Professionnellement, ma vie avait pris un nouveau tournant puisque je commençais à mettre en place ma nouvelle idée de série. Le pilote avait était un succès et si au début cela devait s’appeler ‘surf, plage et soleil’, la production avait finalement décidé que cela s’appellerait ‘surf academy’. Et j’avais eu la confirmation que bientôt ma série serait tourné et plus tard serait sur le petit écran. Je redeviendrais enfin ce que j’avais été et franchement ça ne me faisait pas de mal, j’avais tellement souffert d’être au creux de la vague au niveau inspiration. Mais bien sûr, les choses ne pouvaient pas aller bien et il y a quelques jours, Julian m’a annoncé que nous devions parlés et qu’il ne souhaitait plus se marier. J’avais redoublé d’efforts depuis cette annonce pour devenir la jeune femme parfaite à qui on ne pouvait rien refuser. Je me disais qu’il finirait pas changer d’avis, le voir filer entre mes doigts me rendait folle. C’était impossible, pas maintenant. Maintenant que je l’avais présenté devant tout le monde, maintenant qu’il avait été adopté par mes fans, que tout le monde savait qui était mon compagnon il ne pouvait pas me faire ça. Surtout que je ne comprenais pas ses raisons, oui ça n’allait pas très bien entre nous mais ça faisait des années que c’était comme ça. Et il n’avait jamais parlé d’annuler complètement le mariage. Peut être que c’était notre retour à Sydney même bref qui m’avait fait replonger dans la méchanceté sans même m’en rendre compte, je n’avais pas fait de crise pourtant j’avais l’impression. J’essayais de me calmer mais c’était dur. Ma tentative de viol y était pour beaucoup dans mon attitude et je m’en étais rendu compte en côtoyant l’un de mes figurants Alejandro qui avait un caractère bien trempé mais qui m’avait fait remarquer que je m’emportais trop vite, comme quoi même les autres personnes extérieur à mon couple souffrait de ce qui c’était passé dans ma vie. Le secret que je cachais depuis plusieurs années. Alors que j’étais au téléphone avec une ancienne actrice que je souhaitais reprendre pour mon prochain projet lorsque j’entendis plusieurs aller retour de la part de Julian. C’était bel et bien lui pas de doute, je reconnaissais le bruit de ses chaussures sur les dalles du carrelage. Alors, je raccrochais rapidement, je n’avais pas une seconde à perde, j’étais prête à tout pour le convaincre. Je vis une valise, et je compris tout de suite, essayait-il de partir ? Pour de bon ? Il allait charger sa voiture et me dire, voilà c’est terminé Lauren après toutes ces années je m’en vais. Mais non, moi je ne pouvais pas le laisser faire ça. Je lui demandais alors, même si ça n’avait pas vraiment l’air d’une question et plus d’une affirmation : « Que fais tu, tu t’en vas ? ». Il allait sans doute me répondre que je devais m’en douter vu qu’il m’en avait déjà parlé, que je devais être préparé mais je crois que j’avais fait un déni et le voir là, prêt à partir sur le pallier de la porte me faisait comme un électrochoc : « Tu peux pas partir, je te demande d’y réfléchir, encore, même si tu l’as déjà fait, Julian… Tu me dois bien ça, s’il te plait…». Pour l’instant j’étais calme mais ça n’allait certainement pas duré.
S’il y avait bien une chose qui fascinait Julian, c’était de voir à quelle vitesse des événements pouvaient se produire et bouleverser complètement la vie d’une personne. Cela lui était déjà arrivé par le passé, et ça se reproduisait encore. Tout allait vite, très vite, trop vite. A peine sorti de l’adolescence qu’on lui avait présenté Lauren. Il devait se marier avec elle sans même n’avoir jamais aimé une fois dans sa vie. A peine obtenait-il un emploi à New-York qu’il se retrouvait muté à Sydney, puis à Brisbane. A peine commençait-il à s’occuper de l’organisation du mariage qu’il rencontrait Madison avec qui il enfreint sa promesse de fidélité. A peine avait-il le temps de profiter de Madison que sa relation s’améliorait avec Lauren, au détriment de celle avec sa maîtresse. A peine savourait-il cette réconciliation que la vérité lui éclatait en pleine face : il ne voulait pas l’épouser. Pourquoi tout allait trop vite ? Pourquoi les choses se déroulaient-elles ainsi ? Pourquoi ne pouvait-il pas se contenter de ce qu’il avait, plutôt que de chercher toujours à avoir autre chose ? Voilà des questions auxquelles il ne trouverait sûrement jamais de réponse, mais qu’il ne pouvait s’empêcher de se poser. Aujourd’hui, Julian n’avait presque plus rien. Professionnellement il avait quitté ses associés et se lançait avec Eireen, il repartait de zéro sans clientèle ni rien. Et amoureusement, et bien… Il avait perdu Madison, et avait rompu avec Lauren. Il avait réfléchi durant des jours – non, des semaines – et au final il n’avait pu que constater cette triste vérité qui venait à lui : il n’épouserait pas Lauren. Il ne l’aimait pas et il ne l’aimerait probablement jamais. C’était ainsi, il fallait s’y faire. Leurs caractères n’étaient pas faits pour s’accorder, ils n’étaient pas faits pour être ensemble tout simplement. Peut-être que dans une autre vie personne ne les aurait forcés à être ensemble, peut-être qu’ils auraient quand même parcouru un bout de chemin ensemble dans de meilleures conditions, ou peut-être qu’ils seraient devenus bons amis. Mais ce n’était pas ce qui s’était passé, et l’imaginer ne servirait strictement à rien. Alors Julian était rentré un soir, et avait demandé à Lauren de le rejoindre pour qu’ils discutent. Il lui avait expliqué qu’ils ne se marieraient pas, que c’était tout bonnement impossible. Elle avait refusé de se résoudre à sa décision, et depuis elle avait redoublé d’efforts pour arranger les choses entre eux. Mais c’était peine perdue, l’avocat n’avait pas la tête à ça. Ce qu’il voulait, c’était se concentrer sur lui-même, se retrouver et faire enfin ce qu’il voulait faire sans qu’on ne lui impose le moindre choix. Bien sûr, il comprenait le désarroi de celle qui fut sa promise. Après s’être rapprochés, après avoir été présenté comme son fiancé devant le monde entier, voilà qu’il l’abandonnait. Le moment était très certainement mal choisi, mais y avait-il réellement un bon moment pour une rupture ? La mascarade devait cesser, elle durait depuis bien trop longtemps déjà. Le brun s’était fait de plus en plus rare à la villa, pour prendre du recul face à tout ça et surtout pour éviter de se retrouver seul avec Lauren. Il savait qu’elle essaierait de le convaincre, et qu’il pourrait céder devant son regard larmoyant. Alors il passa du temps à l’hôtel, le temps pour lui de trouver un appartement. Et il venait de le trouver, un grand loft à Pine Rivers. Il pourrait reprendre sa vie en main, recommencer tout à zéro. Mais pour ça il lui restait encore une dernière étape : récupérer ses affaires à la villa. Alors il y retourna un soir, il n’avait pas le choix. Il n’y avait aucun bruit, Lauren semblait être absente. Sans plus attendre, il monta à l’étage et commença à préparer ses valises. Le dessing était grand mais était rempli en grande majorité par les affaires de la rouquine, l’avocat avait bien moins d’affaires qu’elle. Il ne lui ferait pas la guerre pour les meubles ou quoique ce soit de ce genre, il avait largement les moyens de se racheter tout ça pour son nouvel appartement. Il devait juste récupérer ses vêtements, ses bijoux, ses livres, quelques objets personnels et sentimentaux en somme. Au final il se retrouvait avec deux valises remplies, et un sac. Il les descendit en bas des escaliers avant d’aller charger sa voiture garée devant la villa. C’est à ce moment là que Lauren fit son apparition, semblant sortir de nulle part. « Que fais tu, tu t’en vas ? » Il ne prit pas la parole pour lui répondre, se contentant de la regarder tristement. N’était-ce pas évident ? Et puis, il l’avait prévenue la dernière fois. Que c’était fini, et qu’il repasserait chercher ses affaires. Le moment était arrivé, elle devait s’y être préparée. Sinon… et bien, elle devrait faire avec il ne lui laissait pas le choix. « Tu peux pas partir, je te demande d’y réfléchir, encore, même si tu l’as déjà fait, Julian… Tu me dois bien ça, s’il te plait…» Plusieurs sentiments submergèrent Julian après les paroles de Lauren. D’abord de la tristesse, une infinie tristesse. Mine de rien, ils habitaient ensemble depuis si longtemps que cela lui brisait littéralement le cœur de partir définitivement. Il savait qu’en fermant la porte derrière lui, il tournerait une page de sa vie sans pouvoir revenir en arrière. Il y eut de la colère aussi, un peu. Comment ça il lui devait quelque chose ? Parce que, de la façon dont elle s’était comportée avec lui durant leur relation, elle pensait vraiment mériter quelque chose de sa part ? Il se raidit quelques secondes avant de plonger ses yeux dans les siens. « Lauren, c’est terminé. Je m'en vais. » dit-il d’une voix monotone. « Arrête de te voiler la face, s’il te plaît. Cela fait des années que cette mascarade dure, n’en as-tu pas assez ? Je pourrais y réfléchir encore pendant des heures, des jours, des semaines même ! Le résultat serait toujours le même : c’est fini. » continua-t-il sur le même ton étrangement lointain, comme si tout cela ne le touchait pas. Et il se pencha, pour attraper une première valise.
J’avais longtemps espérait qu’il ne reviendrait pas pour prendre ses affaires, qu’il reviendrait, s’assiérait sur le canapé après une longue journée, que je lui servirais son repas et que nous faisions comme si de rien n’était, comme si cette dispute de la dernière fois n’avait pas existé. Mais c’était faux, totalement faux, lorsque je revis Julian c’était bel et bien avec des valises à la main, entrain de quitter notre demeure. Je me posais alors une question ? Comment le retenir…La première chose qui me vint fut la parole, tentait de le retenir comme ça. J’avais tellement d’argument dans cette lutte qui était perdu d’avance, je ne voulais pas qu’il s’en aille, parce que je l’aimais, parce que nous allions nous marier, parce que j’avais acheté ma robe, le mariage était prêt. Et puis aussi parce que j’avais présenté Julian au grand public, tout le monde se demandait qui j’avais présenté, pourquoi je l’avais présenté maintenant…Autant de question auquel je ne pouvais pas répondre moi-même. J’avais l’impression que tout allait mieux entre nous, nous disputions moins, nous étions plus proches. J’avais même pensé à lui expliquer pour ma tentative de viol. On était plus proche, on parlait du mariage sans tension, on savait qu’on allait se marier. Il c’était résigné, il avait fait semblant. J’en étais certaine à présent puisqu’il parlait de mascarade. Forcément, oui, pour lui tout était une mascarade mais pour moi non, je l’aimais donc je serais très heureuse de rejoindre le clan Grimes, de rejoindre sa famille. Cela ne semblait plus d’actualité à présent. Et qu’allait faire mes parents, trouver un autre garçon, j’allais devenir une pauvre fille qui aura épousé le dernier de la liste parce qu’il fallait le faire, parce qu’elle ne pouvait pas trouver quelqu’un toute seule…Je me demandais ce que penserait les gens, et puis je me demandais ce que j’allais faire sans Julian. J’aimais cet homme, oui, je l’aimais vraiment et lorsque j’avais perdu l’homme que j’aimais la dernière fois j’avais fait une grave dépression. Je m’énervais, je ne voulais pas avoir cette discussion là, maintenant, c’était un peu de trop : « Une mascarade, mais putain, pour toi ça a toujours été une mascarade…Tu n’as pas le droit de dire ça Julian, faire comme si tout ce que nous avions vécu ça n’avait pas compté. Pourquoi ? Pourquoi tu fais ça ? On a vécu des bons moments, tout allait bien au départ entre nous. Ces derniers temps aussi ça allait bien… Tu as toujours fait comme si il n’y avait rien entre nous alors forcément de ton côté il n’y a jamais rien eu. Pour moi ce n’est pas une mascarade, nous ne sommes pas si différent Julian, tu le sais au fond de toi….Pourquoi me faire ça maintenant ? Autrement que pour me faire souffrir. Je t’ai présenté à tout mes fans, j’ai acheté ma robe de mariée…Qu’est ce que je vais faire de ma robe de mariée… ». C’est complètement ridicule de penser là, tout de suite et maintenant à ma robe de mariée. Ma robe de mariée c’est bien le cadet de mes soucis, je ne suis pas du genre à faire une crise pour des vêtements, pour des choses subtiles mais pourtant c’est ce à quoi je pense en premier. J’étais décidé à lui en mettre plein la tête, pour peut être qu’a un moment il réfléchisse « Mais putain tu vas partir à cause de ton égoïsme, parce que tu restes braqué sur tes premières idées, c’est pas possible d’être aussi fermé ! ». Je cherche le fight, de toute façon y a que comme ça que je vais le retenir un peu plus longtemps.
Il aurait aimé que les choses se passent autrement. Vraiment. Dans un monde idéal, il aurait eu le coup de foudre pour Lauren-Rose dès le premier regard. Il serait littéralement tombé amoureux d’elle, et tout aurait fonctionné. Il aurait trouvé un travail à New-York, ils seraient restés dans leur premier appartement. Ils se seraient mariés rapidement, et il aurait été fier de l’avoir comme femme. Peut-être qu’ils auraient déjà eu un enfant, ou deux. Il rentrerait le soir et embrasserait sa charmante femme, son adorable fille, et serait heureux d’être parmi elles. Mais ça ne s’était pas passé comme ça. Bien au contraire. Il n’avait rien ressenti pour Lauren lors de leur rencontre, ni par la suite. Juste de l’attirance, car c’était une belle femme il ne pouvait le nier. Puis de l’affection, car elle faisait des efforts et que c’était une fille bien. Malheureusement ils avaient dû déménager leur coco à New-York pour Sydney, où tout avait dérapé. Lauren s’était métamorphosée, devenant un tyran dont il n’avait jamais soupçonné l’existence. S’étaient succédés les interminables disputes, les secrets, les insultes, les mensonges, les trahisons. Non, rien ne s’était passé comme prévu. Et aujourd’hui, cette séparation venait mettre fin à cette mascarade. Car oui, aux yeux de Julian ce n’était rien de plus que ça. Une horrible mascarade, une affreuse mise en scène, une mauvaise pièce de théâtre. On lui avait demandé de jouer un rôle toute sa vie, d’abord celui du fils parfait, puis celui du gendre idéal, et enfin il aurait dû être le mari de ses rêves. Mais non, ce n’était pas possible. Il ne pouvait plus prétendre être quelqu’un qu’il n’était pas, il ne pouvait plus vivre la vie d’un autre, il ne pouvait plus faire semblant. Il savait que Lauren ne le comprenait pas, et qu’elle ne le comprendrait probablement jamais. Car elle n’avait pas vécu les choses comme lui, très vite elle était tombée amoureuse et s’était satisfaite de toute cette situation. Situation que lui n’avait jamais acceptée. On ne pouvait pas le forcer à se marier, ils étaient en 2016 et plus au Moyen Âge bordel. La rousse n’était pas d’accord avec lui, il le voyait très clairement. Son visage trahissait la colère qui la traversait, alors que son regard montrait la tristesse qu’elle tentait de voiler tant bien que mal. Il vint se placer devant lui pour faire barrage et le forcer à la confrontation. Le ton monta rapidement. Comme il l’avait deviné, elle ne comprenait pas de quelle mascarade il parlait. Bien évidemment… Elle lui demanda des explications. Pourquoi faisait-il ça ? Pourquoi s’entêtait-il à tout noircir alors qu’ils avaient vécu de bons moments ? Elle n’avait pas totalement faux, il y avait eu des moments sympas. Mais ils avaient été artificiels, créés de toute pièce par ce mariage arrangé. Sans celui-ci, peut-être ne se seraient-ils jamais rencontrés, dès lors tous les moments dont elle parlait ne se seraient jamais produits. Elle devait ouvrir les yeux et arrêter de se voiler la face. « Si, bien sûr que ça a compté Lauren. » Il n’était pas un monstre non plus, il chérissait certains de ces moments partagés à deux. Tout n’était pas à jeter, il avait passé tellement d’années en compagnie de la rousse que tout ne pouvait pas être du temps perdu. « Mais tout a été créé, inventé. Par mes parents, et les tiens. Sans eux, rien ne se serait produit. Ils se sont amusés avec nos vies, ils en ont fait une pièce de théâtre dont nous avons été les comédiens. Il est temps que le rideau tombe et qu’on sorte de nos rôles. » Il ne savait pas comment lui expliquer les choses autrement, tout était tellement clair et logique dans son esprit à lui. Parce qu’il était détaché de tout ça, son raisonnement n’était pas faussé par quelque chose d’aussi illogique que ne l’était l’amour par exemple. « Ces dernières semaines ne rattrapent pas tous ces années où nous avons été malheureux. » Rien ne pourrait les rattraper, trop de mal avait été fait. Et il ne pourrait jamais se pardonner de l’avoir trompée, tout comme il ne pouvait pas lui pardonner de l’avoir poussé dans les bras d’une autre à cause de son comportement détestable. « Parce que nos disputes ne te font pas souffrir ? Autant souffrir une dernière fois mais pour de bon cette fois, il n’y aura plus de dispute désormais. » Lui ne souffrait pas, ne souffrait plus. Il avait bien trop donné durant leur relation, beaucoup trop. « Arrête de penser aux apparences, aux futilités. Ne me parle plus de cette putain de robe. » Comment pouvait-elle penser aux fans et à sa robe dans un tel moment ? Il en entendait parler depuis des mois, depuis qu’il s’occupait de l’organisation du mariage et qu’il avait rencontré Madison. Cette robe était devenue son pire cauchemar. L’italien tenta de contourner Lauren mais celle-ci n’avait pas terminé, puisqu’elle reprit la parole avec beaucoup plus d’agressivité cette fois. « Mais putain tu vas partir à cause de ton égoïsme, parce que tu restes braqué sur tes premières idées, c’est pas possible d’être aussi fermé ! » Julian s’arrêta aussitôt et se raidit. Il tournait le dos à la rousse et resta ainsi quelques secondes. « Tu plaisantes j’espère ? » Son ton était glacial, tout comme le regard qu’il lui lança après s’être retourné. Il avait même lâché le sac qu’il tenait en main sous le coup de la surprise, puis de la fureur. « Tu me parles d’égoïsme ? A MOI ?! » C’était une blague, une énorme blague. « A moi qui fait selon le bon vouloir de mes parents, de tes parents mais aussi de TOI et ce depuis des ANNÉES ?! C’est la première fois que je prends une putain de décision en pensant à moi, et tu OSES dire que je suis égoïste ? » Il s’était approché de Lauren et son visage n’était qu’à quelques centimètres du sien. Sa respiration était saccadée, signe d’une colère sourde qui montait en lui et qu’il parvenait difficilement à maîtrise. Son regard, lui, était pour le moins menaçant. Lauren était en train de franchir une ligne, et si c’était du sang qu’elle voulait, elle allait le trouver si elle continuait. « Putain mais Lauren arrête d’être conne pour une fois ! Je ne t’aime PAS, je ne t’ai JAMAIS aimé et je ne t’aimerai JAMAIS ! Je ne suis pas fermé, ce n’est pas ma première idée, c’est juste la réalité ! Bordel, elle est où ta dignité ? Ca ne te fait rien de forcer quelqu’un à rester avec toi ? D’être avec quelqu’un qui ne t’aimera jamais juste parce que c’est ce que tes parents veulent ?! ARRÊTE ! Vies ta vie, trouves-toi quelqu’un par toi-même et pas par tes parents. Arrête de laisser les autres guider ta vie, te dire qui tu dois être. Tu peux être heureuse, mais est-ce que tu le veux ? » Julian ne comprenait pas ce qu’il se passait. Il ne savait pas s’il l’engueulait, la sermonnait ou s’il lui donnait des conseils. Il était à la fois en colère et attristé. Il ne voulait pas qu’ils se séparent ainsi, il savait au fond que Lauren était une fille bien. Il voulait l’aider à ouvrir les yeux pour qu’elle s’en sorte, pour qu’elle arrive à se trouver et à être heureuse. Il ne pouvait pas lui tourner le dos en sachant qu’elle ne s’en sortirait pas, c’était impossible. « Grandis un peu, tu n’es plus une gamine. »
J’avais beau être quelqu’un de très compréhensif, là, je ne comprenais pas ce que je faisais Julian. Enfin, en théorie je devais le comprendre mais en pratique je préférais faire comme si tout cela n’existait pas et qu’il ne mettrait jamais ses menaces à exécutions. Pourtant aujourd’hui c’est bel et bien la fin de tout, je suis entrain de le perdre et tout ce qu’il me dit, censé peut être m’apaiser ou du moins me faire réaliser me fait en vérité plus souffrir. Qu’est ce que j’ai fait moi ? Pour mériter ça ? Est-ce ma faute si je me suis fait agresser. Parfois je me dis que oui, c’est ma faute, j’avais tout pour être heureuse. Un futur mari parfait, une belle maison, de l’argent, la réussite professionnelle alors qu’il fallait que quelque chose aille briser tout ça et brise ma vie par la même occasion. Mais parfois je me disais que ça n’aurait rien changé, peut être que malgré mes efforts, même si j’étais resté la jeune femme adorable qu’il connaissait, Julian ne m’aurait pas davantage aimé. Il me parlait du fait que nous avions joués la comédie, que nous n’étions que des acteurs, que c’était une mise en scène de nos parents. Tout ça, bien sûr, ça me faisait mal. Non, pour moi tout cela ce n’était pas qu’un jeu. Bien sûr que nous avions été acclimaté à cette relation par nos géniteurs mais je n’avais jamais joué avec lui. J’avais toujours été si sincère, j’avais tout donné de moi. Tout. « Je n’étais pas en scène moi, quand je te faisais plaisir c’était sincère. Je ne jouais pas avec tes sentiments moi. Tu te rappelles la plage à New York, là aussi tu jouais ton parfait petit jeu d’acteur, pas une once de vérité dans cela ? Je comprends mieux alors, si tu jouais la comédie pourquoi tu ne voyais pas, tu ne vois rien de moi. Les acteurs aussi ont besoin de repos… ». Je parlais bien sûr de mon agression et du fait qu’il ne m’est jamais soutenue ni même questionné après un changement pourtant radicale. J’étais devenue une autre personne pratiquement et il pensait surement que c’était la météo qui m’avait fait devenir exécrable. Il essayait de me donner des exemples, me raisonner mais malheureusement j’avais des arguments à tout que ça lui plaise ou pas. « Malheureux, c’était donc si terrible de vivre en ma compagnie. Pourquoi tu te montres si odieux ? Odieux, c’est le mot oui, c’est toujours comme ça que je t’ai vu. Odieux et déçu de ta propre existence, sans jamais rien n’y faire. Faire un métier que tu ne veux pas, pourquoi ? Tu es d’une faiblesse…Dans tous les domaines… ». Il m’attaque et j’essaie d’en faire de même, oui, je l’ai toujours aimé et j’ai toujours voulu ce mariage mais si c’était différent pour lui et bien il n’avait qu’à refuser dès le départ et pas laisser trainer pendant 5 longues années. Il avait quand même eu le temps d’y réfléchir. Je l’avais ensuite traité d’égoiste et bien sûr, ça n’allait pas calmer les choses : « Mais oui, oui, tu es un putain d’égoïste. Tu ne penses qu’a toi, tu ne vois que toi, pas capable de voir que les choses allaient mal, pas savoir pourquoi, parce que tu ne regardais jamais plus loin que le bout de ton nez. Ton petit nez qui ne voyait rien d’autre que la jalouse, malade, qui avait besoin d’une présence, qui piquait des crises quand tu rentrais tard le soir. Et jamais tu t’es demandé ‘mince, qu’est ce qui lui prend’. Je faisais des crises de larmes et des angoisses et tout ce que tu trouvais à dire c’est que j’étais dérangé. Que je révélais ce que j’étais au fond de moi. Pourquoi me prendre pour un monstre ? Quelqu’un que je n’étais pas ? Tu me détestes tant que ça ? Pourquoi raconter à ton frère et ta sœur que j’étais détestable, que je jouais avec les apparences…Je n’ai jamais fait ça… ». Plus tard au lieu de continuer à me rassurer, il préférait m’en mettre plein la tête, me dire qu’il ne m’aimerait jamais, que jamais il ne m’avait aimé. Je l’avais compris, je crois, enfin je le comprenais maintenant en tout cas j’avais plus d’espoir. Il m’avait fait passer pour un monstre et je crois que finalement il avait raison. Je ne suis pas une victime pourtant j’essaie de me battre et je tais mon secret pour que les autres me voient pareilles qu’avant, identique. J’ai changé pourtant. « Ce n’est pas ce que mes parents voulaient, je t’aime, moi, je suis désolé d’être tombé amoureuse de toi, crois tu que j’ai contrôlé ça…Non j’ai découvert un beau jeune homme qui semblait être gentil et j’ai tout de suite eu des sentiments pour toi. Je ne suis pas indigne, pourquoi devrais-je être indigne des sentiments que j’ai pour toi, Julian, on ne peut pas empêcher un cœur d’aimer…Tu dis vraiment n’importe quoi… ». Oui pour moi tout cela n’était pas uniquement un complot organisé par nos parents mais si ça peut le rassurer et lui donner bonne conscience et bien tant mieux. Il parle ensuite de me trouver quelqu’un, non mais alors, ça c’est la meilleure je crois. Il veut peut être créé une agence matrimoniale et que je sois sa première cliente non ? Je crois que je suis entrain vraiment de sortir de mes gongs : « Je peux plus être heureuse, pas avec un autre, un pot brisé on peut le recoller mais on voit qu’il a été cassé… ». De mieux en mieux, je suis entrain de me comparer à un pot. Si je parle de tout ça une fois de plus c’est par rapport à ma tentative de viol, de tout ce qu’on m’a fait…Des cauchemars, des crises, je ne souhaite à personne de vivre ça. Julian m’a connu avant mais quelqu’un qui ne me connait pas partira très vite, dès la première crise je sais, je n’ai pas envie de faire ma vie avec quelqu’un d’autre que lui. C’est facile, si facile de dire ça quand on quitte quelqu’un. « Tu devrais partir parce que là, je vais vraiment partir en crise…Vraiment… ». C’est toujours la même chose : il fait nuit, il me contrarie, et je revois toute la scène. Lui qui ne rentre pas du travail, lui qui m’envoit un message, moi qui lui répond, qui hésite à sortir, lui qui me dit de sortir pour me faire des amis, d’aller dans un ou deux bars. Alors je sors, et comme je ne connais personne, je me fais belle pour que les gens aient une bonne impression de moi. Je prends ma voiture, il m’envoi un message me disant qu’il rentrera tard, qu’il est très occupé. Je vais dans un quartier que je ne connais pas, car je ne connais rien ni personne ici, je rentre ensuite dans un bar, le premier venu, c’est un bar miteux, les gens ne sont pas très aimables, étranges. Je lui envoie un message. Il ne me répond pas. Je lui renvoie un message. Il ne me répond pas. Un mec commence à me coller. Un mec commence à me harceler. Un mec commence à insister. Il ne répond toujours pas. Un mec commence à vouloir aller plus loin. Je ne veux pas. Je lui renvoie un message. Il ne répond pas, il ne répond pas, il ne répond. Je fuis, le mec me suit. Il ne me répond pas. Je lui dit que je ne suis pas intéressé, il insiste. Je l’apelle, je veux parler à Julian, il ne répond pas. Mon portable glisse de mon sac. Le mec commence à se frotter à moi, il se frotte à moi. Mes larmes coulent sur mes joues : « Casses-toi ! Casses-toi ! ».
Le souffle court une fois sa tirade terminée, Julian dévisageait Lauren. Cette femme avait le don de le mettre hors de lui. Et on dirait qu’elle le faisait exprès, de le pousse à bout, de faire exploser sa colère. L’italien n’était pas de bas quelqu’un de très patient ni de très calme, il s’emportait plus ou moins facilement et Madison en avait été témoin elle aussi. Mais avec Laure c’était complètement différent. Elle parvenait vraiment à faire ressortir le pire de lui, à rendre sa rage physiquement réelle. Son cœur battait la chamade, son regard était noir, son estomac se nouait. Jamais il n’avait été dans un tel état auparavant, c’était sûrement la plus grosse dispute de leur histoire. Et des disputes, il y en avait un bon nombre. C’est dire l’intensité de celle-ci. « Je n’étais pas en scène moi, quand je te faisais plaisir c’était sincère. Je ne jouais pas avec tes sentiments moi. Tu te rappelles la plage à New York, là aussi tu jouais ton parfait petit jeu d’acteur, pas une once de vérité dans cela ? Je comprends mieux alors, si tu jouais la comédie pourquoi tu ne voyais pas, tu ne vois rien de moi. Les acteurs aussi ont besoin de repos… » Et voilà qu’elle feintait l’innocence, ressortant son rôle d’éternelle victime. Bien sûr que si, il y avait eu des bons moments entre eux. De vrais moments d’affections. Il l’avait déjà dit et même répété, combien de fois voulait-elle l’entendre ? Les bons moments qu’ils avaient vécus se comptaient sur les doigts de la main, ça ne pesait pas bien lourd dans la balance à côté de plusieurs années de disputes et déceptions en tous genres. Julian soupira bruyamment, pour lui faire comprendre qu’il n’était pas d’accord avec elle sans toutefois prendre la parole pour lui répondre. Il n’avait rien à dire de plus, si elle voulait continuer de se bercer d’illusions alors soit, il n’allait pas passer sa vie à la ramener dans le monde réel. Celui où il rentrait le plus tard possible durant quatre longues années pour passer le moins de temps possible avec elle. Celui où elle lui faisait passer un interrogatoire presque chaque soir, celui où ses crises de jalousie étaient quasi-quotidiennes. Celui où l’alcool avait été un allié, un refuge pour lui donner du courage et lui faire oublier sa misérable existence. Non, tout ça elle ne le voyait pas ou elle faisait semblant de ne pas le voir. Tout ce qu’elle voyait, c’était une après-midi sur la plage. Une après-midi heureuse au milieu d’une vie en enfer, elle avait le sens de la proportionnalité. « Malheureux, c’était donc si terrible de vivre en ma compagnie. Pourquoi tu te montres si odieux ? Odieux, c’est le mot oui, c’est toujours comme ça que je t’ai vu. Odieux et déçu de ta propre existence, sans jamais rien n’y faire. Faire un métier que tu ne veux pas, pourquoi ? Tu es d’une faiblesse…Dans tous les domaines… » Alors là, elle dépassait les bornes. Littéralement. L’espèce d’une seconde, il eut envie de la gifler. Bien sûr il ne le fit pas, mais l’idée avait traversé son esprit. Pourquoi ? Parce qu’elle lui manquait de respect ? Ou parce qu’il y avait une part de vérité dans ses propos ? Il connaissait très bien la réponse. « Tu n’as pas idée à quel point c’est horrible de vivre avec toi. » siffla-t-il entre ses dents. Ce n’était pas totalement vrai, mais après ce qu’elle venait de dire il n’avait qu’une envie : lui faire le plus mal possible. « Si tu me vois comme, si je suis si odieux, si faible, pourquoi tiens-tu tellement à rester avec moi ? Hein ?! T’es vraiment malade, fais-toi soigner. » Et une partie de lui le pensait réellement. Si elle n’avait qu’une estime aussi basse de lui, pourquoi se battait-elle pour le garder ? Ne serait-elle pas mieux sans lui ? Tout cela n’avait aucun sens, absolument aucun. La rousse ne dévia pas de sa route et continua ses reproches, appuyant là où ça faisait mal et mettant les défauts de l’avocat au premier plan. Il était égoïste, ne voyait pas plus loin que sa petite personne, n’avait jamais cherché à savoir pourquoi elle avait changé de comportement et pourquoi elle lui faisait subir toutes ces crises. Elle n’avait pas tord, il n’avait jamais remis en question son comportement. Il avait tout de suite pensé que, loin de leurs parents, elle montrait enfin son vrai visage, sa vraie nature. Pourquoi avait-ce été sa première idée et l’explication la plus logique à ses yeux ? A cet instant il ne trouvait pas de réponse à cette question. Absolument aucune, rien du tout. « T’es une hystérique, voilà pourquoi. » dit-il sans se démonter pour ne pas qu’elle remarque qu’il était atteint par ce qu’elle disait. Il se posait de plus en plus de questions. « Loin de New-York, tu as décidé de me montrer qui tu étais. Tu pensais que jamais je ne m’opposerais à toi ou à nos parents. Tu pensais pouvoir tout obtenir de moi, car c’est ce que tu es : une sangsue matérialiste. » Il ne savait pas d’où il le sortait ça mais ça n’avait plus aucune importance, dans ce jeu d’insultes le but était d’en sortir le plus possible, fondées ou non ce n’était pas la question. « Tu ne te fies qu’aux apparences et à ce que les gens disent. Tu t’en fous de mon bonheur ou de ce que je pense, tant que de l’extérieur tout le monde pense que tu mènes une vie parfaite. » Elle ne pouvait pas le contredire sur ce point, ils avaient parfaitement joué la comédie à Sydney. Il savait de quoi elle était capable pour sauver les apparences, elle le lui avait démontré encore ce soir en parlant de sa robe et de ce que son public dirait. Mais Lauren n’était pas convaincue. Elle lui expliqua qu’elle était tombée amoureuse, que ça ne se contrôlait pas, qu’elle ne l’avait pas décidé. Il haussa des épaules, désintéressé. Il était bien au courant de ça, elle le lui avait déjà dit. Mais comme elle le disait si bien : ça ne se contrôle pas. Il n’avait pas décidé de ne pas l’aimer non plus, mais il n’arrivait pas à développer des sentiments amoureux envers elle, c’était comme ça et elle devait l’accepter. A titre de comparaison, il était bien plus attaché à Madison en bien moins de temps. Il ne pouvait pas décider pour son cœur, elle venait de l’admettre elle-même. Alors pourquoi ne comprenait-elle pas qu’il ne l’aimait pas et qu’il ne pouvait plus se forcer ? « Je peux plus être heureuse, pas avec un autre, un pot brisé on peut le recoller mais on voit qu’il a été cassé… » Julian fronça des sourcils. Parlait-elle de leur rupture ou d’autre chose ? A chaque fois qu’il prenait la parole, il avait l’impression qu’elle disséminait des indices pour lui parler d’un autre événement dont il n’était pas au courant. Mais il n’était pas sûr, alors il ne préféra rien dire. Elle devait sûrement en rajouter une couche, pour faire son intéressant et essayer de le retenir part tous les moyens. « Arrête ton cinéma. Le rideau est tombé, tu n'as plus besoin de jouer la comédie. » asséna-t-il finalement, mauvais. « Tu devrais partir parce que là, je vais vraiment partir en crise…Vraiment… » Sans un mot, il attrapa son sac qui se trouvait à ses pieds et qu’il avait lâché au début de leur échange. Il n’était pas sûr que partir en la laissant dans cet état était une bonne idée, mais d’un autre côté il était toujours fou de rage et ne se voyait pas la réconforter ou même la calmer. C’était une grande fille, elle se débrouillerait toute seule. L’italien resta immobile quelques secondes avant de tourner les talons et de se diriger vers la sortie. Mais il fut coupé dans son élan. « Casses-toi ! Casses-toi ! » Il se retourna aussitôt et fixa Lauren. La jeune femme le regardait mais sans le regarder. C’était étrange, son regard était vague. Parlait-elle à lui ? Elle ne donnait pas cette impression… « Lauren ? » tenta-t-il. Aucune réponse. Il y avait quelque chose qui ne tournait pas rond, pas rond du tout. Il hésita plusieurs secondes. Devait-il lui parler ? Mais pourquoi faire ? Pour dire quoi ? Il n’avait pas réussi en cinq ans, ce n’était pas maintenant que ça allait changer. De toute façon, il n’était pas dans le bon état d’esprit, et elle sûrement non plus. Il posa sa main sur la clenche de la porte. Il voulut dire quelque chose mais aucun mot ne sortit. Même pas « adieu ». Rien, il ne prononça aucun mot. Alors il sortit silencieusement, et marcha jusqu’à sa voiture sans se retourner. Puis il partit pour commencer une nouvelle vie. Enfin, c’est ce qu’il croyait.