Je viens de terminer ma première journée de boulot en tant que pompier et je dois dire que je suis plutôt content de moi. Ok je n’ai pas fait grand chose aujourd’hui, j’ai fait que regarder et aider dans des tâches mineurs mais je suis quand même satisfait. On n’a pas eu de mort sur les bras, c’était une bonne première journée. Pour couronner le tout j’ai fait une garde de 6h du mat’ à 18h, donc je termine à une heure correcte. Tellement correcte que j’ai l’impression d’être un employé de bureau à finir à 18h. En parlant de bureau, ça me fait penser à mon bro Martin qui doit être pas loin de quitter le sien. Je quitte donc la caserne, direction ma voiture pour aller au cabinet de Martin. J’ai gardé ma tenue de pompier sur moi parce que j’ai envie de me la raconter un peu. Je suis pompier c’est officiel maintenant. Peut être que ça va m’aider avec les filles. Oui y’a des chances. Pour un type qui sait pas y faire avec les meufs j’ai quand même de la chance de jouer de la guitare et de porter un uniforme. C’est sûrement pour ça que j’ai eu les quelques aventures que j’ai eu. Pas grâce à mes talents de drague.

C’est donc vingt minutes plus tard que je me gare non loin du Pacific Wellness. J’entre dans l’immeuble, me rendant à l’étage du cabinet de Martin. Je frappe à la porte et j’entre ensuite. Je me retrouve dans la salle d’attente, qui est vide. Je m’approche de la porte du bureau, je tends l’oreille et je n’entends rien alors je le tente. J’ouvre la porte du bureau et je suis content de voir qu’il est effectivement seul.

« Hey, qu’est ce que tu fou encore ? Fais pas genre tu bosses. »

Je n’attends qu’une chose, qu’il lève son nez de ses papiers et qu’il fasse une remarque sur ma tenue. Je m'installe sur une des chaises qui son de l'autre côté de son bureau.

« Allé je t’embarque, on va bouffer dehors. »

J’ai envie de fêter mon premier jour comme il se doit.

« Sushi ça te tente ? »

Je sais qu’il est végétalien mais je le tente quand même, y’a de tout dans les sushi, peut être qu’il pourra trouver son bonheur.

Le stresse. Le vrai. Celui qui te ronge de l'intérieur, qui te tape dans l'estomac et qui te bloque les vertèbres quand bon lui semble. Voilà ce que je suis entrain de vivre depuis presque deux semaines. Mon assistant est parti, je me retrouve donc à nouveau seul dans le cabinet. Svetlana est à mi temps thérapeutique et ne fait pas grand chose lorsqu'elle est là. J'enchaîne des grosses journées plaines de 8h -voire 7h30 parfois- jusqu'à 19h. Puis je pars du cabinet très rapidement histoire d'être au port à 19h30. Là se tiens une réunion de bien 2h avec les Sea Shepherd sur comment nous allons procéder, l'organisation et tout le bazar pour partir au Japon. De ce fait, je suis toujours à la maison à 22h. Le temps de me doucher, sortir le chien, préparer à manger pour le lendemain et manger encore un bout je suis couché à 00h et là, souvent, je n'arrive pas à trouver le sommeil. Il n'est donc pas rare que je m'endorme à 2h voire 3h. Sachant que je me réveil à 6h le matin, ça ne ma laisse pas beaucoup d'heures pour dormir.

Ce vendredi là est juste la pire journée de ma carrière de kiné. Des patients qui viennent en se trompant d’horaires, qui insistent pour que je les prenne quand même, d'autre qui ne viennent pas, des patients pas content de mes soins, qui se plaignent, qui m'engueule, mon épaule qui me fait souffrir depuis deux jours et dont les douleurs tirent maintenant sur ma nuque et dans le haut de mon dos. En plus cette nuit je n'ai dormi que deux heure. Bref, la définition même de la journée de merde. Fort heureusement, la réunion de ce soir a été annulée et je ne bosse pas de tout le week-end.

Néanmoins, je ne serais pas sorti du cabinet avant 22h, vu toute la paperasse qui me reste à faire. C'est sans motivation aucune que je m'installe derrière mon bureau et que je fixe les papiers comme s'ils allaient se classer et se remplir tout seuls. Je soupire lourdement, me passe une main sur le visage puis me donne une claque et commence à ranger et classer les feuilles. Même pas 5 minutes plus tard, la porte de mon bureau s'ouvre et j’aperçois un pompier qui entre. Je fronce les sourcils, me redresse et l'interroge du regard. Je suis sur le point de lui demander qui il est et ce qu'il fait là, lorsque je reconnais Kane. Je soupire doucement et secoue la tête.

 «Kane ... » soufflais-je avant d'afficher un sourire  «J't'ai même pas reconnu avec cet accoutrement. Ça te va bien, dis donc » souriais-je en le suivant du regard. Je l'observe s'asseoir puis reporte mon attention sur les papiers. Je soupire doucement lorsqu'il me de ne pas faire genre de bosser encore.  «Si seulement ... » soufflais-je, désespéré.  « J'en ai encore pour au moins deux heures et … quoi ? T'es sérieux là ?» demandais-je, surpris lorsqu'il me dit que je dois bouger, qu'il m'emmène bouffer quelques part.

Ma fois, ça me ferait le plus grand bien je pense. Mais je dois travailler. Mais je devrais peut-être me détendre un peu. Mais faut pas que je rentre trop tard. Manger un bout, ok. Mais pas plus. Je soupire et hoche la tête  «OK, les papiers attendront demain » je me passe une main dans la nuque puis éteint mon ordinateur et me lève.  «Sushi ? » j'arque un sourcil, essayant de savoir si oui ou non j'ai envie de sushi.  «Hm...tu veux pas plutôt qu'on aille mangé dans le chinois à deux pas d'ici ? Ils font buffet et y a, évidement, des sushi. Au moins je suis sûr que je pourrais manger quelque chose, moi » je souris doucement et attrape mon sac. Je grimace lorsque mon épaule se plaint presque violemment quand je soulève mon sac à dos, mais je ne dis rien et le met en place sur mon dos  « Allez go» dis-je en sortant de mon bureau puis du cabinet que je ferme à clef derrière nous.

Martin dit que ça me va bien, j’espère bien ! Je me suis même remis les cheveux en place avant d’entrer pour faire bonne impression. De là à pas me reconnaître quand même ! Heureusement qu’il a les neurones qui se sont connectés rapidement. Je veux l’embarquer pour manger mais visiblement il a véritablement beaucoup de boulot et ça me fait chier cette histoire. J’ai déjà prévu toute la soirée dans ma tête et je n’aime pas quand mes plans tombent à l’eau. Ok je devrais peut être faire des plans avec des gens au courant de ceux ci, ça marcherait mieux.

« Bien sûr que je suis sérieux. J’ai envie de fêter ce soir et je voyais ça pas autrement qu’avec toi. »

On se voit pas souvent ces derniers temps, fourré dans le boulot autant lui que moi. Ok surtout lui visiblement. Mais moi je me suis mis au sport et ça c’est un exploit. Ca prend du temps aussi.

« Allé un bon repas, une bonne bière, une bonne soirée. Ca va te faire du bien de décompresser pour une fois. On se voit plus trop en ce moment. »

Et là je me sens puissant parce que je pense que ce sont mes paroles qui lui font changer d’avis. Les papiers attendront hehe. On va pouvoir passer un bon moment tous les deux. Je propose Sushi et il me parle d’un chinois qui n’est pas loin. Des chinois y’en a partout dans ce pays.

« Vas pour le chinois. Si en plus c’est à deux pas, ça m’évitera de chercher une autre place pour me garer. Tu sais que c’est la galère dans ce quartier pour trouver une place ? »

Bien sûr qu’il doit le savoir, il vient ici tous les jours. Peut être que le matin c’est plus tranquille pour avoir de la place. Je ne sais pas, je ne suis jamais venu ici de bonne heure. Et on est parti de son cabinet.

« Alors mon petit Martin, pourquoi t’as autant de boulot ces derniers temps ? T’as pas des assistants qui t’aide normalement ? »

Comme je l’ai trouvé tout seul dans son cabinet, il doit y avoir eu des changements. On sort de l’immeuble et je le suis parce que je ne sais pas où se trouve le chinois en question.

« Et j’espère que t’as pas prévu de bosser jusqu’à 21h mardi soir parce que y’a Coldplay et Coldplay ça attend pas ! On a dit 18h30/19h devant la salle. J’aurai peut être une place à revendre en plus, j’ai pas eu de nouvelles d’Ethan, je sens qu’on va se retrouver à trois. »

Il a envie de fêter son premier jour chez les pompiers, le petit chou. Et il ne voit personne d'autre que moi. C'est un sourire attendrit qui prends place sur mes lèvres alors que je secoue légèrement la tête.  «T'es pas croyable » soufflais-je, amusé. Je ne peux pas résister. A cette bouille, ce regard, ce sourire et cet entrain ! Même si j'étais sur le point de crever, je crois que Kane il arriverait à me réscuciter rien qu'avec sa joie.  «C'est chiant, tu sais bien que j'te résiste pas. Enfoiré. » reprenais-je, faussement énervé en rangeant mes affaires et j'hoche la tête à la suite de ses paroles. Bière, repas, soirée. Ouais. Ouais c'est ce qu'il me faut maintenant. Je lui adresse un sourire pour lui faire comprendre silencieusement que c'est bon pour moi et referme mon sac.

C'est alors qu'il propose de manger sushi. J'hésite un instant. J'adore les sushi, mais souvent c'est un peu trop cher pour ce que c'est (du riz, des algues et des légumes pour ma part) donc je lui propose directement d'aller au chinois du coins. Je sais qu'on y mange bien, là-bas. Je n'ai pas besoin d'argument d'avantage avec Kane, je pense que de toute manière ce qui lui importe c'est de manger. Il accepte, donc, et nous sortons du cabinet puis nous nous dirigeons vers le restaurant.

Et puis, il commence à me poser des questions, voulant savoir pourquoi j'ai autant de travail ces derniers temps et si je n'ai pas d’assistants qui m'aide. Je soupire doucement  «Si, sauf quand ce même assistant à décidé de se prendre des vacances,c e qui est son droit le plus total, mais que son remplaçant ne s'est pas pointé » je soupire doucement  « Je veux dire, je suis parti aussi pendant tout un mois en Septembre/octobre, mais mon remplaçant est quelqu'un de confiance et … bref, c'est la merde. En plus de ça avec les Sea Shepherd on arrive dans la dernière ligne droite de préparatives pour le Japon, ce qui veut dire deux ou trois heures de réunions tous les soirs» j'hausse les épaules  «Bref, les journées sont très longues. J'ai vraiment hâte que tout ça soit derrière moi » je ne suis pas du genre à me plaindre, je sais que c'est entièrement ma faute si les journées sont aussi remplies.

Je reporte mon attention sur mon ami lorsqu'il me demande si je travail mardi à 21h, étant donné qu'il y a Coldplay en concert. Je me rappelle du SMS et que j'avais confirmé ma venue -un peu en retard. J'hoche donc la tête  « Yep ! Pas de soucis, je serais là. J'peux pas laisser valentin et toi tout seul, ça le ferait pas !» j'hausse les épaules et entre dans le restaurant  « Tant pis pour Ethan hein, il ratera la soirée de sa vie» je rigole de bon cœur en suivant la serveuse qui nous guide vers une table. Je m'installe en soupirant doucement puis regarde vers le buffet  «Tu prends le buffet, je suppose ? » demandais-je, sentant mon ventre qui commence à se réveiller.

Le remplaçant de l’assistant n’a pas pointé le bout de son nez, ça doit être un coup dur pour Martin. Il me parle de ses projets avec les Sean Shepherd et j’hoche la tête. Il m’en avait déjà parlé de son voyage au Japon, mais deux ou trois heures de réunion tous les soirs, ça c’est un deuxième coup dur. Je comprends qu’il soit exténué mon petit chou.

« Allé courage mon chou. Ca va vite se terminer. Le temps passe trop vite de toute façon. »

Je ne sais pas pour lui mais je n’ai pas vu passer mes deux semaines de congés entre la fin de mon boulot d’ambulancier et le début de mon job chez les pompiers. A croire que le temps nous joue des tours. J’en ai profité pour passer du temps avec ma famille surtout, je ne les vois pas trop quand je bosse. On parle du concert ensuite et je suis content de voir qu’il est toujours partant. Ca va le relaxer un peu ça aussi, ça change les idées un bon concert avec des bons potes. On entre dans le resto et je me souviens vaguement être déjà venu ici avec lui. C’est clair que Ethan ne perdait rien pour attendre, on allait s’amuser sans lui. On suit la serveuse qui nous guide.

« Bien sûr que je prends le buffet, c’est toujours à volonté c’est ça ? »

Je n’allais pas loupé ça. Je vais m’en mettre plein la pense. Je m’installe à la table et je soupire légèrement.

« Tu veux quoi à boire ? C’est ma tournée. »

Je lève la main vers la serveuse qui n’est pas très loin en même temps. Oui je ne suis pas patient, j’ai envie que ma commande de boisson soit prise rapidement pour pouvoir aller me jeter sur le buffet.

« Ca sera une bière et une carafe d’eau pour moi. »

Je dis à la serveuse qui prend note sur son carnet. J’attends que Martin ait passé sa commande, du moins celle pour les boissons. Et elle repart de son côté.

« Tu vas prendre le buffet toi aussi ? Dois bien y avoir de la bouffe pour toi dans tout ce qu’ils proposent. »

Je tends mon cou pour essayer de voir les sushi un peu plus loin. Il y a l’air d’y en avoir encore pas mal. Il est vrai qu’il est encore tôt pour manger, mais au moins on a plus de bouffe pour nous, et moins de monde.

« Bon et donc t’as deux fois plus de boulot parce que t’as pas d’assistant et t’as un voyage au Japon qui approche. C’est quand déjà ce Japon ? Tu m’enverras une carte ? »

Je n’ai jamais quitté le sol Australien mais j’ai fait le tour de mon pays et c’est déjà pas mal. J’aimerai bien faire un grand voyage un jour mais j’aime pas mettre autant d’argent dans les voyages. Il faudrait que je gagne au loto. Rectification, il faudrait déjà que je joue au loto.

 «Le temps passe vite, mais pas assez » me plaignais-je à mon ami. Pour la forme seulement. Je rigole doucement puis hausse les épaules  « Mais ouais, ça va aller, t'inquiète pas pour moi. Je suis plus résistant qu'on ne le pense hein» je souris et entre dans le restaurant. Nous nous dirigeons vers une table qu'une serveuse nous attribue. J'ai tout juste le temps d'hocher la tête pour confirmer que oui c'est à volonté, que Kane appelle déjà la serveuse pour prendre la commande de nos boissons. Il commande une bière et une carafe d'eau. Moi, je ne vais pas me mettre à l'alcool. Je ne survivrais sans doute pas.  «Un thé au jasmin pour moi. Une théière, oui » commandais-je avant de regarde mon ami qui me retourne la question sur buffet.

Je lance un coup d’œil vers ledit buffet et plisse un peu les yeux.  « Je ...crois. Je vais y faire un tour, on verra bien» je reporte ensuite mon attention vers mon ami lorsqu'il me demande si je pourrais lui envoyer une carte du Japon. Malgré moi, j'éclate de rire. Non pas pour me moquer, mais plus un rire nerveux  « Si tu penses que je vais avoir le temps de t'envoyer une carte, tu te trompes » expliquais-je  «D'ailleurs, si on débarque au Japon, que je frôle le sol de mes pieds ce sera parce que j'aurais été jeté en prison » dis-je avec un rire jaune avant d'hausser les épaules  «Non sérieusement, on va pas là-bas pour faire du tourisme, on y va pour attaquer les baleiniers qui capturent et tuent les baleines. Et donc qui font un trou beaucoup trop important dans l'écosystème des océans et …. enfin ouais, on n'y vas pas pour le fun quoi » je souris et me redresse lorsque nos boissons arrivent. J'attends que la serveuse ait déposé la bière et mon thé devant nous et qu'elle soit partie pour reprendre la parole  « La chasse au baleines est très réglementée dans le monde, mais les japonais dépendent d'un régimes particulier qui leur permet de passer à travers le contrat » je soupire  « En gros, c'est légal tout en restant carrément illégale. Et nous on part avec nos navires pour les attaqué directement sur leur terrains de chasses» que je risque d'y passé, que notre bateau risque de se faire couler par les navires de pêches beaucoup qui font deux fois la taille du notre, tout ça je le passe sous silence. Nul besoin d'inquiéter mon ami plus que de raison.

Je lui souris et désigne le buffet.  «vas-y en premier » lui dis-je, voyant bien à quel point il semble crever la dalle. Pendant que lui se sert au buffet, moi j'appelle la serveuse pour lui demander s'il y a quoique ce soit de mangeable pour moi au buffet. Elle me réponds qu'il n'y a que le riz et une sorte de sushi, donc que ça ne me servirait pas à grand chose. Du coup, je choisi un plat sur la carte. Elle prends commande puis repars. Moi, je me sers en thé et regarde, arquant un sourcil de surprise, l'assiette de Kane qui semble déborder tant il l'a remplie  «Eh ben … tu dois vraiment avoir faim, hein » me moquais-je gentiment.

Il dit qu’il est plus résistant qu’on ne le pense, ouais, je sais pas. Il a l’air tout fragile parfois mon petit Martin. Il faudrait qu’il aille un peu plus à la muscu si il veut être crédible dans son rôle de résistant, mais bon il est quand même pas mal foutu donc je ne vais pas lui faire de remarque là dessus. Quand je demande une carte du Japon à Martin il éclate de rire. Il va être bien occupé pendant son voyage c’est donc compromis. Je grimace quand il parle de prison.

« Toujours super dangereux ce que tu fais. »

Il reprend plus sérieusement et il m’explique ce qu’ils vont y faire. J’hoche la tête au fur et à mesure de ses explications.

« Ouais vous voulez la paix pour les baleines quoi. »

J’ai tout compris de ce qu’il a dit bien évidemment. Nos boissons arrivent et je bois une gorgée. Martin reprend ses explications sur les baleines et la chasse. Je grimace quand il parle d’attaquer et je lève les doigts en faisant un signe V.

« Peace and love. Faites l’amour pas la guerre. Et surtout mangeons ! »

Il me dit d’aller au buffet en premier et je ne me fais pas prier. Je dois passer pour un gros goinfre, mais c’est Martin, il me connait, je ne suis pas dérangé avec lui. Je me rends au buffet en vitesse et je suis un peu surpris par la taille des assiettes, elles sont toutes petites. Du coup j’en prends pas une mais deux. Je pourrais faire deux fois le tour du buffet mais je n’ai pas envie, tout me donne envie de manger et j’ai très faim. Quand je retourne m’asseoir avec mes deux assiettes Martin ne peux pas s’empêcher de me faire une remarque.

« Je meurs de faim. »

Et je m’installe de nouveau en face de lui. Je commence à manger avec appétit et je fais des petites pauses pour parler quand même.

« Tu vas prendre quoi toi ? »

Le connaissant il ne va pas prendre le buffet, j’ai vu ce qu’ils proposaient et ce n’est pas sa came.

« Et donc combien de temps tu pars au Japon ? Combien de jour je vais être privé de ta personne ? Faudra que je m’y prépare, c’est pas facile la vie sans toi tu sais. »

Ok j’en fais des caisses mais c’est vrai. C’est tellement plus drôle la vie quand y’a Martin dedans. Faudra que j’aille plus souvent le choper au boulot pour manger dehors, enfin, en fonction de mes horaires.

« Et comment tu vas faire si t’es en prison là bas ? Tu crois qu’ils vont vous libérer facilement ? »

Oui le côté prison de son récit ne m’a pas rassuré.

« Vous allez pas tous à la guerre j’espère ? Y’en a certains qui restent pour payer les cautions nan ? »

Enfin si c’est le même système qu’ici. Je l’imagine déjà pris dans une sale histoire sans qu’il puisse revenir sur le sol Australien.

« Et si t’es capturé à jamais ? Comment je vais faire moi ? Et toi surtout hein ! »

J’espère bien que cette éventualité ne se produira pas.

Lorsque Kane me dit que ce que je fais est toujours super dangereux, je me contente d'hausser les épaules. Il n'a pas tort, mais si ce n'est pas moi, qui le fera ? Qui aurait ce courage de s'engager pleinement, corps et âme, pour la cause animale ?  « Ce n'est pas en restant assis tranquillement et en sécurité chez sois, dans sa maison, que le monde changera. Et le monde DOIT changer» dis-je tranquillement  « On ne peut pas continuer éternellement comme on le fait. Alors ouais, tu me diras 'qu'est-ce que ça change s'il y a juste moi qui m'engage ?' eh bien … ça change beaucoup. Plusieurs petits pas font un grand pas et l'humanité à besoin de ça»  je soupire doucement  «J'ai encore espoir que tout n'est pas perdu » dis-je en haussant à nouveau les épaules.  «Enfin, on verra dans quelques années » je rigole doucement et hoche la tête pour confirmer que, oui, nous voulons la paix pour les baleines.  « Et pour les autres animaux marins. Comme les dauphins qui sont tué par millier aux îles Féroé par pure 'tradition'»  déclarais-je avant de laisse mon ami partir vers le buffet.

Je m'occupe à boire tranquillement mon thé et à passer une commande spéciale à la serveuse. Et lorsque Kane revient, évidement, je ne peux pas m'empêcher à lui faire une remarque sur son assiette qui déborde. Pour toute excuse, il me sort qu'il a faim. Et je ne le comprends que trop bien.  «moi ? J'ai commandé des nouilles de riz sautées  et un mélange de légumes grillé avec tofu mariné »  je souris  « ça ne figure pas sur la carte, mais ça ne pose de problème au cuisinier, donc c'est cool »  expliquais-je.

Je l'observe ensuite plus en détail lorsqu'il me demande combien de temps je vais rester au Japon parce qu'il va devoir se préparer d'être priver de ma personne.  « Moh, mon pauvre choupinou »  dis-je sur un ton mielleux avant de rigoler doucement  «T'inquiète pas. Je serais parti 2 semaines à peu près. Voire plus. En fonction de comment ça se passe. Mais au moins deux semaines, ça c'est sûr »

La prochaine question me fait légèrement grimacer : comment je vais faire si je me retrouve en prison là-bas ? Est-ce qu'il y en aura qui reste en arrière pour payer les cautions ? Je soupire doucement, pince les lèvres et me prends le temps pour réfléchir à la question avant d'hausser les épaules  «Si je me fais emprisonné -ce que je vais vraiment éviter- c'est que j'aurais mal gérer mon coup et que la mission sera partie en cacahuète »  je me passe une main sur le visage puis dans les cheveux  « Si jamais ça devait arriver, j'ai pas mal de contacte qui pourraient me sortir d'affaire »  je pense à Jameson, par exemple. Mais aussi Hugh qui ne nous accompagne pas. Et peut-être même Kane, dans le pire des cas ? Enfin, je préfère ne pas y penser. C'est pour ça que je soupire un peu plus lorsque mon ami réitère une question sur la prison, me demandant comment il va faire, lui, si je suis capturer.  « Tu continueras ta vie» dis-je sobrement.

Je me pince les lèvres puis me penche en avant et fixe mon regard dans celui de mon ami  «rien de tout cela n'arrivera, je te le promet »  expliquais-je  « Et si jamais quelques chose devrait arriver, j'aurais tout préparer dans mon appartement. Toutes les consignes, tout ce qu'il y aura à suivre etc»  je tends ma main et la pose sur celle de mon ami  « Si jamais ça devait déraper, promet moi de ne rien entreprendre d'idiot, ok ? Tu me laisse gérer, moi et les autres activiste. Ils sauront, eux, comme réagir. Toi tu te tiens en dehors de tout ça, compris ?»  je sers un instant sa main puis me redresse  «Je tiens beaucoup trop à toi pour que tu t'embarque toi aussi là-dedans »  je me recule contre ma chaise lorsque ma commande arrive et gratifie la serveuse d'un sourire avant d'attraper mes baguettes  « Bon ap !» déclarais-je en attaquant à mon tour mon repas.

Martin s’est commandé un plat qui n’est même pas sur le menu, quel beau gosse celui là. Enfin je dis ça, il galère toujours pour trouver de quoi manger quand on sort. Faudra que je fasse des recherches pour des resto végétariens. J’apprends qu’il va rester deux semaines au Japon, c’est pas rien.

« Eh ben deux semaines ! »

J’espère pas deux semaines en prison, voir plus. D’ailleurs en parlant de prison il m’explique un peu plus comment ça va se passer s’il est enfermé. Il a des contacts qui devrait le sortir d’affaire, j’espère bien qu’ils savent ce qu’ils font, perso ça me fait vraiment flipper. Je ne me lancerai jamais dans ce genre de quête. Mais je l’admire pour ce qu’il fait, c’est une sorte de héros mon petit Martin. Un héros pour les baleines et tous les animaux.

« Bon tant mieux. »

Je ne le dis pas mais je pense être capable de me déplacer si jamais il y a besoin. Je ne vais pas laisser un ami dans la merde, même si c’est dans un autre pays. Surtout si c’est dans un autre pays. Moi qui n’ait jamais bougé de l’Australie ce sera le moment. Il dit que je continuerai ma vie, ouais je sais pas si j’arriverai à continuer ma vie normalement si je le sais emprisonné au Japon. Il me rassure en me disant que rien de tout ça n’arrivera. J’espère bien. Ca me fait bien trop peur cette histoire. Il pose sa main sur la mienne et je le laisse faire, j’apprécie le contact. Il me parle d’affaires toutes prêtes dans son appartement. Des instructions à suivre. Ca fait très film tout ça. J’hausse les sourcils quand il me demande de ne rien faire d’idiot.

« Ouais, mais si y’a quelque chose que je peux faire… »

Il dit qu’il tient trop à moi pour m’embarquer là dedans. Je suis touché par ce qu’il dit, mais il se rend pas compte que moi aussi je tiens à lui et je n’ai pas envie de le laisser pourrir dans une prison au Japon. Il est servi et moi mon assiette commence à refroidir mais je m’en moque.

« Bon app. »

Je laisse passer un temps avant de reprendre la conversation où elle s’était arrêté.

« Tu me donneras de tes nouvelles pendant ces deux semaines quand même hein ? Genre un petit message pour me dire que t’es toujours pas capturé ça me ferait plaisir. »

Je souris un peu mais je dis ça sérieusement. Ca me rassurerait encore plus d’avoir un petit mot de sa part tous les jours. Je reprends de manger le contenu de mon assiette et je le termine rapidement. Je déplace mon assiette vide pour prendre possession de la deuxième assiette que j’avais laissé sur le côté.

« Sinon t’as pas des nouvelles un peu moins sérieuses à me donner ? Un truc légé ce serait cool pour changer un peu le ton. Genre moi j’ai commencé à écrire une chanson mais c’était nul alors je l’ai laissé tombé. »

J’écris quelques chansons depuis quelques années mais je suis jamais convaincu par ce que je fais alors j’abandonne toujours. Je termine à chaque fois par chanter des reprises lors de soirées open mic.

« Ca fait longtemps que t’es pas venu m’écouter chanter. T’es trop occupé monsieur le ministre. »

Je prends une gorgée de ma boisson et je fais une pause dans la bouffe, laissant le temps à mon estomac d’assimiler tout ce que j’ai mangé pour pouvoir engloutir la suite sans craintes.

« Oh et on m’a posé un lapin. J’avais un rencard sur Tinder mais la fille n’est pas venu. Je me suis retrouvé comme un con sur le lieu de rendez vous. »

Je fronce un peu le nez.

Je n'aurais pas dû lui parler de notre mission au Japon. Les actions des Sea Sheppherd ne sont plus un secret un secret pour personne, mais je n'ai pas envie d'inquiéter mon ami plus que de raison. Malheureusement, j'en ai trop dis et lorsque je me dis que je devrais me taire, il est déjà trop tard. Kane s'inquiète, c'est évident, même si j'essaie tant bien que mal de lui faire comprendre que ce n'est rien, que je vais m'en sortir et que la prison est vraiment la dernière chose que je souhaite, que je ferais donc absolument tout ce qui est en mon pouvoir pour l'éviter. Il me dit que je devrais le tenir au courant, lui dire que je suis encore vivant et pas encore capturer. Si c'est ce dont il a besoin pour être serein, eh bien soit. Je lui souris et hoche la tête.  «Compte sur moi » assurais-je avant de reprendre mon repas.

Il reprends ensuite la parole et fort heureusement, il change de sujet. Ce qu'il veut savoir maintenant c'est si j'ai des nouvelles plus joyeuses à lui raconter. Comme lui qui a essayé d'écrire une chanson mais ça ne lui a pas plus du coup il a laissé tomber. Il se plaint ensuite que ça fait trop longtemps que je ne l'ai plus écouter. Je grimace légèrement avec un pincement au cœur.  «je sais ... » soufflais-je, comme si ça pouvait excuser le fait que je n'ai plus eu de temps pour mon ami.  «Mais entre mes vacances d'un mois et demi en Amérique du sud en Septembre, le boulot, les préparatives pour la mission et … bref, j'suis vraiment désolé. Mais tu sais quoi ? Dès que je reviens de l'expédition, on se voit chez toi et tu me joueras cette chanson trop nulle, ok ? Je suis le seul et l'unique qui est apte à juger si oui ou non elle est si mauvaise que ça cette chanson » dis-je avec un sourire de chat.

Je reprends une gorgé de ma boisson et relève le regard sur mon ami qui m'avoue s'être fait poser un lapin par une fille qu'il avait rencontrer sur Tinder. Je grimace et secoue la tête  «Elle sait pas ce qu'elle perd cette meuf. » dis-je avant d'hausser les épaules  « Mais tant pis hein. Faut pas abandonner, la bonne arrivera un jour» je lui fait un clin d’œil puis reprends une bouché de mon plat  «De mon côté RAS aussi » avouais-je  « Faut dire que je ne cherche pas non plus. J'ai passé quelques jours avec une fille en Argentine en Septembre mais a part le sexe y avait rien d'autre. A Buenos Aires j'ai aussi prit un peu de bon temps avec un mec mais ...voilà. Rien de spécial quoi» je souris  « De toute manière, je ne sais pas si je suis prêt pour une relation stable. Faudrait que celui ou celle qui partage ma vie accepte de faire beaucoup de compromis, ce qui n'est pas donné à tout le monde» rigolais-je  «T'es sûr toi, que tu veux une relation stable ? » demandais-je alors, curieux. S'il est vrai que Kane et moi nous nous entendons comme ce qu'on pourrait appeler 'meilleur amis', nous parlons assez peu de sujet sérieux de ce genre. Lorsque nous nous voyons nos discussions sont surtout placées sous le ton de la déconnade.

Il est d’accord pour me donner des nouvelles. J’ai bien peur qu’il oublie parfois parce qu’il sera trop occupé mais au moins j’aurai normalement de ses nouvelles. On change de sujet on parle de chose beaucoup moins sérieuses et je lui vide mon sac. La chanson, la meuf, je lui ai tout dit ce qui s’est passé dans ma petite vie récemment. Il me fait sourire à me dire que la meuf sait pas ce qu’elle a perdu.

« Ouais en fait c’était juste un plan cul, mais on sait jamais. »

La bonne sera peut être un plan cul au début, qui sait ? Pas moi en tout cas. J’apprends qu’il a passé quelques jours avec une fille quand il était en Amérique du sud, et avec un mec aussi. C’est vrai qu’il joue sur les deux tableaux mon petit Martin, il a du choix au moins, ça c’est bien. Je suis sûr que les mecs c’est bien moins compliqué que les filles.

« Une relation stable ? Faudrait déjà que je puisse aligné deux mots sans passer pour un idiot fini. »

J’ai du mal avec les filles, donc généralement soit c’est elles qui font toute la conversation, soit ce n’est qu’une histoire de cul.

« Là ça fait plusieurs mois que j’ai eu personne, je pense à recontacter une ex, mais je sais pas si c’est une bonne idée. »

Je fais une moue pensive, ça fait quelques jours que je pose le pour et le contre et je ne me suis toujours pas décidé. Je profite de ces quelques instant de silence pour continuer à manger le contenu de mon assiette. Je me suis garder les sushi pour la fin et je réalise que j’ai oublié de prendre la sauce soja. Je me lève rapidement.

« Je reviens tout de suite. »

Je file prendre la sauce de l’autre côté du buffet et je reviens, avec une assiette de plus au passage et quelques maki supplémentaire.

« Ils m’ont appelé c’est pas de ma faute. »

Je suis trop gourmand et puis la bouffe est pas mauvaise pour un buffet. Je commence à manger mes sushi avec ma bonne sauce soja. J’en gémirai presque. J’avale ma bouffe avant de reprendre la parole.

« Ouais donc les histoires stables moi je connais pas. Tu sais très bien que je reste jamais plus de quelques mois avec une fille. Je suis vraiment pas doué. »

Ah ça je suis un cas. Je ne suis pas du genre romantique. Je comprends toujours les filles de travers ce qui mène à des sales situations à chaque fois et ça se termine par une rupture. La plupart du temps en bons termes je dois l’avouer. Je reste facilement en contact avec mes exs.

« Mais je commence à approcher de la trentaine et faudrait peut être que je trouve quelque chose de stable. Mais c’est bizarre moi j’ai toujours l’impression d’avoir 20 ans. Je sens pas la pression de la trentaine. Tant mieux en même temps. »

Je rigole doucement lorsque Kane m'avoue que cette rencontre devait n'être qu'un plan cul.  «Sacré Kane … si tu n'existais pas faudrait t'inventer hein » dis-je, amusé  «Enfin, tu ne sauras jamais du coup si c'était qu'un plan cul ou non. Mais peut-être que c'est mieux comme ça » reprenais-je en mangeant tranquillement. Une de perdue dis de retrouver, comme on le dit si bien.

A ma question s'il recherche une relation stable, la réponse de mon ami est direct : il faudrait déjà qu'il parvienne à aligner trois mots sans passer pour un idiot. Je fronce légèrement les sourcils, incline la tête sur le côté et l'interroge du regard. Il est vraiment tellement mal à l'aise que ça ? J'ai du mal à le croire. Mais après tout, ça ne m'étonne qu'à moitié aussi. Kane, c'est ce genre de garçon qui adore faire l'idiot et qui est un adepte de l'auto dérision mais qui, malgré tout, reste un grand timide. Sauf avec moi. Et Valentin. Et d'autre potes. Mais c'est vrai que je ne l'ai que très rarement vu entrain de parler à une fille. Enfin, peu importe, je l'aime bien comme il est, mon Kane.  « ça va aller» dis-je pour l'encourager.

Je grimace lorsqu'il me dit que, vu que ça fait plusieurs mois qu'il n'a eu personne, il compte recontacter une ex.  «NON ! Non, non, non, non et encore une fois non » dis-je en secouant la tête à chaque mots.  « C'est la pire des conneries que tu peux faire, et tu le sais  » je soupire doucement  « Laisse ton ex en dehors de ça, parce qu'il y a bien une raison pourquoi elle est ton EX et pas ta COPINE. Ce n'est jamais bon de revenir en arrière »

Je le laisse ensuite repartir vers le buffet et revenir avec une autre plâtré de sushi avec de la sauce soja.  « Ventre sur pattes» marmonnais-je, moqueur, avant que notre discussion sur l'amour ne recommence. Il dit qu'il ne connaît pas l'amour stable et qu'il ne reste avec une fille que quelques mois tout au plus. J'hausse les épaules  « C'est pas grave. T'as 28 ans, laisse couler» dis-je tranquillement. Par contre, lorsqu'il me sort que, vu qu'il a 30 ans, il devrait se trouver quelque chose de stable, je soupire lourdement.

 « Déconnes pas Kane» soufflais-je  «Sérieusement, c'est ta vie à toi. Que tu ais une relation stable à 30 ans ou à 60 ans mais qu'est-ce que t'en as foutre ? C'est la société qui veut ça. Mais merde, si quelqu'un est assez faible pour ne pas supporter la pression de la société il doit chercher le problème chez LUI pas chez quelqu'un d'autre » je pince les lèvres  « C'est TA vie à TOI. Tu vis pour TOI pas pour une putain de société qui te dicte quoi faire. Ceux qui n'évoluent pas sont ceux qui nagent avec le courant, qui ne font rien pour s'échapper du système, qui reste tranquillement avec leur cul à la maison. Ce n'est pas pas grâce à ceux qui suivent les règles de la société à la lettre, que nous avons évolué au point où nous sommes actuellement» je pose mes baguettes et attrape ma tasse  « je ne dis pas de répandre l'anarchie mais bel et bien de vivre pour soi et pas pour une société qui ne te rendra jamais service» je relève légèrement le menton  « Si c'est ton choix de ne pas avoir de relation stable, alors assume le. Si tu ne SAIS pas si tu veux une relation stable, alors c'est que tu n'es pas près. Si tu veux une relation stable, alors tu feras tout pour en avoir une » j'hausse les épaules  «C'est aussi simple que ça. Vis ta vie, ignore les règles que te dicte la société. On est 21e siècle, plus au moyen âge » je soutiens encore quelques instants le regard de mon ami puis souris et reprends mon repas.

Ca va aller ouais peut être, peut être pas. Mais bon on va dire que je ne suis pas complètement un cas puisque j’arrive à avoir quelques relations. Jamais bien longue mais j’y arrive quand même. Quand je parle de contacter mon ex la réaction de Martin est sans appel, il ne faut pas que je le fasse. Je grimace un peu, comme un enfant pris en faute.

« Ouais mais on s’est déjà vu juste pour coucher. Mais là c’est vrai que ça fait plusieurs mois que je l’ai pas contacté ça le ferait pas trop de l’appeler juste pour ça. »

J’entame ma troisième assiette alors que j’écoute Martin me dire combien je n’ai que 28 ans et que je n’ai pas besoin d’avoir une relation stable pour le bien de la société. C’est vrai il n’a pas tort. J’hoche la tête au fur et à mesure de ses arguments.

« Ouais t’as raison. Moi j’attends pas une relation stable, je prends ce qui vient quand j’ai des occasions et après c’est au jour le jour. »

Je termine mon dernier sushi, déjà j’ai terminé mon assiette, je commence à être plein quand même avec toute cette nourriture. Je laisse s’échapper un petit rot.

« Excuse. »

Même si on est entre mecs, je suis quand même poli.

« Enfin tant que toi non plus t’es pas casé tout va bien, je ne suis pas seul. Mais bon j’imagine que t’es pas du genre à oublier tes amis une fois en couple. »

Ca me ferait sincèrement chier si c’était le cas. J’ai quelques autres amis comme ça, maintenant ils ont déjà des gosses, nos chemins se sont plus qu’éloigné. Etre père à mon âge, plutôt crever. Je ne suis pas du tout prêt à être père, je suis trop un gamin encore dans ma tête. Je crois que si une fille me disait un jour qu’elle est enceinte de moi je ferai une syncope.

« Moi il faudrait que je sois amis avec la fille avant d’être en couple avec elle. Comme ça elle me connait et je serai pas autant coincé. Enfin, faudrait aussi qu’elles arrêtent avec leurs sous entendu tout le temps. Je suis pas doué pour décrypter les femmes. C’est plus simple avec les mecs ou c’est pareil ? »

Je suis tout ouïe, très intéressé par la réponse de mon ami.

Je soupire et fait un magnifique facepalm lorsque Kane m'avoue qu'il a déjà revu son ex juste pour coucher avec elle. Je secoue la tête et le regarde, ayant beaucoup de mal à le croire et à me dire qu'il doit être réellement tomber très bas pour avoir aussi peu d'estime de lui-même et retourner coucher avec son ex. Mais je ne dis rien. Je ne sais pas quoi dire d'ailleurs. Mes paroles risqueraient d'empirer les choses, autant laisser couler. Il le saura lui-même que s'il rappelle son ex ce sera l'erreur de sa vie qu'il commettra. Je fini mon assiette et la repousse un peu en me servant à nouveau en thé lorsqu'il m'avoue ne pas chercher de choses sérieuse pour l'instant, qu'il prends ce qui vient comme ça vient et que c'est au jour le jour.

 « That's my boy» m'exclamais-je en rigolant doucement, levant mon verre vers lui.  « J'te reconnais plus comme ça, tu sais ?» j'hausse les épaules  « Laisse couler, te prends pas la tête. Prends la vie et les choses comme elles arrivent et tout ira bien » je souris et reprends une gorgé de mon thé, alors que Kane, lui, reprend son repas.

Il me dit ensuite que tant que moi je ne suis pas casé, ça lui laisse le temps. J'éclate de rire. Un rire franc et sans doute aussi un peu moqueur.  «T'es con putain» me plaignais-je  « Arrête, bien sur que je ne suis pas du genre à abandonner mes potes, tu le sais bien. Et puis tu sais aussi que moi j'ai pas envie d'une relation stable. Du moins, je n'aspire pas à en avoir une tout de suite quoi. J'ai 27 ans, je suis encore bien trop jeune et j'ai encore bien trop de chose à vivre avant de me décidé de me lancer dans une relation. En plus elle ne sera jamais réellement stable avec moi. Je me connais, je suis incapable de rester en place. Je déteste ça»

Que ce soit physiquement ou mentalement, je déteste stagner et me perdre dans un quotidien de routine. Je suis plus ce genre indépendant qui a besoin de sa liberté. C'est pour ça qu'en septembre j'ai pété un plomb après 2 mois de routines, j'ai tout plaqué et je suis parti en Amérique du sud. Seul. Avec mon sac à dos et une voiture louée à des amis. Mentalement, j'ai aussi ce besoin de toujours apprendre plus. C'est pour ça que j'ai réellement hâte que ma formation d'ostéopathe reprenne. Il me reste encore deux ans avant de pouvoir passer à la formation de médecine chinoise. Enfin, peu importe.

Il me demande ensuite comme est l'expérience avec un homme. J'hausse les épaules.  « C'est sûr qu'un homme se prends moins la tête comparé à une femme, mais quand même … ça reste un humain qui n'est pas sans défaut, hein» je souris  « Et je peux te dire qu'un homme peu avoir autant de sous entendu qu'une femme» j'hausse les épaules  « Enfin, j'ai jamais eu vraiment de grandes expériences avec un homme. Le sex est cool par contre. J'ai limite une préférence de coucher avec un homme qu'avec une femme. Ils sont plus confortable, eux» je rigole doucement en jouant un peu avec ma tasse.

Il approuve le fait de prendre la vie telle quelle vient et de ne pas se prendre la tête. C’est vrai que c’est la meilleure façon de voir les choses. On parle des relations de Martin et il confirme qu’il n’est pas du genre à lâcher ses potes. J’en suis bien rassuré. J’ai eu pas mal de potes qui m’ont oublié une fois casé avec une fille. Ils ont même des gosses maintenant. Autant dire qu’on a plus vraiment les mêmes intérêts et sujets de conversation. Il dit qu’il est pas prêt pour une relation stable.

« Comme ça on est deux. »

S’il avait été une femme j’aurai dit qu’on se fait un pacte. Si on est toujours seul à 40 ans on se marie ensemble. Mais bon là ça le fait moyen car Martin est un mec et c’est pas vraiment ma came. Enfin, je dis ça, j’ai jamais essayé, mais j’ai jamais été tenté non plus. D’ailleurs je lui demande comment c’est avec les hommes et il me confirme que ça se prend moins la tête. J’apprends qu’il préfère le sexe avec un homme qu’avec une femme.

« Plus confortable ? »

Il me fait rire, je vois pas de quoi il veut parler. Déjà je suis en train de me demander s’il est au dessus ou en dessous quand il couche avec un mec. Je n’oserai pas lui demander, c’est privé ces choses là.

« Pourtant les femmes y’a des seins et c’est confortable ça. »

Je crois que je dois faire fausse route mais j’avais envie de sortir cette boutade. Je me cale dans le dossier de ma chaise, je jette un coup d’oeil vers le buffet, non pas que je pense à me prendre une autre assiette, mais un dessert serait le bienvenue.

« Donc les mecs aussi font des sous entendus ? Pas cool ça. Moi il me faudrait une femme qui dit ce qu’elle pense tout le temps. Comme ça je saurai si je fais des conneries. Et des conneries j’en fais pas mal. C’est compliqué les relations. »

Je fais une petite moue et je me lève.

« Je vais me prendre un dessert pour me réconforter. »

Ou comment sortir une excuse de merde pour aller prendre un dessert.

« Tu veux quelque chose ? J’ai vu qu’il y avait de la salade de fruit. »

Je me dis que ça pourrait être ok pour lui, des fruits. Ca fait de mal à personne. D’ailleurs si y’a plus de glace c’est aussi ce que je vais prendre. Des fruits. Pour montrer à mon pote que je sais manger sainement aussi de temps en temps. Ok très peu souvent par rapport à lui, mais il m’aime comme ça. Je file au buffet et sans surprise il n’y a plus de glace à la vanille, ma préférée. Tant pis ce sera donc les fruits. Je me prends un petit bol et je le remplis. Je retourne à la table.

« Du coup toi tu squattes le quartier gay pour trouver des plans des fois ? »

Comme il préfère coucher avec des mecs, ça tombe sous le sens.

« Ce serait cool des quartiers juste pour des histoires de cul avec des filles. Enfin je dis pas que les gays veulent que des histoires de cul, mais... C'est des mecs quoi. »

Vaut mieux que je me taise je crois.