Depuis quelques mois, tout a changé pour moi. Si d’un point de vue professionnelle tout va bien avec la première saison de ma nouvelle série qui va sortir bientôt et la deuxième saison est en préparation sauf que je n’ai pas écrit encore tous les épisodes. Pourtant les producteurs me pressent et je peux les comprendre, je sais que cette série pour adolescent peu faire un grand succès et rapporter beaucoup d’argent. Les gens attendent beaucoup de moi mais avec mes évènements personnels récents je n’ai pas eu beaucoup le cœur à écrire. Il faut dire que je me retrouve aujourd’hui enceinte, le père étant soit mon ex-fiancé, soit un figurant de ma série. L’un m’a plaqué du jour au lendemain et est désormais avec une autre fille et le deuxième est parti du jour au lendemain sans donner de nouvelles. Je ne sais pas qui est le père de mon enfant, même si je doute vraiment qu’il s’agisse d’Alejandro avec qui je n’ai eu qu’une seule relation. Pour moi le père est Julian même si bien sûr, il refuse de voir la réalité en face, pour lui ce n’est pas possible tout simplement parce qu’il ne veut pas d’enfant mais cela ne fonctionne pas comme ça dans la vie malheureusement. On n’a pas toujours ce qu’on veut. Depuis qu’il est parti, bien sûr il existe un immense vide en moi mais aussi, quelque chose de beaucoup plus bête, je me suis rendu compte simplement que j’étais incapable de faire tout ce qui touchait au bricolage et au jardinage, toutes les tâches particulièrement masculine. Julian n’était pas du genre à passer deux heures dans le jardin ou bien à faire des améliorations sur les objets du quotidien, il faut croire que tout ce que mes parents m’ont dit dans ma jeunesse ont finit par déteindre sur moi. Même si je n’étais pas toujours d’accord, ils avaient des propos assez conservateur, comme quoi la femme devait rester au foyer à élever les enfants et l’homme à travailler. J’avais toujours cru que tout ça c’était des conneries, je le pensais encore, mais il fallait que je me rende à l’évidence. J’étais incapable de couper les rosiers ou bien encore remettre une prise qui s’est défaite. J’avais donc posté une petite annonce au pôle emploi. Je n’étais pas passé par le bureau car c’était que pour quelques heures par semaine. Un homme m’avait contacté, il semblait intéressé, d’après la voix au téléphone il était jeune. Il avait un léger accent, je ne savais pas d’où. Il avait commencé de travailler à la villa il y a un mois. Si au départ il était plutôt de bon service, maintenant je le sentais de plus en plus dégouté par les différentes tâches que je lui demandais. Je finissais par me demander pourquoi il avait accepté cet emploi. Mais j’étais contente de l’avoir rencontré, c’était quelqu’un de sympa ce garçon. Très sympa. Nous avions quelques points en commun et je me sentais assez proche de lui. Je me disais que nous pouvions devenir amis, j’avais besoin de soutien en ce moment. Comme plusieurs matin par semaine, il était là à couper les arbres du jardin pendant que je regardais la terrasse, une idée m’était venue, celle de mettre un jacuzzi mais c’était peut être un peu trop ambitieux. « Vous avez fini ? Vous voulez prendre un café ? ». Je disais ça plus par politesse, mais je voulais aussi discuter un peu avec lui.
Voilà maintenant deux mois que Nino était à Brisbane, deux mois qu'il avait fuie l'Italie et le seul endroit auquel il avait pensé pour se réfugier c'était l'Australie. Simplement car il savait qu'ici il aurait une attache, son frère. Seulement, ce serait trop simple si tous les deux avaient des rapports cordiaux, complices. Ce n'était pas le cas. Nino était venu ici pour rendre des comptes et pour avoir des explications. Pourquoi son frère qui avait toujours été la pour lui, toujours présent dans les coups durs, pourquoi était il partis en laissant Nino entre quatre murs dans une indifférence totale. Il avait tourné les talons et laissé son frère moisir dans cette prison. Nino lui en voulait terriblement. S'il avait retrouvé son frère, il n'allait plus le lâcher avant d'avoir réussi à tourner la page. Le risque c'est qu'elle ne se tourne jamais. Trop blessé, atteint en plein coeur, lui qui voyait en son frère un modèle, c'était fini.
Nino avait dégoté un visa tourisme mais il savait que pour pouvoir rester plus longtemps sur le territoire il allait devoir trouver un travail. Pas question pour lui de dépendre d'une hiérarchie qu'il détestera, pas question de se lever tôt le matin ou de rentrer tard dans la nuit, impossible de travailler les weekend. Beaucoup d'exigence qui éliminait déjà la plupart des jobs en restauration ou dans les bars sont à exclure. Les tafs demandant trop de qualifications sont à exclure également. Nino n'a aucun diplôme, aucune reconnaissance. C'est pas en faisant le guetteur ou refilant des pochons sous le manteau qu'on sait comment travailler. Alors au début du mois, il a vu cette annonce. Homme à tout faire chez une nana qui pensait que certaines tâches étaient réservées aux mecs. En voyant la liste des petits tafs à faire chez elle, il s'est dit qu'il pourrait être l'homme en question. Les horaires n'étaient pas contraignante et au moins, il n'allait pas être obligé d'être sociable avec des gens qu'ils ne connaissaient pas. Il a rapidement appelé le numéro indiqué sur l'annonce et quelques jours plus tard, il se retrouvait avec un tournevis à la main pour fixer une lampe dans une chambre. Il s'était montré motivé et enjoué à l'idée d'avoir un travail mais il serait hypocrite de dire qu'il était sincère. Nino n'avait aucune envie de se trouver là et au fur et à mesure du temps, il était bien moins démonstratif de son faux enthousiasme.
Ce matin là, il était dans le jardin entrain de couper des branches qui dépassaient pour rendre cette haie parfaitement droite. Il avait déjà très chaud et se dépêcha pour finir rapidement. Plus tôt toutes ces branches seraient coupées, plus tôt il pourrait partir. L'avantage c'était qu'il travaillait en fonction des missions que sa cheffe lui donnait et s'il n'y en avait qu'une, il partait ensuite. Aujourd'hui, il n'en avait qu'une. Il était entrain de ramasser les branches au sol pour débarrasser le jardin et le rendre à nouveau propre lorsque Lauren-Rose débarqua. Il faut dire qu'il est plutôt veinard de pouvoir avoir sous les yeux une femme aussi belle qu'elle, presque tous les jours. Au fur et à mesure des jours, il avait l'impression qu'elle prenait la confiance avec lui et qu'elle lui parlait de plus en plus. Voulant pas paraître trop con, il lui répondait sans pour autant donner trop de détails sur lui, comme d'habitude. J'ai fini dans un quart d'heure. répond il en levant à peine les yeux et ramassant toujours ses branches. Vous avez pas une bière plutôt? Boire un café chaud par cette chaleur, en transpiration comme il est, c'était pas ce qu'il voulait le plus. Par contre, une bière sortie du frigidaire, bien fraîche, la il était partant. J'finis et j'arrive! Il se redresse et passe sa main sur son front et prends le temps de souffler un peu avant de s'y remettre pour terminer.
Pour moi avoir un employé était un fait tout à fait nouveau, je n’avais jamais eu personne à mon service à la maison. Bien sûr, il y avait des gens qui travaillaient pour moi notamment des maquilleuses et des coiffeuses quand je passais à la télévision ou quand j’allais à un évènement médiatisés mais je trouvais ça beaucoup plus légitimes qu’on s’occupe de moi pour ses évènements plutôt que d’avoir quelqu’un chez moi qui était là et bien complètement à mon service. Après on ne pouvait pas dire que Nino était du genre à faire dans l’excès de zèle, à faire plus qu’il n’en faut. Non, il préférait faire le minimum est pour lui ça semblait déjà bien suffisant. Nino s’accordait à faire les tâches que je lui donnais mais il ne prenait pas vraiment d’initiatives quant aux petits travaux ménagers. Il y a pourtant pas mal de chose à faire dans une maison, surtout une grande villa comme la nôtre. Je remarquais alors chacun des disfonctionnements et n’oubliait pas de le noter sur un petit cahier que j’avais acheté depuis le départ de Julian. Alors que Nino était entrain de couper des branches je lui avais proposé un café. Le jeune homme voulait une bière, certes il était presque midi, il devait avoir raison d’en vouloir une. Julian lui-même aurait sans doute prit le même genre de boisson à cette heure là. Je sortis la bière du réfrigérateur tandis que je me faisais un thé purifiant. J’avais une collection de dizaine de thé. J’en buvais déjà pas mal habituellement mais avec ma grossesse, je faisais une véritable fixation. Tout d’abord parce que je ne pouvais pas boire de l’alcool et aussi parce que j’avais sans cesse l’impression qu’on allait voir mon gros ventre, que bientôt tout les médias annoncerait dans ma presse ma grossesse et je n’étais pas préparé à ça. Je ne voulais pas qu’on dise que mon petit ami était parti à cause du gosse ou toute autre rumeur que les gens inventeraient par méchanceté, c’était déjà assez dur comme ça. La bière ouverte, je sortais un paquet de chips au cas où il voudrait grignoter avant déjeuner et posait le tout sur notre grand plan de travail. La maison était luxueuse, il ne fallait pas être très observateur pour comprendre que nous avions de l’argent. Enfin que j’avais de l’argent puisque je vivais seule dans cette grande villa désormais. Nino arrivait enfin et je l’entretenais à propos des travaux davantage pour faire la conversation qu’autre chose : « L’arbre est coupé totalement ? Je ne pensais pas vraiment que la maison demandait tant d’entretien…Il faut dire que, nous n’en avions pas trop pris soin ses derniers mois… ». Julian se contentait simplement de faire au plus vite, au plus urgent et pour le reste, cela attendrait mais le provisoire était devenu à la longue définitif. « Je ne vous accompagne pas pour la bière, vous savez pourquoi ! ». Je lui avais dit que j’étais enceinte et c’était de plus en plus difficile de le cacher avec mon petit ventre qui commençait à s’arrondir. Je lui fis passer les chips avant de me servir moi-même. « Alors vous avez des plans de prévus pour ce week-end ? ». Demandais-je souriante, Nino était devenu une connaissance sympathique avec qui j’aimais bien discuter de tout et de rien donc autant faire la conversation.
Après quelques minutes, Nino en avait enfin fini avec ces branches. Il rassemblait tout dans un coin. Ce qui était chiant quand il s'occupait des extérieurs c'était qu'il devait ensuite se rendre dans une déchetterie pour balancer les déchets verts. Ca, ca le gonflait vraiment, du coup, il avait trouvé un coin pas trop loin de chez Lauren Rose où il pouvait tout balancer sans que personne ne s'en rende compte. C'était sous des arbres, donc tout serait confondu, du vert sur du vert, qui viendrait lui prendre la tête? Au moins, il n'avait pas besoin de passer quasiment une heure, aller-retour pour faire ça proprement et dans les règles. De toutes façons, Nino et les règles, tout le monde sait que c'est pas compatible.
Une fois fini, il se dirigea dans vers l’intérieur. Il mis un coup de pied involontairement dans un nain de jardin qui traînait sur son chemin. Celui ci étant assez fragile, il se brisa en deux. Merde! Il se baissa pour saisir les deux pièces entre ses mains et regarda l'objet fracturé. T'es moche de toutes façons... il haussa les épaules et balança le nain éventré derrière lui, sur le tas de branche. Il le mettrait à la poubelle plus tard.
Là, il avait soif et la proposition de Lauren-Rose tombait à pic. Il se dirigea une bonne fois pour toute vers elle et saisi la bière qu'elle lui tend. D'un signe de la tête, il la remerciait. Désolé, j'ai défoncé le nain de jardin que vous aviez dehors... il espérait que ce n'était pas un héritage ou quoi que ce soit de valeur, car pour lui, a part être du plâtre, ce n'était pas grand chose. Peut être lui avait il rendu service aussi... Ouais, ca y est, j'en ai fini avec cette Me... cet arbre! dit il pour se rattraper, il essayer de ne pas être trop vulgaire devant sa patronne. Sa façon de parler pouvait traduire de sa motivation pour travailler ici. Mais au moins, c'était pas trop mal payé, et c'était une bonne planque. Il posa ses yeux sur son ventre et il se demandait toujours où il était le père. Elle en avait jamais trop parlé et lui, il à la base il s'en foutait, mais au fur et à mesure qu'il venait travailler pour elle, il se posait des questions. Vous allez l'élever seule?! un peu cash comme question mais il est pas du genre à passer par quatre chemin, sa mère lui a jamais trop appris la diplomatie. Quant à savoir ce qu'il allait faire de son weekend, il n'en savait rien pour le moment. Surement des soirées trop arrosée mais fallait il qu'il lui raconte? Sa propre question allait lui permettrait de ne pas répondre à Lauren-Rose non plus, de l'esquiver. Il n'avait pas forcément envie de raconter sa vie à sa patronne. Par contre, il n'avait à ce moment précis, rien contre le fait qu'elle le fasse elle même. Ca lui permettrait de rallonger son temps de pause. Il bu un gorgée en attendant la réponse.
J’avais préparé la bière pour qu’il puisse la savourer une fois qu’il aurait terminé. Je le regardais faire, mettant les branches dans un coin du jardin. Bon, je me demandais pourquoi il faisait un tas et comment il apporterait tout ça, mais ça ne me regardait pas vraiment. Je n’arrivais déjà pas à gérer les travaux ménagers alors savoir où je devais ranger les déchets, ce n’était pas trop mon problème. Après quelques minutes il arriva enfin en me disant qu’il avait défoncé un nain de jardin ? On avait des nains de jardins dans le jardin, ça devait être un cadeau de mes parents quand ils avaient su qu’on allait avoir un jardin avec une maison. Je levais les yeux au ciel, oui, je m’en fichais de ce nain : « Je prélèverais 20 dollars sur votre salaire… ». Je restais sérieuse quelques instants avant de me mettre à rire : « Je plaisante, c’était un petit cadeau, ce n’est pas très grave…Y a d’autres nains dans le jardin ? ». Je me demandais finalement combien y avait de nains dans le jardin et si y avait d’autres éléments de décorations. Je soupirais quand il me dit qu’il avait fini avec cette merde, j’avais bien entendu. Il parlait de merde ? Ce n’était pas son travail. Je ne faisais pas de réflexion pour cette fois si mais bon…J’avais quand même entendu et compris que ça le soulait, mais je lui donnais quand même assez d’argent pour pas faire grand-chose alors il pouvait au moins respecter ce que je lui demandais de faire. Je me servais un petit cocktail de jus de fruit en l’écoutant, est ce que j’avais même une réponse à a question ? Je savais pas. Non, je savais pas si j’allais pouvoir élever l’enfant seul ou si Julian allait revenir. Ou si quelqu’un d’autre que Julian allait élever cet enfant avec moi. C’était le genre de truc d’ailleurs qui me faisait paniquer : « Je…Je ne sais pas. Je…C’est n’est pas vraiment ce que je voulais pour mon enfant mais maintenant, Julian est parti, je crois bien pour de bon et je suis quand même enceinte. L’enfant n’a pas a payé pour ses parents. Alors j’espère quand même qu’un jour il connaitre le bonheur d’avoir un père et une mère mais je ne sais pas si Julian assumera son rôle vous savez… ». J’émettais beaucoup de réserve quand à sa faculté à devenir le petit papa modèle. Et j’ajoutais assez rapidement : « En plus il a une nouvelle copine alors ces histoires de bébés, ça l’intéresse pas… ». Et puis pourquoi lui raconter tout ça, ma vie ne tournait plus autour de Julian, cet enfant oui mais pas Julian. Je souriais avant d’ajouter : « Ne parlons plus de lui, ça ne sert à rien, nos sujets de conversation sont toujours si triste. Si on faisait quelque chose de plus…Distrayant tous les deux… ». Je sais pas, peut être sortir de cette maison un soir, faire un bowling. Ok, j’étais sa patronne mais j’étais aussi une meuf de trente ans comme lui non ? Plutôt que de parler toujours des morts et des mauvaises nouvelles. Ça changerait.
Si c'était une blague, elle était loin de faire rire Nino, si c'était vrai, il allait surement pas apprécier qu'elle lui prenne 20 dollars juste pour un nain qui en valait même pas le tiers. Mais rapidement, elle avoua plaisanter. Nino se contenta de ne rien répondre, pas tellement sensible à ce genre d'humour. J'crois pas! il en savait rien en fait, il avait pas fait le tour complet du jardin et il avait pas fait attention à tout ce qui y trainait mais en même temps, il en avait pas le souvenir. Et s'il y en avait d'autres, il les foutrait aussi à la benne, apparemment, ils manqueraient pas à la blonde.
Nino avait voulu être sympa deux minutes en posant une question, en faisant mine de s'interesser à la vie de sa supérieure et là voilà partie dans un monologue. Du coup, de peur d'être pris en otage, il savait pas s'il devait vraiment répondre ou s'il devait lui foutre un vent et repartir dans son jardin. Là où il serait tranquille, là où on viendrait pas lui parler de môme et d'ex qui se sont fait la malle. Il connaissait pas la raison et en fait, il s'en foutait. Peut être qu'avec ses grandes tirades, elle avait finit par le fatiguer, comme elle venait d’assommer Nino. Bon, une chance, c'est qu'avant même qu'il ne lui dise qu'il allait finir par bouger de là, elle changea de sujet d'elle même. Comme si elle avait fini par comprendre qu'elle avait trop raconté sa vie.
Nino restait de marbre quand il compris qu'elle lui proposait de sortir quelques part avec lui. Il bu sa bière d'une traite et ne répondit pas tout de suite. Il voulait gagner quelques secondes pour reflechir à la réponse ou plutôt à la manière dont il allait lui répondre. Il secoua la tête et regarda l'état de sa tenue. J'suis dégelasse et plein de transpiration ! C'était surtout une excuse. En plus, j'ai pas fini. Faut que j'dégage tout ce merdier dans l'jardin. J'en ai encore pour un moment. dit il comme s'il était vraiment attaché à son travail.
Je plaisantais à son propos, lui disant que je prélèverais un peu d’argent sur son salaire mais ça n’avait pas l’air de le faire rire. Il ne me répondait ‘je ne crois pas’ comme si c’était lui le patron, parfois je n’arrivais pas à comprendre ce jeune homme, vraiment. Je pensais qu’il était sympa un jour et le lendemain, c’était plutôt l’inverse, c’était dur de se fier à ce qu’il était, ce qu’il pensait. On avait l’impression qu’il avait toujours un masque sur son visage et que son je m’en foutisme cacher quelque chose ? Quoi on ne saurait pas dire…J’avais du mal à reconnaitre le mec qui semblait heureux d’avoir trouvé du travail. J’avais l’impression qu’il était ici comme un esclave, que tout ce que je lui demandais n’était que corvée et que tout l’énerver au plus haut point. Il se taisait et c’est vrai que quand quelqu’un avec qui je parlais se taisait, j’avais tendance à parler, plus qu’il ne faudrait, encore une fois j’avais l’impression d’en avoir trop dit. Peut être des choses que j’aurais du garder pour psy, sans doute oui, mais Nino était mon employé, je le payais lui aussi, donc il pouvait bien m’écouter. Mon raisonnement était sans doute étrange mais c’était vrai. J’avais tendance à me dire que si je lui versais de l’argent la moindre des choses. Mais bon, peut être qu’il n’était pas vraiment comme moi, pas vraiment l’envie d’aider son prochain et que la compassion, ce n’était pas son truc. Je lui avais proposé qu’on fasse un truc ensemble, autre qu’être ici, je moisissais entre cette maison et le plateau de tournage où je travaillais, ce n’était pas, ce que j’appelle. Une situation très dynamique et très drôle. Quoi qu’il en soit, cette proposition j’aurais pu la faire aujourd’hui comme un autre jour, je voulais juste être sympa, qu’on apprenne à ce connaitre. Que je ne passe pas pour une patronne conne et hautaine, mais je crois que j’avais loupé mon coup. « Pas de soucis, je parlais pas forcément d’aujourd’hui, mais si vous avez transpirés, vous pouvez prendre une douche, sans problème ! ». A le croire on avait l’impression qu’il avait fait les travaux d’hercule mais la tâche n’était pas si horrible. « Si vous avez pas le temps aujourd’hui vous pourrez ramener les déchets demain ». Un long silence s’installa ensuite. Mais cette fois si je ne parlais pas, je ne voulais pas le souler. « Vous parlez jamais, comme ça ? ». Finissais je par demander.
Ca va, j'me laverai quand j'rentrerai. histoire de pas se retrouver dans une impasse une fois qu'il sentira le gel douche de nana parfum vanille bourbon ou fraise d'antan. Et ça tombait bien puisqu'en temps normal, le jeune italien était loin de tenir à son hygiène corporelle. Rester dans une odeur masculine, extrait d'une journée passée sous le soleil à remuer les bras, ne le dérangeait absolument pas.
Nino s'apprêtait à retourner à nouveau dans le jardin quand de nouveau, elle l'interpella. Il se demandait si elle ne se sentait pas un peu trop seule pour vouloir faire la conversation à son homme de main. Il avait ignoré qu'en postulant à cette offre d'emploi, il avait aussi répondu à une annonce désespérée qu'on aurait pu laisser sur meetic. Lui qui cherchais seulement une planque pour être tranquille et pouvoir mener son bout de chemin tranquille à Brisbane, il avait l’impression que cette Lauren Rose était encore plus tortionnaire que tous les dealers et gros bras pour qui il avait pu travailler auparavant. Au moins, eux se contentaient de lui donner son taf sans chercher à trop en savoir sur sa vie ou sur lui. Nino était là pour travailler et pas pour faire dans le social. Il avait pas forcément la conscience professionnelle pour finir une tâche quand il avait commencé, mais là, il préférait finir et trainer pour prétexter être crever ensuite pour rentrer chez lui. J’aime bien commencer un job entamé. J’vais mal dormir si non. Il tourne enfin les talons pour sortir de ce salon et mettre un pied sur la terrasse. J’savais pas que dans homme à tout faire, on voulait vraiment dire « tout faire ». J’fais mon taf, j’suis pas un grand bavard. Du coup, si ca vous dérange pas. J’ai à faire. dit-il sans même se retourner sur elle et en désignant d’un coup de menton la direction de ces branches à terre. Il se tourne légèrement vers la porte et d’un coup de main il pousse la porte fenêtre laissant sa supérieure à l’intérieure. L’enfer. souffla-t-il avant de se remettre au taf.