Pouvait-elle être plus amère ou plus froide ? Elle sous-entendait sans aucune difficulté que lorsqu’il avait couché avec une autre, il savait ce qu’il faisait. Alex médita un instant sur ce qu’elle venait de dire et réalisa qu’effectivement il savait. A ce moment-là, il avait quitté le domicile conjugal dans l’espoir de faire un mal irréparable. Il avait cherché à être maître de sa destinée. Jusque là c’était Eliane qui avait tout dicté. Elle était mal dans sa peau et lui avait imposé le silence depuis qu’elle avait appris qu’elle était stérile. Elle l’avait tenu à distance comme on tient un chien enragé loin de soi. Il en avait souffert et avait fini par décider que si leur couple devait décliner, alors il voulait que cela soit aussi de sa faute. Il avait pris sa veste et était parti retrouver une jeune qui voulait bien de sa compagnie, qui voulait bien écouter ses problèmes. Il aurait dû aller voir Alizée à la place, elle lui aurait remis les idées en place. Avec elle, il n’aurait pas pu céder. Mais il avait été voir Théodora parce qu’il savait qu’elle se laisserait faire sans questionner sa morale plus en avant.
« Oui, oui je savais ce que je faisais. J’ai pensé qu’en me faisant mal, en nous faisant du tort à tous les deux, je pourrai peut-être arrêter de souffrir du reste, de tout ce qui nous arrive. »Mais Eliane était butée. Et chaque phrase qu’il prononçait était détournée de son but et devenait quelque chose de dégradant contre elle. Elle lui demandait combien de temps il tiendrait et Alex fulminait. Le faisait-elle exprès ? Il avait tenu six ans auprès d’elle sans que cela ne lui semble être un calvaire. Pourquoi voulait-elle que cela change.
« Tu es désespérante Eliane. Je n’ai pas à tenir. Quand comprendras-tu qu’entre un enfant ou toi, je te choisis toi ?! » C’était aussi simple que ça. Et là où elle voyait une impasse et des reproches, il voyait un monde plein de possibilités. Il aurait voulu qu’elle porte leur enfant dans ses pans, oui. Mais si c’était une autre qui donnait la vie à leur héritier de nom, c’était tout aussi bien. Pour autant que leur amour ne flétrisse pas comme il était en train de le faire.
« Tu n’as pas le droit de dire ça. » Son ton était froid. Qu’elle donne raison à sa mère, c’était la pire des abominations. Il ne pouvait pas faire face au fantôme omniprésent de la mère d’Eliane. Il savait que cette femme avait fait un mal considérable à sa fille et se demandait si un jour son amour suffirait à panser ces blessures. Apparemment l’exécrable personne gagnait du terrain et détruisait leur couple encore aujourd’hui. Et Eliane continuait sa tirade sans sens.
« Je ne serai jamais dégoûté de toi. Ce qui me dégoûte c’est que tu puisses penser que cela arrivera. C’est que tu te permettes de penser à ma place, de faire des choix pour moi. Tu préfères me repousser que de me donner une chance de te montrer que cela n’affecte en rien mon amour pour toi. » Il la regardait, cherchant à savoir ce qu’il pourrait bien dire ou faire pour corriger le mal qui avait été fait. Mais alors qu’il pensait que son adultère serait ce qu’il devrait justifier, c’était tout autre chose qui continuait à les séparer. Il s’assit sur le lit et laissa tomber sa tête entre ses paumes.
« Tu vois Eliane, si je t’ai trompée, je pense que c’était parce qu’une part de moi espérait créer un problème qu’on pourrait régler. J’espérais que tu m’en voudrais mais que tu me pardonnerais et qu’ensuite on irait de l’avant. Je voulais peut-être créer une diversion pour qu’on oublie le vrai mal, celui qui te prend à la gorge depuis quatre mois. » Il secouait la tête sans trop savoir s’il devait dire toutes ces choses. Pourtant, il devait saisir sa chance et parler maintenant.
« Si tu me dégoûtes ? Evidemment que non. Quand tu as aimé quelqu’un pour de bon, peu importe ce qui arrivera, tu l’aimeras toujours. Mais si tu me demandes si aujourd’hui je suis capable de te prendre dans mes bras et de t’aimer comme autrefois… ma réponse est non. » Il leva les yeux vers elle. Ces yeux qui étaient au bord des larmes. Il n’avait plus pleuré depuis des années, depuis la mort de sa mère. Il refusait la faiblesse et la souffrance il préférait la garder à l’intérieur. Pourtant les larmes étaient là, prêtes à jaillir sans avoir obtenu la permission pour.
« Mais avant que tu ne dises une bêtise, si j’ai du mal, ce n’est pas parce que tu ne peux pas m’offrir ce que tu penses être mon plus grand rêve. C’est parce que tu m’as repoussé, tu m’as tenu à l’écart et tu m’as refusé ce qui était le plus cher à mes yeux. Toi, Eliane. C’était toi. » Il enfonce son visage entre ses mains et laisse passer un moment avant de se lever.
« Je pense qu’on devrait se donner un peu de temps tous les deux. Faire une pause, un break comme disent d’autres. Parce que là… là… on se tue à petits feux et ça me détruit. Bien plus que ce que tu penses que ta stérilité aurait pu me détruire. »Il ne voulait pas mettre la faute sur elle et pourtant, il lui reprochait d’avoir cédé à la peur et de ne pas l’avoir inclus dans le cercle des intimes avec qui elle discutait de cela. Il lui reprochait d’avoir oublié qu’il était là pour elle.
« Tu as oublié Eliane, tu as oublié que je suis ton mari et que je t’aime. Je ne sais pas pourquoi mais tu l’as fait et tu n’imagines même pas comment ça ça fait mal. »Alex se penche pour prendre un attaché case qu'il utilise au travail et se retourne une dernière fois vers Eliane avant de partir.
« Prends soin de toi Eli... Et si tu as besoin de moi pour quoi que ce soit, appelle-moi. » Il tourne le visage violemment pour ne pas qu'elle puisse voir l'émotion qui se grave sur son visage et sort. Il prendra ses affaires en vitesse et partira avant de s'effondrer dans son appart', là où personne ne verra les ravages que font l'amour.
FIN DU TOPIC
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