"Et merde! Vaffanculo!" dit il en claquant son poing contre le distributeur de billet. Accès aux comptes refusés. Nino avait déjà dépassé ses quotas de retraits pour le mois et nous n'étions même pas à la moitié. Plus un rond, plus un billet sur lui pour payer la bouffe ou pour payer ses clopes. Il allait devoir taxer des tunes à ses quelques connaissances. Il allait aussi devoir trouver un taf pour renflouer les caisses mais pour le moment, il n'avait pas trouvé de contact fiable pour proposer ses services. Il fallait qu'il trouve ça, et vite.

Elle est pas si simple, la vie dans une nouvelle ville, nouveau pays. Tout est inconnu, tout est à refaire. Il est plus vraiment là le caïd de la Scampia. Dérobé de son identité, de ses repères. Souvent, depuis son arrivée, Nino se demande Qui je suis? Il sait pas si c'était vraiment une bonne idée de venir ici. Toujours pas de traces de Titto, mais ça finirait par arriver, hein?! Nino arrivait toujours à ses fins, donc oui, ca finirait par arriver.
En attendant, il continuait à arpenter les rues de Brisbane, pour tuer le temps, pour se faire à cette ville, pour y découvrir les coins qu'il pourrait fréquenter. C'était pas forcément les bars et les boites les plus branchés, c'était plutôt les endroits où il serait incognito et où on viendrait pas l'emmerder.

Il déambulait dans ce quartier sans même savoir où il était vraiment. Il était juste derrière une nana qui semblait presque aller au même endroit que lui. Fallait il encore savoir où il allait. Le fait est qu'il était derrière elle et qu'au bout d'un moment, elle pourrait très bien sentir sa présence et paniquer en pensant qu'il la suivait. Non, c'était juste qu'il était là, sans penser à quoi que ce soit. Soudain, il vit un objet foncé tomber à ses pieds. Il baissa alors les yeux et reconnu un porte feuille. D'une nana sans aucun doute, de cette nana. Il se pencha et le ramassa. Son premier reflex n'a pas été de l'interpeller pour lui rendre, non, son premier reflex a été de l'ouvrir et d'y jeter un oeil. Quelques billets, ca fera pas sa richesse mais ça pourrait lui permettre d'acheter son paquet de clopes pour les 3 jours à venir et de se prendre un burger dans le coin pour midi,ca tombait à pic. Il fourre le porte feuille dans sa poche et change de direction pour aller commencer par s'acheter son paquet qui va le ruiner. S'il avait su que les clopes et l'alcool coûtaient si chers en Australie, il en aurait ramené un wagon avec lui. Dans le meilleur des cas, ce serait passé à la douane. Au cas contraire, tout aurait été saisi et on aurait pu lui mettre sur le dos un trafic de contrebande et sa chance pour une nouvelle vie serait tombée à l'eau. Rester en Italie et représailles.

Nino adossé contre un mur grille une cigarette entre ses lèvres. Les yeux rivés sur les passants, comme s'il voulait faire peur pour qu'on ne l'approche pas. Puis il voit de nouveau cette fille. Cette fois, il voit son visages, le même que sur ses papiers d'identité qui plus est. Il reconnait surtout sa démarche et ses vêtements. D'un pas décidé, il se dirige alors vers elle. "Eh! Toi, avec le pantalon vert!" Il s'approcha d'elle et sortie son porte feuille de sa poche. "J'ai retrouvé ça par terre tout à l'heure. A en croire tes papiers d'identité, tu t'appelles Cynthia, c'est ça? " Il n'avait rien à faire des papiers d'une nana. Par contre, plus de liquide à l’intérieur, ca c'était bien plus interressant.

Voila comment se faire passer pour un ange gardien alors qu'on a plutôt une queue de diable bien cachée. Le problème c'est qu'en général la queue fini toujours par réapparaître et par nous trahir. Mais pour le moment, Nino n'en était pas là. La fausse auréole au dessus de sa tête était bel et bien visible et il semblerait que la jeune femme n'y voyait que du feu. Son soulagement en retrouvant son porte feuille et ses papiers faisait sourire Nino. Si elle savait à qui elle avait réellement à faire. Si elle savait que ce même mec qui lui avait donner son porte feuille sur un plateau d'argent était le même qui lui avait dérober tout son liquide.
A son tour, elle lui demande son prénom. C'était partie pour faire les connaissance. C'était peut être le moyen pour elle d'en savoir plus pour pouvoir le remercier. "Nino" dit il en restant bref.
Après l'excitation, la surprise et la joie de retrouver son bien, voici la déception quand la jeune femme se rend compte que son porte feuille n'est plus si remplie qu'il ne l'était. Nino aurait presque pitié d'elle s'il n'était pas lui même dans une galère. Il n'était pas du genre à s’apitoyer sur le sort des autres, encore moins quand il ne les connais pas. Alors même si cette Cynthia semble bien charmante, il n'allait pas avouer ses fautes et lui rendre ses billets. La culpabilité, c'était pas vraiment ce qui le caractérisait. Enfin, si on oublie Vince mais c'était un autre sujet.
Mais qu'elle se rassure, au moins, elle avait retirer du liquide le matin même pour s'acheter un paquet de cloque et la première chose qu'en a fait Nino c'est bien ça. Donc, finalement, c'est pas si terrible."Je suis désolé, je l'ai trouvé tel quel. C'est pas cool... pour toi. Mais bon, t'as tes papiers, c'est le principal. " dit il en passant sa main dans sa nuque, comme s'il était gêné pour elle. Quels talents de comédien, digne d'un grand acteur Hollywoodien. Au moment même où elle lui demande s'il fume, il glissait une main dans sa poche pour saisir son paquet de cigarette. L'idée de lui proposer une cloque en guise de consolation lui était venu. "Tiens, c'est ton jour de chance!" il tend le paquet qu'il ouvre d'un doigt et la laisse se servir. De son autre main, il cherche son briquet dans son autre poche qu'il dégaine aussitôt qu'il le sent entre ses doigts.
Il regarde la jeune femme, elle lui semble plutôt jeune, plus jeune que lui en tout cas. De 5 ans, 8 ans? Il n'a jamais été très doué pour donner un âge aux autres et pour le coup, ce n'est pas quelques chose qu'il a regardé sur ses papiers. Il se prend une cigarette à son tour et la porte à ses lèvres pour l'allumer. "la prochaine fois, tu feras gaffe! Ton sac à dos, c'est pas très secure. N'importe qui peut glisser sa main à l’intérieur sans que tu t'en rendes compte." Nino avait même pas eu besoin d'en faire autant, il s'était contenté de se baisser pour ramasser l'objet tombé au sol. Mais autant faire passer ça pour un coup des pick Pocket.

Une dette envers lui, si elle savait. Il sourit et hausse les épaules. On va dire que j'étais au bon endroit, au bon moment... Pour lui, c'est sur, il pouvait pas tomber mieux. C'était le jackpot! Bon, il avait pas encaissé des milles et des cents mais au moins, ca lui faisait son argent de poche. Il allait pouvoir se faire plaisir pour les jours à venir. C'était comme gagner de l'argent tombé du ciel, là, tombé à ses pieds. Tout bénéf pour lui, moins pour elle. Mais dans son mal, elle avait retrouvé ses papiers. Et ça pour ça, Nino allait pouvoir se sentir mieux... Enfin, faudrait il encore qu'il ait quelques remords.
La jeune femme commencerait presque à lui raconter sa vie. Quand elle parle de "là où elle a grandit", Nino capte aussitôt qu'elle vient pas d'un quartier tranquille au bord de la plage où les gens ont les pieds dans l'eau lorsqu'ils de chez eux. Non, elle vient d'un de ses quartiers que Nino connait que trop bien. Là où lui aussi, il a vécu alors soudainement, il se prendrait presque pour son grand frère et lui rendrait les tunes qu'il lui a pris. Sauf que non, il perdrait clairement toute crédibilité sur ce coup et il passerait surement à coté. T'inquietes, j'crois que tu craint pas grand chose ici! C'est pas le pire! clairement, c'était pas le pire et si Nino visait juste, elle savait de quoi il parlait aussi.Et j'ai vu pire, en nana naïve! On pouvait pas dire qu'elle l'était pas. Déjà croire qu'un mec puisse vous ramener votre porte feuille, comme par hasard, trouvé près d'une poubelle et il tombe sur vous juste après, c'est être naïve. Mais, comme déjà dit, Nino se prenait d'un élan de solidarité envers elle, il n'allait pas la casser plus que ça. Il voulait maintenant, en savoir plus à son sujet. Le jeune italien se met à sourire lorsqu'elle relève que son nom n'a pas de consonnance Australienne. Il faut pas sortir d'une grande école pour sortir ça. Rien qu'à son accent fort présent, on pouvait le savoir. Nino n'avait pas un anglais parfait, loin de là, il se débrouillait comme il pouvait, savait se faire comprendre et comprenait aussi plutôt bien ce qu'on voulait lui dire, mais son accent lui, ne pardonnait rien. Italien. Il tire sur sa clope et devient plus curieux, histoire de voir s'il se trompait pas à son sujet. Il rebondit aussitôt et en profite pour lui demander : tu viens d'où, du coup? elle allait peut être lui donner le nom d'un quartier dont il n'aura jamais entendu parlé, n'étant pas du coin, même pas du pays, il avait de grande chance de ne pas connaitre la vraie signification de sa réponse.

Décidément, entre son prénom et son accent, Nino était trahi par ses propres origines. En même temps, il était très fier de sa nationalité, très fier d'être italien et ne le renierai jamais. Si c'était souvent un cliché qui collait à la peau des méditerranéen, pour Nino c'était plus que ça, c'était la réalité. Il avait cette sorte d'arrogance quand il s'adressait aux autres, sans forcément le faire exprès. Toute fois, depuis qu'il était à Brisbane, il avait mis ce coté de sa personnalité un peu de coté. En terrain inconnu, Nino se surprenait à être quelqu'un d'un peu plus fébrile, moins intouchable qu'il ne l'était en terrain conquis qu'étais Scampia. Il se demandait s'il reverrait ce quartier un jour. Sans doute. Je suis arrivé en décembre. il allait bien se garder de lui confier ce qui l'avait amené en Australie exactement. Bien qu'il était aussi là pour son frère, il ne serait jamais venu s'il n'avait pas eu des soucis avec la justice, et s'il n'était pas menacé de mort en restant à Naples. Etre loin de cette ville et de ce pays était la seule solution. Voilà une bonne raison pour sa venue.J'ai un frère ici. Un peu de tourisme et changer d'air, c'est assez important ? Il lui lança un clin d’œil et tira à nouveau sur sa clope qui se consumait au bout de ses doigts. T'es curieuse. mais étrangement, celà ne dérangeait pas tant que ça Nino. Cynthia n'avait pas une voix désagréable, elle n'avait pas une attitude de pimbêche qui le rebutait et elle finirait presque par lui faire pitier tien. Comme si le jeune italien était pris de remord de lui avait dérober son argent, pour payer son loyer qui plus est. Mais tant pis, elle allait s'en remettre et lui, encore plus. Jamais entendu parlé de ta ville. La culture de Nino n'était pas très développée et ses connaissances en géographie l'étaient encore moins. S'il arrivait à placer Rome et Paris sur une carte, pour le reste, il ne fallait pas trop lui en demander. Mais au moins, il savait où se trouvait l'Australie, au moins... Tu vivais pas dans les beaux quartier de la ville, non? à en croire ce qu'elle lui avait dit auparavant. Nino était intéresse. Peut être qu'au final, il était tombé sur une nana qui était aussi paumée que lui, qui avait vécu la même misère que lui. Un quartier où il faisait pas forcément bon vivre. Bien que lui, s'y était carrément fait, il s'y était habitué et meme attaché. Contrairement à d'autres qui partaient au fur et à mesure, comme son frère Vitto. Vitto qui avait toujours dis qu'il quitterait cette vie miséreuse et non seulement il l'avait dit mais en plus il l'avait fait. Il avait réussi, lui. J'connais pas encore la ville, encore moins les quartiers. Mais j'sais au moins où je suis hebergé. A Pine Rivers. Chez une nana qui a eu un peu pitié de moi, j'crois. dit il sur le ton de l'humour mais il n'était surement pas loin de la vérité. Ma veine, c'est que j'lui file pas une tune. dit il comme si c'était une fierté.

Spoiler:

La question fatidique. Nino était il proche de son frère? Il y a encore quelques mois, enfin, plusieurs mois voir quelques années, il aurait dit oui. Inséparables. Plutôt, lui ne le lâchait jamais. Toujours derrière lui, toujours collé à ses basques, son ombre. Nino c'était celui qu'on voyait toujours aux cotés de Vitto en ville. Toujours jusqu'à ce que leurs chemins se séparent. Jusqu'à ce que Vittorio décide de s'en aller à Rome, laissant derrière lui frère et mère. Lui avait fini par s'en sortir, pas trouver sa voix, partir de Scampia et de la misère de ce quartier qui agissait telle la gangrène sur toute personne y mettant les pieds et qui voulait s'y installer. Mais certains arrivent à s'en défaire, à voir plus loin, à rêver d'une vie meilleure et tout faire pour y parvenir. C'était ce qui qualifiait le grand frère de Nino. C'était tout le contraire de Nino. Lui y était resté et tout s'est enchaîne. Bien qu'il faisait déjà partie de ces voyous de bas étage, seconde catégorie, il avait pris du grade, de la confiance. Il avait plus son frère pour jouer au flic derrière lui, pour lui rappeler que la vie c'était pas ça. Comme deux doigts d'une main, à la base. il n'avait pas pu s'empêcher de souffler cette précision. Il redresse la tête  et regarde Cynthia avec un air grave sur le visage. La séparation a été difficile. dit il comme pour sauver la mise. Il n'avait pas envie de s'étaler en ce qui concerne sa vie de famille. Il ne la connaissait pas et ne savait pas à qui il avait à faire pour trop en dire. Et puis, même avec des connaissances de longue date, il savait que la confiance ne s'accordait jamais facilement. Toujours rester vigilent.
Il semblerait que la jeune femme ai déjà des projets pour leur futurs. Se revoir? Ou si ce n'était pas une ferme attention, au moins, elle n'excluait pas cette possibilité. Nino ne releva pas pour autant. Pour lui, elle n'était qu'une gamine de passage. Il avait fait sa fausse bonne action de la journée et il s'en contenterait pour la suite. Il n'était pas du genre à se lier aussi vite avec quelqu'un qui venait juste de croiser. Qui plus est, quelqu'un qu'il venait d'arnaquer sans scrupule. Toutefois, il semblait presque compatir au passé de la jeune demoiselle. Ce quartier qu'elle décrivait correspondait tout à fait à Scampia.   Se fondre dans la masse ouais. Suffit juste de pas chercher la merde, rester dans son coin, se faire discret. C'est le meilleur moyen. On aime pas les grandes gueules. ajouta t il comme s'il lui répondait directement, il sait exactement de quoi elle parle. le meilleur moyen de résister, c'est de succomber. Il finissait par en dire un peu trop sans vraiment le vouloir mais chaque parole de la jeune femme résonnait que trop fort dans les oreilles de Nino. Pour lui, rallier les groupes des caïds de Scampia c'était un moyen d'être tranquille et de mener sa vie sans emmerde. C'était sa force de résistance.
Je crois que j'vois où c'est ouais. Il n'étais pas passé souvent devant ce grand batiment qu'elle décrivait, mais il lui avait tapé dans l'oeil. Il s'était demandé de quoi il s'agissait, n'ayant pas vraiment regardé le nom de l'enseigne. Une radio donc. Elle bossait dans une radio, en tant que stagiaire... pourquoi pas. Il se demandait quel age elle avait pour être encore stagiaire. Surement la vingtaine. C'est vrai qu'elle lui paraissait être jeune. On? Non seulement, elle l'invitait à manger à présent avec elle un midi mais il semblerait qu'elle avait l'intention de le présenter à d'autres personnes. Hors de question pour lui d'adopter ce genre de comportement. J'te file ton porte monnaie et tu crois qu'on va aller déjeuner à l'occas ensemble? c'était trop pour lui d'un coup. Loin d'être habitué à ce genre de proposition d'ailleurs. Et il devait arrêter d'accepter les invitations des inconnus, il avait déjà atteint son quota de sociabilisation, et largement. C'était sans doute la goutte d'eau qui faisait qu'il avait décollé de la conversation, il n'écoutait plus tellement ce que la jeune femme disait. Ouais ouais, j'paie que dal. Il commençait à regarder autour de lui pour savoir comment il allait bien pouvoir se défaire de cette discussion. Il avait l'impression d'être à nouveau pris au piège. A croire que la gentillesse et la spontanéité ne faisait pas partie de son monde, ca avait tendance à l'angoisser. J'te crois ouais. Mais dis, t'avais pas un truc à faire? Il sentait qu'il allait perdre patience. En même temps, il avait tout à fait conscience qu'elle avait rien fait de mal mais c'était pas un comportement habituel pour lui.