J'avais attendu Enzo chez moi mais il n'était pas venu. Certes, j'étais partie avec un train d'avance, mon rendez-vous était à 15h et à 14h30 j'étais déjà chez la gynécologue, dans cette salle d'attente qui me donnait envie de vomir. J'aurais pu attendre jusqu'à 14h40 chez moi vu qu'il ne me faut que 20 minutes en voiture pour aller à l'hôpital, mais j'aurais espéré qu'Enzo vienne encore plus en avance pour me "rassurer". A quoi bon... Vu comment notre dernière discussion s'est fini, je pouvais toujours courir.
Zoey était restée à la garderie pour cet après-midi, je l'avais déjà prévenu ce matin quand je l'avais laissé. Ca me soulageait de la savoir là-bas car l'emmener ici il en était hors de question.
Dans cette salle d'attente il y avait deux femmes à mes côtés, toutes deux enceintes jusqu'au cou. Elles parlaient ensemble, riaient, parlaient des prénoms qu'elles aimeraient donner à leur enfant. Elles devaient être à 6 mois environs... J'osais à peine lever les yeux dans leur direction... Mais la salle d'attente était si petite et je n'y échappais pas.
- Et vous, vous attendez aussi un heureux événement ?
Les deux s'étaient retournées vers moi, mortes d'impatience d'avoir ma réponse.
- Euh.. Pardon... Moi? Oui bien sûr moi, il n'y a que moi avec vous...
Je riais nerveusement en me raclant la gorge et rien qu'à l'idée d'accoucher je serrais davantage mes cuisses comme un signe de dégoût ou de peur soudaine.
- Euh... Je... Je ne suis pas encore sûre. D'où ma présence ici. Vous savez avec la technologie on est jamais sûre de rien.
Elles fronçaient les sourcils ne comprenant pas trop mes mots.
- Les tests de grossesse sont à 90% fiable vous savez? Mais vous avez raison il vaut mieux vérifier, sait-on jamais. En tout cas je vous souhaite d'être enceinte, ça n'apporte que du bonheur. - Je confirme les propos de ma collègue. C'est mon troisième enfant et pour moi c'est un cadeau venu du ciel.
Je ne savais pas quoi répondre, j'étais gênée et horriblement malade. Mon estomac se noua et là j'avais juste envie de vomir. J'étais devenue blanche en deux secondes, me précipitant en courant dans les toilettes les plus proches et je vomissais... De la bile encore. Je n'avais rien mangé depuis deux jours, je ne faisais que boire de l'eau, il m'était impossible d'avaler quoique ce soit.
- Putain...
Disais-je dans les toilettes en train de pleurer tant ça me faisait mal à force de vomir "du vide". Je tirais la chasse, me regardant dans le miroir, je ne ressemblais à rien. Je me passais de l'eau sur le visage en prenant un chewing-gum à la menthe que j'avais précieusement amené. Je ressortais des toilettes dix bonnes minutes plus tard, il n'y avait plus qu'une femme désormais, l'autre étant sûrement en consultation.
- Vous allez bien? - Oui... Désolée... Les nausées sans doute... - Vous semblez très affaiblie Mademoiselle. - Maxyn... Je m'appelle Maxyn.
Je me rasseyais sur ma chaise initiale en regardant cette femme en face de moi qui semblait soucieuse de mon état de santé.
- Le papa va venir? - Je...
Hors de question de passer pour la victime.
- Je ne sais pas, vous savez il travaille énormément. Il m'a dit tout faire pour passer mais je le vois ce soir pour le compte rendu bien évidemment. Il est chez les STUPS, ils ne rigolent pas là-bas vous savez.
Je riais mais c'était forcé... Si forcé que je me mettais à regarder la porte d'entrée en espérant voir Enzo apparaître tôt ou tard. Il était désormais 14h45, il avait encore 15min pour arriver et ça allait être les 15 minutes les plus longues de ma vie...
Même si j'étais parti de chez Maxyn en trombe ce week-end, je ne comptais pas la laisser toute seule allait à ce rendez-vous. Et j'avais prévenu le commissaire que je devais m'absenter dans l'après midi pour un rendez-vous important pour ma famille et forcément il avait accepté sans problème. A une seule condition. Que je clôture le rapport de la mission de la veille. J'avais tiré une sale tête. Parce que les rapports sont ma bête noire et je les termine toujours trois plombes plus tard que les autres. A part quand on me met pareil couteau sous la gorge. Je n'avais pas eu d'autres choix. Je ne pouvais pas abandonner encore une fois mon ex. Même si je me suis senti un peu humilié d'avoir eu envie de l'aider et de me retrouver rejeté de la sorte. Il fallait que je passe au dessus de mon égo et que je la soutienne. On avait merdé tous les deux et je sais à quel point être enceinte la rend mal. Je ne la détesterais jamais. Je n'arrive toujours pas à la comprendre voilà tout. Et je n'allais clairement pas la laisser tomber. Pas question. Sauf que je n'avais pas vu à quel point j'avais mis du temps à finir ce stupide rapport. Il était déjà 14h30 passé. Et je n'étais pas à côté. Surtout qu'il fallait que je donne ce rapport à mon chef. Il allait encore me retenir bien trop longtemps. Je suis loin d'être impoli mais tant pis, qu'il le prenne mal ou non, j'avais mis terme à son débit de parole et m'étais enfin tiré. Je roulais comme un fou sur les routes, je ne voulais vraiment pas être en retard, sauf que les minutes filaient bien trop vite. Je descendais de la voiture et il était moins 5. Je courais à travers l'hôpital et quand je débarquais dans la salle d'attente un peu trop essoufflé, j'y voyais Maxyn, seule, à y attendre. Pourquoi fallait-il que tout s'arrête quand je la voyais, que je perde tous mes moyens. Il fallait que je me ressaisisse, elle et moi c'était plus possible et je le savais depuis longtemps. Je venais m'asseoir à un siège d'elle pour éviter tout accident et lui disais Désolé, j'ai pas pu me libérer avant. Lui expliquais-je sans oser la regarder. Mais il fallait que je me force, que je montre que j'étais adulte et responsable. Alors je relevais le regard vers elle et lui demandais Comment vas-tu ?
J'étais désormais seule dans la salle d'attente, j'avais parlé un bon moment avec cette inconnue mais heureusement j'avais réussi à changer de sujet. A la fin elle me parlait de ses enfants, de l'avenir qu'elle aimerait pour celui qu'elle attendait, une vraie pipelette et ça m'arrangeait. Je ne voulais pas parler de... "ça" en moi.
J'étais sur mon téléphone, j'espérais avoir un sms ou un appel d'Enzo pour me dire qu'il était en route ou bien alors qu'il ne pouvait pas venir, mais au moins un signe, sauf que rien du tout. Il n'allait donc pas venir, je m'étais faite à l'idée mais j'avais envie de pleurer. Oui, je lui avais dit que je pouvais me débrouiller seule mais c'était dit sous le coup de la colère... Je ne l'avais pas pensé... Même si peut être il y avait une part de vrai. Je n'avais pas eu besoin de lui au début mais maintenant... Oui, j'avais besoin de lui mais je lui avais dit je t'aime, je lui avais demandé ce qu'il voulait faire et il m'avait clairement fait comprendre que se remettre à nouveau ensemble c'était tout sauf une bonne idée.
Je regardais alors sur mon portable des photos de Zoey, ça m'apaisait... Puis je regardais des photos de lui et Zoey et des anciennes photos de nous quand j'étais encore aveugle que j'avais précieusement gardé. Qu'est-ce que je faisais? De plus, j'avais couché avec Raven et est-ce qu'il fallait que je lui dise? Il avait beau dire que je faisais ce que je voulais, il n'avait pas apprécié pour Billie alors là... J'étais perdue... Totalement.
Perdue dans mes pensées, la porte qui s'ouvrit me fit sortir de mes gongs. Je levais ma tête et je vis Enzo. Mon coeur s'était arrêté deux secondes avant de reprendre. Je ne disais rien sous le coup de l'étonnement, le regardant s'asseoir tandis qu'il semblait vouloir éviter le mien.
- Je pensais que tu ne viendrais pas...
Disais-je tout doucement avec une voix plus que fatiguée. Que devais-je répondre à sa question suivante? Il m'avait fait comprendre que je me plaignais trop sans agir, donc lui dire que j'avais encore vomi est-ce-que c'était une bonne idée?
- Je vais... bien, oui ça va. Et toi? T'as l'air exténué.
Je le regardais de bas en haut, analysant le moindre de ses gestes ou la moindre de ses réactions. Il était essoufflé, avait-il couru jusqu'ici? Ou pire encore quelque chose de grave s'était passé au boulot ou ailleurs et ça le mettait dans tout ses états?
Heureusement je n'étais pas arrivé en retard, Maxyn attendait toujours dans la salle de d'attente, et évidemment ça me rappelait des souvenirs. Pas du tout agréable à l'époque. Je n'avais pas voulu de Zoey et pourtant j'étais quand même venu ici. Combien de fois ? A peine une fois ou deux. Mais je ne m'étais guère investi. Et aujourd'hui, quand j'ai envie de m'investir, c'est pourquoi? C'est pour qu'elle puisse se faire avorter. Je déglutissais, essayant de retrouvant mon souffle, accoudé sur mes genoux. Je ne voulais pas en vouloir à Maxyn pour ça, ni sur le fait qu'elle ne voulait pas prendre sa vie en main, après tout c'est son choix, et si elle veut encore plus se détruire, sans trouver de vraie solution, c'est son problème. Je ne voulais plus essayer d'aider quelqu'un qui s'en fiche et qui ne semble pas en vouloir. Même si au fond je me doute bien qu'elle se sentait mal par rapport au fait que je n'ai pas répondu par la même à ses sentiments. Si elle savait ce que je ressentais vraiment, ce serait encore plus dur, autant pour elle que pour moi. Non c'était mieux ainsi. Alors que je venais m'asseoir elle m'avouait penser que je ne viendrais pas Je tiens mes promesses. Lui répondais-je simplement/ Je lui demandais ensuite comment elle se sentait, et quand je remontais mon regard vers elle, je voyais bien qu'elle se nourrissait mal encore une fois. Mais que fallait-il bien faire pour qu'elle se décide à manger ? Même enceinte elle n'en ressentait pas le besoin. Franchement, je n'y arrivais vraiment plus avec elle. Donc oui, autant qu'elle se débrouille toute seule. Mais pas dans cette épreuve. J'étais autant responsable qu'elle de cette grossesse et je voulais la soutenir dans cette épreuve. Quel que soit son choix. Même si j'espérais qu'elle change d'avis. Elle remarqua forcément mon état essoufflé et lui répondais Ca n'a pas été si simple de me libérer finalement. Mais le principal c'est que je sois là n'est-ce pas ? Lui expliquais-je, pas vraiment enclin à la conversation. J'espérais simplement que ce rendez-vous se passe rapidement, que je puisse retourner à mon taf.
"Je tiens mes promesses" m'avait-il dit. Pourquoi ces mots qui se voulaient si rassurant me blessaient au fond? Peut-être car encore une fois, on était dans cette même salle, dans une ambiance glaciale. Ma gynécologue savait un peu ma vie, elle savait pour mes "péripéties" de ces deux dernières années avec mes conquêtes féminines, jamais protégées... Je ne prenais aucune contraception même si je faisais souvent des tests en guise de précaution. Car oui même entre filles on pouvait se refiler des trucs pas net. Ma gynéco était limite devenue ma psy secondaire, je me confiais plus à elle qu'à ma psy "attitrée" d'ailleurs. Mais quand elle avait dû recevoir l'appel d'Enzo, elle avait dû se demander quel chapitre elle avait loupé. Si seulement...
- Merci...
Oui réponse bête mais je le pensais... Sauf que je ne le méritais pas vu mon attitude à son égard samedi dernier. Je lui avais limite dit qu'il servait à rien et que j'allais me débrouiller seule et malgré tout il était venu... exténué en plus de cela... Alors quand il m'avait dit qu'il avait eu des soucis à se libérer mais qu'il avait quand même réussi, ouais ça me touchait. J'en avais limite les larmes aux yeux... Je devais lui dire que j'avais couché avec Raven. Pourquoi au final? On était pas ensemble... Mais j'avais l'impression de devoir lui dire comme je lui avais dit, malgré moi, pour Billie. Car malgré tout il y avait ce lien.. Ce foutu lien qui me rendait presque chèvre.
- Oui... L'important c'est que tu sois là.
Je répétais ses mots comme pour me rassurer que tout était réel et non encore un de mes fichus rêves.
- Je suis désolée Enzo pour mes mots de samedi... Je... Je les pensais pas. J'étais blessée et c'est sorti tout seul. Je voulais pas te faire croire que je me fichais de... toi. T'as aussi ton mot à dire... Je m'en voudrais de t'infliger quelque chose que tu ne souhaites pas comme je t'ai infligé Zoey.
Je culpabilisais trop et j'avais besoin de parler tant ce rendez-vous me donnait encore plus l'envie de vomir... encore. Je déglutissais difficilement sans savoir comment enchaîner la suite. "Hey Enzo, je me suis faite baisée par un autre"? Non... Il allait me dire que je ne faisais que chercher "des merdes" et que.. que tout était de ma faute et que je cherchais tout ce mal être. Et je ne pourrais pas le contredire sauf que là j'avais besoin de soutien et non d'une énième dispute avant un rendez-vous qui me rendait déjà assez malade.
- Avant que tu arrives j'avais deux bonnes femmes qui ne faisaient que parler... Je comprends désormais que tu en as marre quand je parles trop, c'est épuisant.
Je me forçais à rire, voulant briser la glace même si je n'étais pas trop sûre de la finalité.
Non, je n’avais pas envie de me justifier, de lui raconter quoi que ce soit, vu que de toute façon, elle ne semblait pas avoir tant besoin de moi. Et pourtant, elle semblait vraiment rassurée que je sois là. Je me doutais bien que ça avait été des paroles bien plus brutales que celles qu’elle pensait, mais au fond, il y a forcément une part de vérité. Je voulais me faire croire qu’elle avait besoin de moi, et je le savais que ce n’était pas le cas. Pas de cette façon. Elle voulait être avec moi, elle me l’avait bien dit, mais ça me semblait tellement … irréel. Et pourtant, on a déjà été ensemble de longues années. Aujourd’hui, j’avais l’impression d’avoir affaire à une toute autre femme que je n’arrive pas du tout à cerner. J’y ai cru pendant un temps, jusqu’à ce qu’elle aille voir ailleurs alors qu’on n’avait pas encore eu de conversation par rapport à notre nouvelle situation. Mais si moi je fuyais les conversations avec les autres femmes, avec elle, je l’avais espéré, un peu trop et au final, cela ne s’était quand même pas fait. Je me dis qu’au fond, c’est pour une bonne raison. Oui, j’aime toujours Maxyn mais pour quoi au final, pour que je souffre encore plus ? Non, je préférais rester seul. Quand je l’ai quitté j’ai eu besoin d’avoir une femme dans ma vie et aujourd’hui, je préférais rester seul ? Oui, elle me fait encore devenir fou, et dépendant d’elle. C’est alors qu’elle s’excusa pour ses paroles du week-end passé. Je ne savais pas quoi lui répondre. Elle ne voulait pas m’infliger une nouvelle épreuve comme celle de Zoey, mais c’est clairement ce qu’elle faisait en vouloir supprimer cette vie qui n’était pas encore formée. Mais au fond, je savais qu’elle avait raison, on n’était clairement pas prêt à avoir un deuxième enfant, pas avec ce genre de situation. Surtout concernant son travail. Je regardais malgré moi les magazines posaient sur la table d’en face, sans vraiment lire quoi que ce soit, juste perdu dans mes pensées quand elle réussit à me faire sourire. En coin, certes, mais quand même. Je me détendais même un peu, maintenant que mon souffle avait repris un rythme normal. C’est que j’ai du mal à te suivre parfois. Lui répondais-je en la regardant, le même sourire aux lèvres. Je regardais alors ma montre et il était 15h passé. On avait bien pris rendez-vous à 15h non ? Non, je n’avais rien de mieux à dire, certainement parce que notre dernière conversation s’était mal passée. La peur de ne pas trouver les bons mots pour que tout se passe bien. Autant attendre d’être dans le cabinet avant de pouvoir vraiment échanger, attendre qu’il y ait un arbitre. Et pile à ce moment-là, la porte de la gynéco s’ouvrait. Sauvés par le gong.
Au moins je le faisais rire... Un peu. Je préférais le voir souriant que soucieux ou bien... Triste ou bien encore énervé. D'ailleurs ses prochains mots ne me firent que sourire. Il avait du mal à me suivre et je ne pouvais que le comprendre. Moi aussi j'avais du mal à me suivre... Sauf qu'à la fin il ne répondit à aucun de mes mots, il préférait éviter les sujets qui fâchent sans doute. Peut-être faisait-il cela pour se protéger ou me protéger moi ne voulant pas me faire paniquer ou m'énerver... Peut-être faisait-il cela pour nous deux et je n'allais pas le forcer à parler s'il ne voulait pas.
- Oui à 15h... Tu es stressé? C'est moi qui va me faire ausculter en ayant cette pommade à -10 000°C sur mon ventre tandis qu'elle va y appuyer dessus comme une acharnée pour espérer voir quelque chose... Et tu stresses?
Je le taquinais, j'espérais qu'il le comprenne. D'où j'avais employé un ton assez taquin mais oui... Nous n'étions pas un couple normal, pas du tout même. En règle générale, les couples se tenaient la main dans ce genre de pièce, parlaient de bébé, d'un proche futur comme un futur lointain, voir même le papa avait sa main sur le ventre de la maman mais là... Non. Nous étions sur deux rangées de chaises différentes, comme si on avait chacun un rendez-vous et non un rendez-vous commun.
- Promis je ferais un effort de plus autant parler. Je ne veux pas prendre le risque de te perdre.
J'avais dit cela toujours sur le même ton et ma dernière phrase avait un double sens... J'espérais qu'il le comprenne mais je n'étais pas là pour lui déclarer encore et encore ma flamme. Peut-être devrais-je penser à oublier Enzo, définitivement... Après tout s'il ne m'aimait pas, si je lui faisais mal, le rendant malheureux, pourquoi m'accrocher? C'était bien trop dur à faire... J'avais essayé pendant deux ans de l'oublier, au final, on se retrouve encore, dans cette même pièce, dans une situation plus ou moins similaire que pour Zoey. Un jour, oui, un jour j'arrêterais d'aimer Enzo, mais quand et comment... Là était la question.
Cette situation n'était pas du coup confortable pour moi. D'abord je me sentais contraint d'éviter Maxyn alors que j'avais juste envie d'être près d'elle, et ensuite parce que je ne voulais pas qu'elle baisse les bras aussi rapidement pour cet enfant. C'était difficile pour moi de faire semblant que tout allait bien. Même si elle me disait que ses paroles du week-end dernier étaient exagérées. Tout ce qu'il se passait depuis qu'on avait couché ensemble semblait s'effondrer, comme si on était fait pour se déchirer. Nos blessures étaient peut-être trop profondes pour être guéries. Alors je voulais éviter au maximum de passer du temps avec mon ex, parce que je sentais que j'allais être faible, encore, qu'elle allait réussir à m'atteindre encore une fois et que je vais vouloir rester le plus longtemps avec elle, pour elle. Mais il fallait que j'arrête, ça ne me menait à rien. Je ne stressais pas pour la raison qu'elle me disait, non, et je sentais bien qu'elle voulait encore plus détendre l'atmosphère, mais mon sourire se voulait triste cette fois-ci. La patience d'avant nous était bien partie mais la gynéco ne nous recevait pas tout de suite. Fallait que je sois un peu plus patient, de nouveau. Je ne stresse pas Maxyn, j'aimerais en finir le plus rapidement possible. Oui, c'était des paroles certainement dures, mais au fond, c'est ce que je ressentais, je ne pouvais pas rester avec elle, pas en sachant tout ce qu'il s'était passé et ce qu'il va se passer. Elle rajoutait par la suite, qu'elle ne parlerait plus autant, de peur de me perdre. Mon regard toujours aussi attristé remontait vers le sien et la regardais perplexe Tu ne veux pas me perdre, mais apparemment tu n'as pas besoin de moi. Moi, rancunier ? Seulement avec elle, parce qu'elle est bien plus importante pour moi que n'importe qui. La porte du médecin s'ouvrit alors de nouveau, elle était enfin prête à nous recevoir et je n'attendais pas plus longtemps avant de me lever et de me diriger dans le cabinet sans attendre la blonde.
Il avait cassé l'ambiance... J'essayais de le faire sourire, ce que j'avais réussi mais... Les derniers mots prononcés m'avaient fait mal au coeur. Il voulait vite en finir et il me remettait en plein visage mes derniers mots alors que je m'étais excusée en lui disant que je ne le pensais nullement. Je baissais juste les yeux, honteuse et peinée à mon tour. J'espérais juste que le docteur arrive bientôt, à croire que rester seuls dans une même pièce nous ne réussissait pas... Pourquoi ne pouvais-je pas tout bêtement d'arrêter d'aimer Enzo, en arrêtant d'espérer quelque chose?
Puis le "ciel" attendit mes prières, enfin... si j'étais croyante on dirait cela... je crois. Je m'étais levée à peine la porte ouverte qu'Enzo me passa devant, saluant d'un signe de tête ma gynéco. Ma gynéco me sourit et me serra la main à mon tour.
- Asseyez-vous donc.
Disait-elle, tout sourire. Je m'installais sur la chaise de libre, pile en face de son bureau. Je ne regardais pas Enzo, me contentant de poser mon sac au sol. Mon manteau restait sur mes cuisses et je commençais à agiter mon pied dans le vide à cause du stress.
- Ca fait longtemps que je ne vous ai pas vu Monsieur Valentine, comment vous portez-vous? Votre petite bichette va bien? Elle a quel âge désormais?
Je ne savais pas pourquoi elle parlait à Enzo en premier, peut-être avait-elle entendu la fin de notre conversation et avait vu qu'Enzo était rentré en premier sans même m'attendre. Je n'en savais guère rien. Je me contentais juste de me taire, regardant la main d'Enzo, bien trop effrayée de le fixer droit dans les yeux. Peut-être voulait-il parler cette fois-ci, il avait voulu m'accompagner donc c'était bien pour quelque chose, du moins... Je me disais cela.
Serrant la main du toubib, je n'attendais pas Maxyn, et je me trouvais très gamin tout à coup. Est-ce que l'éviter nous permettrait vraiment de résoudre nos problèmes d'adultes ? Certainement pas. Et on allait se faire passer pour deux ados qui commencent à peine une relation et qui s'engueulent parce qu'ils ont découvert qu'ils allaient avoir un enfant ensemble. Alors qu'on avait passé quatre années ensemble, qu'on avait aussi eu Zoey. La tête du gynéco me revenait en mémoire. Pourtant, je ne l'avais pas vu autant que Maxyn et je me sentais un peu gêné. J'osais faire ma tête de con mais après tout je n'avais rien à reprocher à mon ex, je n'avais pas été présent pour elle à l'époque. Je me devais d'être là pour elle aujourd'hui, qu'importe les circonstances. Mais ça me faisait toujours aussi mal au cœur. On s'était donc assis en face du docteur, attendant bêtement qu'elle enclenche la conversation. Alors que j'aurais pu directement amener le problème qui nous amenait aujourd'hui. Mais l'appréhension m'envahissait. C'est alors que la gynéco m'adressa la parole. Pourquoi à moi ? Je regardais instinctivement mon ex, qui évitait encore plus mon regard. A quoi je m'attendais ? A ce qu'elle réponde à ma place ? Son docteur venait clairement de s'adresser à moi 3 ans. Elle a 3 ans. Et elle va bien, même si on ne peut pas en dire autant de sa mère … Non, on n'était pas là pour parler de Zoey, bien que ça aurait été bien plus simple. On n'était pas non plus là pour parler de ma santé, on s'en contre fichait, le plus important à cet instant précis était Maxyn. Et même si je lui en voulais de ne pas faire d'effort pour nous, pour notre famille, je ne pouvais pas m'empêcher de m'inquiéter pour elle et de l'aimer. Je savais que je l'aimerais toujours, au fond de moi, mais là, c'en devenait viscéral, ça me prenait aux trippes et je n'arrêtais pas de me demander si c'était vraiment sans danger.
Enzo avait été cash, bien trop rapide voir même froid dans sa réponse. Il avait bien dit: il voulait vite en finir. J'ignorais toujours son visage, osant à peine regarder le médecin.
- Que vous arrive-t-il donc? - J'ai fait un test de grossesse et il s'est avéré... positif. Je n'ai pas eu mes règles depuis du coup je suppose que le test est véridique... Mais depuis j'ai sans cesse des nausées, la moindre odeur me rend... mal.
Elle fronçait les sourcils ne disant rien, elle semblait vouloir me laisser parler et je préférais en dire "trop" avant qu'Enzo parle à ma place. S'il voulait vite en finir il pourrait me traiter de droguée, d'alcoolique et me mettre plus bas que terre, je n'en savais rien, je n'arrivais pas à comprendre... son état psychologique.
- J'ai des soucis pour manger depuis un moment... J'ai eu une période.. compliquée. Mais j'avais recommencé un peu à reprendre à manger mais avec la grossesse... ça ne m'a pas aidé. Je me sens vraiment mal. Puis... C'était pas prévu que je tombe enceinte... Pas du tout... Ce n'est pas... le bon moment et... je ne sais pas quoi faire. Enfin... On ne sait pas quoi faire.
Elle prenait des notes sans dire un mot puis son regard se relevait pour fixer Enzo puis moi, comme si elle attendait qu'Enzo réplique mais apparemment je m'étais trompée car elle enchaîna.
- Depuis combien de temps êtes-vous enceinte? Environs? - Deux à trois semaines je dirais... Plus trois semaines. - On va vérifier cela.
Elle se leva et se rapprocha de la fameuse "chaise allongée" où j'allais mourir de froid à cause de cette pommade que je détestais tant.
- Venez ici et relevez votre haut, j'allume la machine et prépare la pommade.
Je ne regardais toujours pas Enzo, pas la force et je n'en avais pas envie... Normalement là on était censé se tenir la main et attendre impatiemment de voir "cet enfant" à l'écran mais non.
- Vous ne voulez pas voir?
Demandait-elle à Enzo tandis qu'elle préparait le matériel. Quant à moi je ne disais rien, je relevais juste mon pull jusqu'à la poitrine en m'asseyant tout d'abord sur cette chaise allongée, mes bras croisés sur mon ventre comme si j'avais honte de le montrer.
Cette épreuve était loin d'être évidente. J'étais à la fois soulagé d'être là à temps, et pourtant je voulais m'enfuir le plus vite possible. Je voulais être là pour Maxyn mais je voulais qu'elle soit là pour moi aussi. Je m'en rendais de plus en plus compte, particulièrement avec cet enfant à naître. Ou pas. Je pouvais le prendre en charge cet enfant, oui, je le pouvais. Non, je ne le pouvais pas. Les congés paternité dans mon service ça ne s'est jamais vu. Et payer une nourrice, ça finirait par me ruiner. J'écoutais alors les paroles des deux femmes, sentant bien le malaise de mon ex, voulant la tenir par la main pour l'aider à se sentir mieux. Mais à quoi bon, tout ce qui lui arrive n'est que sa faute, si elle se décidait à vraiment agir, c'est évident qu'elle irait mieux. Et c'est pas en lui tenant la main que j'arriverais à lui faire comprendre ça. Et pourtant, j'étais là à ma manière. Je serais incapable de la laisser tomber, je tiens bien trop à elle. Mais ça clairement, elle n'en a pas conscience. Elle expliquait donc approximativement son problème et je restais assis quand elle se dirigèrent vers la machine à échographie. J'étais sensé faire quoi ? Venir voir cet embryon que de toute façon elle ne voulait pas garder ? Elle n'avait pas été totalement honnête en disant à sa gynéco qu'on ne savait pas quoi faire. Si, chacun de nos côtés on savait, mais à nous deux c'était Bagdad. J'étais perdu dans mes songes quand la gynéco me demandait si je ne voulais pas voir A quoi bon, de toute façon elle ne veut pas le garder. Lâchais-je sans réfléchir. Non, j'allais me faire souffrir en voyant cet embryon, je préférais ne rien voir, tellement que je détournais complètement la tête. J'avais envie de crier ma rage comme jamais et essayais tant bien que mal de me calmer. J'étais là pour Maxyn, pour la soutenir, et là, tout ce que je faisais, c'était mon sale gamin capricieux. Je soufflais alors un bon coup et me levais. Je venais auprès de la blonde et lui pris la main avant de lui dire Je suis là pour tout Maxyn. Si tu ne te sens pas capable de le garder, je suis prêt à te soutenir. Ca passait très mal dans ma gorge, mais j'en avais marre de la voir aussi mal. Et si une fois ce problème résolut elle pouvait vraiment se concentrer sur ses propres problèmes, oui j'étais prêt à faire ce sacrifice.
Je ne comprenais pas pourquoi il agissait ainsi, j’avais l’impression qu’il m’en voulait à mort. Il agissait de façon si enfantine alors qu’il me reprochait d’avoir trop de problèmes et qu’il fallait que je me bouge. Déjà il me taclait avant qu’on entre, ensuite il entrait sans m’attendre pour finir par répondre sèchement au médecin lui faisant comprendre que j’avais un souci et là… c’était l’apothéose. Il osait dire avant moi mes souhaits pour… cette chose dans mon ventre, remballant proprement le médecin. Je baissais les yeux, honteuse, encore et toujours. La gynécologue me regardait d’un air… triste je ne savais comment interpréter ce regard. Je me contentais juste de lui sourire pour lui signifier que ça allait alors qu’elle voyait très bien que ça n’allait pas.
J’allais m’apprêter à m’allonger, mais pour je ne sais quelles raisons, Enzo s’était levé et était désormais devant moi, ma main dans la sienne. J’avais juste mon autre bras couvrant mon ventre que je n’assumais toujours pas alors qu’il n’avait pas changé tant j’en étais au début, mais c’était un réflexe inconscient.
- Maxyn, allongez-vous s’il vous plaît. Enzo vous pouvez prendre une chaise et vous mettre ici, il faut du temps à l’appareil pour que l’image soit un minimum net.
J’aurais pu répondre à Enzo mais j’étais perdue. Pourquoi me disait-il cela alors qu’une phrase avant il avait énoncé cette même idée sur un ton… dégoûté ? Ou alors disait-il cela pour faire bon genre devant le médecin ? Je n’en savais rien… J’avais juste envie de pleurer et de crier mais je me retenais. Je n’étais pas du tout démonstrative en public, pas du tout. Alors, vu que je ne répondais pas, je me contentais de serrer la main d’Enzo pour caresser le dos de cette dernière à l’aide de mon pouce, défiant son regard depuis plusieurs minutes et quand elle me demanda de m’allonger, je ne laissais pas trop le choix à Enzo de rester là, debout à côté de moi car ma main n’avait pas quitté la sienne.
Je laissais mon ventre à nu, tandis que je la voyais prendre cette fameuse pommade qui me glaçait jusqu’au sang à chaque fois, mais je préférais m’acharner sur la main d’Enzo si jamais c’était intenable. Oui, j’étais frileuse.
- Je vous étale la pommade, d’accord ?
Je disais juste « oui » d’un signe de tête en serrant encore plus la main d’Enzo dans la mienne et quand elle commença à l’appliquer je devais faire une grimace horrible.
- Pourquoi c’est si froid dites ? C’est obligatoire ?
Mon médecin se mit à rire en s’appliquant à bien l’étaler pour aider la machine à faire son travail. Ca me faisait bizarre que quelqu’un touche mon ventre de la sorte, j’aimais cette sensation habituellement, ça me relaxait et ça me rappelait certaines « papouilles » qu’Enzo m’avait déjà fait dans le passé pour m’aider à m’endormir ou juste pour le plaisir de toucher ma peau. Cette sensation me manquait mais je ne pouvais pas le forcer à me toucher s’il ne le voulait pas. Là, je tenais juste sa main car c’était lui qui avait fait ce geste en premier mais même si j’avais envie de plus, je restais sage… Ca me ferait trop mal qu’il me rejette. Encore.
C'était dur pour moi. Autant de devoir me priver de Maxyn que d'être là à la soutenir pour qu'elle avorte. Je me sens en conflit constant et j'ai horreur de cette sensation. Si j'avais pu l'éviter, je l'aurais clairement fait. Mais j'avais pris des engagements auprès de mon ex et je devais assumer tout autant qu'elle. Et je voyais bien qu'elle avait autant de mal que moi. Je connaissais aussi ses souffrances et je ne pouvais pas continuer à l'éviter ainsi, non, il fallait que je me reprenne, que je prenne sur moi et que je sois vraiment là pour elle, quoi qu'elle décide, et que je le fasse vraiment. Voilà pourquoi je m'étais rapproché des deux femmes et que j'avais pris la main de la blonde, histoire de la rassurer un minimum. Le pire dans tout ça c'est que je savais qu'elle n'allait pas me repousser mais qu'elle en aurait tout à fait le droit. Je me dis que ce serait tellement plus simple si elle me repoussait aussi. Mais ça ne suffirait pas à continuer de cacher mes sentiments pour elle. A les étouffer encore une fois, oui, peut-être. La gynéco commença alors à passer la pommade qui glaça la peau de mon ex et la fit me serrer la main après l'avoir caresser doucement. Non, franchement, je me sentais de plus en plus happer par elle et ça ne me disait rien qui vaille. Je souriais malgré moi aux paroles de mon ex pour reprendre rapidement mon air sérieux. Elle allait conduire à ma perte j'en suis sûr. Et une part de moi en avait envie. Détend toi, ça va aller. Essayais-je de la rassurer du mieux que je pouvais. La gynécologue sortit la sonde et une fois le moniteur bien connecté elle la passa sur le ventre de mon ex. Et elle semblait bien appuyer. Je fronçais les sourcils, ne comprenant pas l'utilité d'y aller si fort. J'avais assisté à l'une des échographies de Zoey et elle n'avait pas appuyé aussi fort, non ? Peut-être qu'une fois le ventre plus rond, ce n'est plus nécessaire. Peu importe, je préférais ne rien dire, seulement continuer de garder la main de mon ex dans la mienne. Je regardais l'écran et franchement, on ne voyait que dalle. Je plissais les yeux et … non, toujours rien. Franchement je ne voyais pas comment on pouvait voir un embryon dans tout ce bordel.
La seule chose qu'il me faisait sourire c'était de voir Enzo inquiet et à mes côtés. Pour Zoey ça avait été loin d'être ça... Alors oui ça me faisait plaisir. Sauf que l'appui du médecin et cette couche glaciale sur mon ventre me faisait grimacer. Je soufflais tant ça me saoulait mais bon elle voulait sûrement vérifier si.. le bébé était bien accroché, j'en savais rien. Je savais que mes nausées n'étaient pas normales mais je pensais plus que c'était dû au stress... qu'à quelque chose de réellement "physique".
Ma main toujours dans celle d'Enzo, je ne voulais même pas regarder l'écran. Je préférais regarder Enzo qui lui regardait l'écran et je me mis à rire comme une imbécile tant Enzo faisait une de ces têtes.
- Ne riez pas trop s'il vous plaît... Restez concentrée... - Oui, oui, pardon, ça me chatouille.
Faux ça me chatouillait pas, ça me compressait le ventre mais soit. Je me contentais alors de me mordre ma lèvre inférieure et de regarder le sol. Car oui je riais certes, Enzo les yeux plissés c'était quelque chose à voir surtout quand il "ne comprenait rien" mais je me refusais à humaniser cet embryon.... Non. J'étais toujours décidée à... ne pas le garder... Sauf que ma main dans celle d'Enzo me donnait envie de... pas de changer d'avis mais... je ne sais pas, juste d'y penser encore. Il y a plus de 3 ans, je lui avais infligé Zoey et là je lui inflige de supprimer une vie sans trop son... consentement. Pourquoi voulait-il garder cet enfant? Pourquoi? Surtout avec... moi? Etait-ce juste ses idéaux politiques ou "philosophiques" qui lui dictaient ses actes ? Ou alors voulait-il garder cet enfant car... il était de moi? Et s'il avait mis une autre femme enceinte, penserait-il toujours ainsi?
- Enzo on ne va rien voir enfin... T'attends pas à voir une tête, deux bras et deux jambes.
Disais-je en le taquinant tant il semblait focus sur l'appareil. Je savais qu'il ne s'attendait pas à "ça" mais voilà... Je voulais juste détendre l'ambiance... Je ne voulais pas qu'il me haïsse.
- Vous ne voulez pas regarder Miss Ledger ? - Je... Euh...
Je me sentais conne tout à coup. Devais-je casser l'ambiance et lui rappeler mon souhait principal? Alors, par politesse, je détournais mon regard d'Enzo et je zieutais l'écran. Je voyais juste deux gros points noirs fulgurants emprisonnés dans une sorte de poche mais j'étais incapable de savoir qui était quoi où quand comment et pourquoi... Mais je ne disais rien, je regardais, ma main toujours dans celle d'Enzo.