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{ Now that it's raining more than ever
Know that we'll still have each other
You can stand under my umbrella }
angelina ✰ andrina

– Tes ongles me font peur. Elle s’interrompit, posant un regard interrogateur sur Abel. « Je t’ai fait mal ? » Avant lui, elle n’avait jamais donné le bain à un enfant, n’avait jamais aidé un bambin à enfiler son pyjama après ça et effectivement, elle n’avait pas pensé qu’elle se retrouverait dans ce genre de situation en allant au salon de beauté pour sa nouvelle manucure. Elle fixa ses longs faux-ongles, d’un air presque coupable, craignant un brin qu’il réponde par l’affirmative et qu’Angelina ne lui fasse plus jamais confiance parce qu’elle avait laissé une infime griffure sur son fils. Elle exagérait à peine concernant ce point. Heureusement, le petit garçon secoue la tête. – Non, c’est juste qu’on dirait une sorcière. Elle reste interdite, l’air très sérieux, elle tire sur le pan de son haut de pyjama pour le mettre correctement en lui lançant : « Et si je te disais que je suis une sorcière ? » Il s’esclaffe et réplique avec le plus de naturel au monde. – T’es trop gentille pour être une sorcière !  Elle ne s’y attendait pas à celle-là, ça lui fait un drôle d’effet de l’entendre mais ce n’est pas désagréable. Sa réaction fut immédiate, elle prit un air faussement contrarié, plaquant son index contre ses lèvres. « Chut ! C’est justement une couverture pour que personne ne le sache. Tu me promets de garder le secret ? », lui dit-elle, en chuchotant. Il hausse les épaules, fait mine de réfléchir, décidément, il était dur en affaires mais elle était réellement magicienne. Il ne lui faut que quelques secondes pour finir de le convaincre. Elle tend le bras, passe sa main derrière l’oreille du petit garçon et présente devant son nez son poing fermé. « Souffle. » L’enfant est intelligent, d’où son air suspicieux mais s’exécute et en ouvrant ses doigts, l’étudiante révèle deux bonbons emballés dans du papier coloré. – Oh !!! Leurs rires colorent la pièce d’une ambiance unique, de celle qu’elle ne retrouve que quand elle est en sa compagnie. Garder Abel était loin d’être reposant mais il était si attachant, elle comprenait presque pourquoi sa mère en était si dingue. « Mais je te les donnerai plus tard, si tu m’aides à mettre la table! C’est l’heure d’aller manger les plats super bons que ta maman nous a fait! » fait-elle en mettant les sucreries dans sa poche et en se levant. Il est bien sûr déçu mais cela ne dure pas bien longtemps, ils prennent ensemble le chemin de la salle à manger. « Le petit monstre est tout propre ! » En voyant Angelina, elle ne peut s’empêcher de lui sourire. Il y a quelque chose entre elles qui dépasse les mots, ce n’était pas clair mais c’était réel, elle le ressentait à chaque fois qu’elles se lançaient ce qui pouvait ressembler à des banalités. Chez elle, les “ça va ?”, les “tu vas bien ?” et les “tu as besoin de quelque chose ?” n’étaient pas que des formules de politesse toutes faites. Il leur fallait encore du temps pour s’apprivoiser l’une et l’autre mais elles en avaient fait du chemin. Qui aurait cru, quand elle repensait à ce soir d’orage, qu’un jour elle serait accueillie dans l’appartement d’Angelina ? Elle s’était faite à l’évidence qu’elle s’était trompée sur toute la ligne la concernant. Leur relation avait pris un tel tournant qu’elle ne réalisait pas encore et que même une marque de gentillesse, aussi infime soit-elle de la part de la Gilmore girl lui faisait encore un drôle d’effet. Elle s’empare des assiettes et des couverts, tandis qu’Abel se charge des dessous de table et des verres. Le numéro est bien rôdé, ils commencent à avoir l’habitude de coopérer, comme ça et en moins de cinq minutes, la table est mise pour trois. Abel interpelle Nina, - Eh,t'as bien dit qu’on regardait [insérer dessin animé d’Abel], ce soir ? Quel malin! Elle n'avait jamais dit ça et en plus, elle commençait à avoir sa dose. Elle n'allait pas céder à ses grands yeux de chiens battus. « Quoi ? Non ! On le regarde tout le temps, allez, choisis autre chose. » - Je ne veux pas ! Je veux regarder ça ! « Mais Abel ! » chouinait Nina, d’un ton qui pouvait semer le doute et interroger sur qui était l’enfant entre les deux. - Non ! insistait le petit garçon. Nina continuait se comporter comme gamine, très sérieuse, s’opposant fermement aux désirs d’Abel et se lançait dans une dispute de sourd avec son neveu d’adoption, prête à batailler encore, sans même se rendre compte que son manège était insupportable vu de l’extérieur. « Angelina !!! Tu peux nous dire ce qu'on va regarder ce soir ? » s'exclama-t-elle, faisant ressortir ses antécédents de gamine capricieuse à qui l'on ne refusait rien. C'était la question pour le million. Angie avait vraiment une bombe entre les mains, sa réponse avait potentiellement le pouvoir de détruire leur début d'amitié. Sans rire.

Angelina remua le risotto végétarien qu'elle venait de concocter avec amour et versa le tout dans un grand plat blanc qu'elle posa sur la table. Elle entendait les éclats de voix d'Abel et Nina venant de la salle de bain, et ne put s'empêcher d'esquisser un sourire. C'était dingue quand on y pense, les trois formaient une petite famille atypique, certes, mais plus soudée que jamais. La maladie d'Henry les avaient rapprochés comme jamais. Par ailleurs, Henry répondait très bien à la chimio et les médecins avaient bon espoir de réussir à éradiquer le cancer qui avait commencé à le ronger. Le célèbre avocat avait été pris en charge à temps visiblement et avait retrouvé la chaleur de son foyer. Madame Gilmore était évidemment toujours un peu paniquée mais on se faisait à tout, et ils avaient réussi à intégrer cette maladie dans leur routine. Angelina venait rendre visite à ses parents plus souvent, parfois même sans Abel chose qui était particulièrement rare avant que tout ça ne leur explose à la figure. Puis il y avait Nina qui sans s'en rendre compte faisait office de liant entre Angie et ses parents. Les Gilmore n'en avaient pas cru leurs yeux lorsqu'ils avaient vu Nina, Angelina et Abel descendre de la même voiture un dimanche midi pour le repas de famille dominical. Ils avaient encore un peu de mal à réaliser que la guerre était finie entre les deux brunes mais ils ne manquaient pas de s'en réjouir. Il y avait de quoi. Nina était un vrai rayon de soleil dans le monde d'Angelina, leurs réconciliations n'auraient pas pu arrivées à un moment plus opportun que celui-ci. Nina ne s'en rendait peut-être pas compte, et c'était mieux ainsi, mais elle avait plus pour Angie que beaucoup.

D'ailleurs, Angelina était toujours très frileuse lorsqu'il s'agissait de confier Abel à quelqu'un et pourtant tout de suite un lien spécial s'était créé entre son fils et celle qu'elle considérait désormais comme une coeur. Elle avait même entendu son fils l'appeler "Tata Nana" et elle n'avait pas relevé. Après tout quoi de plus normal ? Il la voyait quasi de manière quotidienne depuis quelques mois. Angelina avait même appelé la garderie pour mettre Nina sur la liste des personnes de confiance au cas où. C'était une belle soirée pour la dernière génération Gilmore et lorsque Angelina vit Nina et son fils tout beau tout propre se mettre à table elle ressentit une bouffée de sentiments bien particuliers qu'elle ne pensait pas avoir ressenti un jour de manière aussi intense : alors c'était ça le bonheur ? Elle ne remarqua même pas qu'un conflit totalement ridicule était en train de gonfler sous ses yeux. La raison ? Le programme télé de ce soir. Angelina servit son fils puis Nina en tranchant : "Alors étant donné qu'un certain petit bébé démon a mit plus d'une heure à aller prendre son bain et qu'il est déjà 21h, heure à laquelle il devrait déjà être au lit il regardera un épisode de Peppa Pig gentiment dans son lit pendant que Maman et Nina vont se mettre une bonne petite série." Abel fixa sa mère avec des yeux ronds, se demandant sûrement si il devait péter un câble et se jeter par terre ou si la perspective de regarder l'iPad dans son lit, chose à laquelle il n'avait le droit que très rarement, n'était pas meilleure. Le poupon aux yeux bleus tourna lentement la tête "Peppa Pig dans mon lit, mieux que toi." s'exclama Abel en tirant la langue à sa tante d'adoption. Angelina éclata de rire, encourageant malgré elle l'insolence de son fils. "Oui bah profite ça va pas être tous les jours non plus." Elle était toujours aussi surprise par les traits d'esprit que faisait son fils. Elle le suspectait de prendre un peu du côté de son père... Quoiqu'il en soit chacun mangeait et le calme était revenu à table. Angelina regarda Nina. "Ça te plait ? C'est bon ? Je sais que les plats végétariens sont réputés pour être fade mais..." Angelina était un vrai cordon bleu, la cuisine était une véritable passion chez elle. Un plaisir coupable. Peu de gens savaient ça à propos d'elle. "Bon quoi de neuf en ce moment ? Les amis, les amours, les emmerdes ? Quoique niveau emmerde on a eu notre quota ces derniers temps hein... J'ai vu Kane cette semaine." Elle la regarda pour guetter sa réaction. "Il te passe le bonjour." Elle prit une gorgée de vin et rajouta. "Il a l'air de bien t'aimer."

Abel était peut-être un adversaire redoutable mais Nina avait vingt années de caprices derrière elle, elle avait perfectionné sa technique, ce qui signifiait qu’elle ne serait pas la première à céder. Aussi têtue qu’impatiente, laisser Angelina trancher semblait alors être la seule issue possible si on voulait en finir avec toutes ces histoires. Même si la jeune maman était prête à faire des pieds et des mains pour le bonheur de son petit bonhomme, Andrina considérait qu’Abel était le seul à ne pas être lassé par ce dessin-animé. Elle n’était pas experte en matière de lien maternel mais l’idée qu’on puisse se sacrifier à ce point et accepter de regarder la même histoire, les mêmes personnages, les mêmes répliques pour la quatre cent-douzième fois, à ces yeux, relevait de la torture. Au fond, le programme cinématographique de la soirée lui importait peu mais elle prenait un malin plaisir à provoquer gentiment le petit garçon alors c’est les yeux pleins d’espoirs qu’elle attend le verdict. Elle était déjà prête à parader, certaine qu’Angelina lui donnerait raison mais finalement, ce n’est pas une grande victoire. Elle est satisfaite d’échapper au re-visionnage du film préféré d’Abel mais il ne s’en tirait pas si mal non plus. Elle hausse les épaules avec désinvolture et quand il la nargue, son rire fait écho à celui d’Angelina.

Tous les trois à table, Nina se sent comme sur un nuage tellement elle est joyeuse. En y réfléchissant, c’était ce genre de situation – quasi anecdotique - qui lui faisait réaliser à quel point, elle avait été intégrée parmi les Gilmore. En premier par Henry et sa femme qui s’étaient occupées d’elle comme s’ils étaient affiliés par le sang. Puis, la maladie du patriarche l’avait rapprochée d’Angelina et elles avaient retrouvé une sorte de nouvel équilibre ensemble. Le mot ‘famille’ n’avait jamais eu de sens pour elle avant qu’elle ne les rencontre mais ce qu’elle vivait était ce qui se rapprochait le plus de l’idée qu’elle se faisait. Elle pouvait compter sur eux, sans déplacer des montagnes, sans mentir, sans prétendre… Elle n’avait pas à fournir beaucoup d’efforts pour se sentir bien parmi eux. Leur relation offrait une simplicité qu’elle avait toujours cherché, ils prenaient soin d’elle autant qu’elle s’efforçait à en faire de même pour eux. Le gloussement qui lui échappe n’est pas moqueur mais quand ses yeux se plantent sur le visage de la jeune femme, elle ne peut s’en empêcher. Angelina s’inquiète pour savoir si le plat est à son goût et il y avait un certain décalage entre sa première impression, ces airs de garce pleine de rage et de froideur et son autre facette, celle qui se révélait dans l’intimité de son foyer. « C’est parfait, Angelina, je suis vraiment impressionnée. Tu as commencé à cuisiner pour Abel ou ça a toujours été ton truc ? » Elle s’interrompit de mâcher un instant et plissa les yeux. « Je serai curieuse de savoir si tu as d’autres talents cachés… » Ses lèvres s’étirent, dévoilant un petit sourire malicieux. Cependant, elle affiche une mou étrange, mal-à-l’aise, quand pour faire la conversation, le ‘sujet’ Kane se retrouve sur la table. Andrina fixe un instant son assiette bien entamée déjà, cherchant ce qu’elle pouvait bien répondre à son interlocutrice. Quand elle relève les yeux, pour les plonger tout droit dans l'océan qu'étaient les siens, elle se demande un instant quel sort la Gilmore girl avait bien pu lui jeter pour qu’elle soit encline à se livrer sur ce genre de sujet. L’héritière Farrell était pudique de nature, réservée quand il s’agissait de ses histoires personnelles, faute que n’avoir jamais eu d’amis qui s’intéressaient réellement à sa vie privée. Calmement, elle reprend un sourire mais malgré tous les efforts fournis, il ne brille pas de naturel. « Oh, je me demandais quand toute cette histoire finirait par arriver à tes oreilles. C’est vrai que vous êtes très proches… » Son regard glisse sur Abel, incertaine si c’était le moment de parler de ce genre d’histoires devant lui. « Je l’aime bien aussi… enfin je crois, mais quoi qu’il en soit il n’y a rien entre nous. Je l’avais approché au départ parce que, c’était encore l’époque où… comment dire… on ne se connaissait pas très bien toi et moi, je pensais que vous sortiez ensemble et j’avais juste envie de te faire chi-… de t’embêter. » confie-t-elle d’un ton détaché, se remémorant son comportement passé. « Je te donne le droit de me juger d’être, enfin, d’avoir été comme ça. » Elle n’est pas spécialement émotive ou larmoyante mais elle n’en restait pas moins sincère, préférant mettre carte sur table devant Angelina. « On pourrait peut-être parler d’autre chose à table, non ? » propose-t-elle, consciente qu’elle est la seule responsable de ce soudain changement d’atmosphère mais elle se sentirait peut-être plus à l’aise à s’étendre sur le sujet s’il n’y avait pas le regard glacé et perçant d’Angelina droit sur elle et une autre présence, celle d’un enfant en plus. « Je… Il est peut-être tôt pour en parler mais c’est bientôt l’anniversaire de ta mère, je crois, non ? La maladie, le traitement d’Henry, tout ça, ça a du être usant… Tu penses qu’on pourrait réfléchir à quelque chose qui lui ferait plaisir ou qui leur ferait plaisir à tous les deux ? »

Un fond sonore de Led Zepplin et le vent qui soufflait dehors. Angelina ne pouvait pas se sentir mieux qu'auprés de celle qu'elle considérait de plus en plus comme sa soeur et de son fils qui avait déjà commencé à manger, ignorant ses couverts en plastique pourtant soigneusement déposés devant lui en guise d'invitation à se montrer sous son meilleur jour. Raté. Maintenant qu'Arthur faisait partie de leur vie, il était vrai qu'Angie se reposait un peu sur lui pour l'apprentissage des bonnes manières car elle manquait toujours un peu d'autorité sur Abel qui savait parfaitement comment rendre sa mère zinzin. Angelina lui lança un regard noir lorsqu'il la regarda, histoire de le dissuader d'essuyer ses mains sur son t-shirt mais c'était vain. Angie avait pensé limiter les dégâts en faisant du risotto mais maintenant elle avait bien peur que la moitié de la crème se retrouve sur le visage de son fils. "On mange doucement et on mâche bien." insista Angelina en faisant mine de mâcher pour montrer l'exemple à son fils. Celui-ci hôcha la tête la bouche pleine et prit le temps de mastiqeur ce qui rassura momentanément Angelina.

La jeune maman reporta donc son attention sur Nina à qui elle venait de parler de Kane. Elle remarqua alors son malaise bien qu'elle essayait de le dissimuler et ne put s'empêcher de laissa échapper un rire grave. "Tu devrais voir ton air." Nina avait l'air d'être en train de passer un grand oral et elle n'était clairement pas en train de jouer sa meilleure partition. Angelina la regardait faire avec un plaisir coupable, c'était méchant de la laisser s'embourber comme ça dans cette situation alors que finalement, Angie se foutait pas mal de ce que Kane et Nina foutaient ensemble même si c'était assez bizarre dans un sens puisque Kane et Angie avaient fait les pires cochonneries à l'époque où les deux avaient un peu de temps à perdre ensemble. C'était bizarre de penser que Kane appliquerait peut-être avec Nina ce qu'elle lui avait appris à l'époque. Ewww. Elle ne préférait pas y penser. Nina confia qu'elle s'était rapprocher de Kane pour l'énerver, ce qui fit rire Angelina encore plus. "Je te juge pas du tout, toi et moi on sait très bien que j'aurais pu faire exactement la même chose mais Mademoiselle est tellement secrète sur ses fréquentations que ça aurait été assez difficile de verrouiller la cible." Pour ce qui était d'Angie ce n'était pas difficile, il y avait Maxyne, Azur, Carlisle, Kane et Callum. Elle n'avait pas vraiment d'amis à part ceux là et ne cherchait pas franchement à s'en faire vu que ça donnait à chaque fois qu'elle essayait de sociabiliser. "Tu as mon feu vert, baby. Franchement sers toi, Kane est un amour, du genre vraiment adorable. Ton petit coeur de pierre sera en sécurité avec lui même si il fait un peu bad boy avec ses tatouages parfois." dit-elle avant de reprendre une bouchée de risotto, lançant un regard à son fils qui mangeait consciencieusement.

Toujours pas à l'aise, Nina fit la pirouette du changement de sujet. Angelina haussa les épaules sans se départir de son sourire, c'était difficile de mettre Nina mal à l'aise, ou du moins de réussir à le déceler. "Détends toi." la rassura Angelina. Elle aborda ainsi le sujet de l'anniversaire de la mère d'Angelina. Celle-ci perdit immédiatement son sourire. Elle détestait les anniversaires, tout le monde le savait et elle ne les fêtait pas en général. Ça lui rappelait le temps qu'il passe, ça lui rappelait toute l'hypocrisie qui se rapportait à son adoption. "Je ne fête pas les anniversaires." répondit sèchement Angelina. "Même celui d'Abel est très compliqué pour moi à fêter, généralement c'est mes parents qui s'en occupent." Elle avait honte mais elle était incapable de tenir son fils lorsqu'il soufflait ses bougies, généralement elle s'écartait pour aller fumer une cigarette et c'était ses parents qui se chargeaient de l'ouverture des cadeaux. Elle était incapable d'expliquer pourquoi elle détestait ces moments de fête. "Tu peux lui fêter si tu veux, mais je ne m'en occuperai pas. Elle le sait. En général c'est Ruth la gouvernante qui lui donne les cadeaux que je lui ai fais mais je ne participe pas à la fête ou quoique ce soit d'autre." dit-elle en reprenant une longue gorgée de vin cette fois-ci.

Elle apprenait doucement les règles qui régissaient la vie de famille mais c’était une tâche plus facile que prévue, pour la simple et bonne raison qu’il n’y avait rien de défini. Chaque être fonctionnait à sa façon avec ses propres préoccupations, sa propre personnalité mais il trouvait toujours un point d’ancrage dans sa famille parce qu’on l’acceptait et l’aimait sans conditions. Elle faisait partie de la dynamique des Gilmore désormais, elle avait sa propre place et elle ne l’aurait échangé pour rien au monde. Des moments pareils ne s’achetaient pas, tant mieux, car elle s’imaginait que cela représentait un trésor inestimable juste d’être avec des gens qu’on aime et qui nous aime, avec Led Zeppelin en fond sonore et un risotto végétarien. Elle ne pouvait s’empêcher de sourire quand Angelina reprenait Abel sur sa façon de manger. Elle redevenait une enfant quand la brune se comportait comme une maman-poule un peu autoritaire devant elle mais réprimait son envie de la rendre encore plus zinzin en encourageant Abel à faire plus de bêtises. Dans ces moments-là, leur écart d’âge et d’expériences se faisait sentir mais cela ne les empêchait pas d’être plus proches chaque jour. Assez pour que la vie amoureuse de Nina puisse être un sujet de conversation à table, elle se frotte la pommette, elle est peut-être gênée mais Kane représentait un sujet houleux dans son esprit. L’idée de pouvoir en parler à quelqu’un était tentante. Elle en faisait l’expérience tous les jours quand il était question de problèmes économiques, débattre et considérer tous les points de vue leur permettaient de trouver des solutions mais malheureusement, les marchés et les chiffres lui semblaient beaucoup moins complexes que les sentiments humains. Si elle ne connaissait pas Angelina depuis si longtemps, elle se serait vexée après sa petite moquerie et une autre personne qu’elle, si elle avait osé, se serait sûrement trouvée avec une fourchette plantée dans la main. Elle se contenta de forcer un sourire et évita son regard en reprenant une gorgée dans son verre. « Il va me falloir une certaine quantité d’alcool avant de t’en dévoiler plus sur ma vie amoureuse, Angie. » glissa-t-elle, sous-entendant qu’elle n’était pas vraiment fermée à une soirée entre girls, à parler de garçons. Quel cliché, se dit-elle, mais elle était prête à être honnête avec Angelina. Elles construisaient petit à petit une relation solide, Nina ne craignait d’être jugée par son homologue et elle savait qu’elle comprenait assez bien la jeune mère pour être un bon pont d’union entre les parents et la fille Gilmore. « Tu te trompes, je n’ai jamais rien eu à cacher. Je venais d’arriver et tu te doutes bien que je ne suis pas vraiment considérée comme une personne sympathique. » lâcha-t-elle, d’un ton détaché, nullement triste d’avouer qu’elle n’avait jamais eu beaucoup d’amis. Aucun, en fait, à l’époque. Elle connaissait beaucoup de têtes, c’est vrai, et elle tolérait la compagnie d’un certain nombre de personnes d’ailleurs mais elle ne s’ouvrait pas aux autres. Aujourd’hui, c’était légèrement différent, elle ne repoussait plus les gens avec autant de ferveur et avait laissé quelques chanceux prendre une part plus importante dans sa vie. Rien qu’en y pensant, elle se sentait vulnérable… alors elle envisageait encore moins l’amour, feu vert ou non. Elle lança un regard troublé à Angelina, après ses mots, se promettant d’y méditer ou d’en reparler plus tard. En attendant, elle préféra changer de sujet. Sans le savoir, ce fut à son tour de mettre Angelina dans une situation délicate mais elle n’aurait jamais pu se douter des positions de la jeune femme. L’étudiante fut surprise et eut un mouvement de recul devant le ton sec de sa compagne. Les lèvres pincées, elle laisse la brune s’exprimer. Elle n’avait jamais observé le comportement Angelina durant les fêtes d’anniversaire - d’ailleurs, elle ne se souvenait plus si elles avaient déjà été ensemble à ce genre de rassemblement. « Ok, je vois… Je pensais juste que… Non rien, c’est pas grave. Si tu veux, je pourrai emmener Abel avec moi, cela pourra te laisser une journée libre. » finit-elle par répondre. Nina se tourna ensuite vers son neveu de coeur. « Hein, Abel ? ça te dit de voir mamie et de faire la fête ? » Il se montra aussi enthousiaste qu’elle l’espérait de lui mais un coup d’oeil à la maîtresse de maison les encouragèrent à reprendre leur calme à table.

Après avoir terminé de manger, Nina aida Angelina à débarrasser et s’occupa d’emmener Abel se laver les dents avant de passer le relais à sa maman pour qu’elle le mette au lit. Pendant ce temps, la jeune Farrell reprit leurs verres, la bouteille ouverte plus tôt pour accompagner le risotto et s’installa dans le canapé, le nez dans son portable. Elle finit d’éditer ce post instagram qu’elle devait poster, concentrée sur sa tâche, elle perçut tout de même Angelina revenir dans la pièce grâce au bruit de ses pas. Une notification s’afficha sur son portable et elle ne réfléchit guère avant de lancer : « Angelina ? Tu connais Tinder ? »

Spoiler:

C'était sans doute parce que sa naissance s'était déroulé dans la panique, les cris et les larmes qu'Angelina avait associée les anniversaires à des moments tristes, plus proche du cauchemar que du moment qu'on attendait toute l'année. Angelina se foutait bien du temps qui passait et pourtant ce marqueur chronologique avait toujours ce caractère anxiogène. Les grandes fêtes que ses parents donnaient pour ces événements n'avaient rien arranger à ce traumatisme. En général, elle finissait par trouver un moyen de s'enfuir discrètement et trompait son monde en envoyant des mots de remerciement savamment rédigés. Il fallait bien que son talent pour l'écriture ait au moins un avantage. Angelina passe une main dans ses cheveux alors que Nina la sauve de ce sujet délicat en l'amenant sur un autre terrain. Plus le temps passait et plus Nina semblait mieux connaitre celle avec qui elle partageait son quotidien. Elle savait quand est-ce qu'Angelina n'avait pas envie d'en dire plus et respectait toujours son silence qui pourtant aurait pu la blesser, la mettre mal à l'aise. Nina et Angelina fonctionnaient presque en osmose à présent, ce qui était assez rare pour être relevé étant donné les deux caractères volcaniques des jolies brunes. La maladie d'Henry semblait avoir adoucit les moeurs, Angelina avait l'impression que cela avait provoqué un déclic chez elle. L'éventualité de pouvoir perdre son père, lui faisait se rendre compte à quel point même à bientôt 30 elle avait besoin de ses parents, même si ils ne partageaient pas le même ADN. Angelina avait envie d'être une meilleure mère pour son fils et Abel lui-même semblait le sentir, il était plus apaisé, mieux entouré, et la maitresse lui avait notifié lorsqu'elle était passée le chercher sa dernière fois. L'heure du coucher était devenue beaucoup plus facile, à l'image de ce soir où Abel se coucha sans difficulté, laissant Angelina l'espoir de pouvoir passer une soirée entre femmes avec Nina. Elle avait besoin de ce temps privilégié avec celle qu'elle considérait de plus en plus comme une amie.

Revenant dans le salon, elle s'empare de son verre de vin lorsque Nina lui demande si elle connaissait Tinder. Angelina hausse les sourcils. "Tu crois que j'ai quel âge ? 70 ans ?" Elle s'installe aux côtés de Nina et prend une gorgée de vin qu'elle laisse quelques temps danser sa langue. "Evidemment que je connais, je l'ai même téléchargé mais je l'ai pas ouverte." Angelina n'était pas vraiment friande de sites de rencontre, l'élite dorée de Brisbane était restreinte, certes, mais assez ouverte d'esprit en terme de fréquentation à l'époque où elle était encore une petite nymphomane irresponsable. Mais la question de Nina la renvoyait directement vers sa vie de femme qu'elle avait laissé pour compte. "Je ferais peut-être bien de m'y remettre, je suis restée abstinente pendant quatre ans et mon dernier coup remonte à six mois maintenant." soupire t-elle, d'un air blasé qui en disait long sur sa lassitude. C'était assez marrant de reparler de nouveau de ce genre de choses librement, comme si elle était revenue à ses vingt ans, lorsque ses expériences sexuelles faisaient parti de ses trois sujets préférés avec la drogue et le mannequinat. Ca faisait du bien de pouvoir parler de tout ça, elle qui devait se contenter d'être une maman la plupart du temps et qui faisait tout pour donner une bonne image à tout le monde afin qu'on ne vienne pas lui tirer son gosse. "Pourquoi ? Tu me conseilles de me mettre dessus ? Ca fonctionne pour toi ? Fais voir un peu ce qu'il y a sur le catalogue." Une chasseuse reste une chasseuse, et l'instinct de prédatrice d'Angelina vient de refaire surface en un claquement de doigt, il avait suffit de cette petite question anodine pour que le monde qu'elle avait abandonné il y a quelques années l'attire de nouveau comme un aimant. Un monde libre, où elle était une femme avant tout. Et quelle femme. Confortablement installée dans son canapé, elle a hâte que Nina l'initie à l'application dont elle a longtemps entendu parler. Peut-être que finalement c'était aussi parce qu'elle n'avait jamais osé la fréquenter. "J'ai tellement peur de croiser quelqu'un que je connais que j'ai toujours préféré éviter. Imagine je croise Arthur là-dessus : je serais tellement gênée." C'était son pire cauchemar, tout le monde savait que ce truc là était réservé exclusivement à la baise. Croiser son ex sur un tel support se rapprocherait plus ou moins d'un aveu de débauche embarrassant. Mais l'idée la tentait. Elle avait besoin de se changer les idées. Définitivement.

Son entente avec Angelina restait récente, comparée au temps qu’elle avait passé à Brisbane, depuis son arrivée chez les Gilmore. Elle aimait la relation simple qui s’étaient installées entre elles, lui laissant le confort nécessaire pour en découvrir plus sur son aînée. Apprendre seulement maintenant que cette dernière n’était pas une grande fan des anniversaires, et pire, qu’elle les évitait comme la peste, témoignait de la fraîcheur de leur lien. Il y avait mille et une choses derrière ce beau visage et ces yeux envoûtants qui lui demeuraient secrètes. Les deux brunes avaient besoin de temps, autant pour apprivoiser l’autre qu’accepter de laisser entrevoir des parts d’elle-même. A son rythme, Nina l’avait laissée entrer dans sa vie mais garantissait de la garder longtemps près d’elle et de la soutenir. La jeune femme était loyale aux gens en qui elle faisait confiance et après toutes les épreuves qu’elles avaient traversé, Angie était entrée dans ce cercle très restreints de personnes. Tout était encore nouveau pour elle, tout était encore à expérimenter mais une chose était certaine, une part de sa paix intérieur résidait dans les sourires de cette presque-soeur. Alors oui, forcément elle est un peu déçue de savoir qu’une grande fête d’anniversaire ne la rendrait pas aussi heureuse que l’étudiante avait pu l’imaginer. Elle s’était déjà imaginé en donner une pour célébrer les trente ans d’Angelina, elle avait sincèrement pensé lui faire plaisir de cette façon mais tant pis, elle trouverait autre chose. Après tout, c’était peut-être ringard de considérer 30 ans comme un cap presque sacré et déjà, les neurones de la jeune femme travaillaient pour trouver une façon de changer les idées de sa compagne.

Angelina répond, d’abord sarcastique et pour la peine, Nina décolle le nez de son portable pour lui jeter un coup d’oeil amusé. Un sourire naît sur ses lèvres, pas méchant, pas moqueur, juste amusé. Bingo ! fait-elle, dans sa tête, quand elle apprend que la brune a déjà songé à faire des rencontres via l’appli. « La légende dépeignait une Angelina plus sulfureuse… » fit-elle, faisant référence à sa réputation d’antan. Elle pouvait deviner les raisons et le pourquoi du comment elle n’avait jamais osé ouvrir Tinder. Il y avait du bon, du mauvais, dans les rencontres virtuelles mais au-delà de ça, la raison était que la brune avait souvent tendance à laisser sa propre vie au second plan au profit de son fils. Une lueur pétille dans le regard de l’étudiante, l’excitation peut-être, elle se dit qu’elle tient un truc pour les propulser dans une nouvelle aventure. « WHAT ? — Elle craint d'avoir réveillé son éclat de voix et se calme aussitôt — Il y a six mois ? Avec qui ? » On dirait qu’elles sont dans un genre de rom-com classique, avec les deux copines qui parlent de garçons, c’est plutôt drôle. La réponse aux problèmes des femmes étaient rarement les hommes mais ils pouvaient avoir des qualités et se révéler utiles, parfois. « Je n’ai pas de profil Tinder, je suis en couple. » Avec Simon. Et ce, depuis quatre ans, déjà. En incluant les périodes off. Elle ne savait même pas si elle l’avait déjà évoqué à Angie. Encore un truc sur la liste des secrets que Nina gardait pour elle. Ils n’étaient pas tout à fait un couple mais elle n’était pas totalement libre. Situation trop compliquée qu’elle-même n’avait pas encore dénoué assez pour vouloir en parler. « Ok, ce serait pas ça qui m’empêcherait d’utiliser Tinder mais je n’en ai pas trop besoin. Le privilège de n’avoir pas d’obligations et de pouvoir sortir quand je veux et où je veux pour rencontrer du monde… Et puis… bon, bref, ce n’est pas de moi dont on parle. » Nina n’était pas vraiment intéressant par du sexe pour du sexe. Sa réputation concernant les conquêtes était plus flatteuse que la réalité. Sensuelle, elle l’était mais justement, de son point de vue, le casual sex avec n’importe manquait d’intimité et ce n’était pas des situations où elle était le plus à l’aise. « Ce n’est pas la recette miracle pour trouver l’amour… il y aurait déjà beaucoup de travail à faire sur toi. » C’est drôle, là, un peu, non ? C’est dit dans l’élan de la phrase comme si c’était une évidence, glissé malicieusement, mais ce n’est qu’une taquinerie. « Je rigole. Tout ça pour dire que le catalogue est aussi vaste que l’océan mais il faut vraiment faire attention si on veut trouver la perle rare. » Les sourcils de Nina se froncent quand Angie évoque le père d’Abel. « On s’en fout de ce qu’Arthur penserait. Tu es une adulte, tu fais ce que tu veux. » lâche-t-elle, espérant rapidement balayer les inquiétudes d’Angelina. Elle voulait réveiller l’ancienne Angelina. Pas la furie, elle avait fait les frais de son côté psychotique-borderline-whatever, folle, si on voulait le résumer en un mot. Non, elle voulait lui faire réaliser qu’elle pouvait être maman et femme. Que les deux n’étaient pas incompatibles. Et mieux, que personne n’avait le droit de lui reprocher de vouloir concilier les deux. Welcome to 2018. Angelina lui passa son téléphone et elle ne mentait pas, l’application se lance pour la première fois et les fit atterrir sur une page d’inscription. Passé les différentes étapes pour les renseignements de base nécessaires à l’élaboration de son profil, elles purent passer au plus intéressant : la traque. « Well, est-ce que tu as un type précis… ? On peut affiner les recherches, si besoin… Ou tu préfères éplucher le catalogue ? Promis, je ne jugerai pas alors n’aies pas honte de me le signaler si on tombe sur ton fantasme ultime. »