| (#24) a house built out of stone (saul) |
| | (#)Mer 14 Sep 2016 - 18:47 | |
| saul & hassan a house built out of stoneThere is a house built out of stone, wooden floors, walls and window sills, tables and chairs worn by all of the dust. This is a place where I don't feel alone, this is a place where I feel at home 'cause, I built a home for you, for me, until it disappeared from me, from you. ☆☆☆ Hassan était resté dubitatif un instant, lorsque l'on avait sonné à la porte. Il venait tout juste de se poser pour terminer de corriger un paquet de copies et il avait le sentiment que s'il s'interrompait maintenant il ne parviendrait jamais à s'y mettre. Spike lui n'était pas du même avis, l'animal jappait joyeusement comme pour signifier à son maitre qu'il devait être devenu sourd pour ne pas avoir entendu qu'on sonnait à la porte, et faisant contre mauvaise fortune bon cœur le brun avait fini par quitter la table de la cuisine à laquelle il venait de s'installer pour rejoindre l'entrée. Il avait ainsi fait la connaissance du facteur, et accepté non sans une seconde ou deux d'hésitations de réceptionner un colis pour ses voisins, visiblement absents. Laissant le dit colis dans l'entrée, près de la porte, le professeur en étant ensuite retourné à ses copies et avait finalement quitté la maison peu avant treize heures, ayant cours tout l'après-midi. Il avait conscience de surcharger un peu ses élèves, d'ordinaire il n'hésitait pas à dévier un peu du programme ou à en modifier un peu l'ordre, notamment en fonction de l'actualité, mais maintenant que son départ pour Téhéran était officiel il se rendait compte qu'assouplir le programme qu'il se fixait en début d'année n'avait pas que des avantages, et il essayait de trouver un compromis qui convienne à ses élèves autant qu'à lui. L'après-midi avait filé à une telle vitesse qu'il en avait totalement oublié cette histoire de colis avant de rentrer chez lui, d'ouvrir la porte et d'être accueilli à la fois par Spike et par ce carton qui encombrait son entrée. Gratifiant l'animal de quelques caresses, le brun avait fait un pas ou deux en arrière sur le porche pour jeter un oeil à la maison d'à-côté. Une voiture était garée dans l'allée et une fenêtre du premier étage semblait ouverte, signe qu'au moins l'un des occupants était présent. Intimant à Spike de rester là, Hassan avait attrapé le carton marqué au nom Masterson, probablement celui de ses nouveaux voisins, et traversé le jardin jusqu'à la maison de gauche. Masterson, c'était aussi le nom sur la boîte aux lettres, et d'un pas assuré le brun avait donc rejoint la porte et appuyé sur le bouton de la sonnette. Sans grande surprise il avait entendu un chien aboyer, dont la truffe reniflant sous la palissade séparant les deux jardins arrières avait déjà intrigué Spike à plusieurs reprises, et un grand brun était finalement venu lui ouvrir la porte. « Bonsoir ! » Marquant une pause presque imperceptible, avec la vague impression - sans doute infondée - que ce visage ne lui était pas entièrement inconnu, il avait repris « Pardon de déranger, je viens d'emménager dans la maison d'à côté. J'ai récupéré un colis pour vous ce midi, le facteur a dit qu'il n'y avait personne. » Désignant d'un signe du menton le colis qu'il tenait sous le bras, Hassan s'était fendu d'un sourire lorsque le chien avait tenté de passer entre les jambes de son maitre « C'est donc à lui qu'appartient le petit bout de truffe que je vois dépasser de la palissade de temps en temps ? » Les mains prisent par le carton Hassan n'avait pas pu tendre la main vers l'animal, bien que ce ne soit pas l'envie qui lui manque. Avant d'avoir Spike il n'était pas particulièrement chiens, ou animaux de compagnie en général ; Il les aimait bien, mais n'avait jamais envisagé d'en avoir un à lui. Aujourd'hui les choses avaient changé et il peinait à se souvenir ce que c'était que de vivre sans un animal.
|
| | | | (#)Ven 16 Sep 2016 - 0:33 | |
| Une après-midi rêvée, aux yeux de Saul, était une après-midi où les réunions ne s’enchaînaient pas et où il avait tout le loisir de diriger les répétitions de ses prochains spectacles. Parce qu'il était un metteur en scène avant d'être un producteur, que c'était à ce poste qu'il se sentait le plus à l'aise, et qu'il troquait toujours volontiers les fauteuils inconfortables des salles de réunions contre les sièges douillets de ses salles de spectacles. Et puis, c'est vrai, ne pas avoir à supporter les commentaires incisifs de Patty et les questionnements existentiels de Vance jouaient aussi dans le fait qu'il évitait maintenant autant que possible de s'enfermer plusieurs heures avec ses associés, d'autant plus alors que la plupart de leurs discussions n'étaient qu'un prétexte pour se contredire les uns les autres et se renvoyer leurs erreurs à la figure. Ainsi, aujourd'hui, c'est serein que Saul avait quitté le siège de sa compagnie, à une heure à laquelle il aurait encore le nez au milieu de ses dossiers si toutefois Patty n'était pas partie en déplacement pour quelques jours. Il était rentré en voiture, pour la première fois depuis plusieurs jours – son véhicule dormant généralement sur le parking de ses studios – car les embouteillages de fin de journée ne l'avaient pour une fois pas incité à s’engouffrer dans le premier taxi venu. Arrivant à quelques mètres de son domicile, il constata rapidement qu'Elsie n'était quant à elle pas encore rentrée, son propre véhicule ne stationnant pas dans leur allée. Se garant alors, Saul gagna la pelouse et ramassa à ce moment-là le vélo de son fils aîné, pour venir l'appuyer contre la façade de leur demeure. Finissant par gagner l'intérieur, il fut rapidement accueilli par Jango, qui sans doute était le premier à s'étonner du fait que son maître rentre aussi tôt, quand il n'était pas rare que Saul regagne son domicile alors que tout le monde s'apprêtait à passer à table. Refermant la porte, il monta à l'étage le temps de se débarrasser de sa veste et de dénouer sa cravate, et en profita pour aérer sa chambre. Ne comptant pas s'éterniser au premier étage, il fut néanmoins surpris d'entendre qu'on sonnait à la porte, et ne tarda pas à réemprunter les escaliers, cette fois dans l'autre sens, pour accourir jusqu'à la porte d'entrée. Au moment d'ouvrir, c'est face à un visage a priori inconnu qu'il se retrouva, mais toutefois un sourire qu'il ne tarda pas à esquisser. N'ayant pas l'habitude de rentrer aussi tôt – ni d'être seul à la maison – il ignorait si l'homme qu'il avait face à lui avait l'habitude de rendre visite à la baby-sitter de ses enfants, ou bien à Elsie lorsque celle-ci était déjà rentrée, mais ne voyait de toute façon aucune raison de ne pas se montrer avenant. « Bonsoir. » Le brun souffla alors, tandis que l'homme n'attendit pas beaucoup plus longtemps pour finalement l'informer de la raison de sa visite. A ce moment-là, Saul assimila plusieurs choses, à commencer par le fait que l'homme qu'il avait d'abord pris pour un passant était en fait son voisin. « Oh, il me semblait bien avoir aperçu un camion de déménagement. J'espère que vous êtes bien installé, en tout cas soyez le bienvenu dans le quartier. » C'est avec enthousiasme qu'il reprit, ne pouvant à ce moment-là s'empêcher de repenser à son échange avec Alexis, qui elle aussi habitait à deux pas de chez lui et qui quant à elle n'avait pas eu droit à une démarche aussi chaleureuse la dernière fois que leurs routes s'étaient croisées. Il faut dire qu'ici Saul n'était pas un voisin empreint au doute et à la suspicion, il affichait le visage que chacun lui connaissait, sans être sur ses gardes ni ressentir le besoin de se cacher derrière la moindre animosité. « Merci pour le colis. Et je suis désolé que vous ayez du le réceptionner, généralement il y a toujours quelqu'un à la maison, mais aujourd'hui la baby-sitter nous a fait faux bond. » C'est ce qui expliquait que même ses deux plus jeunes enfants ne soient pas à la maison, Elsie et lui ayant du les déposer chez un couple d'amis en début de journée, tandis que sa femme irait justement les y récupérer. L'intérieur du domicile familial semblait du coup particulièrement silencieux, chose assez inhabituelle quand on connaissait le tempérament survolté de ses fils. Saul s'empressa en tout cas de débarrasser son voisin en récupérant le colis qu'il avait eu la gentillesse de lui apporter, avant d'esquisser un sourire attendri à sa prochaine remarque. « Oui, il s'appelle Jango. C'est notre chien depuis presque dix ans. Mais ne vous inquiétez pas, il n'a pas encore trouvé le moyen d’atterrir dans les jardins environnants, même si je le soupçonne d'essayer régulièrement. » Lâchant un léger rire, il crut néanmoins comprendre que son interlocuteur n'était pas rebuté par la présence de l'animal, un point qui n'était pas sans lui plaire et qui en plus laissait présager qu'ils avaient au moins une chose en commun. Un bon début, surtout si l'on tenait compte du fait qu'ils ne se connaissaient que depuis une ou deux minutes. « Je suis Saul. » Il finit par reprendre, libérant l'une de ses mains de façon à pouvoir la lui tendre, un sourire toujours accroché aux lèvres. « Entrez, je vais vous servir quelque chose à boire. Ce n'est pas tous les jours que j'ai l'occasion de rencontrer mes nouveaux voisins, ni que je me retrouve seul dans cette grande maison. » C'était deux affirmations on ne peut plus véridiques, car il était déjà exceptionnel en soit qu'il ait été présent pour ouvrir directement la porte, et sans doute cela ne se reproduirait-il pas avant plusieurs semaines. Reculant en tout cas en veillant à ne pas marcher sur Jango, Saul entreprit de poser le colis sur la petite table qui trônait dans l'entrée, avant de revenir sur le seuil de la porte, comme pour confirmer à son voisin qu'il était véritablement le bienvenu. |
| | | | (#)Jeu 22 Sep 2016 - 2:45 | |
| C'était un peu étrange, mais tandis qu'il appuyait sur le bouton de la sonnette Hassan se rendait compte qu'il appréhendait presque de faire la connaissance des personnes qui habitaient la maison à côté de la sienne. Parce que comme pour tout le reste cela aurait changé, et ils n'auraient probablement rien à voir avec les voisins qu'Hassan avait connu vingt ans plus tôt, avant d'abandonner cette maison une première fois. Ce ne serait probablement pas un mal, le brun avait souvenir d'un vieil homme vivant seul, assez peu patient avec les enfants ainsi qu'avec les difficultés de Shahra Al-Jaafari à maitriser la langue anglaise autant qu'elle l'aurait souhaité. Mais comme le reste cela faisait partie de ses souvenirs, et il y repensait maintenant avec une certaine nostalgie. Il y avait donc probablement eu une seconde ou deux de latence lorsqu'un grand brun était venu lui ouvrir la porte, tout sourire et le saluant avec politesse ; Exit le vieil acariâtre. « Oh, il me semblait bien avoir aperçu un camion de déménagement. J'espère que vous êtes bien installé, en tout cas soyez le bienvenu dans le quartier. » Ne jugeant pas nécessaire de le contredire, le camion de déménagement ayant certainement à faire plus loin dans la rue et Hassan s'étant contenté de la bonne vieille méthode du pote qui prêtait ses muscles et le coffre de sa voiture pur économiser du temps et de l'argent, Hassan s'était contenté de sourire en retour « Merci beaucoup. » Le quartier avait beau ne pas lui être totalement inconnu, ce n'était pas la même chose que d'y avoir des souvenirs et des habitudes, et d'en faire définitivement partie. Rapidement pourtant, Hassan en était venu à l'objet véritable de sa visite, n'étant pas simplement venu ici pour se présenter. Observant toujours son interlocuteur du coin de l'oeil avec cette impression de déjà-vu qu'il ne parvenait pas à expliquer, il s'était délesté du colis en le lui tendant, tandis que le brun tentait de se justifier « Merci pour le colis. Et je suis désolé que vous ayez du le réceptionner, généralement il y a toujours quelqu'un à la maison, mais aujourd'hui la baby-sitter nous a fait faux bond. » Baby-sitter, ce qui signifiait enfants ; Hassan n'avait pas encore eu l'occasion de les apercevoir, mais cela ne saurait donc probablement tarder. Secouant doucement la tête, un sourire calme toujours sur le visage, il avait répondu « Oh non, il n'y a aucun souci. Si cela pouvait vous éviter un trajet inutile jusqu'au bureau de poste. » Et puis cela n'avait pas coûté grand effort à Hassan que de signer un reçu et de traverser son jardin avec le paquet, d'autant plus lorsque l'on avait la fibre aussi serviable que pouvait l'avoir le brun. Les mains désormais libres, il s'était risqué à tendre une main prudente vers le chien qui tentait désespérément d'attirer l'attention sur lui plutôt que sur ce vulgaire colis « Oui, il s'appelle Jango. C'est notre chien depuis presque dix ans. Mais ne vous inquiétez pas, il n'a pas encore trouvé le moyen d’atterrir dans les jardins environnants, même si je le soupçonne d'essayer régulièrement. » Hassan avait laissé échapper un léger rire, et s'était demandé un instant si son Spike serait aussi vaillant que le dénomme Jango, lorsqu'il aurait dix ans. « Quelque part ça me rassure sur la solidité de la clôture, j'ai bien peur que le mien finisse par avoir le même genre d'idées, c'est nouveau pour lui d'avoir un jardin. » Mais c'était l'une des conditions non-négociables lorsqu'Hassan s'était mis en quête d'un nouveau logement, Spike avait absolument besoin d'un jardin, il avait presque atteint sa taille adulte et on le sentait un peu à l'étroit dans l'appartement qui les accueillait jusque-là. Pensant sa "mission" terminée, et ne souhaitant pas abuser inutilement du temps de son voisin, Hassan s'apprêtait à prendre poliment congé. Au lieu de ça l'homme avait libéré l'une de ses mains, tenant son carton en équilibre, pour la lui tendre en se présentant « Je suis Saul. » Attrapant la main tendue pour la serrer un instant, esquissant un nouveau sourire, il avait répondu « Hassan, enchanté. » Une chose était certaine en tout cas, le sentiment de déjà-vu qui habitant le brun semblait être à sens unique, Saul ne semblant lui pas se poser la question un instant. « Entrez, je vais vous servir quelque chose à boire. Ce n'est pas tous les jours que j'ai l'occasion de rencontrer mes nouveaux voisins, ni que je me retrouve seul dans cette grande maison. » En concluant donc d'une famille nombreuse, tout en se demandant bien pourquoi tous ces éléments devraient l'intéresser à ce point, il s'était néanmoins montré hésitant. Hassan avait toujours peur de déranger. « Oh je ne sais pas, je ... vous avez probablement des choses à f- ... » Mais semblant ne pas l'entendre - ou ne pas l'écouter - l'homme avait laissé la porte ouverte pour lui permettre d'entrer, et tourné les talons pour poser le colis sur un guéridon. Hassan s'était laissé convaincre, ayant déjà mis un pied dans la maison lorsque Saul s'était retourné vers lui « Je ne voudrais pas vous déranger. » Surtout s'il n'avait pas souvent l'occasion de profiter de sa maison pour lui seul, Hassan comprenait que l'on ait parfois besoin d'un peu de calme et de solitude, il le ressentait déjà parfois après une journée entière à baby-sitter son neveu et sa nièce, alors il n'osait pas imaginer comment on s'en sortait lorsqu'il s'agissait de ses propres enfants. « Dites, je ... ma question va vous sembler un peu étrange, mais vous ne travailleriez pas à l'université, à tout hasard ? » C'était plus fort que lui, il ne parviendrait pas à se sortir cette impression de la tête tant qu'il n'aurait pas cherché à la résoudre. Au pire des cas il se trompait, et alors ?
|
| | | | (#)Dim 25 Sep 2016 - 3:03 | |
| Si Saul n'avait pas l'habitude de quitter son travail avant une certaine heure – qui variait généralement entre la toute fin de l'après-midi et le milieu de la soirée – il avait encore moins l'habitude de regagner son domicile avant sa femme et ses enfants. C'est ce qui expliquait qu'aujourd'hui, tout lui semble si étrangement silencieux, comme s'il avait poussé la porte d'une maison qui paraissait en tous points identique à la sienne, mais à qui il manquait ce supplément d'âme, ces détails si caractéristiques de la présence de sa famille. Les rires de ses fils, les pleurs de sa fille, le son des talons d'Elsie qui résonnaient contre le parquet. Toutes ces choses qui pouvaient parfois s'avérer étouffantes lorsqu'on les retrouvait soir après soir pendant des années, mais qui ce soir manquaient cruellement au brun tandis qu'il retrouvait cette demeure froide, subitement trop grande pour lui tout seul. Accueilli par son chien, il profita d'avoir du temps devant lui pour gagner l'étage et se débarrasser de certaines de ses affaires, là encore légèrement perturbé de ne pas retrouver les chaussures de ses fils balancés à droite et à gauche de leurs chambres, ou les colliers de sa femme disposés sur sa coiffeuse. Ainsi, lorsqu'il fut finalement tiré de ses pensées par le bruit de la sonnette, Saul fut forcé d'admettre qu'il n'était pas mécontent qu'on vienne l'arracher à sa solitude. Regagnant le rez-de-chaussée pour ouvrir la porte, c'est alors face à un homme qui se présenta d'emblée comme son nouveau voisin qu'il se retrouva. Saul, qui mentirait s'il disait qu'il avait le temps de se tenir parfaitement au courant de toutes les allées et venues dans le voisinage, tenta de se rappeler du moment où il avait pu apercevoir ce qu'il avait pris pour un camion de déménagement, avant de souhaiter la bienvenue au jeune homme, et d'apprendre que celui-ci était en fait surtout venu lui apporter un colis qu'il avait réceptionné à sa place. Une intention louable, et que Saul n'oublierait pas, tandis qu'il se sentit d'abord désolé de l'avoir contraint à réceptionner son colis alors qu'en règle générale ses voisins n'avaient pas à se déranger puisqu'il y avait toujours quelqu'un à son domicile. Du moins jusqu'à aujourd'hui. « Mais vous avez sans doute suffisamment à faire avec votre emménagement, ça m'embête que vous ayez du gérer ce genre de détails. » Saul souffla alors, dans un fin sourire et après s'être emparé du colis en question, tandis qu'il ajouta. « Comptez sur nous pour vous rendre la pareille, que ce soit pour réceptionner un colis ou si vous avez besoin d'un coup de main. Il y aura toujours quelqu'un pour vous ouvrir la porte et vous rendre service. » Qu'il s'agisse de lui prêter du sucre ou bien de l'aider à monter une étagère, Saul parlait ici très sérieusement. Elsie pouvait paraître un peu distante quand on ne la connaissait pas, mais c'était une femme véritablement chaleureuse lorsqu'on ne se laissait pas impressionner. La journée, la baby-sitter de leurs enfants accepterait sans nul doute de le dépanner, et lui, bien sûr, se ferait une joie de lui renvoyer l'ascenseur si son voisin revenait à un moment où il était également à la maison. Évoquant par la suite Jango et sa tendance à vouloir découvrir le voisinage, c'est dans un léger rire qu'il accueillit la réplique de son interlocuteur – après avoir noté qu'il possédait lui-même un chien, ce qui expliquait qu'il ne semble absolument pas réticent face à ces bêtes. « C'est donc la première fois que vous emménagez en pavillon ? Est-ce que je peux vous demander dans quel coin vous viviez avant d'arriver dans le quartier ? » C'était une question qui pouvait sembler anodine, mais qui malgré tout lui paraissait presque indiscrète après seulement une demi minute de conversation. Les deux hommes se présentèrent finalement l'un à l'autre, et c'est sans plus tarder que Saul invita Hassan à entrer pour se désaltérer, songeant que l'occasion était trop belle pour ne pas en profiter pour apprendre à le connaître. Néanmoins son voisin semblait hésiter, ce que Saul nota après avoir déposé le colis dans l'entrée et être revenu vers lui. « Vous ne dérangez personne, rassurez-vous. Ma femme ne rentrera probablement pas avant une bonne demi-heure, et d'ici là j'aime autant poursuivre notre conversation plutôt que de surveiller notre allée depuis la fenêtre du salon. » Conscient que cette confession avait un coté légèrement pathétique lorsqu'on s'imaginait la scène en elle-même, Saul reprit aussitôt, dans un rire spontané. « Je n'ai vraiment pas l'habitude de rentrer le premier, c'est tout juste si je saurais quoi faire de mes dix doigts en l'attendant. » C'est pour cette raison qu'il risquait de tourner en rond d'ici à ce qu'Elsie et les enfants le rejoignent, et donc qu'il préférait pouvoir partager un verre avec leur nouveau voisin, ne serait-ce que pour le remercier du service qu'il leur avait rendu. Finalement Hassan se laissa convaincre, et l'homme lui posa à ce moment-là une question assez inattendue, mais que Saul accueillit par un nouveau sourire. « A Queensland ? » Il demanda d'abord, associant inévitablement le terme « université » à la fac qu'il avait fréquenté et connaissait donc le mieux. « Je n'y travaille pas, non, mais j'y ai fait mes études il y a de ça une douzaine d'années, et il m'arrive encore parfois de m'y arrêter, par nostalgie. » Parce que tout ou presque s'était joué pour lui à l'époque où il avait foulé les bancs de la Queensland University. C'est là qu'il avait véritablement trouvé sa voie, qu'il s'était essayé à la dramaturgie pour la première fois, qu'il avait rencontré certains de ses associés, mais aussi sa femme et la mère de ses trois enfants. « Est-ce que c'est votre cas ? » Il supposait du coup qu'Hassan travaillait peut être à Queensland s'il avait d'abord envisagé l'idée que leurs routes s'y étaient déjà croisées, comme Saul l'avait supposé à l'entente de sa question. « Il m'arrive par contre de donner des cours à la St Anthony's School. Si vous avez des enfants, nous nous y sommes peut être déjà croisés sans le savoir. » Saul réalisait qu'il ignorait encore beaucoup de choses sur son nouveau voisin, ainsi c'était l'occasion d'en apprendre davantage sur lui et sur la famille qui l'attendait peut être de l'autre coté de la clôture. « Je vous en prie, installez-vous dans le salon. » Il reprit après quelques secondes, tout en invitant Hassan à découvrir le rez-de-chaussée, et notamment la pièce principale, où l'attendaient deux vastes canapés semblant eux aussi particulièrement esseulés en l'absence de ses enfants. « Est-ce qu'une bière vous ferait plaisir ? J'achète surtout des marques sud-américaines, mais il doit me rester de la Coopers Pale Ale, si mon demi-frère n'a pas déjà dilapidé nos stocks. » Parce qu'il était fréquent qu'Abel utilise son double des clés pour investir la maison pendant la journée, puis pour en repartir les bras chargés de denrées en tous genres qu'il « empruntait » à son demi-frère histoire d'économiser le peu d'argent qu'il s'autorisait à gagner. Saul ne l'avouerait pas devant Hassan, mais Abel était bien le seul dont il ne regrettait pas l'absence à cet instant précis, alors que son demi-frère n'aurait peut être pas fait la meilleure première impression qui soit à leur nouveau voisin. |
| | | | (#)Mer 12 Oct 2016 - 23:02 | |
| En vérité Hassan avait bien hésité à aller se présenter à ses voisins de manière plus formelle, et sans forcément attendre une excuse aussi courue que celle du colis récupéré à leur place, mais il s'était retrouvé pris d'une appréhension qui l'avait poussé à sans cesse remettre cela à plus tard. Le couple qui leur avait jadis racheté la maison à Qasim et lui, et qui venait de la lui revendre à nouveau, était un couple charmant et d'une profonde gentillesse, Hassan avait eu l'occasion de s'en rendre compte, et sans doute ses désormais voisins devaient-ils se méfier un peu de lui, qui avait pris la place de ces retraités serviables et sans histoires. Contrairement à ce qui était sous-entendu, Hassan ne se formalisait en tout cas pas d'un service aussi aisément rendu, et dont il espérait au mieux un retour d'ascenseur dans l'éventualité où le facteur dépose un colis durant sa propre absence. « Comptez sur nous pour vous rendre la pareille, que ce soit pour réceptionner un colis ou si vous avez besoin d'un coup de main. Il y aura toujours quelqu'un pour vous ouvrir la porte et vous rendre service. » S'étant donc entendus, Hassan s'était contenté d'un sourire poli et d'un léger signe de tête. Il y avait en réalité bien un petit service que le brun était tenté de demander, mais il préférait se faire une idée plus détaillée de son interlocuteur avant de la lui soumettre. Il devait aussi régler cette impression de déjà-vu qui lui accaparait l'esprit. « C'est donc la première fois que vous emménagez en pavillon ? Est-ce que je peux vous demander dans quel coin vous viviez avant d'arriver dans le quartier ? » avait fini par questionner le dénommé Saul, lorsqu'Hassan avait laissé entendre que son propre chien, encore jeune, découvrait tout juste le fait d'avoir un jardin et les possibilités qui allaient avec. « Oh non, j'ai vécu dans ce quartier pendant un paquet d'années. » Mieux encore, dans la maison d'à côté « Mais les choses ont fait que j'ai du déménager quelques temps à Fortitude Valley, et je n'ai eu Spike - mon chien - qu'après. » Nul doute que l'animal se ferait très vite au fait d'avoir un peu de verdure et d'extérieur à sa disposition, particulièrement aux heures où Hassan s'absentait. Ayant finalement été invité à entrer quelques instants, Hassan s'était montré un peu hésitant, ne souhaitant pas déranger ou donner l'impression d'imposer sa présence d'une quelconque façon. « Vous ne dérangez personne, rassurez-vous. Ma femme ne rentrera probablement pas avant une bonne demi-heure, et d'ici là j'aime autant poursuivre notre conversation plutôt que de surveiller notre allée depuis la fenêtre du salon. » Ayant de toute façon fini par regagner l'intérieur comme pour persuader Hassan de le suivre et de refermer la porte derrière lui s'il souhaitait poursuivre cette conversation, le brun s'était donc finalement exécuté, accordant an passage une caresse au chien qui venait renifler ses mains avec curiosité. « Je n'ai vraiment pas l'habitude de rentrer le premier, c'est tout juste si je saurais quoi faire de mes dix doigts en l'attendant. » Se laissant aller à un sourire amusé, Hassan s'était gardé de tout commentaire, ayant lui été habitué, à l'époque où il était marié, à rentrer le premier sans pour autant ne jamais manquer d'occupations en attendant le retour de Joanne. Au lieu de cela, et parce qu'il n'y tenait plus, le brun avait fini par poser la question qui lui brûlait les lèvres et hasardé sur l'endroit où lui et son nouveau voisin auraient bien déjà pu se croiser « A Queensland ? Je n'y travaille pas, non, mais j'y ai fait mes études il y a de ça une douzaine d'années, et il m'arrive encore parfois de m'y arrêter, par nostalgie. » Ce n'était donc pas cela, Hassan n'avait pas une mémoire des visages suffisamment développée pour avoir retenu un visage qu'il n'aurait croisé qu'une seule fois par le plus grand des hasards « Est-ce que c'est votre cas ? » - « J'y enseigne, oui. » Mais sans connaître l'âge véritable de Saul Hassan pouvait estimer à vue d'oeil que ce n'était pas non plus en tant qu'élèves qu'ils auraient pu se croiser. « Il m'arrive par contre de donner des cours à la St Anthony's School. Si vous avez des enfants, nous nous y sommes peut être déjà croisés sans le savoir. » La question sur les enfants, à mesure que le temps passait, prenait aux yeux d'Hassan des airs de running gag dont il se serait volontiers passé. Impassible, il s'était pourtant contenté de répondre dans un sourire « Je n'ai pas d'enfants, non. Mais laissez, ça doit être un de ces sentiments de déjà-vu qui ne s'explique pas vraiment, vous me faites sans doute juste penser à quelqu'un. » Et probablement que le quelqu'un en question lui reviendrait en mémoire plus tard, à un moment où il aurait cessé de se triturer le cerveau avec cette question. Menant Hassan au salon, ce dernier n'avait pas pu entièrement s'empêcher de jeter un regard curieux autour de lui, saisissant au passage les similitudes existant entre cette maison et la sienne, probablement construites sur le même modèle. « Je vous en prie, installez-vous dans le salon. » Le salon, pareil à celui d'Hassan, possédait une grande baie vitrée permettant de voir et d'accéder au jardin, de l'autre côté. Un jardin parsemés de jouets qui ne laissaient aucun doute sur l'existence des enfants de Saul « Est-ce qu'une bière vous ferait plaisir ? J'achète surtout des marques sud-américaines, mais il doit me rester de la Coopers Pale Ale, si mon demi-frère n'a pas déjà dilapidé nos stocks. » Consentant à prendre place sur l'un des canapés désigné, il avait néanmoins secoué la tête avec politesse avant de refuser « Merci, je ne bois pas d'alcool, mais un thé ou un verre d'eau fera amplement l'affaire. » Disparaissant un instant dans ce qui était probablement la cuisine, Saul avait laissé Hassan quelques instants, ce dernier frottant ses deux mains l'une contre l'autre d'un air un peu gauche, mal à l'aise dans cet environnement inconnu. Se levant à nouveau, il avait fait quelques pas pour rejoindre la baie vitrée d'un air pensif, reposant les yeux sur son hôte à son retour « J'en conclus que vous avez des enfants, de votre côté ? » La mention de la baby-sitter au début de leur conversation et les jouets du jardin répondaient déjà à la question, cela dit, mais n'empêchait pas Hassan de vouloir faire la conversation. La silhouette de Saul cependant, ainsi de profil, avait comme l'effet d'un flash pour Hassan qui d'un seul coup s'était rappelé cette photo punaisée sur l'un des murs du bureau de Deepika. « C'est bon, je me rappelle d'où je vous connais. Deepika Rajadi ? Il y a une photo de vous deux dans son bureau. C'est une amie. » Une très bonne amie en réalité, mais Hassan n'était pas certain que ce détail intéresse beaucoup le brun. Cela faisait en tout cas au moins un mystère résolu.
|
| | | | (#)Ven 21 Oct 2016 - 15:14 | |
| Si Saul n'était jamais le dernier pour rendre service à l'un de ses voisins – qu'il s'agisse de le dépanner d'un peu de sucre ou de l'aider à porter ses sacs de courses – il était toujours d'autant plus disposé à se montrer serviable lorsqu'on lui avait au préalable rendu un précieux service. Et jugeant de toute façon chaque coup de main comme étant « précieux » dès lors qu'il leur facilitait la vie à sa famille et à lui, il était définitivement courant qu'il entreprenne de rendre la pareille. Et ici, tandis qu'il comprenait que son voisin venait tout juste d'emménager dans la maison d'à coté et qu'il n'avait pourtant pas hésité à prendre de son temps pour accepter la réception d'un de leurs colis pour ensuite venir le leur rapporter, ça l'encourageait décidément à se montrer redevable. Ainsi, sans savoir quand ni comment il pourrait renvoyer l'ascenseur au jeune homme, Saul ne manquerait pas de se rappeler de ce service rendu si un beau jour son voisin nécessitait son aide. Comprenant en tout cas qu'il possédait lui aussi un chien et que ce dernier se familiariserait sous peu avec le fait d'avoir un jardin, c'est instinctivement que Saul supposa que son voisin n'avait encore jamais vécu en pavillon. Et pourtant, par le biais d'une confession pour le moins inattendue, celui-ci lui apprit rapidement qu'il avait en fait déjà vécu dans ce même quartier, plusieurs années auparavant. « Oh mais alors, vous devez déjà avoir vos repères. Peut être même que vous viviez ici avant même que ma femme et moi n'emménagions dans le quartier ? » Saul supposa alors, un sourire enthousiaste accroché aux lèvres et envahi il est vrai d'une certaine curiosité, bien qu'il formule ici certaines de ses interrogations à demi-mot. « Ça fait une dizaine d'années que nous avons acheté cette maison. Je m'étais laissé convaincre par mon père de ne surtout pas emménager avec Elsie avant que nous nous soyons mariés, et je crois qu'elle n'était pas mécontente non plus de garder un peu plus longtemps son indépendance. » De son coté, Saul n'avait jamais tellement de mal à s'étendre sur ce qui avait fait qu'il se retrouvait aujourd'hui sur le seuil de cette spacieuse demeure, à discuter avec son voisin. Le ton de la confidence n'était jamais bien loin, quand bien même il s'agissait ici de sa première conversation avec son voisin. C'est ainsi sur le même ton que Saul ajouta par la suite se sentir aujourd'hui un peu seul dans cette maison généralement peuplée des rires de ses enfants, alors qu'il était généralement rare qu'il investisse les lieux avant même que sa femme ne soit rentrée du travail. Cette confession faite, il accueillit en tout cas Hassan à l'intérieur de son habitation, bien décidé à lui faire comprendre qu'il ne le dérangeait en aucun cas. Ce dernier formula alors une question qui eut le mérite d'étonner légèrement le brun, lui qui n'avait plus entendu directement parler de l'université de Queensland depuis un certain nombre d'années. Hassan semblait se demander s'il y travaillait, ce à quoi Saul lui répondit que ce n'était pas le cas, avant d'apprendre que son voisin, de son coté, y enseignait effectivement. « Et vous vous y plaisez ? Je garde personnellement de bons souvenirs de cette fac, pourtant dieu sait que j'étais au départ réticent à l'idée de m'enfermer entre les quatre murs d'un amphithéâtre lorsque je réfléchissais encore à quoi faire de ma vie. » Émettant un léger rire, Saul eut presque un pincement au cœur lorsqu'il repensa brièvement aux quelques années qu'il avait passé à l'université. Il est vrai qu'il ne s'y était pas forcément orienté de bon cœur au départ – ayant sans doute développé un certain esprit de contradiction après que son père ait tant insisté pour qu'il se forme à la dramaturgie sur les bancs de l'université – mais aujourd'hui Saul ne regrettait en aucun cas cette partie de sa vie, et pas seulement parce qu'il vivait aujourd'hui de sa passion et partageait toujours la vie de celle qui avait croisé sa route durant sa vie d'étudiant. « Vous savez ce qu'on dit, on a tous un sosie quelque part. » Saul reprit par la suite, dans un nouveau sourire, supposant qu'il n'y avait effectivement pas matière à chercher beaucoup plus loin, ou que dans tous les cas l'évidence leur sauterait peut être aux yeux bien assez tôt. Invitant alors Hassan à gagner le salon, Saul ne tarda pas à lui proposer de se désaltérer, invoquant la traditionnelle bière à laquelle beaucoup d'amateurs ne sauraient résister. Mais à la réponse bientôt formulée par son voisin, Saul se sentit presque bête de s'être immédiatement persuadé qu'il apprécierait une boisson alcoolisée. « Oh, bien sûr, je vous apporte ça tout de suite. » Croyant deviner qu'il était ici soit question de convictions religieuses, soit de raisons au moins aussi légitimes, Saul se mit tout naturellement en route vers la cuisine, où il entreprit bientôt de faire chauffer un peu d'eau chaude, avant de réapparaître dans le salon et de tendre à Hassan une tasse pleine, accompagnée de divers sachets de thé qu'il avait embarqué à défaut de savoir ce qui lui ferait plaisir. « Vous avez de la chance, il y a quelques amateurs de thé sous ce toit. » Et affichant un sourire teinté de malice tandis qu'il laissa planer le doute quant à l'identité des amateurs en question, Saul rejoignit Hassan après qu'il se soit approché de la baie vitrée, accueillant sa prochaine question par un hochement de tête. « Oui, trois enfants. L’aîné a sept ans, le cadet en a trois et la petite dernière fêtera bientôt son premier anniversaire. » Saul adoptait toujours un ton particulier lorsqu'il évoquait ses enfants. Un ton qui laissait très facilement deviner qu'en plus d'être la prunelle de ses yeux, ils étaient à tous les niveaux sa plus grande réussite, mais aussi sa plus grande fierté. C'était parfois difficile à concevoir dans un milieu comme le sien, où beaucoup de metteurs en scène renonçaient à fonder une famille pour rester marié à leur art, mais Saul n'avait jamais caché, pas même à ses collègues, que sa famille était la seule chose qui passerait toujours avant sa passion. Hassan reprit finalement la parole, et Saul resta interdit quelques instants. Il évoqua Deepika, un nom qui forcément attira toute son attention, et c'est lorsqu'il assimila toutes ses paroles que Saul afficha une expression incrédule, à mi-chemin entre la surprise et l'exaltation. « Oh vraiment, vous êtes un ami de Deepika ? En voilà une coïncidence ! » Parce que sans s'y connaître en probabilités, les chances pour que deux amis proches de la brune qui ne s'étaient jusqu'ici jamais rencontrés se retrouvent un beau jour dans le même salon, et soient qui plus est voisins depuis peu, étaient selon lui assez faibles au départ. « Je la connais pour ma part depuis maintenant plusieurs années, nous sommes tous les deux dans le milieu du spectacle et nous avons souvent collaboré avant de devenir très amis. » Il ne saurait en vérité plus tellement dire si leur amitié était née de leurs fréquentes collaborations ou bien s'ils avaient justement entrepris de s'associer régulièrement parce que le courant était rapidement passé entre la brune et lui. « D'ailleurs, s'il arrive qu'elle disparaisse pendant plusieurs jours, sachez que j'y suis souvent pour quelque chose. Deepika m'accompagne parfois au gré de mes déplacements professionnels, un peu comme une bonne étoile dont je n'aime pas me séparer. » Il ajouta d'ailleurs, toujours souriant, avant d'être naturellement envahi d'une certaine curiosité à l'idée que son voisin ait donc eu l'occasion de faire le lien entre Deepika et lui, alors que lui avait encore assez peu d'éléments sur la relation qui le liait à la brune. « Et vous alors, comment vous êtes-vous rencontrés ? Est-ce que vous êtes sur le point de m'avouer que la danse est votre plaisir coupable ? » Il émit cette fois un léger rire qui témoignait facilement du fait qu'il n'envisage pas cette idée très sérieusement, car même s'il y avait effectivement une chance pour que la danse soit ce qui avait rapproché Hassan et Deepika, il tendait il est vrai à privilégier d'autres pistes de prime abord, peut être parce qu'il peinait un peu à imaginer son voisin investir les salles de danse entre deux cours à l'université. Se tournant pleinement vers lui, Saul ajouta. « Deepika est aussi amie avec ma femme, elle vient parfois dîner à la maison. Alors maintenant que je sais que vous êtes proches, je n'hésiterai pas à vous convier à notre table la prochaine fois qu'elle nous rendra visite. » Il était de toute façon probable qu'Hassan n'échappe pas éternellement à une invitation à dîner, pas alors qu'il habitait la maison juste à coté de la leur et qu'Elsie serait sans doute pressée de rencontrer leur nouveau voisin à son tour. « Si ça vous convient, bien sûr. » Saul nuança toutefois, ne voulant pas donner l'impression à Hassan de lui forcer la main, quand bien même il supposait qu'il serait d'autant plus à l'aise en compagnie de Deepika, qui elle ne se ferait certainement pas prier non plus pour venir dîner en compagnie de plusieurs de ses amis.
Dernière édition par Saul Masterson le Ven 11 Nov 2016 - 16:51, édité 1 fois |
| | | | (#)Jeu 3 Nov 2016 - 10:51 | |
| C'était la preuve ultime du côté casanier d'Hassan en fin de compte, le fait que non content de ne pas s'imaginer vivre ailleurs qu'à Brisbane, il n'ait retenu de son année passée à Fortitude Valley que le fait qu'il était définitivement fait pour vivre à Logan City. Le changement de décor et d'ambiance d'un quartier à l'autre était tel que l'on pouvait presque croire à plusieurs villes différentes, et le brun ne se voyait pas sacrifier à nouveau la tranquillité et la verdure de la banlieue pour l'agitation permanente du centre-ville. Peut-être était-ce simplement une question d'habitude ? Il n'avait pas mis beaucoup de volonté dans le fait de s'intégrer dans son ancien quartier, refroidi sans doute par l'existence de son voisin, celui dont il préférerait définitivement oublier l'existence et les blessures physiques ayant résulté de leur dernière confrontation … Et pourtant dieu sait que cela n'avait pas échaudé Hassan pour autant, puisqu'il ne s'était pas méfié un seul instant en allant sonner à la porte du dénommé Saul. Quelques minutes à peine lui avaient en effet semblé suffisantes pour conclure que son nouveau voisin était de meilleur augure que l'ancien, et c'est donc un peu sans réfléchir et dans le simple but de faire la conversation que le brun avait fini par avouer ne pas être un véritable nouvel arrivant concernant ce quartier. « Oh mais alors vous devez déjà avoir vos repères. Peut-être même que vous viviez ici avant même que ma femme et moi n'emménagions dans le quartier ? » C'était même plus que probable, Hassan pouvait le deviner à vue d’œil rien qu'en jaugeant l'âge de Saul, probablement pas beaucoup plus vieux que lui « Ça fait une dizaine d'années que nous avons acheté cette maison. Je m'étais laissé convaincre par mon père de ne surtout pas emménager avec Elsie avant que nous nous soyons mariés, et je crois qu'elle n'était pas mécontente non plus de garder un peu plus longtemps son indépendance. » Hassan avait esquissé un sourire poli, bien que de son côté intimement persuadé que l'on ne connaissait pas véritablement quelqu'un tant que l'on n'avait pas fait l'expérience de vivre sous le même toit que lui, avec aucune possibilité d'échapper à ses qualités, mais aussi et surtout à ses défauts. « Pour être tout à fait honnête, la maison d'à côté a appartenu à mes parents, alors je crois que niveau repères on peut difficilement faire plus solides. » Il avait esquissé un vague sourire « Mais c'était il y a plus de vingt ans, après ça j'ai vécu un peu plus prêt de la plage. Mais le couple d'anciens propriétaires l'a remise en vente au moment où je cherchais à déménager, alors … disons que j'ai pris ça comme un signe. Mon côté nostalgique, sans doute. » C'était même certain. Sans dire qu'il n'était jamais passé à autre chose, puisqu'il avait fini par le faire, que son frère et lui aient du se séparer de cette maison dans un premier temps lui avait toujours laissé un goût un peu amer dans la bouche. Accompagnant son hôte au salon, il n'avait pas su résister plus longtemps à l'envie de lui demander s'il ne fréquentait pas, d'une manière ou d'une autre, l'université de Brisbane, tant l'impression de l'avoir déjà vu ailleurs laissait Hassan dubitatif. Pas que ce soit une mauvaise chose, mais il craignait d'être en train de se rendre coupable d'impolitesse en ne reconnaissant pas quelqu'un qu'il devrait reconnaître et qui pourrait, de ce fait, se sentir vexé. Mais si Saul reconnaissait bien en avoir été élève par le passé, il n'avait désormais plus vraiment de raisons de s'y rendre, et il semblait donc très peu probable que ce soit à cet endroit que le brun l'ait déjà croisé. « Et vous vous y plaisez ? » avait néanmoins questionné Saul lorsqu'Hassan avait admis y être enseignant, en plus d'y avoir été élève « Je garde personnellement de bons souvenirs de cette fac, pourtant dieu sait que j'étais au départ réticent à l'idée de m'enfermer entre quatre murs d'un amphithéâtre lorsque je réfléchissais encore à quoi faire de ma vie. » Hassan avait esquissé un sourire, et secoué légèrement la tête « Je crois que c'est le point de vue d'un grand nombre d'élèves, encore aujourd'hui. » Peut-être même était-ce pire en réalité, Hassan avait cette impression que la génération d'étudiants auxquels il enseignait désormais était en questionnements incessants concernant son avenir. « Mais j'aime à penser que s'il peut arriver de commencer des études totalement par hasard, on en arrive rarement au bout pour les mêmes raisons. On finit forcément par trouver sa voie. » Entre temps il fallait forcément s'y être trouvé un minimum d'intérêt, sans quoi cela n'avait pas le moindre sens. « Mais je m'y plais, oui. L'enseignement n'était pas ma vocation première, mais maintenant je ne m'imagine plus faire autre chose. » Lui aussi avait trouvé sa voie, en fin de compte. Mais pour en revenir au sujet initial, ce n'était donc pas à cette occasion qu'il aurait pu rencontrer Saul, et ne voyant pas d'autre possibilité tant son champ d'activité se réduisait au minimum syndical depuis ses ennuis de santé, Hassan en avait simplement conclu à un hasard et une fausse impression. « Vous savez ce qu'on dit, on a tous un sosie quelque part. » avait de son côté conclu Saul dans un sourire. S'étant d'abord vu proposer une bière, Hassan l'avait déclinée poliment comme à chaque fois que lui était proposé de l'alcool, mais s'était permis néanmoins de suggérer un thé ou même un verre d'eau dont il se contenterait sans le moindre mal « Oh, bien sûr, je vous apporte ça tout de suite. » Laissé seul quelques instants Hassan n'avait pas résisté au brin de curiosité qui lui avait fait parcourir la pièce des yeux un peu plus en détails, mais une fois Saul reparu il avait reporté toute son attention sur lui. « Vous avez de la chance, il y a quelques amateurs de thé sous ce toit. » Saisissant la tasse qui lui était tendue avec un sourire, Hassan avait commenté d'un ton amusé « Dans mon cas je pense qu'on peut même presque parler d'addiction. » avant de reprendre un peu de sérieux et de questionner Saul sur ses enfants, dont il n'ignorait pas l'existence mais qu'il n'avait jamais réellement eu l'occasion de croiser jusqu'à présent, en ignorant donc même le nombre. « Oui, trois enfants. L'aîné a sept ans, le cadet en a trois et la petite dernière fêtera bientôt son premier anniversaire. » La manière dont il en parlait avait un côté presque attendrissant qui avait arraché à Hassan un nouveau sourire. Il connaissait cet air-là, son frère possédait pratiquement le même lorsqu'il était question de ses propres enfants, et Hassan connaissait suffisamment Qasim pour savoir que ce regard-là n'était jamais destiné à d'autres que sa progéniture. « J'ai une nièce de six ans et un neveu de quatre qui risquent de passer bon nombre de leurs vacances dans les parages, je suis sûr qu'ils ne seront pas contre un peu de compagnie pour partager leurs jeux. Alors dans l'éventualité où votre baby-sitter vous ferait à nouveau faux-bond. » Ou même pas forcément, d'ailleurs. Sans doute était-ce d'avoir laissé cela dans un coin de sa tête sans plus espérer trouver la réponse qui avait changé la donne, mais alors que cela semblait sortir de nul part Hassan avait soudain eu l'illumination, et retrouvé pourquoi le visage de Saul ne lui était pas entièrement inconnu. Il n'avait jamais croisé l'homme nul part en fin de compte, en revanche il avait désormais en tête cette image précise du cliché placardé au milieu d'autres sur le tableau en liège qui trônait derrière le bureau de Deepika, et c'était bien Saul qui se tenait tout sourire à côté de la danseuse sur ce cliché. « Oh vraiment, vous êtes un ami de Deepika ? En voilà une coïncidence ! » C'était en effet un heureux hasard que deux connaissances de la jeune femme se retrouvent ainsi voisin sans avoir rien fait de particulier pour qu'il en soit ainsi, bien qu'Hassan ne soit pas vraiment partisan du hasard, de manière générale. « Je la connais pour ma part depuis maintenant plusieurs années, nous sommes tous les deux dans le milieu du spectacle et nous avons souvent collaboré avant de devenir très amis. » Hassan lui n'avait jamais eu l'occasion de travailler avec Dee, mais il croyait sur paroles ceux qui la disaient être un vrai requin dans son travail ; C'est qu'il connaissait le tempérament de la jeune indienne. « D'ailleurs, s'il arrive qu'elle disparaisse pendant plusieurs jours, sachez que j'y suis souvent pour quelque chose. Deepika m'accompagne parfois au gré de mes déplacements professionnels, un peu comme une bonne étoile dont je n'aime pas me séparer. » C'était donc probablement avec lui que la jeune femme se trouvait il y a quelques temps, lorsqu'elle s'était absentée quelques jours pour il ne savait plus quel pays d'Europe du Nord. D'ordinaire il accrochait les cartes postales qu'elle lui envoyait sur son frigo, mais avec le déménagement toutes croupissaient pour l'instant dans un carton avant de retrouver leur place. « C'est donc vous le coupable. » avait en tout cas plaisanté Hassan d'un ton amusé, tout en trempant ses lèvres dans sa tasse de thé pendant que Saul questionnait « Et vous alors, comment vous êtes-vous rencontrés ? Est-ce que vous êtes sur le point de m'avouer que la danse est votre plaisir coupable ? » Laissant échapper un rire, il avait secoué doucement la tête avant de répondre « C'est un domaine dont je préfère ne pas me mêler, même si j'avoue ressentir ce brin de fierté un peu ridicule à chaque fois que j'ai l'occasion de la voir danser. » Ridicule non pas parce qu'elle l'était, mais parce que lui n'avait pas de quoi être fier, il n'était pour presque rien dans l'ascension de la jeune femme, et aimait à penser que si lui ne lui avait pas tendu la main un autre l'aurait fait. « C'est une amie de longue date, elle a vécu en collocation avec mon frère et moi durant quelques années à son arrivée à Brisbane. » N'ayant aucune idée du niveau de confiance que Dee avait envers Saul, et donc des connaissances qu'il pouvait avoir de son parcours un peu atypique, il n'avait pas pris le risque de partager avec lui le moindre détail supplémentaire, notamment concernant ce qui l'avait amené en Australie en premier lieu. « Disons que malgré son côté très indépendant c'est plus un membre de la famille qu'une simple amie, à mes yeux. » C'était un peu compliqué à expliquer à quelqu'un d'extérieur, d'autant plus qu'Hassan avait une notion de la famille un peu atypique du fait que la sienne s'était un peu faite, défaite, refaire au fil du temps, mais Deepika possédait à ses yeux un statut particulier et difficile à définir. « Deepika est aussi amie avec ma femme, elle vient parfois dîner à la maison. Alors maintenant que je sais que vous êtes proches, je n'hésiterai pas à vous convier à notre table la prochaine fois qu'elle nous rendra visite. Si cela vous convient, bien sûr. » S'installant à nouveau sur le canapé tandis que Saul en faisait de même, Hassan avait posé sa tasse sur la table basse pour la laisser refroidir un peu, et acquiescé « A vrai dire elle n'a pas encore eu l'occasion de voir où j'avais emménagé, ça a été compliqué d'accorder nos emplois du temps ces derniers temps, alors je pense qu'elle en sera la première surprise. » Car si elle savait qu'Hassan avait pris la décision de racheter l'ancienne maison familiale ce dernier n'avait pas jugé utile de s'étendre plus en détail sur son emplacement, laissant cela pour le moment où l'un et l'autre trouveraient le temps de se voir autrement qu'en coup de vent, et où il pourrait lui faire visiter les lieux.
|
| | | | (#)Sam 12 Nov 2016 - 19:39 | |
| Ainsi donc Saul n'avait-il pas ouvert sa porte à un tout nouvel arrivant, mais plutôt à un habitué de Logan City, revenu s'installer dans le quartier plusieurs années après y avoir vécu une première fois. Cette confession ne manqua évidemment pas de surprendre le brun, mais celui-ci manifesta surtout un certain enthousiasme à l'idée que son nouveau voisin ait peut être même vécu dans les parages avant qu'Elsie et lui ne songent à emménager dans cette maison, et possède ainsi un certain nombre de repères. Le jeune homme confirma alors sa supposition en lui révélant que ses parents avaient en fait été les propriétaires du pavillon d'à coté il y a de ça une vingtaine d'années, laissant ensuite entendre que l'attachement sentimental qu'il avait légitimement gardé pour cet endroit l'avait incité à la racheter lorsque l'occasion s'était finalement présentée. « On reste toujours particulièrement attachés aux premiers endroits où l'on a vécu. Ils ont souvent une symbolique particulière, qu'on retrouve rarement par la suite. » Il laissa alors entendre, dans un fin sourire, n'ayant aucun mal à imaginer que son voisin ait pu ressentir l'envie de récupérer la maison qui avait appartenu à ses parents lorsqu'elle s'était retrouvée à nouveau libre. « De mon coté, j'ai grandi dans un pavillon du centre de Lima, avant de suivre mon père en Australie et de me retrouver à Pine Rivers, dans un appartement à deux pas de ses bureaux. Aujourd'hui je reste beaucoup plus nostalgique de mon enfance au Pérou que de mes premières années à Brisbane, parce que ce n'était pas tout à fait pareil à mes yeux. » Et pour cause, il s'était particulièrement attaché à la maison où il avait d'abord vécu avec ses deux parents, au cœur d'un pays qui représentait beaucoup pour lui et qu'il avait quitté à regrets. C'est après que les choses s'étaient un peu gâtées et qu'il s'était senti plus esseulé, en haut d'une tour qui n'avait pas le cachet de la demeure qu'il avait longtemps connue, et alors que d'un foyer aimant, il était passé à une famille disloquée, que son père n'avait pas mis beaucoup d'énergie à ressouder au départ. « Je crois aux signes, moi aussi. Alors si racheter la maison de votre enfance vous est apparu comme une évidence, c'est que vous avez bien fait de revenir dans le quartier. » En dehors même du fait qu'il soit normal qu'il ait envisagé de se réinstaller par ici, si le moment lui avait paru idéal – pour des raisons sur lesquelles Saul n'oserait pas nécessairement le questionner – c'est sans doute qu'il était destiné à reprendre cette maison. L'invitant en tout cas à s'installer dans le salon, Saul se vit finalement demander s'il ne travaillait pas à l'Université, une question qui eut le mérite de le surprendre au départ. Ce n'était donc pas le cas, bien qu'il juge potentiellement utile de préciser à son voisin qu'il y avait en revanche étudié plusieurs années auparavant. Hassan, lui, y était donc enseignant, et à la façon dont il en parlait, on pouvait facilement deviner qu'il ne s'agissait pas simplement d'un travail pour lui. Les lèvres de Saul s'étirèrent alors à nouveau, tandis qu'il se permit une confession. « Entre nous, j'ai toujours eu une certaine admiration pour les enseignants, parce que je me suis toujours demandé si j'aurais pu m'habituer à l'ingratitude de certains élèves. Pourtant, il y a bien les cours que je donne parfois à l'école, mais ce n'est pas tout à fait la même chose. » Pas la même chose, parce que le public était sensiblement plus jeune et que son attention était souvent beaucoup plus facile à capter, mais aussi parce qu'aussi bien pour lui que pour ses petits élèves, ça restait un « à coté », une sorte de parenthèse rafraîchissante que personne n'avait l'air de subir. « Mais c'est probablement le point de vue de quelqu'un qui a fréquenté pas mal d'élèves turbulents à l'époque du lycée. » Il reprit finalement, cette fois dans un léger rire. Saul n'avait peut être pas connu une adolescence particulièrement tumultueuse – s'il l'avait subie, c'était même plutôt parce qu'il ne rentrait pas nécessairement dans le moule à ce niveau-là – mais il ne s'était pas toujours rapproché que des élèves les plus disciplinés, ainsi peut être se laissait-il effectivement influencer par les années qu'il avait passé à s'amuser bêtement de l'insolence de ses amis. Comprenant en tout cas qu'Hassan avait la troublante impression de l'avoir déjà croisé quelque part, Saul supposa qu'il ne s'agissait peut être que d'une impression de « déjà vu », inspirée par le fait qu'il avait sans doute un physique commun et qu'on confondait facilement avec un autre. C'est alors à ce moment-là qu'il proposa à son voisin de lui servir à boire, culpabilisant instantanément d'avoir soumis l'idée d'une bière en comprenant qu'Hassan n'en buvait pas, et se rattrapant bientôt en lui apportant plutôt un thé. Une boisson globalement appréciée sous ce toit, mais dont Hassan, lui, semblait tout particulièrement raffoler. Souriant à cette idée, Saul se vit finalement questionner sur ses enfants, qu'il évoqua alors avec cette même lueur au fond du regard qui se manifestait toujours lorsqu'il parlait de ce qu'il considérait comme sa plus grande réussite, et de loin. Et c'était d'autant plus vrai aujourd'hui, alors qu'il empruntait un chemin qui pourrait d'ici quelques temps le mener droit au précipice. A la proposition de son voisin, il acquiesça alors avec enthousiasme. « Oh, je pense qu'ils seraient ravis d'avoir des camarades de jeu. Surtout les deux plus grands, qui finissent toujours par déclencher un cataclysme lorsqu'ils ne jouent qu'entre eux. Ça leur ferait certainement du bien de rencontrer d'autres enfants, dans la rue ils n'ont pas souvent l'occasion de se faire des amis. » Alors oui, l'idée que ses enfants puissent profiter d'un peu de compagnie, qui plus est de celle des neveux et nièces de son voisin – qui lui inspirait déjà une certaine sympathie et une absence totale de méfiance – ne pouvait que l'enchanter. Saul envisagea alors un court instant de lui demander s'il avait lui-même des enfants, mais supposa qu'il l'aurait aussitôt précisé si tel avait été le cas. Il se concentra alors bientôt sur la suite, et ne manqua pas de s'étonner du fait qu'Hassan pense finalement l'avoir reconnu, et ce grâce à un cliché placardé sur le mur de l'école de danse de Deepika. Ainsi donc avaient-ils une amie en commun, ce qui avait tout d'une surprenante coïncidence compte tenu du fait qu'ils se retrouvaient en plus de ça voisins. Car Saul se serait déjà étonné de rencontrer par hasard une connaissance de la brune, mais ici la situation était d'autant plus inattendue. Évoquant alors son amitié avec la jeune femme, il précisa à son voisin que Deepika et lui étaient souvent amenés à collaborer, mais aussi à voyager ensemble. Une anecdote à laquelle Hassan répondit par une remarque qui vint amuser Saul. « Pour ma défense, je n'ai pas encore trouvé le moyen de la transporter directement dans ma valise, alors jusqu'ici elle avait le choix de me suivre ou non. » Il souffla, dans un sourire rieur, en repensant aux nombreuses fois où il avait proposé à l'indienne de le suivre au gré de ses déplacements et où celle-ci ne s'était pas faite prier. Son voisin, en tout cas, n'était pas l'amateur de danse que Saul avait imaginé sur le ton de la plaisanterie. « Elle est toujours particulièrement troublante quand elle danse. » Il acquiesça d'ailleurs, à la précision d'Hassan, avant que celui-ci ne développe à son tour les circonstances de sa rencontre avec la danseuse et qu'il comprenne un peu mieux d'où pouvait lui venir ce brin de fierté qu'il venait à l'instant d'évoquer. « Alors vous avez joué un rôle clé dans son intégration à Brisbane. » Son sourire s'étendit légèrement tandis qu'il posa sur son voisin un regard bienveillant. « Je sais que Deepika a d'abord eu un peu de mal à s'acclimater à ce changement d'environnement, et qu'elle s'est probablement sentie très seule au début … alors je vous suis reconnaissant de l'avoir aidée à se faire une place en ville. Elle vous doit probablement beaucoup, et je me sens moi aussi indirectement redevable pour ce que vous avez fait pour elle. » Il était sincère, parce que Deepika comptait énormément pour lui et que l'idée qu'elle ait pu compter sur quelqu'un dès son arrivée en Australie le rassurait autant qu'elle le contentait. Saul n'avait rencontrée la jeune femme qu'un peu plus tard, et alors qu'elle semblait déjà beaucoup plus familière avec cette nouvelle vie, ainsi il se réjouissait que quelqu'un ait été là pour elle quand elle en avait besoin. Soumettant en tout cas l'idée d'inviter Hassan à leur table la prochaine fois que Deepika y serait conviée, Saul rebondit à la remarque de son interlocuteur. « Tout comme nous, j'imagine qu'elle s'étonnera de nous savoir voisins, mais que cette idée ne manquera pas de l'enchanter. » Ne serait-ce que parce qu'elle était proche des deux hommes et que Deepika se réjouirait probablement de savoir qu'ils auraient sans doute l'occasion de sympathiser eux aussi, à force de se cotoyer. « Aujourd'hui, est-ce que vous vivez seul ? » Saul se risqua finalement à demander, après quelques secondes de réflexion, jugeant que la question était légitime dans la mesure où il savait maintenant qu'Hassan avait déjà expérimenté la colocation. Il lui paraissait de plus en plus évident qu'il n'avait pas d'enfants, mais peut être avait-il une compagne – ou un compagnon – ou bien vivait-il encore aujourd'hui avec des amis. Finalement, la sonnerie du téléphone vint l'arracher à ses réflexions, et Saul dut quitter sa place à regrets. « Oh, excusez-moi. » Pour le coup, il était assez gêné de devoir interrompre cet échange, mais il ne préférait pas prendre le risque de filtrer cet appel s'il s'agissait de sa femme ou de quiconque pourrait avoir besoin de le joindre en urgence. « Allo ? » Il commença alors, avant qu'une voix familière ne se fasse entendre à l'autre bout du fil. « Saul, es tía Mercedes. Has recibido mi paquete ? » Il reconnut effectivement la voix de l'une de ses tantes maternelles, restée au Pérou mais dont il était encore particulièrement proche. « Sí, llegó hoy. Un vecino tuvo la amabilidad de traérmelo. » Saul, qui retrouvait ici sa langue natale, adressa un sourire à son voisin depuis l'autre bout de la pièce, puis entreprit d'écourter un appel dont il aurait tout le temps de profiter une fois qu'il serait seul. « Te llamaré más tarde, gracias todavía. Hasta luego. » Et cela ajouté, il raccrocha pour revenir aussitôt en direction du canapé et se rasseoir face à son voisin. Seules quelques minutes s'étaient écoulées depuis le moment où il s'était levé, mais Saul ressentit instantanément le besoin d'excuser cette parenthèse inattendue, et toujours un peu contrariante lorsqu'on recevait quelqu'un chez soi. « Je suis désolé, c'était ma tante, qui habite au Pérou. C'est elle qui m'a envoyé le colis que vous m'avez apporté tout à l'heure, et elle désirait savoir si je l'avais bien reçu. » Il partait ici du principe qu'Hassan n'était pas familier avec la langue espagnole, mais rien ne disait après tout qu'il n'avait pas parfaitement compris la teneur de cet appel. « A ce propos, peut être pourriez-vous me donner votre avis ? » Saul reprit, cette fois d'un ton un peu plus hésitant, sans trop savoir s'il faisait bien d'emprunter ce chemin-là dès leur première rencontre. Pourtant, se levant à nouveau, il partit aussitôt chercher le colis qu'il avait préalablement déposé dans l'entrée, revenant jusqu'à son voisin en disposant le paquet sur la table basse. « C'est un cadeau pour le baptême de ma fille. Une boite à bijoux musicale, celle que ma grand-mère avait offerte à ma mère lorsqu'elle n'avait que quelques mois. Je recherchais un cadeau très symbolique, seulement j'ai un peu peur … que je sois le seul qu'elle rende nostalgique. » Parce qu'il serait probablement le seul à en avoir un souvenir encore quasiment intact. Sa mère, elle, n'irait sans doute jamais faire le rapprochement entre cet objet et celui qui l'avait si longtemps accompagnée dans sa jeunesse. Ce genre de souvenirs seraient déjà loin pour n'importe qui, mais pour elle ils étaient sans doute définitivement enfouis dans une partie de sa mémoire qu'elle ne récupérerait jamais. « Elle aurait peut être besoin d'être repeinte à certains endroits, mais elle est en meilleur état que je l'aurais pensé. » Et sortant finalement du carton une boite à musique en bois soigneusement décorée de frises et de fleurs, Saul releva les yeux vers son voisin, sans réellement savoir ce qu'il espérait y lire. C'était idiot parce qu'Hassan n'avait probablement aucun avis sur la question, et même aucune raison d'en penser quoi que ce soit, mais il se dégageait de lui cette aura un peu singulière qui l’incitait à s'en remettre à son jugement, même en le connaissant encore si peu. Et puis, n'avait-il pas gagné le droit d'émettre un avis en prenant la peine de lui rapporter ce colis ? |
| | | | (#)Mar 29 Nov 2016 - 1:49 | |
| Hassan s'était senti pris d'une sorte de malaise en avouant ainsi, à un presque inconnu, les raisons qui l'avaient poussé à racheter la maison d'à côté quand bien même il en avait visité des dizaines d'autres durant les mois qui avaient suivi sa décision de quitter Fortitude Valley et son agitation. Sans doute parce que les raisons étaient multiples et ne se résumaient par à l'explication de Saul « On reste toujours particulièrement attachés aux premiers endroits où l'on a vécu. Ils ont souvent une symbolique particulière, qu'on retrouve rarement par la suite. » Mais il n'était pas simplement question de symbolique, cette maison c'était aussi et surtout le théâtre de la grande majorité des souvenirs qu'Hassan possédait de ses parents, de sa mère plus particulièrement puisqu'elle ne quittait que rarement leur domicile, un peu effrayée par ce pays où elle ne s'était pas toujours sentie la bienvenue. « De mon coté, j'ai grandi dans un pavillon du centre de Lima, avant de suivre mon père en Australie et de me retrouver à Pine Rivers, dans un appartement à deux pas de ses bureaux. Aujourd'hui je reste beaucoup plus nostalgique de mon enfance au Pérou que de mes premières années à Brisbane, parce que ce n'était pas tout à fait pareil à mes yeux. » Hassan avait beau n'avoir jamais mis les pieds au Pérou, il croyait Saul sur parole. Lui aussi s'y connaissait en dépaysement. « Je crois aux signes, moi aussi. Alors si racheter la maison de votre enfance vous est apparu comme une évidence, c'est que vous avez bien fait de revenir dans le quartier. » Se targuant d'un sourire poli, Hassan n'avait pu s'empêcher de déplorer le fait que tout le monde ne soit pas de cet avis, et que son propre frère, bien que ne s'y étant pas fermement opposé, avait accueilli cette décision de manière un peu dubitative. Lui non plus n'avait pas compris que ce n'était pas de nouveauté, dont Hassan avait besoin pour aller mieux. Ce dont il avait besoin c'était de repères solides auxquels s'accrocher, et cette maison en étant un, assurément. Bien que d'abord guidé uniquement par le fait de vouloir découvrir pourquoi le visage de son nouveau voisin lui semblait familier, Hassan avait fini par en dire plus sur son métier, quand bien même l'université n'était à l'évidence pas le lieu où l'un et l'autre auraient pu se croiser, même par hasard « Entre nous, j'ai toujours eu une certaine admiration pour les enseignants, parce que je me suis toujours demandé si j'aurais pu m'habituer à l'ingratitude de certains élèves. Pourtant, il y a bien les cours que je donne parfois à l'école, mais ce n'est pas tout à fait la même chose. Mais c'est probablement le point de vue de quelqu'un qui a fréquenté pas mal d'élèves turbulents à l'époque du lycée. » Un peu interpelé par un détail mentionné par Saul, Hassan avait questionné avec une pointe de curiosité « Vous donnez des cours ? » Il était donc un peu enseignant, aussi ... non ? Bien que cela semblait ne pas être totalement la même chose, selon ses propres dires. « Mais les plus turbulents ne sont pas toujours ceux qui s'en sortent le moins mal, heureusement. Même si je ne peux pas nier que les lycéens auxquels je donne des cours de soutien sont beaucoup moins disciplinés que mes étudiants habituels. » Sans doute parce que les lycéens étaient là par obligation, et les étudiants par choix, du moins dans ma majorité des cas. Laissant là la conversation tandis que Saul disparaissait un moment faire du thé, Hassan s'était permis de laisser ses yeux observer un peu le salon, avec le brin de curiosité commun à toute personne qui pénétrait dans un environnement inconnu, s'en remettant à la question des enfants lorsque son regard s'était arrêté sur les jouets abandonnés dans le jardin. « Oh, je pense qu'ils seraient ravis d'avoir des camarades de jeu. Surtout les deux plus grands, qui finissent toujours par déclencher un cataclysme lorsqu'ils ne jouent qu'entre eux. Ça leur ferait certainement du bien de rencontrer d'autres enfants, dans la rue ils n'ont pas souvent l'occasion de se faire des amis. » Acceptant la tasse de thé en remerciant avec politesse, Hassan avait fini par imiter Saul et s'asseoir au bout du canapé, laissant la boisson refroidir quelques instants sur la table basse « J'ai cru remarquer que le quartier avait un peu changé de visage, oui. Quand j'étais plus jeune c'était beaucoup de familles avec des enfants, la rue ressemblait à une véritable aire de jeux le week-end. » Disant cela il avait esquissé un sourire, gardant de bons souvenirs de cette époque quand bien même il n'ait gardé de contact avec pratiquement aucun des gamins qui rythmaient son quotidien d'enfant ; Seuls les Khadji faisaient exception, mais pas n'importe quelle exception. Enfin, et alors qu'il ne l'espérait plus, Hassan avait eu un éclair de lucidité et songé à cette photo placardée dans le bureau de Deepika, et sur laquelle se trouvait Saul. Ils ne s'étaient donc effectivement jamais croisés, mais pour autant le visage du brun n'était pas totalement inconnu à Hassan, comme il l'avait pressenti. Plus qu'une simple connaissance de la jeune femme Saul semblait se cacher derrière l'identité de celui qui faisait que la jeune femme était toujours par monts et par vaux « Pour ma défense, je n'ai pas encore trouvé le moyen de la transporter directement dans ma valise, alors jusqu'ici elle avait le choix de me suivre ou non. » Laissant échapper un léger rire, bien conscient que la jeune femme n'était pas de celles qui se laissaient dicter leur conduite « Elle est toujours particulièrement troublante quand elle danse. » avait en tout cas admis Saul à son tour, avant de s'informer sur la manière dont Hassan et elle en étaient venus à se connaître, de leur côté. Et le brun ne pensait pas exagérer en la qualifiant comme faisant presque partie de sa famille, car ce mot avait aux yeux d'Hassan un sens bien plus large qu'une simple question d'ADN. « Alors vous avez joué un rôle clé dans son intégration à Brisbane. Je sais que Deepika a d'abord eu un peu de mal à s'acclimater à ce changement d'environnement, et qu'elle s'est probablement sentie très seule au début … alors je vous suis reconnaissant de l'avoir aidée à se faire une place en ville. Elle vous doit probablement beaucoup, et je me sens moi aussi indirectement redevable pour ce que vous avez fait pour elle. » Un peu surpris d'avoir visiblement affaire à quelqu'un qui en savait plus sur Deepika qu'il ne l'avait imagine au départ, Hassan avait secoué la tête et saisi sa tasse de thé « Je n'ai pas grand mérite à ce sujet, elle est pleine de ressources et elle a son caractère, elle trouve toujours un moyen de s'en sortir. Mais je crois qu'elle a eu autant de chance de tomber sur moi, que moi de tomber sur elle, en fin de compte. » La vie d'Hassan aurait certes continué sans la moindre encombre, si elle n'avait pas été ainsi mise sur son chemin, mais il aurait assurément perdu l'occasion d'une amitié désormais précieuse. « Tout comme nous, j'imagine qu'elle s'étonnera de nous savoir voisins, mais que cette idée ne manquera pas de l'enchanter. Aujourd'hui est-ce que vous vivez seul ? » Un peu surpris par le brusque changement de conversation, et toujours un peu amer quant à cette solitude qu'il n'avait jamais vraiment apprivoisée, Hassan avait répondu en bafouillant légèrement « Oh je, non ... Non, juste moi. Enfin, avec mon chien. » Mais ce n'était probablement pas ce dont parlait Saul en posant sa question, quand bien même Hassan avait eu l'occasion de découvrir que la compagnie d'un animal pouvait elle aussi s'avérer précieuse et réconfortante. Quand bien même l'idée d'un chien ne venait pas de lui et l'avait d'abord rendu un peu dubitatif. Mais, sauvé par le gong, Hassan avait été interrompu par la sonnerie d'un téléphone avant de pouvoir ajouter quoi que ce soit d'autre. Cherchant machinalement après le sien dans la poche de son jean, avant de réaliser qu'il s'agissait de celui de son hôte, le brun n'avait même pas eu besoin de se forcer à faire comme s'il n'entendait pas une conversation probablement privée, puisqu'il ne parlait pas un mot d'espagnol. « Je suis désolé, c'était ma tante, qui habite au Pérou. C'est elle qui m'a envoyé le colis que vous m'avez apporté tout à l'heure, et elle désirait savoir si je l'avais bien reçu. A ce propos, peut être pourriez-vous me donner votre avis ? » Son avis concernant le fait qu'il avait bien reçu le colis ? Fronçant légèrement les sourcils, Hassan avait compris que Saul faisait référence à ce qui se trouvait à l'intérieur du carton lorsqu'il avait commencé à le déballer, pour finalement en sortir une boîte visiblement ancienne, usée mais pas d'une manière qui lui faisait perdre le charme qu'elle était supposée avoir. « C'est un cadeau pour le baptême de ma fille. » lui avait-il alors expliqué « Une boite à bijoux musicale, celle que ma grand-mère avait offerte à ma mère lorsqu'elle n'avait que quelques mois. Je recherchais un cadeau très symbolique, seulement j'ai un peu peur … que je sois le seul qu'elle rende nostalgique. » Incertain sur la conduite à adopter, et sur le fait que son statut de voisin rencontré un quart d'heure plus tôt lui donne véritablement le droit de répondre avec honnêteté, Hassan avait néanmoins observé l'objet tandis que son propriétaire remarquait « Elle aurait peut être besoin d'être repeinte à certains endroits, mais elle est en meilleur état que je l'aurais pensé. » L'usure semblait en effet plus flagrante à certains endroits, mais n'enlevaient rien au charme désuet de l'objet, qu'Hassan avait lâché des yeux pour les relever vers Saul « Ou même simplement une couche de vernis, ils en font du coloré, maintenant. Il faut simplement faire attention au type de pinceau, certains laissent des traces peu esthétiques sur des objets aussi fins. » Réalisant que sa soudaine connaissance du vernissage semblait sortir de nul part il avait ajouté « Mon père était menuisier, j'ai passé un peu trop de temps dans son atelier. » Suffisamment pour que la menuiserie ait été son second choix de carrière envisagé, dans l'optique où il n'aurait pas réussi à entrer à l'université. Mais Hassan avait pu obtenir son diplôme, et la question ne s'était donc plus posée. Terminant son thé, Hassan avait étiré ses jambes avec l'intention de se lever, tandis que Saul remettait la boîte à musique précieusement dans son carton pour ne pas l'abîmer. Surveillant l'heure sur l'horloge du salon, Hassan s'était fait la réflexion qu'il ne devait pas traîner trop longtemps, bien que Sohan ne soit pas particulièrement à cheval sur la ponctualité, mais eu avant d'aller plus loin la présence d'esprit de se lever pour récupérer quelque chose dans la poche arrière de son jean tout en s'adressant à son hôte « Je ne voudrais pas vous déranger trop longtemps, mais, tant que j'y pense ... » De sa poche il avait sorti un anneau au bout duquel étaient accrochées trois clefs auxquelles il n'avait pas encore pris le temps de trouver un porte-clef digne de ce nom « Je compte m'absenter plusieurs semaines, une opportunité professionnelle à l'étranger. Vous accepteriez de jeter un oeil à la maison en mon absence ? Juste, vous savez, vérifier que rien n'a l'air de clocher. J'ai de la famille à quelques pâtés de maisons d'ici, je vous donnerai leur numéro au cas où il y aurait un pépin, mais ils n'ont pas vraiment d'occasions de passer dans cette rue le reste du temps, et comme vous êtes à côté ... » Cela lui semblait être un compromis plus simple, Hassan ne souhaitant par ailleurs pas donner au père de Yasmine un trajet supplémentaire à effectuer avec ses soucis de santé, et sachant bien qu'Amjad se sentirait obligé de venir vérifier la maison chaque jour s'il lui demandait de ne jeter qu'un coup d'oeil occasionnel. « C'est un double des clefs de la porte d'entrée. » avait-il par ailleurs signalé en détachant l'une des clefs de son anneau. « J'ai proposé la maison à une amie en mon absence, pour dépanner, mais je ne suis pas certain qu'elle en ait besoin alors il vaut sans doute mieux que je vous confie les clefs à vous. Mais c'est une petite blonde, si jamais. » Il doutait pourtant sincèrement que Joanne fasse usage de l'offre qu'il lui avait faite, et même s'il le déplorait et n'était pas tranquille à l'idée de la savoir sous le même toit que l'homme qui la tourmentait, il ne pouvait malheureusement pas l'obliger à quoi que ce soit.
|
| | | | (#)Ven 9 Déc 2016 - 20:38 | |
| Saul le savait, il n'était pas rare de ressentir une nostalgie particulière à l'égard d'un endroit où on avait vécu étant plus jeune. Lui-même gardait énormément de souvenirs du Pérou, et plus particulièrement de l'époque où ses parents et lui vivaient dans une charmante maison du centre de Lima. Une époque où le bonheur semblait toujours à porter de main, où tout semblait particulièrement simple et facile. C'était plusieurs années avant que ses parents ne se déchirent, plusieurs années avant qu'il ne soit amené à suivre son père en Australie et perde ensuite quasiment sa mère de vue. Et même si aujourd'hui sa famille était de nouveau réunie et comptait même un élément de plus – son demi-frère Abel – peu de choses lui paraissaient encore comparables à ce qu'ils avaient vécu dans ce petit pavillon. Celui-ci avait en effet longtemps gardé l'empreinte du coup de foudre de ses parents, de cet australien qui avait mis sa vie entre parenthèses pour rester auprès de cette jolie péruvienne qui avait su voler son cœur, et c'est là-bas qu'il avait lui-même connu les premiers temps forts de son existence, de ses premiers pas à son premier béguin pour une jeune et jolie voisine, en passant par ses premières affinités avec l'écriture théâtrale, lorsque son bilinguisme l'avait très tôt plongé dans certaines œuvres shakespeariennes. Alors oui, sans doute Saul était-il particulièrement bien placé pour comprendre qu'Hassan ait pu ressentir le besoin de racheter la maison de son enfance lorsque l'occasion s'était présentée. Lui-même n'hésiterait certainement pas à faire de même s'il était amené à réinvestir la banlieue de Lima dans un proche avenir. En attendant, la discussion dévia bientôt sur le métier exercé par Hassan, alors enseignant à l'Université. Une vocation, sans nul doute, mais qui était longtemps apparue à Saul comme un métier ingrat, où l'on donnait beaucoup de soi sans forcément recevoir grand chose en contre-partie. Pourtant, lui-même était parfois amené à donner quelques cours, mais à un public sensiblement plus jeune et donc peut être un peu plus réceptif. « De guitare, oui. J'y joue depuis un certain nombre d'années maintenant, probablement depuis que je suis en âge d'apprendre des accords, et j'ai longtemps eu envie de partager cette passion autour de moi. » Une passion qui lui venait certainement au départ de la culture hispanique dans laquelle il avait grandi, où la musique et l'expression par les arts avaient toujours eu une place importante. Plusieurs de ses oncles possédaient une guitare ainsi c'est presque naturellement qu'il avait finalement gratté ses premières cordes. « J'ai un demi-frère que ça n'a jamais vraiment intéressé, et une femme qui me dirait sans doute qu'elle a passé l'âge de se lancer là-dedans, alors quand l'occasion s'est présentée, je l'ai saisie. Ce n'est l'affaire que de quelques heures par semaine, rien qui mette en péril ma principale activité. » Mais réalisant qu'il n'avait pas encore précisé à Hassan ce qu'il faisait précisément dans la vie, c'est dans un fin sourire qu'il ajouta aussitôt. « Je suis producteur et metteur en scène au sein d'une compagnie théâtrale, à Redcliffe. » Et si par certains égards la fonction de metteur en scène rejoignait sans doute le métier d'enseignant ou tout du moins de pédagogue, Saul préférait penser que ses artistes et lui étaient sur un pied d'égalité et que s'il pouvait effectivement leur inculquer certaines choses, l'inverse était parfois tout aussi vrai. Sa vision de son art avait évolué au fil des années qu'il avait passé au contact de ses comédiens, et c'était la raison pour laquelle il se félicitait chaque fois de n'avoir pas renoncé à la mise en scène lorsqu'il avait ajouté une nouvelle corde à son arc en s'essayant à la production.« Mais je suis certain qu'ils vous seront tous reconnaissants d'ici quelques années, lorsque vos cours auront porté leurs fruits. » Il reprit en tout cas, suite aux dernières paroles de son voisin, tendant effectivement à penser que viendrait le jour où ces lycéens peu réceptifs deviendraient des hommes plus reconnaissants, qui prendraient conscience d'être devenus ce qu'ils étaient en partie parce que des hommes comme Hassan s'étaient montrés patients avec eux. De quoi largement rentabiliser les efforts dépensés face à un public quelques peu ingrat au départ, à ses yeux. Disparaissant en tous les cas le temps d'aller chercher à son voisin de quoi se désaltérer, c'est avec du thé qu'il réapparut dans le salon, répondant à ce moment-là à la curiosité d'Hassan en évoquant ses enfants, qui sans doute apprécieraient effectivement d'avoir quelques nouveaux compagnons de jeu avec qui passer un peu de temps. « Il faut croire que ce cadre attire maintenant des profils différents, ce qui est sans doute une bonne chose. Et puis, ma femme et moi étions aussi un jeune couple sans enfant lorsque nous sommes arrivés ici, j'imagine que beaucoup de familles seront vouées à s'agrandir. » Il passait ici délibérément sous silence les nombreuses années où Elsie et lui avaient désespérément tenté de devenir parents, en vain au départ, et combien cette période avait pu affecter son moral et sa confiance en lui. Ce n'était certainement pas le genre de choses qu'il faisait bon confier au détour d'un premier échange, et dieu merci cette époque lui semblait maintenant suffisamment loin pour que ni lui ni personne n'ait besoin de se la remémorer. Comprenant en tout cas qu'Hassan avait fini par se rappeler de la raison pour laquelle son visage semblait ne pas lui être totalement inconnu, c'est un Saul à la fois surpris et fasciné qui accueillit l'idée que son voisin soit lui aussi un ami de Deepika. L'occasion pour lui de faire référence aux nombreux voyages au cours desquels il avait souvent pu compter sur la compagnie de la danseuse, le tout le temps d'un trait d'humour, avant qu'il ne manifeste à son tour une certaine curiosité face aux circonstances dans lesquelles Hassan avait pu connaître la jeune femme. Et à l'entendre, il semblerait que leur rencontre remonte déjà à un certain nombre d'années, lui qui semblait alors avoir joué un rôle clé dans la vie de Deepika lorsque la jeune femme était arrivée en Australie. Saul, qui tenait tout particulièrement à la brune, se sentait alors reconnaissant envers cet homme sans qui son amie ne serait certainement pas devenue ce qu'elle était aujourd'hui. Et lorsqu'Hassan confessa lui-même avoir eu de la chance de la rencontrer, c'est un large sourire qu'il esquissa, prêt à le croire absolument sur parole car étant lui-même bien placé pour savoir que Deepika savait révolutionner la vie de ceux qui croisaient sa route. Émettant en tout cas l'idée d'inviter Hassan et Deepika autour d'une même table à l'avenir, car supposant que la brune apprécierait tout particulièrement de savoir que son vieil ami n'était autre que son nouveau voisin, c'est porté par un nouvel élan de curiosité que Saul se risqua finalement à demander à ce dernier s'il vivait seul. Et à la façon dont Hassan formula bientôt sa réponse, il comprit qu'il l'avait peut être pris au dépourvu, ou gêné sans en avoir l'intention. « Excusez-moi, j'espère … que ma question ne vous a pas mis mal à l'aise. » Mais parce que ça semblait être le cas, Saul n'insisterait pas en tentant d'obtenir de plus amples informations sur un sujet qu'il valait peut être mieux laisser de coté à ce stade de sa relation avec son voisin. Ainsi se contenta-il d'un nouveau sourire, peut être un peu plus hésitant, avant que la sonnerie de son téléphone ne vienne brusquement interrompre le court de cet échange. A l'autre bout du fil : sa tante Mercedes, avec qui il était resté en contact même après qu'il se soit éloigné de sa famille maternelle en suivant son père jusqu'en Australie. Celle-ci désirait alors s'assurer qu'il avait bien reçu le colis qu'elle s'était occupée de lui faire parvenir, ce que Saul lui confirma avant d'entreprendre d'écourter cet échange qu'ils auraient tout le loisir de reprendre plus tard. Ici ça le gênait de discuter tranquillement au téléphone alors que son voisin attendait à quelques mètres de là, qui plus est dans une langue qu'Hassan ne maitrisait peut être pas. Ainsi raccrocha-t-il, revenant bientôt près de son voisin, toutefois en entreprenant presque aussitôt de s'éloigner à nouveau de quelques pas, cette fois pour aller chercher le colis qu'il avait préalablement déposé dans l'entrée. Ce fameux colis envoyé par sa tante, et que son voisin lui avait gentiment apporté. Et ici, c'était précisément parce qu'Hassan avait fait ça pour lui que Saul ressentait l'étrange envie de demander l'avis de son voisin quant au contenu dudit colis. Il s'agissait là d'un cadeau pour le baptême de sa fille, et d'un choix peut être un peu risqué si l'on considérait le symbolisme de ce présent, et le fait que les rares personnes à en connaître la valeur sentimentale n'étaient plus nécessairement en mesure de se le représenter. Sortant alors du carton une boite à musique un peu datée, Saul émit l'idée de la repeindre à certains endroits, avant qu'Hassan ne suggère quant à lui d'utiliser du vernis. Cette suggestion ne tomba évidemment pas dans l'oreille d'un sourd, et la confession bientôt formulée par son voisin dessina même sur les lèvres de Saul un large sourire. « Oh Hassan, vous n'auriez jamais du me dire ça. Maintenant je risque de solliciter vos lumières chaque fois que je me retrouverai face à ce genre de difficultés. » Il plaisanta alors, n'ayant bien évidemment aucune intention d'embêter son voisin chaque fois qu'il lui prendrait l'envie de jouer les bricoleurs du dimanche. « Le hasard a voulu que je sois aussi inexpérimenté en matière de bricolage que ma femme peut être douée de ses mains. Je crois bien que le seul rôle que je ne me serais pas vu endosser au théâtre était celui de décorateur. Il faut dire que je n'ai jamais vraiment pu compter sur mon père pour faire de moi quelqu'un de manuel. » Contrairement à Hassan qui avait visiblement bénéficié de conseils précieux en la matière. Le père de Saul, lui, avait toujours dépensé beaucoup plus d'énergie à tenter de lui apprendre les lois impitoyables du milieu des affaires – sans doute avec le long espoir qu'il finirait par marcher sur ses traces – et s'était ainsi souvent retrouvé bien démuni face à des apprentissages beaucoup plus ordinaires. « J'irai donc suivre vos conseils et acheter du vernis. » Saul reprit finalement, bien décidé à se fier à son voisin, non seulement parce qu'il semblait définitivement plus calé que lui en la matière, mais aussi parce qu'il ne lui avait jusqu'ici donné aucune raison de se méfier de lui. Au contraire, cet échange s'avérait plaisant et lui laissait présager que ses rapports avec son voisin seraient plus que cordiaux à l'avenir, ainsi lorsqu'Hassan chercha bientôt à savoir s'il accepterait de veiller sur sa demeure pendant qu'il s'absenterait quelques semaines, c'est naturellement que Saul répondit par la positive. « Oui, bien sûr, je peux faire ça pour vous. Vous m'avez vous-même rendu service et je vous ai dit que je vous rendrais la pareille à la première occasion, alors ça me semble être un bon moyen de vous renvoyer l'ascenseur. » Et le ton qu'il employait ajouté à l'expression qu'il affichait prouvaient qu'il ne se sentait en aucun cas obligé de lui rendre service à son tour, mais qu'il le ferait véritablement de bon cœur. « Et puis, ça ne me dérange absolument pas. Vous pouvez partir tranquille. » Il lui précisa alors, ne voyant aucune raison de lui refuser quelque chose qui ne lui imposerait aucune contrainte, si ce n'est celle de jeter un coup d'oeil à la maison d'à coté, ce qui ne lui demanderait pas de réorganiser ses journées ou bien de faire des détours impossibles. Hassan lui tendit ainsi un double des clés, avant de lui préciser qu'une amie à lui investirait peut être les lieux en son absence, auquel cas il lui faudrait donner à cette jeune femme les clés de la maison. « Une petite blonde ? D'accord, je lui transmettrai les clés si jamais elle se manifeste. » Et gardant cette possibilité à l'esprit, Saul se fit la réflexion que la demoiselle en question serait alors peut être mieux placée que lui pour veiller à ce que tout reste parfaitement en ordre à coté, sachant qu'il était peu probable qu'Hassan lui ait proposé d'emménager chez lui en son absence s'ils n'étaient pas suffisamment proches ou si la jeune femme ne s'était pas déjà familiarisée avec cet environnement. « A votre retour, vous pourrez peut être venir dîner à la maison. Que Deepika soit là ou non, je suis certain que le reste de la famille apprécierait de vous rencontrer, et puis vous aurez certainement beaucoup de choses à raconter. » Il avait beau ignorer vers quelles contrées plus ou moins lointaines son opportunité professionnelle conduirait Hassan, Saul s'y connaissait suffisamment en voyages pour savoir que les plus grandes traversées ne faisaient pas systématiquement les meilleurs souvenirs. « Je vais vous noter mon numéro, au cas où vous désireriez vous assurer que tout se passe bien pendant votre absence. » Et s'éloignant le temps de saisir un bloc-notes sur lequel il inscrivit son numéro personnel et celui de son domicile, Saul tendit ensuite le petit papier à son voisin, prolongeant leur discussion jusqu'à finalement le raccompagner à la porte d'entrée où ils se saluèrent avant de retourner chacun à ses occupations. Saul put ainsi entreposer son colis dans un endroit où il ne risquerait pas de gêner ou d'être malencontreusement bousculé par l'un de ses enfants, gardant un instant à l'esprit cette entrevue plus qu'agréable et l'idée que sa famille et lui soient visiblement très bien tombés avec ce « nouvel arrivant », qui maitrisait visiblement l'art de faire bonne impression. |
| | | | | | | | (#24) a house built out of stone (saul) |
|
| |