| | | (#)Ven 5 Mai 2017 - 2:07 | |
| So when I'm touching you, Can I trust in you? Can I trust in you? Oh babe... Girl, come show me your true colors, Paint me a picture with your true colors, these are the questions of a new lover... true colors, true colors...
(☆☆☆) Hannah Siede n'était pas une créature d'habitudes et pourtant, une certaine routine s'était installée depuis que Saul vivait sous son toit et la brune se demandait très franchement comment elle avait fait pour vivre sans lui. Ça ne durait que depuis quelques semaines et pourtant, Hannah aimait passer la porte de sa demeure et le trouver là, elle aimait bien se plaindre de choses complètement inutiles et le regarder esquisser un sourire alors qu'elle se blottissait au creux de ses bras. Elle aimait bien la façon dont Audrey semblait s'être prise d'affection pour le metteur en scène, se mettant en tête d'apprendre à faire tous ses plats préférés afin que ce dernier se sente complètement à l'aise. Il y avait aussi les moments de silence, ceux là étaient définitivement les préférés d'Hannah, la brune n'avait pas besoin de dire quoi que ce soit et Saul comprenait qu'il y aurait du silence pendant les prochaines heures à venir tandis qu'elle se concentrait sur un bouquin en particulier, ou alors qu'elle griffonait sur son carnet, sa paire de lunettes bien en place sur le visage et une chemise de Saul sur les épaules. C'était simple, entre les murs de la villa d'Hannah, ils semblaient avoir trouvé un semblant d'équilibre et l'actrice s'efforçait de ne pas penser à ce qui se passait au dehors, quand Saul n'était pas là. Elle savait que la compagnie lui donnait du fil à retordre, que son divorce aussi devenait une affaire compliquée de jour en jour... Ce n'était pas que la brune avait envie de s'impliquer dans tout ça, c'était tout simplement qu'elle ne savait pas quoi dire et qu'elle pouvait uniquement lui apporter son soutient après une mauvaise journée. Lui offrir un sourire, une blague vaseuse et regarder un sourire se dessiner sur le visage de Saul. C'était... l'entre-deux, une période qui n'était facile pour personne et surtout pas pour lui. Saul était assez gentleman pour ne pas se plaindre à voix haute mais Hannah avait appris à le lire au fil des jours et elle se rendait compte que Saul était beaucoup plus compliqué qu'il n'aimait le dire. Ou alors c'était Hannah qui savait quoi observer et quelle genre de réaction elle pouvait attendre quand il rentrait particulièrement tard. Ou Hannah ne parlait tout simplement pas car elle ne voulait pas ruiner le moment, ne pas faire éclater cette espèce de bulle, ce cocon, qu'ils semblaient s'être créé et qui était mieux que tout ce qu'elle avait connu auparavant. Hannah était heureuse, le reste ne devait pas avoir d'importance ... pas vrai ? C'était ce que la brune se répétait de jour en jour et encore se réveillant en début d'après midi, Saul ayant déjà quitté les draps depuis longtemps. Hannah se contenta de rouler à la place qu'avait occupé le metteur en scène et elle respira son parfum, s'imprégnant un peu plus de lui et maintenant l'illusion un peu plus longtemps. C'était elle qui était rentrée tard cette fois-ci et elle pouvait presque voir le sourire qu'il avait dû lui adresser en voyant qu'elle dormait encore profondément. It's not that I am not a morning person, I can't just sleep when there's so much to do at night, avait tout simplement argumenté Hannah au fil des jours et c'était un argument qu'elle allait sans doute utiliser la prochaine fois qu'ils allaient se croiser, elle en était certaine. Mais la brune avait bien l'intention de rester là, peut-être jusqu'à ce que Saul rentre et qu'il lui donne une bonne raison de ne plus quitter ce lit. Hannah allait certainement le faire, elle l'aurait fait si Audrey ne l'avait pas tirée de sa rêverie en tapant à la porte. Hannah prétendit se cacher sous les couvertures, chose qui fait bien rire sa gouvernante qui tirait déjà les rideaux pour laisser entrer les rayons du soleil et lui rappeler qu'elle avait des obligations. "Fine." protesta la brune en se relevant. "Je suis debout, je suis debout..." Elle tendit les mains pour récupérer son téléphone et se dirigea vers sa salle de bain, ses yeux rivés sur son programme de la journée. Journée qui était en fait quasiment vide et ne comportait qu'un seul et unique rendez vous à l'hôpital de la ville. La brune se figea un instant et se demanda comment elle avait fait pour oublier cet élément-là, elle était censée avoir une bonne mémoire mais la réponse lui vint très clairement quand elle fixa son propre reflet dans le miroir et le collier qui trônait toujours autour de son cou. Aucune raison d'avoir peur, elle allait chercher des résultats, savait déjà qu'ils seraient négatifs, elle serait déçue, elle passerait à autre chose et elle prendrait la main de Saul ce soir, comme si de rien était. Comme si. Hannah avait réussi à se convaincre que tout irait bien, tellement qu'elle esquissait un sourire en enfilant sa robe de chez Chanel, ses lunettes de soleil trouvant également sa place sur son nez. C'était juste un mauvais moment à passer, se jura la brune en faisant de son mieux pour ignorer l'odeur caractéristique de l'établissement hospitalier qui lui envahit les narines une heure plus tard. La brune attendit son tour en pianotant sur son téléphone portable, échangeant respectivement des messages avec son père et avec Andreas qui lui relatait ses dernières frasques sentimentales. "Miss Siede ? Hannah Siede ?" La concernée finit par se relever et avec un sourire presque compatissant pour son médecin, elle se leva et elle le suivit. "Je suppose que ça va être très rapide non ? Je n'avais pas de très grands espoirs en passant ces examens-là alors..." "Hmm... Je crois que je risque de vous décevoir Miss Siede, il s'agit d'une bonne nouvelle." Hannah afficha une expression perplexe pendant quelques secondes, expression qui fut remplacée par de la pure surprise puis par quelque chose de plus triste alors que le médecin lui montrait ses résultats d'analyses, lui expliquant ligne par ligne ce que tout cela signifiait. "Donc..." La brune inspira lentement, la gorge sèche. "Donc vous êtes en train de me dire que je pourrais... un jour... avoir des enfants ?" "Oui, mais pas de manière conventionnelle je veux dire, vous aurez de bien meilleurs chances en procédant à une insémination artificielle. Mais je sais que vous aviez déjà posé des questions à ce sujet à mon collège de New York qui n'avait pas pu vous répondre. Je peux désormais vous affirmer que cette méthode marchera très bien, surtout au vu de vos derniers résultats... Est-ce que vous avez songé à un donneur potentiel ?" "Je..." Hannah ne pouvait soudainement plus parler, les mots se retrouvèrent coincés dans sa gorge, son coeur battant à tout rompre dans sa poitrine tandis que son esprit essayait de réaliser ce qui était en train de se passer. Il y a des années de cela, c'était également un médecin qui lui avait dit que non, jamais elle ne pourrait donner la vie, que jamais elle ne serait mère et maintenant il y avait un espoir que... "Veuillez m'excuser je... je viens de me souvenir que j'avais un autre rendez vous important." Hannah se leva, trop vite elle ignora complètement les signaux mis en place par son corps et tenta de mettre le plus de distance entre elle et l'hôpital. Elle n'attendit même pas pour l'ascenseur et dévala les marches, sa poitrine lui faisant mal, incapable de respirer. Qu'est-ce qui se passait ? Était-elle en train de paniquer ? Hannah n'avait plus le contrôle sur rien et elle fut obligée de ralentir dans la cage d'escaliers, se concentrant sur sa respiration, et sur rien d'autre. Son esprit ne voulait pas se taire, il continuer d'hurler et une partie d'elle était contente, contente de savoir qu'elle n'était pas cassée, qu'elle était comme les autres et qu'elle pouvait donner la vie. Hannah posa une main sur son ventre et elle finit par lâcher un rire nerveux. Pourquoi paniquait-elle, elle avait tout ce qu'elle voulait non ? Une bonne raison de continuer et Saul. Hannah poussa un autre soupir à cette pensée-là... Elle ne pouvait plus se voiler la face, pas vrai ? Car s'ils faisaient ça, s'ils se lançaient dans tout ça, si le brun acceptait par elle ne savait quel miracle d'être le père de son enfant, ils ne seraient définitivement plus amis et bien plus que de simple amants. Hannah inspira et expira profondément et elle finit par s'asseoir, juste là et elle envoya un message à Saul.
- Citation :
- Est-ce que tu peux venir me chercher ? Je suis dans la cage d'escalier de la clinique de Toowong. Je vais bien. Je viens juste d'apprendre quelque chose d'important et je crois que je vais avoir besoin de toi. Vraiment.
Hannah relut son message avant d'appuyer sur envoyer. Elle avait fait mieux comme appel au secours, mais c'était la première fois qu'elle était aussi perdue. |
| | | | (#)Mer 10 Mai 2017 - 6:25 | |
| C'était toujours de bon matin que Saul était amené à quitter les draps douillets dans lesquels Hannah et lui avaient dormi, et avec regret qu'il lui fallait chaque fois laisser la comédienne derrière lui pour démarrer ce qui s'annonçait toujours comme une longue journée. Alors, même pressé, même mis en retard par un réveil capricieux, le brun trouvait toujours le temps de s'attarder tout près de la comédienne, pour simplement l'observer, endormie, inoffensive, et toujours si radieuse. Une habitude qu'il avait prise au lendemain d'une de leurs premières nuits ensemble, lorsqu'en quittant Hannah il s'était senti animé d'une angoisse saisissante. Celle que leur histoire, sur laquelle ils peinaient encore tous les deux à mettre des mots, n'échappe peut être pas à la règle qui semblait vouloir qu'il gâche ce qu'il avait de plus précieux et fasse souffrir plusieurs cœurs au passage. Car souvent, dans les bras de la brune, Saul s'égarait en pensées, réalisant que ce qu'ils avaient aujourd'hui était né d'une suite d'erreurs, de mauvaises décisions, de souffrances aussi, et de choses qui auraient pu les épargner mais qui dans le même temps n'auraient peut être jamais placé cette Hannah sur sa route. La Hannah si sensible, vulnérable et attendrissante qui s'était fait une place de choix dans son cœur, avant de le conquérir. La Hannah qui ne jouait plus ni le jeu de la scène, ni celui des photographes. La Hannah nature, spontanée, qui pouvait décider de fausser compagnie à son père et à son équipe le jour de son anniversaire, ou de sortir d'un gâteau géant à moitié nue. Non, probablement que s'il n'avait pas précipité la fin de son mariage avec Elsie et par la même occasion écrit l'issue de sa liaison avec Meg, ou que si la comédienne n'avait pas choisi de renoncer à Jamie, alors jamais ils ne se seraient éveillés au fond d'un même lit, enlacés comme deux âmes sœurs trop longtemps séparées l'une de l'autre. Une idée qui savait l'exalter lorsque leurs deux bouches échangeaient un baiser ou que leurs deux corps partageaient une étreinte, mais qui parfois savait aussi lui rappeler que tout était sans doute voué à finir un jour. Et d'une fin, Saul n'en voulait pas pour Hannah et lui. Parce qu'après des mois teintés d'échecs et de remises en question, il avait pour la première fois retrouvé le goût d'avancer lorsque cette tendre flamme s'était allumée entre la brune et lui. Lorsqu'il avait lu, rien qu'en sondant son regard, que ce qu'il voulait elle le voulait autant que lui. C'est ainsi que chaque matin, il restait quelques instants, la détaillant et gravant la douce image d'une Hannah assoupie dans un coin de son esprit. Comme une garantie, celle que ces instants là ne le quitteraient jamais, même si elle devait un jour elle aussi regretter de lui avoir cédé son cœur. Et ce matin, c'est étonnamment en avance qu'il avait finalement pris la direction du bureau, grimpant à l'arrière du taxi qui le déposait le plus souvent à la compagnie avant d'y retrouver Vance et plusieurs de ses collègues pour la réunion hebdomadaire. « Patty n'est pas là ? » Fut la première remarque qui lui échappa tandis qu'en entrant dans la salle où l'équipe se réunirait, il constata que le siège occupé par son associée était vide. « Tu n'as pas eu sa note ? Elle est en Chypre jusqu'à la fin de la semaine prochaine. Elle s'est apparemment offert des vacances avec sa conquête du moment. » Saul adopta une expression un brin surprise, puis répliqua. « Non, elle ne m'avait rien dit. Mais tu sais, ça va faire quelques temps qu'on ne se dit plus grand chose, elle et moi. » Rien de bien étonnant, donc, au fait que la blonde n'ait pas jugé bon de l'informer de ce voyage soudain. Depuis le début de l'année, celle-ci préférait échanger avec lui au sujet de leurs différends professionnels. La réunion put ainsi commencer une fois tous les protagonistes installés, et effleura divers sujets, à commencer par les projets qu'ils monteraient et le bilan de leurs dernières représentations. Un bilan positif, qui valut à Saul de déplorer l'absence de Patty, qui aurait peut être ainsi reconnu qu'en dépit de ses récents déboires personnels, la compagnie se portait toujours aussi bien. Alternant entre des prises de notes assidues et ses interventions, Saul entendit bientôt son téléphone vibrer et s'en empara par réflexe, toujours inquiet qu'il puisse s'agir d'Elsie, de Carmen ou de quoi que ce soit qui concernerait ses enfants. Mais c'est un message d'Hannah qu'il découvrit bientôt, et son sang ne fit qu'un tour. - Hannah a écrit:
- Est-ce que tu peux venir me chercher ? Je suis dans la cage d'escalier de la clinique de Toowong. Je vais bien. Je viens juste d'apprendre quelque chose d'important et je crois que je vais avoir besoin de toi. Vraiment.
Saul déglutit à la simple lecture du terme « clinique » et à l'idée qu'Hannah ait pu avoir une bonne raison d'atterrir dans un tel endroit. Son message restait évasif et ne visait certainement pas à l'alarmer, mais c'était plus fort que lui, avoir l'habitude de fréquenter des hôpitaux impliquait qu'il s'attende toujours au pire. Alors, se levant d'un bon de sa chaise, il ne se souvint qu'après quelques secondes qu'il se trouvait toujours dans la salle de réunion, au milieu de ses associés et de leurs investisseurs. Ce n'est qu'au moment où Vance s'adressa à lui qu'il atterrit. « Un problème ? » Saul passa une main contre sa nuque et expira. « C'est … j'ai rendez-vous à Toowong. Une urgence. Je ne sais pas combien de temps ça risque de me prendre, mais je ne pense pas repasser avant demain. Je suis désolé. » Vance et lui entreprirent de se rapprocher de la porte de la salle, lorsque son associé se tourna complètement vers lui, l'air plus concerné. « Rien de grave, j'espère. » Le brun haussa les épaules, résigné. « Je ne sais pas encore. C'est … c'est Hannah. J'ai l'impression qu'il se passe quelque chose, et je m'inquiète. » Et il suffisait de le voir s'agiter à la simple idée d'ignorer de quoi il en était réellement pour deviner qu'il prenait ça très à cœur et ne soufflerait pas tant qu'il n'aurait pas eu la brune face à lui pour lui raconté ce qui s'était passé et quelle était cette chose importante dont elle parlait dans son message. « Alors ne la fais pas attendre. Où est-ce que tu dois la retrouver ? Je suis garé juste en bas, je peux te déposer si tu veux. » En d'autres circonstances, Saul lui aurait certainement répondu qu'il se débrouillerait seul et qu'il pouvait reprendre la réunion là où ils l'avaient arrêté, mais aujourd'hui il était plein de trop d'angoisse et de trop de questionnements pour ne pas accepter la proposition de son ami. C'est ainsi qu'il lui parla de la clinique, qu'ils rejoignirent ensemble après quelques minutes d'un trajet qui lui parut interminable. Une fois la voiture de Vance à l'arrêt sur le parking, Saul sentit son angoisse s'intensifier encore d'avantage. « Voilà, on y est. T'essaies de me tenir au courant lorsque t'en sais un peu plus ? » Le brun acquiesça, doucement, détachant sa ceinture avant d'ouvrir la portière. « J'essaierai. » Et s'apprêtant à se précipiter à l'intérieur, il fut néanmoins coupé dans son élan lorsque Vance l'accosta une dernière fois, le forçant à se retourner. « Eh, Saul. » Le blond souffla, un sourire empathique sur les lèvres. « Je suis sûr que ça n'est rien. » Lui ne pouvait pas encore en être certain, mais comme souvent le soutien de Vance s'avérait précieux pour lui, d'autant plus alors que comme beaucoup d'autres il aurait pu se détourner de lui plusieurs mois plus tôt. « Merci pour tout. Maintenant rentre et ne te tracasse pas, d'accord ? » Lui s'en ferait bien assez de son coté et ne tenait pas à ce que son associé passe le reste de la journée à faire fonctionner son imagination et à scruter son téléphone dans l'espoir d'avoir des nouvelles. Après un dernier sourire, Saul finit par rejoindre l'intérieur de l'établissement, n'attendant pas davantage pour prendre la direction de la première cage d'escaliers qu'il aperçut, espérant y trouver la brune. Il gravit ainsi les marches avec précipitation, balayant chaque recoin du regard. « Hannah ? » C'est finalement après quelques minutes d'une angoissante ascension qu'au moment de monter une nouvelle série de marches, il finit par l'apercevoir, assise sur l'une d'elle. « Hann... » S'approchant sans plus attendre, il s'assit à ses cotés et ne résista pas à l'envie de la serrer un moment tout contre lui, encore animé de l'angoisse qui l'avait pétrifié dès lors qu'il avait lu son sms. L'avoir près de lui, voir qu'elle ne semblait pas blessée ni en état de choc, ça suffisait à l'apaiser en partie mais pas à le calmer entièrement. « Qu'est-ce qui se passe ? J'ai eu une de ces peurs quand j'ai lu que tu étais ici … Il s'est passé quelque chose ? Tu as du voir un médecin ? » Les questions fusaient à la même vitesse qu'elles avaient parcouru son esprit quelques instants plus tôt, et Saul finit par passer une main sur son front, soupirant avant de poser un regard inquiet sur la brune. « Hannah, je suis là. Je sais bien qu'on n'a pas encore vraiment eu l'occasion de parler, de tout ça … de nous deux. Mais je suis là. Alors s'il y a quelque chose, quoi que ce soit, tu sais que tu peux m'en parler. Tu sais que tu n'es pas seule. » Et finissant par serrer sa main dans la sienne, il n'ajouta plus un mot et se contenta de détailler son regard, comme s'il espérait déjà y lire une indication, le moindre indice qui l'aiderait à comprendre et à se rassurer. Il pouvait tout entendre, pourvu qu'elle se sache en confiance avec lui. |
| | | | (#)Jeu 11 Mai 2017 - 21:24 | |
| Hannah ne perdait pas le contrôle, jamais. Elle était la fille de Nathan Siede, Hannah Sara Siede, l'enfant d'une union quasiment sacrée qui représentait le meilleur de l'élite de Manhattan. Paniquer n'était jamais au rendez vous, non. À six ans, quand sa mère avait fini par s'éteindre, elle avait sans doute versé quelques larmes, une main dans celle de son père et c'était probablement la seule fois où il l'avait laissée s'exprimer ainsi et montrer sa peine à la vue de tous. Tout le reste devait être froid et calculé afin de ne jamais laisser les autres savoir ce qu'il y avait de l'autre côté. Elle avait eu seize ans la deuxième fois qu'elle avait versé des larmes devant son père, la jeune adolescente qu'elle avait été alors venant de renoncer son premier amour sous les ordres de Nathan. Il lui avait dit de ravaler ses larmes et de s'assagir, lui rappelant qu'aucune faiblesse n'était tolérée. Et elle ne l'avait jamais oublié, jamais, c'était une leçon qui était ancrée dans sa chair et en dehors de la scène, là où elle existait à travers les émotions des autres, Hannah s'était efforcée de sourire et de garder les épaules bien droites face à tout. Face à absolument tout. Elle essuyait les critiques et les insultes comme personne, prenant tout comme un compliment, le sourire aux bord des lèvres et une cigarette déjà dans la main droite. Il y a quelques mois de cela, Hannah aurait été incapable de faire la différence entre son propre visage et le masque qu'elle portait en permanence. Parce qu'elle devait le faire, parce que c'était beaucoup plus simple ainsi. Il y a quelques mois cette nouvelle information délivrée par son médecin lui aurait valu un simple battement de sourcils et un merci des plus réglementaire. Mais elle n'était plus cette personne. Ce coeur qui battait à tout rompre dans sa poitrine et qui lui faisait mal, se débattait et lui faisait enfin tout ressentir, tout comme une personne normale. Hannah inspira et expira profondément, posant son téléphone à plat sur la marche en dessous d'elle. Un coup d'oeil jeté à ses mains et elle réalisa que ces dernières étaient tremblantes et ce malgré ses meilleures efforts pour tout stopper. Elle qui était si brillante pour faire plier son corps à sa volonté sur scène... Où était donc la brillante actrice à cette seconde précise ? Elle avait fui, fui et avait laissé place à une femme peu sûre d'elle. Qui pour la première fois pouvait vraiment avoir ce qui aurait pu la rendre heureuse et qui était complètement terrifiée par cette idée. Car ce n'était pas vraiment l'argent ou les chaussures qui faisaient qu'elle était Hannah, non, c'était ce besoin vital d'être heureuse à tout prix, une chose que Nathan n'avait jamais compris et qu'il aurait voulu étouffer dans l'oeuf. La voir ressentir ne faisait pas parti des priorités de son père elle en était certaine et il l'aurait surement jugée en la voyant ainsi. Hannah se maudit intérieurement et tenta de penser à autre chose. Elle ignora la main qui se posait sans cesse sur son ventre, comme si et dirigea toutes ses pensées vers Saul. Qui viendrait certainement dans quelques minutes et qui ne la jugerait pas. Elle pourrait se cacher dans son cou et oublier tous ses doutes et toutes ses peurs pour quelques minutes. Quelques secondes même. C'était tout ce qu'il lui fallait dans le fond, quelques secondes avec Saul avait un goût d'éternité et c'était tout ce qu'Hannah voulait. Sa respiration et son rythme cardiaque se calmèrent peu à peu et la brune inspira longuement, songeant désormais à ce qu'elle allait lui dire. La vérité, rien d'autre, il méritait de savoir et s'il allait partager sa vie, il devait savoir et voir toutes les autres cicatrices qu'Hannah avait tenté de lui cacher. Elle n'avait jamais été aussi vulnérable, personne ne l'avait vue comme ça et la brune croisa les bras sur sa poitrine, ayant soudainement trop froid malgré la température ambiante. Et si... et s'il disait non, et si cette conversation s'achevait par Saul qui faisait ses valises et qui s'effaçait peu à peu dans la distance. Dans un sens, ce n'était pas ça qui l'effrayait, ce qui lui faisait peur c'était qu'elle était capable de le laisser partir si c'était ça qui le rendait heureux. Si c'était ça qui le faisait sourire au point que des rides apparaissent au coin de ses yeux comme à chaque fois qu'Hannah faisait le pitre devant lui eh bien... elle le laisserait partir pas vrai ? Si ce n'était pas elle qui le rendait heureux, elle ne devait pas être égoïste et faire ce qui était mieux pour lui... Parce qu'elle l'aimait. Hannah inspira pronfondément lorsqu'elle en arriva à cette conclusion et elle se passa une main dans les cheveux. Elle le savait déjà, elle l'avait déjà compris mais tout devenait réel à cette seconde précise et encore plus quand ce fut la voix de Saul qui parvint à ses oreilles. Le brun entra dans son champ de vision quelques minutes plus tard et Hannah eut un sourire triste en voyant son air paniqué."Je vais bien... enfin je crois. Je crois que je vais bien." dit-elle lentement tandis qu'il s'asseyait déjà à ses cotés. Idiote, se dit l'actrice, bien sûr qu'il s'était inquiété à son tour, c'était Saul. Pourtant, Hannah s'agrippa quelques instants à la veste de Saul quand il la serra contre lui, la brune profitant encore plus du moment. Elle ne le quitta pas du regard face à ses questions et elle hocha lentement la tête. Ils en étaient arrivés à la même conclusion; tant pis si ce n'était pas l'endroit idéal... il n'y en aurait jamais de toute façon. "Merci d'être venu... j'espère que je ne t'ai pas pas trop dérangé. C'est stupide, vraiment." La brune lui épargnerait les détails des dernières minutes, elle préféra porter une main à son visage, comme si elle essayait de mémoriser tous les contours et tous les détails qu'elle aimait tant. "Et Saul... Je sais." Hannah déposa un baiser au coin de ses lèvres, comme elle avait si bien l'habitude de le faire désormais et elle s'écarta légèrement de lui. Elle ne savait pas par où commencer, avec Saul, il n'y avait aucune tactique particulière, elle savait que le brun l'écouterait même si son discours était désorganisé... Hannah regarda un instant leur deux mains liées et elle releva le regard vers lui. "Il faut qu'on parle, je m'en suis rendue compte après mon rendez vous, il y a quelques minutes. On a évité le sujet assez longtemps alors..." Alors arrêtons de nous voiler la face, se retint d'elle d'ajouter. "Mais je vais commencer par le début et la raison qui fait que je suis là aujourd'hui et pourquoi je suis roulée en boule dans une cage d'escalier en train de ruiner un modèle unique de chez Chanel..." Hannah eut un léger rire, attrapant l'autre main de Saul avec la sienne. Elle ressentait enfin ce le metteur en scène avait du subir en Décembre, pendant sa confession, il n'y avait aucun moyen de savoir comment il réagirait, il fallait juste qu'elle lui fasse confiance. "J'avais rendez vous avec ... mon gynécologue. Tu ne le sais sans doute pas, peu de personnes sont au courant et même mon père ne sait rien mais... je ne peux pas avoir d'enfant. J'ai eu un accident de cheval il y a des années de cela et il y a eu des complications. Je sais ce que tu vas me dire je n'ai pas de cicatrices mais... avoir de l'argent ça sert." Hannah eut un sourire sarcastique pour ne pas lui parler de son long séjour à l'hôpital, l'impatience de son père et les opérations qu'elle avait dû subir. Comme beaucoup de choses traumatisantes dans sa vie, Hannah n'en parlait pas et prétendait qu'elles étaient arrivées à une autre personne et pas à elle. Mais cet incident là l'avait marquée et avait façonné sa façon de vivre pendant des années et surtout ses relations. Apprendre à seulement 20 ans qu'on ne pouvait pas fonder de famille était dévastateur. Pourquoi essayer ? Pourquoi s'attacher alors ? Autant se jouer de tout et de tous alors... Non, Hannah n'utilisait pas cet argument pour excuser sa conduite d'avant, cela avait juste été un des éléments, et maintenant Saul pouvait un peu mieux la cerner. "Bref. J'avais... accepté l'idée, enfin je m'y étais faite je crois. C'est assez étrange de ne pas avoir le choix dans ces moments-là mais... j'ai fini par m'y faire et par faire des check up réguliers histoire de." Hannah haussa les épaules. Accepter l'idée. Ça paraissait si simple, mais comment lui dire qu'elle avait eu l'impression qu'on l'amputait d'une partie d'elle-même, qu'on lui enlevait un choix important, une décision cruciale et qu'on l'avait privée de sa liberté dans un sens. "À New York mon médecin m'a dit qu'il y avait du progrès et j'ai fui avant d'avoir les résultats finaux. Mais maintenant je sais. Je sais que c'est possible, et que je pourrais avoir des enfants un jour, en utilisant des moyens détournés." Hannah, qui fixait les mains de Saul depuis quelques minutes déjà pour se distraire, lui fit un regard plus qu'appuyé. "Et tu connais les médecins et leur tact légendaire. Ils m'ont déjà demandé si j'avais songé à un donneur potentiel pour ... ça." Elle marqua une nouvelle pause, ses yeux toujours plantés dans ceux de Saul. "Et si tu te souviens bien il y a une question que je ne t'avais jamais posé à New York..." Peut-être qu'il n'y songeait plus, mais Hannah si. Une idée folle lui avait traversé l'esprit à l'époque. Il était le seul homme qui lui était venu à l'esprit, elle se savait incapable d'accepter un donneur anonyme et Saul, à ce moment là, avait été un candidat parfait : un père de famille adulé, un mari exemplaire et un artiste accompli. Que pouvait-elle demander de plus ? Maintenant, Elsie ne faisait plus partie de l'équation. Maintenant. "Mais ça serait complètement fou, non ? Je veux dire, tu es toujours marié techniquement et je ne sais même pas si on est ensemble. Je veux dire... " Le ton d'Hannah s'était accéléré, traduisant une certaine nervosité qui lui était étrangère. "Ça, c'est tout ce que je veux, juste être avec toi." avoua t-elle à demi-voix. "Le timing est foireux je sais et tu auras surement besoin de temps à toi une fois que tu seras célibataire... alors je ne vois pas comment je pourrais te demander ça ou d'être avec moi... comme un vrai couple." Hannah se refusait à le dire pour le moment, refusait de l'appeler le père de son enfant, car aucune vie ne se formait dans son ventre et elle s'interdisait d'y penser. Saul avait une vie à lui, elle ne faisait qu'y être de passage et il la rendait meilleure, c'était certain. Un futur avec lui ? Cela paraissait trop parfait. |
| | | | (#)Mar 16 Mai 2017 - 2:23 | |
| Si personne n'aimait probablement fouler le sol d'un hôpital en raison de l'ambiance singulière qui y régnait toujours, Saul avait quant à lui un rapport plus particulier encore avec ce genre d'endroits. Sans doute cela venait-il du fait que sa mère, souffrant de la maladie d'Alzheimer, avait fréquenté suffisamment de cliniques, de centres et d'autres endroits pas beaucoup plus gais durant les onze dernières années pour l'avoir malgré elle familiarisé avec cet environnement froid qui pourtant parvenait toujours à l'angoisser. Il y avait aussi eu l'hospitalisation de son père, à la suite de la tempête d'octobre dernier, et la triste issue qui avait rapidement suivi. Un épisode douloureux qui lui aussi avait contribué à ce que Saul redoute aujourd'hui de devoir à nouveau poser un pied dans ces lieux où les bonnes nouvelles restaient rares et où les nerfs étaient souvent mis à rude épreuve. Alors, quand il lut le sms d'Hannah et qu'il comprit qu'elle était quelque part dans un hôpital, celui-là même où il avait fait ses adieux à son père quelques mois plus tôt, Saul se sentit envahi d'une angoisse qu'il n'était pas pressé de revivre à nouveau. Car une fois de plus, il se retrouva impuissant, démuni à l'idée que l'un des êtres auxquels il tenait le plus soit peut être en danger. Parce qu'Hannah s'était montrée rassurante à travers ces quelques lignes, et ce comme si elle savait comment il fonctionnait et avec quelle facilité il lui était possible de s'imaginer le pire, mais que Saul aussi la connaissait assez pour savoir qu'elle ne se rendrait pas dans ce gendre d'endroits pour trois fois rien. Alors oui, il ne put faire autrement que de s'inquiéter, quittant la réunion qu'il avait débuté et filant à toute vitesse en compagnie de Vance, qui aussitôt le conduisit jusqu'au St Vincent's Hospital. Sur place, l'attente ne se fit pas moins difficile tandis qu'il lui fallut encore rejoindre la brune depuis l'endroit où elle avait envoyé son message. Une cage d'escaliers, qu'il remonta tout en imaginant mille et uns scénarios qui pourraient expliquer la venue d'Hannah et, surtout, la raison pour laquelle elle avait visiblement attendu d'être informée d'une nouvelle importante pour le tenir au courant. Le brun montait alors énergiquement ces marches, lorsqu'enfin il l'aperçut. Là, sans réfléchir, et parce qu'il n'avait sans doute jamais eu autant besoin de la serrer contre lui, il la rejoignit sur la marche où elle avait pris place et l'étreignit, longuement, avec autant de chaleur que de fébrilité. Il était passé par tout un flot d'émotions en l'espace de quelques minutes, et même à cet instant, Saul ne savait pas s'il devait souffler de soulagement à l'idée qu'Hannah ne semble pas mal en point ou s'il devait s'inquiéter de ce qui demeurait pour lui une véritable interrogation : pourquoi cet hôpital ? Les quelques mots bientôt soufflés par la brune eurent le don de le soulager quelques peu, mais le brun restait fébrile, envahi d'une déroutante incertitude. « Bon sang Hannah, tu n'aurais jamais du venir ici toute seule. » Il souffla alors, contre la peau de son cou, avant de se déloger partiellement des bras de la comédienne pour croiser à nouveau son regard. Il ne savait pas encore dans quelles circonstances Hannah était arrivée là, mais l'idée qu'elle ait fait le déplacement seule lui était difficile à supporter, peut être parce qu'il était bien placé pour savoir qu'il s'agissait du genre d'endroit où un peu de compagnie ne faisait jamais de mal. La suite lui valut de froncer doucement les sourcils, tandis qu'il souffla. « Tu plaisantes ? » Et sentant les doigts de la brune détailler la peau de son visage, il ferma les yeux une seconde, oubliant presque qu'ils étaient toujours dans cette cage d’escaliers, avant de les rouvrir pour lui sourire, tendrement. « C'est ici qu'est ma place, auprès de toi. Peu importe la raison qui t'a conduite dans cet hôpital, tu as bien fait de me demander de te rejoindre. Je ne me serais jamais pardonné de ne pas l'avoir fait. » Et tenant à ce qu'elle sache qu'il serait là pour elle quel que soit ce qu'elle avait appris et qu'elle n'était pas seule, Saul répondit bientôt au baiser qu'elle déposa sur ses lèvres, laissant les siennes embrasser sa mâchoire lorsque leurs deux visages s'éloignèrent doucement et que le ton de la conversation se fit un peu différent. Plus solennel, lorsqu'Hannah revint sur l'idée que le moment soit peut être venu d'avoir la conversation qu'ils repoussaient depuis déjà quelques temps. Depuis leur première nuit ensemble, et la façon dont les choses s'étaient précisées entre eux. Leur relation, elle, n'était pas encore à proprement parlé officielle, et c'est en ça qu'il leur fallait discuter. « Il le faut, oui. » Saul répondit alors, resserrant légèrement la pression de ses mains sur celles d'Hannah, par envie de lui prouver qu'il était prêt à ce qu'ils se parlent sincèrement, autant que parce que la jeune femme se disait sur le point de se confier à lui, et qu'une fois encore il voulait lui assurer qu'il était là, qu'il le serait toujours. Hannah débuta alors un récit qui le prit de court dès ses premiers mots, lorsqu'il fut question de son gynécologue, de cet accident qu'elle disait avoir eu étant plus jeune et de ses conséquences … Le brun sentit sa gorge se nouer tandis qu'il plongea son regard dans le sien. Il n'avait rien pressenti, rien deviné, alors qu'il était dernièrement parvenu à la cerner à bien des niveaux et qu'il se sentait parfois si proche d'Hannah qu'il avait comme l'impression qu'ils avaient toujours été indirectement connectés, elle et lui. Et imaginer qu'elle ait pu traverser tout ça, renoncer à un rêve certainement commun à toute femme à un moment ou à un autre de sa vie, ça lui serrait intensément le cœur. « Je ... » Saul chercha ses mots, caressant cette fois le dessus de ses mains à l'aide de ses pouces, puis souffla avec un dépit et une empathie sincères. « Je suis désolé. C'est vrai, je l'ignorais. » Bien des choses s'étaient peut être répandues dans la presse à scandales au sujet de la comédienne, mais lui qui avait fait tout son possible pour ne pas accorder plus d'attention que nécessaire à ces torchons indiscrets n'avait rien su de tout ça. Et bien que cela coûte certainement à Hannah de lui faire cette confession aujourd'hui, il préférait l'apprendre de sa bouche. La laissant poursuivre, ses yeux ne quittant toujours pas les siens, Saul s’abreuva de chacun de ses mots et sentit son cœur se gonfler d'une émotion particulière lorsque la jeune femme en vint à énoncer que tout espoir n'était finalement peut être pas perdu pour elle d'avoir un jour des enfants. Elle évoqua en effet des moyens détournés, et il releva, hésitant. « Est-ce qu'on parle bien … d'une insémination artificielle ? » C'était ce qu'il croyait deviner, autant à la façon dont Hannah avait sous-entendue la chose que parce qu'il en connaissait lui-même un peu plus qu'il ne le voudrait sur la question. Et pour cause, à l'époque où Elsie et lui peinaient à fonder une famille, celle-ci s'était aussi posée. « Je me souviens, oui. » Saul reprit ensuite tout doucement, les lèvres légèrement pincées, lorsqu'Hannah fit allusion à cette question qu'elle n'avait jamais pu lui poser, quelques mois plus tôt. Une question restée en suspend lorsque son amitié avec la jeune femme avait basculé, un soir de janvier, dans son salon new-yorkais. Ainsi y repenser aujourd'hui l'animait toujours d'une intense mélancolie, et plus encore à présent qu'il croyait comprendre à coté de quelle discussion ils étaient passés lorsque leurs deux routes s'étaient momentanément éloignées. « Tu ne me l'as jamais posée parce que j'ai tout gâché, sans le vouloir, ce jour-là. Brusquement, tu n'avais sûrement plus aucune envie de te tourner vers moi, et je … je m'en veux d'autant plus maintenant que je sais ce que tu m'aurais sûrement demandé si les choses s'étaient passées autrement. » Troublé, et plein d'une émotion accablante qui lui valut de soupirer face à sa propre bêtise, Saul ajouta tout bas. « J'aurais sûrement du insister, même si ça n'aurait peut être servi à rien … Je te demande pardon. » Parce qu'il comprenait maintenant à quel point il avait du la décevoir pour qu'une question qu'elle se sentait prête à lui poser reste logée dans un coin de son esprit et de son cœur. Parce qu'il l'avait contrainte à vivre un peu plus longtemps avec tout ça, sans imaginer un seul instant ce qu'elle était prête à lui demander. Alors, quand Hannah poursuivit, effleurant du doigt le problème qui semblait aujourd'hui se poser face à l'idée d'un avenir commun, Saul délogea lentement ses mains de celles de la brune pour les déposer de part et d'autre du visage de la comédienne. « Hannah. » Dans un souffle, il tenta d'effacer tous les doutes dont il la sentait prisonnière, lui volant un doux baiser avant d'ajouter. « Je veux être avec toi, moi aussi. Je ne peux pas … te promettre que ce sera parfait, parce que j'ai fait suffisamment d'erreurs pour savoir que rien ne l'est jamais vraiment et que tous les chemins, même ceux qui semblent les plus sûrs, sont semés d’embûches. Tout comme je ne peux pas te promettre qu'avec Elsie les choses se régleront rapidement et pour le mieux. Ni que ça ne créera pas une nouvelle vague de regrets et de souffrance. » Mais Hannah devait déjà s'en douter, pour l'avoir vu rentrer tracassé des dizaines de fois après d’innombrables rendez-vous avec leurs avocats et pour l'avoir souvent sondé lorsqu'il s'angoissait au point de se perdre dans ses propres pensées. Oui, Hannah savait tout ça, et même si ça n'était sûrement pas une vérité plaisante à entendre pour elle, il savait qu'elle n'aurait pas voulu qu'il lui mente ou enjolive la situation. « Car ça prendra certainement du temps, et qu'aussi longtemps qu'on l'encouragera à faire durer les choses pour profiter de l'avantage qu'elle aura sur moi et me faire payer ce qu'elle a subi par ma faute … je resterai cet homme marié, malhonnête et éclaboussé par le scandale. Et même après, ma lâcheté risque de me poursuivre. Longtemps, peut être pour toujours. » Son regard interrogea le sien, comme s'il tentait d'y lire quoi que ce soit qui lui indiquerait qu'Hannah était vraiment prête à supporter tout ça, pour eux, et ce même si cette histoire n'aurait pas toujours des allures de contes de fées. « Mais ça n'aura aucune importance si à tes yeux je suis encore digne d'un peu de confiance. Et digne d'être avec toi. Parce que je te l'ai dit, il n'y a rien que je désire plus. » Et ça, lui était prêt à l'assumer. Peu importe que ça complique encore davantage les choses avec Elsie ou que ça lui attire à nouveau les foudres d'un Tommy ou d'une Patty, il avait déjà risqué tout ce qu'il avait par amour et était prêt à le refaire, mais cette fois sans se cacher ni prétendre être un autre. « Quant au reste ... » Saul saisit de nouveau les deux mains d'Hannah, inspirant posément avant d'esquisser, enfin, un plus large sourire. « Pose-moi ta question. » Peu importe qu'il croit déjà la connaître, peu importe le timing, peu importe sa situation qui de toute façon ne se résoudrait ni en un jour ni en un coup de baguette magique … Hannah avait besoin de la lui poser. Elle en avait besoin depuis des mois, et lui avait besoin qu'elle sache qu'ici ça n'était plus New York et qu'il n'y avait plus ni secrets ni quoi que ce soit pour la dissuader de formuler cette demande qui certainement importait plus que n'importe quoi d'autre pour elle. |
| | | | (#)Ven 26 Mai 2017 - 11:00 | |
| Peut-être qu'en parler était une mauvaise idée. Peut-être qu'Hannah ne se confiait jamais pour une raison et qu'une fois que les mots s'étaient échappés de ses lèvres, elle ne pouvait plus jamais les récupérer. Mais c'était ça la question dans le fond... voulait-elle les récupérer ? Ou décidait-elle de faire confiance à Saul ? Elle avait déjà fait son choix, elle lui faisait déjà confiance et le symbole de tout ça trônait et brillait autour de son cou, comme une simple parure pour certains mais beaucoup plus pour Hannah et lui. Beaucoup plus et c'était ça qui déroutait toujours Hannah, même maintenant, leurs deux mains enfin noués ensemble, comme ils avaient si bien l'habitude de le faire, comme s'ils pouvaient toujours se suivre et se guérir. Comme si. Plus Hannah poursuivait son récit et sa confession et plus elle avait envie de se taire, de juste se blottir dans le creux de ses bras et attendre que les secondes passent comme ça. Parce qu'il savait à quel point il comptait pour elle, il savait forcément à quel point il était devenu vital et essentiel. Il devait forcément le savoir. Alors pourquoi ne pas rester dans ses bras et laisser le temps faire ce qu'il faisait de mieux... pourquoi pas ? Si Hannah avait pu, elle aurait sorti de son sac la montre que Saul lui avait offert il y a quelques mois de cela et elle les aurait ramené à cette après-midi sur la plage, pas parce qu'elle regrettait tout ce qui s'était passé depuis, non, mais juste parce que tout était plus simple et c'était précisément ça qu'il leur fallait en ce moment. Juste pour quelques heures de plus, avec cet air marin dans les narines et la main de Saul toujours dans la sienne. Il n'y avait rien qui comptait en dehors de cela et elle ne voulait pas que quelque chose ait de l'importance à part lui. Voilà où ils en étaient dans cette relation peu définie et Hannah avait besoin de savoir si les choses étaient équitables, si, par un quelconque miracle, il la voyait comme ça, s'il avait besoin d'elle comme ça. Sous la chaleur des draps, c'était facile de se promettre l'éternité, pendant la nuit, avec les étoiles, c'était facile de crier des pour toujours, mais en pleine journée, dans la pâleur de la réalité ... que restait-il ? Est-ce que tout finissait par s'envoler ou est-ce qu'il y avait quelque chose de solide ? Hannah était probablement aussi perdue que lui, guidée par ce coeur qu'elle n'écoutait d'ordinaire jamais. "Hmm... oui c'est ça, même si le terme technique reste ... technique. Enfin bref, tu as compris l'idée." finit par articuler la brune, une légère moue bien en place sur le visage. Là encore tout nommer déroutait particulièrement Hannah et elle était contente que la première partie de son récit soit fini, revenir sur tous ces évenements-là n'était guère plaisant et Hannah avait vraiment envie de refermer la page sur tout ça. Cette jeune femme, encore une adolescente dans sa tête, qui s'était retrouvée dans un lit d'hôpital plus longtemps que nécessaire ... ce n'était tout simplement pas elle. Elle, elle était là, à tenir les mains de Saul et à continuer de vider son sac, comme elle ne l'avait jamais fait auparavant. Et les valises d'Hannah étaient plus que lourdes à porter, son fardeau parfois immense et elle n'avait jamais vraiment eu de vraies raisons de continuer à trainer tout ça dans la boue. Jusqu'à maintenant. "Je ne t'ai pas posé la question à New York parce que j'étais... complètement terrorisée à l'idée de te perdre." murmura la brune , détournant légèrement son regard de celui de Saul, elle était épuisée par ses propres mots dans le fond, pas habituée à être aussi honnête, sincère et dans le fond, aussi vulnérable. "C'est toujours le cas." dit-elle un peu plus fermement, relevant les yeux vers le brun. Cette phrase voulait tout dire et rien à la fois, mais comment mettre des mots sur tous les sentiments qu'il avait réveillés en elle ? Il ne l'avait pas simplement rendue meilleure, il lui avait donné envie d'être meilleure, pour de bon, sans aucun regard en arrière et pour la personne qu'elle avait été. Et pourtant, le changement était trop beau, trop soudain et elle attendait désespérément la chute, le moment où la gravité la rappèlerait vers le sol et qu'elle se souviendrait que rien ne durait vraiment. La vérité était qu'Hannah avait peur, et que c'était bien pour ça qu'elle n'avait rien fait pour commencer cette discussion qui trainait depuis plus de quelques semaines désormais. La brune inspira profondément, rassurée quelque part par les mains de Saul de part et d'autre de son visage, par le baiser qu'il déposa sur ses lèvres et surtout par la façon qu'il avait de dire son prénom. Elle se retint d'en quémander un autre, bien consciente que ce n'était pas vraiment le moment pour ça et elle eut un maigre sourire aux mots de Saul. Un autre que lui lui aurait surement menti et aurait essayé d'enjoliver la vérité mais pas lui, et puis de toute façon, les mensonges avaient trop régi leur vie respective, il était temps de s'en défaire. La brune hocha la tête quand il lui répéta que son divorce prendrait du temps, Hannah le savait, elle savait qu'il serait marié pendant encore de longs mois et qu'il lui faudrait faire avec. Ce n'était pas un concept qui lui plaisait particulièrement mais elle avait décidé de le ranger dans un coin de sa tête et de ne pas y penser. Ce n'était pas de son ressort et elle connaissait assez Saul pour savoir qu'il aurait préféré la savoir en dehors de tout ça. Elsie et lui avaient besoin de tourner la page sur leur histoire, même si cela devait être long, même si cela devait être brutal, Hannah n'allait pas s'en mêler. Alors elle ferait avec, ils feraient avec, la situation serait bancale, mais elle s'en moquait parfaitement tant qu'elle pouvait toujours rester contre lui et lui serrer la main. "I don't want perfect, I just want you." lâcha enfin Hannah, cette fois-là pour rassurer Saul. Elle n'aimait pas particulièrement le portrait qu'il faisait de lui-même et elle s'empara d'une de ses mains contre sa joue à elle pour déposer un léger baiser dans le creux de sa paume. Saul n'était pas lâche, il était juste humain et admette ne pas avoir les épaules assez larges pour tout supporter était déjà noble en soit. Ce n'était pas un gamin, non c'était un homme au sens premier du terme, qui faisait ce qui était juste avant tout et Hannah ne pouvait pas se défaire de cette image-là qu'elle avait de lui, elle ne pardonnait pas ses fautes non, elle les acceptait, savait que rien n'était noir ou blanc et que la réalité était plus compliquée que ça. Et elle apprenait encore à aimer toutes les facettes de Saul au fur et à mesure qu'elle les découvrait, elle était certaine qu'il y en avait qu'elle n'aimerait pas... et encore même ça elle en doutait, mais Saul ne devait pas se faire d'illusion, Hannah savait comment tout ça marchait, qu'il y aurait des bons et des mauvais jours, mais avec Saul à ses côtés, elle sentait qu'elle pouvait tout faire. Absolument tout. Comme cette idée ridicule qui trottait dans un autre recoin de sa tête depuis quelques mois. Elle, enceinte, c'était complètement stupide pas vrai ? N'importe qui de censé lui aurait trouvé dix bonnes raisons de ne pas se lancer dans une telle aventure, surtout pas avec son rythme de vie actuelle, et pourtant, Saul était là à lui donner un ordre précis. "Pose-moi ta question." Et Hannah ne sut pas ce qui la dérouta le plus, le fait qu'il ait compris qu'elle avait quand même besoin de lui poser la question, justement, ou le sourire qu'il affichait. Comme si tout ne dépendait que d'elle et que sa réponse à lui était déjà claire, parce qu'il voulait tout d'elle. "Je..." Les mots d'Hannah se retrouvèrent coincés dans sa propre gorge et pour la première fois devant lui, elle sentit le rouge lui monter aux joues, la jeune femme pris de court par tout, par lui, son sourire, le fait qu'il ne reculait pas alors qu'il aurait dû la traiter de folle. "Tu m'en demandes beaucoup Saul." articula la brune le fixant du coin des yeux, juste pour s'assurer qu'elle ne rêvait pas. Elle préféra tourner autour du pot et reprendre la conversation depuis le début. "Je tiens juste à dire que je sais que les choses vont trainer en longueur avec Elsie et je m'en fiche. Je veux être avec toi. Je ne suis pas en train de dire qu'il n'y aura pas des jours où ça ne va m'énerver ou juste m'attrister ou me blaser, mais je préfère qu'on en parle maintenant. Je préfère savoir dans quoi je mets les pieds dès le début." Pas comme avant, se retint de marmonner Hannah, se disant qu'il n'apprécierait pas l'ironie. Même elle ne l'appréciait pas dans ce cas précis et préférait ranger ce chapitre de sa vie bien loin. La brune parvint à retrouver son sourire quelques secondes plus tard, elle fixait Saul avec ce qui s'apparentait le plus à de la possessivité à cette seconde précise. "Et il est hors de question que je te laisse repartir... c'est quelque chose que je ne suis pas prête à faire. Donc je sais que les prochains mois seront difficiles, mais je veux être avec toi, maintenant, demain, tout le temps, et ce peu importe le temps que ça prendra. Je ne promets rien, mais je veux juste que tu saches ce que je ressente." La brune s'était déjà posée la question, elle s'était demandée si Saul en valait la peine, si elle ne devait pas juste le laisser partir, régler ses propres problèmes et se trouver un autre type bien. Mais non, son coeur aurait refusé un autre substitut, c'était Saul ou rien. "Je veux dire même quand tu étais encore marié et heureux avec elle tu as été mon seul et unique choix pour tu sais quoi..." Hannah eut un rire nerveux, avant d'arrêter d'éviter le regard de Saul et de le fixer vraiment. La brune se dit d'abord qu'il était particulièrement beau à cet instant précis et elle perdit quelques secondes pour se pencher vers ses lèvres et l'embrasser rapidement. Elle n'allait jamais s'en lasser, de sentir ses lèvres à lui contre les siennes, ce moment précis où ils ne faisaient qu'un ou la façon dont son coeur se soulevait à chaque fois. Non, Hannah n'allait jamais s'en lasser. Elle finit par s'écarter, seulement pour garder les yeux fermés, son front contre celui de Saul. "Je ne dis pas qu'on va se lancer là dedans maintenant, et tu n'est pas obligé de dire oui... je veux juste une réponse honnête ..." Sa voix était à peine plus élevé qu'un murmure et Hannah finit par rouvrit les yeux, prête à figer et capturer leur moment. "Je veux juste savoir si tu accepterais... dans un futur pas si lointain que ça d'être le père de mon ou mes futurs enfants." |
| | | | (#)Mer 7 Juin 2017 - 2:42 | |
| Passés la crainte de savoir Hannah dans cet hôpital et le soulagement de voir que la brune semblait au moins physiquement indemne, c'est à un flot incontrôlable d'interrogations que Saul se retrouva bientôt confronté. Parce que sur ces marches se trouvait assise la femme avec qui il vivait. Celle sans qui il ne se voyait plus avancer. Et celle en partie pour qui il s'était levé chaque matin quand les temps s'étaient fait plus sombres pour lui et que les bonnes raisons de mettre un pied devant l'autre et de relever la tête s'étaient faites de plus en plus rares. Celle qu'il aimait, aussi, comme un amour né au plus joli moment, une âme sœur qui s'était présentée à lui bien des années plus tôt, s'était laissée apprivoiser pour un beau jour tomber le masque, et enfin s'unir à lui. Pour toutes ces raisons, savoir qu'Hannah avait pu avoir une bonne raison de pousser la porte de cette clinique et de marcher, seule, le long de ces couloirs froids, le partageait entre une dévorante angoisse et une impuissance qui semblait décidément s'accrocher à lui chaque fois qu'il pénétrait ces murs. Saul était perdu, accablé de doutes et probablement prêt à entendre un million d'explications plus ou moins rassurantes. Il détaillait chaque trait de son visage, le cœur à l’affût du moindre indice. Il ignorait à cet instant beaucoup de choses, mais ce qu'il savait, en revanche, c'est qu'il serait là pour elle. Quoi qu'Hannah ait à lui annoncer. Quelle que soit la raison pour laquelle elle avait dit avoir besoin de lui. La chaleur avec laquelle il avait tâché de l'envelopper au moment où il l'avait rejoint serait toujours là, à la cajoler, à réchauffer son cœur qui comme souvent semblait en avoir cruellement besoin. Le soin qu'il avait mis à la rapprocher de lui, la tendresse dont il avait fait preuve en lui offrant un baiser, la patience et la compréhension qu'il était prêt à lui offrir même en ignorant tout de ce qu'elle s'apprêtait à lui confesser … Rien de tout ça ne changerait. Ainsi, lorsque la brune se sentit prête à se confier à lui, à lui ouvrir son cœur et à mettre des mots sur ce qu'elle n'avait sans doute jamais eu le courage d'avouer, c'est un Saul réceptif mais surtout ému qui accueillit ses paroles. Hannah était longtemps restée un épais mystère à ses yeux, mais le temps passé avec la brune lui avait déjà permis de la cerner davantage, d'apprendre à découvrir différentes facettes de son être, jusqu'à finalement avoir l'impression de connaître le visage le plus authentique d'Hannah. Mais il restait des parts d'ombres, des détails qui faisaient d'elle une femme teintée d'ambivalence, qu'on ne cernait jamais tout à fait, ou sauf à grand renfort d'efforts et de patience, et Saul réalisait notamment que de nombreux pans de son passé lui restaient inconnus. Ces révélations le saisirent alors au cœur, ébranlant peut être quelques certitudes, dissipant peut être quelques doutes. Dans une caresse, il se montra désolé, luttant contre l'impression déroutante d'avoir peut être eu sous les yeux de quoi comprendre, et lui éviter ce discours assurément pénible. Mais la suite capta de nouveau son attention, et c'est une once d'optimisme qui envahit cette fois la cage d'escaliers. Sa propre expérience personnelle l'incita à questionner Hannah, presque à demi-mot, sur la définition de ces « moyens détournés » qui pourraient un jour lui permettre de fonder une famille. Une famille dont elle semblait tant rêver, sous les yeux d'un Saul attendri qui se prenait à en rêver pour elle, avec elle. Bien sûr qu'elle aurait des enfants. Bien sûr qu'elle donnerait la vie. Le sujet n'avait jamais été effleuré jusqu'ici, et pourtant aujourd'hui l'évidence était là : sous ses yeux. Hannah ferait une mère formidable, attentive, passionnée. Une mère comme celle qu'il avait eu. La réponse soufflée par Hannah confirma son interprétation et il se contenta d'un sourire, infiniment doux. La suite, elle, voulut qu'ils reparlent de New York et de cet épisode qui aujourd'hui encore restait le plus douloureux qu'il ait connu avec Hannah. Car New York avait d'abord sonné comme une fin pour eux, et pour cette relation si particulière qu'ils avaient noué au fil des mois. New York, il l'avait maudit, détesté pendant les semaines qu'il avait passé à douter de la revoir. Presque autant qu'il s'était détesté lui-même après coup. Alors, c'est le regard plein d'une émotion particulière qu'il se remémora ces temps compliqués, et cet échange dans le salon de la brune, où quelques mètres de séparation lui avaient fait l'effet d'un faussé. Ce jour-là, Hannah n'avait pas pu lui poser la question qui déjà hantait son esprit. A cause de lui. Mais la brune fit aujourd'hui preuve d'indulgence, et c'est par un plus doux sourire encore que Saul répondit à ses paroles. « Tu n'as jamais été sur le point de me perdre, Hannah. Jamais. » Il se pencha plus encore vers elle, resserrant la pression de sa main sur la sienne et captant pour de bon son regard, leurs nez se frôlant dans une légère caresse. « Si tu avais décidé de tirer un trait sur moi, ce jour-là, à New York … j'aurais respecté ta décision et je l'aurais comprise, mais je n'aurais pas pu faire de même. En aucun cas. Et c'est pour ça que ça a été si dur, d'ignorer si tu me pardonnerais un jour de t'avoir cachée toute une partie de ma vie, d'ignorer si tu serais de nouveau prête à soutenir mon regard et à m'accorder ta confiance. » Ses mots, il les soufflait avec peine, et une culpabilité encore bien présente. « Parce que je savais que quoi que tu déciderais, je resterai hanté par mes regrets et par l'idée que j'aurai peut être pu dire ou faire quelque chose pour te retenir. » Peut être en vain, sans doute même, à en juger par la détermination dont avait fait preuve Hannah ce jour-là, face à lui. Peut être que tout ce qu'il aurait pu tenter n'aurait rien changé, peut être même qu'il aurait fait pire en pensant faire mieux... mais si elle s'était détournée de lui pour de bon, alors il n'aurait jamais su. Et il aurait du vivre avec ces doutes, en plus de beaucoup d'autres. « Tu ne me perdras pas. » Le brun finit par reprendre, doucement, maintenant toujours son regard bien ancré dans le sien comme pour s'assurer qu'elle comprendrait le sens et la sincérité de chacun de ces mots. « Je suis là, non ? Et je ne compte pas partir. » Et lui souriant dans l'espoir de voir les lèvres de la brune s'étirer dans la même courbe que les siennes, il ajouta. « Je suis là. » Hannah pouvait douter de beaucoup de choses, comme de l'avenir dont ils ne savaient rien et qui pouvait leur réserver toutes sortes de surprises. Saul lui-même était envahi d'interrogations face à l'idée de reprendre sa vie presque à zéro à trente-huit ans, d'aimer à nouveau, de tout offrir de lui-même, sans pudeur ni condition … Mais ni elle ni lui ne pouvait douter du fait qu'à cet instant, ils étaient tous les deux, ensemble dans cette petite bulle qui les réunissait comme si souvent depuis qu'ils s'étaient trouvés. Ils n'en avaient pas le droit. Finalement, les doutes qui semblaient accabler la brune incitèrent Saul à s'ouvrir plus encore, et à mettre des mots sur cette situation où il craignait sans doute de l'emprisonner malgré lui. Une situation qu'il ne lui imposerait jamais, pourtant. Ainsi c'est sans doute pour ça, et pour qu'elle soit bien sûr de vouloir emprunter cette route avec lui, qu'il se montra parfaitement honnête, sans chercher ni à minimiser ni à enjoliver les choses. Oui, il était toujours un homme marié. Oui, le divorce qui s'annonçait entre Elsie et lui remuerait certainement pas mal de boue, comme il installerait certainement un climat particulier, parfois inconfortable. Oui, tout ça pourrait rendre les choses difficiles au début, si bien que leur histoire n'aurait peut être pas toujours des airs de contes de fées. Mais lui, en sachant tout ça et combien il lui serait pourtant plus facile de se présenter face au juge en bon célibataire, savait aussi et surtout que ça en vaudrait la peine, à chaque instant, si Hannah se fiait à lui. Si elle savait qu'il voulait être avec elle, peu importe les obstacles, peu importe les complications. Et à la réponse bientôt soufflée par la brune, c'est un doux soulagement qui s'empara justement de lui. Hannah disait vouloir de lui, de tout ça, malgré tout. Et c'était là tout ce qu'il avait besoin d'entendre pour être d'autant plus sûr lui-même. Un fin sourire gagna alors ses lèvres lorsqu'il sentit celles d'Hannah se déposer au creux de sa paume, et ils échangèrent un regard profond, dans un court silence qui donna toute sa symbolique à ce moment. Et lorsque Saul reprit finalement la parole, ce fut pour la délivrer. La délivrer de ce poids qu'elle semblait porter depuis New York, si ce n'est depuis plus longtemps. Le poids d'une question restée enfermée dans son cœur, en partie par sa faute. Une question qu'il était temps qu'elle lui pose. Lui, en tout cas, se sentait prêt. La voix d'Hannah résonna à nouveau dans la cage d'escaliers, et Saul resta parfaitement attentif. Sa première remarque le fit d'abord sourire, avec tendresse. La demande dont il était ici question, Saul en connaissait la teneur mais il tenait à l'entendre de sa bouche, sachant pourtant que c'était dans les moments où les mots avaient le plus besoin de sortir qu'il était en général plus durs à les prononcer. La douceur de ses prochaines déclarations, finalement, lui provoqua une émotion qui transparut plus qu'il ne le pensa sans doute sur le sourire qu'il esquissa. « C'est aussi ce que je veux. Et si tu prête à te lancer là-dedans avec moi, si ça n'est pas trop tôt ou trop risqué à tes yeux, alors la seule promesse que je puisse te faire en mon âme et conscience, c'est que je ferai tout pour que ni moi ni aucun des problèmes qui me poursuivent ne te rendent malheureuse. » C'était une promesse qu'il donnait peut être l'impression de faire à demi-mot, avec toute la prudence dont il savait maintenant s'armer pour s'assurer de ne plus blesser ceux qui comptaient pour lui, mais qu'il comptait bien honorer à chaque instant qu'il passerait à ses cotés. « Je ne veux plus avoir de secret pour toi, et tu sais maintenant que tu peux toi aussi tout me dire. Il y aura sûrement des jours où mes vérités seront difficiles à entendre, mais tu as raison, tu mérites de savoir quel est le prix à payer pour vivre auprès d'un homme comme moi. » Un homme qui transportait son lot de casseroles et qui même sans le poids des jugements extérieurs ne serait sans doute jamais tout à fait en paix. « Si un jour tout ça te coûte trop cher, alors nous saurons. » Il reprit, cette fois plus bas encore, baissant légèrement la tête. Une partie de lui espérait que ce jour n'arriverait pas, que jamais Hannah n'en viendrait à se dire que la coupe était pleine, qu'elle en avait trop supporté et qu'il n'en valait plus la peine. Mais une autre partie, elle, savait qu'au moins Hannah ne ferait pas l'erreur qui avait été la sienne de s’enfermer dans une illusion si ça n'était pas la meilleure option pour elle. Lui n'avait pas su voir que son mariage avait passé un cap, mais la brune ne se laisserait pas aveugler. En temps voulu, et si nécessaire, il savait qu'elle agirait. « Mais d'ici là, je ferai tout pour tenir ma promesse et pour ne pas reproduire les erreurs qui m'ont conduit à cette situation. Il y a quelques temps tu m'as demandé d'assumer les conséquences de mes actes, et j'en ai toujours l'intention. » Ça aussi, c'était une promesse. Parce qu'il ne pouvait rien effacer, mais qu'au moins il pouvait faire en sorte d'apprendre de ces épisodes tumultueux qui avaient laissé des traces. Finalement, après un baiser dont il profita jusqu'à la séparation de leurs lèvres, le ton d'Hannah sembla changer, légèrement, tandis qu'elle sembla sur le point de lui poser sa question. Saul prit une légère inspiration, presque aussi tendu que s'il était à sa place. Il savait ce qu'il allait entendre, tout comme il savait déjà ce que ses propres lèvres lui souffleraient une fois sa demande formulée. Mais l'émotion fut réelle, palpable et presque étourdissante lorsqu'Hannah prononça enfin ces quelques mots. Lui, qui quelques mois plus tôt pensait avoir tout perdu et qui encore récemment doutait de pouvoir reconstruire sa vie, se voyait proposer d'aider Hannah à réaliser le plus beau de ses rêves. N'était-ce pas comme le signe qu'il y avait encore un sens à donner à sa vie, et que pour la première fois depuis trois ans, il lui était possible de distribuer du bonheur autour de lui ? « Ce serait pour moi un honneur et un plaisir d'être cet homme, Hannah. » Saul souffla alors, d'une voix qui ne trompait personne sur sa fébrilité, tandis qu'une de ses mains remonta jusqu'à la joue de la brune, que son pouce effleura distraitement. « C'est oui, bien sûr. » Et scellant cette réponse aux allures de nouvelle promesse par un baiser riche de sens, Saul ne se détacha d'elle que pour laisser ses lèvres lui livrer une confession qu'il faisait rarement, mais qui comptait parmi les choses qu'il voulait lui apprendre sur lui. « Tu sais, je suis passé par les mêmes doutes que toi il y a quelques années, lorsqu'Elsie et moi espérions fonder une famille mais que tout laissait penser que j'étais celui qui rendait ça impossible. Ça a pris du temps, mais la bonne nouvelle a fini par tomber, un jour, et j'ai réalisé que je n'avais pas été tout à fait complet avant de tenir mon fils aîné dans mes bras. » C'était un moment qu'il n'oublierait jamais, lorsque Caleb était venu au monde et avait balayé en un instant, en un seul cri, plusieurs années de doutes et d'une culpabilité sans fondement. « Tu connaîtras ce bonheur, toi aussi, et ça changera ta vie. Et parce que ce rêve est le tien et qu'il n'y a rien que je ne ferais pas pour toi, je t'aiderai à le réaliser. J'en ai envie, Hannah. » Son sourire, lumineux, lui criait qu'il serait prêt à tout pour qu'elle aussi vive un moment aussi magique, loin des désillusions qui l'avaient frappée quand elle avait cru ne pouvoir jamais donner la vie. « Lorsque tu seras prête, je le serai aussi. » Il avait pris sa décision et savait qu'il ne la regretterait pas, auquel cas il n'aurait jamais pris le risque de lui donner de faux espoirs. Son choix était fait. |
| | | | (#)Ven 16 Juin 2017 - 0:43 | |
| Repenser à New York était douloureux. Pour lui comme pour elle d’ailleurs, les quelques mois qui s’étaient écoulés et les nuits passées ensemble n’avaient pas suffi à refermer cette plaie géante il semblait bien. Et la brune ne pouvait pas avoir la même certitude que lui, après tout, s’il décidait de faire demi-tour… Hannah ne pourrait même pas lui en vouloir, il ne serait pas le premier, il ne serait pas le premier à lui promettre la Lune et finir par disparaitre une fois que les choses devenaient trop compliquées. Elle aurait souhaité avoir une vie plus simple et seulement lire ce genre de drames dans les pages des romans qu’elle adorait tant. Si seulement tout ça n’était qu'une comédie, ou une tragédie dans le cas d’Hannah. Juste une autre riche héritière, un peu trop rêveuse, un peu trop naïve, gardée dans une tour d’ivoire par son père. Et là, il ne s’agissait pas seulement de traverser les enfers, de décapiter des bêtes par milliers pour pouvoir avoir son coeur. Non, c’était tout ce qui l’entourait le problème, c’était aussi son coeur le problème. Car même si Hannah voulait croire de toutes ses forces qu’elle était bien plus qu’une plastique, plus qu’un nom dans les pages des magazines, bien plus qu’une simple princesse, elle ne pouvait pas s’empêcher de douter. De craindre la solitude comme toutes les princesses et se demander qui pourrait tout accepter, le bon comme le mauvais. Saul avait vu l’ombre du pire à New York, mais il ne se doutait pas de quoi elle était vraiment capable et parfois cette simple pensée réussissait à l’extirper des bras de Morphée. Elle ouvrait les yeux simplement pour réaliser que les bras puissants qui l’enserraient étaient ceux de Saul et que eux aussi pouvaient finir par disparaitre. Après tout, dans sa vie, l’amour était toujours trop vif, c’était un éclat qui finissait par la brûler et qui la laissait complètement vide et complètement seule. Ni plus ni moins. Le contraire rester encore à prouver. Et Hannah s’en voulait déjà de mettre toutes ces responsabilités-là sur les épaules de Saul, était-elle en train de les condamner ? Ou juste lui, lui qu’elle mettait déjà en échec parce qu’il devait faire mieux que tous ceux qui avaient osés se présenter devant elle avant lui. Qu'est-ce qu'elle lui avait dit à New York déjà ? You were better, I need you to be better. I don't care how, or when, or how long it takes you... just fix this. Fix you. And be better. Des mots qu’ils n’avaient pas oublié, ni l’un ni l’autre et quand Saul reprit la parole pour le rassurer, Hannah savait qu’il n’avait pas oublié. Il y aurait toujours cette cicatrice, toujours ces mots-là entre eux et Hannah l’écouta lui et ses mots doux encore une fois, une main posée sur une des joues de Saul et pour la première fois depuis trop longtemps… Hannah eut des regrets. Juste là, elle sentit son propre coeur se serrer légèrement alors qu’elle se maudit intérieurement, voyant enfin ce que ses mots à elle avait causé. Saul … Saul ne serait jamais parfait, à l’époque, il y a quelques mois, elle vivait encore dans la peur, dans l’attente de tout ce qu’elle ressentait pour lui et maintenant elle savait. Elle ne voulait pas quelqu'un de parfait, elle voulait juste Saul, bon ou mauvais, elle prenait tout. Elle voulait l’artiste confiant qui savait parler à chacun des membres de sa troupe, trouvant toujours le bon ton et ce peu importe le caractère de chacun. Elle voulait le père de famille qui était prêt à décrocher la Lune pour ses enfants si ces derniers le lui demandait. Elle voulait l'amant qu’elle avait eu le plaisir de découvrir il y a quelques semaines, celui qui déposait toujours des baisers au creux de son cou en la fixant comme personne ne l'avait jamais fixée avant. Elle voulait l'ami qui n'avait pas hésité à se présenter à elle à son anniversaire avec des mots rassurants et un cadeau parfait. Elle voulait le romantique qui jouait de la guitare dans son salon, assez fort pour qu’elle puisse reconnaitre le morceau qu’il jouait mais pas assez pour ne pas la déranger. Et elle voulait également l’homme hésitant qu’elle apercevait à chaque fois que son divorce était mentionné, celui qui avait trompé sa femme au nom d'un amour qu'il avait jugé bon de défendre. Elle voulait tout. Pas besoin de changer quelque chose qui était parfait, n’est-ce pas ? Hannah hocha donc la tête quand il parlait d’assumer les conséquences de ses actes. Hannah avait beaucoup de progrès à faire dans ce département elle aussi. « Saul… on a déjà parlé des promesses. N’en faisons pas, je n’ai pas envie que tu finisses par le regretter, tu es là, tu veux être là pour moi et c’est tout ce qu’il me faut je t’assure. Bon tu devras sans doute le répéter une centaine de fois avant que je finisse par te croire mais… » La brune eut un maigre sourire, toujours aussi proche de lui. « I don’t need anything else, I just need you. » Et peut-être qu’un jour elle trouverait le courage de lui dire tout ce qu'elle ressentait vraiment pour lui. Mais pas ici et certainement pas comme ça, une question importante à la fois. Une question qui traina dans l’air pendant quelques secondes; les yeux couleurs noisettes de la brune rivés sur Saul en attendant sa réponse. Une réponse qui fit vibrer le coeur d’Hannah à une toute autre intensité quand elle arriva enfin, la brune se perdant quelques instants dans le baiser qu'ils échangèrent. « Thank you, thank you so much for … everything. » souffla t-elle contre ses lèvres, incapable de trouver d’autres mots pour le moment. Depuis des semaines, Hannah avait rangé l’idée, cette question ailleurs, se disant qu’ils y reviendraient plus tard, quand ils auraient le temps. Elle n’aurait jamais imaginé une seule seconde qu’il lui dise oui. Un sourire franc et sincère trônait sur le visage de la brune tandis que Saul lui affirmait qu'un jour, elle aussi serait heureuse. Une notion qui pouvait paraitre ridicule pour certains mais qui était tellement essentielle pour Hannah, vu qu’elle avait toujours fait pour corrompre ou éloigner quiconque pouvait lui apporter une dose de bonheur. Pas Saul, jamais Saul, se dit Hannah, jouant déjà avec le col de chemise de ce dernier. « Et en ce qui concerne les secrets… Je vais être honnête avec toi également, peu importe les on dit et autre, il faut que tu saches que tout ce qu’on dit sur moi n’est pas vrai. Je ne suis pas complètement innocente, mais tu sais aussi bien que moi que tout n’est pas noir ou blanc mais... » Hannah se mordit la lèvre inférieure, cette conversation lui faisait un bien fou et elle le réalisait de minute en minute que jouer carte sur table, sans prétention, sans que qui que ce soit n'hausse le ton était peut-être une bonne idée. « Je ne dis pas que je vais être prête demain non, j’ai encore beaucoup de questions à poser à mon médecin histoire de me rassurer mais… je vais être mère un jour. » L’actrice marqua un silence qui fut ensuite suivi d'un léger rire, elle-même ayant du mal à réaliser ce qu'elle venait de dire. « And it’s kinda scary to say that out loud… » Et là encore, c'était un doux euphémisme se dit Hannah. « Si on m’avait dit il y a des mois en arrière que j’en serais là… je crois que j’aurais rigolé. Mais c’est une bonne chose. De ne pas savoir, ça laisse plus de possibilités… » Car Hannah n'était définitivement une de ces femmes qui planifiaient leur vie au millimètre près et pour les dix prochaines années à venir. Mais entre tout ce qu'elle s'apprêtait à entreprendre avec Rose, la compagnie et maintenant Saul… Le futur qui se profilait à l’horizon lui donner juste envie d’avancer. La brune finit par légèrement s’écarter de Saul, seulement d'un demi-centimètre afin de croiser les jambes et de poursuivre leur conversation. « J’ai tout de même une dernière question pour toi Saul, sachant que tu es toujours marié et que je serais une très mauvaise menteuse en disant que nous faisons chambre à part… » Hannah marqua une pause, son regard déjà plein de promesses pour la soirée à venir. Mais elle s’égarait, elle avait une autre question à lui poser. « Qu’est-ce que ça fait de moi ? La maitresse ? Encore une fois, c’est un titre que je porterai avec honneur, mais je préfère savoir au cas où on me pose la question. Et si je pose la question c’est que je n’ai jamais vraiment été en couple. Enfin je crois… il y a eu des moments avec des hommes … et avec des femmes mais… Jamais vraiment rien de sérieux.» Le tact légendaire de la brune frappait encore et elle haussa tout simplement les épaules, il n'y avait pas de façon plus polie que ça de dire que sa vie amoureuse était juste une longue listes de désastres, de murmures dans des chambres d'hôtels et de cigarette échangées. Si Saul était honnête et voulait lui faire comprendre qu'elle pourrait se laisser d'attendre après un homme marié, elle devait également lui faire comprendre que tout ça, ce qui ressemblait de près ou de loin à une relation, était nouveau pour elle. À près de trente ans, Hannah pouvait dire qu'à part... eh bien à part Lawrence lors de l'été de ses seize ans, elle n’avait jamais été en couple. Ni même une grande adapte de la monogamie. « Hmm… tu as encore le temps de courir dans l’autre direction si ça fait un peu trop pour toi. » ajouta la brune après quelques instants de silence, son regard toujours sur Saul. |
| | | | (#)Mer 28 Juin 2017 - 0:59 | |
| Depuis quelques mois, nombreux étaient les événements auxquels Saul repensait avec un pincement au cœur, et cette pointe de mélancolie qui lui remuait les entrailles pour y laisser résonner un grondement sourd, paralysant. La disparition de son père, d'abord, et la sensation qu'il avait eu de sentir tout le poids de son corps être avalé par le sol qui se tenait sous ses pieds lorsqu'il avait compris que c'était fini. L'instant où il avait tenu Camber tout contre lui et du prendre la décision la plus difficile de sa vie. Puis celui où le regard d'Abel s'était assombri, bordé de larmes, mais où son demi-frère avait fait mine, devant lui, d'être à peine accablé par la nouvelle. Piètre comédien, avait-il pensé. Aussi, le soir du Nouvel An et le poing de Tommy s'abattant sur sa joue, le laissant dans un flou artistique total avant qu'il n'ait que de trop longues minutes pour se faire à l'idée que toute sa vie venait de basculer. Le moment où Elsie avait appris, enfin, que l'homme qui avait partagé sa vie pendant les trois dernières années n'était plus l'homme qu'elle avait épousé. Le soir où il avait préparé ses bagages, descendu leurs escaliers sans même savoir s'il les remonterait un jour. Sa première nuit dans une chambre d'hôtel impersonnelle, la première fois qu'il avait bu au point d'en oublier jusqu'à son nom. Toutes ces fois où il avait serré ses enfants contre lui avec l'espoir qu'un jour viendrait où ils seraient en âge de savoir, et peut être de comprendre. Sans pour autant pardonner. Et puis, ce court séjour à New York dont l'épilogue l'avait marqué au fer rouge, lui aussi. Peut être parce que jusqu'au dernier moment, et l'instant bien précis où Hannah et lui s'étaient éloignés, il avait cru qu'elle serait celle qui l'aiderait à affronter cette tempête. Elle l'avait été, par la suite, mais les quelques mots qu'ils avaient échangé ce soir-là dans son salon, ajoutés au regard qu'elle avait tout juste osé poser sur lui, tout ça l'avait tenu éveillé des nuits entières tandis qu'il s'était demandé, inlassablement, ce qu'il aurait pu faire pour leur éviter cette fin. Une fin qui depuis avait laissé place à un début, celui d'une histoire qui peut être effacerait avec le temps ces moments troubles auxquels il ne pouvait pour l'instant repenser qu'avec désolation. Comme lorsqu'il plongea son regard dans celui d'Hannah et se souvint, brusquement, de ce qui l'avait traversé lorsqu'il avait véritablement cru que leurs chemins s'étaient définitivement séparés. L'espace d'un instant, il crut même ressentir cette même douleur à la poitrine, cette même impression d'avoir perdu son dernier rempare, son dernier abri, au milieu d'une pluie battante. Ce qu'il avait pu souffrir. Ce qu'il avait pu douter, et maudire ces années de mensonges et leurs conséquences. C'est pourquoi il ne comptait pas reproduire les mêmes erreurs, tomber dans les mêmes pièges. Il ignorait où cette histoire les mènerait, et ne se risquerait certainement pas à déborder d'optimisme alors qu'il avait déjà eu la preuve, par deux fois, que de la plus grande des passions pouvait découler la plus triste des fins. Mais ce dont Saul voulait se persuader, c'est qu'il saurait lui éviter de souffrir, comme il n'en avait pas été capable avec Elsie et Margaret. Qu'il ne laisserait pas de sordides mensonges se mettre entre eux, ni ne prendrait le risque de tout perdre à nouveau. En serait-il capable, lui qui pour trois ans d'un nouvel amour avait déjà sacrifié onze ans d'un beau mariage ? Pouvait-il encore espérer racheter sa conduite, sans poursuivre le sombre dessein qui régissait sa vie depuis quelques années ? Saul n'en savait rien, mais lorsque la brune reprit la parole et gomma par de simples mots les quelques doutes qui commençaient à ombrager son esprit, le brun eut un tendre sourire. « Tant mieux, parce que dernièrement je n'ai pas été très doué pour faire des promesses. Et je ne parle même pas de les tenir. » Il souffla, de ce ton teinté d'auto-dérision et d'une pointe de mélancolie dont il avait fait sa spécialité. Hannah ne saurait certainement jamais ce qu'on pouvait ressentir lorsqu'on s'était brûlé les ailes au point d'avoir ruiné la plus grande promesse de son existence. Elle ne le saurait certainement jamais, et c'était tant mieux. « Hannah, on sait tous les deux que tu n'as pas choisi la facilité en me choisissant moi. » Il reprit cette fois, dans un plus fin sourire, comme un besoin de lui mettre à nouveau toutes les cartes de la partie entre les mains, au cas où. « Mais j'étais sincère tout à l'heure, je ne te ferai jamais de mal consciemment. C'est … l'une des choses qu'on apprend lorsqu'on a pris le risque de tout perdre. Qu'on ne peut pas toujours s'empêcher d'actionner la bombe qu'on a entre les mains, mais que les autres, eux, peuvent toujours être épargnés. » Elle comprendrait où il voulait en venir, il le savait. Que ce qui lui laissait aujourd'hui le goût le plus amer, et le poids le plus lourd, ça n'était pas d'avoir été incapable de se raisonner quand il aurait fallu, mais d'avoir délibéré joué avec l'amour et la confiance qu'on lui avait porté. « Et aujourd'hui tu fais partie des personnes que je protégerai envers et contre tout. » Y compris de lui-même, ça c'était aussi peut être bien la seule promesse qu'il pouvait véritablement se faire à l'heure actuelle. L'atmosphère se fit un peu plus douce, sucrée, lorsqu'enfin vint le moment pour la brune de lui poser la question qui la hantait depuis des mois. Une question qui franchit la barrière de ses lèvres sous le regard ému d'un Saul qui n'aurait jamais osé prétendre à la confiance qu'elle était prête à mettre entre ses mains. L'instant fut comme suspendu dans le temps, tout comme celui où il lui livra sa réponse. Une réponse sans appel, mais pourtant réfléchie. Saul savait exactement ce que ce « oui » impliquait, et que ça n'était pas le genre de réponse qu'on pouvait donner puis sur laquelle on pouvait revenir. Il savait tout ça, et c'est pourquoi il n'avait pas hésité. « Ne me remercie pas, Hannah. » Il souffla, contre ses lèvres, après le baiser que la brune et lui échangèrent. « Je ne te fais aucun honneur en acceptant de t'aider. Toi, tu m'en as fait un en me posant cette question. » Car dieu sait combien d'hommes sur cette terre, et rien que dans cette vile, auraient été aussi bien si ce n'est mieux taillés que lui pour assumer de telles responsabilités. Dieu sait combien d'hommes formidables elle aurait pu convaincre de faire ça pour elle. Mais c'était à lui qu'elle avait posé la question. A lui, qui avait enchaîné les erreurs, et semé le malheur sur son chemin. A lui, comme si malgré tout ça il était resté à ses yeux le meilleur candidat à ses yeux. « Et puis, pour une fois que c'est à toi de m'offrir un rôle. » Ses lèvres émirent un rire ému, et ses yeux eux brillaient d'une lueur incomparable. Devenir père, il l'avait vécu par trois fois et aucun autre instant au monde n'avait jamais rivalisé avec l'ivresse de bonheur qui s'était emparée de lui chaque fois qu'il avait tenu l'un de ses enfants contre lui. De tous les rôles qu'il avait pu endosser, parfois bien malgré lui, c'était de loin le plus précieux. La voix d'Hannah s'éleva de nouveau et c'est un sourire teinté de tendresse qui trouva ses lèvres. Ainsi, après ces mois passés à s'apprivoiser l'un l'autre, et à se faire une place dans chacun de leurs mondes, Hannah craignait encore que des « on dit » puissent altérer son jugement la concernant ? « Je sais tout ça, je n'ai jamais … cru que tout ce qu'on pouvait raconter sur « Hannah Siede » était vrai. A vrai dire, j'ai même la plupart du temps évité d'écouter ce qui pouvait bien se dire. Parce que tu le sais, les articles dans la presse ne m'ont jamais intéressé et les ragots, eux, encore moins. Et si parfois j'ai pu tendre l'oreille un peu malgré moi, sache que je n'ai jamais eu besoin des autres pour me forger un avis sur quelqu'un. » Et effleurant sa main du bout de son doigt, il ajouta. « Et si je n'avais pas été prêt à me faire ma propre opinion sur toi, nous n'aurions sûrement pas cette discussion aujourd'hui. Tu n'es pas d'accord ? » Sans doute que si, et c'était bien la preuve qu'il n'avait eu besoin de personne pour juger qu'Hannah était quelqu'un de bien, quelqu'un qui gagnait à être connue, soutenue, puis aimée. Et si tout entre eux n'avait pas toujours été parfaitement simple, Hannah ne lui avait donné la moindre raison de regretter de l'avoir approchée. Celle-ci se montra un peu plus fébrile encore au moment de laisser parler ses craintes, et c'est d'un regard protecteur qu'il la couva. « Hannah, c'est parfaitement normal d'angoisser. On ne parle pas d'un petit changement ni d'un acte sans conséquences, mais tu sais au fond de toi que tu es prête depuis l'instant où tu as eu envie de me poser cette question. Il faut juste que tu prennes le temps de te faire pleinement à l'idée, et là tu sauras que le moment est venu. » Elle était sur le point de voir sa vie être révolutionnée par une décision loin d'être anodine, mais il n'avait pas le moindre doute sur le fait qu'elle ait suffisamment réfléchi à la question. Il y avait des femmes qui faisaient des enfants sous le coup d'une envie qui finissait par leur passer, mais pas Hannah. Finalement, Saul sentit à son tour une pointe d'appréhension l'envahir au tournant que prit bientôt la conversation. Hannah avait retrouvé cet air parfaitement sérieux, presque un brin dramatique, et se disait sur le point de lui poser une question dont il devinait à l'avance l'importance et le symbolisme à ses yeux. Ainsi, quand des mots vinrent balayer ses interrogations, c'est un Saul pris de court qui accueillit la question de la brune … et les confessions qui suivirent. A vrai dire, c'est même sur celles-ci qu'il concentra son attention lorsqu'il apprit, par un hasard des plus troublants, que les conquêtes de la jeune femme ne se conjuguaient pas seulement au masculin. « Avec … des femmes ? » Il releva, spontanément, ses yeux cherchant ceux de la brune. « C'est l'une de ces choses qu'on pouvait lire dans la presse, n'est-ce pas ? » L'une des choses dont il aurait peut être eu des échos s'il avait accordé un minimum de crédit à ces fameux articles, ainsi qu'aux rumeurs du métier. Saul, en tout cas, garda le silence l'espace d'une minute, remettant un peu d'ordre dans ses pensées. « Excuse-moi, je suis juste … un peu déstabilisé. Je m'étais fait à l'idée que toi et moi avions nos ressemblances et nos différences. Que notre passé, certaines de nos expériences … tout ça puisse parfois nous opposer, comme le reste sait aussi nous rapprocher. » Il savait depuis le premier jour, depuis l'instant où il avait posé les yeux sur elle, qu'appartenir au même monde et au même milieu ne les avaient pas pour autant conduit sur les mêmes sentiers, ni amenés à suivre les mêmes chemins. Et pourtant, aujourd'hui, c'était comme s'il commençait tout juste à assimiler tout le mystère qu'elle représentait. « C'est juste … une donnée que j'aurais voulu avoir. Je ne dis pas que ça change quelque chose, et certainement pas ma façon de te regarder, mais j'aurais aimé savoir. Toi, tu savais qu'il y avait des risques pour que je sois le seul idiot à des kilomètres à la ronde à être passé à coté de cette information, et pourtant ... tu n'as rien dit. » L'espace d'un instant, sa voix vibra sous le coup d'une légère désolation. La dernière chose qu'il voulait était que sa réaction lui paraisse inappropriée, ou qu'elle se persuade que le problème ne se situait pas que dans le fait qu'il ne l'ait pas su plus tôt. Quand bien même l'idée en elle-même avait de quoi le travailler. Mais il mentirait s'il disait qu’il n'aurait pas aimé qu'elle se confie sur ce détail plus tôt, notamment avant que tout devienne plus concret entre eux. « Je ne suis pas fâché » qu'il reprit cependant, avant de lui laisser penser qu'il puisse en être autrement, son regard ne se détachant plus du sien. « Et tu parlais à l'instant de secrets. Moi, je t'ai dit un peu plus tôt que je n'en aurai plus pour toi. Alors je vais me montrer parfaitement honnête à mon tour. » Et prenant une inspiration, Saul ignora les doutes qui lui rappelèrent l'espace de quelques secondes que ce genre de prises de risques avaient bien failli lui coûter cher, quelques mois plus tôt. « J'ai passé une soirée avec Joanne, dans un bar, peu de temps après New York. Ça n'était pas prévu, on est même tombés l'un sur l'autre parfaitement par hasard, et on a principalement bu et discuté. Mais il y a eu un moment où … disons, pour la sortir d'un pétrin, on a jugé bon d'échanger un baiser. Sans qu'il y ait plus, ou la moindre ambiguïté. Elle n'était pas intéressée, et moi … je n'étais déjà pas dans mon état normal. » Ses yeux guettèrent les siens tandis qu'il fit volontairement et indirectement allusion au soir de la Saint Valentin, où déjà Hannah avait pu constater qu'à l'époque il ne revenait généralement pas de ce genre de virées indemne. « Ça ne doit rien changer parce que ça ne voulait rien dire. Mais j'ai dit que je ne voulais plus rien te cacher, alors maintenant tu sais tout. » Et même s'il avait peut être pris un risque en évoquant cet épisode qu'Hannah aurait sûrement préféré ignorer, au moins il savait qu'il n'y avait plus rien qu'elle risque par la suite de découvrir à ses dépends « Et tu ne seras pas ma maîtresse. » Saul reprit, cette fois d'une voix plus basse, presque dans un murmure, son regard s'adoucissant sous le poids de ces mots chargés de sens. « Je suis peut être toujours marié, mais je me suis suffisamment caché. J'ai mal agi pendant trois ans en dissimulant toute une partie de ma vie, et ça a certainement causé bien plus de mal que si j'avais dit toute la vérité dès le début. » Dès le début, à savoir quand il avait rencontré Meg et su qu'elle et lui ne se contenteraient pas d'une relation amicale, platonique, à l'inverse d'avec toutes les femmes qu'il avait rencontré depuis Elsie. « Ce que je veux dire, c'est que je préfère qu'on me regarde de travers parce qu'on jugera que cette nouvelle histoire survient trop tôt ou est malvenue, plutôt que de vivre à nouveau une vie faite de mensonges et de rencontres clandestines, comme si je n'étais pas assez grand pour assumer mes choix. » On l'avait jugé ces derniers mois et on le jugerait sans doute encore à bien des reprises, mais s'empêcher de vivre par peur de semer l'indignation sur son passage, ça n'aurait aucun sens. « Si on te demande ce qu'il en est, ne réfléchis pas, dis simplement ce que tu as envie de dire. C'est ce que moi je ferai. » Et effleurant sa joue de la paume de sa main, Saul unit leurs lèvres comme pour lui prouver qu'il assumerait à ses cotés si c'était aussi ce qu'elle souhaitait. S'il fallait vivre cachés pour vivre heureux, alors ils prendraient le risque. |
| | | | (#)Mer 12 Juil 2017 - 4:30 | |
| Il y a des mois en arrière, cette conversation n'aurait jamais eu lieu. Déjà car la brune n'aurait pas fait l'effort de se déplacer chez son médecin pour quelque chose d'aussi ridicule. Elle aurait balayé la nouvelle sous un coup de whisky et elle serait passée à autre chose, le coeur anesthésié et l'esprit apaisé par le néant qui se présentait devant elle. Mais Hannah réalisait bien qu'elle n'était plus cette personne, si de l'extérieur il s'agissait d'un changement conséquent, elle était en panique constante, doutant souvent certaines de ses décisions. Plus que ses décisions, la comédienne redoutait le moment où tout s'avérerait n'être qu'une amère illusion et qu'il lui faudrait rendre cette vie quasi parfaite à quelqu'un d'autre. Oh bien entendu, les choses n'étaient pas simples. Ce qu'elle partageait avec Saul par exemple n'avait absolument rien de simple, c'était compliqué et pourtant, en écoutant le brun qui la rassurait encore, qui lui affirmait s'être toujours fait sa propre opinion d'elle, Hannah ne pouvait pas s'empêcher d'avoir un maigre sourire aux lèvres et de se dire que si justement, il n'y avait rien de plus simple que ça. Que tous les sourires qu'elle lui adressait sans même s'en rendre compte, que la façon dont ses mains trouvaient toujours celles de Saul, ce simple contact réussissait toujours à l'apaiser d'une certaine façon. C'était simple et Hannah comprenait un minimum tous les grands discours qu'on lui avait servi sur l'amour, le même amour qu'on avait tenté de défendre devant ses yeux et qui l'aurait fait éclaté de rire il y a quelques mois. Pas parce qu'elle était persuadée que cela n'existait pas, non, elle l'avait bien vu de ses yeux couleurs noisettes, même Hannah Siede n'était pas stupide à ce point-là. En revanche, elle avait du mal à concevoir que quiconque, quiconque de censé, veuille d'elle à ce point-là. Et voilà qu'aujourd'hui elle se retrouvait à faire des confessions dans une cage d'escaliers à Saul. Saul qui n'avait pas hésité une seule seconde à venir ici parce qu'elle avait murmuré le mot urgence. À force de le fixer, Hannah se retrouvait à se demander et si ? Et c'était probablement ça le plus terrifiant et le plus compliqué au final, pas le reste. «Hmmm... Touché. »murmura simplement la brune, toujours le sourire bien en place sur le visage, ils n'en seraient pas là aujourd'hui si Saul n'avait pas décidé de lui accorder un minimum sa confiance. Là encore, Hannah ne comprenait pas ce qu'elle avait fait pour mériter un tel élan de générosité. Elle avait toujours été elle-même avec Saul, il était arrivé de nouveau dans sa vie à un moment critique, où tout partait littéralement en fumée et qu'elle était complètement perdue. Elle avait été honnête, elle s'était accrochée à lui de toutes ses forces, en espérant, priant pour qu'il ne lâche pas et aujourd'hui ils en étaient là. Et Hannah se retrouvait à lire la confusion sur ses traits qu'elle commençait à connaitre par coeur. Saul était presque adorable, presque et Hannah se retrouva à hausser un sourcil à ses prochains mots, se demandant si elle devait y voir l'ombre d'une insulte ou une simple incompréhension. Après tout, des années les séparaient et Saul sortait d'une... non deux longues relations, ils n'avaient définitivement pas les mêmes expérience en matière de relations amoureuses. Ou l'absence de relation dans le cas de la brune. Hannah se refusa à formuler des excuses, à quoi bon, elle aurait certainement dû être honnête plus tôt mais ce n'était pas comme si la brune s'en cachait particulièrement et puis sa dernière aventure avec une femme remontait à tellement longtemps. Jamie avait constitué un énorme pan de sa vie et avait ainsi occulté tout le reste et Hannah avait parfois du mal à se souvenir à quoi ressemblait sa vie avant. Ce n'était pas qu'elle avait voulu cacher cette partie de sa vie à Saul, c'est qu'elle avait presque l'impression de parler d'une autre personne quand elle le faisait. « Je... j'avoue que je n'avais pas songé au fait que je devais te l'annoncer de manière officielle, c'est surtout ça. » finit par tout simplement déclarer Hannah. Saul ne voulait visiblement plus de secrets entre eux et la brune aurait adoré pourvoir faire toutes ses confessions maintenant, mais il y avait tellement de choses à raconter, elle ne savait pas par où commencer. Ni quoi dire. Personne ne l'avait jamais vue ainsi et elle n'était pas certaine que la vraie Hannah vaille le détour. La voix de Saul la tira de sa réflexion et cette fois-ci, la comédienne fronça vraiment les sourcils quand Joanne fut mentionnée. C'était bien la dernière personne à laquelle Hannah avait songé au cours des dernières semaines, préférant la ranger loin de son esprit, elle la voyait heureuse et comblée, heureuse de savoir qu'Hannah était sortie de sa vie, une bonne fois pour toute. Saul continua ce qui ressemblait de près comme de loin à un aveu et ce fut au tour d'Hannah de se montrer perplexe. Ni plus ni moins, elle ne cacha pas l'incompréhension qui passa sur son visage, mais elle retint néanmoins les millions de questions qui menacèrent de quitter ses lèvres. Mais voulait-elle vraiment savoir ? La vérité était que non, Saul n'était pas Jamie et il ne s'apprêtait pas à aller voir la blonde dès qu'elle aurait le dos tourné, il ne s'agissait pas de ça, Saul tentait de se défaire de son passé pour construire un avenir avec elle. Ce qui s'était passé avant, avant eux, n'avait pas la moindre incidence sur maintenant. Aussi, Hannah prit une profonde inspiration, ses yeux toujours dans ceux de Saul. Pas la maitresse ? Elle aurait pu faire une blague vaseuse sur le sujet mais au lieu de ça, ses deux mains vinrent trouver les épaules de Saul, le forçant à se tenir droit. « Saul... je vais être encore une fois très honnête. Les gens risquent de te regarder de travers, les prochains mois vont être difficiles, parce qu'en plus de ton divorce, des gens que tu connais pas, en plus de tes amis proches et de ta famille vont se permettre de juger et de critiquer la moindre de tes actions. Rien ne sera jamais assez bien, et tu seras toujours dans l'erreur et ce même si tu suis tes instincts. » Hannah n'était que trop bien placée pour le savoir, toute sa vie, elle avait vécu sous le regard attentif des médias et du reste du clan Siede. L'un comme l'autre, tout le monde voulait la voir échouer, était même prêt à l'aider dans sa chute, juste pour pouvoir mieux la dénigrer. Et oui, la brune avait eu ses moments de faiblesse, mais elle n'avait jamais laissé personne la détruire au point qu'elle ne puisse pas se relever. Peu importe ce qu'on disait sur elle, ces idiots continuaient toujours de parler d'elle, car c'était eux qui avaient besoin d'Hannah et non l'inverse. « Mon conseil ? Ne leur donne pas raison. Tu peux te tenir informé mais tu vas devoir garder la tête haute et un sourire aux lèvres, ça sera ta seule et unique arme. Les gens se demanderont toujours pourquoi est-ce que tu continues de sourire quand le pire est en train d'arriver. » Hannah excellait dans ce domaine et ses sourires hypocrites réussissaient toujours à en déstabiliser plus d'un, les autres expressions n'appartenaient qu'à elle et ... d'une certaine manière, à Saul également. « Oh et je serais là également donc je suppose que tu ne t'en tires pas si mal que ça... hmm ? » La comédienne eut un léger rire, une expression joueuse sur le visage, incapable de résister à l'occasion de s'envoyer des fleurs. Elle reprit néanmoins sur un ton un peu plus sérieux. « Et je serais plus honnête à l'avenir. C'est nouveau pour moi aussi, tu vas surement rire mais tu en sais déjà beaucoup sur moi, plus que certaines personnes qui me côtoient depuis des années. Je ne suis pas la personne la plus... démonstrative du monde, on le sait tous, I'm working on it. » Du temps, voilà ce dont Hannah avait besoin, du temps passé dans les bras de Saul, assez pour se dire qu'il ne partirait pas et qu'elle pouvait lui parler des choses importantes ou même complètement ridicules, comme le fait qu'elle avait toujours un livre dans son sac, ou du qu'elle était en réalité terrifiée des avions mais qu'elle faisait très bien semblant de ne pas avoir peur... ce genre de choses. « Mais dans un élan d'honnêteté, je dirai que ça m'arrangerait si à l'avenir j'étais la seule femme qui avait le droit de faire ça... » Hannah venait encore de changer de ton et ses mains glissèrent sur le col de Saul qu'elle tira afin de rapprocher leurs deux visages et de déposer un long baiser sur les lèvres de ce dernier. « ... Ça me semble être un bon compris non ? » souffla finalement la brune, ses lèvres se courbant déjà dans ce sourire qui n'était réservé qu'à Saul. |
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