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 the element of surprise (hannah)

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Message(#)the element of surprise (hannah) EmptyDim 17 Juil 2016 - 2:57



there’s a set of rickety stairs, in between my heart and my head. and there ain’t much that ever bothers going up them.

(☆☆☆)


Quand sa femme lui avait proposé de faire quelques courses en compagnie de leur fils de trois ans pendant qu'elle emmènerait Caleb et le bébé chez le médecin, Saul avait sans doute légèrement surestimé la bonne volonté que mettrait son fils à faire cette promenade à deux. Car tandis qu'ils n'avaient pas quitté la maison depuis plus de vingt minutes, le garçonnet s'épuisait déjà à ralentir son père, qui sans être particulièrement pressé d'aller acheter quelques bricoles ne comptait pas non plus dormir sur ce trottoir. Eliott rechignait à avancer, hurlant qu'il ne voulait pas marcher, et dans ces moments-là Saul regrettait toujours que sa femme ne soit pas là pour élever la voix. Car aussi surprenant soit-ce lorsqu'on lui connaissait une rigueur implacable dans le cadre de son travail, Saul n'avait jamais été un père particulièrement autoritaire et était chaque fois plus mal à l'aise qu'autre chose à l'idée d'enguirlander ses enfants. Elsie avait un caractère souvent plus affirmé que le sien, un caractère auquel il évitait parfois lui-même de se confronter, si bien qu'ici Eliott semblait parfaitement conscient qu'en l'absence de sa mère, il était libre de s'égosiller sans craindre un sermon aussi virulent que d'habitude. « Eliott, je t'avais prévenu que si on ne prenait pas la poussette, tu devrais marcher. C'est toi qui l'as voulu, je te signale. » Et ça n'était certainement pas lui qui aurait insisté pour s'encombrer d'une poussette infernale qu'il aurait mis une éternité à ouvrir et de laquelle Eliott l'aurait de toute façon supplié de descendre au bout de vingt mètres. « Eliott. » Saul insista par la suite, après s'être agenouillé face à son fils, qui profita bientôt du fait qu'il se soit mis à sa hauteur pour encercler son cou de ses petits bras. Incapable de le reposer par terre et conscient qu'il n'obtiendrait de toute façon pas gain de cause, il se releva alors, les lèvres bordées d'un sourire attendri, tandis qu'il garda Eliott contre lui et déposa un baiser sur son front. « Tu as gagné, mais tu ne diras pas à Maman que j'ai cédé, on est d'accord ? » Parce qu'Elsie s'empresserait probablement de lui conseiller de s'affermir face aux caprices de leur cadet, et que ce genre de discussions, en plus d'avoir déjà eu lieu, jetteraient un froid sur le repas du soir avant de les mener à une réconciliation qui n'aurait pas lieu avant l'heure du coucher. Et quitte à se rapprocher de sa femme dans leur lit conjugal, Saul aimait autant que ce soit dans d'autres circonstances. Reprenant finalement sa route, son fils toujours dans les bras, il s'arrêta instinctivement devant une vitrine lorsqu'un reflet attira son attention. Se retournant, il constata que celle qu'il avait cru apercevoir l'espace d'un instant s'était déjà éloignée, ainsi c'est d'un pas un peu plus pressé qu'il entreprit de la rattraper, finissant par arriver à sa hauteur et par déposer sa main libre - celle qui ne retenait pas Eliott - sur son épaule. « Hannah ? » La jeune femme lui fit face, et il reconnut effectivement la comédienne, dont il ne pourrait pas oublier les traits même avec toute la meilleure volonté du monde. Car lorsqu'il avait vu jouer quelqu'un, ne serait-ce qu'une seule fois, il était rare que son inconscient oublie sa prestation, mais aussi son visage. Et celui d'Hannah l'avait d'autant plus marqué qu'ils avaient été amenés à se revoir, depuis leur rencontre à New York. « Bonjour. » Saul ne pouvait à cet instant cacher être agréablement surpris de tomber sur une connaissance, qui plus est quelqu'un qui partageait sa passion pour le théâtre et qu'il espérait toujours secrètement convaincre de se joindre à lui sur ses projets futurs, c'est pourquoi son ton se faisait plus enthousiaste. « Tu as l'air chargée, tu veux un coup de main ? » Il avait ajouté, en remarquant les quelques sacs que portait Hannah, et en s'approchant d'un pas ou deux. « Quoi qu'il nous faudra échanger, et je suis pas certain que tu gagnes au change ... » Dans un rire, il avait désigné son fils, qui à son âge commençait à peser son poids et n'était plus porté avec la même facilité que sa petite sœur. Il y avait de fortes chances pour qu'Hannah préfère garder ses sacs, quoi qu'ils contiennent, bien que ça ne l'empêche pas de reprendre avec humour. « Il est propre, si ça peut te rassurer. » Il ignorait quel rapport Hannah était susceptible d'avoir avec les enfants, mais il savait - pour être habitué aux manières de son demi-frère - que ceux qui n'en avaient pas se faisaient souvent un monde de l'hygiène des plus petits, ce dont il parvenait toujours à s'amuser, étant après tout passé par là lui aussi à une époque qui lui semblait appartenir à une autre vie.
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Message(#)the element of surprise (hannah) EmptyJeu 21 Juil 2016 - 1:36

Si Hannah n’aimait pas les clichés, probablement comme tous les artistes, elle devait admettre qu’elle se pliait bien à quelques clichés et surtout celui qui concernait les femmes et le shopping. La brune ne s’en était jamais cachée et il était rare de la voir porter la mêmes robe deux fois, n’ayant jamais eu de mère, elle avait appris la différence toute seule entre une bonne tenue de soirée pour une femme de son rang et le genre de tenue qui était faite pour provoquer, charmer et séduire. Elle avait surtout compris que la mode n’était rien d’autre qu’un autre art et qu’il était bon de dépenser son argent juste pour quelque chose qu'on allait porter qu'une seule fois. Là encore, ce n’était qu’un jeu, un costume de plus, alors quand on pensait de cette manière, qu’on imaginait quel rôle on allait jouer ce jour là, il fallait définitivement plus de tenues et plus d’accessoires. Et la plupart des choses étaient gratuites pour Hannah, les créateurs se pressaient souvent pour avoir son avis ou pour avoir un peu plus de publicité parce qu’elle portait telle ou telle chose. Les apparences faisaient tout… vraiment. Hannah avait déjà neuf sacs au total, la brune ayant déjà craqué pour trois paires de chaussures différentes, une robe et une proche en diamants. Hannah était superficielle oui, ça lui prenait parfois, et dès que des diamants étaient concernés de près ou de loin, la trentenaire n’avait plus aucun contrôle. Elle riait presque de sa propre bêtise, les bras chargés, sa nouvelle paire de lunettes de soleil perdue dans ses mèches brunes. Il ne lui restait plus qu’à rentrer et à trouver une occasion pour sa nouvelle tenue, elle passait de plus en plus de temps, en dehors des répétitions, à l’Electric Playground, l’endroit le plus branché de Brisbane, enfin seulement parce qu’Hannah y mettait les pieds depuis quelques semaines, elle en était persuadée. Peut-être qu’elle pouvait convaincre Rosalie de se joindre à elle ? Avoir une femme mariée comme principale amie pouvait s’avérer affreusement ennuyeux parfois. Hannah en était là de ses réflexions, à peser le pour et le contre avec son téléphone en main quand on l’interpella. Elle se retourna quasiment certaine d’avoir à faire à un photographe, seulement pour froncer les sourcils. Elle connaissait ce visage, elle qui se vantait toujours d’avoir une bonne mémoire, après tout, elle était actrice, elle ne pouvait pas avoir oublié quelqu’un rencontré sur les planches de sa ville natale. « Saul ? …. Saul Masterson... mon dieu ça fait une éternité, New York pas vrai ? » La brune posait la question alors qu’elle connaissait la réponse, Hannah pouvait se revoir avec quelques années et beaucoup moins d’expérience qu’aujourd’hui, elle en avait fait du chemin et… Saul aussi. Le regard d’Hannah passa de Saul à… son fils ? Très probablement, pendant quelques secondes avant qu’elle ne reprenne la parole. « Et merci pas besoin d'aide, tu devrais savoir que l'un des plaisir du shopping c'est de pouvoir se balader avec autant de sac. » Un proverbe qu’elle venait d’inventer ? Probablement mais elle était quasiment certaine que personne ne lui en voudrait. Préférant briser la glace, elle se tourna de nouveau vers le petit garçon qui semblait avoir élu domicile dans les bras de Saul. « Et qui est ce charmant jeune homme ? … Je suis Hannah, ravie de te rencontrer. » Contrairement à ce qu’on pouvait penser, la brune n’avait aucun problème avec les enfants, oui, ils étaient bruyants, un peu turbulents mais ils tenaient forcément ça de leurs parents, non ? Et puis, eux au moins étaient incapables de mentir et n’avaient pas de filtre, une chose qu’Hannah savait apprécier. « Je ne pensais pas te revoir à Brisbane, et encore moins avec des enfants… si j’étais médisante je dirais que tu as pris un coup de vieux, mais tu me connais, ce n’est pas mon genre. » Hannah eut un léger rire et toujours aussi curieuse, elle enchaina : « J’ai du temps devant moi… qui est partant pour une glace ? » Et très sincèrement, elle posait plus la question au fils qu’au père.
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Message(#)the element of surprise (hannah) EmptyVen 22 Juil 2016 - 21:05

Si bien des personnes prétendaient avoir une mémoire sélective, le plus souvent par commodité, celle de Saul ne faisait en revanche aucune distinction entre les heureux moments qu'il avait plaisir à se remémorer et les événements plus déplaisants qu'il occulterait volontiers. Il se souvenait ainsi avec une précision égale de sa rencontre avec Elsie et de son premier chagrin d'amour, tout comme il se remémorait parfaitement la naissance de son premier enfant et le jour où on lui avait annoncé que sa mère souffrait d'une maladie dégénérative qui lui coûterait quant à elle jusqu'à ses derniers souvenirs. Et s'il rendait grâce au ciel d'être ainsi à l'abri d'oublis fâcheux tels que la date de son anniversaire de mariage ou le jour de la semaine où il devait conduire Caleb à ses cours d’aïkido, Saul se félicitait d'autant plus d'avoir une excellente mémoire lorsque celle-ci lui rendait service dans le cadre de son travail. Et l'un des avantages au fait de pouvoir se rappeler de tout ou presque, c'était d'être en mesure d'associer un visage à une prestation artistique, qu'il y ait assisté deux jours plus tôt ou plusieurs années auparavant. Saul n'oubliait jamais une interprétation théâtrale, tout comme il n'oubliait jamais les accords d'une mélodie ou une jolie voix. Et ici, tandis qu'il avait cru apercevoir un visage familier à travers le reflet de la vitrine devant laquelle il s'était arrêté, c'est sans hésiter qu'il s'était lancé à la poursuite de la jeune femme qu'il lui avait semblé reconnaître, et sans la moindre surprise qu'il s'était par la suite retrouvé face à elle. Hannah Siede, comédienne de talent découverte quelques années plus trop, avait ce petit quelque chose de particulièrement mémorable qui l'avait instantanément trahie. La jeune femme semblait elle aussi se rappeler de lui, une idée qui ne manqua pas de le flatter tandis qu'il acquiesça pour confirmer son hypothèse avant d'ajouter, le sourire aux lèvres. « New York, oui. J'avais assisté à l'une de tes représentations et nous avions discuté après le spectacle. Je t'avais alors longuement complimentée, et je crois que ça avait vexé quelques unes de tes collègues. » Et bien qu'il s'en amuse ici, c'était une chose qu'il faisait fréquemment, aller à la rencontre de comédiens dont il avait apprécié le travail, qu'ils aient joué l'une de ses pièces ou aient simplement su le captiver d'un bout à l'autre du spectacle. Remarquant en tout cas qu'Hannah était quelques peu chargée, il se proposa de lui porter ses sacs à condition que celle-ci soit prête à échanger avec ce que lui portait jusqu'ici, à savoir son fils, qui n'avait pas quitté ses bras depuis tout à l'heure. Hannah déclina toutefois sa proposition et Saul s'amusa brièvement de sa remarque. « Tu sais, pour moi le shopping se limite presque exclusivement à remplir un cadis de courses, alors j'ai sûrement une vision un peu moins glamour de la chose. » Il était effectivement rare qu'on le surprenne dans un magasin de haut standing, n'ayant que trop peu de temps libre pour choisir de le passer dans des boutiques hors de prix. Il aurait pourtant les moyens de rafraîchir une garde-robe qui s'actualisait surtout grâce aux « prêts » de son demi-frère, mais ça n'était définitivement pas dans ses priorités. « C'est Eliott, mon plus jeune fils. Son frère et sa sœur sont chez le médecin avec leur mère, alors on a décidé de se balader un peu tous les deux. » Saul reprit ensuite, à la question d'Hannah, avant que sa main libre ne se saisisse de celle de son fils et l'agite lentement. « Tu dis bonjour, Eliott ? » L'enfant ne perdit pas une minute pour enfouir son visage dans le cou de son père avant de marmonner un « Bon-jour » légèrement inaudible, que Saul accueillit avec un nouveau sourire. « Il fait son timide devant toi, mais crois-moi il est plus loquace quand il s'agit de contester mes ordres. » Ça Eliott le lui avait prouvé à de nombreuses reprises, et pas plus tard que tout à l'heure, notamment, lorsqu'il avait rechigné à marcher tout seul et que son père avait du se faire une raison. Hannah parvint en tout cas à l'amuser de nouveau à la façon dont elle reprit bientôt la parole. « Et je peux savoir quel genre d'homme tu t'attendais à retrouver ? » Il la testait, mutin, curieux de savoir ce qu'elle aurait à répondre, puisqu'elle ne semblait pas s'attendre à ce qu'il soit aujourd'hui un père de famille comme les autres. La jeune femme enchaîna quant à elle avec une proposition qui eut le mérite d'attirer toute l'attention d'Eliott, qui se redressa si brusquement que Saul crut un instant qu'il se jetterait hors de son étreinte. « Moi, moi ! Je veux une glace ! » Amusé mais néanmoins gêné chaque fois qu'il prenait à Eliott l'envie d'être malpoli en public, Saul ne tarda pas à corriger son fils, cette fois en s'efforçant de donner à ses propos un tant soit peu d'impact. « On dit « s'il te plaît » lorsqu'on demande quelque chose, Eliott, on te l'a déjà répété cent fois. » Et ça lui tenait d'autant plus à cœur qu'il ne tenait pas forcément à ce qu'une femme comme Hannah, qu'il avait connu par le biais de son boulot et pour le talent de qui il avait une certaine admiration, le prenne pour un père démissionnaire qui se ficherait de faire mauvaise impression. Se penchant toutefois vers la jeune femme, il reprit. « Entre nous, tu es bien sûre de vouloir te lancer là-dedans ? Parce que lui proposer une glace, c'est le meilleur moyen pour qu'il fasse de toi sa meilleure amie et après ça je ne peux pas te promettre qu'il te laissera repartir. » Parce qu'Eliott savait où étaient ses intérêts et que chaque fois que quelqu'un lui résistait, il savait généralement comment s'y prendre pour s'attirer les faveurs d'une autre personne. Ça avait marché sur lui toutes les fois où sa femme avait fait bloc face aux caprices de leur cadet, et ici Eliott semblait bien conscient que sans l'intervention d'Hannah, il n'aurait jamais été question de la moindre glace.
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Message(#)the element of surprise (hannah) EmptySam 30 Juil 2016 - 1:29

« Je n'oublie jamais un homme qui me fait des compliments crois-moi. » répondit simplement Hannah, un fin sourire sur les lèvres. La brune était sincère, elle aurait aussi pu dire à Saul qu'elle n'oubliait surtout pas les personnes qu'elle considérait comme talentueuse et qu'elle avait envie de voir évoluer. La jeune femme n'était pas du genre à faire des compliments, en général elle les recevait, pas l'inverse. Ce qui en disait beaucoup sur son propre caractèr d'ailleurs... Mais Hannah le pensait réellement, le milieu des arts de la scène était tellement petit et fermé et intime dans un sens, qu'Hannah, comme beaucoup d'ailleurs, le considérait comme une véritable famille. Et comme dans toute bonne famille qui se respectait, il y avait toujours les frères et soeurs qu'on préférait éviter parce qu'on savait qu'on allait se prendre la tête avec eux pour rien, et ceux au contraire, qu'on avait hâte de revoir, pour rattraper le temps perdu et faire les quatre cent coups. Saul entrait dans la deuxième catégorie, sinon Hannah se serait contentée de passer son chemin sans lui parler, et rien qu'en le voyant, Hannah avait envie de lui raconter toutes les pièces dans lesquelles elle avait jouée depuis leur dernière rencontre et tous les autres metteurs en scène qu'elle avait côtoyés. Elle n'était plus juste une débutante maintenant, pas de doute là dessus. Cependant, l'attention de la brune s'était tournée, vers Eliott et son sourire s'agrandit quand le garçon se manifesta enfin quand elle lui parla de glace. «Eh bien ravie de te rencontrer Eliott. » Les enfants étaient tellement facile à impressionner, se dit aussitôt la comédienne. Comme ça être parent était si simple mais Hannah savait que c'était loin de l'être. Elle n'avait sûrement que la version la plus enjouée du petit garçon, Saul et sa femme devaient avoir les crises de colères et les autres moments joyeux des journées d'Eliott. Pas de doute qu'Hannah n'aurait pas d'enfant avant... très longtemps. Jamais, d'ailleurs. Elle roula des yeux à la remarque de Saul. « Mais qui a dit que ça me dérangeait d'être la meilleure amie d'un aussi charmant jeune homme... » Ce n'était pas comme si elle avait d'autres plans pour la journée, sa carte de crédit et son compte en banque de manière général pouvaient se reposer quelques heures de plus. Et en plus, revoir Saul avait piqué sa curiosité et sa créativité, pas de doute qu'elle ne le laisserait pas repartir avant d'échanger son numéro de téléphone avec le metteur en scène. « Allez c'est moi qui offre. » Pour conclure le débat, Hannah ouvrit la marche, guidant le père et le fils dans un café dans lequel elle avait habitude de se rendre avec son amie Rosalie. L'établissement se trouvait à quelques pas d'ailleurs et Hannah tint la porte ouverte à Saul et à Eliott, rassurant aussitot le père de famille. « J'insiste prend tout ce que tu veux. » déclara t-elle avant qu'on les guide à une table. Peut-être que Saul avait en tête un cadre un peu plus détendu et moins huppé que l'endroit où Hannah les avait emméné, mais pour la Siede c'était normal qu'on lui demande si elle désirait commencer par un verre d'eau minérale ou pas. Oui, c'était sans doute triste à dire, Hannah était capable de jouer comme personne, mais dans la vraie vie elle était un peu snob et ça, ce n'était absolument pas un role qu'elle aurait voulu laisser tomber. « Alors ça fait depuis combien de temps que tu es à Brisbane et question encore plus importante, sur quoi est-ce que tu travailles en ce moment ? » demanda la brune au moment où on leur apportait la carte. « Oui je veux tout savoir. Avec les détails et tout bien entendu.»
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Message(#)the element of surprise (hannah) EmptyDim 31 Juil 2016 - 18:47

Si bien des artistes l'avaient marqué au terme des nombreuses représentations auxquelles il avait assisté ces dernières années, Hannah était incontestablement l'une de ceux dont il avait gardé le souvenir le plus intact, précieux, et qui encore aujourd'hui savaient lui re-procurer ses sensations d'antan simplement en se tenant près de lui. A la remarque de la brune, c'est alors un fin sourire qu'il esquissa. « Même alors qu'ils doivent être beaucoup plus nombreux que les autres ? » Les « autres », à savoir ceux qui ne lui avaient jamais glissé un compliment à l'oreille, car s'il se fiait à son expérience du milieu et à la fougue que bien des hommes avaient mise à la flatter outrageusement le soir où lui s'était contenté de lui souffler quelques mots spontanés, ces hommes-là n'étaient pas nombreux. « Je suis plus avare en compliments qu'il y paraît. » Autrement dit, tout ce qu'il avait pu lui dire ce fameux soir était sincère. Parce qu'il pouvait sembler facile d'obtenir de lui des paroles bienveillantes, pour autant il réservait ses discours les plus élogieux aux quelques artistes qui parvenaient à le toucher comme nuls autres, dans un savant mélange de passion et de contrôle, d'intensité et de subtilité. Il ne complimentait jamais ni pour faire plaisir, ni pour rassurer. Il faisait la distinction entre des mots soufflés à l'oreille d'un comédien en proie au doute, à qui on témoignait toute sa confiance, et l'éloge réservée aux prodiges qui avaient su lui délivrer la performance de leur vie, comme s'ils incarnaient leur personnage pour la dernière fois. Hannah y était parvenue, et c'était en cela que tout chez elle lui était si mémorable. Cette dernière, en tout cas, ne sembla guère impressionnée face au tempérament d’Eliott, qui mimait une timidité face à laquelle son père n'était pas dupe. La suite lui donna d'ailleurs raison après que la jeune femme ait suggéré l'idée de lui offrir une glace, lorsque le garçonnet manqua de chuter de ses bras au moment de manifester son enthousiasme. « Je ne suis pas certain que tu tiendrais le même discours si je te le laissais toute l'après-midi, mais on peut toujours faire un essai. » Saul s'amusa en tout cas, dans un sourire plus prononcé, songeant à ce moment-là qu'Hannah avait eu de la chance de ne pas croiser leur route dix minutes plus tôt, sans quoi elle aurait assisté aux caprices d'Eliott et aurait probablement revu son jugement. La jeune femme entreprit par la suite de les conduire jusqu'à un café situé non loin de là où ils se trouvaient, et si cette initiative ne fut pas pour déplaire à Saul – qui commençait à fatiguer depuis qu’Eliott ne quittait plus ses bras – c'est bientôt une légère surprise qu'il manifesta au moment d'arriver sur place. « J'avoue que ça n'est pas vraiment le cadre que j'avais à l'esprit lorsque tu as parlé d'une glace. » Il énonça alors, d'un ton qui se voulait sans doute un peu taquin, avant qu'Hannah ne reprenne la parole. « Je prendrai simplement un café. » Et asseyant Eliott avant de prendre place près de son fils, il dévisagea la brune un court instant, avant d'ajouter. « Mais il n'y a aucune raison pour que tu nous invites. Si Eliott veut quelque chose, il n'a qu'à me le demander, tu n'as pas à te sentir obligée de le lui offrir. » Il croyait comprendre que la jeune femme voulait faire plaisir au jeune garçon, mais Saul évitait toujours autant qu'il le pouvait d'avoir des dettes, quelle que soit leur valeur et leur nature. Et ici, ça le gênerait particulièrement de profiter de la générosité de la brune alors que leur dernière entrevue remontait à des années. « Tu sais, à cet âge-là ils ne sont pas très reconnaissants. » Et s'il se permettait de le faire remarquer, dans un léger sourire, c'est parce qu'il préférait qu'elle sache qu'à cet âge les enfants aimaient recevoir sans forcément décerner une très grande gratitude en retour. Mais tandis que la carte leur fut apportée et qu'il laissa malgré tout son regard défiler d'une page à l'autre, Saul releva les yeux au moment où Hannah l'interrogea. « J'y vis depuis plus de vingt ans, à vrai dire, même si je voyage beaucoup. J'y ai suivi mon père après la séparation de mes parents, et je m'y suis marié il y a maintenant onze ans. » Ça pouvait sembler remonter à une éternité, pour autant il gardait des souvenirs intacts de sa vie à Lima, où il avait passé une enfance heureuse, quand bien même la première union de ses parents avait été plus conflictuelle que la seconde. « Toi, tu vivais à New York la dernière fois qu'on s'est vus. Dois-je comprendre que tu t'es installée ici ? » Si tel était le cas, sans doute ne s'étaient-ils pas croisés plus tôt en raison de leurs emplois du temps respectifs. Et à ce propos, tandis qu'Hannah saisit cette occasion pour l'interroger sur les projets sur lesquels il travaillait actuellement, c'est avec un brin d'enthousiasme qu'il répliqua. « Eh bien, en ce moment je tente de convaincre mes associés de monter un opéra-rock, et je te cache pas que c'est loin d'être une mince affaire. Ils pensent qu'on irait droit dans le mur en montant quelque chose d'un peu avant-gardiste, et de mon coté … je pense que je bosse avec une belle bande de trouillards. » Saul jugeait qu'il était temps de sortir de leur zone de confort et de s'essayer à des productions un peu plus ambitieuses, qui ne se contenteraient pas de reprendre le schéma classique des spectacles musicaux que la compagnie avait jusqu'ici produits. Mais ses associés, plus terre-à-terre, y voyaient une entreprise périlleuse. « Il y serait question d'une société secrète en proie à la débauche et aux corruptions, le tout dans un univers sombre et technologiquement avancé. J'imagine que c'est ce qui les a refroidi. » Et bien qu'il s'en amuse ici, cette histoire le contrariait sans doute plus qu'il ne le laissait paraître, lui qui dépréciait la censure dans la moindre de ses formes. « Bon, et toi ? J'espère que tu ne nous as pas fait venir ici pour m'annoncer que tu renonces au métier, parce que j'ai bien l'intention de te faire une proposition d'embauche avant la fin de la journée. » Il mentirait s'il prétendait n'avoir pas vu en cette invitation une occasion de solliciter les talents de la jeune femme pour peut être l'amener à accepter une collaboration future. Longtemps il avait espéré pouvoir un jour la compter dans ses rangs, et aujourd'hui il était probable que le destin soit enfin de son coté.
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Message(#)the element of surprise (hannah) EmptyMar 9 Aoû 2016 - 2:15

Hannah s’était contentée d'une expression indéchiffrable quand Saul lui avait parlé de la laisser seule avec Eliott pendant une après-midi. Cela aurait pu être une expérience assez inédite pour l’actrice, la plupart des femmes de son âge avait des enfants, la bague au doigt et elles avaient rangé leur rêves de jeunesse au placard depuis longtemps. Pas Hannah, sa carrière restait son rêve principal et elle n’avait pas été obligée de mettre quoi que ce soit de coté pour le vivre. Ou peut-être son coeur qu'elle protégeait trop, peut-être le fait qu’elle ne s’attachait pas y était pour quelque chose. Mais quoi qu'il en soit, Eliott n'avait absolument rien d’effrayant pour elle et elle se dit que c'était un défi qu'elle était prête à relever. Cependant, la brune ne dit rien de tout ceci à voix haute, elle savait à quel point certains parents pouvaient être protecteur envers leur progéniture et elle ne savait pas encore dans quelle catégorie elle devait ranger Saul. « Hmmm ? Quoi ? Cet endroit est parfait non ?»  dit simplement la brune, ne comprenant pas du tout sa remarque sur l’endroit qu’elle avait choisi, ne sachant pas si c’était trop ou pas assez pour lui et son fils. Elle ignora la remarque, la chassa et la rangea aussi facilement qu’elle replaçait une mèche brune derrière son oreille et elle l'écouta lui dire comment il avait occupé les années qui avaient séparés leur rencontrer. « J’avoue que je ne t’imaginais pas du tout marié, comme quoi, impossible de savoir ce que font vraiment les gens quand ils ne sont pas sur scène. » Et d’ailleurs, se retint-elle d’ajouter, elle n'aimait pas vraiment le faire. C’était un peu perdre un peu plus de cette magie si particulière au théâtre, elle n’avait pas besoin de savoir que ceux qui étaient capables de créer, d’imaginer et de transmettre des émotions à partir de rien pouvait également être humain. Ça ne l'intéressait absolument pas, si cela ne tenait qu’à elle, la scène ne finirait jamais vraiment et tout le monde aurait un rôle à jouer dans la vie de tous les jours. Elle était certaine que les choses seraient beaucoup plus faciles ainsi et beaucoup moins serait blessé, c’était certain. Saul avait une vie très banale et même normale en fait, rien que ce que ces larges épaules, sa barbe ou la façon dont il donnait des ordres à des comédiens ne laissait présager, comme quoi… Il redevint un peu plus l’homme qu’Hannah connaissait quand il lui parla de son nouveau projet, elle leva ses yeux noisettes du menu, soudainement beaucoup plus intéressée. Là, bien entendu, il avait toute son attention, mais c’était également le tour d’Hannah de faire des confidences. « J’ai suivi mon père, ça fait quatre ans que je suis à Brisbane désormais, et je suis bien partie pour rester vu que je suis bien installée… c’était juste l’affaire de quelques mois au début, mais j’ai trouvé une troupe de théâtre dans laquelle je me plais et j’ai rencontré … disons des amis donc, une fois qu'on s’attache difficile de partir. » Hannah eut un haussement d’épaules, elle trouvait qu'elle arrivait bien à résumer ces dernières années et le chaos qu’était sa vie sentimentale sans trop rentrer dans les détails. « Comme tu peux le constater, je n’ai absolument pas l'intention de renoncer à ma profession, je m'imagine difficilement faire quatre chose… c’est juste inconcevable. » Hannah passa sous silence son dernier voyage personnel qui l’avait éloignée de Brisbane pendant plus de trois semaines, elle était revenue avec la ferme intention de se concentrer sur son travail et rencontrer Saul était comme la réponse qu'elle cherchait depuis des semaines. « Laisse moi deviner tu cherches quelqu’un pour le rôle principal ? Si ce n’est pas ça je peux te dire que ce n’est pas la peine de me faire une offre… »
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Message(#)the element of surprise (hannah) EmptyVen 12 Aoû 2016 - 1:59

Soumettre l'idée d'offrir une glace à son fils, c'était définitivement le meilleur moyen de réveiller le gourmand qui sommeillait en lui. Et un Eliott gourmand était un Eliott qui savait se rendre irrésistible auprès de ceux qui étaient susceptibles de servir ses intérêts. Si Hannah était certainement loin d'imaginer à quel point un enfant de trois ans pouvait déjà raisonner comme un calculateur hors pair, Saul, lui, connaissait suffisamment son cadet pour savoir qu'il vendrait toute sa panoplie de jouets s'il avait la garantie de se voir offrir une glace chaque fois qu'il en aurait envie. Ainsi, c'est amusé qu'il avait soumis l'idée de le lui laisser toute une après-midi, histoire que la jeune femme découvre que les enfants paraissaient toujours adorables lorsqu'on ne les côtoyait que très brièvement, mais pouvaient bien vite s'avérer ingérables. Mais loin de l'envisager sérieusement – autant parce qu'il ne voulait pas lui faire perdre sa journée que parce qu'il ne savait pas comment tout ça apparaîtrait aux yeux de sa femme – Saul s'intéressa plutôt à l'endroit où la comédienne les conduisit. Un café qui, s'il était charmant, avait surpris le brun au premier regard. « Absolument. C'est juste que je ne me serais pas offusqué si tu nous avais conduit jusqu'à un marchant ambulant. » Il souffla en tout cas, dans un sourire, pour être bien certain qu'Hannah ne se méprendrait pas. Il n'arrivait absolument rien contre les endroits comme celui-ci, mais contrairement à ce que sa renommée laissait peut être penser, il ne vivait pas la grande vie et se serait tout autant satisfait d'un arrêt au marchand de glaces du coin. S’épanchent en tout cas sur la vie qu'il avait mené à Brisbane, Saul ne tarda pas à s'amuser du prochain commentaire de la brune. « Je pourrais te dire la même chose. J’imaginais que je te retrouverais mariée à un producteur de renom, et à la tête d'une famille nombreuse. Mais il faut croire que nous avons aussi peu d'intuition l'un que l'autre. » Il énonça ainsi, après s'être assuré qu'elle ne portait pas d'alliance, et sans se départir de sa mine souriante. Puis il reprit, de peur peut être qu'elle s'imagine qu'il puisse parler sérieusement. « Je plaisante, j’ai bien compris que pour toi, ce genre de vie n'est pas forcément la meilleure option qui soit, pour les gens comme nous du moins. » Et il ne disait pas ça comme un reproche ou parce qu'il s'était senti visé par sa remarque. Il savait pertinemment qu'Hannah était le genre de comédienne indomptable à qui on ne passait pas la bague au doigt si facilement, et qui peinait à comprendre que l'on puisse aspirer à une vie simple quand le milieu du spectacle laissait miroiter toutes sortes d'autres alternatives. Saul avait su très jeune qu'il voudrait fonder une famille, il avait durement lutté pour ça, mais il concevait que tout le monde n'en fasse pas nécessairement le projet de toute une vie. Évoquant par la suite l'un des projets sur lesquels il était amené à plancher, Saul ne fut guère étonné de constater que l'attention d'Hannah était subitement dédoublée. Celle-ci se confia à son tour, et c'est dans un nouveau sourire qu'il répliqua. « Maintenant que j’y pense, je suis presque certain de t’avoir déjà aperçue en couverture d’un magazine, ce qui j’imagine est le lot de toutes les jeunes et jolies actrices de notre époque. Je n'avais simplement pas fait le lien, après tout le talent ne connaît pas de frontière. » Mais ça lui revenait, à présent, et s'il avait osé poursuivre dans cette voie, il aurait même ajouté qu'il avait cru comprendre que sa vie personnelle avait fait plus d'une fois les gros titres de ce genre de revues. Mais partant du principe que ça ne le regardait pas – du moins tant qu'Hannah et lui n'étaient pas amenés à se côtoyer un peu plus souvent – Saul préféra s'abstenir. « Et tu as bien raison. Chaque seconde où ton talent n'est pas exploité est une seconde de perdue. » Il souffla alors, rassuré qu'Hannah n'ait jamais envisagé d'arrêter le théâtre et de se priver de la voie royale qui s'ouvrait plus que jamais à elle. Il avait côtoyé bien des actrices ingénieuses depuis qu'il était dans le milieu, mais Saul regretterait tout particulièrement qu'un talent comme le sien se perde, raison pour laquelle il n'attendit pas plus longtemps pour soumettre l'idée de lui faire une proposition. Proposition qu'Hannah n'accepterait visiblement que si elle s'avérait digne d'elle, et cette idée suffit à ce que le brun émette un rire. « Voyez-vous ça, mademoiselle sait ce qu’elle veut. » Et c'était une très bonne chose, du moins de l'avis de Saul. Hannah pouvait se permettre d'être difficile, et il aimait l'idée qu'elle veuille le meilleur pour la suite de sa carrière. « Rassure-toi, je ne te ferai pas l’affront de te faire une proposition indigne de ta qualité. » Il reprit, faussement énigmatique, en se penchant légèrement au-dessus de la table pour se rapprocher d'elle, comme si subitement l'échange se faisait plus confidentiel. « La question est maintenant de savoir si tu serais prête à pousser la chansonnette ... » Et par « pousser la chansonnette », il lui proposait évidemment de tenir le rôle titre de l'un de ses spectacles musicaux. Une idée assez audacieuse lorsqu'on connaissait le registre principal de la comédienne, mais une idée prometteuse aux yeux de Saul. « Parce que j'ai toutes sortes de premiers rôles à te proposer dans mes prochaines pièces, mais que je suis convaincu que tu pourrais t'essayer à un autre registre. Quelque chose de plus dynamique, de plus vivant. » Quelque chose qui lui permettrait surtout d'ajouter une corde à son arc. Il savait déjà qu'Hannah était une comédienne formidable, qui vivait pleinement chacune de ses prestations et qui s'imprégnait toujours un maximum de ses rôles. Mais ici, il serait question de maîtriser les contraintes d'un show plus électrique, de composer avec de toutes nouvelles difficultés. « Lorsqu'on a ton talent, on ne doit pas hésiter à prendre des risques. Et ce risque-là pourrait bien te consacrer comme la meilleure interprète de ta génération. » Et Hannah devait savoir qu'il n’emploierait jamais de tels mots s'il n'était pas certain de ce qu'il avançait. Il avait été sincère le soir où il l'avait longuement complimentée sur sa prestation, et il l'était tout autant aujourd'hui, alors qu'il tentait de la convaincre de se laisser cette chance. Et comme il était bien décidé à ne rien laisser au hasard, c'est bientôt un sourire contenté qu'il afficha au moment où il sortit de sa poche une petite carte qu'il tendit à la brune. « Tu vois cette carte ? C'est celle de mon contact à Broadway. On a vu avec eux pour produire notre prochain spectacle, et ça risque d'être notre plus gros coup depuis la création de la compagnie. J'aimerais vraiment que tu en fasses partie. » Parce qu'il ne pourrait rêver meilleure collaboratrice qu'Hannah pour se lancer dans un projet d'une telle envergure. Il avait longtemps attendu le moment où il lui proposerait de les rejoindre, et aujourd'hui tout semblait indiquer qu'une occasion comme celle-ci ne se représenterait pas avant un moment. L'heure était donc aux négociations, et Saul ne reculerait devant rien pour la faire céder.
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Message(#)the element of surprise (hannah) EmptyDim 21 Aoû 2016 - 20:49

Oui, les choses avaient bien changé depuis leur dernière rencontre, mais Hannah ne voyait pas forcément ça comme une mauvaise chose. Lors de leur première rencontre, elle devait être âgée de dix neuf-ans tout au plus et chaque performance lui apparaissait encore magique, encore comme la première en fait, elle avait encore une certain innocente par rapport à la vie, à ce qu’elle voulait faire plus tard et là où sa carrière devait la conduire. La jeunesse sûrement, désormais, la vie de la brune était un tourbillon sans fin et sa carrière était un point central, une chose cruciale qui empêchait la brune de sombrer ou juste de se retrouver sans absolument rien. Ce n’était pas juste son métier, c’était aussi son exécutoire, le meilleur moyen qu’elle avait d’être réelle et quelque chose dont elle ne pouvait pas se passer. Au diable l’amour, la vie tranquille et les enfants, Hannah avait déjà eu des centaines d’amants sur la scène, vécu des dizaines d’histoire d’amour, était morte, revenu à la vie, avait donné vie à des enfants, les avait regardé grandir et la détester… c’était ça sa vie, et définitivement pas les torchons qu’on voyait dans les magazines. Elle avait envie de dire à Saul qu’il était chanceux s’il ne l’avait vue que dans un seul magazine, Hannah semblait être incapable d’échapper à la presse plus de quelques heures. C’était un cercle vicieux en fait, elle se croyait toujours en sécurité, jusqu’à ce que quelques minutes après un photographe vienne lui rappeler que ce n’était pas vraiment possible dans son cas. « Ma vie est malheureusement bien documentée dans la presse, c’est un des désavantages d’être moi. Le seul je te rassure. » conclut Hannah avec un franc sourire, mentant sans absolument aucune gêne. Elle n’avait pas vraiment besoin d’entrer dans les détails et de toute façon, elle n’avait pas envie de le faire, rester sur quelque chose de négatif ne ferait en rien avancer la situation pour Hannah, elle avait volontairement choisi de se concentrer sur sa carrière en ce moment, bien certaine que cela l’aiderait à oublier les déceptions amoureuses. Et malheureusement, ces dernières étaient nombreuses… Hannah conserva le silence alors que Saul continuait de lui faire une proposition plus qu’intéressante, il fut juste interrompu par le serveur qui vint prendre leur commande et Hannah souligna que la glace du petit garçon devait être parfaite mais ce fut tout. Saul savait jouer avec les mots comme personne et pas de doute qu’en tant que metteur en scène il avait appris à faire avec les personnalités de chacun, et il savait déjà qu'avec quelqu’un comme Hannah, il fallait mettre les formes et savoir attiser sa curiosité. La brune n’était définitivement pas une femme comme les autres et elle était capable de vous envoyer sur les roses même si vous lui promettiez la lune… jusqu’à parce ce qu'elle en avait envie. Le théâtre était bien le seul moment où Hannah se permettait de considérer ses options et d’être un peu plus humble, après tout, elle avait encore des tas de choses à apprendre. « C’est une offre intéressante et ça serait un vrai challenge, je pense être en mesure de chanter juste et d’apprendre le reste… ça me changerait de registre. » avoua Hannah, un air pensif sur le visage. Parce qu’elle avait été la fille choyée d’un père beaucoup trop riche pour son propre bien, Hannah avait reçu une éducation particulière, en plus de savoir monter à cheval et de tirer à l’arc, elle savait également jouer du piano et du violon à un niveau qui se voulait respectable. Le violon, Hannah ne préférait pas trop s'y essayer mais le piano qui trônait dans son salon n’était pas juste là pour faire joli et pour amuser la galerie. Il lui arrivait de se laisser aller à un ou deux airs, mais là on parlait de quelque chose de complètement différent, au niveau professionnel… La brune fixa Saul avec un autre sourire avant de croiser les bras sur sa poitrine. Il était hors de question qu’elle dise non, s’il y avait bien quelque chose qu’adorait plus que jouer ou les grandes robes de créateur, c’était les défis, et Saul lui en offrait un sur un plateau d’argent. « Et est-ce que tu es en train de me demander d’abandonner la troupe dans laquelle je suis ? » C’était le seul détail qu’elle avait envie de clarifier, elle était dans la même troupe depuis près de trois ans et avait donc ses petites habitudes, partir du jour au lendemain serait sûrement difficile. « Si c’est oui, il va falloir que tu es autre chose qu’un premier rôle à m’offrir Saul. »
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Message(#)the element of surprise (hannah) EmptyJeu 25 Aoû 2016 - 20:57

Il était facile de se méprendre sur la vie que menait Saul en dehors des répétitions de ses pièces et de ses déplacements professionnels lorsqu'on le voyait à l’œuvre, dirigeant une troupe ou écrivant ce qui deviendrait son prochain spectacle. On l'imaginait souvent solitaire, comme à l'époque où il n'était encore qu'un étudiant renfermé sur lui-même, accaparé par son inspiration et vivant beaucoup de choses par le biais des pièces qu'il commençait à écrire. Et l'importance qu'il accordait encore aujourd'hui à son art laissait sans doute difficilement penser qu'il puisse devenir un autre homme chaque fois qu'il posait un pied en dehors des locaux de sa compagnie. Un mari, un père, quelqu'un qui ne parvenait pas toujours à ranger sa casquette de producteur et à se déconnecter complètement de sa passion, mais pour qui l'amour des siens primait toujours sur l'amour qu'il portait au théâtre dès qu'il retrouvait ceux qui l'inspiraient aussi à leur manière. Alors oui, Saul n'était pas étonné que son profil puisse surprendre Hannah, tout comme il n'était pas étonné qu'elle semble tout aussi épanouie dans la vie qu'elle menait de son coté, loin du désir de fonder une famille quand sans doute le théâtre était la seule dont elle avait besoin, en tout cas pour l'instant. Saul, en tout cas, se rappela à ce moment-là l'avoir certainement aperçue sur la couverture de l'un de ces torchons qui distillaient scrupuleusement la vie des comédiennes dans son genre, aussi jeunes et jolies qu'elles devaient être fascinantes pour des journalistes en mal de scoops. La façon dont la jeune femme ironisa sur sa situation lui valut en tout cas d'esquisser un sourire. « Et dire que je rencontre tous les jours des comédiennes qui rêveraient d'avoir leur photo en une d'un magazine et qui seraient probablement prêtes à payer des paparazzis pour qu'ils les immortalisent entrain de promener leur chien ou de sortir leurs poubelles. » C'était triste, mais malheureusement vrai. Saul avait conscience qu'à une époque comme la leur, où il était facile d'avoir son quart d'heure de célébrité – pourvu qu'on sache jouer avec son image et donner à la presse ce qu'elle recherchait – beaucoup aspiraient à une reconnaissance qui dépassaient les frontières du théâtre. « Toi et moi, on a la même vision de notre milieu. On ne fait pas ça pour envahir les étalages des marchands de journaux ou pour avoir un quart d'heure d'antenne dans un talk-show réputé. » C'est du moins le sentiment qu'il avait, car s'il n'avait aucun doute quant au fait qu'Hannah soit suffisamment maligne pour s'amuser de l'attention que lui portaient les journalistes et pour retourner chaque situation à son avantage comme si ce petit jeu ne l'affectait pas, le brun tendait à penser qu'elle aspirait en vérité à une tranquillité que personne n'était encore en mesure de lui offrir. « Ne leur accordent pas plus d'importance qu'ils n'en méritent. » C'était son point de vue, et sans doute était-il influencé par le fait qu'il ait lui-même fait l'objet de certaines spéculations, quand la presse s'était aussi intéressée à la vie qu'il pouvait mener en dehors du théâtre. Il avait eu son compte d'articles calomnieux, de rumeurs infondées, mais avait très tôt choisi de détourner le regard plutôt que d'en faire une obsession. Souriant ensuite lorsqu'Hannah passa commande pour Eliott, Saul ne perdit pas de temps pour renchérir et lui faire une proposition qu'il savait alléchante lorsque comme Hannah, on aimait les défis. Et ne s'y étant pas trompé, il accueillit sa réponse par une expression contentée. « Je connais des dizaines de professeurs de chant qui seraient ravis de te faire travailler. J'ai toujours cru qu'une comédienne pouvait apprendre à chanter, comme j'ai toujours cru qu'une chanteuse pouvait apprendre à jouer la comédie. » C'était ce genre d'idées qui l'avaient inspiré pour fonder sa propre compagnie, afin de donner leur chance à des artistes de tous milieux, de leur offrir des opportunités parfois éloignées de ce qu'ils pensaient être leur seul domaine de compétences. « Moi même, je n'ai longtemps été qu'un auteur. Aujourd'hui, j'ai plusieurs cordes à mon arc et je me félicite d'avoir eu l'audace de me lancer dans d'autre choses. » Il était ainsi bien placé pour savoir que rien ne servait de s'enfermer dans une case, et que chacun pouvait élargir son horizon et s'essayer à d'autres domaines, à force de travail et de persévérance. Lui s'était donné du mal, avait appris de l'expérience des autres, et il savait qu'Hannah ne se lancerait pas dans ce genre de projet sans l'envie de bien faire à son tour. S'amusant ensuite de son coté pragmatique, Saul lâcha un léger rire, avant d'ajouter. « Il va de soi que nous te ferions signer un contrat d'exclusivité. Ce serait l'affaire d'un an ou deux, et tu serais par la suite tout à fait libre de te réengager auprès de quelqu'un d'autre si tu ne souhaitais pas poursuivre notre collaboration. » Il n'était en tout cas guère étonné qu'elle soulève ce genre de points, Hannah était une professionnelle qui tenait compte de chaque paramètre avant de prendre la moindre décision, et c'était en ça que son profil l'intéressait d'autant plus. « A moins que nous tombions tous sous ton charme, et dans ces cas-là il se pourrait bien que nous ayons un peu plus de mal à te laisser partir. » Et esquissant un sourire plus malicieux, il remercia par la suite le serveur qui vint apporter la glace de son fils. Sortant un bavoir de sa besace et l'attachant autour du cou du garçonnet, il releva ensuite les yeux vers Hannah, conscient que les négociations s'annonçaient ardues. « J'imagine que mon admiration éternelle ne te suffirait pas ? » Il souffla, dans un sourire amusé, prenant son fils sur ses genoux avant de reprendre. « Alors je pourrais tout aussi bien t'inviter au restaurant histoire de poursuivre cette conversation autour d'une coupe de champagne, mais va savoir ce qu'en penseraient nos amis journalistes ... » Il faisait par là allusion à leur conversation de tout à l'heure, au sujet de ces vautours qui ne la lâchaient pas d'une semelle et trouvaient de quoi écrire sur le moindre de ses déplacements. Il avait effectivement toutes les raisons de penser que ce genre de sorties, auprès d'un producteur relativement réputé et marié de surcroît, pourrait faire jaser. Lui s'en amuserait sans doute plus qu'il ne s'en inquiéterait – il avait assez de soucis pour ne pas vouloir s'angoisser davantage, qui plus est alors qu'il n'avait jusqu'ici jamais perdu de vue la frontière qui se tenait entre sa vie personnelle et professionnelle – mais la dernière chose qu'il souhaitait était de placer Hannah dans une situation délicate, autant parce qu'il l'admirait en tant que comédienne et commençait à l'apprécier en tant que femme, que parce qu'il ne voudrait pas que leur future collaboration s'en trouve menacée. « Pourquoi tu ne me dirais pas plutôt quelles sont tes conditions ? » Saul finit par reprendre, d'un ton énigmatique, pensant qu'après tout c'était elle qui était en position d'imposer, de réclamer. Elle savait maintenant qu'il ne reculerait devant rien pour la convaincre de se joindre à lui, ainsi elle devait savoir qu'il y avait peu de choses qu'il pourrait prendre le risque de lui refuser, plus encore alors qu'il avait certainement les moyens sociaux et matériels de satisfaire la moindre de ses exigences.
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Message(#)the element of surprise (hannah) EmptyLun 29 Aoû 2016 - 22:26

Saul avait beau être un artiste, il avait adopté un ton très professionnel et surtout très rapidement et voilà qu’il lui parlait de contrat et d’exclusivité. Il ne perdait pas le Nord et cela ne fit que sourire Hannah, quand on savait que le degré de patience de l’actrice était proche du zéro absolu, le brun faisait bien d’aller droit au but. Et de lui dire exactement ce qu’il voulait. Et dans le monde du théâtre, Hannah avait l’habitude que sa réputation la précède et de beaucoup, et en général, elle n’avait plus besoin de faire ses preuves. Son CV était aussi long que son bras et les critiques qui l’avaient déjà encensée au fil des années, Hannah était une valeur sure en ce qui concernait les arts de la scène. Mais chanter ? Chanter et jouer à la fois, on parlait d’autre chose et pour une fois, Hannah avait en face d’elle un homme en position de supériorité. Ça ne lui déplaisait pas, bien au contraire, elle qui avait décidé de faire de son travail la priorité pouvait avoir trouvé un partenaire idéal. Enfin. Elle se pencha sur son verre avec un sourire mutin, sourire qui se transforma en rire quand Saul lui demanda abruptement quelles étaient ses exigences. Là, il parlait vraiment en des termes que pouvait connaitre Hannah. Plus que d’être une excellente actrice, Hannah était avant tout une femme qui avait grandi dans un monde où tout était à sa portée, où il lui suffisait juste de claquer des doigts ou de faire un regard en direction de son père pour obtenir l’objet de tous ses désirs. Aussi simplement que ça. Certes, au fil des années, ça s’était complexifié, il fallait donner un peu plus d’argent, faire plus de sourire, mais le principe restait le même et les Siede, le père comme la fille d’ailleurs, étaient passé maitre dans l’art de la négociation. « Saul tu parles à la fille d’un avocat tu le sais ça ? Cette simple conversation ne suffira pas, il ne s’agit que des préliminaires. » commenta simplement l’actrice, qui dans le fond ne vivait que pour ce genre d’échange. Son père n’avait peut-être pas réussi à lui transmettre sa passion pour le droit mais il avait en revanche réussi à lui inculquer les bases d’un bon marché et surtout comment se disputer et argumenter pour ressortir vainqueur. Saul avait peut-être ses meilleures intérêts à coeur mais, faisant parti de ses rares actrices qui n’avaient pas d’agent artistique, elle devait se protéger seul. « Si je finis par signer un contrat, il faudra que mon père y jette un coup d’oeil avant… c’est la première et la plus importante des conditions. » Et la seule qui était non négociable, se retint d’ajouter Hannah, son père relisait ses contrats depuis des années alors ça ne serait aucun problème pour lui et son équipe d’avocat compétent. Hannah prit une minute de plus, pour réfléchir à ses demandes, après tout, elle avait la main pour le moment et elle comptait bien l’utiliser. « Et je ne veux pas que mes idées soient mises de coté juste parce que je ne suis que comédienne et pas producteur ou que sais-je… c’est la deuxième condition. » Une chose qu’elle formulait à voix haute pour la première fois, si Hannah s’était chargée de l’aspect pub et marketing dans la troupe dans laquelle elle se trouvait, elle voulait avoir la main mise sur autre chose désormais. Que ce soit quelque chose d’aussi simple que les costumes, les décors, la brune avait toujours des idées à revendre, idées qui finissaient toujours pas se perdre dans sa propre tête quand elle se lançait à fond dans l’interprétation de son personnage. Dans ces cas-là, elle oubliait tout, y compris sa propre vie, ses propres souvenirs et son propre nom. Là, il lui faudra en plus s’assurer de bien chanter et de transmettre toutes ces émotions avec ses cordes vocales. « Ensuite, il va me falloir un prof de chant et un bon, je te laisse te charger de ce genre de détails… vu que tu sembles avoir une idée très précise de ce que tu veux. D’ailleurs… est-ce que tu vas me faire passer une audition ? Ça fait des années que je n’ai pas fait ça. » Hannah était sincère, la dernière audition qu’elle avait passé devait remonter à ses 23 ans, quand elle était encore à Manhattan, et qu’elle cherchait des rôles pour se diversifier. Avant qu’elle eu le temps d’expliquer ça à Saul, elle eut un sourire pour Eliott. « Et tu as de la glace sur le nez mon grand. » Hannah s’empara de sa propre serviette pour faire partir la glace tout aussi rapidement. « C'est mieux comme ça je crois. »
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Message(#)the element of surprise (hannah) EmptyMer 31 Aoû 2016 - 20:35

Si c'est en premier lieu son talent notoire pour la comédie qui avait frappé Saul lorsque celui-ci avait découvert Hannah, plusieurs années auparavant, c'était aujourd'hui les nombreux points qu'il semblait avoir en commun avec elle qui tendaient à le fasciner pour de bon. Hannah n'était pas de ces actrices qui s'étaient retrouvées au beau milieu d'une scène par hasard ou bien parce qu'elles aspiraient à la notoriété, à l'idée de gloire et de succès. Elle avait beau faire la une des magazines, avoir cette allure un brin singulière qui pouvait donner l'impression qu'elle n'appartenait pas au même monde que ceux qui l'entouraient, Saul savait voir plus loin que ce que semblait refléter cette habile carapace. Ce qu'il voyait, c'était une artiste passionnée, une femme qui vivait pour son art. Quelqu'un qui lui rappelait celui qu'il avait lui-même toujours été, dans le fond, même s'il se plaisait aujourd'hui à prétendre qu'il n'était plus aussi dépendant à sa passion que quelques années plus tôt. Tous deux partageaient un besoin irrépressible de faire ce qu'ils aimaient, qu'importe le prix à payer, que ce soit pour elle l'acharnement incessant d'une troupe de journalistes ou pour lui des rapports modifiés avec son entourage, en particulier ses enfants. Sans doute un peu incompris par ceux qui n'imaginaient pas l'importance du théâtre dans leurs vies, c'était comme s'ils avaient toujours été prédestinés à travailler ensemble. C'était du moins ce qu'il pensait, et la raison pour laquelle il n'avait pas mis bien longtemps à formuler la proposition qu'il gardait dans un coin de sa tête depuis l'instant où leurs routes s'étaient recroisées. Bien souvent Saul avait fait ce genre de démarches auprès de talentueux comédiens qu'il s'était évertué à convaincre de rejoindre ses rangs, mais jamais il n'avait été porté par une telle envie d'emprisonner un talent brut entre les quatre murs de sa compagnie, comme un joyau qu'il protégerait du monde extérieur, de la concurrence, et du coté parfois malsain de ce milieu. Car si le concept d'exclusivité ne semblait pas s'appliquer à sa vie sentimentale, il régissait bel et bien son univers professionnel, tout du moins depuis qu'il était devenu un producteur averti, qui se pliait volontiers au jeu des négociations. Avec Hannah, il le savait, la tâche n'aurait rien d'évidente. La jeune femme savait très exactement ce qu'elle voulait, tout comme elle savait probablement comment l'obtenir. Et Saul, qui n'était pas d'un naturel contrariant, était justement disposé à lui céder tout ce qui pourrait l'aider à prendre une décision. Une décision qu'il espérait favorable. Ainsi, quand la jeune femme exposa sa première condition et qu'elle émit le souhait d'inclure son père à l'étape des négociations, c'est un sourire joueur qu'il esquissa. « Voilà le genre d'argument qui doit aussi faire son petit effet auprès de tes prétendants. Parce que personne ne veut déjà avoir un avocat sur le dos, alors si en plus il s'agit du père de la grande Hannah Siede ... » Cette idée était pourtant loin de l'affoler, lui qui en plus d'avoir l'habitude de composer avec la détermination d'agents artistiques incrédules et d'avocats acharnés savait aussi ce que c'était que d'avoir un père influent. « Condition accordée. Il pourra même visiter nos locaux et rencontrer nos collaborateurs, pourvu que ça puisse convaincre sa fille de marcher avec nous. » Saul reprit par la suite, dans un sourire cette fois plus amusé, bien conscient qu'Hannah savait qu'elle était en position d'exiger beaucoup de lui, et choisissant de le voir comme un savoureux challenge. La jeune femme poursuivit, et il hocha doucement la tête, agréablement surpris qu'elle semble vouloir s'investir tout particulièrement dans la bonne marche de leur futur projet, quand beaucoup de comédiennes se désintéressaient des détails qui n'impliquaient pas leur propre prestation. « Nos artistes ont souvent leur mot à dire en ce qui concerne le coté artistique des spectacles. Mais toi, tu pourras émettre un avis sur tous les points qui te tiennent à cœur. » Parce qu'il tenait à ce qu'elle se sente libre d'avoir une opinion, même tranchée, et un véritable droit de veto. Il mentirait s'il prétendait que tous les comédiens avaient la même influence sur la façon dont l'équipe pouvait décider de revoir certains détails, mais une jeune femme comme Hannah, qui avait une véritable expérience du métier mais aussi et surtout une détermination et une audace à toutes épreuves, avaient toutes les chances de faire plier même le plus sceptique de leurs collaborateurs. « Mais je préfère te prévenir, l'une de mes associées, Patty, est extrêmement susceptible lorsqu'on s'oppose à son avis. Je ferai mon possible pour qu'elle reste à sa place, mais si j'étais toi je crois que j'investirais dans une protection rapprochée, si ça n'est pas déjà fait. » Ses lèvres avaient laissé échappé un rire, car bien sûr il n'était pas entrain de sous-entendre que son intégrité physique serait menacée à l'instant même où elle oserait aller contre l'avis de son associée. A vrai dire, Saul imaginait plutôt Patty serrer les dents et ronger son frein un long moment avant d'imploser. Et lui, qui avait l'habitude de canaliser cette boule de nerfs ambulante, saurait réagir au moment opportun pour éviter un affrontement qui promettait de faire des étincelles si deux caractères comme les leurs s'opposaient fermement. Au sujet du chant, en tout cas, il semblerait qu'Hannah veuille mettre toutes les chances de son coté, et cette idée le fit sourire à nouveau. « Tu auras le meilleur, je compte bien me charger personnellement de ce détail. » Il l'avait dit, il connaissait plus d'un professionnel qui rêverait de lui apprendre les bases fondamentales qui lui permettraient à moyen terme de s'illustrer comme une brillante interprète, et s'il y avait bien un détail qu'il ne comptait pas laisser au hasard, c'était bien celui-ci. « Je ne pensais pas te faire passer de bout d'essai dans la mesure où je sais ce que tu vaux en tant qu'actrice et où je ne veux personne d'autre que toi pour ce rôle. Mais pour ce qui est du chant, je me réserve le droit de réclamer une petite exclusivité lorsque tu auras pris quelques cours. » Son ton se voulait plus taquin, mais néanmoins sérieux. Il lui faisait confiance pour ce qui était de se donner les moyens de relever ce défi avec brio, mais son irrésistible curiosité ne serait satisfaite que lorsqu'il l'aurait entendu chanter pour la première fois, après avoir déjà été conquis par ses talents de comédienne. Saul agissait comme un admirateur en présence d'Hannah, qui pouvait se vanter d'être la première artiste à lui faire cet effet. Finalement la voix de la brune s'éleva à nouveau, à l'attention de son fils cette fois, et il lâcha un rire spontané. « J'en connais un qui aime se faire dorloter. » Il commenta en remarquant le petit air conquis de son fils cadet, non sans s'amuser du soin que mettait Hannah à débarbouiller le garçonnet. L'attention d’Eliott sembla finalement se porter vers un homme qui se tenait non loin de l'entrée du café, et lorsque Saul nota ce que le commerçant tenait entre ses mains, il comprit d'où lui venait cet intérêt soudain. « Ah, je crois qu'il a repéré quelque chose qui lui plaît beaucoup. » Et pour cause, de là où il était assis, il pouvait apercevoir une multitude de ballons plus imposants et colorés les uns que les autres, ne demandant qu'à rejoindre les mains expertes d'un enfant. « Je te le laisse deux petites minutes, le temps d'aller lui chercher l'un de ces ballons. N'en profitez pas pour comploter contre moi, hein. » Saul reprit alors, à l'attention de la jeune femme, avant de se lever et d'inciter son fils à quitter ses genoux, saisissant sa petite main le temps de contourner la table pour arriver près d'Hannah. Aidant Eliott à grimper sur cette dernière, il afficha un large sourire au moment où il se fit la réflexion qu'ainsi la jeune femme aurait l'occasion d'expérimenter son rôle pour un court instant. S'éloignant pour rejoindre l'entrée du bâtiment, il acheta bientôt deux ballons qu'il retint fermement de peur de les voir s'envoler. Puis, retrouvant l'intérieur, il constata que son fils n'avait pas quitté les genoux d'Hannah. Lui tendant alors le premier ballon, il lança un regard taquin à la jeune femme avant de lui tendre le second. « Je t'en ai pris un aussi. Considère ça comme un cadeau de bienvenue, le premier d'une longue liste. » Parce qu'il partait évidemment du principe que ces négociations seraient un succès. Saul n'était pas tant optimiste que simplement déterminé à mettre toutes les chances de son coté pour la convaincre, et pour ça il n'hésiterait pas à l'attendrir à la première occasion, certain d'avoir trouvé en la brune une compétitrice qu'il aurait plaisir à affronter sur le terrain de l'humour, avant qu'ils n’œuvrent ensemble pour la même cause.
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