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Message(#)message man (tommy) EmptySam 16 Juil 2016 - 17:52


you don't know my brain the way you know my name. you don't know my heart the way you know my face.

(☆☆☆)


Lorsqu'on connaissait Saul, on était généralement en mesure d'affirmer qu'il tenait bien l'alcool. Et pour cause, il n'était pas de ceux que trois verres de vin pouvaient terrasser ou qui parvenaient à se mettre minables en un rien de temps. Et bien qu'à une époque il aurait pu s'en étonner dans la mesure où il ne buvait qu'à de très rares occasions, aujourd'hui les prétextes qui pouvaient le conduire à pousser la porte d'un bar se faisaient il est vrai un peu plus nombreux. Il lui arrivait en effet de commander un verre pour fêter la signature d'un contrat, la fin de négociations houleuses avec ses investisseurs, ou tout simplement une représentation réussie. Mais aussi pour oublier ses tourments et les choix impossibles qui finiraient par gangrener sa vie personnelle. Car s'il y avait bien une chose que Saul avait apprise depuis qu'il fréquentait ce genre d'endroits, c'est que les bars redoublaient d'oreilles attentives qui semblaient plus disposées que le reste du monde à écouter, conseiller et comprendre. Et Saul, lui, avait pris conscience que c'était précisément ce qu'il lui fallait : qu'on se mette à sa place, au moins pour une heure, et qu'on lui épargne des couplets qu'il avait trop souvent entendu de la bouche de son demi-frère, et de quelques autres. Parce que s'accabler de reproches, il le faisait très bien tout seul. Il n'était pas parfait, il avait même toutes les raisons de penser que peu de gens finiraient tôt ou tard par en douter, mais certains soirs il ne se sentait plus capable d'affronter seul une vérité qui l'accablerait à nouveau dès le lendemain matin. Certains soirs, il voulait juste parler, de tout, de rien, de lui et de l'autre. Laisser ses problèmes à la porte d'entrée d'un bar chaleureux, rempli de gens tout aussi critiquables et incompris, oui, c'était une thérapie qui avait fait ses preuves. Pourtant, ces dernières semaines, c'est loin des bars qu'il avait recherché l'absolution, et près de sa fille qu'il avait pris à cœur de passer du temps, comme s'il se reprochait plus encore son attitude vis à vis d'elle que vis à vis des autres. Mais ce soir, alors que Lexie s'était endormie sans problème et que Abel était venu passer le week-end à la maison, Saul avait ressenti l'envie de s'évader à nouveau, seul et loin du domicile familial, déclinant même la proposition de son demi-frère de l'accompagner dans sa promenade nocturne. Elsie avait concédé à ce qu'il sorte, même à cette heure indue, et c'est finalement en compagnie de leur chien, Jango, Berger des Shetland qui avait vu naître chacun de ses enfants, qu'il avait quitté la maison, puis l'allée, pour finalement disparaître à l'extrémité de la rue. Inconsciemment ou non, c'est à nouveau en direction du McTavish qu'il avait marché, et devant la devanture du pub qu'il s'était arrêté, accrochant la laisse de son chien à un crochet probablement prévu à cet effet. « Je serai pas long. Sois sage, hein. » Et lui caressant la tête, il s'éloigna à regret de Jango pour pousser la porte de l'établissement, constatant qu'à cette heure-ci l'endroit était noir de monde. S'approchant du bar comme il en avait pris l'habitude, Saul zieuta un instant son téléphone et nota le message qu'Abel lui avait envoyé quelques minutes après son départ de la maison. « J'espère que t'es pas là où je crois que tu es... » Soupirant, Saul n'eut aucun mal à imaginer que son demi-frère puisse le soupçonner d'être allé retrouver Meg, parce qu'après tout ça n'aurait pas été la première fois qu'il aurait servi n'importe quel prétexte pour rejoindre la jeune femme. Mais cette suspicion, quand bien même il l'avait mérité, ne faisait que lui confirmer qu'il avait bien fait de venir. Et tandis qu'il releva la tête pour commander sa bière habituelle, c'est bientôt un regard familier qu'il croisa, pour sa plus grande surprise. « Tommy ? » Il s'étonna, lorsque le jeune homme avec qui il avait si souvent dégusté une pinte lui apparut sous les traits d'un serveur. « Ça fait longtemps que tu bosses ici ? » Probablement pas, car même s'il n'avait pas fréquenté le McTavish depuis quelques temps, le nouvel emploi de Tommy devait être assez récent pour qu'il ait tout juste eu le temps de se faire embaucher pendant que Saul n'était pas dans les parages. « Il suffit que je me tienne éloigné de cet endroit quelques semaines pour qu'à mon retour tu te retrouves de l'autre coté du bar. Il va falloir que je m'y habitue. » Et bien qu'il ait été surpris de prime abord, ce changement était en vérité bien loin de le perturber ou de lui causer du souci. Après tout Tommy restait ce type agréable avec qui il aimait discuter, et le fait qu'il soit maintenant serveur ne changeait rien, et certainement pas la façon dont Saul pourrait encore vouloir se confier à lui, profitant toujours de ce cadre particulier pour évacuer des choses qu'il avait plus de mal à avouer à Abel ou Adriel par exemple. Soudain les aboiements si reconnaissables de Jango le sortirent de ses songes, et Saul esquissa un sourire un peu plus embarrassé. « Oh, je l'ai laissé dehors parce que j'étais pas certain qu'il ait le droit d'entrer. C'est que j'aimerais pouvoir continuer à venir de temps en temps, alors … je voulais pas risquer d'avoir des problèmes, tu vois. » Tous ceux qui connaissaient Saul savaient qu'il n'était pas le genre à sortir tous les vendredis soirs avec une large bande de copains, à écumer les endroits branchés de Brisbane et à retrouver les sensations de sa jeunesse aussi souvent qu'il lui prenait l'envie de sortir une fois la nuit tombée. Ce genre d'évasions, il se les accordait malgré tout assez rarement, tout en sachant pertinemment que les bien-faits qu'il ressentait dans ces moments-là ne dureraient pas et que la réalité le rattraperait si tôt sorti de cet endroit, alors il aimait autant rester le bienvenu, plus encore maintenant qu'il avait la certitude de retrouver Tommy à chaque fois qu'il s'aventurerait par ici.


Dernière édition par Saul Masterson le Mer 27 Juil 2016 - 2:49, édité 1 fois
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Message(#)message man (tommy) EmptyMar 19 Juil 2016 - 18:43

Maintenant qu'il avait les quelques semaines de recul nécessaires il pouvait le dire avec plus ou moins de certitude : il avait gagné au change en étant embauché ici. Ce n'était pas faute d'avoir hésité pourtant, il était certes un client régulier - et l'était déjà avant de s'exiler au Canada une décennie durant - mais il craignait un peu que de passer de l'autre côté de la barrière fasse perdre à ses yeux le charme qu'il trouvait à l'endroit. Car on savait comme il était facile d'être déçu de quelque chose une fois que l'on avait goûté à l'envers du décor. Mais fort heureusement l'ambiance au McTavish était loin d'être aussi électrique que ne l'était celle du Burrow durant les dernières semaines où le brun y avait travaillé, la volonté du nouveau chef de salle de dégager les éléments dérangeant pour caser ses propres poulains à leur place ne faisant aucun doute ; Tommy espérait simplement pour Elie qu'elle ne serait pas mise à la porte de la même manière que lui. Passer de la plonge au service en salle avait aussi quelque chose d'un peu gratifiant, du moins c'était ainsi que lui le ressentait puisqu'il ne se faisait plus l'effet d'être relégué dans un coin, à l'abri du regard des clients et avec la vaisselle salle pour unique compagnie. Certains soirs - comme ce soir - il avait même l'occasion de lâcher son tablier de serveur pour passer derrière le bar, profitant du jour de congé d'Alvin pour occuper son poste. Et il aimait bien cela, être derrière le bar, cela lui donnait une vision d'ensemble du pub que l'on n'avait pas lorsque l'on courrait d'une table à l'autre.

Piquant un ou deux cure-dents dans une coupelle d'olives vertes, il l'avait déposée sur le plateau où attendaient déjà deux bières, un soda et un Irish Coffee et que Cassia s'était empressée d'aller amener à bon port. Le brun, lui, avait machinalement lancé un « Bonsoir, qu'est-ce que je vous sers ? » et relevé les yeux en entendant le ton surpris qui venait de demander « Tommy ? » avec la sensation que cette voix ne lui était pas étrangère. Un sourire franc s'étirant sur ses lèvres en découvrant Saul, il avait attrapé un verre à bière sur l'étagère au-dessus du comptoir. « Ça fait longtemps que tu bosses ici ? » Il avait secoué sa tête de droite à gauche comme pour signifier que la réponse dépendait un peu du point de vue « Trois semaines, plus ou moins. Tu le saurais si tu n'avais pas subitement disparu de la circulation ... » Appuyant le ton taquin sur la fin de sa phrase, il s'était tout de même décidé à demander « La même chose que d'habitude ? » plus par principe qu'autre chose. Il n'abait jalais vu Saul commander autre chose que son éternelle bière, depuis qu'il le croisait ici. Pas que ce soit un reproche, Tommy ne variait pas non plus beaucoup ses propres cinsomlations. « Il suffit que je me tienne éloigné de cet endroit quelques semaines pour qu'à mon retour tu te retrouves de l'autre coté du bar. Il va falloir que je m'y habitue. » Et lui donc, c'était malgré tout un peu perturbant de passer du mec qui levait le coude au comptoir au mec qui remplissait les verres. Mais au moins il n'était plus payé uniquement pour les nettoyer. « T'es dans les bonnes grâce d'un des employés maintenant, pense à tous les avantages que ça va t'apporter. » Pratiquement aucun en réalité, sans quoi Tommy ne risquait pas de conserver son boulot longtemps, et le fait d'avoir omis de mentionner son passé carcéral lui donnait déjà la sensation d'évoluer en équilibre précaire.

La porte d'entrée s'était ouverte sur deux clients qui quittaient l'établissement, et les aboiements au dehors étaient parvenus jusqu'à leurs oreilles à tous les deux sans que Saul ne paraisse véritablement surpris - bien qu'un peu embarrassé, de toure évidence « Oh, je l'ai laissé dehors parce que j'étais pas certain qu'il ait le droit d'entrer. C'est que j'aimerais pouvoir continuer à venir de temps en temps, alors … je voulais pas risquer d'avoir des problèmes, tu vois. » Esquissant un sourire amusé, Tomly avait jeté une oeillade distraite aux alentours avant de proposer « Dans ce cas fais le tour et attache-le dans l'arrière-cour, je lui apporterai une gamelle d'eau, et comme ça les clients potentiels n'auront pas peur de se faire croquer un molet s'ils essayent de rentrer. » Pas sûr que Lisis apprécie dans le cas contraire. Parait-il qu'elle avait un bon fond, mais Tommy lui avait un peu de mal à la cerner et encore plus à l'apprécier pour l'instant ... Peut-être parce qu'elle n'avait pas eu l'air enchantée lorsque Callum l'avait engagé, et ne s'était pas sentie obligée de faire un minimum comme si. Attrapant un bol dans un des placards il l'avait rempli d'eau et essuyé ses mains sur le torchon accroché près de l'évier avant de quitter un instant le bar pour retrouver Saul à l'arrière « Comment est-ce qu'il s'appelle ? » Tendant une lain hésitante vers l'animal sans pour autant oser le caresser, la peur du coup de dent sans doute, il avait avoué dans un soupir « C'est la lubie actuelle de ma petite, elle veut un chien. Déjà que le chat du quartier s'invite chez nous à tout bout de champ. » Tommy jouait les grincheux mais au fond il s'était presque habitué à l'animal. Pas endore au fait de le voir s'inviter sur le canapé ou sur le lit s'il laissait la fenêtre ouverte trop longtemps, mais enfin. Il lui avait même trouvé un surnom. Ne s'attardant pas plus que de raison pour ne pas laisser trop longtemps le bar sans surveillance, Tommy avait fait signe à Saul de le suivre par l'entrée de service, et tous les deux avaient retrouvé leurs places d'origine. Laissant le brun quelques instants le temps d'honorer les deux commandes arrivées entre temps, il était finalement revenu vers lui et avait posé sa bière sur le comptoir « Bon alors, où t'étais passé ? » La question était sérieuse sans vraiment l'être, Tommy n'avait pas réellement l'audace de croire que Saul avait le moindre compte à lui rendre sur ses allers et venus ici, et il ne demandait que par simple curiosité.


Dernière édition par Tommy Warren le Jeu 25 Aoû 2016 - 20:26, édité 1 fois
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Message(#)message man (tommy) EmptyVen 22 Juil 2016 - 14:53

De tous les endroits que Saul avait fréquenté depuis le soir où il s'était mis en tête d'écumer occasionnellement certains des bars les plus réputés de Brisbane, le McTavish était sans conteste celui où il avait passé ses meilleures soirées. La bière y était excellente, l'atmosphère suffisamment chaleureuse pour qu'il soit chaque fois tenté d'éterniser ses virées nocturnes et le service, lui, était irréprochable. Mais que serait une soirée arrosée sans une compagnie de circonstances, disposée à trinquer avec vous pour vous déculpabiliser, et à vous tendre une oreille attentive dans l'hypothèse où vous chercheriez quelqu'un à qui confier vos tourments ? Cette compagnie, Saul l'avait précisément trouvé en Tommy, un type avec qui il avait bu l'une de ses premières bières ici, et qu'il avait ensuite retrouvé toutes les fois où ses pieds l'avaient de nouveau mené jusqu'à cet endroit. C'est à lui qu'il s'était bien souvent confié lorsque certains soirs ses problèmes lui avaient semblé insurmontables et sa situation sans issue. C'est vers lui qu'il s'était tourné quand son besoin d'être écouté – mais surtout soutenu – s'était fait irrépressible. Car là où son demi-frère ne ratait jamais une occasion de lui faire des reproches, Tommy lui avait toujours offert une totale compréhension, faisant passer la solidarité masculine avant son droit de le juger. Alors, tandis qu'il retournait ce soir au McTavish après s'en être tenu éloigné pendant plusieurs mois, c'est avec surprise qu'il retrouva Tommy, oui, mais de l'autre coté du bar cette fois. Il avait visiblement trouvé une place de serveur, une place qui ne remontait donc qu'à quelques semaines, date à laquelle Saul était toujours aux abonnés absents. « J'ai disparu pour mieux revenir, tu vois bien. » Il s'amusa alors, après la réflexion de Tommy, avant que celui-ci ne se propose de lui servir la même chose que d'habitude, à savoir la bière qu'il avait si souvent bu en sa compagnie. « La même chose, oui. Merci. » Certains détails avaient peut être changé depuis sa dernière soirée ici, pour autant Saul ne comptait pas déroger à ses habitudes, encore moins après s'être privé de sa bière fétiche pendant un certain temps. « J'imagine que cette fois, je trinquerai seul ? » Il demanda néanmoins, tout en soutenant le regard de Tommy, l'air de lui proposer de se servir une bière qu'il se ferait si besoin un plaisir de régler. Il savait, pourtant, qu'il était peu probable que Tommy prenne le risque de se faire remonter les bretelles par son nouveau patron simplement parce qu'il serait lui aussi nostalgique des soirées qu'ils avaient passé à boire ensemble, juchés sur leurs deux tabourets. Alors il préféra bientôt s'amuser du fait que sa « courte » disparation ait suffi à ce que sa situation ait évoluée, réprimant un rire à la façon pour le moins pragmatique dont Tommy avait répliqué. « C'est vrai. Et ça tombe assez bien car j’ai justement laissé mon porte-feuille dans mon autre veste. C’est le moment de me faire profiter d’un de ces fameux avantages, tu crois pas ? » Son ton trahissait sans mal son amusement et le fait qu'il ne cherche évidemment pas à abuser de sa cordialité ou de leur passif pour se voir offrir sa consommation. Lui qui ne savait jamais quoi faire de son liquide s'en débarrassait généralement quand il venait ici, lésinant rarement sur les pourboires – chose qui serait d'autant plus vraie aujourd'hui. Finalement, et tandis qu'il avait presque oublié que Jango l'attendait patiemment à la porte du pub, c'est un peu gêné qu'il se justifia auprès de Tommy lorsque le chien leur signifia sa présence, avant que les paroles de Tommy ne viennent le rassurer. « L’arrière cour, ça marche. » Et si tôt dit, Saul quitta son tabouret pour rejoindre Jango et faire avec lui le tour du bâtiment, jusqu'à gagner la petite cour où il l'attacha de nouveau, sans craindre cette fois qu'il importune quelqu'un. « T'es bien mieux ici, hein ? » Il souffla à l'oreille de l'animal avant de lui caresser la tête, accueillant l'instant d'après l'arrivée de Tommy par un sourire tandis que celui-ci déposa une gamelle d'eau qu'il avait préalablement remplie. « Jango. C’est mon demi-frère qui lui a choisi ce nom, et même s'il a du me répéter trente-six fois à quoi ça faisait référence, je t’avoue que ça m’a pas marqué. » Abel et lui n'avaient pas exactement les mêmes références, et cela ne tenait pas seulement au fait qu'ils avaient plus de dix ans d'écart. Ils possédaient deux personnalités très distinctes et n'avaient jusqu'ici pas expérimenté la vie de la même façon, alors il n'y avait rien de bien étonnant au fait que leurs goûts diffèrent fréquemment. « Tu peux le toucher sans problème, il ne t’attaquera pas. Il est plus inoffensif qu’un bébé chat, le seul risque que tu pourrais prendre c'est qu'il t'adopte et ne veuille plus te quitter ensuite. » Jango avait parfois son petit caractère mais jamais Saul ne s'était senti menacé par sa présence, lui qui bien qu'étant profondément attaché à son chien n'aurait pas hésité à s'en séparer s'il avait craint pour la sécurité de sa famille, notamment à la naissance de ses enfants. « Et si ça arrive, ne t'inquiète pas, on a une chambre d'amis. » Lui lançant un regard entendu, forcément amusé, Saul ne perdit rien de son sourire lorsque Tommy lui confia que sa fille rêvait justement de se voir offrir un chien. « Si tu dois lui en prendre un, adopte-le. Nous, on a trouvé Jango dans un refuge alors qu'il avait quelques mois. Son ancien maître l'avait abandonné sur un parking et on a tout de suite su qu'il avait beaucoup d'amour à donner. » Il avait suffi d'un regard pour que l'animal et lui s'adoptent mutuellement, et Saul n'avait ensuite eu aucun mal à convaincre Elsie de l'intégrer à leur foyer, à l'époque où ils s'efforçaient de combler le vide affectif qui s'était creusé en eux alors qu'ils peinaient à fonder la famille dont ils rêvaient. « C'est tout ce qui te fait hésiter ? » Saul avait finalement repris, croyant deviner que Tommy n'appréciait pas nécessairement de voir son espace vital envahi par un animal qui viendrait réclamer son attention, mais supposant qu'il pouvait aussi avoir une aversion plus générale pour les bêtes – une aversion qui l'étonnerait mais ne remettrait pas en cause l'estime qu'il commençait à lui porter. Finalement Tommy se montra lui aussi curieux, après qu'ils aient tous deux regagné l'intérieur du pub et retrouvé leur place respective, revenant sur les nombreuses semaines que Saul avait passé loin de cet endroit. « Eh bien, je … j'avais pas mal de boulot. De gros projets à monter et des voyages d'affaires à tour de bras, alors j'ai pas vraiment vu passer les derniers mois. » Pour autant son ton le trahissait dans son désir de cacher à Tommy la vérité au sujet de son absence, comme s'il craignait subitement d'être jugé et moqué par celui qui pourtant l'avait jusqu'ici accepté même en connaissant ses frasques. « Bon, d'accord. » Il reprit alors, dans un soupire, et en relevant les yeux vers lui. « J'étais auprès de ma fille. Elle est née à l'automne dernier, et j'ai eu envie de profiter un petit peu d'elle et du reste de la famille. » Tout simplement. Et s'il était difficilement concevable qu'il ait préféré parler d'occupations professionnelles plutôt que d'avouer avoir passé du temps auprès des siens, c'était pour une raison étonnante mais à ses yeux justifiée. « J'en ai pas honte, c'est juste … disons que quand je sors ce genre de choses à mon demi-frère, c'est comme si je tendais le bâton pour me faire battre. » Parce qu'Abel trouvait toujours le moyen d’enchaîner sur de nouveaux conseils, qui en fait cachaient systématiquement des reproches. Quand il lui disait vouloir passer du temps auprès de sa famille, il y voyait la manifestation de sa culpabilité et la preuve qu'il lui fallait au plus vite mettre un terme à sa situation. Et quand bien même ce serait la vérité – car ça l'était – Saul était las que leurs discussions les mènent chaque fois au même point. Soufflant finalement un rapide « Merci » tout en se saisissant du verre que Tommy lui avait déposé, il reprit ensuite. « Dis-moi plutôt ce que j'ai raté. La dernière fois qu'on s'est vus, t'avais pas mal de succès auprès des serveuses alors je me demande ce que ça doit être maintenant que tu les côtoies de plus près. » Peut être déclenchait-il régulièrement des esclandres et subissait-il dans le même temps les avances très appuyées de jeunes femmes plus éprises les unes que les autres. Si tel était le cas, Saul aurait du mal à le plaindre mais invoquerait certainement à son tour cette même solidarité masculine que Tommy avait si souvent mise en avant.
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Message(#)message man (tommy) EmptyMar 2 Aoû 2016 - 0:49

Tommy aurait pensé se faire avec un peu moins de facilité au fait d'être passé du statut de pilier de bar au statut d'employé de bar. Mais en définitive il n'avait as mis longtemps à trouver sa place, une place actuellement menacée uniquement par l'antipathique de Lisis à son égard. Antipathique qui, il en était certain, tenait majoritairement au fait que son ego supportait mal que Tommy ait été embauché par son associé sans qu'il ne prenne le temps – ou la peine – de la consulter au préalable. Et le brun lui acceptait assez mal de se retrouver pris au milieu d'un désaccord professionnel dont il n'était malgré lui que le dommage collatéral principal. Pour l'heure il tentait donc de se montrer aussi irréprochable que possible, par désir de donner raison à Callum autant que pour clouer le bec à Lisis, comme lorsqu'il avait fallu remplacer un trou dans le planning derrière le bar et que le brun s'était proposé sans y réfléchir à deux fois. Le hasard avait voulu que cette soirée de remplacement soit aussi celle où Saul avait décidé de réapparaître au McTavish, après en avoir disparu pendant quelques semaines ; Suffisamment pour que Tommy, pourtant pas du genre à se mêler de ce qui ne le regardait pas, se soit demandé ce qu'il avait bien ou advenir de son compère de boisson habituel. « J'ai disparu pour mieux revenir, tu vois bien. » lui avait fait remarquer le principal intéressé d'un ton amusé, s'installant un peu mieux à la place qui était souvent la sienne, et acquiesçant d'un signe de tête avant de confirmer « La même chose, oui. Merci. » tandis que Tommy s'affairait de toute manière déjà à lui préparer sa bière habituelle. « J'imagine que cette fois, je trinquerai seul ? » Écartant légèrement les bras en signe de résignation, parce qu'il ne comptait effectivement pas prendre le risque de boire au travail et de livrer sur un plateau l'excuse qui manquait à Lisis pour le foutre à la porte sans lui laissant plus ample occasion de faire ses preuves, il avait répondu dans un sourire « Je ne te ferai pas l'affront de trinquer à l'eau du robinet, alors oui. » A moins que le péruvien ne soit d'humeur à patienter jusqu'à la fermeture pour partager une bière avec Tommy, mais cela faisait un peu long pour une simple balade avec son chien, même lorsque l'on savait manier les fausses excuses aussi bien que Saul. Bien qu'en soit il puisse bien rester autant de temps qu'il le voulait, ce n'était pas le barman-d'un-soir qui le mettrait à la porte, bien au contraire « C'est vrai. Et ça tombe assez bien car j'ai justement laissé mon portefeuille dans mon autre veste. C'est le moment de me faire profiter d'un de ces fameux avantages, tu ne crois pas ? » Laissant échapper un léger rire, Tommy s'était penché sur le comptoir comme pour s'adresser à Saul sur le ton de la fausse confidence « J'te conseille quand même de ne pas l'oublier à chaque fois, sinon tu risques de faire la connaissance de Monsieur Muscles ici présent. » Et disant cela il avait désigné du menton la silhouette imposante de Bryan, le videur du McTavish, auquel n'importe quelle personne saine d'esprit réfléchirait à deux fois avant de se mesurer.

En parlant de dissuasion, pour ceux qui ne le connaissaient pas le chien de Saul pouvait bien avoir quelque chose de dissuasif, raison pour laquelle Tommy avait fini par lui proposer de venir l'attacher dans l'arrière-cour, là où ses aboiements ne risqueraient pas de faire fuir les clients qui, comme Tommy, voyaient les chiens d'un œil un peu méfiant. Ce n'était pas qu'il ne les aimait pas, mais il avait tendance à voir la taille de leurs crocs avant de voir leur potentiel de mignonnerie. Ce qui ne l'empêchait pas ceci dit de trouver un côté attendrissant à la scène à laquelle il avait assisté en rejoignant l'arrière-cour à son tour, Saul penché vers son compagnon à quatre pattes pour lui susurrer on ne savait quoi à l'oreille. « Jango. C'est mon demi-frère qui lui a choisi ce nom, et même s'il a du me répéter trente-six fois à quoi ça faisait référence, je t'avoue que ça ne m'a pas marqué. » Tommy avait esquissé un sourire, bien que surpris d'apprendre que malgré le domaine dans lequel il travaillait Saul ne semblait pas être un grand fan de cinéma. « Tu peux le toucher sans problème, il ne t'attaquera pas. Il est plus inoffensif qu'un bébé chat, le seul risque que tu pourrais prendre c'est qu'il t'adopte et ne veuille plus te quitter ensuite. Et si ça arrive ne t'inquiète pas, on a une chambre d'amis. » Qu'un bébé chat, Tommy se permettait malgré tout d'en douter, bien qu'à la manière dont il faisait bouger ses oreilles avec contentement tandis que son maître le caressait, le dénommé Jango n'avait à première vue rien d'un mauvais bougre. « Si je réussi pas à garder ce boulot et que tu cherches un baby-sitter, tu me feras signe. » avait-il en tout cas répondu du même ton amusé. Bien qu'il espérait bien ne pas se faire virer de ce boulot de sitôt, ne pas être parvenu à conserver son emploi au Burrow à cause de ses antécédents était déjà suffisamment difficile à assumer pour lui. Toujours un peu dubitatif Tommy avait fini par confier que sa fille, elle, rêvait d'avoir un chien, ce qui n'était pas pour l'enchanter « Si tu dois lui en prendre un, adopte-le. Nous, on a trouvé Jango dans un refuge alors qu'il avait quelques mois. Son ancien maître l'avait abandonné sur un parking et on a tout de suite su qu'il avait beaucoup d'amour à donner. » Tommy avait grimacé légèrement ; Il n'était peut-être pas très chiens, mais il ne comprenait pas pour autant que certains abandonnent le leur – ou tout autre animal de compagnie – comme un sac poubelle. « C'est tout ce qui te fait hésiter ? » l'avait en tout cas questionné le brun, et secouant légèrement la tête Tommy avait affiché une moue incertaine avant de répondre « Disons que je sais comment ça se terminera. Elle s'amusera avec le chien pendant quelques semaines et puis elle finira par s'en désintéresser lorsqu'elle aura une nouvelle lubie … et ça sera à moi de me débrouiller pour le sortir quand il sera trop tôt ou trop tard ou qu'il fera froid, quand il faudra jouer avec, le laver, le nourrir … » Il avait parfaitement conscience, lui, qu'un animal quel qu'il soit n'était pas simplement une source d'amusement mais également un petit lot de contraintes. Et à l'âge qu'avait Moïra on se doutait bien qu'elle compterait sur son père pour se charger de tout ce qui ne serait pas du domaine de l'amusant. « Et puis pour le moment je ne sais pas encore si notre retour à Brisbane est définitif … je ne saurais pas quoi faire d'un chien, si on partait. » Pas le prendre avec eux en tout cas, puisque dans son esprit pour l'instant quitter Brisbane sous-entendait de repartir pour le Canada, et qu'il imaginait difficilement faire traverser la moitié du globe à un animal, surtout pour un changement de climat aussi drastique.

Laissant là l'animal et sa gamelle d'eau, les deux hommes avaient regagné l'intérieur du bar et retrouvé leur place initiale au comptoir, Tommy abandonnant son comparse quelques instants le temps de préparer les quelques commandes que sa courte absence avaient entraînée. Revenant enfin vers Saul Tommy avait repris sur le ton de la conversation et tenté d'en savoir plus sur cette disparition momentanée du péruvien. « Eh bien, je … j'avais pas mal de boulot. De gros projets à monter et des voyages d'affaires à tour de bras, alors j'ai pas vraiment vu passer les derniers mois. » Tommy se serait sans mal contenté de cette explication, qui somme tout tenait la route, si le ton et l'air affichés sur le visage de Saul ne trahissaient pas un mensonge éhonté. Tommy peinait presque à imaginer comment il parvenait à mener sa double-vie s'il mentait si mal. « J'étais auprès de ma fille. » avait-il finalement repris d'un ton résigné. « Elle est née à l'automne dernier, et j'ai eu envie de profiter un petit peu d'elle et du reste de la famille. J'en ai pas honte, c'est juste … disons que quand je sors ce genre de choses à mon demi-frère, c'est comme si je tendais le bâton pour me faire battre. » Affichant un sourire compatissant, le serveur avait attrapé un verre propre et avait relevé la tête vers Saul « Je crois qu'on a toujours l'esprit plus critique et prompt au jugement avec les membres de sa propre famille. » Et là-dessus Tommy était bien placé pour le savoir, puisqu'il avait le sentiment – à moitié fondé – que tous les Warren patientaient sagement après les occasions de le rabaisser ou de remettre ses actions en cause. Et même actuellement, les choix de vie de Saul ne lui faisaient ni chaud ni froid parce qu'au fond ils ne le concernaient pas, mais il avait toujours vu qu'un assez mauvais œil, par exemple, le fait que Beth se soit entichée d'un autre homme alors qu'elle était mariée. « Merci. » Déposant la pression devant Saul, Tommy avait passé un rapide coup d'éponge sur le comptoir et rajouté une coupelle de cacahuètes à côté du verre. « Dis-moi plutôt ce que j'ai raté. La dernière fois qu'on s'est vus, t'avais pas mal de succès auprès des serveuses alors je me demande ce que ça doit être maintenant que tu les côtoies de plus près. » Le serveur avait laissé échapper un rire, bien que son succès auprès des serveuses relevait bien plus de l'imagination de Saul que de la réalité selon lui … Peut-être parce qu'il y avait un peu d'exagération, mais également parce que Tommy n'était pas des plus réceptifs concernant la gente féminine. Du moins plus maintenant. « Toujours un succès phénoménal, mais toujours pas intéressé, y'a des choses qui ne changent pas. » Bien qu'il ait employé le ton de la plaisanterie, pour marquer l'exagération certaine du début de la phrase, la fin elle était on ne peut plus véridique. Tommy n'avait encore jamais vraiment parlé ouvertement de sa situation avec Saul, bien qu'il n'en ait jamais fait un secret non plus … Il élevait sa fille seul et portait son alliance sur une chaîne autour du coup, assez d'indices pour qu'il soit possible de deviner ce qu'il en était. « Et toi ? Toujours pris entre deux feux ? » C'était bien plus simple d'en revenir à la situation de Saul, plutôt que de commencer à s'épancher sur la sienne. Il se demandait si le brun était véritablement en proie à un choix cornélien ou si au contraire cette situation, aussi discutable puisse-t-on la trouver, lui convenait. « J'ai bien cru que ta disparition subite était liée à un … changement de situation. » Autrement dit, au fait que l'une ou l'autre des femmes entre lesquelles il se partageait ait découvert le pot aux roses et décidé de faire disparaître son corps. Accidentellement. Parce que c'était un peu la vision clichée et romanesque que Tommy se faisait de l'adultère : les cris, les larmes, le goût prononcé pour la tragédie. Mais quelque part Saul était un tragédien, après tout.


Dernière édition par Tommy Warren le Jeu 25 Aoû 2016 - 20:27, édité 1 fois
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Message(#)message man (tommy) EmptyJeu 4 Aoû 2016 - 3:21

Si à son entrée dans le pub, Saul avait retrouvé avec plaisir l'endroit où il avait passé beaucoup de ses soirées il n'y a encore pas si longtemps, et qu'il avait redécouvert avec un certain enthousiasme les petits détails qui faisaient tout le charme d'un lieu où il se sentait encore aujourd'hui comme chez lui, c'est par la suite avec une certaine surprise qu'il avait constaté que son camarade de boisson, celui avec qui il avait pris l'habitude de consommer moult bières, était passé de l'autre coté du bar. Tommy avait effectivement accédé au poste de serveur durant le temps où il s'était tenu éloigné du McTavish, et l'idée d'être servi par quelqu'un qu'il commençait à apprécier ne tarda pas à apparaître à Saul comme une aubaine. Après tout, le nouvel emploi de Tommy ne l'empêcherait probablement pas d'honorer leurs petites habitudes en discutant comme au bon vieux temps, et c'était le principal. Le seul inconvénient à cette situation était alors le fait qu'il ne puisse malheureusement pas trinquer avec lui, au risque sans doute de s'attirer les foudres de sa hiérarchie. « La prochaine fois, je viendrai avant l'ouverture pour qu'on puisse trinquer avant ton service. » Saul souffla alors, dans un fin sourire, et d'un ton plus sérieux qu'il y paraissait. Il se désolait un peu du fait que Tommy soit destiné à le servir sans pouvoir prendre part à la dégustation, raison pour laquelle il se ferait un devoir de provoquer le destin afin que la fois prochaine, ils puissent trinquer ensemble à nouveau. « Car oui, j'ai bien l'intention de redevenir un habitué des lieux. » Et c'était d'autant plus vrai maintenant que Tommy avait été embauché, car Saul était certain de le trouver chaque fois qu'il passerait la porte du pub. Une garantie qui ajouterait à son envie de passer à nouveau un peu plus de temps dans les parages, c'est certain. Plaisantant en tout cas quant à l'idée qu'il puisse lui prendre l'envie de profiter des fameux avantages évoqués par Tommy, Saul prétexta avoir oublié son porte-feuille, avant que le commentaire de son interlocuteur – et le rapide coup d’œil qu'il jeta au videur – ne le dissuadent de poursuivre dans cette voie. « Il a l'air … extrêmement sympathique. » Il commenta, dans un léger rire, forcé d'admettre qu'il avait d'autres ambitions dans la vie que de finir écrasé contre le poing d'un mec qui devait approximativement peser le double de son poids. « Je suis pas certain que tous mes vaccins soient à jour, alors j'éviterai sans doute de prendre des risques inutiles. » Au cas où il prendrait au videur l'envie de le laisser pour mort dans une ruelle crasseuse après l'avoir roué de coups. Oui, définitivement, Saul veillerait à toujours avoir de quoi régler ses consommations, quand bien même ça n'était généralement pas dans ses habitudes de sortir sans monnaie – et sachant qu'il avait de toute façon les moyens de régler autrement. Jango, le fidèle compagnon qu'il avait laissé devant l'entrée du bar, saisit en tout cas cette occasion pour rappeler à son maître qu'il était là, et bien déterminé à ne pas faire de la figuration plus longtemps. D'abord gêné par la façon dont son chien avait attiré leur attention – et probablement celle d'une partie des clients – Saul retrouva néanmoins le sourire après que Tommy lui ait permis d'attacher l'animal dans l'arrière cour, profitant bientôt du fait que le jeune homme les rejoigne pour le rassurer sur le caractère de Jango, et insinuer qu'il lui ferait volontiers une place chez lui dans l'hypothèse où l'animal l'adopterait. C'est alors un sourire mutin qu'il afficha à la remarque de Tommy. « Eh bien, d'habitude j'aime autant quand les baby-sitters ont la vingtaine et qu'elles ont de jolies boucles rousses, mais pour toi j'arriverais sans doute à adapter mes préférences. » Son ton le trahissait dans son envie de s'amuser encore un peu plus de la situation, autant parce que les baby-sitters de ses enfants avaient souvent plus d'expérience que de sex-appeal, que parce que ses goûts en matière de femmes étaient comme ses goûts en matière de théâtre : on ne peut plus éclectiques. « Plus sérieusement, je te souhaite de le garder ce boulot. Je te sens dans ton élément ici, et puis je tiens à garder un allié de l'autre coté. » Et bien qu'insistant sur la fin de sa phrase, Saul était on ne peut plus sincère lorsqu'il disait souhaiter à Tommy de préserver son emploi, ayant cru comprendre qu'il en avait besoin et jugeant qu'ici, après tout, il aurait pu tomber beaucoup plus mal. Apprenant en tout cas que Tommy hésitait à prendre un chien à sa fille parce qu'il craignait de devoir s'en occuper seul, c'est un sourire un peu attendri qui gagna ses lèvres tandis que Saul haussa doucement les épaules. « Dans ce cas, ne lui prends pas un chien si tu penses qu'elle te laissera te débrouiller avec lui. Ces bêtes-là méritent qu'on s'en occupe autrement que par résignation. » Parce qu'il était entièrement compréhensible que Tommy ne tienne pas à dédier tout son temps à un animal qui ne le mettait visiblement pas très à l'aise, ainsi peut être ferait-il mieux d'attendre quelques années que sa fille soit en âge de réaliser qu'un chien n'était pas une peluche qu'on cajolait puis qu'on laissait dans son coin, sans plus s'en occuper. « Commence peut-être par lui prendre une gerbille ? » Il émit cette idée sur le ton de la plaisanterie, pour autant il supposait que ce serait un bon moyen de tester l’habilité de la fillette à s'occuper d'un animal, et que ça ne demanderait pas autant de concessions à Tommy dans l'hypothèse où sa fille s'en désintéresserait bel et bien. L'écoutant reprendre la parole, Saul ne put s'empêcher d'afficher une légère grimace lorsque Tommy évoqua l'autre raison qui le faisait hésiter. Alors, sortant de sa poche un crayon et un mouchoir en papier, il y griffonna bientôt quelques chiffres avant de tendre le tout au brun. « C'est mon numéro. » Et relevant les yeux vers lui comme s'il croyait deviner que cette initiative surprendrait son interlocuteur, il ajouta bientôt. « J'aimerais bien … que tu me préviennes, si un jour vous partez. » Et si c'était sans doute une requête inattendue, elle s'expliquait notamment par le fait que Saul trouvait chez Tommy un soutien et une compréhension que peu de gens autour de lui savaient lui témoigner, quelque chose d'implicite, de naturel, une sorte de sécurité qui lui donnait chaque fois l'impression de pouvoir tout dire, tout avouer, sans jamais craindre d'être jugé. Toutes ces choses lui manqueraient si Tommy devait tôt ou tard repartir d'où il venait, et il se désolerait d'autant plus d'apprendre son départ après qu'il ait eu lieu. Regagnant en tout cas l'intérieur, Saul fut aussitôt interrogé sur les raisons qui l'avaient tenu éloigné du pub durant les dernières semaines, et prétexta dans un premier temps avoir été accaparé par son travail – une excuse crédible quand on connaissait ses responsabilités professionnelles – avant de se résoudre à admettre qu'il avait simplement voulu se rapprocher de sa famille. Le genre de prétexte que son demi-frère aurait trouvé le moyen de juger, sans doute, mais pas Tommy. « T'as l'air de savoir de quoi tu parles. Et comme je crois savoir que t'es pas vraiment le genre à juger gratuitement même quand t'aurais de bonnes raisons de le faire, j'imagine que t'as personnellement vérifié cette théorie. » Saul supposa, après la réflexion du brun, étant effectivement témoin de la tolérance dont il savait faire preuve, tout du moins envers ceux qu'il ne connaissait qu'au travers des verres qu'ils avaient partagé et des confessions qui lui avaient été faites. Et puis, parce qu'il était probable qu'il ait raté pas mal de choses en restant loin du McTavish alors que Tommy s'y faisait engager, Saul se demanda si son acolyte n'avait pas profité de ses nouvelles responsabilités pour approcher les serveuses qui n'avaient jamais semblé insensibles au charme du grand brun. Mais à l'entendre, jouer les bourreaux des cœurs ne l'intéressait pas. « Je crois qu'on n'a pas été taillé dans le même bois, toi et moi. » Saul commenta alors, dans un rire, avant d'accrocher le regard de Tommy. « Je sais pas comment tu fais. T'as jamais besoin … je sais pas, d'une présence, de quelqu'un sur qui te reposer ? » Son ton se faisait plus sérieux tandis qu'il réalisait que peut être le problème ne venait pas de Tommy mais bien de lui, qui n'avait jamais été aussi malheureux que lorsqu'il était seul, dépourvu d'un cœur à conquérir et d'un corps à étreindre. Il n'était pas un homme à femmes, pas dans sa définition traditionnelle du moins, mais il avait toujours été déraisonnablement amoureux de l'amour, et de l'idée de partager avec quelqu'un ce qu'il ne parvenait pas toujours à exprimer dans son art. La question de Tommy le tira alors de ses réflexions. « Toujours. » Saul soupira, un sourire pourtant accroché aux lèvres, parvenant presque à s'amuser de la façon dont le serveur avait enchaîné. « Non, à vrai dire les choses en sont toujours au même point, mis à part que j'ai sûrement doublé le nombre de mes mensonges depuis la dernière fois qu'on s'est vus, mais c'est pas comme si je les comptais encore. » Et c'était bien le point qui pesait le plus lourd sur sa conscience, le fait de devoir mentir, inventer, extrapoler, simplement pour se dédouaner auprès des deux femmes qu'il continuait de vouloir épargner tout en sachant pourtant que la vérité, lorsqu'elle éclaterait, ferait plus mal que chacun des mensonges qu'il avait tenu à taire. « Le pire, c'est que j'aurais jamais pensé en arriver là un jour. J'ai longtemps été ce type un peu gauche qui n'arrivait jamais à ses fins, avec personne. J'ai passé mes années lycée à attendre que ma meilleure amie me regarde autrement que comme un bon copain, et non seulement ça ne s'est pas fait, mais en plus elle s'est tirée à l'armée avant que j'ai eu le temps de réaliser. » Et s'il en riait presque aujourd'hui, cette histoire lui avait causé une peine et une désillusion telles qu'il avait mis du temps à apprivoiser le sentiment de colère qui était né en lui, à l'égard de Stella mais surtout à l'égard de lui-même. « J'avais la poisse. Jusqu'à cette fille, en terminale, avec qui je suis d'abord sorti parce qu'elle me rappelait Stella. Une fille drôle, attachante, que j'ai sans doute mis du temps à apprécier à sa juste valeur. Ça a été la première personne à me regarder comme si j'étais le centre de son existence, comme si rien d'autre ne comptait. Je m'étais encore jamais senti aussi important pour quelqu'un, et c'est à partir de là que j'ai pris ce qu'il y avait à prendre, que j'ai appris à l'aimer pour ce qu'elle était, et plus pour ce qui la rapprochait de Stella. Ça a duré quelques mois, entre nous, mais il m'arrive encore parfois d'y penser. » Parce qu'elle avait été la première femme à entrer dans son cœur non pas pour le ravager de l'intérieur, sous la force d'une peine immense, mais pour y semer une chaleur bienveillante, délectable. Cette même chaleur qu'il recevait d'Elsie et de Meg, au travers des sentiments qu'il avait pour chacune. « Je sais pas pourquoi je te raconte tout ça, j'ai sûrement besoin d'un autre verre. » Et finissant justement sa bière avant de reposer son verre sur le bar, il releva les yeux vers Tommy, un léger sourire en coin. « J'espère que vos autres clients ont une vie sentimentale moins compliquée que la mienne, parce que sinon ça doit pas t'aider à reconsidérer l'idée de laisser une femme entrer dans ta vie. » Or il trouvait ça triste, en vérité, qu'un homme comme Tommy semble fermé à l'idée de vivre quelque chose, quelque part, avec quelqu'un qui lui correspondait. Les histoires de Saul n'étaient peut être pas un modèle à suivre, mais elles étaient la preuve qu'on pouvait aimer même d'une façon peu conventionnelle, pourvu qu'on s'autorise à donner, mais surtout à recevoir. Tommy se complaisait dans sa solitude quand Saul, lui, la redoutait plus que tout le reste.
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Message(#)message man (tommy) EmptyDim 14 Aoû 2016 - 20:15

Pour dire vrai Tommy s'était demandé où était passé le péruvien ces dernières semaines, il n'avait encore jamais eu l'occasion de le recroiser depuis qu'il était passé du côté employé de ce bar, et même avant cela il lui semblait ne pas avoir trinqué avec lui depuis un moment en tant que client. Gardant néanmoins ses questionnements pour plus tard - peut-être - le brun se désolait simplement de ne pas pouvoir trinquer avec son ancien acolyte. « La prochaine fois, je viendrai avant l'ouverture pour qu'on puisse trinquer avant ton service. Car oui, j'ai bien l'intention de redevenir un habitué des lieux. » Esquissant un sourire tout en terminant de sécher un verre avec son torchon, il avait répondu « Le meilleur plan ça serait encore de trinquer avec moi après la fin de mon service, plutôt. Et j'espère bien que tu n'as pas prévu de disparaitre à nouveau. » et si le ton laissait penser à une boutade il n'en demeurait pas moins que Tommy serait un peu déçu si Saul venait à prendre la poudre d'escampettes à nouveau. Les clients ici n'étaient pas toujours agréables, et Saul se situait du bon côté de la barrière ; Sans compter qu'ils étaient peu à être suffisamment réguliers pour que Tommy ait eu l'occasion de sympathiser avec eux. Et parce qu'il l'était définitivement, un habitué, Saul avait probablement déjà du remarquer Bryan et son côté un peu armoire à glace, bien que l'un et l'autre n'aient jamais été présentés « Il a l'air … extrêmement sympathique. » avait d'ailleurs commenté Saul, d'un ton qui en disait long « Je suis pas certain que tous mes vaccins soient à jour, alors j'éviterai sans doute de prendre des risques inutiles. » Tommy avait laissé échapper un léger éclat de rire, avant de rendre malgré tout justice à Bryan « Ça va, il n'est pas méchant. Un peu brut de décoffrage, mais pas méchant. » Tant que l'on ne lui donnait pas de raison de l'être, certes, mais c'était aussi un peu son boulot, après tout.

Interrompus par les jappements du chien, que Saul avait laissé dehors, Tommy lui avait proposé d'aller l'attacher derrière afin qu'il soit plus tranquille - et que les clients le soient eux aussi - et avait rempli un bol d'eau pour que l'animal patiente en ayant lui aussi droit à sa pause fraicheur, pendant que son maître se faisait le plaisir d'une bière. Tommy n'était pas très chiens, en règle générale, mais il pouvait à l'occasion se laisser amadouer si l'animal en question se révélait avoir bon caractère ; C'était le cas de celui de Saul, assurait ce dernier. « Eh bien, d'habitude j'aime autant quand les baby-sitters ont la vingtaine et qu'elles ont de jolies boucles rousses, mais pour toi j'arriverais sans doute à adapter mes préférences. » Laissant échapper un rire, Tommy avait néanmoins retrouvé son sérieux lorsque Saul avait ajouté « Plus sérieusement, je te souhaite de le garder ce boulot. Je te sens dans ton élément ici, et puis je tiens à garder un allié de l'autre coté. » et laissé un léger rictus passer furtivement sur son visage, comme s'il avait peur qu'à l'évoquer clairement tout cela ne finisse par lui porter la poisse. « J'vais toucher du bois. » Parce qu'il ne pouvait pas se permettre de perdre à nouveau un emploi, et peu importe que son agent de probation ne tire la gueule parce que Tommy n'avait pas fait les choses dans les règles. Autrement dit en exposant clairement son passé de prisonnier à son employeur. Et puis, s'il en venait à se faire virer du McTavish, inutile de dire qu'il pourrait également faire une croix dessus en tant que client.

Pour en revenir au chien, Tommy avait profité d'avoir affaire à quelque qui savait de quoi il parlait pour exposer ses hésitations quant au fait que sa fille réclamait ardemment un chien depuis quelques semaines. S'ils avaient toujours vécu à Kenora sans doute Tommy y aurait-il réfléchi un peu plus sérieusement, ils auraient encore un jardin et de meilleures occasions de le sortir, mais avec l'appartement qui les abritait actuellement dans le quartier de Redcliffe cela paraissait difficilement faisable. D'autant plus que comme tous les enfants Moïra voulait un animal comme on voulait un nouveau jouet, sans songer aux contraintes et à l'engagement que cela représentait sur le long terme ; Et pour y penser, lui, Tommy passait à nouveau pour le rabat-joie de l'histoire. « Dans ce cas, ne lui prends pas un chien si tu penses qu'elle te laissera te débrouiller avec lui. Ces bêtes-là méritent qu'on s'en occupe autrement que par résignation. Commence peut-être par lui prendre une gerbille ? » Bien que le ton de Saul laisse à penser qu'il ne s'agissait que d'une plaisanterie, Tommy avait grimacé et finalement décidé « Je crois que je préfèrerais encore un chien. » Niveau affection ce n'était tout de même pas la même histoire, d'autant plus qu'aux yeux de Tommy rongeur rimait forcément avec meubles grignotés et câbles électriques sectionnés à coups d'incisives. Ce qui n'avait pas échappé au péruvien dans tout cela malgré tout, c'était le fait que Tommy soit incertain quant à la possibilité de rester de manière durable en ville. « C'est mon numéro. » avait-il finalement annoncé en lui tendant un papier griffonné à la va-vite « J'aimerais bien … que tu me préviennes, si un jour vous partez. » Un peu pris au dépourvu, parce que plutôt habitué à passer dans la vie des gens sans jamais laisser un souvenir impérissable, Tommy avait néanmoins hoché la tête « Oh ... Oui, oui si tu veux. Mais tu sais pour l'instant c'est plus un désir qu'un projet, de toute façon. » Le Canada lui manquait, c'était indéniable, mais pour le moment il savait que rester à Brisbane était le mieux à faire, peut-être pas pour lui mais au moins pour Moïra, et c'était le plus important.

Se promettant d'envoyer un message à Saul à la fin de son service pour qu'il ait son numéro également, Tommy et lui avaient finalement regagné l'intérieur du pub, le serveur - et barman d'un soir - ne pouvant pas se permettre de se soustraire aux clients trop longtemps, au risque que Callum ou Lisis ne lui tombent dessus. Servant enfin à Saul la bière qu'il avait demandé précédemment, Tommy en avait profité pour se renseigner à demi-mots sur les raisons qui avaient poussé son acolyte à déserter le McTavish ces dernières semaines, tentant malgré tout de tourner sa phrase de manière à ne pas se montrer outrageusement intrusif. Il ne cherchait pas à mettre Saul mal à l'aise, et même il se voyait presque compatir avec lui au regard pas toujours approbateur que son demi-frère semblait porter sur lui. A tort ou à raison, peu importe, toujours est-il que Tommy pouvait comprendre aisément le malaise qui en résultait. « T'as l'air de savoir de quoi tu parles. Et comme je crois savoir que t'es pas vraiment le genre à juger gratuitement même quand t'aurais de bonnes raisons de le faire, j'imagine que t'as personnellement vérifié cette théorie. » Notant mentalement la commande que la serveuse venait de lui annoncer, et attrapant déjà les verres adéquats, il avait vaguement haussé les épaules et adopté un ton résigné « Disons que dans ma famille il est préférable d'avoir de jolis diplômes à accrocher au mur, si on veut avoir son mot à dire. Moi je suis plus l'exemple de ce qu'il ne faut surtout pas faire, que l'exemple à suivre. » Il laissait volontiers cette place à son frère ainé, Marius avait toujours semblé tellement avide de reconnaissance et de supériorité sur ses frères et sœurs. Mais Tommy était relativement blasé à ce sujet désormais, il y avait longtemps qu'il ne cherchait plus à impressionner ses parents ou ses frères et soeurs, il préférait dépenser son énergie ailleurs. Mais pas n'importe où non plus, et certainement pas dans les filles faciles que le fait de travailler dans un bar pouvait éventuellement amener ... à condition d'aimer la viande saoule. « Je crois qu'on n'a pas été taillé dans le même bois, toi et moi. Je sais pas comment tu fais. T'as jamais besoin … je sais pas, d'une présence, de quelqu'un sur qui te reposer ? » Tommy avait laissé échapper un léger sourire, énigmatique, tout en continuant de préparer les verres qu'on venait de lui commander. Quelque part il était un peu triste pour Saul parce que même s'il ne le lui dirait jamais, il était persuadé que le brun n'avait jamais rencontré l'Amour, le vrai. Sans quoi il ne serait pas ainsi pris entre deux relations. Il n'avait pas encore rencontré LA femme qui éclipserait toutes les autres. « La mère de ma fille. » avait-il simplement fini par souffler, gardant volontairement les yeux rivés sur ce qu'il faisait plutôt que sur Saul. « Ça ne m'intéresse pas, de laisser à n'importe quelle fille de passage l'occasion de me prouver qu'elles ne lui arriveront pas à la cheville. » Il n'avait pas envie de redevenir le papillonneur qu'il était avant de rencontrer Alice, il n'avait pas envie de gâcher le mec bien qu'elle avait tenté de le faire devenir.

Néanmoins toujours un peu mal à l'aise dès qu'il était question de près ou de loin d'Alice, Tommy avait préféré changer de sujet et bifurquer sur la vie amoureuse de Saul plutôt que sur la sienne, d'autant plus qu'au jeu de la situation la plus compliquée l'amateur de bières remportait assurément la compétition haut la main. « Toujours. Non, à vrai dire les choses en sont toujours au même point, mis à part que j'ai sûrement doublé le nombre de mes mensonges depuis la dernière fois qu'on s'est vus, mais c'est pas comme si je les comptais encore. » Plutôt que d'avoir l'air réprobateur, Tommy s'était contenté de secouer vaguement la tête en déposant les verres sur un plateau qu'il avait laissé bien en vue sur le bar pour que la serveuse vienne le prendre, puis il avait reporté son attention sur Saul « Là c'est moi, qui ne sait pas comment tu fais. Mes mensonges finissent toujours par me retomber dessus. » La preuve, le dernier de ses mensonges était aussi ce qui lui avait valu de se faire virer de son précédent emploi. Ce qui ne l'avait pas empêché de réitérer ce mensonge en se faisant engager ici, mais Tommy n'apprenait jamais de ses erreurs. « Le pire, c'est que j'aurais jamais pensé en arriver là un jour. J'ai longtemps été ce type un peu gauche qui n'arrivait jamais à ses fins, avec personne. J'ai passé mes années lycée à attendre que ma meilleure amie me regarde autrement que comme un bon copain, et non seulement ça ne s'est pas fait, mais en plus elle s'est tirée à l'armée avant que j'ai eu le temps de réaliser. » Tommy écoutait avec une certaine curiosité, passablement surpris de savoir que Saul ne se classait pas dans la catégorie des bourreaux des cœurs à l'époque de son adolescence ; C'était un peu comme ça qu'il l'aurait imaginé, pour être parfaitement honnête, comme englué dans un double-jeu depuis toujours ou presque. Au lieu de cela le brun se révélait comme un romantique accroché pendant bien trop longtemps au souvenir d'une femme qu'il n'avait jamais eu simplement parce qu'il n'avait pas su prendre son courage à deux mains pour tenter de parvenir à ses fins. « Je sais pas pourquoi je te raconte tout ça, j'ai sûrement besoin d'un autre verre. J'espère que vos autres clients ont une vie sentimentale moins compliquée que la mienne, parce que sinon ça doit pas t'aider à reconsidérer l'idée de laisser une femme entrer dans ta vie. » Laissant échapper un nouveau rire, Tommy avait récupéré le verre vide de Saul, et lui en avait servi un autre plein cette fois-ci, puisqu'il avait interprété sa réflexion comme la commande d'un second verre « J'espère que tu es venu à pieds. » avait-il d'ailleurs cru bon de faire remarquer, bien que la chose soit probable s'il avait utilisé la promenade du chien comme excuse. « Et je peux t'assurer qu'on en entend des vertes et des pas mûres ici, si on laisse traîner ses oreilles ... toi tu fais encore office de petit joueur. » Sourire énigmatique aux lèvres, il avait enchaîné sans plus attendre sur la vaisselle de verres vides qu'un serveur était veu déposer sur le comptoir « Mais j'ai eu mon lot d'histoires compliquées, plus jeune. J'avais cette fâcheuse tendance à ne pas fréquenter les bonnes personnes, et cela valait aussi pour les femmes. » Il ne reniait pas son adolescence et le début de sa vie d'adulte, mais avec le recul de près d'une décennie Tommy pouvait maintenant affirmer - aussi difficile cela soit-il - que les autres Warren n'avaient pas toujours entièrement tort en pointant du doigt certaines de ses fréquentations, amicales ou amoureuses. « Et cette Stella ... tu n'as jamais cherché à la revoir ? » Ce n'était sans doute pas malin, de rajouter ainsi une troisième femme à l'équation déjà compliquée de Saul, mais Tommy voyait à la manière dont il en parlait une chapitre qui n'avait jamais été entièrement clos. Et Tommy était de ceux qui pensaient que vivre avec des regrets était bien pire que de vivre avec des remords.


Dernière édition par Tommy Warren le Jeu 25 Aoû 2016 - 20:27, édité 1 fois
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Message(#)message man (tommy) EmptySam 20 Aoû 2016 - 1:52

Si Saul n'avait pas mis bien longtemps à se réjouir pour Tommy lorsqu'il avait appris – ou plutôt déduit – que celui-ci s'était vu offrir un poste de serveur, il n'avait pas non plus tardé à en conclure que sa nouvelle situation leur compliquerait légèrement la tâche, à eux qui avaient pris l'habitude de trinquer ensemble – tout du moins avant qu'il ne déserte les lieux pour un temps. Mais qu'à cela ne tienne, Saul était bien décidé à provoquer le destin pour partager à nouveau une savoureuse bière en compagnie du brun, quitte à trinquer avec lui avant que son service ne commence. Ou après, oui, bien qu'il émette quelques réserves quant à l'idée suggérée par son acolyte. « Je sais pas jusqu'à quelle heure ils te font trimer ici, mais je suis pas certain de pouvoir me permettre d'attendre la fermeture avec toi. Le risque, c'est que les enfants soient couchés à mon retour à la maison, et qu'avec quelques verres dans le nez je sois plus trop en mesure de monter à l'étage sans réveiller toute la maison. » Il était rare qu'il rentre de ses escapades nocturnes dans un état si lamentable qu'il pourrait donner lieu à ce genre de situations, mais Saul savait qu'on ne gardait pas toujours un total contrôle sur ces choses-là et qu'elles avaient vite fait de déraper. Pour autant, alors qu'un sourire avait regagné ses lèvres, il ajouta. « Mais bon, c'est aussi pour ça qu'on a inventé les canapés, non ? » Autrement dit, s'il fallait effectivement qu'il reste jusqu'à la fin du service de Tommy pour espérer trinquer avec lui, il y avait fort à parier pour qu'il fasse un effort et prenne au préalable ses dispositions. Notant en tout cas dans un sourire que Tommy semblait désireux de le voir s'éterniser dans le paysage – ce qu'il comptait bien faire maintenant qu'il avait retrouvé le chemin du McTavish – Saul plaisanta par la suite quant à l'idée qu'il ait pu oublier son porte-feuille et soit ainsi dans l'incapacité de payer sa consommation. Mais il retrouva bien vite un ton sérieux lorsque Tommy lui présenta le gus qui leur servait de videur. Une bête impressionnante, qui mesurait approximativement trois têtes de plus que lui, et entre les mains de qui il aimerait mieux ne pas finir broyé, c'est certain. « Ouais, bah rappelle-moi de surtout bien le saluer en partant. » Parce que ce que Saul ne disait pas, c'est qu'il avait son compte d'ennuis en ce moment. Il passait suffisamment de temps à tenter d'échapper à l'emprise d'un maître chanteur sans foi ni loi pour ne pas en plus se lancer dans un bras de fer perdu d'avance avec un type qui aurait vite fait d'avancer l'heure de son trépas. Alors oui, aussi longtemps qu'il continuerait à venir ici, il s'efforcerait de rester en bons termes avec le fameux Bryan, juste au cas où il serait aussi peu commode que son expression le laissait penser. Entreprenant par la suite de conduire Jango jusque dans l'arrière cour comme le lui avait suggéré Tommy, c'est un Saul amusé qui laissa entendre qu'il se ferait une joie d'accueillir Tommy en sa demeure si toutefois son chien n'arrivait plus à s'en séparer, puis avec un peu plus de sérieux qu'il lui souhaita de garder son emploi, avant qu'un sourire n'étire à nouveau ses lèvres. « En ce qui me concerne, j'ai toujours du boulot pour les gens motivés. Alors s'ils étaient assez cons pour se passer de toi, j'aurais pas de mal à te trouver quelque chose à faire. » Autant parce qu'il était toujours disposé à laisser leur chance à ceux qui passaient la porte de sa compagnie avec l'envie de se rendre utiles, que parce que Tommy n'était plus tout à fait un inconnu pour lui, et que pour cette raison il ne le laisserait pas dans le pétrin sans sourciller. Encore moins alors qu'il savait que le brun avait une enfant à charge. « On est basés à Redcliffe, à deux-cent mètres de la salle de spectacle. Tu peux aussi simplement passer, à l'occasion. » Saul reprit ensuite, dans un timide haussement d'épaules. Il n'avait pas la prétention de penser que Tommy s'empresserait de lui rendre une petite visite maintenant qu'il savait où le trouver en dehors de cet endroit, mais il tendait à espérer qu'il n'hésiterait pas à sonner à sa porte par envie ou bien par besoin, un jour ou l'autre. Il était comme ça, il aimait partager ses passions, tout comme il aimait tendre la main à ceux qui étaient suffisamment motivés pour la saisir. Bien sûr il imaginait facilement que Tommy ne serait jamais aussi à l'aise dans son univers qu'il pouvait l'être derrière ce bar, mais il n'aurait pas formulé cette proposition s'il n'était pas persuadé de pouvoir faire quelque chose de lui. Au sujet de Jango, en tout cas, il semblerait que l'animal ne soit pas parvenu à convaincre Tommy d'adopter un chien à son tour. Ce dernier disait hésiter, et le fait que sa fille risque effectivement de se désintéresser à l'animal – ou en tout cas à ce qui touchait à son entretien – était une raison on ne peut compréhensible aux yeux de Saul. Celui-ci plaisanta alors quant à l'idée que Tommy puisse peut être commencer par lui prendre une gerbille, loin de s'attendre à ce que le serveur ait une illumination, et s'amusa à nouveau de sa répartie. « Oui, dis-toi qu'il n'y a rien de comparable avec l'amour que te donnent ces bêtes-là. Tu finis inévitablement par les voir comme un membre de ta famille à part entière. » Et il le savait avec d'autant plus d'exactitude que Jango était entré dans leur vie à l'époque où Elsie et lui peinaient à concrétiser leur plus grand rêve : celui de fonder une famille. L'animal avait comblé un vide qui les avait longtemps oppressés, et à présent que Saul avait suffisamment de recul sur tout ça, il tendait même à penser que leur chien avait peut être aussi et surtout agi comme un porte-bonheur auprès d'eux. Force est de constater qu'après tout, les années qui avaient suivi son adoption avaient été les plus heureuses qu'ils aient vécu. Croyant en tout cas comprendre – non sans regret – que Tommy n'excluait pas l'idée de retourner au Canada dans un futur plus ou moins proche, c'est avec une pointe d'hésitation qu'il lui tendit son numéro de téléphone, désireux de maintenir le contact avec lui dans l'hypothèse où leurs routes se sépareraient subitement. C'était sans doute idiot, mais aujourd'hui Saul pouvait compter ses amis et confidents sur les doigts d'une main, et bien qu'il ne sache pas encore exactement dans quelle catégorie ranger le serveur, il est certain que son départ ne le laisserait pas indifférent. « Il faut croire qu'on fait pas le poids, face à ces bons vieux canadiens. » Il souffla alors, dans un sourire aussi amusé que mélancolique, avant de regagner l'intérieur du pub en compagnie de Tommy. Celui-ci lui servit une bière, et choisit ce moment pour le questionner sur les raisons qui l'avaient tenu éloigné de cet endroit pendant plusieurs semaines. Des raisons qu'il peina à formuler clairement au départ, en partie parce que les reproches régulièrement formulés par son demi-frère ne lui semblaient jamais bien loin. Pourtant, ici Tommy se montrait encore et toujours compréhensif, visiblement parce que lui-même était bien placé pour savoir que les jugements étaient chose courante – et facile – entre membres d'une même famille. Peut être en avait-il même fait directement l'expérience, et c'est effectivement ce qu'il ne tarda pas à lui confirmer. « Quand je t'entends parler, je ne peux pas m'empêcher de me dire que c'est sûrement ce que mon demi-frère raconte à notre sujet, quand il se plaint de nous auprès de ses fréquentations. » Et s'il confiait ça avec une pointe de morosité dans la voix, c'est en partie parce que contrairement à ce qu'Abel devait probablement penser et clamer à qui voulait bien l'entendre, lui ne l'avait jamais encouragé à reprendre ses études simplement pour le faire entrer dans le même moule que lui ou par crainte qu'il déshonore la famille en s'enfonçant dans divers pétrins. Il l'avait fait par inquiétude, par intérêt pour celui qu'il continuait de vouloir protéger de tout et surtout de lui-même, mais certainement pas par désir de lui faire emprunter un chemin soit-disant sacré et grâce auquel il pourrait espérer regagner toute son estime. S'il avait pu la perdre, parfois, c'était pour d'autres raisons que ses choix professionnels. « J'ai toujours pensé qu'il fallait faire les choses pour soi, et pas pour les autres. Si tu es heureux dans ce que tu fais et en étant celui que tu es, alors c'est tout ce qui compte. » Saul n'était sans doute pas le mieux placé pour parler de ce genre de choses, quand on savait qu'il rechignait depuis deux ans à assumer ses envies précisément par crainte de décevoir son entourage, mais il n'en était pas moins persuadé que de devenir celui qu'on voulait être, n'en déplaise aux autres, était la meilleure façon de s'épanouir individuellement. Tommy, en tout cas, ne semblait pas décidé à s'épanouir auprès d'une jeune femme, et à cette idée Saul ressentit un mélange d'admiration et de désolation. Car lui avait toujours fait de l'amour son plus grand but, sa source d'inspiration première, le centre de ses projets. Il aimait sa femme depuis maintenant onze ans, d'un amour que rien ni personne ne pourrait jamais altérer. Il aimait Meg, aussi, parce que son cœur n'était simplement pas fait pour choisir entre deux êtres qui l'animaient d'une passion identique, comme un seul et même grand amour, et alors qu'il s'était lui-même toujours convaincu qu'aimer en dépit des lois, des jugements et des règles, c'était aimer vraiment. Mais quelque chose chez Tommy semblait jouer dans son désir de se fermer à toute opportunité amoureuse, et lorsque ce dernier reprit la parole, c'est par un maigre sourire que Saul accueillit une confession qui, si elle ne le surprit malheureusement pas, lui serra cependant le cœur. « Je m'en étais douté. Je suis ... désolé. » Il souffla alors, à demi-mot, sans être tout à fait certain que des désolations étaient de rigueur alors que Tommy avait du entendre ces quelques mots des milliers de fois et qu'à force, forcément, ils avaient certainement perdu de leur sens à ses yeux. « Je ne peux pas prétendre savoir comment j'aurais réagi à ta place, ni si je ne serais pas entrain de tenir le même discours s'il était arrivé quelque chose à Elsie ... » Parce que lui-même savait pertinemment que perdre Elsie le plongerait au fond d'un abîme tellement profond qu'il n'aurait probablement plus jamais la force d'en ressortir, si bien qu'ici il admirait le courage de Tommy, qui peut être était un brin fataliste mais tenait bon en dépit du drame qu'il avait du surmonter. « Mais je ne pense pas que ce soit la solution, de t'enfermer dans la certitude que tu ne rencontreras plus jamais une femme susceptible d'éveiller en toi les mêmes sentiments que celle que tu as perdu. » Bien sûr sa méfiance était légitime, tout comme son envie de solitude, mais il était bien trop jeune pour être aussi cynique, et surtout bien trop jeune pour se fermer aux nombreuses occasions qui s'offriraient sans doute encore à lui dans un futur plus ou moins proche. Des occasions d'être heureux et épanoui à nouveau, auprès de quelqu'un. « Et puis, laisser entrer quelqu'un dans ta vie ne signifierait pas que tu cherches à la remplacer. » Simplement qu'il ne renonçait pas au bonheur, qu'importe qu'il ne le vive plus jamais avec la même intensité que lorsque sa femme était encore là. Bien sûr que ce serait différent, que les premières années seraient rudes et que son fantôme pèserait sur les relations qu'il pourrait essayer de construire, mais c'était aussi ça, avancer. Quand on y réfléchissait bien, un conjoint finissait toujours par disparaître avant l'autre, et Saul savait que dans l'hypothèse où il quitterait ce monde avant sa femme – ce qu'il souhaitait forcément – il ne voudrait pas que celle-ci finisse sa vie seule, attachée à son souvenir comme si ça pouvait un jour le ramener. Tommy devait déjà savoir qu'il croyait à l'idée que l'amour puisse être multiple, frapper plusieurs fois et toujours avec la même bienveillance, qu'à ses yeux on n'était jamais destiné à un seul être mais bien à tous ceux qui pouvaient nous correspondre, et que la vie était suffisamment courte pour qu'on ne se prive pas de ce genre de bonheurs. Lui ne s'était pas privé de son histoire avec Meg, de ce qui était né entre la jeune femme et lui, même alors qu'il avait appréhendé de se retrouver dans une situation impossible. Mais si aujourd'hui il ne regrettait pas de l'avoir laissé entré dans son cœur, il regrettait en revanche d'avoir perdu le contrôle sur sa propre vie, au point d'être aujourd'hui tiraillé entre des souhaits contradictoires et deux existences qui n'étaient décidément pas faites pour cohabiter. Mentir, inventer, se cacher derrière des excuses et des prétextes … C'était devenu son plus gros fardeau, et la raison pour laquelle se confronter à son reflet lui était de moins en moins supportable. « Les miens m'éclateront tôt ou tard à la figure, c'est sûrement plus qu'une question de temps. » Il énonça alors, à la remarque de Tommy, d'un ton qui se voulait probablement dénué d'émotion mais qui en vérité laissait aisément transparaître l'angoisse qui grandissait en lui à mesure qu'il sentait se rapprocher le moment où sa vie basculerait. Resserrant ses doigts autour de son verre, il quitta un instant le regard de Tommy pour se replonger dans ses souvenirs, débutant bientôt un récit aussi spontané qu'inattendu, même pour lui. Il ne savait pas vraiment pourquoi il lui parlait subitement de Stella et de la façon dont il l'avait pu l'aimer, elle aussi, des années plus tôt. Il savait simplement que c'était libérateur, dans un sens, de formuler tout haut ce qu'il avait toujours gardé pour lui, par honte autant que par pudeur. Et puis, préférant bientôt ironiser quant à l'idée que Tommy puisse avoir son compte d'histoires compliquées si tous les clients étaient embringués dans des idylles aussi complexes que les siennes, Saul esquissa un léger sourire lorsque le brun lui resservit à boire, et qu'il reprit la parole. « Oui, ne t'inquiète pas pour nous. » Pour « nous », parce qu'il parlait non seulement de lui mais aussi de Jango, qu'il tenait à ramener à la maison en un seul morceau. « Dans ce cas, il faudrait que je songe à me mêler aux autres clients. Peut être qu'en les écoutant parler, j'aurais un peu moins l'impression d'être la dernière des ordures. » Il reprit par la suite, les lèvres étirées en un sourire sans joie, tandis qu'il leva son verre comme pour trinquer dans le vide. Il s'efforçait ici de dédramatiser la situation, mais il savait pertinemment qu'il aurait atteint le summum du pathétique s'il en arrivait un jour à vouloir se rassurer de cette façon. Tommy se confia à son tour sur ses amours passées, et il acquiesça doucement. « Mais c'est aussi pour ça qu'aujourd'hui tu sais quel genre de femmes éviter. Les erreurs ont été inventées pour qu'on en tire un maximum d'enseignements, comme dirait mon père. » Et s'il le citait avec le sourire, Saul ne pouvait évidemment s'empêcher de penser que son père, justement, aurait tout le mal du monde à trouver quoi dire de sa situation, s'il devait un jour apprendre la vérité. Car des erreurs, il en avait fait lui aussi étant plus jeune et c'était précisément parce que son père lui avait toujours tout pardonné qu'il avait cité ces quelques mots à tort et à travers, mais ce qu'il vivait aujourd'hui serait sans doute beaucoup plus qu'un faux pas aux yeux de celui qui l'avait toujours érigé en modèle absolu, et qui découvrirait – non sans heurt – que son fils n'avait rien de l'homme irréprochable qu'il imaginait avoir mis au monde. La prochaine question de Tommy le tira finalement de ses réflexions, et Saul resta interdit quelques secondes, avant de pousser un doux soupire. « On s'est revus, à vrai dire, il y a quelques années. Lorsqu'elle a quitté l'armée et qu'elle est revenue vivre ici. C'était … particulier. A la fois inespéré et complètement déstabilisant. » Sans doute parce qu'il était resté des années à attendre le retour de Stella et qu'au moment de se retrouver face à elle, tout lui était revenu en pleine figure. La timidité qui l'avait paralysé du temps où ils étaient au lycée et sans laquelle tout aurait peut être été différent, la façon dont la jeune femme s'était envolée loin de lui, et le mal qu'il avait eu à s'en remettre. « Aujourd'hui je crois que Stella restera le fantasme de l'adolescent que j'étais. Elle a sûrement fait sa vie, comme j'ai fait la mienne … J'imagine que c'était pas censé se terminer autrement. » Et si sa voix trahissait une certaine amertume, c'est parce qu'il avait construit sa vie d'homme sur le fantôme d'une histoire qui n'avait jamais pu voir le jour, quoi qu'il y ait eu ce fameux soir, alors même qu'il aurait peut être pu agir pour que les choses se passent autrement. Il était profondément heureux auprès d'Elsie – autant qu'il pouvait être heureux dans sa relation avec Meg – mais une partie de lui se demanderait toujours si les choses auraient pris une direction différente s'il avait simplement soufflé à Stella les quelques mots qui étaient restés coincés au fond de sa gorge durant de longues années. « Et toi alors, tu t'es déjà demandé si ta vie aurait été différente si tu avais osé dire ou faire certaines choses, par le passé ? » Saul releva les yeux vers Tommy, l'air curieux, songeant qu'il était probable que tout le monde ou presque nourrisse ce genre de regrets, et l'idée que chaque action – ou absence d'action – avait une conséquence qui à long terme impliquait qu'une existence prenne un chemin plutôt qu'un autre.
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Message(#)message man (tommy) EmptyJeu 25 Aoû 2016 - 23:26

Fallait-il en conclure que Saul était un habitué des nuits sur la canapé ? Le brun n'avait pas jugé opportun de poser la question, la situation amoureuse et maritale de son acolyte semblant déjà passablement compliquée sans qu'il ne vienne remuer le couteau dans la plaie. Reste que pour ne pas rendre son passage par le bar encore moins recommandable, mieux valait que Saul reste raisonnable concernant la boisson, mais également concernant sa relation avec le videur. « Ouais, bah rappelle-moi de surtout bien le saluer en partant. » Tommy avait laissé échapper un léger rire. Mais quelque part c'était presque rassurant de savoir que Bryan possédait ce côté dissuasif pour lequel il avait sans doute - en partie - été engagé. Persuadant Saul d'amener son chien dans l'arrière-cour plutôt que de le laisser continuer à aboyer devant l'entrée réservée au client, Tommy n'avait pas manqué d'amener pour l'animal une gamelle bien accueillie, capable de s'occuper correctement d'un animal malgré le fait qu'il ne souhaitait pas en posséder un lui-même. Rien qui soit aussi encombrant et difficile d'entretien qu'un chien, du moins. Un chat errant qu'il n'avait pas vraiment choisi c'était déjà bien suffisant, selon lui. Alors sérieux ou pas ce n'était pas certainement pas lui qu'il faudrait engager pour baby-sitter Jango, ou des enfants, ou même une plante verte ... C'était risqué. Et surtout Tommy avait bien assez à faire avec ce boulot qu'il priait de garder. « En ce qui me concerne, j'ai toujours du boulot pour les gens motivés. Alors s'ils étaient assez cons pour se passer de toi, j'aurais pas de mal à te trouver quelque chose à faire. » Tommy se sentait gêné, cela lui donnait l'impression qu'on lui faisait la charité d'un boulot comme si le fait qu'il ait tant de mal à en garder un était à ce point flagrant. « On est basés à Redcliffe, à deux-cent mètres de la salle de spectacle. Tu peux aussi simplement passer, à l'occasion. » Tommy ne saurait dire si l'hésitation de Saul venait d'une incertitude à réellement vouloir le voir débarquer, ou à une sorte de timidité à vouloir prolonger leur relation en dehors de murs de ce bar, en sachant que Tommy connaissait son petit secret. « Je vois à peu près où c'est, oui. J'habite pas très loin. » Il avait esquissé un sourire « Mais maintenant je sais où te trouver, au moins. » Cela pourrait toujours s'avérer utile un jour, ne serait-ce que si Saul décidait de disparaître à nouveau.

Pour en revenir au chien, Tommy avait beau trouver à celui de Saul un petit quelque chose de sympathique - du moins maintenant qu'il avait cessé d'aboyer - cela ne serait assurément pas suffisant pour le convaincre de céder aux demandes incessantes de Moïra. Heureusement qu'elle n'était pas là d'ailleurs, parce qu'à voir comme Saul essayait de lui vendre les choses à coup de « Oui, dis-toi qu'il n'y a rien de comparable avec l'amour que te donnent ces bêtes-là. Tu finis inévitablement par les voir comme un membre de ta famille à part entière. » Tommy se serait rapidement retrouvé en minorité. Avançant malgré tout l'argument (non-négligeable) d'un possible retour au Canada, il avait malgré tout du préciser qu'il s'agissait bien plus d'une envie que d'un projet véritable pour le moment. C'était ce qu'il souhaitait à terme, retourner s'installer là-bas, mais il se demandait si cela faisait réellement sens, sans Alice ... Et puis, il ne pourrait pas retourner à Kenora de toute manière. La ville était bien trop petite pour que sa réputation de voleur ne soit pas un frein. « Il faut croire qu'on fait pas le poids, face à ces bons vieux canadiens. » Laissant un rire amusé lui échapper, Tommy avait regagné la porte menant à l'intérieur après avoir tapé furtivement sur l'épaule de Saul « Le sirop d'érable et la neige, évidemment que vous ne faites pas le poids. » Ce n'était bien sûr pas à ces deux faits que se résumaient ses dix ans passés au Canada, on s'en doute, mais les véritables raisons ne tenaient pas en seulement quelques mots. Elles ne tenaient même pas en seulement quelques phrases.

De retour à leur place initiale, c'est à dire chacun de son côté du bar, Tommy s'était dépêché de préparer les commandes accumulées pendant sa courte absence tout en écoutant Saul mentionner les jugements récurrents de sa famille vis-à-vis de son style de vie. Se gardant de faire remarquer que le mieux encore pour éviter ce genre de situation était de confier le moins de choses possibles à sa famille, Tommy n'avait pas su cacher entièrement le ressenti qui le liait d'ailleurs aux autres Warren et du expliquer vaguement ce qu'il en était. Tommy avait simplement hérité de la place de canard boiteux de la famille, probablement parce qu'il en fallait toujours un. « Quand je t'entends parler, je ne peux pas m'empêcher de me dire que c'est sûrement ce que mon demi-frère raconte à notre sujet, quand il se plaint de nous auprès de ses fréquentations. » Tommy avait froncé légèrement les sourcils, soudain compatissant avec ce frère qui pourtant semblait lui aussi porter un certain nombre de jugements sur Saul. Probablement une histoire de solidarité entre plus jeunes d'une fratrie. « J'ai toujours pensé qu'il fallait faire les choses pour soi, et pas pour les autres. Si tu es heureux dans ce que tu fais et en étant celui que tu es, alors c'est tout ce qui compte. » Sages paroles, bien que plus faciles à dire qu'à mettre en oeuvre. Ce serait mentir que de dire qu'il était heureux dans ce qu'il faisait, servir des bières ce n'était pas le rêve de sa vie ... Mais il faisait de son mieux, et même ça on ne voulait pas le lui accorder. « Tu devrais lui dire que tu es fier de lui, si ce n'est pas déjà fait. » Il avait appuyé l'un de ses coudes contre le bar, adoptant un air sérieux que Saul ne devait pas lui voir souvent « Et même si tu ne le penses pas entièrement, parce que chacun fait de son mieux ... et parfois ça fait du bien de s'entendre dire que c'est suffisant. Que ce n'est pas "pas assez". » Et si cela pouvait éviter au frère de Saul de développer, à terme, le même complexe d'infériorité que Tommy vis à vis de sa famille, ça ne serait pas un mal.

Pensant probablement changer de sujet pour revenir à quelque chose de plus léger, Saul s'était renseigné sur les occasions que son nouvel emploi pouvaient - ou non - apporter à Tommy, mais si le brun ne niait pas avoir à quelques reprises débarrassé une table pour y trouver un numéro de téléphone griffonné sur un coin de serviette, il se contentait généralement de les jeter à la poubelle ou de les filer à Alvin accompagnés d'un petit commentaire amusé. La raison était simple, il ne se sentait pas spécialement prêt à laisser qui que ce soit d'autre passer après Alice. Il savait qu'un jour, peut-être, il parviendrait à tourner la page, mais pour le moment il ne s'en sentait pas capable, et il n'en ressentait pas non plus le besoin. « Je m'en étais douté. Je suis ... désolé. » Tommy avait haussé vaguement les épaules. Il avait toujours trouvé cette phrase vide de sens, se sentir désolé pour autrui, ça ne voulait rien dire. « Je ne peux pas prétendre savoir comment j'aurais réagi à ta place, ni si je ne serais pas entrain de tenir le même discours s'il était arrivé quelque chose à Elsie ... » Et pourtant il ne savait pas s'en contenter. Et malgré toute la sympathie que Tommy avait pour Saul il savait qu'effectivement, il ne savait pas de quoi il parlait. « Mais je ne pense pas que ce soit la solution, de t'enfermer dans la certitude que tu ne rencontreras plus jamais une femme susceptible d'éveiller en toi les mêmes sentiments que celle que tu as perdu. Et puis, laisser entrer quelqu'un dans ta vie ne signifierait pas que tu cherches à la remplacer. » Le brun avait secoué la tête, parce que bien sûr le but n'était pas de chercher à remplacer à Alice, personne n'y arriverait et Tommy n'avait aucune envie qu'il en soit autrement. Ce n'était pas ce qu'il craignait, concernant les autres femmes. « Je n'ai simplement pas envie de me relancer là-dedans pour l'instant. Je n'ai pas besoin d'une femme dans ma vie, actuellement ... et encore moins d'une femme de passage. Ma fille a eu trop de chamboulements dans sa vie ces dernières années, je n'ai pas envie qu'elle voit passer une ribambelle de nanas en se demandant si l'une d'elle est supposée devenir sa belle-mère. » Les enfants avaient toujours une imagination tellement débordante, et une telle tendance à l'exagération et à l'extrapolation.

Peu désireux de continuer à évoquer sa propre situation, Tommy avait fini par prendre des nouvelles de celle - probablement toujours aussi compliquée - de Saul. Toujours empêtré jusqu'au cou dans ses mensonges semble-t-il, probablement parce que comme chacun savait le mensonge entrainait le mensonge et que d'un seul on se retrouvait à devoir en gérer une multitude, avec plus ou moins de de succès. Tommy lui n'en serait pas capable, du moins le pensait-il. « Les miens m'éclateront tôt ou tard à la figure, c'est sûrement plus qu'une question de temps. » Le brun avait grimacé légèrement, il espérait pour Saul que cela ne se ferait pas trop douloureusement, à défaut de ne pas pouvoir lui assurer qu'il s'en tirerait à bon compte éternellement ; Il savait qu'il n'en serait rien. « Ce jour-là je t'attendrai avec une bière, et c'est moi qui te l'offrirai. » Du moins le croyait-il maintenant, pas sûr qu'il soit toujours du même avis le moment venu, cela dit. Que Saul ce rassure en tout cas, il était loin d'être le pire specimen en matière de vie compliquée, parmi les clients de ce bar. Sans espionner les oreilles de Tommy entendaient forcément quelques brides de conversation ça et là, et il en avait entendu, des choses. « Dans ce cas, il faudrait que je songe à me mêler aux autres clients. Peut être qu'en les écoutant parler, j'aurais un peu moins l'impression d'être la dernière des ordures. » Sourire compatissant tandis qu'il attrapait le torchon et essuyait les deux verres qu'il venait de nettoyer puis de rincer. « Pas sûr que cela t'aide à avoir un peu plus foi en l'espèce humaine, par contre. » A moins qu'il n'apprécie le genre humain de cette manière, malhonnête, parfois cruel, et très rarement pavé de bonnes intentions. Mais que Saul se rassure Tommy avait lui aussi eu son lot d'erreurs et de mauvais choix, concernant les femmes, concernant son cercle de connaissances en général ; Lui-même n'était pas forcément à classer dans la catégorie des bonnes fréquentations, d'ailleurs. « Mais c'est aussi pour ça qu'aujourd'hui tu sais quel genre de femmes éviter. Les erreurs ont été inventées pour qu'on en tire un maximum d'enseignements, comme dirait mon père. » Il avait finalement rangé ses verres. « Sage homme. Mais pour être parfaitement honnête je crois que je cherchais un peu les ennuis volontairement, à l'époque ... je savais très bien ce que je faisais. » Et c'était d'ailleurs bien parce qu'il le savait qu'il en tirait sur le coup une certaine satisfaction, rien que l'idée que cela mette en rogne ses parents, son frère ou ses sœurs était une excuse suffisante. Mais Tommy n'essayait pas de faire croire qu'il agissait intelligemment.

La vraie surprise résidait au final dans le fait que Saul, possédant aujourd'hui plus de compagnie féminine qu'il n'en fallait - suffisamment pour faire des envieux, sans doute - n'avait pas toujours été dans cette situation, et vécu une époque où il restait plutôt dans son coin, à espérer après une idylle ou une amourette avec autant d'avenir qu'il n'avait de courage de la provoquer, c'est à dire très peu. Et cela semblait ne tenir que dans un seul nom, Stella, Tommy y trouvant quelque chose d'attendrissant, lui beaucoup plus réservé quant à ses souvenirs de son propre premier amour. « On s'est revus, à vrai dire, il y a quelques années. Lorsqu'elle a quitté l'armée et qu'elle est revenue vivre ici. C'était … particulier. A la fois inespéré et complètement déstabilisant. Aujourd'hui je crois que Stella restera le fantasme de l'adolescent que j'étais. Elle a sûrement fait sa vie, comme j'ai fait la mienne … J'imagine que c'était pas censé se terminer autrement. » Mais néanmoins Saul en parlait avec ce ton toujours un peu rêveur d'adolescent divaguant un peu « Ça devait être une fille intéressante. » avait-il conclu en souriant, s'accoudant à nouveau au bar en profitant de ses quelques minutes de répit, sans commande ni vaisselle. « C'est marrant, d'ailleurs, je crois que c'est aussi comme ça que s'appelle l'ex-femme du barman habituel. Stella. Mais cette Stella-là, par contre, elle n'a pas vraiment l'air commode. » À moins qu'il ne la voit de cette façon qu'à cause de la manière dont elle traitait Alvin, avec une espèce de dédain mal camouflé derrière un sourire qui ne prenait pas. Ouais, Tommy n'était peut-être pas entièrement objectif. « Et toi alors, tu t'es déjà demandé si ta vie aurait été différente si tu avais osé dire ou faire certaines choses, par le passé ? » Le barman avait affiché une moue pensive, pas vraiment certain de la réponse à apporter à cette question ... Disons que pour lui le problème n'était pas là. « Pas vraiment, non. Mais de me demander où j'en serais si je n'avais pas osé certaines choses par contre, oui. Si je n'avais pas osé quitter ce pays il y a dix ans avec juste un sac à dos, ou si je n'avais pas osé tenter ma chance avec la mère de ma fille alors que ce n'était pas une fille pour moi ... » Pas une fille pour lui parce que déjà celle de son frère, plus ou moins. Et s'il n'avait pas osé piquer dans la caisse de son patron, s'il n'avait pas terminé en prison, s'il n'avait pas pris le poker pour un moyen tangible de régler ses problèmes d'argent ... S'il n'avait pas appelé Alice ce jour-là mais un taxi, pour que ce trajet ne soit pas le dernier pour elle. « Mais j'évite de penser à ce genre de chose. » avait-il repris d'un ton résolu « On ne refait pas le passé. Alors ça ne sert à rien de se faire du mal en pensant à ce qu'on aurait pu ou du faire. » Ce qui n'empêchait pas Tommy de le faire parfois, dans ses jours de déprime. Mais il savait que ce n'était pas la solution.
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Message(#)message man (tommy) EmptyMar 30 Aoû 2016 - 3:26

A présent que Saul s'était fait la promesse de profiter à nouveau d'une bière en compagnie de Tommy, même si pour ça il lui faudrait sans doute s’accommoder du confort de son canapé chaque fois qu'il lui prendrait l'envie d'attendre l'heure de fermeture du pub, il avait à présent tout le loisir de se faire une autre promesse : celle de toujours rester en bons termes avec le videur, qui n'avait décidément pas l'air particulièrement chaleureux. Et parce qu'il tenait un minimum à son intégrité physique, Saul ne comptait pas vérifier par lui-même à quel point ses suppositions pouvaient se vérifier. Annonçant donc qu'il veillerait toujours à le saluer avant de s'aventurer en quittant les lieux, il entreprit par la suite de conduire son chien jusque dans l'arrière-cour, où il ne risquerait pas d'effrayer les clients. Rejoint par Tommy, la suite de l'échange l’amena à formuler une proposition inattendue, et légèrement détournée, lorsqu'il lui sembla que le jeune homme s'inquiétait de perdre un jour son emploi, sans doute parce qu'il n'aurait jamais obtenu une place ici s'il n'avait pas déjà expérimenté ce genre de situations. Et parce que Saul était toujours disposé à tendre la main à ceux qui voulaient s'en sortir – et qu'il en avait d'autant plus envie maintenant qu'il le connaissait un peu mieux – celui-ci se permit de sous-entendre qu'il aurait du boulot pour lui si jamais ses employeurs faisaient un jour l'erreur de se passer de lui. Tommy parut légèrement mal à l'aise, c'est pourquoi Saul se contenta de lui préciser qu'il n'aurait aucun mal à trouver son établissement s'il connaissait vaguement Redcliffe. Et c'était visiblement le cas. « C'est peut être un peu moins branché qu'ici, mais on a notre compte de beuveries, nous aussi, chaque fois qu'il faut fêter quelque chose. » Il se permit d'ajouter, peut être par crainte que Tommy l'imagine dans un costume sur-mesure, à donner des ordres à des comédiens éreintés, simplement parce que les journaux s'employaient à dresser de lui un portrait erroné et que ses locaux pouvaient donner l'impression d'un petit empire qui ne s'assumait pas. « Je t'autorise à me ramener par la peau des fesses la prochaine fois qu'il me prendra l'envie d'oublier cet endroit. » Saul ajouta ensuite, dans un léger rire, supposant que Tommy serait encore le mieux placé pour l'arracher à son bureau certains soirs où il pouvait lui arriver de s'y éterniser. Parce qu'il avait beau se promettre de revenir plus régulièrement à l'avenir, il restait bien conscient que son travail occupait encore une place suffisamment importante dans sa vie pour que ce genre de promesses impliquent toujours certaines réserves. C'est en tout cas un Saul amusé qui nota ensuite qu'en dépit du fait qu'il se soit inquiété du confort de Jango quelques instants plus tôt, Tommy ne semblait pas avoir la moindre envie d'adopter un chien de son coté. Et tous les arguments qu'il avança ne furent pas pour le convaincre, notamment parce qu'un détail semblait particulièrement peser dans la balance : l'éventualité d'un départ pour le Canada. Une idée assez perturbante pour Saul, qui commençait à porter une certaine affection à son (ancien) compagnon de boisson, bien qu'il se plaise ici à ironiser quant au fait que les canadiens devaient avoir de sacrés atouts pour faire ainsi la différence. A la réponse de Tommy, c'est alors un nouveau rire qu'il laissa échapper. « Tu vois, moi je suis plutôt chaleur et pisco. J'ai déjà du mal à me convaincre d'enfiler une veste sous quinze degrés, alors une doudoune … » Mais c'était sans doute parce que lui n'avait longtemps connu que les clémentes températures de Lima, qui sans être étouffante offrait toujours la certitude d'un climat doux et favorable. « Mais je sais ce que c'est que d'avoir l'impression d'avoir laissé toute une partie de sa vie derrière soi. Et y'a rien de plus normal que de caresser l'espoir de retourner là où on se sent vraiment « à la maison ». » Lui s'était heureusement acclimaté à sa nouvelle vie en Australie, mais il se prenait souvent à repenser à ses années au Pérou, aux personnes qu'il avait laissé derrière lui quand il lui avait fallu suivre son père, au début de son adolescence, pour des contrées dont il ignorait presque tout au départ. Aujourd'hui, il ne retournait à Lima que lorsqu'il en avait le temps et l'occasion, et ça lui semblait souvent trop peu. Retrouvant l'intérieur, les deux hommes évoquèrent l'un et l'autre la façon dont on pouvait parfois se sentir sous-estimé dans une famille comme la leur. Tommy semblait en avoir fait personnellement l'expérience, quand Saul se basait plutôt sur celle de son demi-frère, qui se plaisait à revendiquer son indépendance après avoir probablement souffert des reproches et conseils dont il avait si souvent fait l'objet. Aux paroles de Tommy, il haussa alors timidement les épaules. « Disons qu'on a généralement du mal avec ce genre de choses. Abel n'est pas très sentimental, et moi j'oublie souvent que mes proches ne sont pas dans ma tête et que ce qui me paraît évident ne l'est pas toujours pour eux. » Comme le fait qu'il soit fier de son demi-frère, quoi que celui-ci en pense. Il est vrai qu'il ne le lui disait pas toujours autant qu'il le devrait, souvent de crainte qu'il l'utilise ensuite contre lui chaque fois qu'il serait à nouveau animé d'une certaine rancune, mais jamais il ne s'était surpris à poser un regard honteux sur celui qu'il aimait aujourd'hui comme s'ils avaient grandi ensemble. « C'est lui qui a choisi de se convaincre qu'il nous faisait honte, et qui s'est sûrement mis en tête de nous le faire payer. Moi je suis fier de pouvoir dire que mon demi-frère préfère vivre de petits boulots plutôt que de profiter de la fortune familiale. J'ai beau penser qu'il avait les moyens de voir plus grand, je peux pas nier qu'il a fait preuve de plus d'indépendance que moi et que c'est tout à son honneur. » Parce que lui-même s'était efforcé de voler de ses propres ailes, et avait pour ça bien souvent entrepris de se passer des avantages qu'impliquait le fait d'être le fils d'un homme tel que son père. Mais aujourd'hui, malgré tout, il était forcé d'admettre qu'il lui devait beaucoup. Abel, lui, avait toujours refusé que son beau père lui serve de tremplin pour quoi que ce soit, et en ça il avait certainement plus de fierté encore. La suite de la conversation les entraîna quant à elle sur un terrain plus glissant, au point que Saul en vint à regretter d'avoir dans un premier temps évoqué les avantages d'un boulot tel que celui de Tommy pour ce qui était d’interagir avec ces demoiselles. Le serveur avait ses raisons pour se satisfaire de sa vie de célibataire, et Saul eut bientôt confirmation de ce qu'il avait suspecté rien qu'en se basant sur le comportement du brun, et sur l'anneau qu'il portait autour de son cou. Alors, commençant par émettre l'idée que lui-même ne tiendrait probablement pas de discours plus optimistes s'il avait comme lui perdu la femme de sa vie, il tint néanmoins à l'encourager à ne pas se fermer complètement à l'idée de retrouver un jour le bonheur auprès de quelqu'un. Ça lui tenait à cœur, quand bien même il semblait peut être mal placé pour lui vendre un concept comme celui de l'amour, alors que son acolyte n'ignorait rien de ses frasques. Saul était pourtant un romantique, et quelqu'un à qui la solitude n'avait jamais réussi, raison pour laquelle il ne saurait la recommander à qui que ce soit. Mais face aux arguments de Tommy, il eut du mal à insister. « Je comprends. Je me souviens avoir très mal vécu que mon père fréquente d'autres femmes après ma mère, à l'époque où ils s'étaient séparés. Ce n'est pas comparable, bien sûr, mais … je crois que c'est le meilleur moyen de se sentir doublement abandonné. » Ce n'était pas comparable dans la mesure où lui n'avait été qu'un enfant du divorce, pendant les quelques années que ses parents avaient passé loin l'un de l'autre. Mais pour avoir très mal vécu cette situation, et plus particulièrement l'idée que ses parents cherchent l'un et l'autre à tourner la page, il était en mesure de comprendre les craintes de Tommy vis à vis de sa fille. « La femme qui entrera un jour dans vos vies aura beaucoup de chance, et elle en vaudra la peine, j'en suis sûr. » Il reprit, dans un franc sourire, tout en se penchant pour tapoter le bras du serveur à la manière d'un frère qui chercherait à lui redonner confiance en lui, en l'avenir et en ses chances d'y vivre de belles choses, loin de toute culpabilité. Mais évoquant par la suite ses propres problèmes, et cette situation qui ne s'était pas particulièrement simplifiée depuis leur dernière rencontre, c'est un Saul subitement plus fataliste qui émit l'idée que les mensonges qu'il parvenait jusqu'ici à préserver lui exploseraient tôt ou tard à la figure, et non sans heurt. Il savait pertinemment qu'il n'y échapperait pas éternellement, que la lâcheté derrière laquelle il pouvait encore se cacher ne lui sauverait pas toujours la mise, et qu'il aurait tôt ou tard des comptes à rendre à Elsie, à Meg, et à bien d'autres. A la remarque de Tommy, son expression parvint à se décrisper légèrement, tandis qu'il releva les yeux vers le serveur. « Pour une fois, je crois que j'oserai demander quelque chose d'un peu plus fort, quitte à finir minable et prendre le risque de me frotter à monsieur muscles. » Et à cette idée, ses lèvres esquissèrent un fin sourire, parce qu'après tout il valait probablement mieux qu'il en rit tant qu'il le pouvait encore. Parions que le jour où tout se saurait et où il perdrait jusqu'au peu d'estime qu'il avait encore pour sa personne, son humour prendrait un long congé sabbatique. « Je sais qu'on est plus souvent déçu que l'inverse, à ce niveau-là. » Saul reprit bientôt, dans l'esquisse d'un sourire un peu plus résigné, à la prochaine remarque de Tommy. S'il avait eu son lot de bonnes surprises par le biais de rencontres enrichissantes, force est de constater que beaucoup de ses congénères étaient aussi parvenus à le décevoir et à fragiliser sa certitude quant au fait que chaque être humain avait prétendument un bon fond, même habillement caché. Tommy, en tout cas, semblait avoir lui-même connu une période plus trouble où ses choix avaient pu être influencé par son désir de s'attirer des ennuis. A cette idée, c'est un sourire compatissant qu'esquissa le brun. « Mais t'es sûrement plus le même aujourd'hui, sinon t'en serais pas là. » Il ne pouvait pas prétendre le connaître suffisamment pour avancer avec certitude qu'il était maintenant bien loin de la vie qu'il avait pu mener dans sa jeunesse, mais Tommy ne lui avait jusqu'ici jamais donné l'impression d'être un mauvais bougre qui ne vivait que pour se mettre dans le pétrin. Il semblait être un père soucieux, un employé assidu, et plus généralement un jeune homme d'un abord sympathique, loin de l'image qu'il se faisait des voyous. Question passé, en tout cas, celui de Saul ne présentait rien d'aussi intéressant, si ce n'est que lui aussi avait longtemps été différent de celui qu'il était aujourd'hui. Plus renfermé, et tourmenté par un amour à sens unique – ou qu'il avait disons gardé secret. Stella Edwards avait été la première fille qu'il ait sincèrement aimé, et s'il essayait souvent de se convaincre que cette partie de sa vie appartenait à une époque révolue, certains souvenirs n'avaient de cesse de le rattraper. Le départ de la blonde, leurs retrouvailles, et toutes ces choses qui continuaient de faire vibrer un petit quelque chose en lui. C'est pourquoi, à la remarque de Tommy, ses lèvres esquissèrent un sourire un brin rêveur. « Disons qu'elle savait comment s'y prendre pour vous obséder du matin au soir. Elle était ravissante, bien sûr, mais elle avait surtout un petit quelque chose qu'on retrouvait pas chez d'autres. » Et s'il n'avait jamais vraiment su l'expliquer, Saul avait longtemps cru qu'elle représentait son idéal féminin, et qu'aucune fille ne saurait lui faire oublier cette jolie blonde aux yeux clairs, confiante et magnétique. Tommy reprit bientôt la parole et l'attention de Saul se décupla subitement, tandis qu'il se redressa. « J'imagine que tu connais pas son nom de jeune fille ? » Il souffla brusquement, d'une manière presque inconsciente, avant de pousser un doux soupire. « Qu'est-ce qui me prend … Stella, c'est sûrement un de ces prénoms hyper communs qu'on entend à tout va. » Ou bien la preuve que le destin avait un certain sens de l'humour quand il était question de lui rappeler certains épisodes de sa vie par des coïncidences assez troublantes. Parce que les chances pour que cette Stella soit celle qu'il avait à nouveau perdue de vue plusieurs années auparavant étaient minces, il le savait. Ainsi préféra-t-il bientôt interroger Tommy sur ses propres regrets, comprenant bien vite que contrairement à lui, le jeune homme ne regrettait pas d'avoir manqué d'agir, mais justement de l'avoir fait. « Au moins, toi, t'as provoqué ton destin. Tu t'es pas contenté d'attendre dans un coin que quelque chose se passe, pour te demander vingt ans plus tard où avait bien pu se cacher ta paire de couilles lorsque t'en avais besoin. » Un sourire amusé accroché aux lèvres, Saul tentait ici de détendre l'atmosphère, croyant effectivement deviner que remuer le passé n'était pas un exercice que Tommy se plaisait à entreprendre, qui plus est alors qu'il en viendrait d'une manière ou d'une autre à repenser à celle qu'il avait perdue. « C'est dans ces moments-là que je me rends compte que je ne sais pas grand chose de toi. Hormis le fait que les chiens sont toute ta vie, bien sûr. » Là encore, c'est avec humour qu'il reprit, un brin de malice dans le regard. « Et pour être honnête, la première fois qu'on a trinqué ensemble et que ma langue s'est déliée sous l'effet de l'alcool, je crois qu'une partie de moi espérait que nos routes ne se recroiseraient pas. » Sans doute parce qu'il avait conscience de prendre quelques risques en se confiant sur sa vie sentimentale à un quasi inconnu, n'ayant à ce moment-là aucune moyen d'être certain que la situation ne viendrait pas à poser quelques problèmes s'ils étaient amenés à se revoir fréquemment. Ce fut pourtant le cas, et bien vite ses appréhensions s'étaient dissipé. « Aujourd'hui, c'est différent. Et crois-le ou non, quand je me suis tenu éloigné de cet endroit, je t'ai presque autant regretté que cette bonne vieille bière. » Et s'il le disait là encore avec le sourire et sur un ton des plus légers, ses propos n'en étaient pas moins empreints de sincérité. Il avait beau ignorer dans quelle catégorie ranger sa relation avec le serveur, il avait trouvé en Tommy un confident doublé d'un acolyte à l'aura chaleureuse et bienveillante. Quelqu'un dont il n'aurait peut être jamais croisé la route s'ils n'avaient pas trinqué ensemble plusieurs mois auparavant, et grâce à qui son rapport à l'alcool était beaucoup plus sain qu'à l'époque où il n'avait aucune oreille attentive pour l'empêcher de ruminer incessamment ses tourments.
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Message(#)message man (tommy) EmptyVen 9 Sep 2016 - 5:20

Un peu troublé par la proposition de Saul, pas tant par méfiance que par impression qu'on lui faisait un peu la charité d'un boulot quand il s'évertuait pourtant à chercher et obtenir les siens sans l'aide de personne comme pour n'en devoir la réussite qu'à lui-même, il n'avait pas refusé explicitement mais s'était contenté d'une réponse vague et qui n'engageait à rien. Non sans en profiter pour faire remarquer qu'il aurait maintenant au moins un endroit où chercher le brun s'il disparaissait à nouveau sur une période inhabituellement longue. « C'est peut être un peu moins branché qu'ici, mais on a notre compte de beuveries, nous aussi, chaque fois qu'il faut fêter quelque chose. Je t'autorise à me ramener par la peau des fesses la prochaine fois qu'il me prendra l'envie d'oublier cet endroit. » Amorçant un sourire plus franc, Tommy avait secoué la tête et assuré « Compte sur moi. » parce qu'il n'y manquerait effectivement pas. Ne serait-ce que parce qu'il avait développé ces dernières années une nature anxieuse qui le poussait à songer au pire plus souvent que de raison. De la même manière, Tommy s'était engagé à prévenir s'il décidait un jour de quitter à nouveau Brisbane, bien que son désir de retourner au Canada ne soit pour l'instant que cela, un désir et rien d'autre. « Tu vois, moi je suis plutôt chaleur et pisco. J'ai déjà du mal à me convaincre d'enfiler une veste sous quinze degrés, alors une doudoune … » Les préférences de Saul semblaient en effet diamétralement opposées à ce niveau-là « Mais je sais ce que c'est que d'avoir l'impression d'avoir laissé toute une partie de sa vie derrière soi. Et y'a rien de plus normal que de caresser l'espoir de retourner là où on se sent vraiment "à la maison". » Est-ce que cela signifiait que Saul espérait lui aussi, dans une certaine mesure, reposer ses valises un jour dans un autre endroit que la Brisbane qui les accueillait actuellement ? Tommy n'avait pas osé demander, mais avait eu le bref sentiment de se sentir un peu moins seul.

De retour à l'intérieur, la conversation avait finalement dérivé sur leurs familles respectives, en quelques sortes, le barman s'occupant du même coup de laver le peu de vaisselle restante presque par habitude, comme des restes de son précédent emploi. Un peu surpris de la manière dont Saul dépeignait son frère et la relation qui semblait unir ce dernier au reste de leur famille, Tommy s'était un peu reconnu dans les paroles du péruvien et s'était de ce fait permis, à demi-mot, de lui donner un conseil ou deux quant à la manière dont appréhender son cadet. « Disons qu'on a généralement du mal avec ce genre de choses. Abel n'est pas très sentimental, et moi j'oublie souvent que mes proches ne sont pas dans ma tête et que ce qui me paraît évident ne l'est pas toujours pour eux. » Raison de plus, avait pensé Tommy, parce qu'à ne jamais entendre l'opinion de quelqu'un on venait inévitablement à se l'imaginer soi-même, souvent à tort et sans avoir tous les éléments nécessaires. « C'est lui qui a choisi de se convaincre qu'il nous faisait honte, et qui s'est sûrement mis en tête de nous le faire payer. Moi je suis fier de pouvoir dire que mon demi-frère préfère vivre de petits boulots plutôt que de profiter de la fortune familiale. J'ai beau penser qu'il avait les moyens de voir plus grand, je peux pas nier qu'il a fait preuve de plus d'indépendance que moi et que c'est tout à son honneur. » Une chose était certaine pour Tommy, il doutait sincèrement qu'aucun de ses frères et sœurs - Scarlett mise à part - puissent un jour avoir le même genre de discours à son sujet. Lorsqu'il était bûcheron passe encore, bien que Tommy se foutait bien de ce que sa famille pouvait dire dans son dos à cette époque-là, mais plongeur ou serveur dans un bar ? C'était tout bonnement ridicule, à côté de la carrière universitaire de ses deux aînés. « Tu vois, tu es capable de mettre des mots là-dessus puisque tu m'en parles. » avait-il néanmoins fait remarquer à Saul avec un léger sourire. « Alors si tu sais me le dire à moi, tu devrais le lui dire à lui. J't'assure, y'a une grosse différence entre supposer ou espérer quelque chose, et l'entendre de vive voix. » Loin de Tommy l'idée de vouloir imposer sa vision des choses, simplement il trouvait cela dommage ... Car comme l'avait fait remarquer Saul lui-même, les gens ne pouvaient pas forcément deviner ce qu'il avait dans la tête.

Difficile également de savoir ce qui se tramait dans la tête de Tommy lorsqu'il avait décidé de ne pas s'étendre sur un sujet, raison sans doute pour laquelle Saul se sentait un peu perplexe devant son manque d'enthousiasme vis-à-vis de la gente féminine. Se résolvant donc à évoquer brièvement la mère de Moïra et sa volonté de ne pas laisser n'importe qui passer après celle qui resterait la femme de sa vie, le brun ne voulait de toute manière pas imposer à sa fille son indécision en matière de femmes. La fillette avait déjà de quoi se sentir perdue entre le changement de continent, le comportement de Marius lorsqu'il en avait la garde, les tentatives de son père pour la ré-apprivoiser après deux années et demi d'absence qui avaient forcément laissée des séquelles ... C'était beaucoup, pour une enfant de sept ans seulement. « Je comprends. Je me souviens avoir très mal vécu que mon père fréquente d'autres femmes après ma mère, à l'époque où ils s'étaient séparés. Ce n'est pas comparable, bien sûr, mais … je crois que c'est le meilleur moyen de se sentir doublement abandonné. » Moïra avait déjà eu toutes les raisons de se sentir abandonnée, son père avait terminé en prison, et son oncle avait maintenant fui de l'autre côté du globe ... Mais raconter ses déboires judiciaires, ça jamais. Saul était sympathique, mais il en fallait bien plus pour atteindre le niveau de confiance suffisant pour que Tommy envisage d'évoquer ses déboires judiciaires. « La femme qui entrera un jour dans vos vies aura beaucoup de chance, et elle en vaudra la peine, j'en suis sûr. » Tommy avait eu un sourire vague, en proie à de véritables questionnements quant à la possibilité de tourner la page un jour. Il n'en avait pas envie. Peut-être qu'un jour les choses changeraient mais il n'avait pas envie d'y penser, il ne cherchait pas sciemment à les faire changer.

Et puis il suffisait de voir le pétrin dans lequel Saul était capable de se mettre en ce qui concernait les femmes, c'était bien trop de complications pour parvenir à persuader Tommy qu'il devrait laisser à nouveau une chance à la gente féminine. Le brun peinait d'ailleurs un peu à comprendre le raisonnement de son interlocuteur, qui semblait attendre imperturbable que les choses se gâtent pour lui et que les ennuis lui tombent dessus. Il savait que cela se terminerait mal, et pourtant il se laissait glisser. « Pour une fois, je crois que j'oserai demander quelque chose d'un peu plus fort, quitte à finir minable et prendre le risque de me frotter à monsieur muscles. » Tommy avait affiché une légère moue ; Il préférait généralement quand les choses se réglaient à l'amiable, plutôt que quand Bryan se sentait obligé d'utiliser ses muscles. « J'ai dit que je te paierai un verre, pas que je le remplirai jusqu'à ce que tu ne puisse plus te lever. » avait-il néanmoins cru bon de préciser, avec sérieux malgré le léger sourire affiché, car comme une majorité d'employés de bar gérer les clients - beaucoup - trop alcoolisés n'était pas sa partie préférée du boulot. Et peu importe que le client en question soit quelqu'un de sympathique le reste du temps, même si dieu sait que Saul était loin d'être le pire des spécimens « Je sais qu'on est plus souvent déçu que l'inverse, à ce niveau-là. » Soit. Mais si d'un côté réaliste Saul semblait du genre un peu sélectif, Tommy bénéficiant visiblement d'un passe-droit dans son estime. Un passe-droit moyennement mérité, faut-il le dire. « Mais t'es sûrement plus le même aujourd'hui, sinon t'en serais pas là. » Si par "là" Saul entendait serveur dans un bar faut d'avoir su garder son précédent emploi, et avec la sensation d'avoir raté le dernier croisement de son existence, alors sans doute.

Préférant changer de sujet, et passablement intrigué par cette Stella qui, bien qu'elle ne semble plus faire partie du paysage actuel de Saul semblait toujours avoir une place particulière dans ses pensées, Tommy l'avait écouté avec un sourire un peu amusé tandis qu'il en faisait une description on ne peut plus élogieuse « Disons qu'elle savait comment s'y prendre pour vous obséder du matin au soir. Elle était ravissante, bien sûr, mais elle avait surtout un petit quelque chose qu'on retrouvait pas chez d'autres. » Saul avait vraiment tout de l'adolescent énamouré lorsqu'il en parlait, mais au fond c'était peut-être le but ... C'était peut-être normal, de garder un regard juvénile sur quelqu'un que l'on avait pas vu depuis son adolescence. « J'imagine que tu connais pas son nom de jeune fille ? » Visiblement la mention faite par Tommy d'une autre Stella venait de le troubler, mais il s'était rapidement repris « Qu'est-ce qui me prend … Stella, c'est sûrement un de ces prénoms hyper communs qu'on entend à tout va. » Déjà, pour commencer, et surtout à en juger par la description faite précédemment il y avait fort peu de chance - pour ne pas dire aucune - qu'il s'agisse de la même personne à en juger par la description faite par Saul juste avant « Blonde, froide comme la glace et aimable comme un inspecteur des impôts ... Aucune chance que ce soit la même, oublie. » Du moins c'était l'effet que lui avait fait la jeune femme lorsqu'il l'avait croisée brièvement, à quelques reprises, si elle amenait ou venait chercher leur fille directement là où travaillait Alvin. « Al' est une vraie crème pourtant. » Autrement dit Tommy peinait un peu à les imaginer avoir été ensembles à une époque, mais enfin.

Un peu pris au dépourvu par la question de Saul, Tommy avait donné une réponse qui ne cadrait probablement pas avec ce que le brun attendait de lui, mais la vérité c'est qu'il n'avait pas beaucoup de regrets. Il n'avait jamais été du genre qui n'osait pas, au contraire, plutôt du genre à parfois trop oser malgré les dommages collatéraux que ses décisions pourraient causer. Bien sûr qu'à décisions différentes sa vie aurait été elle aussi différente, mais il n'aimait pas faire de plans sur la comète sur des scénarios passés. « Au moins, toi, t'as provoqué ton destin. Tu t'es pas contenté d'attendre dans un coin que quelque chose se passe, pour te demander vingt ans plus tard où avait bien pu se cacher ta paire de couilles lorsque t'en avais besoin. » Vingt ans plus tard peut-être pas, Saul semblait oublier qu'il avait quelques années de plus au compteur que Tommy, mais ce dernier saisissait le principe. « C'est dans ces moments-là que je me rends compte que je ne sais pas grand chose de toi. Hormis le fait que les chiens sont toute ta vie, bien sûr. » Laissant échapper un rire, Tommy s'était permis de se servir un verre d'eau, à défaut de pouvoir boire autre chose pendant ses heures de service « Et ça ne risque pas de s'arranger, le barman est là pour écouter la petite vie des clients, pas pour raconter la sienne. » Certes, il n'était barman que pour remplacer Alvin ce soir, mais le principe était là. « Et pour être honnête, la première fois qu'on a trinqué ensemble et que ma langue s'est déliée sous l'effet de l'alcool, je crois qu'une partie de moi espérait que nos routes ne se recroiseraient pas. Aujourd'hui, c'est différent. Et crois-le ou non, quand je me suis tenu éloigné de cet endroit, je t'ai presque autant regretté que cette bonne vieille bière. » En vérité Saul avait aussi la chance que Tommy se soucie assez peu de la morale des autres, tant qu'elle s'agressait pas ostensiblement sa propre manière de vivre. Il se foutait bien des infidélités de Saul parce qu'au fond cela ne regardait que lui, et qu'il semblait avoir pleinement conscience du fait que cela lui retomberait dessus un jour ou l'autre. A quoi bon faire le moindre commentaire, du coup ? « Presque ? C'est un peu léger. » L'air taquin, Tommy s'apprêtait à rajouter quelque chose lorsque Callum avait annoncé le dernier quart-d'heure avant la fermeture. Pas le dernier quart-d'heure pour Tommy et les autres employés puisqu'il fallait après chaque service nettoyer et effacer les stigmates d'une soirée de beuverie, mais pour les clients en revanche. « Allez, t'as bien le temps de me l'accorder ce verre post-fermeture, du coup ? » D'autant plus que ce verre d'eau rapidement avalé lui avait fait prendre conscience qu'il ne serait définitivement pas contre une bière.

sujet terminé.
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