When the road looks rough ahead and you're miles and miles from your nice warm bed, you just remember what your old pal said: yeah, you've got a friend in me. You've got your troubles, I've got em too, there isn't anything, I wouldn't do for you. We stick together and see it through 'cause you've got a friend in me. ☆☆☆
Vittorio pouvait bien être bourré de défauts, certains admis d'autres un peu moins, c'était en revanche un homme extrêmement redevable et qui n'oubliait jamais les dettes et les services qu'il pouvait avoir envers les uns ou les autres. À Bob il devait actuellement d'avoir un toit sur la tête sans continuer à dilapider ses économies dans une chambre d'hôtel bien trop onéreuse pour ce qu'elle était, et cela valait donc bien - au moins - la matinée qu'il venait de passer à nettoyer la maison de fond en comble en attendant sa sortie de l'hôpital. Qu'on se le dise, l'italien n'en menait pas large durant les quarante-huit heures qu'il avait passé sans nouvelles de Bob, réalisant qu'il ne le connaissait même pas encore suffisamment pour pouvoir aller quémander des informations à la moindre de ses connaissances. Comme une bonne partie des habitants de Brisbane il avait écumé les services hospitaliers en donnant son nom à toutes les blouses blanches qui passaient à sa portée, un mélange d'inquiétude et d'impatience dans la voix, avant de retrouver la trace de son colocataire. En un seul morceau ou presque, puisque paraît-il que le ciel lui était littéralement tombé sur la tête, ou plutôt un morceau de toit ... L'occasion pour Vittorio de se demander dans quel pays il avait foutu les pieds.
A défaut de posséder une voiture qui lui aurait permis d'aller récupérer Bob à la sortie de l'hôpital, le barbu avait donc eu à cœur de remettre la maison en ordre, et d'en effacer même les quelques stigmates que la tempête avait peu avoir sur elle : des débris éparpillés dans le jardin qu'il avait fallu ramasser, la fenêtre de la buanderie colmatée avec du carton en attendant de pouvoir la remplacer, et les trois ou quatre tuiles disparues de la toiture que Vittorio avait changé après avoir écumé plusieurs magasins pour en trouver de nouvelles et emprunté son échelle au voisin pour pouvoir grimper sur le toit. Avec le boulot qu'avaient les couvreurs actuellement, Bob et Vitto avaient largement le temps d'être écrasés par autre chose - au hasard, une météorite - avant que le souci ne soit réglé et la maison à nouveau étanche. Il n'y avait que l'électricité, pas encore revenue, qui empêchait à la maison de donner l'impression de n'avoir pas subi la tempête. « Aux dernières nouvelles cette nuit ou demain. » avait-il d'ailleurs fait savoir à Bob concernant le moment où le courant était censé revenir, lorsqu'enfin le brun avait regagné la maison armé de ses béquilles ... et d'un brin de mauvaise humeur dont Vittorio avait décidé de ne pas lui tenir rigueur. Lui aussi ferait sans doute la gueule, s'il avait la hanche en vrac, un ordre de repos forcé et même pas la télévision ou son ordinateur pour occuper ses journées, faute de courant.
Profitant de ce qu'il fasse encore suffisamment jour, les deux jeunes hommes s'étaient lancés dans une partie de Monopoly, là aussi prêté par le voisin en échange du vélo de Vittorio pour occuper sa pile électrique de fils, perdu sans sa console de jeu. « Flinders Way ... ? Ah si, c'est chez moi ! Tu me dois 333$, allez hop. » Un peu décontenancé par les noms de rues de la version australienne du Monopoly, Vittorio vaguement plus habitué à la version italienne bien qu'il n'ait eu que très peu d'occasion ces trente dernières années de jouer à ce jeu, il avait toujours un moment de latence après le lancer de dé pour vérifier quelles propriétés lui appartenaient ou ne lui appartenaient pas. « Je crois que ma dernière expérience en terme de jeu de société remonte à ... ma dernière coupure de courant, en fait. Même si par chez moi c'est plutôt les tremblements de terre que les tempêtes qui en sont la cause, hm. » Et ces derniers mois avaient encore fait preuve de cet état de faits. Croisant l'air toujours boudeur de Bob, Vittorio avait plissé le nez et quitté sa position en tailleur pour ramener l'une de ses jambes contre son torse « Tu sais, on m'a toujours dit qu'il valait mieux trouver le côté positif là où on pouvait le prendre ... dis-toi que ça te fais des vacances ? » Des vacances coincé dans un canapé ou ralenti par le maniement de béquilles (et qui ne rendaient pas vraiment justice à sa hanche qui plus est). C'était d'autant plus ironique qu'avant de devoir abandonner son boulot Vittorio était typiquement le genre à rechigner à prendre des vacances et à trouver le moyen de passer au bureau y compris pendant ses jours de repos ... Il vivait pour son boulot. Maintenant il n'en avait plus, et il se retrouvait à vanter les mérites de l'inactivité à Bob alors que lui-même l'avait en horreur.
WHEN THE ROAD LOOKS ROUGH AHEAD AND YOU'RE MILES AND MILES FROM YOUR NICE WARM BED, YOU JUST REMEMBER WHAT YOUR OLD PAL SAID: YEAH, YOU'VE GOT A FRIEND IN ME. YOU'VE GOT YOUR TROUBLES, I'VE GOT EM TOO, THERE ISN'T ANYTHING, I WOULDN'T DO FOR YOU. WE STICK TOGETHER AND SEE IT THROUGH 'CAUSE YOU'VE GOT A FRIEND IN ME.
Après quelques jours passé à l’hôpital, c’est enfin le grand jour pour mon retour à la maison. J’ai finalement réussi à joindre Vittorio, même si c’est plutôt lui qui a finit par me retrouver. Je crois que ça faisait deux petits jours que j’étais là, j’avais essayé plusieurs fois de téléphoner à la maison pour prévenir Vitto mais le téléphone sonnait dans le vide, encore et encore (surement que la line avait sautée avec la tempête). Et un jour Vitto a tout simplement déparqué dans ma chambre. Je me suis fait passé un savon bien sur, ce que je comprends. Par chance j’avais de bonne excuse pour justifier que je ne l’avais prévenu, alors mon cher coloc ne m’en a pas trop tenu rigueur. C’est donc l’esprit léger mais l’humeur un peu bougonne que j’ai pu rentrer chez moi aujourd’hui, et j’y ai trouvé une belle surprise. C’était comme si la tempête n’avait jamais existé. Vitto avait fait un travail de folie (ou alors ma maison avait vraiment échappé au massacre) mais je ne pense pas que ma maison avec un champs magnétique et vu l’état des autres maisons je pense sérieusement que Vitto a bien bossé. Lorsque j’aperçois mon coloc à la porte je le félicite « Et bien, tu avais placé notre baraque sous un dôme pour la protéger ? Où t’as tous réparés à mains nues ? » Je reste bouche bée « Bien jouée alors, merci beaucoup. T’assure, je te revaudrais ça. » Quand j’aurais récupéré tout mes membres bien sûr. Je rentre enfin à nouveau chez moi, ça fait du bien. J’ai bien eu peur de ne jamais y remettre les pieds ! Bien entendu Vitto ne fait pas ne miracle et l’électricité n’est toujours pas revenu. Je l’interroge du regard. « Aux dernières nouvelles cette nuit ou demain. » Bon au moins ça va revenir d’ici quelques jours. « Ça explique pour j’arrivai pas à te joindre ces derniers jours. » Je me déplace avec peine dans la maison. Je n’aime pas marcher avec des béquilles et ma cuisse recommence à me faire un mal de chien. Je dois passer mon temps à râler, mais je suis une vrai mauviette et Vitto commence à me connaître maintenant. Nous nous installons au salon, sans courant nous n’avons pas grand chose à faire. Après avoir utilisé mes deux batteries externes, mon ordinateur s’est finalement éteint, alors à part recommencer à travailler sur papier… J’ai laissé tomber mon travail. Vitto a échanger un Monopoly contre un petit vélo avec le voisin (Dans un situation normal, Vitto se serai fait arnaqué mais là je suis bien content). Nous nous lançons donc dans une petite partie, je n’ai jamais été vraiment doué au monopoly, je crois que je n’ai pas beaucoup de chance dans ce genre de jeux « Flinders Way ... ? Ah si, c'est chez moi ! Tu me dois 333$, allez hop. » Qu’est ce que je disais, me voilà déjà entrain de payer. « Mouais, au moins si ça continue comme ça la partie durera pas des plombes. » ça va même être plutôt rapide, je sors l’argent et lui les tends de mauvaise foi. « Je crois que ma dernière expérience en terme de jeu de société remonte à ... ma dernière coupure de courant, en fait. Même si par chez moi c'est plutôt les tremblements de terre que les tempêtes qui en sont la cause, hm. » Je réfléchis à la dernières fois où j’ai joué « Mhh, pour ma part ça remonte pas tant que ça. Mon oncle est un fana de jeux de société, j’ai droit à une séance à chaque fois que je vais lui rendre visite. Je t’amène la prochaine fois si tu veux…. Ah les tremblements de terre, ça doit pas être la joie non plus. C’est quoi ta pire expérience avec ça ? » C’est une question direct, je ne sais pas si Vitto y répondra, après tout je ne connais pas encore toute sa vie alors je tente.
Vitto finit par revenir sur mes béquilles « Tu sais, on m'a toujours dit qu'il valait mieux trouver le côté positif là où on pouvait le prendre ... dis-toi que ça te fais des vacances ? » Je ris (un peu jaune j’avoues) « Je vois ce que tu veux dire. Mais une barre de fer m’a transpercé la cuisse. J’aurai préférer une autre raison pour prendre des vacances. » Je respire un instant et reprends « Mais t’as raison, j’ai pas à me plaindre. Ça aurait pu être bien pire… Des gens ont vécu bien pire. » Je repense à cette jeune femme dans le centre commercial, celle qui ne s’en est pas sortie. Je ne la connaissais même pas. Une vague de déprime me submerge. Je reprends mes esprits « Bon, c’est pas tout ça mais c’est mon tour. J’achète la gare. »
Vittorio n'avait pas vraiment eu à se forcer pour décider de remettre la maison en ordre avant le retour de Bob, nul n'ignorait plus que l'italien était toujours à la recherche d'une manière de se rendre utile, tant le fait de ne plus avoir de "vrai" boulot lui pesait. Et puis, ce n'était pas Bob et ses blessures de guerre qui allaient pouvoir monter sur le toit pour réparer les tuiles endommagées. Leur chance, c'était aussi que leur maison soit loin d'être la plus endommagée du quartier, une chance que tout le monde n'avait pas eu, mais sans manquer totalement de compassion Vittorio était malgré tout du genre à voir midi à sa propre porte, avant celle des autres. Ne manquait plus désormais que le retour du courant, prévu pour le lendemain parait-il, et leur donnant immanquablement l'occasion de réaliser comme les gens de leur époque étaient perdus sans la facilité apportée par l'électricité. Ils en redécouvraient des choses telles que caler leurs activités grâce à la lumière du jour, réfléchir à un repas qui ne nécessite ni aliments cuits ni aliments frais, et s'occuper avec ce qu'ils pouvaient trouver, dont ce jeu de Monopoly prêté par le voisin. « Mouais, au moins si ça continue comme ça la partie durera pas des plombes. » avait d'ailleurs gentiment maugréé Bob tandis que Vittorio commençait à le dépouiller. Lui adressant un sourire narquois, mais amusé, il avait récupéré les billets de Monopoly tendus par son colocataire « Si ça se trouve j'aurai pu devenir un requin de la finance, peut-être que j'ai loupé ma vocation. » Peut-être même que s'il avait été dans la finance plutôt que dans la justice il ne serait présentement pas sans boulot, et exilé à l'autre bout du monde, mais enfin.
L'air pensif, l'italien avait tenté de se rappeler de la dernière fois qu'il avait joué à un jeu de société, sans même être certain qu'il soit question de Monopoly ... Mais il n'y avait pas de courant, ça il s'en souvenait, et ce dont il se souvenait surtout c'était du début de la soirée, avant que le stock d'alcool accumulé par lui et ses camarades de promo n'ait commencé à diminuer sensiblement. « Mhh, pour ma part ça remonte pas tant que ça. Mon oncle est un fana de jeux de société, j’ai droit à une séance à chaque fois que je vais lui rendre visite. Je t’amène la prochaine fois si tu veux … Ah les tremblements de terre, ça doit pas être la joie non plus. C’est quoi ta pire expérience avec ça ? » Le plus rassurant en fin de compte, c'était surtout que les pires tremblements de terre d'Italie Vittorio n'avait pas eu l'occasion de les expérimenter lui-même, une aubaine quand on savait les dégâts - et les victimes - qu'avaient pu provoquer certains. « Rien de trop dramatique, Rome n'est pas la région la plus exposée ... Même si je ne te cache pas qu'être réveillé en pleine nuit avec l'impression qu'un demeuré secoue ton lit comme un prunier, y'a de quoi se lever du pied gauche. » Petit il avait souvent entendu parler du séisme de 1980, des centaines de morts qu'il avait fait à Naples et ailleurs, et de la reconstruction jamais terminée dont son quartier avait été l'une des victimes collatérales. Mais Naples il n'en parlait jamais, et à Brisbane il avait bien l'intention de faire en sorte que personne ne l'associe à autre chose qu'à Rome. « Ta famille habite dans le coin, donc ? » avait-il en tout cas questionné avec une pointe de curiosité, ne s'empêchant pas de poser des questions sous prétexte qu'il n'était lui-même pas très loquace - muet comme une tombe, en fait - concernant sa propre famille.
Mais le but de tout cela, au fond, c'était tenter de dérider un peu l'air dépité de Bob depuis qu'il était rentré. Pas que Vittorio ne minimisait la mésaventure vécue par le jeune homme pendant la tempête, il s'était même plus inquiété pour lui qu'il ne l'aurait imaginé compte tenu du fait qu'ils ne se connaissaient pas encore depuis longtemps, mais il était d'avis que se morfondre dans son coin n'était pas ce qui allait l'aider à guérir plus vite « Je vois ce que tu veux dire. Mais une barre de fer m’a transpercé la cuisse. J’aurai préférer une autre raison pour prendre des vacances. Mais t’as raison, j’ai pas à me plaindre. Ça aurait pu être bien pire … Des gens ont vécu bien pire. » Peut-être était-ce dans sa tête, mais il avait l'impression d'avoir vu Bob frissonner l'espace d'une demi-seconde. « Je n'ai pas dit que tu n'avais pas à te plaindre. » avait-il argué avec une pointe d'incertitude, craignant d'avoir eu l'air de ne pas compatir ou prendre au sérieux ce qui lui était arrivé. Ce n'était pas le cas, Vitto n'était simplement pas doué pour exprimer ce genre de choses. Sans doute par désir de changer de sujet Bob avait lancé les dés à son tour « Bon, c’est pas tout ça mais c’est mon tour. J’achète la gare. » Tenant également le rôle de banquier, l'italien avait pianoté dans le vide avec ses doigts, tel la banque avide de récupérer son argent cédé si difficilement « Ah mais, mais, mais ... ça veut dire que t'as les quatre gares ? T'es vraiment certain que c'est moi qui vais te dépouiller ? » Il cachait bien son jeu, derrière son air de gars dépité et certain de perdre. Lançant à nouveau les dés à son tour Vittorio avait avancé son pion sur le plateau, décidé de ne pas acquérir la rue sur laquelle il venait de tomber et qui se trouvait toujours à vendre, et tendu les dés vers son colocataire d'un air à nouveau pensif « Tu sais que je ... enfin, je suis sans doute pas le mieux placé pour ça, mais si tu as envie de parler de ce qui s'est passé, là-bas ... voilà. » Là-bas, dans ce centre commercial, parce que ça et là Vittorio avait bien fini par grappiller des informations à ce sujet, le début d'incendie, l'effondrement du toit, et les quelques victimes qui avaient péri dans ces centaines de mètres carrés de magasins. Il savait aussi ce que cela faisait de voir quelqu'un mourir de ses yeux, ou de confronter un cadavre ... mais ça non plus il ne l'avouerait pas, évidemment.
WHEN THE ROAD LOOKS ROUGH AHEAD AND YOU'RE MILES AND MILES FROM YOUR NICE WARM BED, YOU JUST REMEMBER WHAT YOUR OLD PAL SAID: YEAH, YOU'VE GOT A FRIEND IN ME. YOU'VE GOT YOUR TROUBLES, I'VE GOT EM TOO, THERE ISN'T ANYTHING, I WOULDN'T DO FOR YOU. WE STICK TOGETHER AND SEE IT THROUGH 'CAUSE YOU'VE GOT A FRIEND IN ME.
« Rien de trop dramatique, Rome n'est pas la région la plus exposée ... Même si je ne te cache pas qu'être réveillé en pleine nuit avec l'impression qu'un demeuré secoue ton lit comme un prunier, y'a de quoi se lever du pied gauche. » Je laisse échapper un petit rire, rien qu’en imaginant la scène ce n’est pas triste. Je n’apprécierai clairement pas qu’on secoue mon lit de la sorte… « Ta famille habite dans le coin, donc ? » C’est vrai que pour l’instant on a pas encore trop parler de nous avec Vitto, il connaît pas grand chose de moi et je ne connais pas grand chose de lui. C’est surement parce qu’on est pas des grandes pipelettes. « Ouais, mes parents habitent à Sydney mais je les ai pas revu depuis mes 16 ans… J’ai vécu chez mon oncle à partir de là, il habite à une heure de Brisbane. » Je lui retourne la question sans vraiment m’attendre à une longue réponse « Et toi ? Tu as de la famille par ici ? » Nous ne prolongeons pas vraiment la conversation, je n’aime pas spécialement parler de mes parents. Plus je pense à peu et plus je m’en veux alors je préfère tout simplement éviter le sujet… Je sais que ce n’est pas moi qui ait mis mon fils à la porte quand il avait 16 ans juste parce qu’il voulait devenir réalisateur mais je sais que ma mère doit s’en vouloir à mort (enfin je pense). Bref, sujet sensible et vu la situation actuel je préfère clairement ne pas y penser.
Nous changeons de sujet et revenons à l’événement d’hier et à mes vacances forcées, je tente de relativiser mais c’est raté… Une vague de souvenir me frappe en plein visage, les flemmes, les gens qui hurle, le sang. Je me demande si on peut considérer ça comme un choc post-traumatique… Mais enfin comme je l’annonce à Vitto je n’ai pas de raison de me plaindre, je suis en vie et malgré l’état de ma cuisse ce n’est qu’une plaie superficielle après tout « Je n'ai pas dit que tu n'avais pas à te plaindre. » Je soupire « Ouais je sais… Mais d’un côté je me sens pas légitime de me plaindre et de l’autre putain je me suis pris un bout plafond sur la gueule et une saleté de canalisation m’a perforé la jambe ! » Je me suis un peu laissé emporté mais je suis vraiment paumé en se moment. Bien sûr je suis ravi de m’en être sorti vivant mais en même temps c’est la première fois que je vis quelque chose comme ça donc c’est peut-être normal. Mais encore une fois je préfère changer de sujet et revenir sur notre jeu.
« Ah mais, mais, mais ... ça veut dire que t'as les quatre gares ? T'es vraiment certain que c'est moi qui vais te dépouiller ? » Je contemple mon triste jeu après les gare je n’ai pas grand chose mais c’est vrai que mes cases sont plutôt bien disposées. « Mhh il me manque encore deux ou trois cartes et la ce sera équitable. Je pense que ça va se jouer sur la chance. » Et pour le coup on peut espérer que c’est au moins mon jour de change, voir même ma semaine… Après s’être raclé la gorge Vitto reprend la parole « Tu sais que je ... enfin, je suis sans doute pas le mieux placé pour ça, mais si tu as envie de parler de ce qui s'est passé, là-bas ... voilà. » Un faible sourire se dessine au coin de mes lèvres, je suis touché que Vitto soit la pour m’écouter. Je ne suis pas sûr d’être capable d’en parler, en tout cas pour l’instant mais ça peu changer donc je prend non « Merci, pour l’instant… Euh je crois pas que j’ai trop envi d’en parler… Enfin je serai pas trop par où commencer… Mais je retiens et crois-moi tu vas regretter de m’avoir proposé ça. Je peux être une vraie pipelette quand je veux. Dans le genre capable d’écrire un scénario tout entier. » Je profite également pour remercie Vitto « En tout cas merci, pour tout ce que tu as fait et pour me supporter. Normalement je suis un meilleur colocataire promis » Enfin je dis ça mais mes deux dernières colocs on pris la poudre d'escampette avant même que je me sois installer mais je cris que leur départ n’avait rien à voir avec moi. « Bon pour me racheter je paie la pizza, enfin si tu as faim et si on arrive à passer un coup de fil pour passer commande. »
Je reprend la partie et tire les dés 5 j’avance et tombe sur une case chance, il est temps de voir si j’ai autant de chance que ça, je lis la carte à voix haute « Vous faite des réparations sur vos hôtels et palaces… » Au fond ce n’est pas vraiment mon jour de chance… Je paie ma dette « Et bien, espérons que tu tombe sur un de mes hôtels sinon je vais gentiment passer à crédit. »
Peut-être par crainte que le jeune homme ne finisse par poser des questions à son tour, et parce que Vittorio n'était de base pas quelqu'un d'intrusif, il se rendait compte qu'il ne savait pas grand-chose de Bob, en définitive. Rien de plus que les banalités liées au fait de vivre sous le même toit, du moins, ce qui dans l'immédiat n'était pas dérangeant mais démontrait une certaine volonté de leur côté à tous les deux à garder pour eux-mêmes les sujets réellement sérieux. « Ouais, mes parents habitent à Sydney mais je les ai pas revu depuis mes 16 ans … » avait finalement admis Bob, Vittorio presque surprise de la facilité avec laquelle il avait obtenu cette confidence. « J’ai vécu chez mon oncle à partir de là, il habite à une heure de Brisbane. Et toi ? Tu as de la famille par ici ? » Comme c'était souvent le cas avec Vitto, il avait éludé la question en en posant une nouvelle à son tour « Tu viens de Sydney ? J'aurais mis ma main au feu que tu avais toujours vécu ici ... » Et en même temps qu'en savait-il, lui, il n'était même pas capable de différencier un accent australien d'un autre. La question de Bob toujours dans un coin de sa tête, il avait consenti à y répondre à son tour, assurant sans réfléchir « Moi ? J'suis certainement le premier Giovinazzo à foutre un pied en dehors de l'Italie, alors aucun risque. » et n'ayant même pas la volonté de mentir, en premier lieu. Et puis Liviana lui était revenue en tête, l'espace d'un instant il l'avait presque oubliée ... et pourtant elle changeait tout à cette conversation. Mais Liviana n'était pas une Giovinazzo, au fond, alors le mensonge n'en était pas vraiment un, en plus de ne pas être volontaire.
Étirant ses bras un instant, comme si cette absence d’électricité le rendait las, Vittorio avait contemplé un instant la posture d’inconfort qui semblait être celle de son colocataire. L’italien avait beau plaisanter sur son statut de vacancier forcé – statut qu’il subissait lui aussi, en vérité, bien que Bob ne possède pas toutes les cartes en main pour en avoir conscience – il se doutait bien que la situation n’avait rien d’enviable, et même devait peser sur le moral du cinéaste habitué à ne s’accorder que peu de répit professionnellement parlant. Vittorio espérait ne pas avoir donné l’impression de prendre la mésaventure du jeune homme à la légère, même s’il avouait avoir ressenti un certain soulagement lorsqu’enfin il avait retrouvé la trace de Bob à force de sonder tous les services d’urgences – débordés – de la ville. « Ouais je sais … mais d’un côté je me sens pas légitime de me plaindre et de l’autre putain je me suis pris un bout de plafond sur la gueule et une saleté de canalisation m’a perforé la jambe ! » Grimaçant légèrement, particulièrement lorsqu’il repensait au fait que Bob lui avait dans un tout premier temps proposé de l’accompagner au centre commercial, avant qu’il ne décline en avançant le retard qu’il avait pris dans ses mails. C’était un peu stupide de s’imaginer que sa présence aurait pu changer quoi que ce soit, tout ce qu’ils y auraient gagné c’était d’être estropiés tous les deux et donc dans de beaux draps désormais, mais c’était plus fort que lui. « Mais j’ai entendu dire que tu avais eu ton moment héroïque … » avait-il finalement fait remarquer, un sourire vaguement taquin sur le visage « Je suppose que c’est le point positif de cette mésaventure … tu pourras la raconter à tes petits-enfants. Enfin, évite peut-être de mentionner l’histoire de la canalisation, si tu ne veux pas les traumatiser. » Et puis ce n’était sans doute pas l’instant le plus glorieux de toute cette histoire.
L'esprit accaparé par cette discussion, Vittorio s'en était laissé surprendre par la partie, lorsque Bob s'était emparé de la quatrième gare du plateau. Et dieu sait pourtant que se concentrer sur un jeu de société aussi désuet n'était pas le meilleur moyen de capter son attention. « Mhh il me manque encore deux ou trois cartes et la ce sera équitable. Je pense que ça va se jouer sur la chance. » Est-ce que ce n'était pas tout le temps le cas, de toute manière ? Ce jeu ne dépendait que de la chance de sa main au moment de tirer une carte ou de jeter les dés. L'esprit quelque peu en suspend, l'air sérieux de Vittorio était resté encore un instant pourtant, tandis qu'il tentait maladroitement de faire comprendre à Bob que s'il n'en donnait pas l'air, il était pourtant dispos s'il avait besoin de parler à quelqu'un sans savoir trop à qui s'adresser. Après tout ils ne se connaissaient pas encre beaucoup, ce qui, dans certaines situations, pouvait être un avantage plutôt qu'un inconvénient. « Merci, pour l’instant … Euh je crois pas que j’ai trop envie d’en parler … Enfin je serai pas trop par où commencer … Mais je retiens et crois-moi tu vas regretter de m’avoir proposé ça. Je peux être une vraie pipelette quand je veux. Dans le genre capable d’écrire un scénario tout entier. » Laissant échapper un léger rire, il n'avait pu s'empêcher de faire remarquer « Si c'est le genre de trucs dont tu as besoin pour trouver l'inspiration je ne donne pas cher de ta peau ... Et tu es dans l'année maudite, je te rappelle, alors fais gaffe. » Le club des vingt-sept, tout ça, ça lui parlait ? Peut-être, ou peut-être pas, tout dépendait de si Bob était du genre superstitieux après tout ... Il n'avait statistiquement pas plus de chance qu'un autre de faire concurrence à Kurt Cobain ou Jimi Hendrix. « En tout cas merci, pour tout ce que tu as fait et pour me supporter. Normalement je suis un meilleur colocataire promis. Bon pour me racheter je paie la pizza, enfin si tu as faim et si on arrive à passer un coup de fil pour passer commande. » Plissant le nez d'un air faussement outré, Vittorio avait quitté son fauteuil en faisant mine de se lamenter « Mangia canguro e osa parlare di pizze ... » Est-ce que Bob avait déjà réellement mangé du kangourou ? Vitto n'en avait pas la moindre idée, mais ce qu'il savait en revanche c'était que s'il n'avait jamais quitté l'Australie son colocataire n'avait jamais mangé de VRAIE pizza. « Le jour où je t'en aurai fait une, de pizza, tu ne voudras plus jamais manger celles du numéro placardé sur le frigo. » Et là-dessus Vittorio était catégorique, rien à voir avec sa tendance à se vanter un peu facilement ... ou presque pas.
Traversant la pièce jusqu'au téléphone fixe, le seul encore utilisable maintenant que leurs deux téléphones portables étaient à plat et que les recharger était impossible, il avait décroché le combiné pour vérifier s'il y avait ou non une tonalité, tandis que Bob en profitait pour jouer son tour de jeu. « Vous faites des réparations sur vos hôtels et palaces … Et bien, espérons que tu tombes sur un de mes hôtels sinon je vais gentiment passer à crédit. » Ses lèvres s'arquant dans un sourire légèrement moqueur, l'italien n'avait pu s'empêcher de faire remarquer d'un ton faussement sérieux « C'est ça d'avoir la folie des grandeurs. » Raccrochant le combiné, il était revenu s'asseoir à sa place en se laissant tomber sur le fauteuil avec lourdeur « Toujours pas de tonalité. J'vais finir par craindre qu'on voit débarquer les zombies. » Pas d'électricité, pas de téléphone, est-ce que l'apparition des zombies n'était pas la suite logique de toute cette histoire ? Attrapant le dé, il s'apprêtait à jouer à son tour lorsque sa crier gare la lumière était revenue dans la pièce et un rap italien virulent s'était échappé de la tour Hi-fi, agressant subitement leurs oreilles (enfin, celles de Bob, du moins). « Assa fa ! » L'allégresse passagère lui rendant son napolitain, malgré la musique qui couvrait à moitié sa voix, Vittorio s'était levé à nouveau pour couper le son, croisant le regard circonspect de Bob « Quoi ? C'était pour couvrir le bruit du vent dehors. » Mensonge, en vérité il lui arrivait régulièrement de mettre la musique à fond en pleine journée, lorsque Bob était absent et que les voisins ne semblaient pas être là eux non plus. « Bon, du coup ... je nous les fait, ces pizzas ? » Question purement rhétorique, puisqu'il passait déjà du côté cuisine, profitant que la configuration de la pièce lui permette de toujours voir Bob pour lancer vers lui un doigt presque menaçant « Et toi tu ne bouges pas de ce canapé. L'année maudite, je te rappelle. » Oui oui, toujours. « Tu n'as qu'à ... me parler de Cora, tiens. Ça fait au moins deux jours, tu dois être en manque ... de parler d'elle, je veux dire. » Quoi que, peut-être pas que d'en parler, qui sait. Affichant un sourire gentiment moqueur, il avait ouvert les placards à la recherche de la farine et du reste des ingrédients. Il était encore un peu tôt pour manger, mais s'il voulait laisser la pâte reposer un minimum, autant s'y mettre dès à présent ... maintenant qu'il était certain de pouvoir la cuire ensuite.
WHEN THE ROAD LOOKS ROUGH AHEAD AND YOU'RE MILES AND MILES FROM YOUR NICE WARM BED, YOU JUST REMEMBER WHAT YOUR OLD PAL SAID: YEAH, YOU'VE GOT A FRIEND IN ME. YOU'VE GOT YOUR TROUBLES, I'VE GOT EM TOO, THERE ISN'T ANYTHING, I WOULDN'T DO FOR YOU. WE STICK TOGETHER AND SEE IT THROUGH 'CAUSE YOU'VE GOT A FRIEND IN ME.
« Tu viens de Sydney ? J'aurais mis ma main au feu que tu avais toujours vécu ici ... »Je soupire malgré moi, ce n’est pas faux, je ne considère presque plus mes origines. « Pour moi c’est comme si j’avais toujours vécu ici. Et je pense que même si j’avais un petit accent de Sydney, tu ne le remarquerais même pas. » Je ne serai pas étonné que pour Vitto tous les habitants d’Australie aient le même accent. Je lui retourne sa question et lui demande s’il a de la famille par ici. « Moi ? J'suis certainement le premier Giovinazzo à foutre un pied en dehors de l'Italie, alors aucun risque. » Je m’attendais à cette réponse, pour qu’il n’est pas d’autre choix que de venir vivre ici avec moi il était logique que Vitto n’est pas de famille en Australie. « Hmm… J’aurai pu m’en douter, j’ai jamais entendu un accent comme le tiens par ici. Tu es le seul représentant de ton espèce par ici. » J’aime embêter Vitto avec son accent mais il est clair que je fais pale figure face à lui. Je serai incapable de parler une autre langue aussi bien que lui le fait (avec ou sans accent), même si j’ai quelque notion au espagnol je n’en mène pas long.
Nous finissions par parler brièvement de mon accident « Mais j’ai entendu dire que tu avais eu ton moment héroïque … Je suppose que c’est le point positif de cette mésaventure … tu pourras la raconter à tes petits-enfants. Enfin, évite peut-être de mentionner l’histoire de la canalisation, si tu ne veux pas les traumatiser. » Je pouf de bon cœur, je me vois bien raconter ça à ma famille, peut-être même que je pourrai le raconter à toute les personnes que je rencontre. Cependant je boude gentiment « Maieuh… pourtant c’est la partie que je préfère… ça change des sauvetages où tout le monde s’en sort sans une égratignure. » C’est juste le après qui est plus compliqué « Par contre, si les douleurs pouvaient ne durer qu’une journée ça pourrait m’arranger. » Je retourne à ma partie et constate l’étendu des dégâts, encore 4 ou 5 cases et j’ai une chance de gagner mais pour l’instant je n’ai pas la moindre chance. Vitto prend à nouveau la parole et me rappelle qu’il est là pour moi si besoin. Je le remercie et décline son offre, enfin pour l’instant en répliquant que le jour où je voudrais parler je lui écrirais un scénario. « Si c'est le genre de trucs dont tu as besoin pour trouver l'inspiration je ne donne pas cher de ta peau ... Et tu es dans l'année maudite, je te rappelle, alors fais gaffe. » Je ricane doucement. « Est-ce qu’on considère l’année comme 12 mois ou bien on peut dire que c’est bientôt fini avec la fin de l’année ? Parce que là je suis à deux doigts de me barricader plus de 3 mois sans quitter la maison s’il le faut. » Honnêtement même s’il le fallait je ne le ferai pas, enfin je pense. Je finis par remercier Vitto pour tout ce qu’il a fait et lui propose de payer une pizza. C’est une vieille habitude que j’avais avec mon meilleur ami, mais c’est vrai que ce n’est pas la meilleure proposition qu’on peut faire à un Italien. « Mangia canguro e osa parlare di pizze ... » Je trouve ça drôle quand Vitto parle italien mais y’a pas à dire je ne pipe pas un mot, même si dans de très rare cas c’est semblable à l’espagnole. « Le jour où je t'en aurai fait une, de pizza, tu ne voudras plus jamais manger celles du numéro placardé sur le frigo. » Ah ça je l’espère bien. « Mais je n’attends que ça mon petit. »
Je joue mon tour le temps que Vitto se dirige vers le téléphone. Manque de pot je suis bon pour payer un max. « C'est ça d'avoir la folie des grandeurs. » « Peut-être, mais pour le coup ça vol pas haut sur mon compte en banque. » Vitto décroche le téléphone fixe « Toujours pas de tonalité. J'vais finir par craindre qu'on voit débarquer les zombies. » Je lève les yeux de mes billets de banque et lance « T’en fait pas, j’ai vu tout les films d’apocalyptiques qui existent au monde. Je saurai survivre dans n’importe quelle situation. Tiens, je t’ai jamais dit que je me suis retrouver fasse à un ours et que j’ai survécu. » Bon d’accord c’est un peu exagéré mais lors de ce stage on s’est vraiment retrouver face à un ours, même s’il n’a pas vraiment fui grâce à moi. Quelques instant plus tard la lumière fut subitement et une musique quelque peu agressante me perça les tympans. Je fis un bon de trois mètre sur mon fauteuil « Assa fa ! » Je levais un sourcil interrogateur vers Vitto « Quoi ? C'était pour couvrir le bruit du vent dehors. » Je ne crois pas vraiment en son excuse étant donné que je l’ai déjà surpris plus d’une fois avec la musique à fond, et tempête non incluse. Mais bon, je ne dis rien, c’est une de nos différences qui me fait marrer. Jamais je ne ferai ça de ma vie, pour dire je suis plutôt discret, mes voisins ne me connaissaient même pas avant l’arrivé de Vitto, et je doute qu’ils me préféraient avant son arrivé. Mais dans le fond, je m’en fou royalement, s’ils ne sont pas contents ils n’ont cas d’emménager, je ne mettrais jamais Vitto dehors, il est ici chez lui maintenant (enfin tant qu’il paie le loyer et qu’il me laisse le choix des films). « Bon, du coup ... je nous les fait, ces pizzas ? » Ah ! voilà une phrase que je voulais entendre ! « Pour sur ! Je ne dis jamais non à la pizza, et tu as raison il est temps que je goûte la tien ! » Je tente de choper mes béquilles pour donner un coup de main à mon colocataire mais celui-ci m’arrête illico dans ma démarche « Et toi tu ne bouges pas de ce canapé. L'année maudite, je te rappelle. » Sur ces mots, je m’affaisse boudeur dans mon fauteuil. « Tu n'as qu'à ... me parler de Cora, tiens. Ça fait au moins deux jours, tu dois être en manque ... de parler d'elle, je veux dire. » Vitto s’installe derrière la cuisinière et fouille dans le frigo à la recherche d’ingrédients magiques. Je ris avant de répondre. Il faut croire que j’ai tendance à un peu trop parler de mon amie, mais en même temps, je n’ai pas d’autre choix j’adore parler d’elle. « Qu’est ce que tu veux que je te raconte de plus ! Je t’ai déjà tout raconté… Comment je l’ai rencontré, comment par je ne sais quel miracle j’ai réussi à la faire jouer dans un de mes films et comment encore actuellement elle m’inspire à chaque nouveau film et dans la vie. Franchement, tu verrais par où elle est passée, elle te surprendrait aussi. Elle ne me dit pas tout, mais je sais… C’est une battante, on en fait pas deux comme elle. » Quand je pense que j’ose me plaindre de ma famille parfois… Ce n’est rien fasse à la sienne, enfin surtout face sa mère. « Mais à bien y réfléchir, si je ne t’ai pas saoulé avec tout ça, j’ai peut-être un truc que je ne t’ai pas encore raconté. » C’est un peu la honte mais je ne suis plus à ça près avec Vitto. « Quand j’étais petit, genre onze/douze ans, je ne voulais pas encore être réalisateur mais écrivain. Mon oncle, chez qui j’ai vécu à partir de mes 16 ans était romancier, enfin il l’est toujours mais je ne l’ai rien vu sortir depuis des siècles. » Pourtant il a toujours un projet en cours quand je lui rend visite, allez savoir il a peut-être un nouveau nom de plume. « Enfin bref je m’égare, donc mon oncle était écrivain, c’était le seul dans ma famille a être un peu différent (voir même un peu fêlé) et je l’adorais, il me ressemblait. Un été, je pu passer deux semaines chez lui. Là-bas, on a écrit ensemble. J’étais jeune et j’apprenais mais j’écrivais des histoires avec lui. J’utilisais toujours le même personnage principale, et même si dans mes souvenirs elle ne s’appelait pas Cora, c’était bien elle qui m’inspirait toutes ces histoires. » C’est marrant de repensé à ça, je ne pense pas l’avoir déjà raconté à quelqu’un, pas même à Cora. « Connaissant mon oncle, il a du garder les carnets, ça serait marrant de retomber dessus un jour. » Après ce monologue extrêmement personnel à mon gout je dévie la conversation vers mon colocataire « Mais et toi, est-ce que tu as garder une passion dévorante depuis ta plus tendre enfance ? Enfin à part le vélo avec lequel tu adore te déplacer bien sur. » Vitto et son vélo me font bien rire, ça lui donne un petit look écolo assez sympa. Pour ma part, le vélo c’est pas mon truc. Je préfère me déplacer à pied, vu ma maladresse c’est moins risqué.
Vittorio, en sa qualité d’étranger fraîchement débarqué – sur un coup de tête qui plus est – voyait l’Australie comme un ensemble homogène plutôt que comme une addition de villes aussi différentes que pouvaient l’être les villes et les régions italiennes. Brisbane, Sydney, Perth … pour lui tout était du pareil au même. Une chaleur à crever, des paysages bétonnés et un style de vie très anglo-saxon, quoi qu’on en dise. Rien d’étonnant donc au fait qu’il ait aisément pu prendre son colocataire pour un natif de Brisbane, sans envisager un seul instant que Bob ait pu grandir à mille kilomètres de là. « Pour moi c’est comme si j’avais toujours vécu ici. Et je pense que même si j’avais un petit accent de Sydney tu ne le remarquerais même pas. » lui avait en tout cas expliqué le jeune homme avec patience, Vittorio se gardant bien d’avouer qu’il n’avait pas remarqué le moindre accent chez qui que ce soit … Les anglophones parlaient tous de la même manière à ses yeux : en donnant l’impression d’avoir une patate chaude dans la bouche pour les empêcher d’articuler convenablement. Et puisqu’il était justement question d’accent, Bob n’avait pas manqué d’enfoncer le clou à propos du sien lorsque Vitto avait menti de manière éhontée en affirmant qu’aucun membre de sa – maudite – famille n’avait jamais fichu un pied en Australie. « Hmm … j’aurais pu m’en douter, j’ai jamais entendu un accent comme le tien par ici. Tu es le seul représentant de ton espèce par ici. » Le visage fendu d’un sourire narquois, l’italien avait machinalement rassemblé ses faux billets de banque pour les trier convenablement « Et par mon espèce tu veux parler des hommes au physique avantageux et à l’accent irrésistible, bien sûr ? » Gardant l’air taquin, Vittorio avait malgré tout tenté de saisir une occasion d’aborder le sujet plus sérieux qui les avait mené à leur situation actuelle : jouant au Monopoly, et Bob se remettant d’un séjour à l’hôpital dont il se serait sans doute passé volontiers. Il faudrait probablement quelques années avant que le jeune homme soit capable d’en parler totalement sur le ton de la plaisanterie, bien que vendant toujours un peu la peau de l’ours avant de l’avoir tué Vitto se soit risqué à un trait d’humour à ce sujet, fort heureusement plutôt bien accueilli par Bob « Maieuh … pourtant c’est la partie que je préfère … ça change de tous ces sauvetages où tout le monde s’en sort sans une égratignure. » Dans ses films, peut-être. « Par contre si les douleurs pouvaient ne durer qu’une journée, ça pourrait m’arranger. » Gratifiant Bob d’un sourire compatissant Vittorio – jusqu’alors assis en tailleur dans le fauteuil – avait décroisé ses jambes pour les étirer un peu, et fait remarquer d’un ton volontairement taquin « Et le septième jour, Dieu créa l’ibuprofène et le paracetamol. Amen. » Une maigre consolation pour Bob à l’heure actuelle, certes. Toujours par pure taquinerie l'italien n’avait par ailleurs pas pu s’empêcher de faire le parallèle entre son âge et le fameux « club des vingt-sept » invention probable d’un cerveau beaucoup plus superstitieux que le sien « Est-ce qu’on considère l’année comme douze mois ou bien on peut dire que c'est bientôt fini avec la fin de l'année ? Parce que là je suis à deux doigts de me barricader plus de trois mois sans quitter la maison s’il le faut. » Tout de suite les grands mots « Moi j’appelle ça une excuse pour reprendre le boulot moins vite. » Le voilà qui haussait les épaules, empli d'une fausse innocence « Mais non, je suis au regret de t'informer que tu ne seras pas tiré d’affaire avant ton vingt-huitième anniversaire … Et oui, j’ai conscience que ça fait très malédiction de conte de fée, dis comme ça. » Et pourtant, Vitto n’était clairement pas le genre de gamin que l'on avait élevé aux contes de fée.
Jouant son tour, Bob avait émis l’hypothèse de commander es pizzas, l’italien incapable de ne pas témoigner de l’hérésie que représentaient les pizzas australiennes à ses yeux, mais se résolvant néanmoins à accéder à la proposition de son colocataire pour une raison simple : sans électricité, leur choix de repas se trouvait considérablement réduit. Pour autant Bob était prévenu, il ne couperait pas aux pizzas façon Vitto, un de ces jours. « Mais je n'attends que ça mon petit. » Bien, alors qu'il ne s’imagine pas que l’italien ne notait pas cela soigneusement dans un coin de sa tête. Pour ce qui était du téléphone et de leur commande, en revanche, ils allaient sans doute devoir remettre leurs plans à plus tard, faute de tonalité. Une situation qui ressemblait un peu trop au pilot de The Walking Dead, de l'avis de Vitto. « T'en fais pas, j’ai vu tous les films d’apocalypse qui existent au monde. Je saurais survivre dans n’importe quelle situation. Tiens, je t’ai jamais dit que je me suis retrouvé face à un ours et que j’ai survécu. » Arquant un sourcil, le barbu n'avait pas pu s’empêcher de questionner d'un air narquois « Où ça, au zoo ? » tandis que le fauteuil l’accueillait à nouveau avec lourdeur « N’empêche, moi qui croyait que les réalisateurs avaient des goûts cinématographiques un peu snob … les films de zombies, vraiment ? » Quoi que, il avait bien fallu que quelqu’un les réalise aussi, ces films de zombies. Interrompant la discussion l’électricité avait fait revenir du même coup la lumière mais également la musique que Vittorio avait poussé au volume maximal au moment où la coupure avait eu lieu. Dieu merci Bob ne comprenait pas l’italien, encore moins le napolitain … ce rap là n’était pas à mettre entre toutes les oreilles, surtout pas celles sensibles de son colocataire. Sautant sur l’occasion de changer de sujet Vitto avait annoncé son intention de faire des pizzas, et ôté à Bob toute idée de l’aider ou même de sortir du canapé, l'air boudeur qu’il avait reçu en retour ne lui arrachant qu’un rire gentiment moqueur. « Pour sûr, je ne dis jamais non à la pizza, et tu as raison il est temps que je goûte la tienne. » Lui adressant un regard qui voulait dire « j’aime mieux ça » l’italien s’était mis à fouiller dans les placard à la recherche du minimum syndical dont il avait besoin pour la pâte. Le reste, il verrait ensuite.
Histoire de tenir son colocataire occupé, puisque la session Monopoly venait malgré elle de prendre une pause, Vitto l’avait donc lancé sur son sujet de discussion favoris : Cora, alias la rouquine qui hantait ses rêves (jusqu’à quel point, là était la question). En toute honnêteté il aimait bien taquiner Bob à ce sujet, et trouvait même cela plus mignon qu’il ne voudrait bien l'avouer. « Qu’est-ce que tu veux que je te raconte de plus, je t'ai déjà tout raconté … » En long, en large et en travers, oui. « Comment je l’ai rencontrée, comment par je ne sais quel miracle j’ai réussi à la faire jouer dans un de mes films et comment encore actuellement elle m'inspire pour chaque nouveau film et dans la vie. Franchement, tu verrais par où elle est passée, elle te surprendrait aussi. Elle ne me dit pas tout, mais je sais … C'est une battante, on n’en fais pas deux comme elle. » Et pourtant Bob semblait plus résolu à faire cette déclaration à Vittorio qu’à la principale concernée … À ce stade-là, ce n’était même plus de la patience. « Mais à bien y réfléchir, si je ne t'ai pas saoulé avec tout ça, j’ai peut-être un truc que je ne t’ai pas encore raconté … » Les mains déjà dans la farine, Vittorio avait tendu une oreille attentive … Il ne l’avouerait pas non plus, mais les péripéties de Bob avec sa dulcinée inavouée c’était un peu son soap opera à lui, il avait toujours envie de connaître la suite. « Quand j’étais petit, genre onze-douze ans, je ne voulais pas encore être réalisateur mais écrivain. Mon oncle, chez qui j'ai vécu à partir de mes seize ans était romancier, enfin il l'est toujours mais je ne l'ai rien vu sortir depuis des siècles. Enfin bref je m’égare, donc mon oncle était écrivain, c’était le seul de ma famille à être un peu différent (voir même un peu fêlé) et je l'adorais, il me ressemblait. » Parce qu’il était un peu fêlé ? Vitto avait presque été tenté de faire cette taquinerie à haute-voix, mais avait finalement préféré laisser Bob continuer son récit « Un été, j'ai pu passer deux semaines chez lui. Là-bas, on a écrit ensemble. J’étais jeune et j’apprenais mais j’écrivais des histoires avec lui. J’utilisais toujours le même personnage principal, et même si dans mes souvenirs elle ne s'appelait pas Cora, c’était bien elle qui m'inspirait toutes ces histoires. Connaissant mon oncle il a du garder les carnets, ce serait marrant de retomber dessus un jour. » Marrant, ou carrément gênant. Vittorio en savait suffisamment quelque chose, il avait beau tenir un journal depuis ses seize ans, les rares fois où il s’était risqué à relire ce qui peuplait son esprit des années en arrière lui avaient suffit pour savoir qu’il s’agissait d'une terrible idée. Ses journaux se contentaient donc de vieillir dans le coffre d’une banque romaine, à l’abri de tous les regards. « Mais et toi, est-ce que tu as gardé une passion dévorante depuis ta plus tendre enfance ? Enfin à part le vélo avec lequel tu adores te déplacer bien sûr. » Sentant la moquerie qui lui permettrait d’éluder le côté sérieux que pourrait avoir une réponse honnête à cette question – Vittorio ne rêvant tout jeune qu’à ressembler aux loubards qui géraient Scampia sous la menace – il s’était engouffré dans la brèche en faisant remarquer d’un ton moqueur « Je rends service à cette ville, elle est déjà bien assez polluée avec toutes vos autoroutes à douze voies. » Douze, aucune exagération dans les paroles de Vitto comme d’habitude (si). « La boxe. Si j’avais décidé de ne faire que ça j’aurais sans doute pu en faire mon métier … Mais boxeur c'est un métier de voyou, paraît-il. » Et beaucoup trop tenu par les bookmakers et les pots de vin, aussi, surtout de là où il venait. Et Vittorio n’était pas de ceux qui se couchaient sur demande, même pour une somme alléchante … Plus par fierté mal placée que par honneur, cela dit. Au lieu de cela il se contentait de fréquenter les rings de boxe pour le plaisir de pouvoir s'y défouler, désormais. Avant même un logement c’était la première chose qu’il avait cherché en arrivant à Brisbane. « Et donc, pour en revenir à Cora. » Bob ne s’en sortirait pas aussi facilement « Tout ça est très intéressant, mais … tu comptes passer la seconde, un jour ? Non parce qu’elle t’inspire dans tes films et dans la vie, tu l’admires, c'est une battante, blablabla … Il serait peut-être temps de lui dire, hm ? » S’interrompant dans son activité pâte à sel pizza, il avait planté son regard dans celui de Bob « Et ne me réponds pas que c'est seulement artistique ou je ne sais quoi, hein, on sait tous les deux que tous les écrivains qui ont eu une muse trouvaient aussi le temps de la culbuter une fois leur plume posée. » Trop littéral pour Bob, peut-être … « Enfin, garde quand même ton côté midinette romantique, hm, ça passera mieux. Sérieux, t’as vraiment été marié dans une autre vie ? » Parfois Vittorio avait l'impression de vivre avec un petit frère de quinze ans qui vivrait ses premiers émois d’écolier, c'en était presque fascinant. Et certes, s'il en faisant autant des caisses et poussait le jeune homme dans ses retranchements, c’était en partie pour le plaisir de le voir devenir rougir avec gêne.
WHEN THE ROAD LOOKS ROUGH AHEAD AND YOU'RE MILES AND MILES FROM YOUR NICE WARM BED, YOU JUST REMEMBER WHAT YOUR OLD PAL SAID: YEAH, YOU'VE GOT A FRIEND IN ME. YOU'VE GOT YOUR TROUBLES, I'VE GOT EM TOO, THERE ISN'T ANYTHING, I WOULDN'T DO FOR YOU. WE STICK TOGETHER AND SEE IT THROUGH 'CAUSE YOU'VE GOT A FRIEND IN ME.
« Et par mon espèce tu veux parler des hommes au physique avantageux et à l’accent irrésistible, bien sûr ? » Je souris à la remarque de Vitto et hoche la tête lentement « Bien sûr… D’ailleurs si tu pouvais arrêter avec cet halo lumineux qui t’entour en permanence. Ça me brûle les yeux… Encore l’accent je fais avec mais porte au moins un voile et arrête de sourire, tu veux ?» Ou alors je devrai peut-être investir dans une paire de lunette de soleil. Mais trêve de plaisanterie et retour à mon petit incident, je reviens sur le fait que maintenant que c’est fait j’aimerai bien ne plus avoir mal et que si mon année maudite pouvait s’achever dans les plus bref délais ça ne serait pas de refus. « Mais non, je suis au regret de t'informer que tu ne seras pas tiré d’affaire avant ton vingt-huitième anniversaire … Et oui, j’ai conscience que ça fait très malédiction de conte de fée, dis comme ça. » Je râle gentiment à cette annonce. « Tu m’étonnes… J’ai l’impression d’être la belle au bois dormant qui vient de s’embrocher la jambe au lieu du doigt… » Puis je réalise le regard soutenu de Vitto. « Je te préviens tout de suite je me réveillerai seul, pas besoin d’un baiser ou d’un truc dans l'genre. »
Au final nous revenons à notre jeu et à la coupure de courant. Vitto aborde l’hypothèse d’une quelconque apocalypse, j’en profite pour me vanter un peu et étaler toute ma connaissance en film apocalyptique avec au passage une petite note sur mon stage au Zoo, mais Vitto ne semble pas étonné pour autant « Où ça, au zoo ? » Oui, c’est souvent là qu’on croise des ours, en effet. « N’empêche, moi qui croyait que les réalisateurs avaient des goûts cinématographiques un peu snob … les films de zombies, vraiment ? » Je le crois pas ! Le voilà plus surpris par mes gouts cinématographiques que par mes folles aventures. « Ouais au Zoo, je remplaçais mon oncle pour un stage stupide et voilà qu’on se retrouve face à un ours sortit de sa cage. Niveau sécurité ils étaient au top là-bas ! » Sur le moment je ne riais pas vraiment et depuis l’idée de retourner au zoo ne m’enchante guère (et dire que c’était déjà pas ma tasse de thé). « Mouais, c’est peut-être moi qui suis un peu bizarre, j’ai des gouts très éclectiques… Et pour ton information, tous les réalisateurs ne sont pas des snob ! » Même si ça en qualifie plus d’un. « En plus certains films de Zombi sont vraiment bien foutus, j’te ferai une liste un de ces quatre. » Bon c’est vrai que parfois j’ai des gouts douteux mais je ne suis pas encore dans un délire de film d’auteurs qui doit nous faire réfléchir du débout à la fin. Des fois un bon films d’horreur me va très bien. « Dans le genre film de zombi apocalyptique "Je suis une légende" n’est pas trop mal, enfin si on ne prend pas en compte les quelques incohérences notoires et la mort de ce pauvre chien qui n’avait rien demandé ! »
Pendant que Vitto s’active dans la cuisine pour faire la pizza il me lance sur le sujet de Cora, je sais bien qu’il fait ça pour me faire parler d’autre chose que de mon accident et probablement parce que ça le fait bien rire, mais pour le coup ça marche plutôt bien. Même s’il va bien finir un jour par ne plus pouvoir la voir en peinture avant même de la rencontrer. Alors que je me lance dans une énième épopée de ma jeunesse à idolâtrer Cora, mais je dévie aussi vite la conversation sur un autre sujet tentant de faire parler mon colocataire. « Je rends service à cette ville, elle est déjà bien assez polluée avec toutes vos autoroutes à douze voies. » C’est pratique les autoroutes à 12 voies, ça va plus vite qu’un vélo. Mais je vois ce qu’il veut dire, des fois ça semble un peu excessif. « La boxe. Si j’avais décidé de ne faire que ça j’aurais sans doute pu en faire mon métier … Mais boxeur c'est un métier de voyou, paraît-il. » Je pense que Vitto m’avait déjà parler de la boxe mais jamais qu’il aurait pu en faire son métier. Métier de voyou ? Pas plus que certain Avocat à mon gout. « Mhh, dommage je t’aurai bien vu en boxeur, il te manque juste le nez tordu. Et un coloc Boxeur c’est toujours utile, enfin sauf quand on doit choisir qui fait la vaisselle.»
Malheureusement, comme à son habitude Vitto ne s’étend pas sur sa petite personne très longtemps. D’ailleurs, j’ai des fois l’impression de ne pas le connaître du tout. « Et donc, pour en revenir à Cora. » Mhh, je ne suis pas encore tiré d’affaire apparemment. « Tout ça est très intéressant, mais … tu comptes passer la seconde, un jour ? Non parce qu’elle t’inspire dans tes films et dans la vie, tu l’admires, c'est une battante, blablabla … Il serait peut-être temps de lui dire, hm ? » Cette réflexion m’agace un peu, je réagis calmement mais du tact au tact. Elle le sait, enfin je crois, je veux dire, je l’idolâtre depuis que je suis gosse et je lui en ai déjà parler plus d’une fois… Sinon comment je l’aurai convaincu de jouer dans un de mes films. Et je ne vois pas où il veut en venir avec sa seconde. Cependant je ne prends pas la parole et Vitto enchaine « Et ne me réponds pas que c'est seulement artistique ou je ne sais quoi, hein, on sait tous les deux que tous les écrivains qui ont eu une muse trouvaient aussi le temps de la culbuter une fois leur plume posée. » Je fais mouche. « Elégant… » Je ne pouvais répondre que ça dans cette circonstance. « Enfin, garde quand même ton côté midinette romantique, hm, ça passera mieux. Sérieux, t’as vraiment été marié dans une autre vie ? » Malheureusement au fond de moi je vois où il veut en venir mais je ne vois pas les choses de la même façon. Je soupire en m’enfonce dans mon canapé « Alors déjà, elle sait très bien ce que je pense d’elle, et depuis toujours. » Cependant, je ne peux qu'aller dans son sens sur certain point. « Enfin… d’un certain sens je vois où tu veux en venir… Mais c’est trop, compliqué. » Tout le monde dit ça tout le temps mais pour le coup ça me semble vrai. « Et de toute façon, même si comme tu dis si bien, je devrai peut être passer la seconde. Bah c’est pas une bonne idée, autant pour elle que pour moi. » Pour elle parce que je ne suis clairement pas la personne qui lui faut et pour moi parce que… J’ai un peu peur de me bruler les ailes… Et je sais de quoi je parle. « A une époque j’ai vraiment pensé que nous deux ça pouvais marcher, puis y’a eu Priam et ensuite Bianca… Et je suis parti, j’ai divorcé… Bref, c’était pas le moment et je pense pas que ça le sera un jour. » Enfin je pense. « Et oui j’ai été marié… J’étais jeune… Et influençable… Non pas que je ne le suis plus mais j’ai retenu la leçon, ces histoires très peu pour moi maintenant, je préfère mon boulot. Et si ça t’intéresse vraiment j’étais bien loin d’être le genre midinette romantique. » Plutôt le genre petit con absent pour être plus réaliste. Je réalise ensuite que je ne sais même pas si Vitto à été marié et de plus j’ai vraiment l’impression d’être une fillette de quinze ans qui vient de dévoiler tout sa vie sentimentale à ses meilleures amies… Je décide donc de lui retourner l’ascenseur même si je ne m’attend pas à un grand succès. « Et toi d’abord ? Tu ne me dis jamais rien grand cachotier ! T’as déjà été marié ? Ou ne serait-ce que fiancé, veuf, en couple libre, père ou je sais pas quoi d’autre… » ça se trouve Vitto est père et je ne le sais même pas ! C’est quand même pas humain de vivre avec quelqu’un qui se dévoile si peu, des fois j’ai l’impression de revivre avec mon père.
Après tout ça et pour changer d’ambiance, je jette un coup d’œil à la pâte qui commence à prendre une forme de pizza, avec un peu de chance on mangera avant que je ne tombe raide mort de faim « Bon, elle est à quoi cette pizza en fait ? Parce que je ne suis pas sûr que ce qu’on avait au congèle ait tenu le coup avec la coupure de courant… » Après réflexion il ne devait pas être trop plein et Vitto l’a peut-être même vidé pendant mon absence « On doit avoir des champignons en conserve et un bocal d’olive par contre. » Des olives noires mes préférés, j’en ai toujours en réserve. Je jette un coup d’œil au plateau de monopoly. On n’a pas avancé les pions depuis une bonne dizaine de minutes. « Ah et comme tu as les mains pleines de farine on est d’accord que je joue à ta place pour ce tour hein ? » Puis je chuchote plus pour moi-même qu’autre chose. « Avec un peu de chance tu tomberas sur mon hôtel. Je dois juste faire un petit 4. »
Vittorio avait accueilli la confession de Bob concernant cette histoire de zoo avec des yeux ronds, se gardant cependant de faire remarquer qu’à sa place il se serait empressé d’attaquer le dit zoo en justice pour leur apprendre à faire preuve d’une telle imprudence et mettre en danger la vie d’autrui. Mais c’était probablement sa tendance à tout ramener – ou presque – au juridique qui influençait son raisonnement. Au lieu de cela le blond s’était contenté d’une taquinerie au sujet des goûts cinématographiques de Bob, loin de ceux que l’on attribuerait par défaut à un réalisateur « Mouais, c’est peut-être moi qui suis un peu bizarre, j’ai des goûts très éclectiques … Et pour ton information, tous les réalisateurs ne sont pas des snob ! En plus certains films de zombies sont vraiment bien foutus, j’te ferai une liste un de ces quatre. » Vittorio n’était pas contre, bien qu’il ne s’agisse clairement pas de son type de films favori. « Dans le genre film de zombies apocalyptiques "Je suis une légende" n’est pas trop mal, enfin si on ne prend pas en compte les quelques incohérences notoires et la mort de ce pauvre chien qui n’avait rien demandé ! » Croisant les bras d’un ton faussement accusateur, l’italien avait fait remarquer non sans grossir un peu le trait « Bah bravo, tu viens de me spoiler. » un air boudeur s’invitant sur son visage. Avant de laisser place à un sourire moqueur tandis qu’il ajoutait « Non je blague, je l’ai déjà vu. » Reste qu’heureusement pour Bob, au fond, parait-il que le spoiler intempestif était un motif de dispute conjugale désormais. Il était loin le temps où les couples se disputaient pour une histoire de rouleau de papier toilette ou d’oubli sur la liste des courses, maintenant on se menaçait de révéler le dernier mort de la série à la mode pour se faire entendre.
Abandonnant finalement le monopoly tandis que l’électricité leur revenait enfin – ils auraient tout le temps de terminer éventuellement cette partie une fois la pizza au four – Vittorio n’avait pu échapper indéfiniment aux questionnements de Bob à son sujet. Questions auxquelles il s’exposait en se montrant lui-même un peu trop curieux à l’égard de son colocataire … Déformation professionnelle sans doute, l’italien était habitué à poser les questions beaucoup plus qu’il ne l’était à en être la cible. Et la vérité quant à ce qu’il rêvait de faire lorsqu’il était minot n’était clairement pas à mettre entre toutes les mains, surtout pas dans celles de Bob ; Et boxeur ce n’était pas un mensonge non plus, au fond. « Mhh, dommage je t’aurai bien vu en boxeur, il te manque juste le nez tordu. Et un coloc’ boxeur c’est toujours utile, enfin sans quand on doit choisir qui fait la vaisselle. » Laissant échapper un léger rire, gageant qu’au moins Bob devait avoir conscience de la chance qui était la sienne d’être tombé sur un colocataire qui malgré ses défauts – goûts musicaux douteux et tendance à l’exhibitionnisme en tête de liste – possédait au moins la qualité de ne pas aimer le désordre et de participer activement à ce que la maison reste propre et ordonnée, il avait répondu du tac au tac « C’est parce que c’est moi qui tord le nez de mes adversaires, la plupart du temps. » et fait mine d’appuyer ses dires donnant un coup de poing vigoureux contre le plan de travail, où les ingrédients nécessaires à la fabrication de sa pâte à pizza étaient enfin réunis. « Mais qui sait, peut-être que si je reste dans le coin assez longtemps dans les parages, je trouverai une salle qui voudra bien de moi pour entraîner une bande de morveux à enfiler ses gants de boxe correctement. » La fin de validité de son visa de touriste arrivait à grands pas, Vittorio n’en parlait pas beaucoup parce qu’il espérait probablement inconsciemment qu’en n’y pensant pas le problème finirait par disparaître, mais la précarité de sa situation en tant qu’immigré n’en restait pas moins réelle.
Se sentant à nouveau glisser sur la pente d’une discussion qu’il ne souhaitait pas avoir, puisqu’il en était la cible, l’italien n’avait pas tardé à revenir à la charge avec Bob et remis sur le tapis un sujet pour lequel il savait qu’il obtiendrait toujours un écho : Cora. Laissant volontairement le tact au placard, puisque commençant à penser que faire preuve de subtilité n’était pas le moyen le plus efficace d’ouvrir les yeux du brun, Vittorio avait adopté une position plus littérale, recevant même un « Élégant … » dubitatif de son interlocuteur. Le fait était que malgré la réputation que l’on prêtait aux italiens le barbu n’était pas le plus fier représentant du romantisme exacerbé et des sérénades qui duraient des semaines (bien que dans le cas de Bob cela semble se compter en années). L’air renfrogné, ce dernier avait protesté « Alors déjà, elle sait très bien ce que je pense d’elle, et depuis toujours. Enfin … d’un certain sens je vois où tu veux en venir … Mais c’est trop, compliqué. » Pour seule réponse Vittorio lui avait lancé un regard dubitatif. Compliqué cela ne voulait rien dire, compliqué ce n’était qu’une excuse derrière laquelle se cacher. « Et de toute façon, même si comme tu le dis si bien je devrais peut-être passer la seconde, bah c’est pas une bonne idée, autant pour elle que pour moi. » Les mains dans la farine, un œil sur ce qu’il faisait et l’autre sur Bob, Vittorio avait relevé la tête un instant « A une époque j’ai vraiment pensé que nous deux ça pouvait marcher, puis y’a eu Priam et ensuite Bianca … Et je suis parti, j’ai divorcé … Bref, c’était pas le moment et je pense pas que ça le sera un jour. » Autant dire que de là où se plaçait Vittorio, l’excuse fournie par Bob n’avait pas le moindre sens « Tu es sûr que tu ne te crées pas des barrières tout seul ? Bianca n’est plus un problème, et ce gars – Priam ? – non plus si j’ai bien compris … Alors où est le problème ? Enfin j’dis ça, tu connais Cora mieux que moi après tout … T’as juste pas l’air d’un gars qui a lâché l’affaire à son sujet, si tu veux mon avis. » Ou peut-être qu’il ne le voulait pas, au fond, mais Vittorio n’avait pas attendu pour le lui donner quoi qu’il en soit. « Et oui j’ai été marié … » avait en tout cas repris le brun, l’italien s’interrompant cette fois-ci totalement dans la confection de sa pâte, persuadé qu’il allait obtenir dieu sait quelle information qu’il n’avait pas eu jusqu’à présent. « J’étais jeune … Et influençable … Non pas que je ne le suis plus mais j’ai retenu la leçon, ces histoires très peu pour moi maintenant, je préfère mon boulot. Et si ça t’intéresse vraiment j’étais bien loin d’être le genre midinette romantique. » Sa curiosité piquée, Vitto avait soulevé un sourcil intrigué « Ah oui ? » Il avait du mal à s’imaginer Bob autrement pourtant, la faible expérience de l’italien en matière de relations amoureuses durables entretenait chez lui cette vision un peu clichée et peu nuancée de la chose « Tu nous cacherais une âme de mâle dominant que je n’aurais pas soupçonné, alors ? » Oui, les clichés qui emplissaient la tête de Vittorio étaient à ce point-là. Encore qu’il avait eu la présence d’esprit de poser sa question sur le ton de la taquinerie plutôt que d’avoir l’air diablement sérieux.
Laissant ses doigts manipuler la pâte avec la dextérité de quelqu’un qui ne faisait pas cela pour la première fois, il s’était presque félicité d’avoir vu venir le moment où Bob lui avait demandé « Et toi d’abord ? Tu ne me dis jamais rien grand cachotier ! T’as déjà été marié ? Ou ne serait-ce que fiancé, veuf, en couple libre, père ou je ne sais quoi d’autre … » appliquant au pied de la lettre la technique du miroir. « Rien de tout ça, pas le temps … Mais hey, dis-toi que si j’avais eu quoi que ce soit pour me retenir à Rome, tu n’aurais pas hérité du meilleur colocataire de l’histoire de la colocation. » Sourire taquin, son arme préférée pour pallier aux réponses qu’il voulait éviter d’avoir l’air trop sérieuses. « Y’a eu deux ou trois nanas, mais bon … Disons qu’elles illustraient bien le cliché de la fourberie féminine, et sérieusement quel mec a du temps à perdre avec ça ? » Pas lui en tout cas, les promesses en l’air, les mensonges d’arracheuses de dents et les caprices de femme bafouée, très peu pour lui. Et pourtant il avait fréquenté un exemple de chaque. Même sa propre mère – et dieu sait pourtant que Vittorio l’avait toujours mise sur un piédestal – était à ses yeux un exemple parfait de ce que pouvait engendrer la fourberie féminine dans la pire de ses formes. Voyant Bob se tortiller sur son canapé pour tenter de voir ce qu’il faisait Vittorio s’était félicité de l’entendre changer de sujet « Bon, elle est à quoi cette pizza en fait ? Parce que je ne suis pas sûr que ce qu’on avait au congèl’ ait tenu le coup avec la coupure de courant … » Secouant négativement la tête comme pour confirmer les dires de Bob Vittorio avait répondu « Il ne restait pas grand-chose, j’ai essayé de refourguer ce que je pouvais pour ne pas jeter … Les voisins avaient un réchaud de camping, on n’a fait des boulettes de viande avec les steak hachés qu’il nous restait, je me suis dit que tu ne serais pas contre. » Après tout sans cela ils auraient terminé à la poubelle. « On doit avoir des champignons en conserve et un bocal d’olives par contre. Ah et comme tu as les mains pleines de farine on est d’accord que je joue à ta place pour ce tour hein ? Avec un peu de chance tu tomberas sur mon hôtel, je dois juste faire un petit quatre. » Frappant la pâte avec vigueur dans le simple but d’arracher un sursaut à Bob, il avait malaxé une dernière fois la pâte à pizza avant de la remettre dans le saladier pour la laisser reposer un peu « Fais gaffe à toi, si je perds je m’occupe de garnir la pizza en utilisant l’autre arme clichée du pizzaiolo qui se respecte : je me mets à chanter. » Et qu’on se le dise, Bob n’avait pas envie de subir ça. « Y’a aussi un bocal de câpres et des cœurs d’artichaut, t’inquiète j’ai de quoi nous faire une pizza qui n’aura pas l’air d’être la pizza du pauvre en manque d’électricité. » Tournant un instant le dos à Bob le temps de passer ses mains sous le robinet d’eau pour les laver, il avait cherché des yeux le torchon pour les essuyer tout en demandant « Alors ? J’espère que tu viens de me rendre riche. »
WHEN THE ROAD LOOKS ROUGH AHEAD AND YOU'RE MILES AND MILES FROM YOUR NICE WARM BED, YOU JUST REMEMBER WHAT YOUR OLD PAL SAID: YEAH, YOU'VE GOT A FRIEND IN ME. YOU'VE GOT YOUR TROUBLES, I'VE GOT EM TOO, THERE ISN'T ANYTHING, I WOULDN'T DO FOR YOU. WE STICK TOGETHER AND SEE IT THROUGH 'CAUSE YOU'VE GOT A FRIEND IN ME.
« C’est parce que c’est moi qui tord le nez de mes adversaires, la plupart du temps.» Je souri à la remarque de mon colocataire, il n’a pas peur de se venter en temps normalement mais là je veux presque le croire. Et ça aurait été vraiment drôle que je cohabite avec un boxeur professionnel, moi qui n’ai déjà pas de vraiment de points commun avec Vitto si en plus il m’avait appris qu’il était boxeur… Hmm à bien y pensé j’aurai peut-être même refusé de l’avoir comme coloc (ce qui est légèrement discriminatoire quand on y pense). « Mais qui sait, peut-être que si je reste dans le coin assez longtemps dans les parages, je trouverai une salle qui voudra bien de moi pour entraîner une bande de morveux à enfiler ses gants de boxe correctement. » Je tique sur le si de sa phrase, ça paraît pour moi une évidence que Vitto doit reste en Australie, je ne veux pas devoir me chercher un nouveau colocataire… Et personne ne peut plus remplacer Vitto maintenant. Malheureusement le consulat n’est peut-être pas du même avis que moi et pourrai facilement renvoyer mon petit Vitto chez lui en Italie. « Y’a pas de si qui tiennent, tu vas rester en Australie. Je te séquestre dans le grenier s’il le faut ! » On n’a pas de grenier donc c’est pour dire, je serai près à en construire un rien que pour l’obliger à rester ici.
Vitto dévie la conversation sur Cora et notre relation statique, je pense lui balancer mes meilleurs arguments pour lui expliquer la situation actuelle et le pourquoi du comment mais au fond je ne suis moi-même pas vraiment convaincu par mes propos et il est clair que Vitto ne semble pas l’être plus que moi « Tu es sûr que tu ne te crées pas des barrières tout seul ? Bianca n’est plus un problème, et ce gars – Priam ? – non plus si j’ai bien compris … Alors où est le problème ? Enfin j’dis ça, tu connais Cora mieux que moi après tout … T’as juste pas l’air d’un gars qui a lâché l’affaire à son sujet, si tu veux mon avis. » Pour être honnête je suis un peu perdu, normalement j’en aurai sûrement parler avec Félix, enfin, s’il me parlait encore. Et si je ne m’étais pas marié avec sa sœur mais c’est le cas, donc je garde tout pour moi et je suis totalement paumé… Au fond je crois juste que je n’ai pas envie de revivre ce qui s’est passé dans mon précédent mariage avec Bianca. Je jette malgré moi un regard sombre à mon colocataire, je n’aime pas qu’il me fasse penser à ça, malgré ça il n’a pas tors et je le sais bien alors je n’ai aucune bonne raison pour l’envoyer balader. « Peut-être bien ouais, mais… j’ai juste pas envie de reproduire les mêmes erreurs. » Je veux dire par là que tout est allé trop vite avec Bianca, on est sorti ensemble rapidement (en même temps je connaissais son frère par cœur du coup ça semblais logique que je la connaisse aussi) et ensuite on s’est marié à nouveau très vite vu que j’allais partir à l’autre bout du monde. Je sais que ça ne peux pas se passer comme ça avec Cora, de 1 parce que je la connais déjà depuis presque 10 ans et de 2 parce que ce n’est tout simplement pas Bianca, mais je reste bloquer net parce cette perceptive (il faut dire que je n’ai jamais été un grand optimiste, un grand rêveur oui… Mais je connais trop la différence entre les rêves et la réalité, les films et la vrai vie… Cependant, c'est vrai que je pourrais quand même tenter de passer la seconde... On a qu'une vie. Je profite de la conversation pour exposé à Vitto le carnage de mon premier mariage et mentionne que j’étais loin d’être le mari parfait, romantique à souhait. « Ah oui ? Tu nous cacherais une âme de mâle dominant que je n’aurais pas soupçonné, alors ? » Je sens bien qu’il dit ça sur le ton de la rigolade mais je ne sais pas vraiment si je dois bien prendre cette remarque. Mâle dominant ? Non clairement ce n’est pas moi et ça ne serait jamais moi. Je n’ai jamais ressenti le besoin de me placer plus haut que les autres et de tenir le lead enfin, dans ma vie privée je veux dire. Parce que je le dois le faire déjà bien assez dans mon travail et ce n’est clairement pas le meilleur rôle (mais si on veut se faire connaitre et respecter on n’a parfois pas d’autre choix). Alors même si ça ne fait passer pour quelqu’un de peut être trop gentil, je n’ai clairement jamais été un mâle dominant. En plus il semblerait que j’ai tendance à être attiré par des femmes fortes qui n’apprécie pas le moins du monde qu’on les domine. On va dire que je suis plutôt pour un partage et une entente commune. « Clairement pas, tu m’as bien cerné là dessus. Non, ce que je veux dire par là c’est que je n’était pas très… présent (si ce n’est jamais). Bon elle non plus ne ratait pas une occasion de s’éclipser des week-end entiers en montagne… Mais je ne pouvais pas vraiment lui en vouloir. Bref, on était très loin du couple parfait, même si pour moi ça semblais fonctionner. Enfin, jusqu’à ce qu’elle brule mes affaires peut-être, là ça sentait un peu le roussit. » Sans mauvais jeu de mots bien entendu. « Bref, on était très loin du couple romantique à souhait qui se fait un petit resto tout les semaines et qui étalent leurs amours aux yeux de tous. » Je retourne la conversation dans le sens de Vitto afin d’en apprendre un peu plus sur mon colocataire « Rien de tout ça, pas le temps … Mais hey, dis-toi que si j’avais eu quoi que ce soit pour me retenir à Rome, tu n’aurais pas hérité du meilleur colocataire de l’histoire de la colocation. » je souris à cette annonce il n’a pas tord mais s’il pouvait éviter de se lancer de fleurs et de prendre la grosse tête ça m’arrangerai. « Tu sais certains hommes ont tendance à prendre la fuite quand des choses devraient les retenir justement. Mais content d’apprendre que ce n’est pas ton cas et que j’ai hérité du meilleur coloc de tout les temps. Par contre, évite de le répète trop fort, j’aimerai pas que la rumeur se répande. Après les voisins seront jaloux. » Et si on me le vole, j’aurai sûrement de la peine à retrouver un coloc comme Vittorio. « Y’a eu deux ou trois nanas, mais bon … Disons qu’elles illustraient bien le cliché de la fourberie féminine, et sérieusement quel mec a du temps à perdre avec ça ? » Me voilà rassuré, j’aurais été très surpris s’il m’avait expliqué qu’il n’y a jamais eu personne, quitte à le soupçonner de me mentir. En vrai j’ai du mal à imaginer mon coloc autrement que comme un Don Juan et je vois tout à fait où il veut en venir avec la fourberie féminine « Aucun, bien entendu. On à mieux à faire, comme regarder le foot ou faire le barbecue par exemple. » Quitte à entrer dans les clichés autant le faire entièrement. Je ne joue pas dans la demi-mesure.
Cenpendant comme je sens que Vitto n’est pas vraiment dans une optique de révélation, je décide de dévier le sujet sur notre pizza. Il faut dire que je commence à avoir la dalle. Vitto m’explique qu’il a pu sauver quelques denrées de la panne d’électricité et que notre pizza ne devrait pas faire trop vide, pendant ce temps, je profite du fait qu’il soit coincé dans la cuisine, les mains pleines de pâte pour jouer à ça place « Fais gaffe à toi, si je perds je m’occupe de garnir la pizza en utilisant l’autre arme clichée du pizzaiolo qui se respecte : je me mets à chanter. » Je tressaille à ses paroles, pitié pas ça, je préfère encore perdre la partie. « Oula, je ne sais ce qui est pire au final… T’entendre massacrer la culture musical Italienne ou perdre au monopoly ? Hmm je crois que je suis pas trop mauvais perdant donc je vais peut-être opter pour la deuxième option. » Je lance les dés, 8 « Alors ? J’espère que tu viens de me rendre riche. » Je jette un coup d’œil au plateau, mais c’est bien ce que je pensais. « Hey non, ton coté Bad Boy a encore repris le dessus. Tu dois aller faire un petit tour en prison. » Ce qui veut dire que le prochain tour je peux sans autre tombé sur ses propriétés sans payé un sou. Cependant, l’alarme de mon téléphone me sort de mon jeu, c’est l’heure de mes antidouleurs, enfin. Je sens que ma cuisse se réveille et des fourmis courent le long de ma jambe jusqu’à mon petit orteil. Je quitte enfin ce petit canapé et me dirige vers la salle de bain. Les deux béquilles étant plus encombrante qu’autre chose je n’en saisi qu’une pour me déplace. Je prends très chère mais la récompense est méritée j’attends mes antidouleurs depuis plus d’une heure. Vu comme ça je me fais clairement pensé à Dr. House (en moins charismatique peut-être, je suis trop gentil pour lui.) Une fois passé à la salle de bain, les pilules dans la main je me dirige en clopinant vers Vitto. « Sur que tu ne veux pas de mon aide maintenant que je suis sur mes pieds. » Même si c’est clair que je ne tiendrai pas longtemps debout, autant proposé mon aide.
Si l’on prenait un peu de recul sur leurs situations respectives, celles de Vittorio et Bob concernant leurs vies sentimentales n’étaient pas si différentes. Ils étaient désabusés tous les deux, assurément pas pour les mêmes raisons – pour Vittorio c’était les femmes qui le désabusait, pour Bob c’était sa capacité à entretenir une relation – mais pour un résultat plus ou moins équivalent : ils ne faisaient plus d’efforts ni l’un ni l’autre et semblaient presque se complaire dans cette situation. Pour seule justification à la remarque de son colocataire concernant Cora et le fait qu’il n’avait pas l’air de quelqu’un qui n’en avait rien à faire, Bob s’était d’ailleurs contenté de répondre « Peut-être bien ouais, mais … j’ai juste pas envie de reproduire les mêmes erreurs. » et une fois n’étant pas coutume Vittorio avait préféré ne pas insister à nouveau. Ce qui ne l’empêchait pas de continuer à penser que si Bob ne trouvait pas le courage de se jeter à l’eau, un beau jour sa rouquine s’accrocherait au bras d’un autre et il n’aurait alors plus que ses yeux pour pleurer. La curiosité piquée au vif concernant ce mariage dont Bob ne parlait que très peu – pour ne pas dire jamais – l’italien s’était permis une petite taquinerie avant tout destinée à tenter de tirer un peu les vers du nez de son colocataire, tout en ne souhaitant pas poser clairement sa question. « Clairement pas, tu m’as bien cerné là-dessus. » avait alors admis Bob, Vittorio néanmoins un peu dubitatif, sa remarque étant plus destinée à le titiller qu’à véritablement énoncer une vérité. « Non, ce que je veux dire par là c’est que je n’étais pas très … très présent (si ce n’est jamais). Bon elle non plus ne ratait pas une occasion de s’éclipser des week-ends entiers en montagne … Mais je ne pouvais pas vraiment lui en vouloir. Bref, on était très loin du couple parfait, même si pour moi ça semblait fonctionner. Enfin, jusqu’à ce qu’elle brûle mes affaires peut-être, là ça sentait un peu le roussi. » L’italien avait grimacé avec surprise, c’était un peu extrême comme façon de faire, même pour lui et son goût prononcé pour les femmes de caractère. « Bref, on était très loin du couple romantique à souhait qui se fait un petit resto toutes les semaines et qui étalent leur amour aux yeux de tous. » A cela le barbu avait haussé les épaules, les preuves d’amour dégoulinantes ce n’était pas vraiment sa tasse de thé et ça ne prouvait rien du tout. « Bon, t’étais pas un mari modèle et t’es pas tombé sur la reine de la patience … Voilà, c’est pas la fin du monde. C’est que la première n’était pas la bonne, et la prochaine fois tu auras appris de tes erreurs. » C’était presque fascinant de voir ainsi Vittorio plein de certitudes quant à la capacité de Bob à apprendre de ses erreurs, quand lui-même jouait les irrécupérables blasés.
Mais la différence entre Bob et Vittorio résidait peut-être aussi dans le fait que plus que la capacité, Vittorio n’avait pas l’envie de consacrer – ou perdre, selon ses propres termes – de temps avec les relations amoureuses. La capacité il l’avait, à priori, ou pas moins qu’un autre en tout cas … Mais elles étaient bien peu nombreuses, celles qui lui avaient donné l’envie de faire l’effort nécessaire, et elles ne le lui avaient jamais vraiment bien rendu. Pas plus Kaecy que celle qui l’avait précédée. « Tu sais certains hommes ont tendance à prendre la fuite quand des choses devraient les retenir justement. Mais content d’apprendre que ce n’est pas ton cas et que j’ai hérité du meilleur coloc’ de tous les temps. Par contre, évite de le répéter trop fort, j’aimerais pas que la rumeur se répande. Après les voisins seront jaloux. » Laissant échapper un rire amusé, parfaitement conscient que les voisins avaient peu de chance en réalité de jalouser sa musique « de sauvage » – entre autres choses – il avait presque malgré lui admis que si femmes il y avait eu elles ne méritaient simplement pas qu’il en garde un souvenir impérissable. Du moins c’était ce qu’il essayait de se dire chaque fois que son esprit n’en faisait qu’à sa tête et laissait ses pensées dériver vers l’une d’entre elles. « Aucun, bien entendu. On a mieux à faire, comme regarder le foot ou faire le barbecue par exemple. » S’engouffrant dans la brèche presque avec délectation Vittorio avait pointé le doigt vers Bob avec approbation « Exactement ! » ses bêtises lui servant une fois encore à refermer une parenthèse qu’il ne souhaitait pas garder ouverte trop longtemps.
En lieu et place de révélations à son sujet qu’il n’aurait de toute manière pas délivré de bon cœur, Vittorio avait préféré se reconcentrer sur la pizza qui était supposé les nourrir tous les deux le soir-même, maintenant que l’électricité était revenue et que la possibilité d’utiliser le four leur était à nouveau offerte. Laissant par conséquent son colocataire jouer son tour de monopoly à sa place Vittorio ne comptait pas le laisser ruiner son jeu sans livrer bataille « Oula, je ne sais pas ce qui est pire au final … T’entendre massacrer la culture musicale italienne ou perdre au Monopoly ? Hmm je crois que je suis pas trop mauvais perdant donc je vais peut-être opter pour la deuxième option. » Lançant le dé sans faire durer le suspense plus longtemps, Bob avait avancé le pion de Vittorio de plusieurs cases, ce dernier attendant le verdict avec un sérieux à moitié feint « Hey non, ton côté bad boy a encore repris le dessus. Tu dois aller faire un petit tour en prison. » Comble de l’ironie, diraient certains. « Tu m’apporteras des oranges, j’espère ? » S’était-il pourtant contenté de demander d’un ton narquois, avant que la sonnerie du téléphone de Bob ne les interrompe. « Hey, hey, tu crois aller où comme ça ? » Agitant machinalement le couteau qu’il avait dans la main tout en lançant à Bob un regard réprobateur, il n’avait finalement pas insisté en le voyant prendre la direction de la salle de bain. Parce qu’il ne fallait quand même pas déconner, le dévouement de Vittorio avait des limites au même titre qu’en avait la fierté de Bob. Réapparaissant quelques instants plus tard ce dernier avait néanmoins pris un ton innocent en demandant « Sûr que tu ne veux pas de mon aide maintenant que je suis sur mes pieds. » tout en s’approchant du plan de travail. Mais jouant à la perfection son rôle de mère poule temporaire l’italien s’était contenté de le houspiller « Retourne sur ce canapé tout de suite sinon c’est moi qui t’y ramène, et là tu pourras dire adieu à ta moitié de pizza ! » Etait-ce l’autorité de Vittorio ou seulement l’appel de la pizza ? Reste que Bob était finalement retourné sagement à sa place. Et s’il avait eu droit à sa part de pizza plus tard dans la soirée, la victoire au Monopoly était quant à elle revenue à Vittorio, qui ne manquerait assurément pas de le lui rappeler jusqu’à leur prochaine partie … A la prochaine tempête, peut-être.