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Message(#)joassan + remember how we said together we would go far EmptyVen 5 Mai 2017 - 18:38


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"Vous devriez savoir qu'il n'y a que lui qui détient la réponse. Vous devriez en parler avec lui." dit Neil après un très long moment de silence, et de réflexion pour lui. Face à lui, Joanne. La séance durait plus longtemps que d'habitude, parce qu'il y avait beaucoup à raconter, mais aussi surtout parce que Joanne prenait du temps à formuler ses phrases. Elle était en larmes. Elle avait déjà utiliser de nombeux mouchoirs que son psychologue lui avait fourni depuis le début. Il déposa son stylo et son bloc-notes sur la petite table qui se trouvait juste à côté de son fauteuil et joignit ses mains sur ses genoux. Il laissait le temps à Joanne pour se remettre de ses émotions, mais cela semblait vain. Il voyait qu'elle gardait le regard bas, qu'elle jouait nerveusement avec ses doigts, que ses mains même tremblaient. "Vous ne me dites que du bien de votre ex-mari, il n'y a pas de raison qu'il ne soit pas plus à l'écoute que les autres fois." "Ca ne nous apporte pas vraiment de bon. Je l'ai déçu et contrarié plus d'une fois. Je le sais. Je n'aurais peut-être pas du tout lui raconter. Comme pour la fausse-couche." "Vous pensez que vous vous seriez sentie mieux de le lui avoir cachée indéfiniment ?" Joanne leva les yeux, pour regarder Neil. Après quelques secondes de réflexion, elle secoua négativement la tête. "Avez-vous déjà tenté de se mettre à sa place ? Vous avez tous les deux beaucoup traversé. Vous l'avez reconnu vous-même, pour votre bien, il a préféré renoncer à vous. Il a du faire le deuil de toutes ces années passées à vos côtés, on lui avait annoncé le pronostic le plus sombre qui soit. Et finalement, non. Il devait réapprendre à vivre, à trouver une raison de vivre. Vous vous revoyez, vous lui annoncez votre fausse-couche. Ca lui fait un nouveau deuil à endurer, en plus de celui de votre mariage, et de la vie qu'il avait avant d'apprendre qu'il était malade." tenta-t-il d'expliquer. "Je ne cherche pas à minimiser votre vécu de votre côté, ça a été tout aussi difficile. Mais je pense qu'après que ce que chacun de vous avez enduré, entendre une autre mauvaise nouvelle fâche, qu'elle fasse de trop." Neil avait rapidement compris que sa cliente avait une sainte horreur des situations conflictuelles. Que pour elle, tout était perdu à la moindre dispute. "Mais je tiens à lui." dit-elle, comme si elle cherchait à se justifier. "Et vous ne pensez pas que ce soit réciproque ?" Joanne avait exprimé sa volonté de tout mettre à plat avant d'avancer quoi que ce soit et Neil l'encourageait dans cette voie. Joanne était l'une de ses premières clientes – il préférait les qualifier de patientes cela dit –. Fraîchement diplômé, il venait de débarquer sur Brisbane et était particulièrement rigoureux quant au respect du secret professionnel. Il voulait aider avant tout. Aider dans le cheminement, et aider à faire avancer. Joanne avait pris énormément de temps avant de se confier à lui, mais elle avait fini par y parvenir et avait compris qu'elle en avait besoin. Besoin de se confier à quelqu'un qui était parfaitement neutre dans toute cette histoire. "Et vous avez réfléchi à la question qu'il vous avez posé ?" finit-il par demander. "Voyez-vous toujours en lui l'homme dont vous étiez tombée amoureuse ?"

Joanne avait l'impression de passer incognito, avec cette nouvelle couleur de cheveux. Ce n'était pas volontaire de sa part, loin de là, elle n'avait jamais demandé à être brune. Elle n'était plus la petite blonde aux yeux bleus, elle se disait qu'elle passerait un peu plus inaperçue partout. Ils ne s'étaient pas revus depuis qu'elle était partie en vacances avec Jamie, et elle ne se voyait pas reprendre contact juste par SMS ou avec un appel. Elle n'avait pas vu le temps passer, et entre temps, Daniel avait été malade pendant quasiment deux semaines. Elle ne l'avait pas quitté d'une semelle jusqu'à ce qu'il ait retrouvé son énergie habituel. Et jusque là, elle n'avait pas vraiment trouvé le courage de venir vers lui. Elle avait alors décidé de refaire quelque chose qu'elle n'avait plus fait depuis longtemps. Assise dans l'amphithéâtre, elle attendait, comme tous les étudiants présents autour d'elle, qu'Hassan arrive et que le cour commence. Ca la faisait toujours gentiment sourire, qu'ils la considèrent comme une étudiante aussi, que son âge passe plus inaperçue qu'elle n'aurait su le penser. Histoire de se fondre davantage dans la masse, elle avait juste pris un stylo et une feuille de papier. Elle n'avait plus d'emploi depuis fin avril, elle avait ses journées entières à combler. Daniel était resté à la crèche pour les mêmes horaires durant lesquelles elle travaillait au musée. Il semblait s'y plaire là-bas, il y apprenait à vivre en société. Joanne ne voulait pas le cloîtrer à la maison par égoïsme, juste parce qu'elle le voulait rien que pour elle. C'était le cas, mais elle avait conscience que ça pourrait être délétère pour le petit, à la longue. Tout le monde devint silencieux dès lors qu'Hassan apparut. Joanne se demandait s'il savait qu'elle était là. S'il ressentait sa présence, d'une manière ou d'une autre. Elle n'écoutait pas son cours, elle écoutait uniquement sa voix. Elle n'avait pas de franc intérêt pour la géo-politique, elle ne l'avait jamais caché. Mais si jusqu'ici, elle assistait à certains de ses cours, ce n'était certainement pas pour écouter ce qu'il avait à dire. Joanne écoutait sa voix, tout simplement. Elle avait toujours aimé l'écouter. Pour une raison qu'elle ne s'expliquait absolument pas, la jeune femme avait mis dans la poche de son trenchcoat avant de partir la bague de fiançailles qu'Hassan lui avait offerte, et son alliance. Elle les avait toujours gardé, elle ne l'avait jamais dit à Jamie, précieusement conservé dans une petite boîte à bijoux qu'elle avait mêlé avec ses affaires. C'était assez tentant, de les remettre à son annulaire. Mais elle ne le pouvait pas, parce que ces bijoux avaient une symbolique bien trop importante aux yeux de la jeune femme. Le cours passait bien trop vite à ses yeux. Elle était bien, assise là, à le regarder, à l'écouter, à exercer le métier qu'il aimait. Jusqu'à ce que tous les étudiants se mettent à ranger leurs affaires, à papoter, ou à sortir au plus vite de l'amphithéâtre. La grande salle se vidait peu à peu, les bavardages allaient en decrescendo jusqu'à ce qu'il n'y ait plus personne, enfin presque. Hassan semblait bien concentré à ranger ses affaires dans sa sacoche. Joanne remit ses bagues dans la poche de son trenchcoat avant de se lever et de descendre les marches de l'amphithéâtre pour s'approcher de lui. Même le tintement de ses talons sur le sol était assez léger. "Coucou." dit-elle tout bas, avec un sourire particulièrement discret. Elle redevenait toujours affreusement timide, lorsqu'il s'agissait d'aborder Hassan. L'espace d'un instant, elle avait oublié qu'elle était brune, et que ce changement radical pouvait particulièrement surprendre. "C'est pas volontaire, le changement de couleur de cheveux." dit-elle avec un rire nerveux. Elle trouvait l'histoire particulièrement ridicule, d'ailleurs. Un court moment de silence s'imposa. Joanne sentait son coeur tambouriner dans sa poitrine, surtout par stress. Elle supposait qu'il ne devait pas être ravi de la voir. "Je... Je suis désolée d'avoir pris autant de temps avant de te contacter. Je me suis dit que..." La jeune femme baisser les yeux et soupira. "Non, rien." finit-elle par dire. "Daniel était vraiment malade et à côté de ça, je... J'allais voir mon psy." Elle ne savait pas vraiment par où commencer, ni vers où aller. Il y avait bien un sujet quelle voulait aborder, cette chose dont elle n'avait osé parler à personne depuis janvier. "Je ne voulais pas juste t'écrire ou t'appeler... Je voulais te voir." Autant le téléphone était un outil utile, Joanne préférait largement avoir la personne en face d'elle. On ne pouvait pas transcrire toutes ses émotions par un simple texto. "Je sais que je suis pas des plus stables, que... Tu peux être épuisé ou refroidi de tout ça, et que... Je fais peut-être croire que je ne te veux plus dans ma vie, mais je t'assure que ce n'est pas vrai. Tout ce qu'on s'est déjà dit, je ne l'oublie pas. Je veux toujours passer du temps avec toi, passer du bon temps, même passer par toutes ces cases... un peu compliquées." Joanne devait encore fait le tri dans ses idées, dans sa vie, et palier avec tout ce qu'il s'était passé dernièrement. Beaucoup trop d'événements à accepter et à ajouter dans le fil de sa vie. "J'ai bien conscience que... ma présence est loin d'être bénéfique à qui que ce soit dernièrement. J'arrive juste à rien gérer, je sais pas comment faire." Parfois, elle ne pensait qu'à Jamie, parfois, elle ne pensait qu'à Hassan, parfois il n'y avait que des idées noires. "Je... J'aimerais bien te parler de ce dont j'ai pas osé la dernière fois, si tu veux." dit-elle avec hésitation, quelques minutes plus tard. "Je... J'aimerais juste que tu sois entièrement sincère avec moi, enfin.. C'est pas vraiment le mot juste, parce que je sais que tu as toujours été sincère aec moi. Mais plutôt... Que tu ne cherches pas à arrondir les coins pour que ce soit plus facile à entendre pour moi. Tu verras, tu... tu comprendras quand tu sauras." bégaya-t-elle nerveusement.  
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Message(#)joassan + remember how we said together we would go far EmptyMar 9 Mai 2017 - 3:50

Hassan ne saurait pas vraiment dire si c’était une réalité ou bien s’il s’agissait uniquement d’une impression de sa part, mais il lui semblait qu’à chaque nouvelle année scolaire la salle commune réservée aux professeurs prenait un peu plus des allures de salon de thé plutôt que de bureau commun … Pas qu’il ne s’en plaigne, cela dit, s’il avait besoin de calme et de tranquillité il avait déjà son propre bureau, et s’il choisissait la salle commune c’était au contraire plutôt dans l’optique de se détendre, boire un thé ou discuter avec certains collègues. Rien de très étonnant donc au fait de les voir lui et ses trois compères les plus habituels entassés sur les poufs colorés acquis en début d’année scolaire, aux prises avec une partie de cartes dont le butin de mise trônait au milieu de la table en attendant que soit désigné son nouveau propriétaire. Quelques bonbons, deux ou trois cigarettes, une pomme et même un porte-clefs Star Wars récupéré dans un paquet de céréales ; Pas de quoi fouetter un chat, mais de quoi donner à leur partie de cartes le minimum d’enjeu qu’elle méritait. Mais l’heure tournait et Hassan ainsi que sa consœur professeur d’histoire du droit en étaient à choisir entre faire tapis une bonne fois pour toutes ou risquer d’arriver en retard à leur propre cours … Et qu’on se le dise, le brun n’arrivait jamais en retard. « C’est bon, je me couche. » Pas de crocodiles acidulés pour lui aujourd’hui. Ramassant sa besace posée à ses pieds et vérifiant machinalement que ses clefs étaient toujours dans la poche de son blouson, il s’était penché un instant vers l’épaule de sa collègue pour murmurer d’un ton taquin « Ne te laisse pas avoir par lui, son jeu est mauvais. Tu me tiens au courant pour demain soir ? » L’ironie c’était qu’Hassan se sentait beaucoup plus motivé à faire mettre le nez dehors à autrui qu’il n’avait pu l’être lorsque c’était autrui qui tentait d’en faire de même avec lui … Probablement parce que le brun avait toujours fonctionné ainsi, plus à même de se soucier des autres que de lui-même.

Quittant la salle commune, il avait boudé l’ascenseur et emprunté les escaliers pour descendre les trois étages qui le séparaient du rez-de-chaussée et de l’amphithéâtre dans lequel avait lieu son unique cours de l’après-midi. Trois heures de cours dispensées à ses élèves de seconde année, qu’il avait salués d’un ton qui se voulait enthousiaste avant de reprendre là où ils s’étaient arrêtés lors du cours précédent. Profitant du quart d’heure de pause séparant les trois heures en deux blocs un peu plus digestes d’une heure et demi pour aller se chercher un – énième – thé à la machine du hall, il était revenu un peu avant la fin de l’interclasse en ignorant le brouhaha ambiant qui régnait dans l’amphithéâtre, fouillant dans ses affaires pour en sortir les transparents de cartographies dont il avait besoin pour la suite de son cours. Par deux ou trois fois il s’était surpris à relever la tête comme s’il cherchait quelque chose dans l’assistance, avant de secouer la tête pour se sortir de sa propre rêverie. La seconde moitié du cours s’était déroulée dans un silence un peu plus relatif que la première, fait résolument habituel sur un bloc de cours aussi long, et tandis qu’ils en arrivaient à la fin d’un gros morceau du chapitre en cours le brun n’avait pas vu l’intérêt d’embrayer sur un nouveau sujet dix minutes avant la fin du cours, il avait consenti à libérer les élèves avec un peu d’avance et accueilli en retour un nouveau brouhaha d’approbation. Un fond de thé avait terminé de refroidir dans son gobelet, oublié sur un coin de son bureau pendant le cours, et tandis qu’Hassan grimaçait avec une pointe de dépit une voix on ne peut plus reconnaissable – et néanmoins inattendue – lui avait fait relever la tête « Coucou. » Ses lunettes de vue – celles qu’il portait désormais dès que la fatigue de ses yeux lui faisait craindre un début de migraine – glissant le long de son nez de façon presque cartoonesque, il avait eu un cours instant d’hésitation durant lequel son esprit avait comme eu du mal à associer la couleur de cheveux sous ses yeux et la personne qui se trouvait en dessous. « C’est pas volontaire, le changement de couleur de cheveux. » avait d’ailleurs commenté Joanne d’un ton incertain, Hassan questionnant entre taquinerie et curiosité « Tu as été retenue en otage par un coiffeur ? » Seul moyen à ses yeux d’expliquer le caractère involontaire d’un tel changement capillaire. Seul moyen également d’expliquer peut-être le silence radio qu’avait été celui de la blonde – ou plus vraiment, maintenant – depuis ce message laconique lui annonçant qu’elle partait – une fois encore – en Europe avec son ex-fiancé.

Hassan aurait aimé trouver quelque chose d’autre, ou quelque chose de mieux, à dire mais tandis que ses yeux ne quittaient plus Joanne les mots, eux, lui manquaient. A trop vouloir lui laisser d’espace il avait l’impression que la jeune femme lui filait entre les doigts, mais en sachant aussi que s’il tentait de la retenir ce serait lui que l’on pointerait du doigt. « Je … Je suis désolée d’avoir pris autant de temps avant de te contacter. Je me suis dit que … Non, rien. » Elle avait baissé les yeux, renonçant visiblement à donner le fond de sa pensée, mais presque avec impatience Hassan avait secoué la tête et froncé les sourcils « Que quoi ? » Il ne comprenait pas. « Daniel était vraiment malade. » avait-elle alors repris sans qu’il soit certain qu’il s’agisse d’une réponse à la question qu’il venait de poser. Il était même certain du contraire, en réalité. « Et à côté de ça, je … J’allais voir mon psy. » Il n’avait pas l’intention de lui demander de développer à ce sujet ; Hassan était on ne peut mieux placer pour savoir que ce qui se disait dans le cabinet d’un psy n’avait pas forcément toujours vocation à en sortir. « Il va mieux ? » Daniel, pas le psy. Mais elle comprendrait probablement à qui il faisait référence. Semblant chercher ses mots, Joanne avait finalement repris d’un ton incertain « Je ne voulais pas juste t’écrire ou t’appeler … Je voulais te voir. » Elle avait l’air grave de quelqu’un qui avait un aveu à faire, un aveu lourd de conséquences, et retenant presque sa respiration Hassan l’avait laissée continuer sans chercher à l’interrompre. « Je sais que je ne suis pas des plus stables, que … Tu peux être épuisé ou refroidi de tout ça, et que … Je fais peut-être croire que je ne te veux plus dans ma vie, mais je t’assure que ce n’est pas vrai. Tout ce qu’on s’est déjà dit, je ne l’oublie pas. Je veux toujours passer du temps avec toi, passer du bon temps, même passer par toutes ces cases … un peu compliquées. » S’asseyant contre le bord de son bureau, le brun n’avait toujours rien répondu, comme s’il en attendait plus. Et il en attendait effectivement un peu plus, autre chose que ce discours qu’il avait l’impression d’avoir déjà entendu mais que Joanne semblait oublier dès lors qu’il n’était plus dans son champ de vision. « J’ai bien conscience que … ma présence est loin d’être bénéfique à qui que ce soit dernièrement. J’arrive juste rien à gérer, je sais pas comment faire. Je … J’aimerais bien te parler de ce dont j’ai pas osé la dernière fois, si tu veux. » Il avait secoué vaguement la tête, non pas parce qu’il refusait mais parce qu’elle ne prenait pas les choses dans le bon ordre « C’est si toi tu veux. » Il ne la mettait pas dos au mur, si telle avait été sa volonté il se serait montré bien plus insistant, bien plus envahissant … Mais Hassan n’était simplement pas comme ça. « Je … J’aimerais juste que tu sois entièrement sincère avec moi, enfin … C’est pas vraiment le mot juste, parce que je sais que tu as toujours été sincère avec moi. Mais plutôt … Que tu ne cherches pas à arrondir les coins pour que ce soit plus facile à entendre pour moi. Tu verras, tu … tu comprendras quand tu sauras. » Malgré lui il avait senti son estomac se nouer, et son cœur cogner un peu plus fort dans sa poitrine. La demande de Joanne lui faisait peur, sans qu’il veuille se l’avouer. « On va monter dans mon bureau, on sera plus tranquilles. » avait-il finalement décidé avec une certaine douceur, en l’invitant à le suivre hors de l’amphithéâtre.

Le trajet jusqu’à son bureau n’avait pas changé depuis l’époque où tous les deux étaient encore mariés. Quatrième étage, bureau 421 ; Hassan avait presque été surpris de découvrir qu’il n’avait même pas été réattribué pendant son année et demi d’absence. L’intérieur non plus n’avait pas beaucoup changé, là où le brun était plutôt ordonné et savait garder sa maison propre et relativement rangée, son bureau de l’université ressemblait lui à un désordre organisé dans lequel lui se retrouvait sans mal mais qui à n’importe qui d’autre ne donnait l’air que d’un capharnaüm sans le moindre sens. Des dizaines de feuilles et de dossiers recouvraient le bureau en y laissant à peine la place suffisante à Hassan pour brancher son ordinateur portable, des étagères semblaient sur le point de s’écrouler sous le poids de tous les livres qu’elles soutenaient, et même le bocal de bonbons posé sur le meuble à côté de la bouilloire semblait ne pas avoir bougé d’un millimètre, Hassan se contentant de le remplir à nouveau de cochonneries bourrées de sucre dès qu’il était au trois-quarts vide. « Tu veux boire quelque chose ? » avait-il finalement demandé à Joanne après avoir refermé la porte derrière eux « Thé, café ? » Bien que ne buvant lui-même jamais de café il gardait toujours quelques dosettes de café soluble avec ses sachets de thé, pour les rares cas où il avait à recevoir quelqu’un dans ce qu’il appelait son « placard à balais personnel ». Les pièces attribués aux professeurs n’étaient en effet pas très grandes et pouvaient tout juste contenir un bureau. Alors que la jeune femme prenait finalement place sur le fauteuil qui faisait face à celui d’Hassan de l’autre côté du bureau, le brun avait reposé sur elle un regard d’inquiétude mêlée d’un brin d’impatience « Qu’est-ce qui se passe, Joanne ? » Il la voyait se tordre les doigts et mordiller le bout de sa lèvre inférieure, comme elle le faisait généralement quand quelque chose la tracassait, et les mots adressés par son ex-femme alors qu’ils étaient encore dans l’amphithéâtre continuaient de faire résonner en lui un air soucieux.
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Message(#)joassan + remember how we said together we would go far EmptyMar 9 Mai 2017 - 16:23


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Joanne connaissait le campus par coeur. Elle y avait passé des années et il n'y avait que de beaux souvenirs qui lui revenaient en tête lorsqu'elle notait certains détails. Cette dernière étape avant la vie active était dotée toujours d'une certaine naïveté, d'une certaine insouciance. Ils vivaient au jour le jour, reconnaissaient parfois qu'ils étaient peu enthousiastes d'aller en cours alors qu'il faisait merveilleusement beau dehors et qu'ils préféraient rester allongée dans l'herbe, à l'ombre d'un arbre. Rêveuse, Joanne avait alors l'impression que cette période remontait à une éternité, parce qu'il y avait tellement de choses qui s'étaient passées entre temps. Mais ça ne faisait que quelques années, en fin de compte, que Joanne avait quitté les bancs de l'université. C'était certainement par nostalgique qu'elle s'y était assise. Bien qu'elle n'était pas venue pour rien. Elle regardait Hassan poursuivre son cours, à le voir parler pendant près de trois heures sur divers sujets qui dépassaient parfois la jeune femme. En même temps, elle ne suivait quasiment pas. Elle était restée assise le temps que tous les étudiants ne quittent l'amphithéâtre, puis avait rejoint Hassan en bas, avec une certaine timidité. La réaction d'Hassan au son de sa voix fut sans appel. Cette grimace peu enthousiaste en disait long et même si elle s'y attendait, cela la blessa plus qu'elle ne l'aurait imaginé. Ca ne l'aidait pas vraiment dans la démarche dans laquelle elle s'était lancée. Sur le moment, elle avait envie de prendre ses jambes à son coup et ne plus rien faire, ayant l'impression qu'aucune de ses démarches n'étaient assez bien pour lui. Qu'importe. Elle était là, il l'avait remarqué, elle n'avait plus d'autres choix que d'avancer. "Il y avait une jeune stagiaire dans le salon, je me suis dit qu'il n'y avait aucun risque qu'elle me fasse un shampoing et un soin. Si seulement elle ne s'était pas trompée de types de produits pour faire ce soin en me massant les cheveux. Et le seul moyen décent qu'il y avait pour que ça passe inaperçu, c'était de teindre." expliqua-t-elle brièvement. "Il va falloir attendre un peu pour que je sois à nouveau blonde." Plein de soins capillaires en vue avant de pouvoir à nouveau s'éclaircir les cheveux. Bien qu'elle n'avait rien contre être brune, Joanne avait toujours préférée sa couleur naturelle. Il était certain qu'elle ne laisserait plus jamais qui que ce soit d'autres lui toucher les cheveux, mis à part ses  coiffeuses habituelles. Elle voulait se montrer conciliante, mais la petite blonde désormais brune était apparemment tombée sur la mauvaise personne. Daniel était longuement perplexe après avoir vu sa mère pour la première fois mais il avait fini par s'y habituer plus rapidement qu'espéré. Elle restait sa maman après tout : les mêmes yeux, le même sourire, la même voix, les mêmes câlins, les mêmes baisers.

Mais ce n'était certainement pas pour discuter de sa nouvelle couleur que Joanne était venue le voir directement à son lieu de travail. Elle n'osait pas vraiment l'appeler, ou l'écrire. Bien que ce soit des moyens de communications utile en temps voulu, cela faisait office de barrières pour de nombreuses circonstances et il y en avait déjà bien assez entre eux pour en mettre des nouvelles. Elle avait tenu à s'excuser pour le peu de nouvelles qu'elle avait donné au courant de ses dernières semaines, mais elle avait avorté sa phrase plus tôt. Cela semblait à nouveau contrarier Hassan, qui la reprit, afin qu'elle termine son explication. Elle ne voulait qu'il lui en veuille. Elle ne voulait pas revoir dans son regard cette déception, cette amertume, cette profonde lassitude lorsqu'elle lui tenterait de lui expliquer, de lui dire le fond de sa pensée. Qu'au final, il en aurait assez d'elle, de son instabilité, de son incapacité à gérer sa vie, à dire non, et au final, d'être toujours en contact avec Jamie. Hassan et Jamie se détestaient l'un l'autre, c'était on ne peu plus réciproque. Elle mentionnait le nom de l'un devant l'autre, leur poil s'hérisserait directement. Joanne se lançait alors dans une autre direction, avec plus d'explications. Le silence d'Hassan était angoissant et pas particulièrement aidant, mais elle continuait de débiter le fond de sa pensée, se fichant bien que cela ait un sens ou pas. Elle se sentait relativement prête à lui parler de ce qui la terrifiait depuis quelques mois, de ce qu'elle pensait être par rapport à Hassan. Cette pensée a pris des proportions indécentes, si bien que cela commençait à la bouffer de l'intérieur. Pendant longtemps, elle préférait rester dans l'ignorance. Mais ses longues discussions avec son psychologue avait fini par lui donner l'envie de savoir. Enfin, une envie, façon de parler. C'était plus un besoin. La seule chose qu'Hassan trouvait à dire après coup, c'était de l'inviter à aller dans son bureau, afin qu'ils soient plus isolés et qu'ils ne soient dérangés par personne. La marche fut particulièrement silencieuse. Elle était légèrement derrière lui, ne sachant où trop aller. Elle était assez surprise qu'il ait gardé le même bureau malgré son arrêt maladie. En entrant dans le bureau, elle reconnaissait là tout Hassan. Rien n'avait changé, d'apès les souvenirs qui lui restaient concernant cette pièce. "Un thé, s'il te plaît. Merci beaucoup." dit-elle avec un très vague sourire, avant de s'installer dans le fauteuil. Elle se tenait droite comme un pic, sentait son coeur battre à vive allure et si fort qu'elle ne s'entendait même plus penser. Une fois qu'il s'était également assis à sa place, Joanne sentait son regard se poser sur elle. Elle n'avait aucune envie de lever les yeux, de crainte de ce qu'elle pourrait voir dans cette paire d'iris bruns. Joanne imposait un long moment de silence, sans trop savoir par où commencer. A côté de cela, elle retenait ses larmes. Elle était terrorisée. Terrorisée de finir par l'entendre dire "oui, tout est de ta faute". Elle s'était déjà demandée comment elle pourrait vivre avec un tel poids sur les épaules – poids qu'elle avait déjà depuis quelques mois, soit dit en passant. A plusieurs reprises, Joanne tentait de prendre parole. Mais au dernier moment, elle se disait que ce n'était peut-être pas la meilleure façon de démarrer ce sujet de conversation. Il n'y avait pas de bonne façon de le faire, de toute évidence. "Pendant ma conversation avec Yasmine, il y a des choses qui ont été dites, enfin..." Joanne secoua négativement la tête. Non, pas comme ça. "Je sais que j'ai pas été la meilleure épouse qui soit, peut-être même que j'ai pas été assez bien avant même qu'on soit mariés, j'en sais trop rien à l'heure, je sais plus. Je sais que j'ai pas réagi comme il fallait le jour où tu as dit que tu voulais divorcer, et que je t'ai déçu, même que j'ai déçu plus d'une personne apparemment." Si Joanne disait tout ceci, c'était aussi pour elle. Il fallait qu'elle mette les choses à plat pour faire un peu plus d'ordre dans ses idées. Cela permettrait peut-être aussi à Hassan de comprendre tout son cheminement. "Elle m'a dit, mot pour mot, que oui, tu avais demandé le divorce parce que tu savais que je ne pourrais certainement pas supporter tout ça, et que tout ce que j'ai fait, c'était de prouver que c'était bel et bien le cas, et qu'au final, tu ne pouvais tout simplement pas compter sur moi. Et elle avait l'air particulièrement sûre de ce qu'elle disait en me disant que ça avait pas mal participé à te détruire." Yasmine avait dit des choses particulièrement dures à Joanne. Du moins, sa fragilité l'empêchait de relativiser et elle prenait absolument tout à coeur. Joanne essuya rapidement une première larme de sa joue, même si elle avait qu'il y allait en avoir bien plus par la suite. "Alors, je me suis demandée si... Enfin, j'ai plutôt fini par déduire que... tout est de ma faute." Joanne commençait vraiment à avoir mal aux doigts à force de se les torturer. Enfin, elle finit de lever ses yeux bleux bien humides vers lui. "Et je suis vraiment désolée si j'ai pas été à la hauteur, si... j'ai pas été là." Joanne sortait rapidement un mouchoir en papier de son sac à main. Il finit rapidement en boule au creux de sa main, le temps de lui parler de ce qu'elle craignait par dessus-tout. "Est-ce que je t'ai vraiment détruit, Hassan ? Avec tout ce qu'il s'est passé... Est-ce, de près ou de loin, c'est de ma faute si... si tu as voulu attenter à ta propre vie ?" finit-elle par lui demander, la voix particulièrement tremblante. Joanne se voyait déjà un peu comme une meurtrière. Pour elle, elle avait tué l'homme qu'il était avant, mais aussi leur relation, et peut-être même qu'elle avait failli le tuer lui. "Est-ce que c'est de ma faute ?" Elle voulait à la fois savoir et ne pas savoir. Elle angoissait tellement qu'elle avait l'impression qu'elle allait finir par faire un arrêt cardiaque, qu'elle allait se décomposer sur place. Peut-être que maintenant, il comprenait le sens de ce qu'elle lui avait dit à l'amphithéâtre.
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Message(#)joassan + remember how we said together we would go far EmptyVen 12 Mai 2017 - 20:43

Hassan avait écouté d’une oreille les mésaventures capillaires de Joanne, mais en réalité son esprit était ailleurs. Il ne parvenait plus à suivre le raisonnement de la jeune femme à son égard, de plus en plus sinueux et sujet à de brusques virages. Elle faisait un pas vers lui, parvenait à le persuader malgré sa prudence d’en faire un vers elle en retour, puis elle se volatilisait suffisamment longtemps pour commencer à lui faire regretter de s’être ainsi mis en abîme … Et lorsqu’il tentait de se faire une raison la mort dans l’âme, elle apparaissait de nouveau et refaisait un pas vers lui comme si son indécision n’avait fait aucun dégât durant sa période de silence. Elle en avait fait pourtant, aux remises en questions permanentes dont était assailli le brun à longueur de journées depuis qu’avait commencé le – long – chemin de sa rémission s’ajoutaient désormais celles qui étayaient sa relation avec Joanne, et le faisait se sentir bien en deçà de l’homme qu’elle attendait de lui qu’il soit. Comme s’il n’était plus suffisamment bien, suffisamment sûr … suffisamment tout. Lorsqu’elle avait ignoré sa question concernant Daniel, pourtant posée sans arrière-pensée et autre dessein que celui d’être soucieux d’autrui, il n’avait pas insisté et compris qu’elle n’était pas venue là pour discuter, et ne souhaitait rien d’autre que de pouvoir lui dire ce qu’elle avait à lui dire. Craignant alors d’être à nouveau la cible d’une salve de reproches qu’il lui faudrait encaisser sans broncher, il s’était fait une fleur autant qu’à elle en proposant de monter jusqu’à son bureau quatre étages plus haut. Il avait promis à Joanne de l’écouter quoi qu’elle décide de lui dire, et Hassan n’était pas homme à revenir sur une promesse … simplement avait-il l’impression d’avoir malgré lui mis le doigt dans un engrenage dont il ressortirait plus meurtri qu’il ne l’aurait voulu. Parce qu’au fond c’était aussi le propre de l’homme que de tenter de se protéger.

Une fois isolés dans la petite pièce qui lui servait de bureau, et dans laquelle régnait une persistante odeur de thé à la menthe, le brun avait d’ailleurs commencé par proposé à Joanne de boire quelque chose, et mis en marche la bouilloire – qu’il remplissait chaque matin avant son premier cours afin de ne pas avoir à multiplier sans cesse les allers-retours jusqu’à la fontaine à eau du couloir – lorsque la blonde avait répondu « Un thé, s’il te plait. Merci beaucoup. » Avec la méfiance de celui qui savait l’épée de Damoclès se balançant au dessus de sa tête, Hassan avait malgré tout gardé une certaine douceur dans la voix au moment de questionner la blonde sur ce qui l'amenait à lui et lui faisait craindre un soudain manque de sincérité de sa part. Le diagnostic de sa leucémie mis à part, il ne pensait pourtant pas en avoir déjà manqué à l’égard de la jeune femme. Se heurtant à un silence angoissé durant plusieurs minutes, le brun avait laissé à son ex-compagne le temps et le soin de trouver ses mots, se contentant lui de l’observer avec un mélange de tristesse et de nostalgie. « Pendant ma conversation avec Yasmine, il y a des choses qui ont été dites, enfin … » Pourtant certain que tout ce qu’il y avait eu à dire sur la question l’avait déjà été lors de leur précédente discussion, Hassan avait malgré tout laissé Joanne poursuivre pour aller au bout de son raisonnement « Je sais que j’ai pas été la meilleure épouse qui soit, peut-être même que j’ai pas été assez bien avant même qu’on soit mariés, j’en sais trop rien à l’heure qu’il est, je sais plus. Je sais que j’ai pas réagi comme il fallait le jour où tu as dit que tu voulais divorcer, et que je t’ai déçu, même que j’ai déçu plus d’une personne apparemment. » Elle en avait déçu, sans doute, tout comme lui en avait déçu en initiant ce divorce … Mais le mal était fait désormais, ils en payaient tous les deux le prix aujourd’hui, et le professeur ne voyait pas bien quel intérêt y’avait-il à continuer de ressasser à ce sujet en se demandant Et si j’avais fait telle chose ? Refaire le monde dans un coin de leur tête ne changerait rien aux faits. « Elle m’a dit, mot pour mot, que oui, tu avais demandé le divorce parce que tu savais que je ne pourrais certainement pas supporter tout ça, et que tout ce que j'ai fait, c’était de prouver que c’était bel et bien le cas, et qu’au final, tu ne pouvais tout simplement pas compter sur moi. » En vérité, Hassan avait l’impression que Joanne et lui avaient déjà eu cette discussion un milliard de fois. Il ne comprenait pas ce que la blonde attendait de lui, ce qu’elle espérait l’entendre dire … Elle avait demandé à ce qu’il ne manque pas de sincérité, et par conséquent elle devait bien se douter qu’il ne pouvait pas contredire tout ce qu’elle venait d’énoncer. « Et elle avait l’air particulièrement sûre de ce qu’elle disait en me disant que ça avait pas mal participé à te détruire. » Sentant la chair de poule glisser le long de ses bras, il avait dégluti avec difficulté, et saisi la boîte de mouchoirs dans l’un de ses tiroirs pour la tendre à Joanne en la voyant essuyer quelques larmes.

Il savait qu’il n’obtiendrait jamais la version objective de la conversation qu’avaient eu Yasmine et Joanne, et qu’il ne pourrait que tenter vainement de faire le tri entre ce que l’une et l’autre croyaient avoir dit, croyaient avoir compris, et étaient disposées à lui admettre à demi-mots et avec une certaine hésitation. « Alors, je me suis demandée si … Enfin, j’ai fini par déduire que … Tout est de ma faute. Et je suis vraiment désolée si j’ai pas été à la hauteur, si … j’ai pas été là. » Oubliant déjà la boîte de mouchoirs posée devant elle, la blonde en avait sorti un de son sac à main malgré ses doigts tremblants, et gardé le silence de longues secondes avant d’oser reprendre « Est-ce que je t’ai vraiment détruit, Hassan ? Avec tout ce qui s'est passé … Est-ce que, de près ou de loin, c’est de ma faute si … si tu as voulu attenter à ta propre vie ? Est-ce que c'est ma faute ? » Fermant les yeux un instant il avait lâché un soupir, et secoué vaguement la tête. Il comprenait mieux, maintenant. « Non, ce n’est pas ta faute. » La bouilloire s’était manifestée, et la gorge serrée Hassan avait quitté sa place pour servir une tasse de thé qu’il avait déposé devant Joanne, avant de s’asseoir sur le coin du bureau « Et je crois savoir pourquoi Yasmine t’as fait cette remarque … Pendant que tu étais à Londres on a parlé tous les deux. Ou plutôt j’ai parlé, et elle m’a écouté. De toi, entre autres choses. Et y’a eu … Elle m’a posé une question. Elle m’a demandé si j’avais envie d’être … enfin, de … tu vois. » Il espérait qu’elle voyait, parce qu’il ne tenait pas vraiment à être plus explicite à ce sujet. « Et je pouvais pas … répondre oui. Pas si je voulais être honnête. Mais ce n’est pas ta faute … ça n’a jamais été ta faute. Ce n’est pas la faute de qui que ce soit. » Depuis tout à l’heure il l’observait tordre ses doigts et triturer ses ongles avec angoisse, et finalement il avait saisi l’une de ses mains entre les siennes avec douceur. « J’ai eu cette psy les premiers mois de ma rémission … Elle n’arrêtait pas de me répéter à quel point c’était une chance que j’aille mieux, que j’avais aucune raison d’être malheureux, que je devais en profiter … reprendre le cours de ma vie. Elle pensait bien faire, je pense, ou du moins j’espère, mais avec le recul je me rends compte qu’elle faisait tout sauf m’aider … Elle se contentait de m’abrutir de cachetons, certains jours j’étais une pile électrique et d’autres j’arrivais même pas à sortir de mon lit. Je dormais plus, j’ai beau adorer mon métier je venais ici à reculons, j’osais plus appeler Qasim ou Yasmine parce qu’ils ont passé un an et demi à s’occuper de moi et que ça avait assez duré … C’était un cauchemar. » Il ne s’en rendait pas compte mais désormais ce n’était plus les mains de Joanne qui tremblaient, c’était les siennes. Comme sa voix, elle aussi tremblait tandis qu’il reprenait ses explications brouillonnes. « J’étais juste … fatigué. De tout. » C’était ce qu’il avait vainement tenté d’expliquer à Yasmine, mais sans trouver les mots juste pour qu’elle ne parvienne à le comprendre. « Et puis … comment j’étais supposé reprendre le cours de ma vie, alors que je l’avais jamais imaginé sans toi ? Je ne sais pas être heureux sans toi. » Finalement il avait baissé les yeux, il se sentait tellement stupide. Jouant silencieusement avec les doigts de Joanne pendant de longues secondes, il avait malgré tout repris en tentant de ravaler son trouble « Mais ça c’est mon problème, pas le tien. Et ce n’est pas ta faute, je veux te l’entendre dire, ce n’est pas ta faute … Faut que tu te sortes cette idée de la tête. Parce que c’est en train de te bouffer, et ça ne devrait pas. » Quittant finalement le bord de son bureau, il s’était accroupi près du fauteuil pour se mettre à la hauteur de Joanne, observant avec attention ses yeux bleus encore brillants des larmes qu’elle peinait à retenir.
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Message(#)joassan + remember how we said together we would go far EmptyDim 14 Mai 2017 - 0:34


remember how we said together we would go far
to me you don't have to keep hiding away who you are

Il est vrai que Joanne n'avait pas songé un seul instant à répondre à la question de son ex-mari, portant sur l'état de santé de Daniel. Ce n'était pas par impolitesse ou par désintérêt, mais ses pensées étaient déjà totalement rivés vers ce qu'elle comptait lui dire. Toutes ses émotions, toute sa concentration étaient focalisées sur ce point précis, et cela la sollicitait beaucoup au point d'en être épuisant. Oui, Joanne était fatiguée de garder tout ça pour elle depuis le mois de janvier, alors persuadée que la situation ne ferait qu'empirer si elle ouvrait la bouche devant qui que ce soit. C'était une idée judicieuse, que de s'isoler dans le bureau du professeur. Plus d'intimité, pas d'oreilles indiscrètes, il n'y avait pas à se maîtriser sur les mots, les réactions, tout pouvait être spontané. Joanne avait l'étrange impression de marcher dans le couloir de la mort, avant d'arriver à la pièce attribuée à Hassan. Une étrange sensation que l'heure de sa sentence avait sonné et que tout pourrait changer une fois qu'elle franchira le seuil de cette même porte. Elle avait la bouche sèche, elle se sentait fébrile et craignait de perdre connaissance à tout moment, tant elle était angoissée. Elle acceptait tout de même volontiers un thé, tout en sachant qu'elle prendrait une éternité pour le boire. Elle attendait que le liquide soit bien tiède avant de pouvoir tremper les lèvres. Joanne n'aimait lorsque son thé était trop chaud pour le boire, mais elle réchauffait toujours ses doigts contre la tasse. Mais elle ne pouvait pas déjà le faire, le thé n'était pas encore prêt. Il lui fallut de longues minutes avant de parvenir à dire quoi que ce soit. C'était un petit peu décousu, elle n'arrivait pas à donner un ordre précis à ses pensées. Mais au final, cela lui semblait relativement compréhensible. Du moins, elle espérait qu'Hassan le comprenne. Joanne voyait trouble tant les larmes s'accumulaient au bord de ses yeux. Dès qu'elles coulaient, d'autres venaient les remplacer au niveau de sa paupière inférieure. Bien qu'au fond, la jeune femme savait parfaitement le ressenti de son ex-compagnon par rapport à sa réaction suite à la demande de divorce, ne pas l'entendre la contredire une nouvelle fois était particulièrement douloureux. Qu'au final, tout ce qu'elle disait était vrai. Il y eut cette poignée de secondes où Joanne regrettait d'avoir parlé, même si lui ne demandait que ça, au final. Mais elle se disait déjà que c'était trop tard, qu'elle allait entendre ce qu'elle redoutait tant. Elle en était persuadée, convaincue. Si Yasmine le disait, c'était qu'elle n'avait peut-être pas si tort que ça. La brune était la personne la plus proche d'Hassan dernièrement, très bien placée pour savoir ce qu'il pouvait ressentir. Le soupir lâché par Hassan en disait déjà trop pour la jeune femme, qui gardait les yeux bien bas. Les mots énoncés ensuite étaient une véritable surprise. Le brun avait fini par se lever pour servir une tasse de thé à Joanne. Incapable de dire quoi que ce soit, elle le remercia d'un discret signe de tête, trop nerveuse et stupéfaite pour faire quoi que ce soit d'autre. Tout juste en face d'elle, il tentait de justifier – peut-être même de défendre la réaction de Yasmine. On n'était pas certain qu'elle le prenne bien ou pas. L'entendre dire qu'il n'avait pas véritablement envie d'être en vie était extrêmement dure. Il n'avait plus d'élan vital, plus de projets sur lesquels s'accrocher, un désintérêt global. Il s'évertuait à répéter dès qu'il le pouvait que ce n'était apparemment pas la faute de Joanne. Il avait pris l'une de ses mains entre les siennes, certainement pour qu'elle cesse de se torturer les doigts. Elle n'osait pas pour autant croiser son regard pendant qu'il se lançait dans ses propres explications. C'était peut-être à ce moment là, qu'il avait parlé à Yasmine de la fausse-couche, peut-être même de ses fausse-couches, et de tout ce qui pouvait s'en suivre. Joanne l'écoutait avec attention, elle serrait parfois un peu plus sa main lorsqu'il se confiait. Là, elle pouvait le comprendre. Ce n'était déjà pas facile d'admettre que l'on voyait un psy, encore moins d'avouer tout ce qui avait été dit durant ses séances. Lui aussi, avait eu des difficultés avec cette psy tout comme le courant n'était absolument pas passé entre celui de Joanne, après la première fausse-couche de cette dernière. Cette fatigue aussi, elle savait ce que c'était. Mais le plus dur à entendre, c'était la suite. Une déclaration d'amour, peut-être, une preuve d'affection qu'il avait conjugué au présent, admettant par là que c'était toujours le cas. C'était au tour d'Hassan de baisser les yeux. Rien de tout ceci n'était facile à dire pour lui. Ca n'était facile pour personne. Elle sentait sa main à lui trembler au moins tout autant qu'elle. Alors elle serrait un peu plus ses doigts avec les siens, mais les mots ne venaient toujours pas. Hassan finit par s'accroupir devant elle, afin d'attirer l'attention de son regard par le sien. Il n'y en avait pas beaucoup, qui parvenaient à chercher ainsi cette paire d'yeux bleus, et à faire en sorte que le contact soit maintenu. Il voulait l'entendre dire les mêmes mots qu'il ne cessait de répéter depuis qu'il avait repris la parole. "Ca m'a déjà bouffée, quelque part." souffla-t-elle, le visage encors bien crispé.  "Pendant tout ce temps, je m'étais dit que... si j'avais appuyé sur la gâchette ou si j'avais tendu la boîte de médicaments, c'était tout comme. Je..." Elle sanglotait quelques secondes. "C'était comme si c'était moi qui t'avait tué et... j'aurais jamais pas pu vivre, ni même survivre avec ça." Elle plaça sa main libre devant sa bouche pour assourdir ses pleurs devant cette image horrifiante qui défilait dans sa tête.  "J'aurais pas pu." répéta-t-elle en essuyant ses joues plus qu'humides. Elle hoquetait, ne sachant que trop dire pendant de longues minutes. "J'ai eu à peu près le même type de psy que toi, après ma fausse-couche. Il tenait à peu de choses près le même discours que la tienne. Je crois que ça n'a fait que empirer le tout." Alors elle comprenait son ressenti vis-à-vis de cette mauvais expérience. C'était curieux que, dans tout leur malheur, ils trouvaient ça et là quelques points communs.  "Je... Je crois que je m'en voudrais toujours un peu, je ne sais pas pourquoi. Même si tu veux que je m'évertue à répéter que ce n'était pas de ma faute. J'ai eu plusieurs mois pour me persuader de l'inverse." Elle sourit, mais avec une profonde tristesse. Joanne ne saurait dire si elle se sentait véritablement mieux ou pas. Joanne se penchait pour déposer un baiser sur le dos de la main d'Hassan, avec ses lèvres humides de larmes.  "Je pense savoir ce que tu veux dire, quand on parle de cette fatigue. Je... Je suppose qu'il faut le ressentir soi-même de près ou de loin pour avoir une idée, et pendant un moment, j'étais aussi très fatiguée. Même là, c'est parfois compliqué. Justement, tout est trop compliqué, je n'arrive pas à gérer, et ça donne juste envie de déguerpir loin d'ici, ne plus avoir à supporter tout ça plus longtemps." Joanne passait ses doigts dans ses cheveux teints avec sa main libre. "Mais il y a Daniel, je me suis dit qu'il compte sur moi tous les jours. Et je me suis dit que peut-être il y en avait d'autres aussi qui ne voudraient pas me voir partir comme ça. Mais pendant longtemps, je m'étais longuement dit que je ne comptais peut-être que pour lui. Ca n'allait pas vraiment entre toi et moi, ni avec Jamie, ni avec mes parents. Je me sentais seule et j'avais tout le temps du monde pour tout remettre en question. Je ne sais pas où j'en suis, ni ce que je fais. Lorsque ça ne concerne pas le petit, tout dérape. D'une manière ou d'une autre." Comme un automate uniquement paramétré pour s'occuper de ce petit garçon qu'elle aimait bien plus que tout autre chose en ce monde. Le reste, elle ne savait pas faire. Ni avec Hassan, ni Jamie, ni ses parents, ni qui que ce soit d'autre dans son entourage. "Après cette conversation avec elle, ça me semblait évident, d'être la responsable de ta chute, de tout." conclut-elle. Joanne tentait de prendre de profondes respirations pour retrouver son calme, en vain.  "Et ça me rend encore plus triste de savoir que tu ne sais pas être heureux sans moi. C'est flatteur, dans un sens, et je sais que c'est beaucoup, pour toi, de me dire tout ça. De me dire tout le reste. Ca compte beaucoup pour moi, que tu aies... bien voulu un peu m'en parler." Joanne se demandait, si dans ces moments où il n'osait même plus appeler son frère ou Yasmine, il avait songé à l'appeler elle. Après le divorce, avant qu'ils ne se revoient hasardeusement.  "J'ai jamais souhaité tout ça pour toi, tu sais." lui confessa-t-elle. "A aucun moment je ne voulais que quelque chose de mal ne t'arrive, tu sais. Je t'ai jamais détesté, je t'en ai jamais voulu. Je me suis toujours dit que tu avais du trouver mieux ailleurs, que tu avais trouvé une vie plus heureuse, même si la nôtre n'était pas si mal que ça." Un vague sourire apparut sur son visage, très discret, il fallait le deviner. "J'ai jamais souhaité tout ce qui t'es arrivé." Elle espérait que d'un côté, il savait. Elle espérait qu'il la connaisse suffisamment pour savoir tout ça. "C'est dur à entendre et à accepter, de savoir tout ce que tu as vécu, de t'entendre dire que ça ne va pas mieux malgré le temps, que même les plus proches n'arrivent peut-être pas à tout comprendre. J'en fais partie. Et je pense savoir ce que c'est, mais peut-être juste pas à la même échelle. De ne pas trouver les mots, alors que tout ce qu'on demande, c'est d'être compris, c'est de plus être seul, au final. Je n'en sais rien." Joanne divaguait totalement, mais qu'importe. Son psy serait déjà bien ravi de savoir qu'elle parlait, au moins, alors qu'elle était bien trop longtemps restée murée dans son silence, persuadée qu'elle ne pouvait que faire du mal à disant tout ce qu'elle avait sur le coeur.  "Et avec tout ça, j'avais fini par me dire que c'était peut-être justement le simple fait que je sois là, qui t'empêchait d'avancer, ou ne serait-ce que d'entrevoir un avenir. Tout concordait avec tout dans ma tête, tout avait tellement de sens, d'un coup." Des liens qui se créaient parmi le flot d'idées noires de la jeune femme, la menant ainsi vers une forme particulière de paranoïa. "Dit comme ça, je semblait vraiment ridicule, je sais, mais je te promets que tout avait sens, que tout était lié au final, et c'était un tableau tellement convaincant..." Elle ne savait pas s'il suivait tout ce flot de pensées qu'elle partageait de manière assez aléatoire, rebondissant sur des phrases qu'il avait dites bien avant. Joanne se laissa alors glisser du fauteuil, pour retomber sur ses genoux. Toujours en sanglot, elle peinait bien à retrouver un peu de son calme. Elle posa son front contre le haut du torse d'Hassan alors que ses larmes tombaient une à une sur le sol. Il y avait toute cette charge émotionnelle, cumulée pendant d'interminables mois, regroupant angoisse, terreur, tristesse, désarroi, peine, culpabilité, qui sortaient et qui s'évacuaient par ces quelques gouttes qui jonchaient désormais le sol.
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Message(#)joassan + remember how we said together we would go far EmptyMar 23 Mai 2017 - 2:20

Il y avait sans doute un peu d’ironie dans la façon dont Hassan s’imaginait naïvement que de le dire à haute-voix suffirait à ce que Joanne comprenne qu’elle n’avait pas à se sentir coupable. C’était demander ce que lui-même n’était pas capable d’entreprendre au fond, tant la culpabilité concernant cet acte désespéré qu’il avait commis continuait de le ronger semaine après semaine, mois après mois. Culpabilité à l’égard des Khadji, à l’égard de Qasim, à l’égard de ses parents même pour qui le suicide serait apparu comme une trahison autant qu’une honte … Culpabilité aussi parce qu’il avait malgré lui prouvé à Qasim et à Yasmine qu’ils ne pouvaient pas lui faire confiance. Culpabilité enfin dirigée contre lui-même, de ne pas avoir su faire preuve de suffisamment de force intérieure pour résister à la volonté désespérée d’en finir. Et malgré tout cela il avait encore l’espoir qu’un simple « ce n’est pas ta faute » suffirait à faire entendre raison à la petite tête blonde et têtue que savait être Joanne. « Ça m’a déjà bouffée, quelque part. » avait-elle d’ailleurs avoué à voix basse, tant qu’il se baissait pour se mettre à son niveau et croiser son regard accablé. « Pendant tout ce temps, je m’étais dit que … si j’avais appuyé sur la gâchette ou si j’avais tendu la boite de médicaments, c’était tout comme. Je … C’était comme si c’était moi qui t’avais tué et … J’aurai jamais pu vivre, ni même survivre à ça. J’aurai pas pu. » Hoquetant pour tenter de réprimer un nouveau sanglot, la blonde avait porté une main à sa bouche, l’autre toujours prise entre les doigts qu’Hassan resserrait autour d’elle dans une vaine tentative de réconfort. Il se sentait un peu mis à nu en évoquant ainsi les échanges entre lui et cette psy qu’il avait longtemps eu tellement honte de consulter, et qui avec le recul ne lui avait été d’aucune aide et avait – involontairement – provoqué sa chute, aussi que Joanne en fasse de même avait l'espace de quelques secondes permis à Hassan de regagner un brin de confiance, bien que totalement infondé. Reste que, sans qu’il n’en soit vraiment surpris, Joanne lui avait ensuite avoué avec ce qu’il prenait pour une sorte de résignation « Je … je crois que je m’en voudrai toujours un peu, je ne sais pas pourquoi. Même si tu veux que je m’évertue à te répéter que ce n’était pas ma faute. J’ai eu plusieurs mois pour me persuader de l’inverse. » Il avait vaguement secoué la tête, au fond il savait qu’il n’aurait pas dû s’attendre à autre chose. « Alors quand tu y penseras trop essaye juste de te rappeler de moi en train de t’assurer le contraire. » Posant finalement un genou à terre, il l’avait laissée déposer un baiser humide sur le dos de sa main, et de son autre main il avait essuyé quelques nouvelles larmes au-dessous des yeux de la jeune femme.

Peut-être parce qu’Hassan le premier avait consenti à avouer un peu de ce qui lui pesait et avait accompagné cette décision insensée dont Joanne se sentait la responsable, cette dernière avait trouvé la force d’en faire de même et de lever un peu le voile sur les doutes et les angoisses qui l’habitaient. La blonde avait raison sur un point, il y avait de ces aveux et explications qui ne faisaient sens que lorsqu’on y avait soi-même été confronté, et qui permettaient de comprendre avec clarté des aveux pourtant faits à demi-mots et avec pudeur. Cette impression de fatigue, de noyade, de ne plus savoir quand ni comment, ni quoi faire ni pourquoi … Et ce besoin de quelqu’un ou de quelque chose à quoi se raccrocher, Daniel représentant sans doute pour Joanne ce qui avait manqué à Hassan à l’époque, ou même encore maintenant. Ce besoin égoïste mais irrépressible pour ne pas basculer totalement d’être indispensable à quelqu’un. Suffisant pour ne pas basculer mais pas assez pour donner un sens au reste « Je ne sais pas où j’en suis, ni ce que je fais. Lorsque ça ne concerne pas le petit, tout dérape. D’une manière ou d’une autre. » Il ne savait pas vraiment quoi lui dire, il n’était même pas certain qu’elle attende de lui qu’il dise quoi que ce soit. Un « ça va aller » semblait bien peu de choses face à ce qui semblait la ronger. « Après cette conversation avec elle, ça me semblait évident, d’être la responsable de ta chute, de tout. Et ça me rend encore plus triste de savoir que tu ne sais pas être heureux sans moi. C’est flatteur, dans un sens, et je sais que c’est beaucoup, pour toi, de me dire tout ça. De me dire le reste. Ça compte beaucoup pour moi, que tu aies … bien voulu m’en parler. » Le mot piquait et rappait comme du papier de verre, flatteur, le genre d’adjectif que l’on réservait au compliment de l’inconnu croisé au hasard et à qui l’on n’avait rien de mieux, rien de plus sincère à répondre. C’était tendre un « je t’aime » et se voir offrir un « merci » en retour … Elle lui avait dit, pourtant. L’avait-elle oublié ? Et gardant le silence Hassan avait détourné les yeux avec le regret et l’amertume de celui qui en avait trop dit et s’était mis en péril tout seul. « J’ai jamais souhaité tout ça pour toi, tu sais. A aucun moment je ne voulais que quelque chose de mal ne t’arrive, tu sais. Je ne t’ai jamais détesté, je ne t’en ai jamais voulu. Je me suis toujours dit que tu avais dû trouver mieux ailleurs, que tu avais trouvé une vie plus heureuse, même si la nôtre n’était pas si mal que ça. J’ai jamais souhaité tout ce qui t’es arrivé. » Il savait, oui. Il n’en doutait pas, ne l’accusait même pas, et comme s’il s’en sentait subitement lui-même accusé le brun avait secoué la tête et fait valoir dans un murmure d’incompréhension « J’ai jamais pensé une telle chose … » Joanne ne semblant pas capable d’arrêter le flot de paroles dont elle se délestait en reprenant déjà « C’est dur à entendre et à accepter, de savoir tout ce que tu as vécu, de t’entendre dire que ça ne va pas mieux malgré le temps, que même les plus proches n’arrivent peut-être pas à tout comprendre. J’en fais partie. Et je pense savoir ce que c’est, mais peut-être juste pas à la même échelle. De ne pas trouver les mots, alors que tout ce qu’on demande, c’est d’être compris, c’est de ne plus être seul, au final. Je n’en sais rien. »

Lentement, inconsciemment, sa main et celle de Joanne s’étaient séparées et Hassan avait touché le sol pour de bon, son dos allant s’appuyer contre le côté de son bureau et l’une de ses jambes se repliant vers lui. Il écoutait Joanne mais quelque part elle ne semblait plus être là, et occulter où elle était, pourquoi, et avec qui. Son regard fixait un point dieu sait où, et le silence finalement avait remplacé la cascade de ses mots, troublé seulement par les sanglots étouffés dont elle était encore secouée à intervalles réguliers. « Et avec tout ça, j’avais fini par me dire que c’était peut-être justement le simple fait que je sois là, qui t’empêchait d’avancer, ou ne serait-ce que d’entrevoir un avenir. Tout concordait avec tout dans ma tête, tout avait tellement de s’en, d’un coup. Dit comme ça, je semble vraiment ridicule, je sais, mais je te promets que tout avait sens, que tout était lié au final, et c’était un tableau tellement convaincant … » C’était tellement de gâchis. Pour elle, pour lui, pour ce qu’ils avaient été tous les deux et pour ce qu’ils pouvaient devenir … Tellement de gâchis qui compressait la poitrine d’Hassan et rendait chacune de ses respirations douloureuses, et qui semblait maintenant s’abattre sur les épaules de la blonde tandis qu’elle glissait au bas du fauteuil, ses genoux cognant contre le sol dans un bruit mat. « Joanne … » Chaque syllabe semblait sortir de sa bouche avec douleur et difficulté, sa propre détresse latente réveillée par celle par laquelle Joanne se laissait à présent déborder. Sa main trouvant à nouveau celle de la jeune femme et celle-ci se laissant finalement glisser contre lui, ses pleurs étouffés contre le torse du brun, Hassan l’enserrant de ses bras pour l’attirer à lui et la laisser pleurer ton son soûl si elle le souhaitait. Lui ne savait plus quoi dire, quoi faire, et ayant répondu à la question qui avait motivé la venue de Joanne à l’université il n’était une fois encore plus certain qu’elle n’ait envie de l’entendre ou de l’écouter pour autre chose. « Shhht … ça va aller. Shhht. » Pour lui-même il n’en savait rien, mais pour Joanne au moins. Elle avait dit ce qu’elle avait à dire, et entendu ce qu’elle voulait entendre … Elle ne s’en convaincrait peut-être pas tout de suite mais elle finirait par le faire, et elle passerait à autre chose. Elle irait mieux.

Les minutes passant Hassan n’avait plus rien dit. Silencieusement il s’était contenté de bercer doucement Joanne contre lui, la laissant épuiser ses larmes et prendre le temps nécessaire pour calmer ses sanglots. Son thé avait refroidi depuis longtemps, le brun laissait l’arrière de sa tête reposer contre le bureau avec lassitude, quant à ses doigts ils caressaient la chevelure blonde de Joanne avec douceur. Ils étaient restés là un long moment, ou peut-être pas aussi long qu’ils en avaient eu l’impression, mais lorsqu’Hassan avait repris la parole sa voix lui avait donné l’impression de ne pas avoir sorti le moindre son depuis une éternité « Qu’est-ce qui va se passer, maintenant ? » C’était plus un murmure qu’autre chose en fin de compte, et décollant un peu sa tête du bureau il avait baissé vers Joanne un regard triste … ou tristement résigné. « J’ai pas envie de … Je veux pas être ce gars auquel tu penses simplement devoir quelque chose. Ou vers lequel tu reviens quand tu as peur qu’il fasse une connerie. J’ai pas envie que ça se résume à ça. » A elle qui quitterait ce bureau en promettant un « bientôt » qui finalement ne viendrait pas. A un silence radio troublé simplement par des messages laconiques pour l’informer qu’elle partait ici ou là avec lui, comme si ces derniers mois n’avaient jamais existé, comme si soudainement la petite blonde violentée et malheureuse qui s’était confiée à lui n’avait été qu’un mirage qu’elle avait déjà oublié. « Ça s’est pas passé comme tu l’imagines, tu sais … » Réalisant qu’elle ne pouvait pas avoir suivi le fil de ses pensées et la manière dont il en était arrivé à cela, il avait repris « T’as pas subitement cessé de faire partie de ma vie le jour où on a divorcé … T’étais toujours là, dans un coin de ma tête, en permanence. Tu dois t’imaginer que j’avais d’autres chats à fouetter et pas le temps de penser à toi, mais c’est faux. » Il ne savait pas trop pourquoi il ressentait subitement le besoin de faire valoir ce détail. Quelque part il avait la sensation que c’était ce que Joanne s’imaginait, que puisqu’il était à l’origine de ce divorce il n’avait jamais douté, ou ne s’était jamais demandé s’il n’avait pas fait la plus grosse erreur de sa vie … Il n’avait pas subitement cessé de la considérer comme sa femme. En vérité Joanne était probablement restée femme aux yeux d’Hassan bien plus longtemps que lui n’était resté mari aux yeux de la blonde. « Je t’ennuie avec mes états d’âme. » Même pas une question, presque une constatation … Il ne savait même pas ce qu’il espérait l’entendre dire. Il la gardait toujours contre lui et continuait de caresser ses cheveux d’un geste distrait mais il la sentait déjà lui filer à nouveau tel du sable entre les doigts.
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Message(#)joassan + remember how we said together we would go far EmptyMar 23 Mai 2017 - 21:19


remember how we said together we would go far
to me you don't have to keep hiding away who you are

C'était une partie de sa personnalité que Joanne avait inconsciemment forgé dès qu'Hassan avait quitté la maison, après avoir annoncé sa volonté de divorcer. Elle ignorait qu'il partait surtout pour ne pas l'entendre pleurer. Joanne avait prétendu qu'elle devait aller chercher quelque chose dans leur chambre afin de s'isoler, il avait forcément du deviner, au bout d'un moment, qu'elle n'y avait que pour pleurer longuement. La douleur ressentie face à cette séparation imminente était indescriptible. Joanne préférait l'oublier, mais cette même souffrance demeurait et avait remodelé ce qu'elle fut jadis. Tout était alors remis en question, et il n'y avait pas eu un seul moment où elle accusait Hassan, où elle lui en voulait. Elle se demandait surtout ce qu'elle n'avait fait ou pas faire durant toutes ces années de vie commune pour qu'il vienne demander à ce qu'ils se séparent. Cette manière de penser là venait de la manière dont sa famille la considérait durant son enfance. Joanne était la plus jeune, il était évident qu'elle ne puisse pas prendre de décisions toutes seules, ou qu'elle fasse tout de travers au point de devoir réajuster le tir. Rien n'était assez bien pour elle. On mettait tout en doute, de ce qu'elle pouvait faire. Elle se souvenait à quel point ce fut laborieux pour que son père accepte qu'elle parte à Brisbane pour poursuivre ses études. Ce n'était qu'un exemple parmi tant d'autres. Il était évident pour la petite blonde à l'époque que c'était de sa faute, pour le divorce. Sa vitalité s'était alors éteinte, comme si son corps était prêt à mourir en même temps qu'Hassan, sans savoir qu'il était supposé être condamné. Mais ses sentiments pour lui, eux, persistaient. Et même s'ils étaient beaux, ils étaient tout aussi douloureux pour la jeune femme. La transformation fut radicale, et n'était pas bénéfique, loin de là. A croire qu'ils s'étaient éteints tous les deux, en même temps que leur couple, arrachant à l'un l'autre une partie d'eux-mêmes en brisant un mariage qui faisait rêver. Parce que tout allait si bien. Hassan voulait à tout prix qu'elle extirpe certaines idées de sa tête. Des pensées qu'elles s'étaient construites à partir de preuves qui lui semblaient évidentes. Il essuyait délicatement ses larmes pendant qu'elle embrassait son autre main, lui conseillant de se rappeler ce qu'il venait tout juste de lui dire. Que son suicide n'était pas de sa faute. Hassan était pris d'une certaine lassitude, d'un désespoir. Joanne était déjà venue à se demander ce qu'il aurait espéré voir, le jour où ils s'étaient revus : s'il avait préféré la voir seule, avec l'espoir qu'elle accepte de le reprendre, ou de voir si elle avait pu continuer sans lui. C'était soit l'un, soit l'autre, mais aucune des deux options n'auraient pu le satisfaire, au fond. Pas alors que, au fond, leur mariage n'était pas véritablement mort. Cela allait bien au-delà de quelques papiers signés. Comme si un cadenas venait de sauter, Joanne continuait de parler, de dire beaucoup de choses qui lui pesaient depuis des mois, peut-être même des années. Elle ignorait d'où venait cette force et cette envie de lui partager ce qu'elle avait gardé pour elle jusqu'ici. La jeune femme avait bien remarqué qu'il y avait certaines phrases qui lui déplaisaient, au point de devoir détourner le regard, de grimacer même très discrètement. Cela aurait pu passer inaperçu, mais certainement pas avec elle. Elle avait vécu avec lui pendant dix ans après tout, elle connaissait très bien ses mimiques. Elle tenait à lui avouer qu'elle ne l'avait jamais haï, qu'elle ne lui avait jamais souhaité quoi que ce soit de mal par vengeance. Parce que Joanne n'était pas une femme rancunière, loin de là, à moins que ce ne soit que dans le jeu ou la plaisanterie. Mais elle n'était pas méchante à ce point. Hassan voulait lui préciser qu'il n'avait jamais pensé pareilles choses également. Elle voulait juste qu'il le sache. Et Joanne continuait de parler, surtout parce qu'elle en avait besoin. Elle n'attendait rien de lui, si ce n'est son écoute, et ça, il l'avait toujours fait. Comme toujours, lorsqu'elle se lançait dans de telles tirades, Joanne ne semblait plus vraiment être là. Son regard était vide, son visage, inexpressif. Son corps et son esprit ne faisaient que lui demander un peu de répit au milieu de toute ces larmes et de toutes ces idées idées noires qui la poursuivaient en permanence. C'en était angoissant. Et lorsqu'elle était à nouveau là, ce n'était que pour se replonger dans des pleurs qui semblaient être incessants. Même si leurs mains s'étaient détachées de l'une l'autre un peu plus tôt, elles se retrouvaient dès lors que Joanne s'était laissée tombée sur ses genoux. Le beau brun la prit délicatement dans ses bras pour l'enlacer avec une tendresse qui lui était propre, laissant la jeune femme déverser toutes les larmes qu'elle avait besoin d'évacuer. Elle sentait qu'il n'allait pas bien non plus, comme si les mots qu'elle avait prononcé était de trop pour lui. Ca va aller, disait-il. Une phrase que l'on aimait et que l'on détestait à la fois. Parce que sur le coup, ça n'allait pas bien, et on ne voyait pas comment s'en sortir. Mais d'un autre sens, elle avait besoin de l'entendre. De se dire qu'il y avait encore peut-être un peu de lumière pour elle aussi, dans les ténèbres qu'elle s'était créées. Elle avait eu besoin de longues minutes avant qu'elle ne parvienne à se calmer. C'était un decrescendo particulièrement long. Les pleurs avaient épuisé la petite brune, et elle se laissait bercer par la chaleur émanant du corps de son ex-mari. Joanne avait également entouré son corps de ses bras. Elle avait toujours beaucoup d'affection à donner. Lui caressait ses cheveux, ne lassant apparemment pas de mêler ses doigts dans ses boucles. Jusqu'à ce qu'il reprenne la parole, allant chercher le regard bleu de Joanne. Ses yeux à lui, eux, étaient particulièrement tristes, et cela lui faisait mal au coeur de le voir ainsi. "Je ne pensais à ni l'un, ni l'autre." répondit-elle tout aussi bas en se redressant un petit peu, mais tout en restant bien dans ses bras. "Je vais pas te fliquer, Hassan. Ce n'est pas mon genre et ce n'est pas le type de comportement qui peut t'aider, je pense." Joanne espérait qu'il la croit. Elle haussa les épaules et soupira ensuite. Encore une fois, elle se demandait pourquoi tout était si compliqué. "Je te l'ai déjà dit, je n'ai pas envie que tu sortes de ma vie. Ca, ça tient toujours. A moins que tu ne veuilles que je sorte de la tienne." Au fond, ils s'accrocheraient certainement à l'un l'autre pendant très longtemps. "Mais je ne sais pas ce qu'il va se passer." Elle n'en avait aucune idée et espérait trouver rapidement un début de réponse à cette question qui leur pesait à tous les deux. Hassan jugeait de parler un peu de sa vie à lui, après le divorce. Contrairement à ce que Joanne avait pu penser, il avait continué à songer à elle. Elle était toujours là, quelque part, pour lui, alors qu'il avait bien d'autres choses à penser. Ces paroles touchaient énormément Joanne, elle qui pensait être passée à la trappe dès que les papiers furent signés. "Non, tu ne m'ennuies pas." lui assura-t-elle aussitôt. "C'est quelque chose qui compte beaucoup pour moi." Même si ce n'était qu'un détail pour certains. "Si tu veux en partager d'autres, je serais ravie de t'écouter. J'ai toujours aimé t'écouter." dit-elle en posant sa main sur son torse alors qu'elle se blottissait à nouveau contre lui. Joanne avait toujours été une oreille attentive, elle avait toujours aimé sa voix. Bien qu'elle ne suivait aucun de ses cours, elle le voyait et l'entendait parler, et ça lui suffisait. C'était encore mieux lorsqu'il ne s'adressait qu'à elle, lorsqu'il se confiait, ou même, plus banalement, lorsqu'ils parlaient de tout et de rien. "J'ai pris plusieurs semaines, avant de retirer mes bagues." confia-t-elle quelques minutes plus tard. "Quand j'étais à l'hôpital, ils m'ont demandés si l'on devait te prévenir, parce que l'alliance était toujours à sa place. Ils m'ont regardé très bizarrement lorsque je leur ai dis que j'étais divorcée, c'en était blessant. Mais je pouvais pas encore les enlever, à ce moment là." La symbolique du mariage était extrêmement important pour Joanne, plus que tout, et Hassan en avait parfaitement conscience. C'était certainement l'une des raisons qui l'avait poussé à tout faire bien, de A à Z, sans fausse note. Alors il devait aussi savoir la valeur de l'alliance et de la bague de fiançailles aux yeux de son ex-femme – la considérait-elle comme telle ? "Quand je les ai enlevé, c'était comme si j'arrachais une partie de moi. C'et un peu le cas, je suppose." Encore une fois, son regard était vague, le ton de sa voix, presque rêveur, mais éreinté par ces douloureux souvenirs. "Elles sont dans ma poche." avoua-t-elle quelques minutes plus tard. "Je ne sais pas trop pourquoi, mais j'avais envie de les avoir près de moi." Elle n'avait aucune explication de ce désir pour le moins surprenant et déroutant à la fois. Elle n'avait jamais voulu s'en séparer et elle n'avait jamais parlé de ces bijoux là à Jamie, ni même à ses parents. A vrai dire, il n'y avait que Sophia qui savait qu'elle les avait gardé. Maintenant, Hassan le savait aussi. "Je ne sais pas ce qu'il va se passer." pensa-t-elle tout haut, songeant à la question posée un peu plus tôt. "Il y a... tous ces sentiments que j'ai pour toi, mais je ne sais pas quoi en faire. Je ne sais même pas comment sera fait demain, je n'arrive plus à envisager quoi que ce soit." Difficile pour elle de faire le tri dans ses idées. "Ce que je sais... C'est que je veux être là pour toi. Pas parce que je pense que je te dois quelque chose, comme tu l'as dit avant, c'est pas ça. C'est être là... Pour être là. Quand deux personnes se connaissent bien et qui savent qu'ils peuvent compter sur l'un l'autre." Joanne n'a pas été assez pour lui, et elle le regrettait énormément. "Il y a tellement de choses qu'on a réussi à... mettre à plat, à se dire, même si ce n'était pas facile, même si nous a fait du mal, même si parfois, ça a tout empiré. Mais j'ai envie de croire que ça peut aller mieux, qu'on a aussi droit à un peu de répit pour qu'on puisse sourire à nouveau, s'apprécier, ce genre de choses..." Elle soupira. "Ca n'a aucun sens, ce que je dis. Tout était pourtant si clair dans ma tête, et là, c'est du grand n'importe quoi, ça n'a aucun sens et ça ne traduit pas tout ce que je pensais." Ca l'énervait, de ne pas toujours être capable de retranscrire parfaitement le cours de sa pensée. "Tu vois ce que je veux dire ?" Joanne finit par se redresser pour attraper son regard dans le sien. "Mes réactions, ma manière de faire sont certainement loin de ce que tu pensais de moi, peut-être même que tu ne me reconnais plus dans ce que je suis aujourd'hui, dans ce que j'ai pu faire, ou ne pas faire, mais..." Encore une fois, Joanne s'exaspérait toute seule. Elle avait l'impression que tout ce qui sortait de sa bouche n'avait aucun sens. "Mais il y a cette partie de moi qui sera toujours accroché à toi, quoi que je puisse faire." C'était un peu la même chose avec Jamie, à vrai dire. Et l'un comme l'autre devait haïr le fait même que Joanne puisse tenir à l'autre et vice-versa. "Toi, tu as envie de quoi ? Tu as envie qu'il se passe quoi ?" lui demanda-t-elle en retour, pour voir s'il avait des désirs, des pistes. Joanne se doutait un peu qu'il n'allait pas vraiment pouvoir répondre à sa question. S'il lui avait demandé, ce n'était pas pour rien, peut-être que lui aussi cherchait des réponses dans les siennes.
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Message(#)joassan + remember how we said together we would go far EmptyLun 5 Juin 2017 - 21:05

Cela pouvait sembler assez paradoxal, qu’Hassan soit toujours si certain que les choses allaient s’arranger lorsqu’il s’agissait d’autrui. Mais contrairement aux apparences le brun n’avait pas totalement perdu l’optimisme qui l’avait toujours caractérisé … Il n’était simplement plus capable de l’appliquer à sa propre personne. Alors oui peut-être que Joanne penserait qu’il ne s’agissait que d’une formule toute faite, destinée à assécher ses larmes et à bercer ses angoisses, mais dans l’esprit du brun il s’agissait d’une vérité dont il suffisait de laisser le temps au temps de faire ses preuves. Là, blottie contre lui, elle lui rappelait ces nuits où réveillée par un cauchemar ou un coup de tonnerre elle enfouissait sa tête contre son épaule en attendant que l’orage passe ou que l’image désagréable s’efface de son esprit … Aujourd’hui l’orage n’était pas au-dessus de leurs têtes mais quelque part sous ces cheveux jadis blonds. Une tempête intérieure que Joanne tentait de calmer en laissant minute après minute les hoquets de son chagrin s’atténuer, puis finalement s’arrêter. Et maintenant ? « Je ne pensais ni à l’un ni à l’autre. » murmurait-elle en levant la tête vers lui, tandis qu’il peinait à comprendre où tout cela était censé les mener. A ce qu’elle disparaisse à nouveau comme la marée et revienne à toute allure pour le noyer lorsqu’il ne s’y attendrait pas ou bien se penserait hors d’atteinte, trop près du rivage. « Je vais pas te fliquer, Hassan. Ce n’est pas mon genre et ce n’est pas le type de comportement qui peut t’aider, je pense. » Non, c’est vrai. Comprendre où il mettait les pieds en revanche l’aiderait un peu, et pour l’instant il n’en avait pas la moindre idée. « Je te l’ai déjà dit, je n’ai pas envie que tu sortes de ma vie. Ça tient toujours. A moins que tu ne veuilles que je sorte de la tienne. » Il avait secoué la tête, à la fois parce que la réponse était non, bien sûr que non, mais également parce qu’il la sentait retourner la situation en oubliant que c’était elle qui venait de le laisser à nouveau un mois sans vraies nouvelles. « Mais je ne sais pas ce qu’il va se passer. » Lentement, peut-être un peu las, il avait laissé sa tête reposer à nouveau contre le bureau en retenant un soupir. Avait-elle seulement conscience qu’il l’attendait ? Sans doute pas. Sans doute parce qu’elle-même ne l’attendait pas.

Dans l’imaginaire de Joanne Hassan semblait être ce gars qui ne regardait pas en arrière, qui n’avait pas eu la moindre hésitation quant au fait de mettre fin à leur mariage, et qui à peine le divorce prononcé aurait rangé souvenirs et sentiments à son égard dans une petite boîte rangée dans un coin et rapidement oubliée. Ce n’était pas sa faute, il avait tout fait pour qu'elle raisonne de cette façon. Mais la blonde n’y était pas du tout, et n’avait pas idée de la torture de tous les instants qu’avait représenté le fait de ne pas chercher à la recontacter, de ne pas faire marche arrière et de ne pas céder à ce besoin d’elle qui avait subsisté pendant des semaines, des mois. Des années. Et l’avouer maintenant n’avait aucun sens. « Non, tu ne m’ennuies pas. C’est quelque chose qui compte beaucoup pour moi. » La main glissant contre son torse, elle s’était à nouveau serrée contre lui « Si tu veux en partager d’autres, je serais ravie de t’écouter. J’ai toujours aimé t’écouter. » La main d’Hassan qui jusque-là caressait les cheveux de Joanne avait glissé jusqu’à son épaule, et à son air pensif s’était ajouté un ton un brin résigné « J’aimerais avoir des choses un peu plus gaies à te raconter. » tandis qu’un sourire triste étirait vaguement ses lèvres. C’était sans doute le symptôme de sa dépression le plus difficile à gérer pour lui, le fait que les pensées et souvenirs positifs glissent contre lui comme la pluie contre une vitre, et que son esprit ne soit capable de retenir que le mauvais, le triste … C’était ce qui par-dessus tout lui donnait l’impression de ne plus se reconnaître lui-même. « J'ai pris plusieurs semaines, avant de retirer mes bagues. » La gorge nouée il l’avait écoutée continuer « Quand j’étais à l’hôpital, ils m'ont demandé si l’on devait te prévenir, parce que l’alliance était toujours à sa place. Ils m’ont regardée très bizarrement quand je leur ai dit que j’étais divorcé, c’en était blessant. Mais je pouvais pas encore les enlever, à ce moment-là. Quand je les ai enlevées, c’était comme si j’arrachais une partie de moi. C’est un peu le cas, je suppose. » Il s’était parfois demandé ce qu’elle en avait fait, si une fois le divorce signé elle s’était empressée de s’en défaire comme on se débarrasserait d'un souvenir trop encombrant, si elle les avaient rangées dans un coin, jetées dans le fleuve, ou dieu sait quoi d’autre. Il avait envisagé des tas de fins pour ces anneaux qui symbolisaient leur couple, mais certainement pas à entendre « Elles sont dans ma poche. Je ne sais pas trop pourquoi, mais j'avais envie de les avoir près de moi. » et l’aveu l’avait un peu dérouté, assez pour qu'il ne sache pas trop quoi y répondre. « Je venais tout juste de la retirer. Quand on s'est revus pour signer les papiers … Je me souviens qu’il y a eu un moment de flottement quand j’ai pris le stylo que me tendait l’avocat, et que tu as vu que je n’avais plus mon alliance. Mais elle était dans la poche de mon jean. J'avais juste peur que tu réalises que j’assumais pas du tout ce que j’étais en train de faire, si je la portais … » Il assumait les raisons pour lesquelles il le faisait, persuadé de prendre la meilleur décision, mais il n'assumait pas l'action en elle-même. Le fait de mettre un terme à une décennie de relation comme ça, en signant un bout de papier. Il s’était toujours dit que l’acte n’était pas à la hauteur de ses conséquences. Quant à l’alliance elle avait retrouvé l’annuaire d’Hassan à peine le taxi de Joanne ayant disparu au coin de la rue … la seconde fois, lorsqu’il l’avait retirée pour de bon, il n’était pas encore prêt à en parler.

Par instinct ou par habitude, et alors que Joanne restait blottie contre lui avec l’apparent besoin de se rassurer,  Hassan laissait ses doigts caresser son bras avec douceur et s’en tenait désormais au silence et à l’attente éventuelle d’écouter ce que la blonde aurait envie ou besoin de dire. Il n’avait pas envie de polluer son esprit de pensées et de souvenirs douloureux parce qu’elle avait déjà ses propres démons à exorciser et ne méritait pas de se voir alourdir par ses démons à lui. « Je ne sais pas ce qu’il va se passer. » avait-elle murmuré à nouveau, le souffle de sa phrase butant contre le tee-shirt du brun et passant au travers. « Il y a … tous ces sentiments que j’ai pour toi, mais je ne sais pas quoi en faire. Je ne sais même pas comment sera fait demain, je n’arrive plus à envisager quoi que ce soit. Ce que je sais … c’est que je veux être là pour toi. Pas parce que je pense que je te dois quelque chose, comme tu l’as dit avant, c’est pas ça. C’est être là … Pour être là. Quand deux personnes se connaissent bien et savent qu’elles peuvent compter l’une sur l’autre. » A nouveau sa gorge s’était serrée, parce que dans un certain sens il était comme elle. Elle peinait à se convaincre de la promesse qu’il lui faisait qu’elle n’était pas responsable de sa tentative de suicide, comme si sa parole n’empêchait pas le doute, et de la même manière il peinait à ne pas se laisser envahir par le doute tandis qu’elle lui assurait qu’il pouvait compter sur elle. « Il y a tellement de choses qu’on a réussi à … mettre à plat, à se dire, même si ça n’était pas facile, même si ça nous a fait du mal, même si parfois ça a tout empiré. Mais j’ai envie de croire que ça peut aller mieux, qu’on a aussi le droit à un peu de répit pour qu’on puisse sourire à nouveau, s’apprécier, ce genre de choses … » Soudainement elle s’était interrompue dans un soupir « Ça n’a aucun sens, ce que je dis. Tout était pourtant si clair dans ma tête, et là, c’est du grand n’importe quoi, ça n’a aucun sens et ça ne traduit pas du tout ce que je pensais. » En désespoir de cause semblait-il, elle avait demandé « Tu vois ce que je veux dire ? » sans doute avec l’espoir qu’il lise entre les lignes. « Je crois, oui. » Ce n’était pas un « oui » franc parce qu’ils avaient eu maintes occasions de réaliser qu’ils peinaient pour l’instant à se comprendre aussi clairement qu’avant, mais il saisissait l’intention générale et cela lui semblait le plus important. « Mes réactions, ma manière de faire sont certainement loin de ce que tu pensais de moi, peut-être même que tu ne me reconnais plus dans ce que je suis aujourd’hui, dans ce que j’ai pu faire, ou ne pas faire, mais … Mais il y a cette partie de moi qui sera toujours accrochée à toi, quoi que je puisse faire. » Finalement elle s’était redressée, Hassan desserrant alors son étreinte à son tour et laissant simplement l’une de ses mains glisser le long du dos de la blonde. « Toi, tu as envie de quoi ? Tu as envie qu’il se passe quoi ? » Ses lèvres s’étaient pincées avec hésitation, et confrontant celui de Joanne le regard d’Hassan avait semblé hésitant. Pas parce qu’il n’était pas certain de sa réponse, il savait ce qu’il voulait et si elle était honnête avec elle-même Joanne le savait probablement aussi, mais parce qu’il n’était tout simplement pas certain d’avoir le droit de la formuler « Si je réponds à cette question je ne tiens pas ma promesse de ne rien attendre et de ne rien demander … » Et cette promesse il en avait encore besoin, pour l’instant. Pour ne pas glisser à nouveau dans le rôle du bourreau vis-à-vis de Joanne, mais aussi pour se protéger des éventuelles indécisions de la blonde.

Quittant son dos, la main d’Hassan était venue caresser la joue encore un peu humide de Joanne avec tendresse, provoquant un moment de flottement durant lequel l’un et l’autre s’étaient regardés, même observés avec attention, sans que ne soit plus échangé le moindre mot. En dépit de ce qu’elle avait affirmé juste avant elle n’était pas très loin, la Joanne qui peuplait ses souvenirs à lui, pas beaucoup plus loin que ne l’était le Hassan qu’elle avait épousé … Ils étaient là, à portée de main, lorsqu’on grattait la surface et faisait abstraction de tout ce qui s’était mis en travers de leur route durant les trois années écoulées. « Ton thé doit être froid. » Esquissant un sourire doux et retrouvant une contenance et un semblant de raison, le brun s’était approché pour déposer un baiser sur le front de la jeune femme, forçant un peu sur sa voix pour tenter de lui redonner un brin de légèreté. « Tu sais ce dont j’ai envie, là tout de suite ? » Il savait bien que ce n’était pas réellement la question qu’elle lui avait posé, mais c’était un début malgré tout. « De t’emmener prendre l’air et profiter du soleil avant qu’il ne se couche. Il y a toujours ce glacier à la sortie du campus, et … je pourrais te raccompagner jusqu’à chez toi ? Ou ailleurs, si tu avais prévu de te rendre autre part, tant que ça nous fait faire une balade. » Est-ce qu’elle ne trouverait pas cela un peu vain, ou illusoire, l’envie de simplement prendre l’air et profiter de sa présence ? C’était le genre de choses toutes bêtes mais qui avaient tendance à apaiser Hassan dans sa quête pour retrouver goût aux petits plaisirs de l’existence, et quelque part il se disait que c’était le genre de choses qui ne pourraient pas faire de mal à Joanne non plus … Elle qui avouait à demi-mots ne pas se laisser beaucoup d’occasions de sortir. « J’ai juste envie de passer un peu de temps avec toi. Et de t’offrir une double ration de glace. Et de t’écouter me parler avec enthousiasme du dernier bouquin que tu as lu, même si tu l’as déjà lu mille fois, ou du dernier film que tu as vu même si c’est le cent-cinquantième revisionnage de La mélodie du bonheur ou du Retour du jedi. » Laissant Joanne se dégager un peu, Hassan s’était remis debout et lui avait tendue une main pour l’aider à se relever à son tour, la laissant épousseter un peu le bas de sa robe de la poussière qui s’y serait éventuellement accrochée. Est-ce qu’elle allait encore disparaitre, après aujourd’hui ? Il n’en savait rien, une partie de lui semblait avoir toujours peur lorsqu’il la voyait désormais qu’il s’agisse de la dernière fois … Mais si cela devait être la dernière fois il n’avait pas envie que cela se résume aux larmes de Joanne, et à une conversation se résumant à sa tentative de suicide. Une glace, un brin de soleil et le sourire de la blonde, c’était ce genre souvenirs qu’il avait envie de se créer à nouveau.
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Message(#)joassan + remember how we said together we would go far EmptyLun 5 Juin 2017 - 23:26


remember how we said together we would go far
to me you don't have to keep hiding away who you are

Il y avait très certainement des choses que Joanne ne voulait pas voir, ou pas admettre. Si c'était le cas, la situation se compliquerait davantage pour elle alors qu'elle avait l'impression de ne pas s'en sortir déjà. Mais quelque part, elle le savait quand même. Elle s'était posée la question, de loin. Comme un songe enfoui au milieu de ses idées noires et de tout ce dont elle se sentait indéniablement fautive. Une petite idée, juste là qui l'avait effleurée effleurée comme une plume pouvait caresser la peau. On associait au divorce le fait qu'il n'y avait plus d'amour dans un couple. C'était devenu tendance, depuis quelques décennies. Quelques années de mariage et un divorce ensuite. Eux n'étaient clairement pas pré-destinées à cela. Ils avaient des rêves communs, ils s'aimaient éperdument et étaient heureux dans leur maison. Ils n'attendaient plus que la venue d'un enfant afin de parfaire ce tableau. Ils se sont quittés alors qu'ils s'aimaient. Lui pensait que c'était le mieux pour elle, elle pensait qu'il avait peut-être malgré tout trouvé meilleur ailleurs. Mais aucun des deux n'avait véritablement su traversé cette épreuve, semblable à un deuil. La situation n'allait pas en s'arrangeant depuis qu'ils se revoyaient, bien que chacune de leur rencontre fut particulièrement tumultueuse. Ils n'étaient plus vraiment sur la même longueur d'ondes, ne se comprenait pas alors qu'ils s'étaient connus par coeur pendant dix ans. C'était particulièrement frustrant. On s'attendait à revoir la même personne que l'on avait laissé derrière soi au tribunal alors que des années s'étaient écoulées depuis et qu'ils avaient tous les deux traversé des épreuves. Mais dans cette histoire, Joanne avait été la seule à réussir à avancer, plus vite qu'elle n'aurait pu se l'imaginer. Grâce à Jamie, cela dit. S'il n'était pas là, elle serait restée dans le même état que la première année qui avait suivi la signature des papiers. Et voilà que lorsqu'elle commençait à renouer avec Jamie, Hassan avait cette réponse silencieuse, quasi imperceptible, de ce qu'il voulait vraiment. Bien certaines femmes adoraient avoir des hommes à leur pied, Joanne n'en faisait pas partie. C'était une situation particulièrement inconfortable, que d'avoir autant d'affection et de tendresse pour deux hommes et que chacun d'entre eux semblait prêt à lui donner en retour. Il fallait bien qu'elle se rende à l'évidence, mais aussi qu'elle finisse par faire un choix. Sauf que dans tout cela, elle ne voulait qu'aucun des deux ne sorte définitivement de sa vie. Et d'un côté, il y avait Yasmine. C'était évident pour Joanne qu'elle soit amoureuse d'Hassan, il n'y avait pas d'autres explications plausibles.

Elle appréciait qu'il se confie sur ce qui pouvait sembler n'être que des détails. Contrairement à ce qu'il pouvait penser, elle ne trouvait pas cela ennuyeux et était même prête à entendre d'autres de ces anecdotes. C'était toujours bon à savoir, à ses yeux. "Je suis certaine que tu trouveras des choses joyeuses à me raconter." dit-elle avec un vague sourire qu'il ne devait certainement pas voir. "Ca viendra, tu verras." Et ça, elle en était certaine, elle ne voulait pas qu'il en doute. Oui, peut-être qu'à cet instant précis, il n'allait pas bien. Mais elle estimait qu'il avait toutes ses chances et tout le temps nécessaire pour se redresser et trouver un point d'ancrage qui pourrait l'aider à surmonter toutes ses difficultés. Joanne se confia sur un détail à son tour. Un détail qui n'en n'était pas véritablement un puisque cela concernait tout de même les bijoux offerts par Hassan. Elle le sentit particulièrement surpris lorsqu'elle avoua qu'elle les avait sur elle. "Je m'en souviens, oui." souffla-t-elle d'un air triste lorsqu'il parlait de la signature des papiers de divorce. "C'était un de ces détails qui m'avait fait dire que... que tu étais passé à autre chose. Qu'il y avait peut-être quelqu'un, j'en sais rien... Je suppose que c'est à partir de là que je me demandais ce que j'avais bien pu te faire, ou ne pas faire, pour que tu viennes à vouloir divorcer de moi." La voix de Joanne tremblait, preuve que la blessure était plus vive que l'on ne pourrait le penser. Jamie avait toujours su qu'elle ne s'en était jamais réellement remise, d'où l'appréhension de la réapparition d'Hassan dans sa vie, mais c'était aussi en partie pourquoi il avait commencé à générer une haine certaine envers lui. Mais Hassan avait l'alliance bien plus près de lui que Joanne n'aurait jamais pu le penser. Elle se souvenait parfaitement de la légère marque de bronzage qu'il y avait sur l'annulaire dénudé de son ex-mari. "Ta technique avait plutôt bien marché, pour le coup." Faire en sorte que Joanne ne voit pas ce qu'il tentait désespérément de dissimuler, pour son bien à elle. Elle se rendait de plus en plus compte de l'ampleur de son sacrifice et la sincérité de ses sentiments. Et que par amour, il avait tout fait à l'envers. Joanne se posa alors soudainement la question : Jamie avait-il appliqué la même technique ces derniers mois avec elle ? La réponse n'en devenait que plus évidente après ces quelques révélations auprès d'Hassan.

Hassan l'écoutait avec attention dans sa tirade, malgré les grandes difficultés de son ex-femme d'exprimer le fond de sa pensée. Lorsque cela concernait de près ou de loin toutes ces idées qui la perturbaient en permanence, elle en perdait vite son vocabulaire et cela l'énervait et la frustrait au possible, n'arrangeant rien à la situation. Elle faisait part de ses sentiments pour lui, d'un sens, mais elle ignorait s'il avait compris ces quelques mots dans son long charabia. Si bien qu'il disait qu'il croyait avoir compris. Il n'en était pas certain et cela ne fit qu'ajouter une dose de frustration supplémentaire sur les épaules de la jeune femme. Cela ne fit que la désespérer davantage et elle préfère s'en tenir à cela. Ca lui manquait, la période où ils ne se comprenaient qu'en un seul regard. Mais encore une fois, elle lui disait qu'il y avait quelque chose qui la maintenait agrippée à lui. Hassan ne semblait pas être plus réactif que ça à ce genre de détails. Alors elle finissait par se redresser afin de retrouver son regard et lui demandait ce qu'il voulait lui. Elle le voyait hésitant, mais pas comme une personne qui ne savait pas quoi répondre. Le beau brun n'en dit pas plus que ce dont il avait toujours l'habitude de dire. "Mais ça ne t'engage en rien, que de dire ce dont tu as envie." dit-elle alors, presque déçue qu'il ne verbalise pas le fond de sa pensée. Déjà qu'Hassan semblait être devenue particulièrement secret sur de nombreux détails, Joanne avait l'impression qu'il rendait le nuage de plus en plus épais. Elle en conclut que le temps où ils parvenaient à se confier indéfiniment. Il devait avoir ses raisons, elle n'en doutait pas. Mais à chaque fois qu'il ne répondait ou évoquait ce type de phrases, elle avait la sensation de s'éloigner toujours plus de lui. Et avec toute l'affection qu'elle avait encore pour lui, cela devenait particulièrement douloureux pour la jeune femme. Le regard bas, résigné triste à la fois, elle ne se risquait pas d'en dire davantage. Elle venait même à se demander si elle avait bien fait de penser qu'elle pouvait toujours autant se confier à lui, comme avant. Un pas en avant, deux pas en arrière.

Le coeur redevenu particulièrement lourd, Joanne ne disait plus rien, et regardait longuement Hassan, avec le maigre espoir de trouver ne serait-ce que quelques réponses à ses innombrables questions. Mais il y avait aussi de la tendresse dans cet échange, malgré tout. Un moment léger, un peu en dehors du temps, le genre d'instant impossible à décrire tant cela pouvait sembler irréel. C'était la caresse du doigt d'Hassan sur sa joue qui l'extirpait de ses songes. Un retour à la réalité plus difficile qu'il n'y paraissait. Hassan tentait de les faire passer à autre chose en parlant de futilités comme la température du thé qu'il lui avait préalablement préparé. "Ce n'est pas grave." dit-elle tout bas, en tentant d'esquisser ne serait-ce que le début d'un sourire. Lui y parvenait, il s'était même approché d'elle pour l'embrasser sur le front. Et ça, ce baiser, que voulait-il dire ? Joanne ne savait plus. Il avait nourri l'espace d'une demi-seconde l'espoir d'une réponse, mais il n'en était rien. Il préférait se concentrer sur ce qu'ils pourraient faire tous les deux, au lieu de rester assis là, dans ce bureau bien trop étroit. Elle ignorait ce qu'il cherchait à faire. Elle ne savait pas s'il occultait tout ce qu'il venait de se dire, ou le mettre d'un côté l'espace d'un instant pour prétendre que tout allait bien. Elle n'arrivait pas à mettre le doigt dessus. Sauf que Joanne n'arrivait pas à prétendre. Il devait bien savoir qu'elle n'arrivait ni à mentir, ni à cacher ses émotions lorsque ça n'allait pas. "P...Pourquoi pas, oui." dit-elle à voix basse avec un léger bégaiement. Un très discret rictus étirait ses lèvres roses, mais il fallait le deviner. "Jusqu'à chez moi, oui." Malgré la promenade, il était encore un petit peu tôt pour chercher le petit à la crèche, et quand bien même, celle-ci fermait assez tard le soir, si jamais. Joanne n'avait nulle part où aller mis à part chez elle. Certes elle faisait de longues promenades avec ses chiens, mais en dehors de ça, elle ne faisait pas grand chose si ce n'est d'étoffer ses idées noires pour s'empêcher d'avancer, encore et encore. Hassan semblait avoir compris que cette suggestion avait particulièrement dérouté Joanne, il jugea alors bon de préciser ce qu'il comptait faire, et pourquoi. En somme, il demandait de retrouver un peu la Joanne qu'il avait connu et laissé derrière lui. Sur le moment, cela semblait insurmontable pour elle, de sourire avec sincérité, d'être à nouveau surexcitée pour trois fois rien comme elle avait pu l'être pendant longtemps. Elle accepta volontiers son aide pour l'aider à se relever. "Moulin Rouge" dit-elle alors avec un sourire gêné, mais discret. "C'est le dernier film que j'ai revu." Et il faisait partie des DVDs lus un bon nombre de fois par la jeune femme. Elle aimait beaucoup de films, mais ceux dont elle ne se lassait pas de regarder étaient beaucoup plus restreints et Moulin Rouge en faisait partie.

C'était sans dire mot qu'ils quittèrent le bureau puis les couloirs pour se retrouver à l'extérieur. Les températures étaient encore bien douces, même agréables. Quoi que la brise légère était un peu trop fraîche pour Joanne. S'il y avait bien quelque chose qui n'avait pas changé chez elle, c'était le fait qu'elle soit incroyablement frileuse. Les mains dans les poches de son trenchcoat, ses doigts jouaient un peu avec la bagues qui se trouvaient au fond de l'une d'entre elles. Joanne pensait à ce qu'il avait dit un petit peu plus tôt. Qu'il voulait passer du temps avec elle malgré tout le reste. Son comportement à elle, le fait qu'elle disparaisse pendant des semaines avant de réapparaître comme si de rien n'était. Et il devait bien se douter qu'elle côtoyait toujours Jamie. Mais malgré tout ceci, il tenait à la retrouver, en quelque sorte. Elle ignorait si, malgré la promesse qu'il s'était faite, il avait une certaine attente de cette promenade. Elle ne savait pas s'il voulait véritablement savoir quelles étaient ses dernières lectures. Elle doutait que ça l'intéresse qu'elle avait commencé à bouquine une oeuvre d'Agatha Cristie – elle adorait ses romans. Joanne était un peu penaude et se trouvait surtout ennuyeuse à mourir, dans de telles situations. Ils approchèrent de ce marchand de glaces qui leur rappelait bien des souvenirs, car la gourmandise avait été l'un de leurs nombreux points communs. Joanne était particulièrement sélective en matière de sorbet et de glaces. Elle ne changeait pas vraiment ses habitudes en choisissant trois boules : straciatella, chocolat et un sorbet à la poire. Tout était fait maison et elle savait déjà que c'était un véritable délice. Ces parfums lui rappelaient de nombreux souvenirs partagés avec lui. "Merci beaucoup." dit-elle avec un sourire qui se voulait cette fois-ci plus sincère. Ils reprirent leur marche d'un pas lent. Rien ne pressait, après tout. Et enfin, Joanne trouvait de quoi discuter. "J'ai postulé pour un poste qui va bientôt être vacant, au QAGOMA." dit-elle alors. Joanne n'aimait absolument pas l'art moderne, le choix du musée pouvait donc surprendre. "Il s'avère qu'il y a toute une aile du musée qui est dédiée à l'art historique internationale, et c'est la conservatrice de cette partie là qui part en retraite. C'est... Jamie qui m'en a parlée le premier et qui m'a présentée à mon potentiel futur supérieur." Joanne n'allait pas le cacher. "Alors j'ai fait mes démarches, j'ai réactualisé mon CV, j'ai fait tout mon possible pour que la lettre de motivation vende du rêve, et je passe bientôt mon entretien d'embauche. Et je suis très stressée." confessa-t-elle. "Jamie ne m'a pas pistonnée, il m'a juste... mis en évidence une voie dont j'ignorais l'existence. Il voulait juste m'aider à sa manière." Parce que oui, Joanne ne l'aurait peut-être su que trop tard que ce poste est à pourvoir.  Joanne se sentait un petit peu obligée d'expliquer comment et par qui elle avait pu saisir cette opportunité. Elle savait que le prénom même de son ex-fiancé faisait grincer des dents Hassan. Elle ne cherchait pas non plus à le blanchir, elle lui présentait simplement les faits tels qu'ils étaient. Et elle espérait sincèrement qu'il fasse preuve d'un peu d'objectivité pour le coup. Parce que la finalité, cela restait tout de même l'avenir professionnel de Joanne, et l'enjeu n'était absolument pas négligeable. "Et... Vraiment, j'espère avoir ce boulot. J'ai visité l'aile là l'autre jour et... Je m'y voyais. J'ai vraiment envie d'avoir ce boulot. C'est devenue comme un objectif à atteindre. Que je dois atteindre même." On pouvait deviner un éclat rare dans le regard bleu de la jeune femme. Une certaine détermination, voire même de la motivation, ce dont elle manquait cruellement depuis de nombreux mois. "Ce qui m'effraie le plus, c'est que ma situation les freine dans la prise de décisions. Mère célibataire, tout ça. Même si j'ai déjà une crèche pour Daniel, je... Je ne sais pas. Je n'ai pas envie que ce détail puisse les buter, parce que je pense que je peux bien tenir mon rôle de maman d'un côté et de conservatrice de l'autre." Joanne restait une femme polyvalente et bien qu'elle se laissait dépasser par beaucoup de choses, ce n'était jamais le cas pour les tâches qu'elle se fixait chaque jour.
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Message(#)joassan + remember how we said together we would go far EmptyMer 7 Juin 2017 - 1:22

C’était une angoisse devenue récurrente chez Hassan, la peur d’entrainer les autres dans sa lente descente dans le fond de dieu sait quelle abysse vers laquelle il avait lui-même l’impression de sombrer avec lenteur. L’impression que pour empêcher à la noirceur de ses idées de se propager chez ses proches il valait mieux ne rien dire, et prétendre au vide de son esprit plutôt que d’avouer le désespoir latent qui s’y était installé. C’était dans ces instants-là que la présence d’un psy revêtait toute son utilité à ses yeux : rôdé à ce genre d’exercice, ayant probablement déjà entendu bien pire, et trop peu impliqué émotionnellement pour que l’on craigne de l’entraîner dans sa chute en lui avouant ce qui le reste du temps paraissait inavouable. Il tentait de ne pas douter de la volonté de Joanne de l’écouter s’il en avait besoin, mais ce dont il doutait avant tout c’était de sa capacité à encaisser le désespoir d’autrui quand le sien semblait déjà tellement lourd qu’il écrasait ses frêles épaules. « Je suis certaine que tu trouveras des choses joyeuses à me raconter. Ça viendra, tu verras. » lui avait-elle pourtant affirmé comme si le doute n’était pas permis sur la question. Lui s’impatientait en silence chaque semaine un peu plus, chaque fois qu’un seul chamboulement suffisait à venir ravager la montagne d’efforts accumulés pour tenter d’obtenir le Graal que représentait le fait de s’endormir le soir en ayant passé une « bonne journée ». Trop souvent encore son esprit se laissait parasiter par les accrocs faits à son moral ou son estime, par le sentiment de tristesse qui parfois semblait arriver de nulle part, ou par les souvenirs douloureux qui prenaient possession de son esprit. Comme ce souvenir évoqué du bout des lèvres, celui du jour qui avait officiellement mis fin à leur mariage et dont Hassan gardait en tête le regard meurtri de Joanne devant la disparition de son alliance, et le « prends soin de toi » qu’il lui avait murmuré la gorge nouée avant de la regarder monter dans son taxi en pensant la voir pour la toute dernière fois. « Je m’en souviens, oui. » Presque happé à nouveau par ces mauvais souvenirs, le brun avait sursauté de manière presque imperceptible lorsque la voix de Joanne l’avait ramené à leur discussion présente « C’était un de ces détails qui m’avaient fait dire que … que tu étais passé à autre chose. Qu’il y avait peut-être quelqu’un, j’en sais rien … Je suppose que c’est à partir de là que je me demandais ce que j’avais bien pu te faire, ou ne pas faire, pour que tu viennes à vouloir divorcer de moi. » La voix tremblante de la blonde avait continué de serrer sa gorge et son cœur au point d’en devenir douloureux, et lorsqu’elle avait finalement ajouté « Ta technique avait plutôt bien marché, pour le coup. » il n’avait pu que secouer la tête avec impuissance et la serrer un instant contre lui en murmurant « Je suis désolé … Je suis tellement désolé. » avec l’impuissance de celui qui savait que rien de ce qu’il dirait ne changerait quoi que ce soit à ce qu’ils avaient vécu et à la peine qui en était ressortie. « Y’a jamais eu personne d’autre. Ça a toujours été toi, y’a toujours eu que toi … » De murmure sa voix était devenue un chuchotement, qu’il avait laissé se perdre contre l’oreille de Joanne presque avec désespoir parce qu’après tout ce temps il avait encore parfois peur qu’elle en doute. Mais c’était vrai, il n’y avait jamais eu qu’elle depuis la minute où ils s’étaient rencontrés, et jamais il n’avait douté.

Mais malgré toutes ses tentatives pour montrer patte blanche, pourtant, Hassan se heurtait à des attentes qu’il ne parvenait pas à cerner de la part de son ex-femme. Elle se dérobait lorsqu’il exprimait ses envies ou ses intentions à son égard, le poussant à se brider et à taire le peu de certitudes qu’il croyait avoir, et finalement lorsqu’il tentait de se tenir à cette résolution dans l’espoir que Joanne puisse avancer à son propre rythme et sans se sentir injustement brusquée, elle lui offrait un regard empli de déception et lui assénait un « Mais ça ne t’engage en rien, que de dire ce dont tu as envie. » en forme de reproche, comme s’il était soudainement coupable de ne pas savoir ce qu’il voulait. Se sentant un peu injustement rabroué par l’indécision de la blonde, Hassan avait desserré un peu son étreinte et lancé à la jeune femme un regard teinté d’incompréhension « Tu le sais déjà … » Et il y avait quelque chose d’assez cruel dans le fait de vouloir le forcer à l’énoncer ainsi à voix haute, à se mettre en abîme alors qu’à chaque fois qu’il avait tenté un pas vers elle, elle n’avait fait que se dérober ensuite. « M’oblige pas à me heurter à un mur une nouvelle fois. » Pas si la conclusion devait encore être sa disparition inexpliquée jusqu’à la prochaine fois qu’elle aurait un pavé à venir jeter dans sa mare, comme si elle ne le pensait plus bon qu’à ça : sécher ses larmes, puis la laisser aller réserver l’intégralité de ses sourires et de ses bons jours aux autres. Il essayait pourtant, il essayait vraiment, et c’était un peu en désespoir de cause et pour laisser les larmes qu’elle venait de verser abondamment dans ce bureau derrière eux qu’il avait proposé de sortir. Une erreur de plus, à en juger par le regard incertain que lui avait lancé son ex-femme en bégayant « P… Pourquoi pas, oui. » donnant à Hassan l’impression qu’elle acceptait par dépit, et rien d’autre. « Jusqu’à chez moi, oui. » Essayant de mettre des mots sur ses intentions, voulant encore croire qu’elle se méprenait simplement et lui prêtait de fausses intentions, il n’avait pas su la convaincre de sa bonne foi et avait accueilli son vague sourire et sa réponse « Moulin Rouge. C’est le dernier film que j’ai revu. » avec le cœur lourd. Un autre jour l’aveu lui aurait arraché un sourire tendre et une réflexion taquine à propos de l’usure probable du DVD concerné, mais tandis que Joanne semblait le suivre la mort dans l’âme ses lèvres s’étaient simplement pincées avec tristesse tandis qu’il refermait son bureau à clefs. Il n’avait pas spécialement eu besoin d’ouvrir la marche, elle connaissait le chemin aussi bien que lui pour l’avoir emprunté des dizaines de fois par le passé, et si le chemin jusqu’au glacier avait soudainement paru si long à Hassan c’était parce qu’il osait à peine tourner la tête pour poser le regard sur Joanne. A une époque il l’aurait attrapée par la main sans hésitation, sans se soucier un instant des potentiels collègues ou élèves qu’ils croiseraient sur leur chemin parce qu’il n’y avait pas de honte à avoir au fait d’être heureux et amoureux, aujourd’hui il osait à peine la regarder et avait pris comme une fin de non-recevoir la façon dont elle avait enfoncé les mains dans les poches de son manteau en préservant entre eux une distance respectable. Là, quelque part au fond de l’une de ces poches, la blonde avait avoué avoir enfoui son alliance et sa bague de fiançailles et Hassan ne pouvait s’empêcher de se demander pourquoi. Pourquoi les avoir gardées près d’elle, pourquoi semblait-elle aussi attachée à ces objets particulièrement symboliques de ce qu’ils avaient été l’un pour l’autre, et en même temps si prompte à faire deux pas en arrière s’il avait l’audace – ou la bêtise – de faire un pas dans sa direction, comme si il ne lui inspirait plus que de la méfiance ? Une question de plus qu’il n’osait pas poser, et qu’il avait ravalé tant bien que mal tandis qu’ils arrivaient au glacier.

Les choix de Joanne avaient réveillé la nostalgie silencieuse d’Hassan, qui de son côté avait opté pour deux boules pistache qui là non plus ne surprendraient pas la blonde ; La glace à la pistache était aux yeux d’Hassan ce que la glace à la vanille était aux yeux d’une majorité de personnes. « Merci beaucoup. » A l’évidence désireuse de ne pas arrêter leur périple, la jeune femme avait repris leur marche, laissant passer quelques minutes où l’un et l’autre avaient dégusté leur glace en silence, Hassan n’osant plus lancer le moindre sujet de conversation jusqu’à ce que Joanne ne décide de le faire. « J’ai postulé pour un poste qui va bientôt être vacant, au QAGOMA. » Cachant avec difficulté le brin de surprise que lui inspirait ce choix, Joanne n’ayant jamais été grande amatrice d’art moderne, il l’avait écoutée reprendre « Il s’avère qu’il y a toute une aile du musée qui est dédiée à l’art international, et c’est la conservatrice de cette partie-là qui part en retraite. C’est … Jamie qui m’en a parlé et m’a présentée à mon potentiel futur employeur. Alors j’ai fait mes démarches, j’ai réactualisé mon CV, j’ai fait tout mon possible pour que la lettre de motivation vende du rêve, et je passe bientôt mon entretien d’embauche. Et je suis très stressée. » Bien que crispante, la mention de Jamie n’avait étonné Hassan qu’à moitié, le britannique ayant cette fâcheuse tendance à user de son influence et de son argent pour tenter de se rendre indispensable, en espérant sans doute se dédouaner du reste. Mais qu’il se montre d’un semblant d’utilité, au fond, n’était que pure réparation. « Jamie ne m’a pas pistonnée. » avait en tout cas ajouté Joanne comme si elle craignait qu’il doute soudainement de sa légitimité « Il m’a juste … mis en évidence une voie dont j’ignorais l’existence. Il voulait juste m’aider à sa manière. » Qu’elle ne s’attende pas non plus à ce qu’il lui jette des fleurs, violent avec un carnet d’adresses utile peut-être, mais violent malgré tout. Surtout. « C’est une bonne opportunité, ç’aurait été une bêtise de ne pas la saisir. » avait-il alors commenté en esquissant un brin de sourire, qu’elle ne s’imagine pas qu’il condamnait la finalité de la situation. « C’est bientôt, ton entretien ? Il n’y a pas de raison que tu ne transformes pas l’essai. » Il fallait bien s’appeler Hassan pour utiliser une métaphore liée au rugby pour parler d’un emploi « T’as de bonnes références, un bon diplôme, ça crève les yeux que tu es passionnée par ce que tu fais … Il faudrait être fou pour ne pas t’embaucher. » Finalement capable de produire un véritable sourire, il l’avait voulu encourageant et empreint de sincérité. Les deux choses étaient foncièrement différentes, et que le comportement de la blonde lui fasse du mal n’empêchait pas pour autant Hassan de ne lui souhaite rien d’autre que du bien. « Et … Vraiment j’espère avoir ce boulot. J’ai visité l’aile l’autre jour et … Je m’y voyais. J’ai vraiment envie d’avoir ce boulot. C’est devenu comme un objectif à atteindre. Que je dois atteindre même. » Il ne se risquerait pas à le formuler à voix haute de peur que cela soit mal interprété, mais quelque part cela le soulageait un peu. Savoir qu’elle avait un projet, un objectif à atteindre et auquel s’accrocher. « Ce qui m’effraie le plus, c’est que ma situation les freine dans la prise de décision. Mère célibataire, tout ça. Même si j’ai déjà une crèche pour Daniel, je … Je ne sais pas. Je n’ai pas envie que ce détail puisse les buter, parce que je pense que je peux bien tenir mon rôle de maman d’un côté et de conservatrice de l’autre. » Parce que les habitudes avaient malgré tout la vie dure, Hassan avait machinalement tendu son pot de glace pour la laisser goûter, comme il l’avait fait des dizaines de fois. Se sentant soudainement un peu bête, mais ne se voyant pas non plus retirer ce qu’il venait de proposer, il avait laissé flotter quelques instants avant de reprendre « On est au vingt-et-unième siècle, t’as aucune raison de devoir choisir entre ton rôle de mère et un boulot qui te tient à cœur. Et puis tu l’as dit toi-même, tu as déjà une crèche pour Daniel, preuve que tu avais déjà réussi à t’organiser avant même de postuler chez ce musée. Je suis sûr que tu t’inquiètes pour rien. » L’espace d’un instant il avait failli pointer le fait qu’elle pourrait aussi sans doute compter sur ses parents pour s’occuper du petit en cas d’imprévu, mais réalisant qu’il n’avait aucune idée d’où en étaient les relations de Joanne avec ses parents actuellement il avait préféré taire cette hypothèse.

Leurs pots de glace rapidement engloutis pour ne pas les voir fondre, ils s’en étaient débarrassés dans la première poubelle passant à leur portée sans interrompre leur trajet, Hassan enfonçant finalement à son tour les mains dans les poches de son blouson pour s’empêcher un quelconque geste que Joanne pourrait retenir contre lui. Après plusieurs minutes et un peu par hasard il avait mentionné tandis que cela lui revenait en tête « J’ai accepté la proposition de Phil, au fait … J’ai repris le créneau des 8-10 ans le dimanche matin. Je ne sais pas si je te l’avais dit. » Sans doute pas, il n’avait pas vraiment eu d’occasion de le faire. Cela pouvait extérieurement sembler assez futile, comme information, mais pour Hassan réaccorder une chance à ce pan de sa vie qu’il associait forcément à celui qu’il était lorsque sa santé ne lui faisait pas défaut, cela signifiait beaucoup, et était également encore la source de nombreux doutes qu’il tentait d’apprivoiser et de canaliser à son rythme. « Je sais que ça doit donner l’impression que je multiplie les excuses pour garder l’esprit occupé, et que ça ressemble à la stratégie de l’autruche, mais je crois que j’avais vraiment besoin de ça. De renouer avec quelque chose que je faisais avant … tout ça. » C’était comme tenter de construire un pont entre celui qu’il était avant et celui qu’il était maintenant. Comme s’il essayait de pousser ces deux personnalités pas si distinctes à s’apprivoiser pour un jour peut-être parvenir à les rassembler. Plus rapidement qu’il ne l’aurait imaginé tous les deux avaient atteint la rue de Joanne alors que le soleil entamait sa disparition derrière la ligne d’horizon créée par le toit des maisons alentours. « Attends … » Le spectacle n’était peut-être pas aussi spectaculaire que s’ils s’étaient trouvés sur un bout de plage ou au bord du fleuve, mais il restait une douceur pour les yeux, et Hassan avait toujours adoré ce moment de la journée où le ciel changeait de couleurs à toute vitesse. Pendant quelques minutes le temps s’était presque suspendu, Joanne et Hassan appuyés côte à côte contre le muret qui délimitait le coin de la rue, jusqu’à ce que les rayons du soleil disparaissent pour de bon en attendant de revenir le lendemain. « C’est ce genre de choses que j’avais envie de faire avec toi. » Sa voix n’était à nouveau qu’un murmure, comme s’il avait peur de briser la quiétude qui s’abattait toujours face à ce genre de paysages. « Tu dois trouver ça futile … » Osant une brève œillade dans la direction de Joanne, il avait repris « J’ai pas envie qu’on s’affronte, tous les deux … Mais j’arrive plus à suivre, je ne sais plus ce que tu attends de moi. » avec une certaine tristesse. « Tu me dis qu’une partie de toi ne veut pas se détacher de moi, mais ensuite tu disparais pendant des semaines, et quand tu réapparais c’est comme si … C’est comme si c’était à nouveau moi le bourreau. » Bourreau. Le mot n’était pas choisi au hasard mais pesait sur les épaules d’Hassan chaque fois avec un peu plus de force. Bourreau. Et ça le rendait malade, d’être le bourreau de la femme qu’il aimait. D’être l’artisan de son malheur quand pourtant il ne voulait rien d’autre que son bonheur.
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Message(#)joassan + remember how we said together we would go far EmptyMer 7 Juin 2017 - 14:48


remember how we said together we would go far
to me you don't have to keep hiding away who you are

S'il y avait bien un mot pour décrire Joanne durant son divorce avec Hassan, c'était bien son mutisme. On lui avait bien fait comprendre par la suite à quel point son attitude avait été mal vue par beaucoup de personnes, surtout par les proches d'Hassan. Surtout qu'ils étaient tous de son côté à lui, s'il y avait un côté à prendre, et forcément, Joanne était la méchante. La mauvaise épouse, celle qui n'avait rien fait pour sauver son couple. Yasmine le lui avait bien fait comprendre et ses mots résonnaient inlassablement dans sa tête. Elle se rappelait tous les jours et cette sensation de solitude ne faisait que se creuser. Elle s'était sentie tout aussi seule face au juge, ou même en présence de leurs avocats et d'Hassan, pour discuter des différents partages à faire. Durant tous ces moments là, Joanne restait muette au possible. Comme si elle avait été dans un état de choc. La seule chose dont elle était capable de faire était de répondre par oui par non ou de faire quelques signes de tête. Jamais elle n'avait osé lever les yeux sur Hassan. Forcément, elle s'était faite des idées, beaucoup trop d'idées. Elle cherchait le problème mais ne l'avait jamais trouvé. La culpabilité d'Hassan était conséquente si bien que, trois ans après les faits, il tenait à s'excuser encore et encore d'avoir ainsi meurtri les pensées de la jeune femme. Ca n'avait été que le début d'une longue période de vide et de tristesse. Il la serrait un peu plus fort contre lui, lui certifiant qu'il n'y avait eu qu'elle durant ces dix années d'amour, qu'il n'avait jamais songé à passer à autre chose. Il avait des projets avec Joanne, beaucoup de projets, même. "Je sais." lui souffla-t-elle tout bas alors qu'elle avait la gorge encore bien serrée à ce moment là. Elle le savait, maintenant qu'elle connaissait les véritables raisons qui avaient poussé Hassan à se séparer d'aller, à contre-coeur.

Le fait qu'Hassan continuait à se montrer si secret commençait à offusquer la jeune femme. Elle ne savait pas si c'était à cause d'un soucis de confiance, ou s'il voulait tout simplement se protéger des conséquences possibles suite au partage de ses aveux. Joanne aurait aimé avoir des pistes, des clés en main. Car décrypter Hassan était devenue une tâche bien difficile pour elle et elle n'était plus certaine de le connaître aussi bien qu'avant. Peut-être qu'elle n'utilisait pas les bonnes méthodes en l'incitant à verbaliser ses désirs mais Joanne avait bien trop peur de ne frapper à côté en supposant ce qu'il voulait sans avoir la certitude que c'était bien le cas. C'était une procédure bien trop dangereuse à son goût. Elle voulait savoir et pas seulement supposer. Elle en avait assez d'être baignée dans cette constante incertitude, cela l'effrayait de plus en plus à l'idée d'aller de l'avant, parce qu'elle ne savait pas quel chemin prendre. Hassan finit par lui donner une vague réponse. Elle le savait certainement, oui. Mais l'admettre était autre chose et il était vrai que, depuis sa séparation avec Jamie, il lui était difficile de s'engager sur certaines voies. Tout simplement parce qu'elle avait bien trop peur des éventuelles répercussions. Joanne n'avait aucune estime d'elle-même, elle se dénigrait en permanence et c'était ce qui la poussait à se demander pourquoi il voulait bien encore d'elle. La jeune femme ne savait pas quoi faire et elle ne se voyait absolument pas jouer sur deux tableaux. Encore une fois, tout était bien trop compliqué à ses yeux et elle ne savait pas quoi faire. Depuis quelques temps, elle se disait qu'elle n'était plus que bonne à décevoir et à briser des coeurs. A quoi bon résumer son existence à cela ? Tout ce qu'Hassan demandait, c'était qu'elle ne se ferme pas et ne s'éloigne pas de lui comme elle avait pu le faire quasi systématiquement. Elle ne parvenait pas à expliquer son comportement. Elle avait à la fois envie de le voir, mais elle en avait aussi très peur. Au lieu de s'éterniser ici, Hassan avait tenté de se radoucir et de lui faire penser à autre chose en lui proposant une activité qui lui aurait bien plus à l'époque. Mais le côté mystérieux de son ex-mari et son lot de secrets la laissaient perplexes et elle ne parvenait pas à voir véritablement cette bonne idée telle qu'elle était, tant elle était déçue. Elle lui avait alors répondu en demi-teinte, par des réponses courtes, avec une pointe de lassitude. Joanne connaissait le chemin par coeur pour rejoindre l'extérieur, mais elle préférait tout de même attendre Hassan. Elle avait le regard vide et bien peu d'entrain, dissimulée derrière toutes ses pensées qui ne cessaient de lui faire du mal. Impossible d'en faire le tri, encore moins lorsqu'elle restait ainsi accrochée au passé en jouant avec les bagues qui traînaient au fond de sa poche.

Les bonnes vieilles habitudes ne s'oubliaient jamais, pas même lorsqu'il s'agissait du choix des parfums de glace. Là, ils pouvaient se reconnaître l'un l'autre sans trop de soucis. Joanne aurait pu en sourire si elle n'était pas tant tracassée. Mais cette simple commande éveilla en elle des souvenirs heureux. Joanne ne voulait pas s'éterniser devant le glacier et avait fini par reprendre la marche. Hassan était juste à ses côtés, et ils mangeaient chacun leur glace avec une certaine gourmandise. Joanne fit alors part de la seule grande nouveauté du moment, bien que tout ceci restait encore bien incertain. C'était sans surprise que Joanne nota la stupéfaction de son ex-mari lorsqu'elle parlait du musée où elle avait postulé. "J'ai oublié de dire historique. Une aile dédie à l'art historique internationale. Ca change sacrément du reste du musée." dit-elle rapidement, réalisant un peu trop tard qu'elle avait oublié de mentionner un adjectif qui expliquait à lui seul son grand intérêt pour ce poste. Elle avait bien vu que mentionner Jamie avait un peu hérissé le poil du brun, mais Joanne se devait d'être honnête. Cependant, il ne fit absolument aucun commentaire à ce sujet. Hassan ne voulait que se focaliser sur Joanne et ses projets. "C'est la semaine prochaine, oui." Joanne avait souri lorsqu'il l'entendait réutiliser des expressions toujours en rapport avec son sport favori. Ce détail là aussi, lui rappelait certains moments de leur relation amoureuse. Elle avait senti son regard se poser sur elle, ce fut pourquoi elle leva également ses yeux. Il lui souriait, avec encouragement. On voyait qu'il espérait que ce projet là fonctionne pour elle. Il était fort probable que Joanne baisse les bras si elle allait devoir essuyer un refus de la part du musée. Elle misait énormément sur ce poste, elle avait énormément de volonté mais elle n'était pas du genre à vouloir se faire montrer à tout prix. "J'avoue que je suis très stressée, il y a quand même beaucoup en jeu." lui confia-t-elle avec un sourire décrivant alors toute sa nervosité. "Je ne sais pas vraiment qui sont les autres candidats, mais je sais qu'il y en a beaucoup." Et ils devaient tous avoir de bons diplômes et de la motivation. Joanne ne savait pas vraiment quoi faire de plus pour se démarquer un peu des autres, elle ne savait être qu'elle-même avant tout. L'on ne pourra pas alors lui reprocher son intégrité. Cependant, elle craignait qu'on critique le fait qu'elle soit seule avec un enfant en bas âge. Tout était déjà anticipé de ce côté là, mais Joanne appréhendait malgré tout. Le beau brun lui tendit sa glace par pure réflexe. Cette petite habitude fit sourire Joanne et elle accepta volontiers cette invitation silencieuse à goûter sa glace en en prenant une toute petite cuillerée. Joanne lui suggéra d'en faire de même en lui tendant son propre pot de glace pendant qu'elle l'écoutait parler. "Ce qui me fait le plus de soucis, c'est que si je suis prise, je travaillerai aussi certains samedis. Et la crèche n'est pas ouverte le weekend. Si ça tombe à chaque fois les weekends où Daniel est chez Jamie, c'est chouette, mais ce sera assez irrégulier quand même et je n'ai pas vraiment d'alternatives par rapport à ça." Et si elle était prise, il fallait qu'elle trouve rapidement une solution. Joanne ne parlait toujours pas à ses parents, pas vraiment. Elle donnait de temps en temps des nouvelles pour s'assurer que tout allait bien et se disait qu'il fallait quand même qu'elle aille les voir pour discuter de tout ce qu'il s'était passé. Mais elle refusait qu'il tente de reprendre le contrôle sur sa vie en choisissant d'éloigner par leur propre méthode certaines personnes d'elle.

C'était au tour d'Hassan de prendre la parole après de longues minutes de silence. A croire qu'ils prenaient tout ce temps pour trouver quoi dire. Surtout qu'ils n'avaient plus vraiment l'excuser de la gourmandise étant donné que leur glace avait été mangé il y a plusieurs minutes de cela. "Je savais juste que tu avais revu Phil, mais rien n'était décidé, la dernière fois qu'on s'est vu." se rappelait Joanne, tout en se rendant compte que cela remontait à plusieurs semaines. Hassan avait l'impression que pour beaucoup, ce n'était qu'une excuse pour se tenir éloigner de tous ses doutes et de tous ses problèmes. "Ce n'est pas comme ça que je le voyais." certifia la jeune femme avec un léger sourire. "Je trouve ça même particulièrement encourageant que tu veuilles à nouveau t'investir dans quelque chose. Quelque chose que tu aimes, qui plus est." Son rictus s'étira, et était on ne peut plus sincère. Elle était heureuse pour lui. "Puis je pense que tu prendras un malin plaisir à entraîner les petits. Ce ne sera que du bonheur." Hassan avait toujours été très à l'aise avec les enfants, nul doute qu'il aurait fait un père merveilleux. "Je suis sûre que ça te fera le plus grand bien. Que ça deviendra un de ces moments que tu attendras impatiemment chaque semaine." Cela ne pouvait que lui apporter de nouvelles choses. Un grand bol d'air frais, en somme. Il s'investissait à nouveau, ce qui était bon signe. Joanne était confiante pour lui, elle savait qu'il s'en sortirait. Elle était véritablement heureuse pour lui. Son sourire et son regard attendris tournés vers lui étaient sincères. Leur discussion fit passer le temps bien trop vite, parce qu'ils arrivaient déjà près de la rue où habitait Joanne. Mais le beau brun la stoppa net, désireux de regarder le coucher de soleil avec elle. Elle avait toujours adoré le crépuscule, tout comme l'aube. C'était des moments quotidiens si uniques à chaque fois. Ca l'émerveillait plus que de raison et elle ne s'en était jamais lassée. Ils admirèrent alors ce spectacle de la nature silencieusement et une fois que le soleil s'était entièrement couché, Hassan partageait son envie de passer ce type de moments avec lui. Joanne lui aurait bien répondu qu'elle aussi, elle avait adoré ce moment, et qu'elle ne trouvait pas ça futile. Mais avant qu'elle n'ose ouvrir la bouche, Hassan avait repris la parole pour discuter de choses bien moins plaisantes. Plus il avançait dans ses propos, plus Joanne ressentait à nouveau cette vive douleur au niveau de son coeur. Il employait des mots tout de même relativement forts. Une multitude de pensées ravageait la légèreté qu'elle avait pu ressentir tout au long de cette promenade. Joanne avait baissé les yeux, elle regardait ses pieds, toujours appuyée contre le muret. Alors quoi, que voulait-il dire par tout ceci ? Que tout était de sa faute, qu'il ne croyait plus vraiment ce que Joanne disait. Elle avait l'impression que c'était elle qui devait prendre les rennes, prendre les décisions pour eux deux, décider de ce qu'ils allaient devenir. Joanne pouvait être tout, mais certainement pas un leader. Du moins, elle ne se percevait pas comme tel bien qu'elle avait certaines capacités à se faire comprendre et à ce qu'on dise oui à ce qu'elle pouvait dire. Mais là, c'était différent. Elle ne savait même pas quoi dire, pas quoi répondre. Elle était à deux doigts de lui dire de tout laisser tomber, qu'ils ne faisaient que tourner en rond et que toute cette histoire ne rimait à rien. Par un étrange mécanisme de d'idées, Joanne avait l'impression que les rôles s'inversaient et que ce soit finalement elle, le bourreau de toute leur histoire. Depuis la façon dont elle a réagi à la demande de divorce jusqu'à ce jour. Si on devait reprocher tout ce malheur à quelqu'un, il fallait se tourner vers elle. C'était elle qui ne faisait que décevoir, rendre triste, qui ruinait absolument tout. Et il n'y avait pas qu'Hassan comme exemple, il y avait aussi sa relation avec Jamie, le départ précipité de Sophia, elle était persuadée d'y être pour quelque chose. Sa mésentente avec son frère, ses parents. Et ça l'épuisait, Joanne était à bout et les paroles d'Hassan étaient certainement le clou du spectacle. C'était elle qui disparaissait et réapparaissait pour tout empirer. C'était toujours elle. Joanne ne parvenait plus à se défaire de ce sentiment de culpabilité qui la bouffait depuis des mois, des années même. Et chaque nouvelle parole semblait être une nouvelle preuve de son échec. A force, elle n'osait plus parler, persuadée que le moindre mot qui pouvait sortir de sa bouche n'allait que faire du mal. Même si elle s'efforce à tout faire au mieux. Et tout ça parce qu'elle n'arrivait pas à se faire comprendre. Les mauvais mots, les mauvaises réactions. Tout était foncièrement mauvais, selon elle. C'était véritablement frustrant pour elle, mais le mal était déjà fait partout. "C'est pas futile..." souffla-t-elle tout bas avec un ton totalement détaché. Elle pensait juste à ce qu'il avait dit avant tout le reste. Ce nouveau flot de pensées réhumidifièrent ses iris bleus. Joanne n'était jamais vraiment à court de larmes. "A t'entendre, je... Je me dis que c'est en fait moi, ton bourreau, et non l'inverse. Ca a toujours été comme ça, en fait." C'était la seule conclusion qu'elle en avait à tirer. Le mot était particulièrement lourd de sens, lourd à porter. "Je..." Après quelques secondes de suspens, Joanne secoua négativement la tête. On devinait sur son visage qu'elle était avant tout en colère contre elle-même lorsqu'elle disait. "Ca ne sert à rien, je n'arrive plus à me faire comprendre, de toute façon." à voix basse. C'était frustrant d'avoir perdu cette facilité là. Elle se mit à jouer nerveusement avec ses doigts, ne sachant ni quoi dire, ni quoi faire. "Je ne fais que ça en ce moment. Faire les choses pas bien, jamais comme il faut." admit-elle, n'osant pas vraiment croisé son regard. Elle supposait qu'il était à nouveau déçu, de ne pas avoir été fichue de donner une réponse claire à ses interrogations. "Je peux pas dire que j'ai des .. attentes vis-à-vis de toi. Ce ne serait pas juste. Ce n'est pas comme ça que les choses sont sensées être. Et que, forcément, s'il y a des attentes, il peut y avoir des déceptions au bout." Encore une fois, Joanne n'était pas sûre de se faire comprendre. "Je n'attends rien de toi dans le sens où... Comment dire... J'estime qu'il faut voir où ça mène, sans qu'il y ait d'attentes derrière. J'arrive plus à me projeter dans ma vie personnelle, à me voir dans quoi que ce soit. Au niveau du boulot, c'est un peu différent, c'est cadré par une institution, etc. Là, pour moi, j'ai plein de données, mais je ne sais absolument pas quoi en faire." Sa voix s'était mise à trembler et à se noyer par ses émotions malgré elle. "Tout le monde se dit que, sous prétexte que la maison est toujours bien rangée, ma vie l'est tout autant. Mais à côté de ça, j'ai un petit garçon à m'occuper, je tente tant bien que mal de retrouver une vie professionnelle, et dieu sait combien j'aimerais à nouveau avoir une vie amoureuse. Mais quoi que je fasse, Hassan,..." Elle se mit hoqueter et prit une profonde inspiration dans l'espoir de calmer son chagrin – en vain. "Quoi que je fasse,–et tu pourras pas franchement dire le contraire– ça finit mal. Je finis toujours par faire ou dire un truc qui gâche tout. Qui te déçoit toi, qui déçoit les autres, tout le monde. Un jour, ce sera peut-être même aussi Daniel, qui sait." Ca serait le pire. "Et depuis le début, depuis le jour où tu m'as demandée le divorce, je fais tout mal. On me l'a bien fait comprendre, tu me l'as fait comprendre aussi depuis qu'on se revoit. Je ne fais rien de bien, même lorsque j'essaie de bien faire." Elle pensait notamment à la fois où elle l'avait invité à dîner et où rien ne s'était passé comme prévu. Le ton de Joanne était relativement calme, elle ne s'était pas énervée. Mais on sentait qu'elle était assez résignée. "En passant tout ça en revue, tu... peut-être que je te fais sentir comme tel, mais c'est pas toi, le bourreau, c'est moi." conclut-elle calmement. Joanne se demandait si le fait qu'il n'arrivait plus à suivre signifiait aussi qu'il ne voulait plus la suivre. Ne plus essayer. "Entre chaque fois où on se voyait, je... Je prenais le temps de peser le pour et le contre. Que malgré mes sentiments pour toi, je te faisais un peu plus de mal à chaque fois. Un sacré don. Et j'ai fini par me dire que j'aurais été bien égoïste de vouloir te voir autant de fois que je ne le voudrais et que toi, à côté, tu en ressortirais à chaque fois un peu plus triste, parce que je t'aurai encore plus blessée que la fois précédente. Mais ce n'était pas l'envie qui manquait, de te voir plus souvent." Encore une fois, elle ne savait pas si ses explications étaient véritablement claires. Elle avait l'impression d'être une incapable, pire que ça, même. Bonne à rien. Le visage de Joanne se crispa à cause de cette profonde tristesse qui était en elle, et qui se faisait aussi traduire par les quelques mots qu'elle prononçait en larmes. "Je suis tellement désolée, Hassan. Tellement désolée pour tout. J'en peux plus, de ne te faire que du mal."
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joassan + remember how we said together we would go far Empty
Message(#)joassan + remember how we said together we would go far EmptyMar 13 Juin 2017 - 4:31

Le cœur alourdi par les silences et les tergiversations de son ex-épouse, Hassan s’était presque laissé porter par la conversation – ou plutôt l’absence de conversation – dans laquelle s’était murée la blonde pendant une grande partie du trajet. Rien à faire, dès qu’il était question de tenter d’avoir une discussion normale, ou tout du moins qui ne découle pas de l’une des actions d’Hassan dont la blonde semblait se désoler ou s’agacer, cette dernière lui infligeait la punition du silence et donnait l’impression de complaire dans leurs conflits incessants. Il avait beau la connaître, tenter de se raisonner, lui chercher des excuses, il ne comprenait ni ce qu’elle espérait ni où elle voulait en venir, et bien que la bienvenue aux yeux d’Hassan la mention soudaine de sa situation professionnelle faisait presque cheveu sur la soupe. « C’est la semaine prochaine, oui. » avait-elle répondu concernant l’entretien qui déterminerait peut-être la suite de son parcours professionnel. « J’avoue que je suis très stressée, il y a quand même beaucoup en jeu. Je ne sais pas vraiment qui sont les autres candidats, mais je sais qu’il y en a beaucoup. » Et la blonde comme souvent n’avait pas besoin de plus pour douter de ses chances ou de ses capacités. « Ne te focalises pas là-dessus, fais au mieux, ta candidature n’est pas moins bonne que les autres. » Le reste ne dépendait pas d’elle, alors inutile qu’elle se ronge les sangs en se demandant ce qu’elle pourrait bien faire  de plus. Elle semblait de toute façon avoir déjà bien assez à faire avec les soucis d’organisation qui eux viendraient en cas de réponse positive. « Ce qui me fait le plus de souci, c’est que si je suis prise, je travaillerai aussi certains samedis. Et la crèche n’est pas ouverte les week-ends. Si ça tombe à chaque fois les week-ends où Daniel est chez Jamie, c’est chouette, mais ça sera assez irrégulier quand même et je n’ai aucune alternative par rapport à ça. » Les parents Prescott ne semblaient donc pas être une option à l’heure actuelle, et bien que cela le démange Hassan s’était gardé de tout commentaire à ce sujet. « L’ex d’un ami fait garder leur fille par une étudiante quand elle a un impératif, il avait l’air de me dire que ça se passait bien, tu veux que j’essaye d’avoir son numéro ? » Matteo accepterait probablement de le demander pour lui, ou même Hassan aurait l’occasion de le demander à Cleo lui-même la prochaine fois qu’elle viendrait amener ou déposer Cami à la maison. Réalisant d’ailleurs qu’il n’avait pas mentionné à Joanne sa récente colocation avec Matteo, le brun s’en était pourtant gardé, pour d’autres raisons. D’une banalité presque aussi écrasante que le silence qui s’était à nouveau abattu sur eux, Hassan avait mentionné l’évolution de la proposition que lui avait fait Phil quelques semaines plus tôt en de rappelant que le sujet avait déjà été évoqué avec Joanne à ce moment-là. Pour elle comme pour n’importe qui d’autre la chose semblerait avoir un intérêt moindre, mais pour lui qui tentait avec difficulté de redonner des repères à cette vie tombée en ruines après son divorce, c’était le genre de décisions qui avaient un certain sens et une certaine profondeur. « Je savais juste que tu avais revu Phil, mais rien n’était décidé, la dernière fois qu’on s’est vu. » avait-elle confirmé, enfonçant un peu plus le clou du temps qu’elle laissait à chaque fois passer après l’avoir vu. « Ce n’est pas comme ça que je le voyais. » lui avait-elle en tout cas assuré tandis qu’il réfutait maladroitement l’idée selon laquelle il ne chercherait qu’à se noyer dans les excuses pour ne pas penser. « Je trouve ça même particulièrement encourageant que tu veuilles à nouveau t’investir dans quelque chose. Quelque chose que tu aimes qui plus est. Puis je pense que tu prendras un malin plaisir à entraîner les petits, ça ne sera que du bonheur. » Ou une maigre consolation, aurait dit la petite voix tranchante dans un coin de la tête d’Hassan, toujours là pour venir verser du sel sur celles de ses plaies encore à vif. L’idée de devoir se contenter de regarder grandir les enfants des autres la moins cicatrisée de toutes. Mais Joanne avait malgré tout raison, ce rôle-là le brun saurait le prendre à cœur, à l’aise avec les enfants depuis presque toujours et l’âme du pédagogue définitivement imprimée dans son ADN au fil de ses années comme professeur. « Je suis sûre que ça te fera le plus grand bien. Que ça deviendra un de ces moments que tu attendras impatiemment  chaque semaine. » Bien qu’encore un peu songeur et incertain à ce sujet, Hassan avait acquiescé d’abord silencieusement avant de répondre « J’espère. C’est l’idée en tout cas. » en arborant une vague esquisse de sourire. Il l’espérait presque autant pour lui-même que pour pouvoir prouver à Yasmine et à Qasim qu’il était capable d’autre chose que de se complaire dans sa situation de désespoir latent actuel, comme ils semblaient parfois le penser à demi-mot.

Interrompus à la fois par leur proche arrivée à destination et par la couleur – si particulière – du ciel ayant attiré l’œil d’Hassan, tous les deux avaient gardé un silence cette fois-ci choisi tandis que le soleil disparaissait derrière le toit des maisons et créait un dégradé d’orangé et de rose dans le ciel à demi-couvert de cet hiver qui de faisait toujours attendre. Le crépuscule, particulièrement lorsque les températures étaient clémentes, était un moment un peu à part cher à l’esprit encore trop souvent tourmenté d’Hassan. Pour une raison que lui-même ignorait c’était le moment que choisissait régulièrement son organisme épuisé pout s’éveiller un peu durant les longues semaines qu’avaient duré son hospitalisation ; Comme si son corps, inconsciemment, voyait ce moment de la journée comme celui à ne pas louper s’il ne fallait en choisir qu’un seul. À l’apaisement provoqué par ces quelques minutes de quiétude venait cependant de succéder la résignation, l’impression de ne pouvoir que s’avouer vaincu face à l’incompréhension qu’Hassan avait de Joanne et de ses attentes envers lui. Comme si en disparaissant le soleil avait aspiré les derniers espoirs du brun à être un élément sérieux de l’existence de la blonde. « C’est pas futile. Je … » alors qu’il tournait lentement la tête comme pour témoigner de son attention, elle s’était ravisée. « Ça ne sert à rien, je n’arrive plus à me faire comprendre de toute façon. » Reproche ou simple constatation, Hassan n’avait su quoi répondre tant l’impression était partagée. « Je ne fais que ça en ce moment, faire les choses pas bien, jamais comme il faut. Je peux pas dire que j’ai des … attentes, vis-à-vis de toi. Ce ne serait pas juste. Ce n’est pas comme ça que les choses sont censées être. Et que, forcément, s’il y a des attentes il peut y avoir des déceptions au bout. » Alors que dire du fait qu’elle semblait le considérer comme une source de déception sans même avoir d’attentes vis-à-vis de lui ? « Je n’attends rien de toi dans le sens où … comment dire … J’estime qu’il faut voir où ça mène, sans qu’il y ait d’attentes derrière. J’arrive plus à me projeter dans ma vie personnelle, à me voir dans quoi que ce soit. Au niveau du boulot, c’est un peu différent, c’est cadré par une institution, etc. Là, pour moi, j’ai plein de données mais je ne sais absolument pas quoi en faire. Tout le monde se dit que, sous prétexte que la maison est toujours bien rangée, ma vie l’est tout autant. Mais à côté de ça j’ai un petit garçon à m’occuper, je tente tant bien que mal de retrouver une vie professionnelle, et dieu sait combien j’aimerai à nouveau avoir une vie amoureuse. Mais quoi que je fasse, Hassan … » Au bord des larmes, elle lui avait jeté un regard lourd de sens, comme si c’était lui le responsable, comme si en ne demandant rien d’autre qu’un peu de considération pour les sentiments qu’elle malmenait depuis des semaines – des mois – il en demandait déjà trop. « Quoi que je fasse – et tu pourras pas franchement dire le contraire – ça finit mal. Je finis toujours par faire ou dire un truc qui gâche tout. Qui te déçoit toi, qui déçoit les autres, tout le monde. Un jour ce sera peut-être même aussi Daniel, qui sait. Et depuis le début, depuis le jour où tu as demandé le divorce, je fais tout mal. On me l’a bien fait comprendre, tu me l’as bien fait comprendre aussi depuis qu’on se  revoit. » Bien sûr, évidemment que c’était à nouveau sa faute. N’était-ce pas ce qu’elle ne cessait de répéter à chaque fois qu’il tentait d’obtenir un semblant de réponse ? Il ne demandait rien d’autre au fond, simplement des réponses, une direction sur laquelle se positionner pour tenter de remettre sa vie sur les rails, avec ou sans elle … Mais il en demandait déjà trop, semblait-il. Et lentement, tandis qu’elle retournait la situation et se rendait victime de l’incapacité d’Hassan à pouvoir se contenter de la place bâtarde et incertaine qu’elle lui avait attribué, lui sentait l’amertume l’envelopper tout entier. « Je ne sais rien faire de bien, même quand j’essaie de bien faire. En passant tout ça en revue, tu … peut-être que je te fais te sentir comme tel, mais c’est pas toi, le bourreau, c’est moi. » Elle le devenait en tout cas, chaque fois qu’elle utilisait ses tentatives d’obtenir des réponses pour tourner la situation à son avantage, et se présenter comme la victime de son incessante volonté à ne pas rester le paillasson sur lequel elle venait s’essuyer les pieds dès que lui ou leur relation semblaient être la cause de l’un de ses maux. Y compris de ceux qu’elle se créait toute seule. « Entre chaque fois où on se voyait, je … Je prenais le temps de peser le pour et le contre. Que malgré mes sentiments pour toi, je te faisais un peu plus de mal à chaque fois. Un sacré don. Et j’ai fini par me dire que j’aurais été bien égoïste de vouloir te voir autant de fois que je le voudrais et que toi, à côté, tu en ressortirais chaque fois un peu plus triste, parce que je t’aurais encore plus blessé que la fois précédente. Mais ce n’était pas l’envie qui manquait, de te voir plus souvent. » La gorge serrée, le visage fermée par ce qui n’était à ses yeux qu’une nouvelle salve de reproches destinés à lui faire admettre que c’était lui le seul responsable de ses silences radio répétés, il s’était entendu noter entre ses dents « Et malgré ça tu as attendu d’avoir besoin de soulager ta conscience pour revenir. Comme la fois précédente. » S’assurer qu’elle n’était pas responsable de sa tentative de suicide. L’inviter simplement pour obtenir de lui l’assurance qu’il ne partageait pas les accusations de Yasmine. La finalité était la même au fond, elle revenait vers lui pour soulager ses propres maux, mais sans se préoccuper de ceux qu’elle créait en ne l’estimant plus bon qu’à ça et rien d’autre.

Cette impression de ne jamais être que la roue de secours que l’on s’empressait de remplacer par un pneu neuf à peine arrivé chez le garagiste était en train non plus de lui peser, mais de l’engloutir. En appuyant par-dessus la montagne de raisons qu’avait Hassan de ne plus trouver sens en rien, pour tenter de le noyer pour de bon malgré de maigres tentatives pour garder la tête hors de l’eau. Il lui en voulait à cet instant, il lui en voulait même tandis qu’elle ajoutait encore « Je suis tellement désolée, Hassan. Tellement désolée pour tout. J’en peux plus, de ne te faire que du mal. » et transformait sa volonté d’obtenir des réponses en occasion supplémentaire de s’auto-flageller plutôt que d’accepter de lui offrir de quoi soulager les questionnements qui l’accablaient. « Moi aussi, je suis désolé. » Les épaules basses, le ton résigné, il avait enfoncé les mains dans les poches de son blouson. « Parce que j’avais promis de ne rien espérer et de ne rien demander … mais c’est juste trop difficile. Mets-toi à ma place, j’essaye d’avancer, de reconstruire un semblant de vie, et y’a toujours cette grande inconnue au beau milieu, parce que la personne qui servait de centre à mon existence refuse de décider si elle veut toujours en faire partie ou non. » Il ne réclamait même pas après sa place initiale au fond, il savait ne pas être en droit de la demander et osait à peine l’espérer en silence, mais en revanche il en réclamait une véritable. Une vraie place, et non pas uniquement les miettes que Joanne venait lui lancer de temps à autres, lorsqu’elle se rappelait de lui ou n’avait rien de mieux à faire. « Je veux pas être seulement un pansement, Joanne. Revenir vers moi quand tu as besoin d’être rassurée ou consolée – Jamie, Yasmine, ma tentative de suicide – mais ne plus te soucier de ce que je deviens dès que les choses vont mieux pour toi, je suis désolé mais c’est pas assez … C’est pas ce que je veux être. Je veux savoir si oui ou non tu feras partie de la suite de ma vie, peu importe si c’est comme amie, comme compagne, ou comme n’importe rôle que tu aurais envie d’y avoir, mais y’a pas d’entre-deux, y’a plus de peut-être. » Il s’en était contenté pendant trop longtemps, et pour le piètre résultat que l’on connaissait. Ce n’était plus suffisant, désormais. « Je suis assez grand pour décider tout seul de ce qui me fait du bien ou pas. C’est ton incapacité à décider si j’ai encore une place à tes yeux ou non qui me blesse, rien d’autre. Et ça c’est pas quelque chose que je peux décider à ta place, c’est ta responsabilité. » Tenter de se dédouaner n’y changerait plus rien, elle avait une décision à prendre et plus elle tarderait plus ils souffriraient l’un et l’autre. L’indécision était parfois plus douloureuse que le refus. « Je te prends pas en traître, Jo. T’as toutes les cartes en main, tu sais ce que je veux, tu sais ce que je ressens à ton égard, et tu dois savoir aussi que peu importe ta décision ça changera rien à la sincérité de mes sentiments … J’accepterai. Je te demande simplement d’être honnête avec toi-même et de réfléchir à ce que tu veux vraiment, de prendre le temps et le recul pour avoir une vraie réponse à cette question. » Prendre le temps de décider de ce qu’elle voulait. Pas en fonction de lui ou de quelqu’un d’autre, simplement ce que elle voulait, et des moyens qu’elle était prête à se donner dans ce sens. « Si tu décides de revenir j’en serai plus qu’heureux et je te ferai une place dans ma vie sans la moindre hésitation. Mais si tu reviens c’est pour de bon … pas en dilettante, pas en n’étant pas certaine de le vouloir. Si tu reviens c’est pour de bon … sinon c’est pas la peine. » Est-ce que cela sonnait comme un adieu ? Au fond cela ne dépendrait que d’elle. Hassan lui était las d’avancer ainsi à l’aveuglette, d’être yeux bandés au bord d’un précipice. Que Joanne veuille voir où tout cela les mènerait était une chose, mais avant d’en arriver là il fallait d’abord qu’elle décide une bonne fois pour toutes si elle voulait que cela les mène ou non quelque part, où que ce soit. Gageant qu’elle n’aurait pas besoin de lui pour remonter la rue et rejoindre sa maison, il avait fait un pas en arrière et avait laissé leurs regards se croiser une dernière fois avec tristesse, avant de tourner les talons et de la laisser à ses incertitudes.
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