«  Je suis désolée, mais je dois vraiment y aller. » Je ne sais plus réellement à qui je m’excuse le plus. Mon travail pour devoir toujours partir avant 20h le soir et parfois devoir remettre certaines choses entre les mains de mes salariés ou bien à mon fils auquel j’avais promis plus de présence et pour qui je n’arrive que rarement avant 20h… Récupérant mes affaires, je me dépêche de descendre, atteindre ma voiture puis le 20 Pine Rivers. Alors que les journées des enfants se font de moins en moins chargées, celles des adultes ne diminuent pas. Bien heureusement pour moi, Gabriel passe de plus en plus de temps avec Oliver et alors que j’accepte sans problème de les prendre le week-end, en semaine, je suis incapable de les récupérer à trois heures de l’après-midi. Quand Théo m’avait proposé de prendre mon fils en même temps que le sien, je n’ai pas hésité bien longtemps pour dire oui. Devant la porte des Hazard-Perry, alors que la soirée a déjà bien commencé, je me sens coupable d’être sortie aussi tard du travail et frappe comme à mon habitude à la porte de chez eux. Je sais que les garçons vont comme toujours courir dans la chambre d’Ollie ou tout autre endroit de la maison se cacher pour ne pas avoir à se quitter, mais au moins la porte s’ouvre. Loin d’être la personne que j’espérais, c’est sur Connor que la porte s’ouvre. Un sourire apparait sur mon visage tout aussi amical que coupable. Je m’en veux un peu de ne lui pas avoir dit qui je suis mais comment aurais-je pu lui dire directement ? Après tout, moi non plus je ne l’ai pas reconnu de suite… Jusqu’à ce qu’il vende une montre hors de prix à un jeu auquel il n’adhérait même pas… «  Hey. » Bon cette maison n’a l’air d’avoir que trois habitants dont deux en haut, pas prêts à descendre… «  Je suis désolée du retard, c’est un peu la course en ce moment… » Bon d’accord, je ne sais même plus comment interpréter son regard mais il a l’air de penser quelque chose… «  Tu vas bien ? » De toute manière, je doute que les pensées de Connor restent dans sa tête bien longtemps, à la grande différence de son frère qui ne viendra pas me sauver à ce moment précis…

«  Pas de problème Théo vient tout juste de partir, je suis le chaperon depuis à peine 10 minutes.» Elle a réellement de la chance d’avoir toujours un frère sous la main. Elle est encore une très jeune maman, et si déjà je le pense pour moi, pour elle, entre les études et son fils, c’est mission impossible. Les liens familiaux qu’ils ont sont donc parfaits. Tout comme ce que Gauthier souhaitait en partant ici… Je suis tout de même soucieuse de ne pas l’avoir trop mise dans une mauvaise situation en lui laissant les deux garçons, mais la présence de Connor sur le sujet me rassure légèrement, même si j’avoue qu’après l’avoir aperçu avec son charme scandinave, je ne sais plus ce que je préfère… « ça peut aller oui, et toi ?» Je fronce légèrement les sourcils, qu’est-ce qui le dérange ? Cette réponse n’est pas celle que l’on espère lorsqu’on pose réellement la question… « Ça va toujours, juste un peu débordée je crois comme tu as pu le voir. » Autrement, ce n’est pas mon genre d’arriver à pas d’heure pour récupérer mon fils… Quoi que… Je le laissais bien à mon mari pendant des heures le soir, alors question éthique, j’ai encore beaucoup de leçon à prendre. Répondant à son invitation, je quitte le pas de la porte pour entrer dans ce salon que je connais de mieux en mieux sans y être totalement habituée. Même si nous passons beaucoup de temps ensemble avec les enfants et Gauthier, nous arrivons régulièrement chez moi ou dehors, endroits plus calmes et moins peuplés que cette maison. « Les gamins jouent à cache-cache tu veux quelque chose à boire le temps qu’ils finissent leur partie ? » « Seulement un verre d’eau merci. » Après cette journée, une bière ou un verre de vin aurait aussi pu faire l’affaire, mais je dois ramener mon fils chez moi et avec la fatigue accumulée, je préfère ne pas forcer le destin… Et comme nous en avons probablement pour un petit moment avant qu’ils ne finissent, je préfère ne pas décliner entièrement l’offre de mon hôte. « On se croise pas mal en ce moment, Ollie et Gabriel sont devenus inséparables ou quoi ? » Je ne serais pas entraînée à ça, j’aurais probablement rougit à sa demande, telle une coupable. Mais je n’en suis pas une et sa question reste légitime et totalement vraie. « J’ai tout tenté, voir s’il avait d’autres amis mais rien y fait. » Je souris à ma réplique comme si mon but était de les séparer. « Il faut croire qu’ils se sont parfaitement trouvés, ou je vais croire qu’il n’y a qu’un autre garçon dans la classe de Gab. » Il n’est pas possible de ressentir un lien du sang si loin juste comme ça, donc cela pourrait être une solution ! Et puis il faut l’avouer, ils ne sont pas les seuls à proposer des sorties à quatre, la raison pour laquelle nos chemins se croisent régulièrement…

Je ne sais pas pourquoi, mais le regard du plus jeune Hazard-Perry, ne me dit rien de bon depuis qu’il m’a vu sur le perron de la maison… Aimant bien jouer avec les autres, je préfère ne pas avoir un revers de manche trop fort et au fond de moi, je pense qu’il a compris. Connor est loin d’être bête et le prendre pour quelqu’un de ce genre, n’est pas la meilleure solution. « Oh, ça se voit à peine. Entre seulement. » L’écoutant, je prends place dans la demeure, découvrant à nouveau et avec soin, les décors de ce cocon familial. « Sur ? Même pas une petite vodka pour te réveillé ?» Un léger rire s’échappe d’entre mes lèvres. Je pense que ça ira, surtout pour de la vodka. « C’est vrai que l’Irish Cofee ne serait peut-être pas de refus, pour un petit tonus. » Bien entendu, je blague, là tout de suite, un Irish me finirait probablement sur le champ.

Rapidement, il tourne la conversation sur les deux garçons devenu inséparables au cours de ces derniers mois et encore plus ses dernières semaines où Gauthier et moi étions loin de refuser un moment tous les quatre. « C’est vrai ? Vraiment tout ? Comme quoi ils s’accrochent quand ils veulent. » Bon, probablement pas tout, tout, mais il est régulier que je demande à Gabriel s’il souhaite inviter un autre ami, jamais aucun n’a fait mouche et seul Ollie est récurrent.  Pourtant, j’ai réellement cette impression que les deux garçons font leur règne à l’école et je pense que la liste des invités à l’anniversaire sera longue, cependant c’est le petit brun qui gagne la palme d’or, comme Maia l’avait eu avec moi à peu près au même âge. « Mais dans le fond ça te permet d’apprendre à nous connaître... Et je comprends Gabriel, une fois qu’on connait un HP on peut pas le lâcher, on finit toujours par revenir.» D’apprendre à les connaitre ? Au fond, il n’a pas vraiment tort, je n’aurais jamais autant parlé avec Théo depuis le rapprochement de nos garçons, mais pour ce qui concerne Charlie et Connor, ma relation avec eux est un peu différente, quand à Gauthier… Ce n’est pas vraiment parce que les deux enfants sont amis mais plus… « Je ne suis pas sûre que je sois bien gagnante à ce jeu, alors, si ? » Je le taquine légèrement, rentrant dans son propre jeu. Enfin pour le côté HP et ne pas les lâcher, je peux presque être que d’accord. « Tu es sûr que ta stratégie fonctionne pour vous tous ? » Du côté des Donovan, on a testé avec Ollie et Gauthier et l’histoire est vrai, mais même si j’apprécie Connor, est-ce que réellement je reviendrais uniquement pour lui ? « Et qui nous dis que ce n’est pas Oliver qui supplie Gabriel de revenir ? » Bon j’avoue, en ce moment, cela vient plus des adultes mais ça, on ne le dira pas…

« Pas gagnante ? On est toujours gagnant quand on croise notre route, enfin surtout la mienne.» Comment vont les chevilles Connor ? Je ris doucement à sa réplique, persuadée surtout grâce à son rire qu’il n’est pas si sérieux que cela. Il se permet tout de même de marquer un temps de réflexion quand je lui demande s’il pense réellement que tout ça s’applique à toute la fratrie. « Mhh… J’ai encore un doute en ce qui concerne Charlie mais je préfère ne rien lui dire, il pourrait se vexer.» C’est bien, on sent la rancœur chez le petit frère ! Les relations doivent être géniales dans le coin… Je ne peux tout de même retenir un souffle ironique, il ne lâchera donc rien. Déjà petit il aimait bien cela, mais alors aujourd’hui, il a grandi et est devenu encore plus fier de lui et cela est plutôt drôle au final. « C’est bien, tu tiens au moins ta fierté de famille. Et je trouve Charlie adorable pour ma part. » Je lui adresse un clin d’œil, à part le paon, et encore, je ne vois pas plus fier qu’un Hazard-Perry… Mieux vaut ça que l’inverse mais mon dieu que mon fils ne devienne pas un serial lover fier de lui comme ses oncles et prennent un peu la retenue que seul Gauthier a peut-être acquis dans la famille (côté homme…). Pour ce qui est de son frère, j'aime surtout voir sa réaction face à cela... « On va dire que c’est moitié/moitié comme ça tout le monde est contents.» J’acquiesce même si la vérité est tout autre et que je ne suis pas d’accord avec ses propos. D’accord Ollie est fantastique et je l’accorde je crois que tous ses oncles lui vouent un culte sans nom mais Gabriel est tout de même le plus adorable de tous… Ok, je ne suis peut-être pas très objective mais…

Rapidement je le vois regarder son téléphone alors que je réfléchis à une échappée qui me semble encore impossible. Quand il me dit absolument tout sur son texto, je fronce les sourcils. D’accord, qu’est-ce qu’il se passe ici ? Personne n’aurait traduit son message pour s’excuser d’y répondre et encore moins pour un message qui au final, n’est pas si urgent… « Pas de souci, répond lui. » Je le regarde pianoter sur ton téléphone avant de relever la tête vers moi, le regard perçants presque meurtrier s’il n’y avait pas ce sourire avec. «  J’sais pas encore si j’y retournerai. T’es déjà allé à Londres toi non ? » Je ne lui ai pas déjà dis la dernière fois ? J’hausse les épaules et souris doucement. « Si, j’y ai fait mes études et y suit restée jusqu’à mon emménagement ici. » Pourquoi va-t-il sur ces plates-bandes ? Aurait-il un doute et compris que si, nous nous sommes déjà rencontré et à plusieurs reprises alors qu’il n’avait même pas encore fait sa crise d’adolescent ? Je suis d’ailleurs bien heureuse que l’Irlande est autorisée le droit du sang avant la naissance de Gabriel sinon il n’aurait été qu’anglais et ça ce n’était pas possible… « Tu pourras toujours y faire des vacances là-bas, ou inviter les gens à venir te voir ici, c’est plus sympa pour un été. » Même en hiver, il fera toujours meilleur ici que là-bas.

«  ça c’est parce qu’il ne fait pas partie de ta famille. Crois moi à vivre il est insupportable au quotidien.  » L’attaque à sa famille me fait sourire. Non, Charlie ne fait pas parti de ma famille et même si je l’apprécie, je suis loin d’être triste de cette nouvelle. Mais ils sont frères, cela doit faciliter le quotidien et je pense même qu’ils se ressemblent plus qu’il ne veut l’avouer, ce qui rend ce frère si difficile à supporter sur le long terme. « Il faut vous recréer ce quotidien aussi, cela fait longtemps que tu n’as pas vécu avec lui, il vous faut peut-être une période d’adaptation plus importante.  » A vrai dire, je n’en sais rien. Aujourd’hui, ce que j’ai de plus proche d’une sœur est Maia et jamais je n’ai vécu de tels sentiments à son égard, quand à Eleanor, nous ne sommes pas encore sœur dirons-nous.

La question sur ma vie à Londres me surprend au départ, mais je me rends compte rapidement qu’il a compris et qu’il cherche à s’amuser, qu’il tente, je ne le laisserais pas gagner. Il sait que nous nous connaissions ? Bien, il était plutôt temps il me semble. Il a l’air de se rappeler notre discussion sur ma vie dans sa ville natale, ce qui m’arrache un léger rictus. « C’est vrai, j’avais oublié mais je me souviens maintenant tu m’en a parlé ! C’était de quand à quand du coup ? Londres est grand mais si ça se trouve on s’y est croisé quelques fois sans s’en rendre compte. [/color][/b]» La voilà la question qui lui brûle véritablement les lèvres depuis que j’ai passé le pas de sa porte. « Je suis arrivée à 18 ans pour prendre mon cursus et n’en suis repartie que réellement pour venir ici, il y a un an donc. Soit presque onze ans.  » Onze ans dans cette ville où je n’aurais peut-être pas dû trainer ma meilleure amie…  « Et ou…  » Je n’ai pas le temps de finir qu’Olli arrive en courant dans la pièce pour trouver une cachette. Je regarde la scène retenant un rire lorsque l’oncle propose à son neveu de se faufiler dans le four. Je comprends le non de l’enfant et lorsqu’ils se décident enfin pour le dessous de canapé, l’enfant va s’y cacher alors que le jeune homme se tourne vers moi et fier de lui. « Je parie que Gabriel ne le trouvera jamais. » Cette fois, je ne peux retenir un léger rire alors que je vois que Connor aimerait surement pouvoir jouer avec eux. « Je ne parierais pas là-dessus à ta place.  » S’il ne le trouve pas, Olli en aura vite marre et sortira de sa cachette, ce qui fera que de toute évidence, Gab le trouvera tôt ou tard car une chose est sûr, il ne lâchera rien et n’abandonnera jamais. Ma tête blonde entre à son tour dans la salle et cherche partout. «  Vous auriez pas vu Olli par hazard?  » Il ne faut pas que je triche, je secoue donc de droite à gauche ma tête, prenant mon verre d’eau et montrant discrètement le canapé à mon fils qui s’y dirige vaguement petit à petit comme s’il avait compris. « Donc nous disions, déjà croisé à Londres ? A-t-on avis Connor ?  » Mon regard se plante dans le sien, cela fait longtemps mais tout de même, il a tout pour se souvenir aujourd’hui. «  TROUVE !  » Les cris des enfants nous interrompent à nouveau alors que je pars dans un rire communicatif avec le leur qui disparait rapidement de peur de devoir déjà partir.

Je vois parfaitement qu’il n’est pas entièrement d’accord avec moi, et je ne peux que l’écouter. Même si j’ai grandi sans frère et sœur, Maia a tenu et tiens encore ce rôle pour moi et je sais parfaitement que jamais je ne pourrais lui en vouloir indéfiniment pour quelque chose, comme si nous avions un lien plus fort que tout et j’ose croire que c’est identique pour tous les frères et sœurs, au moins, ceux qui ont grandi ensembles, comme cette fratrie. Quoi qu’il puisse me dire, Connor n’est pas revenu uniquement pour sa sœur et son neveu, ils s’en sortaient avant sans lui. Il est venu retrouver sa famille et Charlie en fait partie, peut-être même plus qu’il n’a l’air de vouloir le croire. Après tout, dans mes souvenirs, ils étaient très proches, ce serait dommage de rompre tout ça pour un je ne sais quoi. Après, je n’ai pas à me mettre dans leurs histoires, je suppose simplement que cela serait plus simple pour tous s’ils s’entendaient à nouveau ils pourraient unir leur force pour embêter leur aîné, cela je le garderais pourtant bien pour moi…

Je sais, je le sens, il connait la vérité et je n’ai rien à lui cacher. Simplement, nous nous sommes retrouvés sans que je fasse attention à qui il était et je ne me suis jamais vu lui dire ‘oh finalement tu sais que je te connais depuis avant même que tu es des poils au menton, Conny !’. Il est aussi vrai que je trouvais la situation assez ironique et aujourd’hui ses tentatives l’étaient tout autant. Je ne sais pas ce qu’il cherche réellement à faire, si c’est me piéger à un jeu, je suis loin d’être certaine qu’il y arrive, mais après tout, laissons-le faire un instant. Nous sommes rapidement interrompus par Ollie qui cherche désespérément une cachette avant de se retrouver sous le canapé. Mais avant même de reprendre notre conversation, la pièce laisse place à mon fils qui déboule à son tour cherchant son ami avant que nous puissions retourner aux vaines tentatives de Connor sous mon sourire peu discret. « Ouais, j’pensais qu’on aurait pu se croiser mais depuis tes 18 ans tu dis… Au final, ça remonte peut-être à un peu trop loin pour moi. Je ne visais pas aussi haut à cette époque.» Je l’ai tenté pourtant mais je ne suis pas sûre d’accepter la pique sur les dix-huit ans ! « Parce qu’aujourd’hui tu as changé d’avis ? » Pas que je souhaite être dans son viseur mais simplement parce que je suis très bien à mon âge et presque heureuse qu’il n’est jamais rien tenté à cette époque. Deux dont un Hazard-Perry, c’est déjà bien suffisant… « Mais tu vois, tu me dirais que tu connaissais l’un de mes frères ou même ma soeur ainée que je ne serais pas étonné. » Je le regarde en biais. Il ne dira réellement rien ? Sans comprendre réellement son jeu, je lève un sourcil. Il se plante devant moi, j’ai envie de rire. En réalité, je n’ai jamais cherché à le tromper ou quoi que ce soit, mais le voir ainsi prendre cela de la sorte, m’amuse un peu, je dois l’avouer.

«  TROUVE ! » On ne finira donc jamais cette conversation ? Cependant je suis bien heureuse que Gabriel est trouvé son ami bouclant ainsi notre pari et montrant donc son ingéniosité. Leurs rires nous ramène à eux alors qu’Ollie tente tant bien que mal de sortir de sous le canapé. Les supplications des deux garçons ne me surprennent pas, ils nous font le coup à chaque séparation. « Pour moi pas de problème, à voir avec ta mère vous avez peut-être des choses à faire. » Tous les visages se tournent vers moi alors que je fais mine de réfléchir. Nous n’avons en réalité absolument rien à faire ce soir et puis il faut bien que j’enlève le doute de Connor. « Une rapide alors, on ne va pas abuser de leurs temps encore. » Ce n’est pas comme si mon fils passe plus de la moitié de son temps chez eux. Sans plus attendre, les deux enfants cours sans aucun vrai but si ce n’est ce cacher et compter les plus rapidement pour que l’autre n’ai pas le temps de trouver la meilleure cachette. Me tournant vers le cadet de la famille, je souris sachant qu’il voudra probablement finir ce que nous avons commencé. « Connor, tu le sais que je connais ton frère depuis longtemps, non ? » Jouant l’innocence et la logique pur, je ne pense même pas avoir besoin de lui dire le nom de son frère aîné pour qu’il comprenne duquel je parle. « J’ai passé des soirées entières chez toi et je pense être celle qui a le moins changé d’entre nous depuis tout ce temps. » Je ne dis pas pour autant avoir la même tête qu’à mes vingt ans mais il n’a plus les mêmes joues qu’à l’époque et fort heureusement pour lui… « Je suis presque vexée que tu ne te souviennes pas de moi. » Pour toutes les fois où il a voulu faire une soirée avec nous, bonjour la mémoire de poisson rouge Connor ! « Ce n’est quand même pas ce que tu essaies de me faire dire depuis que je suis rentrée, si ?  » Je souris délicatement, loin de lui en vouloir ou de lui faire porter le moindre préjudice, je ris même un peu de la situation que j’aurais pu éviter il y a plusieurs semaines…

J’ignore réellement pourquoi le plus jeune des Hazard-Perry tenait tant à me faire dire que je suis une connaissance de son frère mais pourtant je lui avoue sans détour. Je me doute qu’il est déçu, et je dois l’avouer, cela se voit sur son visage. « Peut-être bien oui. » Je souris, lui expliquant que pourtant c’était une évidence et même si je ne l’ai jamais souligné, je ne vois pas ce qui a bien pu le bloquer sur cette information. Après tout, mon amitié avec Gauthier n’était pas un grand secret, pas cette partie-là. « Pas faux, excuse moi pour ça, mauvaise mémoire. » Je fronce rapidement les sourcils, n’ayant aucun problème réel avec cette situation. « Rien de grave, tu n’as pas à t’excuser. » C’est presque étrange de voir ainsi un membre de cette famille demander pardon pour un fait qui est loin d’être grave et surtout que l’on ne peut reprocher, il n’avait que douze ans, seize au plus tard, et je n’étais pas amie avec lui mais bien avec son frère, je ne vois pas comment je pourrais être capable de lui reprocher cela. J’aimerais savoir tout de même, s’il tourne vraiment autour du pot exprès depuis le début, ou bien est-ce une allusion de ma part. Je sais que je me suis prise dans le jeu, mais tout de même ! « Possible, possible, mais pour être honnête je pensais que ce serait plus drôle de te le faire avouer. » Je ris doucement à sa réplique. « Tu vas devoir retravailler ton talent d’enquêteur pour cela. » Je lui adresse un clin d’œil. « Enfin, comme tu ne l’as pas du tout mentionné lorsque tu m’as vu avec Oliver, je me suis dit que tu avais peut-être quelque chose à cacher… » J’ouvre grands les yeux. Oui, j’ai des choses à cacher, mais tout de même, je n’irais pas jusque-là pour camoufler mes liens avec sa famille, la partie visible en tout cas… « Tu n’imagines même pas tout ce que je peux te cacher ! Mais je ne sais pas, je ne me voyais probablement pas te dire : au faite, tu sais que je suis une amie de Gauthier ! J’y penserais la prochaine fois, promis. » Je garde joyeusement mon sourire, notre conversation étant loin d’être lourde ou bien pleine de sens, simplement un mal entendu finissant sur un convenu plutôt banal.

Pourtant, c’est lorsqu’il continue que j’ai bien plus de mal à conserver mon visage joyeux et pouvant également être une arme fatal en partie de poker. « Mais maintenant qu’on est au clair… Faudrait quand même que tu m’explique comment tu peux supporter Gauthier depuis tout ce temps… J’veux dire, moi je le fais parce que j’ai pas le choix, mais il est quand même sacrément rasoir comme type non ? » Je ris vaguement pour éviter de rougir. Franchement ? Je n’en ai aucune idée, et sans savoir pourquoi, je n’ai jamais trouvé Gauthier rasoir ou autre synonyme possible. Pour moi, il incarne une bonté intense, un esprit serein et surtout, il fait battre mon cœur comme personne d’autre ne peut le faire, partageant les mêmes passions que moi, tout en mettant du cœur et de l’amour dans tout ce qu’il fait. Concrètement, je ne peux répondre cela à son frère, sinon je peux dès à présent, signer mon arrêt de mort et annoncer de but en blanc que si je pouvais je passerais même plus de temps avec son frère, et qu’en plus de l’aimer spirituellement, il m’attire assez pour avoir été l’aimant ayant participé à la destruction de mon mariage mais surtout à la conception de mon fils, courant actuellement partout dans leur maison… « Ou si ça se trouve tu peux plus le voir en peinture et tu pleurs chaque soir qu’Ollie et Gabriel soient meilleurs amis.» Je ris bien plus librement à cela, imaginant la scène bien loin de la réalité, et pouvant pourtant être si proche. Je n’ai réellement pas parfaitement vécu le rapprochement entre les deux garçons au départ, pensant que cela complexifierait toute la situation pourtant, petit à petit, elle m’a permis de voir Gauthier, lui avouer la vérité, et nous permets facilement aujourd’hui de nous voir, tout en le laissant connaitre Gabriel sans avoir besoin de subterfuge particulier. J’hausse les épaules et me plonge dans mon verre avant de le porter à mes lèvres. « Il n’est pas rasoir, tu es dur avec lui, tout de même. » Rabat joie. « Je ne sais pas, je pense qu’on partage juste beaucoup de choses, les mêmes passions, un ancien cercle d’ami commun également. » Aka mon mari… « Et il ne faut pas croire, j’ai aussi vécu cinq ans loin de lui, ça aide peut-être à survivre aujourd’hui. » Un large sourire s’étend sur mes lèvres, alors que mes paroles évoquent tout le contraire de mes pensées, ces cinq dernières années ayant été une épreuve à vivre sans le voir régulièrement. « Mais oui, tous les soirs, je dois me faire force pour de nouveau amener mon fils ici, j’étais vraiment heureuse d’enfin pouvoir tomber sur toi ! » Nouveau clin d’œil, par pitié, Gauthier pardonne mes paroles, mais autrement, je peux carrément lui envoyer directement le faire part lui annonçant mes sentiments et ta paternité ! « Enfin tu es tout de même venu de ton plein gré sous son toit, tu dois bien aimer tout ça au final, non ? »

«Je ferais mieux à l’avenir, j'ai pas souvent pratiqué. » Je préfère sincèrement qu’il ne retente pas et qu’il n’y ait ainsi jamais d’avenir sur ce point-là. Le fait que je connaisse son plus vieux frère n’est pas un secret, d’autres points plus sensibles le sont et il est hors de question qu’il les apprenne par moi. Encore moins de cette manière. C’est aussi la raison pour laquelle je préfère que les garçons passent du temps chez moi et non dans cette famille qui pourrait bien trop facilement reconnaître des points communs entre mon fils et le propriétaire des lieux, comme la parfaitement fait une de ses vieilles amies… Je lui démontre tout de même que l’opportunité de lui annoncer la nouvelle ne s’est jamais faite suite aux jeux des vikings ce qui a l’air de plutôt le faire rire. Un bon point probablement. « C’est vrai que ça aurait été bizarre balancé comme ça. Un point pour toi. Et pour tes autres secrets va savoir je sortirai peut être une nouvelle fois mes talents de détective ou alors tu veux peut-être tout balancé maintenant tant qu'on y est. » Tous les points pour moi, jeune homme, tu n’as rien gagné depuis tout à l’heure, si ? A mon tour de rire. Je ne balancerais rien et aucun talent de détective ne fonctionnera sur moi, alors autant abandonner maintenant. « Je préfère te laisser ramer encore un peu, je trouve ça plutôt… intéressant ? A voir. » Un sourire en coin, je le taquine mais sait parfaitement que je touche tous les points sensibles petit à petit et en joue à la perfection.

Il arrive tout de même à renverser la situation en mettant Gauthier réellement sur le tapis. Expliquer pourquoi je reste à ses côtés, malgré son côté « ennuyant » que lui trouve son frère est difficile. C’est peut-être bien même ce côté qui m’a le plus attiré chez lui, celui qui fait que jamais il n’est possible de bien le connaître, de voir la profondeur de son esprit et sa sensibilité bien plus grande qu’il ne le laisse paraitre grâce à cette passion que nous partageons. « C’est pas la personne la plus déjantée que je connaisse en tout cas. » Peut-être mais je te laisse gravir un mur de trente mètres de haut ou sauter d’une falaise pour te baigner à la suite, sans voir l’eau du plongeoir et peut-être qu’ensuite nous pourrons voir ce que tu appelles déjanté… « C’est sûr qu’on ne le retrouvera pas dans toutes les boîtes du coin, mais j’avoue ne pas y être la première non plus alors. » Je lui adresse un clin d’œil avant de sourire. Je n’y suis même jamais réellement allée de moi-même, Maïa étant celle qui me traine toujours dans ce genre de soirée… « Quelles genre de passions? » Je souris. J’espère tout de même qu’il connait ce pan de son frère… « Le sport, mais surtout la montagne je dirais, les grands espaces. » Ce que ni lui, ni moi ne pourront échanger contre rien au monde. Jamais, je pourrais m’enfermer dans une ville avec l’impossibilité de voyager, de découvrir des espaces verts ou la nature rapidement. Je laisse l’atmosphère se détendre doucement, le laissant comprendre qu’il n’y a pas forcément de raison pour être ami avec une personne tout en ironisant sur ses propres paroles. « J’te donnerai mes horaires la prochaine fois dans ce cas, ça sera plus simple. » Son sourire me fait tiquer légèrement, merde, c’est vraiment quelque chose de famille cette marque qui s’installe sur le bord de leurs lèvres quand elles s’étirent, la même que Gabriel… Pour tenter de ne pas trop penser à cette ressemblance, je pars sur un autre sujet : lui. Quelque chose qui l’occupera probablement surtout en touchant sa venue ici et le fait qu’il reste dans cette maison alors qu’il a probablement la possibilité de prendre autre chose. « Peut-être bien oui, mais évite d’ébruiter ça par ici j’ai une réputation de petit chieur à tenir. Mais j’avoue… J’aime bien vivre ici, c’est vivant et même si parfois c'est un peu l'anarchie ça me plait bien. » Je souris tendrement en le voyant s’ouvrir ainsi. Je ne pensais pas qu’il le ferait et le voir ainsi me touche un peu. Je savais bien que sous cette belle carapace se trouver un autre bisounours. « Promis, motus et bouche cousue. » Je mime en même temps le geste en zippant mes lèvres comme si nous scellions un immense secret entre nous. Promis, je sais les tenir…

Alors qu’Ollie entre dans la pièce, il se met à chercher et étrangement, je vois Connor refuser de tricher. Je salue le geste, bien trop mauvaise joueuse pour être capable de faire de même. Quelques instants, l’enfant s’agite dans tous les sens dans la pièce pour tenter de trouver mon fils, puis repart sous notre regard bienfaiteur. « Tu crois qu’ils seraient capable de ne jamais se trouver juste pour ne pas mettre fin au jeu ? » Bien sûr que je le pense ! J’agite la tête pour dire oui alors que pour me faire mentir, des cris s’élèvent à cet instant dans la maison. Je crois que Gabriel a été débusqué. « Ils sont peut-être plus honnêtes qu’on ne le croit finalement. » Je souris et rattrape d’instinct mon fils qui me court dans les jambes. « Il m’a pas encore attrapé, il m’a pas encore attrapé ! » Je pars dans un rire léger mais sincère alors qu’Ollie débarque pour tenter de le toucher mais pas encore assez grand pour atteindre les jambes recroquevillées de mon fils dans mes bras. Tentant d’égaliser la partie, je me baisse un peu et Oliver peut alors gagner la partie en poussant des petits cris de joies et tapant la main de ma petite tête blonde. « Bon allez les garçons, on va devoir rentrer nous. » Les mines tristes qu’ils me sortent ne me font presque plus rien, tellement nous les voyons à chacune de leurs tentatives. « Merci beaucoup Connor pour le verre et n’hésite pas à m’envoyer tes horaires pour la prochaine fois alors. » Je lui adresse un nouveau sourire en faisant référence à notre conversation de tout à l’heure, laissant mon fils s’échapper pour récupérer ses affaires et préparer notre retour à la maison.