Un gala de charité, un autre gala de charité. Tu les enchaînais un petit peu en ce moment, tu n’avais pas le choix. Depuis l’ouverture de ton cabinet, il était plus qu’important pour toi de te montrer à tous les galas, toutes les garden parties, tout ce qui touchait de près ou de loin de potentiels clients. Heather était en ce moment sur un dossier qui lui prenait beaucoup de temps du coup tu te retrouvais à aller seule représenter votre cabinet. Ce n’était pas le poids de la tâche qui te dérangeait, tu étais habituée depuis ton enfance à ce genre d’évènements. Non, ce qui te dérangeait c’était que tu n’allais pas trop d’amuser malheureusement … C’était toujours la même chose, toujours les mêmes rituels. Habillée d’une robe de marque haute couture achetée avec Liviana quelques semaines plus tôt, tu passais l’entrée sous le flash des photographes. Tu allais ensuite déposer l’enveloppe contenant le chèque de ta donation pour l’association avant de laisser un petit mot dans le livre à côté toujours sous les flashs. Tu finis ensuite par entrer dans la salle où vont se dérouler les festivités et cette fois les flashs s’arrêtent. Tu ne peux t’empêcher de soupirer de soulagement parce que franchement c’est très oppressant. Tu ne sais pas comment font les stars pour supporter cela … Tu vois des enfants, ceux de l’association et puis il y a tous ces hommes en costard avec une belle femme à leurs côtés. Pathétique. Tu sais déjà qu’on va te faire remarquer que tu es venue seule, qu’à ton âge il est temps de te marier mais tu as juste envie de leur cracher à la figure à tous ces machos que tu fréquentes depuis trop longtemps. Un verre à la main, tu commences à te balader observant les costumes des enfants qui eux semblent jouer à s’attraper. Alors que ton regard se perd dans la foule et que tu penses à ce que tu aurais pu faire ce soir, un enfant te bouscule et tu rentres dans une femme. « Je suis vraiment désolée, un petit astronaute m’est rentré dedans. » Dis-tu en essayant de montrer l’enfant en question mais il avait disparu. En levant les yeux tu vis que la femme en question était Eliane Samuels, avocate d’affaires dont tu avais entendu parler. Ce n’était pas ton domaine mais connaître les personnes de la profession l’était. « Je ne vous ai rien renversé dessus j’espère ? » Lui demandas-tu ne sachant pas quoi dire d’autre et préférant t’en assurer vu que tu tenais une coupe de champagne à la main lors de la bousculade. Tu aurais préféré un mojito mais on allait te prendre pour une alcoolique de bas étage.

Eliane soupira tout en mettant un point final à son maquillage. Elle se regarda et se jugeant acceptable, la jeune femme appela un taxi pour l’emmener sur Pine Rivers. Si elle avait pu passer son tour, elle l’aurait fait volontiers.

« Eliane, faut que tu m’enlèves une épine du pied !! Tu dois remplacer Carter ce soir au gala ! »

Eliane avait relevé la tête de son dossier en observant Liz d’un œil perplexe attendant qu’elle poursuive.

« ça fait un mois qu’il bassine tout le monde en clamant hait et fort qu’il voulait représenter le cabinet et c’est que maintenant qu’il se rappelle que demain il a une opération. Tu sais pour sa cataracte… »

La brune avait hoché la tête

« Ok mais pourquoi moi ? »

Liz sourit d’un air entendu

« D’une parce que t’es la meilleure pour ça et de deux parce que McDouglas sera là… »

McDouglas ou le client qu’Eli courtisait depuis des mois.

« Et puis c’est pour les enfants… On sait tous ici à quel point tu les adores ! »

Un coup de poignard. Un coup en plus qui se planta dans le cœur de la brune. Elle se crispa mais réussit néanmoins à faire un sourire de façade à sa collègue.

« Si c’est comme ça… Ok »

Elle se leva d’un bond et lui demanda de lui envoyer l’adresse par téléphone et qu’elle rentrait chez elle pour se préparer.

Et la brune se retrouvait donc aux portes de la soirée. Un coursier était venu chez elle déposer l’invitation ainsi que le chèque que le cabinet avait décidé d’octroyer généreusement à la cause. Eliane savait déjà qu’elle allait y rajouter le sien perso. Liz avait raison, c’était une cause dont l’avocate était sensible. Elle pénétra alors dans la salle et prit machinalement une flute de champagne. Règle numéro 1 dans ce genre de soirée, ne jamais avoir les mains libres ou alors avoir un verre vide. Il y avait toujours une âme charitable pour vous apporter à boire et on pouvait finir la soirée très facilement ivre. Elle scruta la salle et repéra sa proie dans un groupe. Coup de chance, elle en connaissait la moitié. Alors qu’elle s’apprêtait à les rejoindre son beau sourire sur les lèvres, elle sentit qu’on la bousculait.

« Ce n’est pas grave. Ce genre de chose arrive très facilement. L’année dernière, l’un d’eux avait foncé dans la fontaine de champagne. J’imagine que c’est pour cette raison qu’ils n’ont pas réitéré l’expérience d’une fontaine cette année… »

Eliane sourit un peu malicieuse. Tendant la main, elle se présenta

« Eliane Samuels. Enchantée »

Règle numéro 2, ne jamais faire d’esclandre et apprendre à connaitre tout le monde. C’était bon pour le réseau.

C’était bien ta veine de bousculer quelqu’un toi qui espérais ce soir passer à peu près invisible. A part aux yeux de potentiels clients ou autre bien sûr. Mais l’envie de socialiser n’était pas réellement là ce soir. Toutefois, maintenant que tu y étais forcée, tu allais bien devoir le faire un peu. Les enfants tu adores ça mais alors quand ils sont en groupe en train de jouer à s’attraper au milieu d’une soirée où tu portes des talons hauts, cela devient beaucoup plus compliqué de les apprécier. Mais bon, ils avaient l’air heureux et pour des enfants dans leur situation c’était déjà pas mal. En général tu étais plutôt stable sur tes talons, encore fallait-il que tu te prépares à te faire bousculer pour bien anticiper le répartition du poids de ton corps. Heureusement, Eliane Samuels semblait ne pas être le genre d’avocate d’affaires à se fâcher pour un rien. « Ce n’est pas grave. Ce genre de chose arrive très facilement. L’année dernière, l’un d’eux avait foncé dans la fontaine de champagne. J’imagine que c’est pour cette raison qu’ils n’ont pas réitéré l’expérience d’une fontaine cette année… » Cette soirée commençait à se faire beaucoup plus dangereuse que ce que tu avais prévu. Oui, en effet, ils avaient retenu la leçon de l’année dernière. Tu espérais sincèrement qu’ils avaient aussi anticipé des ambulances si les enfants se blessaient ou finissaient par blesser quelqu’un avec leurs jeux. « J’imagine que c’est beaucoup d’excitation pour eux, ils veulent profiter le plus possible. » A leur place, tu ferais certainement pareil mais tes trente-quatre ans commencent sérieusement à se faire sentir pour le coup. « Eliane Samuels. Enchantée » Tu le sais déjà, bien entendu que tu le sais déjà mais tu fais celle qui ne sait rien, tu sais jouer la comédie quand il le faut. « Milena Grimes, enchantée. » Dis-tu un sourire aux lèvres. « Qu’est-ce qui vous amène par ici ? » Lui demandas-tu. Certainement la même chose que toi mais il fallait bien faire la conversation et tu avais appris très jeune que les choses les plus intéressantes à apprendre dans ces galas était tout ce qui n’était pas dit, tout ce qui était impliqué ou tout ce qui passait par le langage corporel. Le reste, ce n’était que du vent.

Eliane laissa son regard errer sur les enfants disséminés ici et là et eut un petit sourire entendu. Oui, ils attendaient ça depuis pas mal de temps, elle en mettrait sa main à couper. L’année dernière, c’étaient les enfants de son orphelinat qui avaient été invités à la fête et cela avait été l’effervescence pendant pas mal de temps. Les enfants avaient été tellement heureux… Encore plus, lorsqu’ils avaient appris qu’elle serait de la partie. Oui, le gala de l’année dernière était en tout point différence de celui de cette année. L’année dernière, elle n’était pas seule. L’année dernière, elle était encore follement heureuse et en compagnie de son mari…

« Oui. Ce n’est pas tous les jours qu’ils peuvent échapper au couvre feu. Je pense qu’à leur place, j’aurais été encore plus surexcitée »

Elle reposa les yeux sur Milena et répondit à sa question silencieuse

« Il y a un dispositif en cas d’accident et il y a pas mal de médecins de l’hôpital ce soir dans la pièce donc ils sont en sécurité »

L’organisation était toujours la même et Eliane connaissait la personne qui était en charge de tout ça. Elle l’avait rencontrée l’année dernière et l’avait aidé. Cela n’avait pas été simple car c’était une nouvelle venue dans la ville et ses relations n’étaient pas aussi étendue que son prédécesseur. Mais elle avait compensé ce manque par une maîtrise hors pair et un sens de l’organisation qui avait valu l’admiration de tout le comité, Eliane y compris. Cette année, on lui avait demandé de faire partie du comité mais elle avait décliné la proposition sous prétexte d’un agenda débordé. Elle n’était même pas censé être c’était pour dire… Et sans Carter et sa défection, Eli aurait été au fond de son lit ou bien dans sa chambre noire pour ne pas penser à tout ça.

« J’aime beaucoup cette cause et puis ce genre de soirées offre pas mal de possibilités… »

Elle avait resitué Milena grâce à son nom.

« Comme se faire des relations pour développer son business… », lui dit-elle avec un petit clin d’œil complice.

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Les galas de charité avaient perdu leur éclat rapidement à tes yeux. Tu en avais trop mangé durant ton enfance et ton adolescence. Tu aimais pourtant les associations, tu savais que c’était important de donner mais c’était tellement surfait dans des galas que tu trouvais ça hypocrite. Mais tu venais parce que tu savais aussi que c’était le meilleur moyen de se faire une clientèle, le meilleur moyen de montrer qu’on est au bon endroit au bon moment, qu’on connaît les bonnes personnes et qu’on peut vous faire confiance. Les enfants couraient partout et ils étaient bien la seule chose qui rendait ce gala moins ennuyeux même si tu devais avouer que te faire bousculer n’était pas dans les plans de ta soirée. « Oui. Ce n’est pas tous les jours qu’ils peuvent échapper au couvre feu. Je pense qu’à leur place, j’aurais été encore plus surexcitée. Il y a un dispositif en cas d’accident et il y a pas mal de médecins de l’hôpital ce soir dans la pièce donc ils sont en sécurité » Tu ne te faisais pas réellement de soucis pour leur sécurité. Si ce gala avait pu être organisé c’était que tout était fait pour que la soirée soit sécurisée pour les enfants. Tu ne manquais pas de noter qu’Eliane semblait drôlement informée de ce qui se passait dans ce gala. Toi tu étais venue en simple invitée pour regarder le spectacle et parler aux bonnes personnes. La bonne cause n’était qu’un plus. Tu donnais de ton temps dans des associations quand tu pouvais mais la réalité c’était que tu n’avais pas beaucoup de tems pour toi. « Je me doute qu’on ait bien entouré. » Dis-tu un fin sourire sur les lèvres. Toute la haute société de Brisbane se trouvait certainement là ce soir. Tout comme toi sur son trente et un. Les robes des grands créateurs n’étaient pas tes préférées mais il fallait marquer le coup, savoir se vendre autant par son discours que par son image. Et puis tu trouveras bien un moment pour la ressortir. « J’aime beaucoup cette cause et puis ce genre de soirées offre pas mal de possibilités… Comme se faire des relations pour développer son business… » En effet, c’était assez bien vu. Une bonne cause et le moyen de se faire un bon carnet d’adresse c’était ce qui t’avait amenée aussi. « En effet c’est non négligeable. » Dis-tu avec un sourire. « Vous êtes impliquée dans cette association et ce gala ? » Tu refusais de faire une quelconque gaffe.

De ce qu’elle se rappelait, Milena Grimes était une avocate spécialisée dans les affaires de la famille ce qui expliquait sa présence dans ce gala. Après tout, la cause des enfants attirait pas mal de personnes non ? Cela allait lui permettre de faire la rencontre de pas mal de membres de l’administration de ce gala ainsi que de différentes associations. Eliane soupçonnait la belle brune être venue dans ce but. Qui pouvait l’en blâmer surtout quand on sait que son business venait tout juste d’être lancé. Ce gala était le meilleur moyen de se faire des relations dans sa branche.

« Je l’ai été l’année dernière. J’aime beaucoup les enfants par conséquent je ne peux qu’adhérer à ce gala de bienfaisance… »

Eli essayait de faire en sorte que sa voix ne tremble pas. Son amour des enfants n’avait pas bougé juste sa vie personnelle. Mais les deux étaient intrinsèquement liés. Ce qu’elle aimait tant lui procurait une souffrance sans nom en retour. Mais ces petits êtres innocents n’y étaient pour rien et elle se le répétait comme un mantra pour ne pas flancher. Paradoxalement quand elle était à l’orphelinat, elle réussissait sans problème à donner le change. Et elle était incapable de savoir pourquoi.

« Et vous ? C’est la première fois que vous venez à celui-là n’est-ce pas ? Si vous le souhaitez, je peux vous présenter à la directrice. Elle peut vous en dire plus sur l’association et cela peut également vous aider pour la suite… »

La brune disait implicitement qu’elle connaissait le cabinet de sa compagne du soir. Elle lui laissait la possibilité de refuser sans pour autant qu’il n’y ait de malaise entre elles. Eliane ne faisait pas ça dans le but de prouver quoique ce soit. Si elle pouvait aider, elle le faisait volontiers.

Tes parents t’avaient appris très tôt qu’il était important de s’intéresser à la cause associative. Cela donnait une bonne image de vous et des valeurs que vous représentiez. Ca t’avait toujours fasciné de voir ton père magouiller le soir dans son bureau et le voir tout sourire déposer des chèques pour diverses associations de New York. Oh oui, il y a bien une vie privée et une vie publique. De ton côté, tu ne magouillais pas mais tu avais gardé le côté associatif en toi. Tu aimais donner de l’argent aux associations qui te plaisaient, participer à ce genre de gala si cela pouvait aider parce que du temps pour faire du bénévolat tu en manquais cruellement. Eliane, tu la connaissais simplement car elle était avocate des affaires. Tu ne connaissais rien de sa vie privée ni de ses engagements dans des associations si elle s’était engagée. « Je l’ai été l’année dernière. J’aime beaucoup les enfants par conséquent je ne peux qu’adhérer à ce gala de bienfaisance… » Tu hoches la tête. C’est pour toi un miracle qu’elle ait réussi à trouver le temps de monter un gala comme celui-ci l’année dernière. Toi tu avais la tête dans l’ouverture de ton cabinet et puis aussi dans ta famille dysfonctionnelle. Oui, peut-être que tu étais finalement un peu égoïste mais qui ne l’est pas ? « C’est très admirable de votre part. J’adore aussi les enfants mais je n’ai pas le temps pour l’instant de m’investir dans quoi que ce soit. » Dis-tu en haussant les épaules. Tu ne relèves pas le côté tremblant de la voix d’Eliane en abordant ce sujet ni son visage crispé tout à coup. La dernière fois que tu avais vu ce genre de réaction c’était quand ta meilleure amie Eva t’avait annoncé qu’elle ne pouvait pas avoir d’enfants. Mais tu ne commentais pas, tu la laissais te dire : « Et vous ? C’est la première fois que vous venez à celui-là n’est-ce pas ? Si vous le souhaitez, je peux vous présenter à la directrice. Elle peut vous en dire plus sur l’association et cela peut également vous aider pour la suite… » Tu rends son sourire à Eliane. Clairement il n’y a pas que toi qui connais la compétition. Enfin, compétition était un bien grand mot. Eliane travaillait dans un grand cabinet, le tient démarrait et vous n’avez pas la même spécialité mais bon, c’est le principe. « C’est une proposition qui ne peut pas se refuser en effet. » Lui dis-tu en lui emboîtant le pas. Tu décidais d’en profiter aussi pour apprendre à la connaître : « Vous habitez Brisbane depuis toujours ? » Demandas-tu dans un premier temps. Une question peu invasive qui pouvait lancer une conversation.

Admirable ? Elle ne pensait pas. Certes, cela prenait du temps mais la satisfaction et le plaisir qu’elle en retirait valaient largement le temps qu’elle y consacrait. Mais bon, elle ne devait pas avoir le même emploi du temps ni les mêmes préoccupations que Milena. Monter sa propre boîte ne devait pas être simple et on devait avoir dix milliards de choses en tête. C’était plutôt elle qui devait admirer Milena et non l’inverse… Cela fit sourire Eliane ce petit paradoxe.

« Moins admirable que de monter son propre cabinet… », lui répondit-elle en souriant.

Fini les faux semblants. Par-là, l’avocate d’affaires venait de dire à l’avocate des familles qu’elle connaissait sa réputation et son cabinet. Eliane aimait être directe. Elle n’était pas ici en pleine transaction où elle devait se la jouer fine et un brin requin. On était dans un contexte totalement différent et puis elles n’évoluaient pas dans les mêmes cercles. Il n’y avait aucune compétition à voir.

« Venez ! Vous allez voir que Sandy Clarkson est une femme en tout point remarquable. Et elle connait énormément de monde. Si vous lui plaisez, elle vous fera rencontrer des personnes susceptibles de vous aider pour votre cabinet. »

Elles commencèrent à slalomer entre les personnes présentes ce soir-là.

« Non… J’ai vécu mes premières années à Paris en France. Je suis arrivée à Brisbane vers l’âge de cinq ans… »

Elle gardait un vrai souvenir nostalgique de sa ville de naissance. C’était l’époque où elle avait une vraie famille aimante et unie. La mort de son père avait brisé ce bel équilibre et sa mère s’était alors révélé sous son vrai jour… Mais c’était le genre de choses dont Eli ne voulait pas se rappeler aujourd’hui…

« Et vous ? Vous êtes d’origine italienne n’est-ce pas ? »

Ce qui semblait logique au vu du prénom de sa rencontre du soir…

Tu ne pouvais que féliciter Eliane de s’engager ainsi dans un travail associatif qui ne pouvait que lui prendre beaucoup de temps à côté de son travail. Tu l’avais fait toi aussi à New York mais depuis ton arrivée à Brisbane, tu n’avais pas trouvé le temps. D’abord parce qu’il avait fallu que tu prennes du temps pour toi après le scandale que tu avais fui, que tu apprennes à te reconstruire et puis ensuite parce que tu t’étais lancée dans ton projet de cabinet et que cela te prenait tout ton temps libre. Certainement que tu t’engageras de nouveau quand ton cabinet sera réellement installé et reconnu. Pour l’instant il était encore bancal ce qui était assez normal. « Moins admirable que de monter son propre cabinet… » Tu souris à Eliane. Cela ne te surprenait nullement qu’elle sache que tu avais ouvert ton cabinet. Se tenir au courant de ce qui se passe dans la profession, c’est la base quand même donc cela ne te surprend pas. « Je sais pas, certains diront que c’est de l’égoïsme, au moins vous donnez votre temps pour les autres. » Dis-tu en haussant les épaules. Les certains dont tu parlais n’était autre que ton petit frère qui avait assez mal réagi à ton annonce. Pourquoi serait-il le seul à ouvrir son cabinet ? Des fois, tu ne comprenais pas ton plus jeune frère, des fois se transformant en constamment ces dernières années. « Venez ! Vous allez voir que Sandy Clarkson est une femme en tout point remarquable. Et elle connait énormément de monde. Si vous lui plaisez, elle vous fera rencontrer des personnes susceptibles de vous aider pour votre cabinet. » Tu hoches la tête, tu n’en doutais nullement. Ne jamais refuser une introduction qui peut vous être utile, c’est important. Surtout que ton domaine qui était le droit de la famille était un domaine qui intéressait souvent. « Merci beaucoup. » Dis-tu ne sachant pas quoi dire à ce sujet. Tu demandais alors à Eliane si elle venait de Brisbane ou pas pour faire un peu la conversation et apprendre à la connaître par la même occasion. « Non… J’ai vécu mes premières années à Paris en France. Je suis arrivée à Brisbane vers l’âge de cinq ans… Et vous ? Vous êtes d’origine italienne n’est-ce pas ? » Tu hoches la tête. Pour toi, à cinq ans c’est presque comme si elle avait toujours vécu à Brisbane mais tu comprenais qu’elle insiste sur ses origines, c’est normal. « Des origines oui mais je n’ai jamais vécu en Italie. Je suis née à Londres où j’ai vécu jusqu’à mes treize ans puis on a déménagé à New York et je suis à Brisbane depuis deux ans et quelques mois. » Dis-tu avec un sourire pour répondre à sa question.

« Je ne considère pas l’ambition comme de l’égoïsme personnellement… Il faut une grande capacité de concentration et de travail pour réussir. Et puis les soi-disant grands cabinets ont commencé par être des cabinets débutants non ? »

Eli était admirative des personnes qui voulaient construire de leur propres mains un endroit qui leur ressemblaient. La jeune femme savait qu’elle n’aurait jamais ce courage. Et puis, elle était bien là où elle était et n’aspirait pas à autre chose professionnellement parlant. Du moins pas dans le milieu juridique. Elle aurait aimé avancer dans sa vie personnelle mais cela semblait être compromis maintenant. Mais ce n’était pas le genre de conversation à avoir en ces lieux.

« Vous avez beaucoup bougé… Pourquoi avoir tout quitté et venir à Brisbane ? New-York a l’air d’être une ville tellement cosmopolite et intense… »

Elle aurait aimé vivre là-bas. Le rêve américain en somme. Peut-être l’aurait-elle fait si elle ne s’était pas mariée. Maintenant ce n’était plus d’actualité. Elle avait sa vie ici et ne se voyait pas tout recommencer à zéro. En somme, elle n’était pas si courageuse que ça. Être dans sa zone de confort… ben c’était confortable. Aussi la modestie de Milena lui plaisait. Ce n’était pas une femme qui allait se pavaner en étalant sa réussite et cela plaisait à Eliane.

« Pourquoi Brisbane ? Enfin à part le soleil à temps plein bien sur… »

Tout en parlant, elles étaient arrivées près de Sandy qui embrassa chaleureusement la brune.

« Tu sais que tu nous as manqué cette année ? T’as intérêt à te rattraper avec un gros chèque ma belle ! »

Eli éclata de rire devant l’audace de la vieille femme.

« Hmm… Tu verras bien ! Mais promis, j’essayerai de t’aider un peu plus pour le prochain. Cela a été un peu… compliqué ces derniers temps. »

C’était le moins que l’on puisse dire. Un coup de massue sur la tête et un mariage qui partait en vrille c’était pas mal…

« Sandy… je voudrais te présenter Milena Grimes. Elle est avocate spécialisée dans le droit de la famille. Milena, Sandy Clarkson. La femme qui mène tout ça d’une main de maître et une femme admirable en tout point de vue… »

« Je ne considère pas l’ambition comme de l’égoïsme personnellement… Il faut une grande capacité de concentration et de travail pour réussir. Et puis les soi-disant grands cabinets ont commencé par être des cabinets débutants non ? » Tu ne sais pas si ton intention est de devenir un grand cabinet. C’est au moins que ton cabinet soit reconnu, qu’il ait une place dans le milieu. Qu’il devienne énorme n’est pas une priorité, qu’il comporte en son sein les meilleurs éléments de Brisbane par spécialité était par contre plus qu’essentiel à tes yeux. Mais le recrutement de ton personnel n’était pas réellement ce pour quoi tu étais là ce soir, c’était plutôt des clients que tu recherchais. En effet, on ne recrute pas des avocats sous le nez de leurs employeurs, c’est mal vu de toute manière. « Certes, cela demande beaucoup d’investissement et de temps. J’ai juste une famille très particulière qui est loin d’être heureuse de manière unanime depuis l’ouverture de ce cabinet. » C’était plus simple de dire ça que d’avoir à expliquer comment fonctionnait ta famille. Même toi tu n’étais pas certaine de le savoir des fois et c’était carrément flippant. Tu donnais ensuite à Eliane un résumé des villes dans lesquelles tu avais vécu. « Vous avez beaucoup bougé… Pourquoi avoir tout quitté et venir à Brisbane ? New-York a l’air d’être une ville tellement cosmopolite et intense… Pourquoi Brisbane ? Enfin à part le soleil à temps plein bien sur… » Ah la question à dix mille dollars … Celle que tu avais presque oubliée parce que plus personne ne te la pose désormais. Celle qui te rappelle de mauvais souvenirs, des souvenirs que tu comptes bien laisser dans le passé. Tu réfléchis à ce que tu vas répondre à Eliane. Non, tu n’es pas partie parce que tu en avais marre de New York, tu es partie parce que tu as été forcée de partir. Pas directement mais c’était tout comme. « Mon frère habitait et habite toujours à Brisbane. Je suis allée le rejoindre. Il était temps pour moi de quitter New York. » Dis-tu simplement avec un petit sourire poli. Tu n’avais nullement envie de t’étendre sur le sujet et cela tombait bien car vous étiez arrivées devant l’organisatrice de cette soirée apparemment. Tu te contentais de lui sourire alors qu’Eliane lui parlait dans un premier temps puis elle te présenta : « Sandy… je voudrais te présenter Milena Grimes. Elle est avocate spécialisée dans le droit de la famille. Milena, Sandy Clarkson. La femme qui mène tout ça d’une main de maître et une femme admirable en tout point de vue… » Tu serres la main de la femme se trouvant devant toi. Tu n’as aucun mal à l’imaginer en train d’organiser ce genre de soirée. « Enchantée. Félicitations, c’est une très belle soirée que vous avez organisée là. Les enfants comme les adultes semblent passer une bonne soirée. » Dis-tu comme simple constat car effectivement, tout le monde semblait bien s’amuser.

Elle arqua un sourcil en entendant Milena parler de famille particulière mais discrète, elle ne posa pas de question. De toute façon qui était-elle avec une mère qui ne savait rien faire d’autre que de la rabaisser et un mari aux abonnés absents pour parler ? Les familles dysfonctionnelles, elle connaissait…

« Parfois, il faut juste continuer sa route sans se préoccuper de ce que les autres peuvent penser. On ne peut que mieux s’en porter… »

Si elle avait dû écouter sa mère, Eliane ne serait aujourd’hui qu’une serveuse dans un restaurant quelconque. Non qu’elle éprouve du mépris pour les serveuses, elle était juste heureuse d’avoir pu saisir l’opportunité qui lui avait été donné pour faire des études et de s’être donné les moyens de ne pas gâcher cette chance. En écoutant Milena, elle comprit que la jeune femme ne lui disait pas toute la vérité.  Mais encore une fois, elle ne dit rien. Elle n’était pas là pour déterrer le passé ou les secrets des personnes qu’elle rencontrait. Elle voulait juste oublier un temps sa vie et ne plus penser à tout ce qu’elle traversait en ce moment.

« Je comprends… »

Elles arrivèrent alors près de Sandy à qui elle présenta Milena. Elle put se rendre compte que la jeune femme était rompue à ce genre d’exercice à sa façon de parler avec la directrice qui eut l’air ravie

« Je vous remercie. Vous vous intéressez depuis longtemps à cette cause ? »

Eli regardait autour d’elle. C’était vrai que les gens avaient l’air de bien s’amuser. Les enfants étaient occupés dans un coin avec un magicien qui leur confectionnait des ballons dans différentes formes. C’était une belle soirée et Sandy avait très bien tout géré.

« Milena a raison. C’est magnifique Sandy ! Tu n’as plus besoin de moi pour faire ce genre de soirée ! », rajouta-t-elle avec un petit clin d’œil taquin.

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« Parfois, il faut juste continuer sa route sans se préoccuper de ce que les autres peuvent penser. On ne peut que mieux s’en porter… » Oh tu avais continué ta route. Ton cabinet avait ouvert après tout et tu n’avais pas vu ton frère depuis cette discussion. Ce n’était pas comme si tu le voyais souvent avant cette petite prise de tête mais là pour le coup cela avait été un beau silence radio. Il devait se pavaner avec sa nouvelle petite amie et continuer à jouer à l’égoïste. En ce moment, l’image que tu avais de ton petit frère n’était pas des plus flatteuse surtout qu’il n’avait même pas trouvé bon de se montrer à l’hôpital quand ton grand frère s’était fait opéré. « J’ai continué ne vous en faites pas, j’ai ouvert mon cabinet. C’est juste dur à gérer quand cela vient de votre famille. » Tu ignorais la situation familiale d’Eliane donc peut-être qu’elle comprendra, peut-être pas mais en tout cas c’était vraiment ça ton plus gros problème. Tu avais pu voir les yeux de la jeune brune en face de toi briller quand elle avait entendu parler de New York. Cette ville aura toujours une place bien particulière dans ton cœur mais tu ne pourras plus y habiter. C’est la vie, c’est un fait. Tu ne t’étends pas sur le pourquoi du comment et Eliane semble comprendre que tu n’as aucune envie de t’étendre sur ce sujet. Seuls tes frères savent ce qui s’est passé à New York, personne n’est au courant à Brisbane et tu comptes bien que cela se poursuive encore longtemps. Alors qu’Eliane te présente l’hôte de la soirée, tu la complimentes. Tu l’aurais fait même si la soirée était loupée mais ici ce n’était pas du tout le cas. « Je vous remercie. Vous vous intéressez depuis longtemps à cette cause ? » Tu souris, cette femme n’est pas là pour faire le show mais réellement pour défendre la cause de ces enfants. C’est louable … Beaucoup d’hôtes que tu avais rencontrées n’organisaient ces soirées que pour les retombées médiatiques et la popularité que cela leur permettait d’acquérir. « Je m’intéresse à ce qui touche les enfants depuis très longtemps. Mes parents ont toujours été impliqués dans les œuvres caritatives. Mais je n’ai pas la chance de donner de mon temps comme vous. » Il fallait le reconnaître, tu n’étais pas un ange. Tu étais ici pour faire des rencontres et déposer un chèque. « Milena a raison. C’est magnifique Sandy ! Tu n’as plus besoin de moi pour faire ce genre de soirée ! » Tu souris à cette remarque. Des mains en plus et une vision plus moderne ne font jamais de mal pour se renouveler. « C’est peut-être travailler avec vous qui lui manque. » Dis-tu pour taquiner les deux femmes.

Elle eut un petit sourire entendu envers Milena lorsqu’elle évoqua sa famille. Elle ne pouvait que trop la comprendre. Eli avait une mère – enfin si on pouvait appeler Madame Davenport une mère – totalement absente. Et lorsqu’elle revenait dans la vie de sa fille ce n’était que pour lui demander de l’argent et la démolir un peu plus à chaque fois. Elle avait beau afficher un visage impassible, son cœur supportait assez mal cette attitude de la part de la personne censé vous aimer d’un amour inconditionnel. Et c’était d’ailleurs la chose qu’elle s’était promis de ne pas reproduire le jour où elle aurait des enfants. Enfin… Lorsque ce rêve avait encore lieu d’être. Aujourd’hui… Ben elle reportait cet amour sur les enfants de l’orphelinat. Tout en papotant, elles s’étaient rendues auprès de Sandy. Eliane ne put s’empêcher de rire à la taquinerie de Milena.

« Qui sait ! Elle n’a plus personne pour lui casser les pieds à longueur de journée ! », répondit-elle du tac au tac.

Un petit regard échangé avec la vieille dame qui rigola à son tour. Sandy était une femme de poigne avec une grande expérience dans le domaine du caritative. Eli avait énormément appris à son contact et même si sur certains sujets, elles n’avaient pas été d’accord et que leurs discussions avaient pu être assez houleuses, il en était néanmoins ressorti un grand respect mutuel et une belle amitié.

« J’ai croisé Lance qui m’a dit que vous allez reprendre l’idée de la projection. Vous avez repris les diapositives qui restaient de l’année dernière ? »

La vielle dame hocha la tête

« Oui et on a eu pas mal de clichés de l’opération faite au Ghana. C’est une bonne chose que les gens puissent voir que leur argent sert bien à quelque chose d’autres que des réductions sur leurs impôts ! Je compte sur toi Eli pour revenir nous prêter main forte. »

Elle se tourna vers Milena pour rajouter

« Vous avez raison, ça m’a manqué de ne pas travailler avec elle. Mais vous savez qu’on a toujours besoin de mains… »

Eliane sourit. Le sous-entendu était on ne peut plus clair…

Faire la conversation à l’organisatrice de la soirée, cela ne te dérangeait nullement. Tu étais programmée pour ce genre de conversations toutes faites qui n’avaient pas de réel fond mais qui se trouvait être d’une importance cruciale et donc qu’il ne fallait nullement louper. Les personnes qui se lancent dans le caritatif de cette ampleur, ce sont des gens avec de gros carnets d’adresse. Tout le monde ne s’improvise pas organisateur de ce genre de soirées. Ta mère était une grande experte dans le domaine, femme au foyer, quand vous aviez grandi elle s’était lancée dans le caritatif et les soirées organisées par ta mère faisaient parties des soirées les plus prisées de New York. Sans compter celles qu’elle organisait régulièrement chez vous pour ton père, ses collaborateurs et ses clients. Oh oui, ta mère avait toujours joué le rôle parfaite de la femme du grand avocat qui lui permet de briller un peu plus en société. Tu n’arrivais pas à comprendre comment ta mère pouvait supporter cette vie mais tu ne l’avais jamais vu souffler ou se plaindre. « Qui sait ! Elle n’a plus personne pour lui casser les pieds à longueur de journée ! J’ai croisé Lance qui m’a dit que vous allez reprendre l’idée de la projection. Vous avez repris les diapositives qui restaient de l’année dernière ? » Tu n’étais pas là l’année précédente, tu ne savais donc pas de quoi les deux femmes parlaient. Tu allais certainement le découvrir au cours de la soirée cependant. Il était évident qu’elles partageaient une connexion assez forte et que les deux femmes s’entendaient à merveille. Les taquineries de l’une comme de l’autre étaient là pour le rappeler. « Oui et on a eu pas mal de clichés de l’opération faite au Ghana. C’est une bonne chose que les gens puissent voir que leur argent sert bien à quelque chose d’autres que des réductions sur leurs impôts ! Je compte sur toi Eli pour revenir nous prêter main forte. Vous avez raison, ça m’a manqué de ne pas travailler avec elle. Mais vous savez qu’on a toujours besoin de mains… » Tu lèves un sourcil, cela ne te surprend pas que l’on essaye de te recruter. Dans le caritatif, tu savais qu’on a toujours besoin de bénévoles car ceux qu’on a déjà ne sont pas toujours disponibles quand il le faut, il faut avoir une petite armée en réserve pour pouvoir faire face. Un sourire en coin sur les lèvres tu répondis : « Il serait bête de ma part d’éluder la question et de faire comme si je n’avais pas compris. Ce serait un plaisir pour moi de venir vous aider, je manque légèrement de temps en ce moment car je suis en train de lancer mon cabinet mais n’hésitez pas à me passer un coup de fil quand vous avez besoin de deux mains en plus. » Lui dis-tu en lui tendant ta carte. Ou comment donner sa carte à une personne influente de manière naturelle et discrète. Mais tu étais sincère, si tu avais le temps tu viendras aider avec plaisir.

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