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 No remedy for memory / Clara

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Message(#)No remedy for memory / Clara EmptyLun 18 Déc 2017 - 17:03

Au plus simple, au plus près. Leena avait suffisamment appris de toutes ses années de bénévolat pour savoir que, même au sujet d’une cause qui tient véritablement à cœur, il faut mettre toutes les chances de son côté : maximiser le temps, minimiser le transport, faciliter les démarches. C’était donc en toute logique qu’elle avait épluché la liste des écoles et entouré en rouge celles autour de son périmètre de vie : sa maison, la boutique de Célia. Puis elle s’était renseignée sur les écoles en elles-mêmes, leurs initiatives, leur statut, la densité du personnel, le nombre d’élèves, etc. Puis elle avait commencé à noter les noms des responsables : directeurs, encadrants, infirmiers, assistants sociaux… Et quand elle s’était attelée au cas St Anthony, le nom de Clara Davis avait eu une résonnance bien particulière dans son esprit. Clara Davis. À Brisbane, ça ne pouvait être qu’elle ; la même qu’il y avait maintenant plus de dix ans, enfin — la même en version 2.0. Ce ne devait plus être la petite blondinette toute énergique et volubile, prête à suivre Adam dans la moindre de ses idées (et il en avait plein), à courir dehors ou à construire tout un tas de choses que Leena regardait toujours d’un œil amusé. Adam était un garçon plein de vie, plein d’amis, plein d’énergie, et si Leena avait eu une enfance et une adolescence plus timides que lui, il n’y avait jamais eu de scission entre eux : ils se complétaient, elle lui apportait de la stabilité tandis qu’il la stimulait et l’entraînait dans toutes ses joyeuses idées. C’était l’une des choses qui lui manquaient le plus, d’ailleurs : cette énergie communicative, qu’elle n’avait jamais retrouvé nulle part. Elle avait hésité — il y avait bien longtemps qu’elle avait laissé derrière elle la disparition d’Adam et son histoire familiale. Quitter Brisbane avait marqué un tournant définitif à tout cela. Jamais, aux personnes qu’elle avait ensuite rencontrées, elle avait parlé de tout ça, de ce secret morbide qui avait à l’époque intéressé tous les médias et fait parler tout le quartier. Elle avait trop souffert d’être la sœur du disparu, quand elle essayait, et plutôt dans la douleur, de combattre tous ses problèmes d’adolescentes. Un retour à Brisbane entraînait forcément une certaine replongée dans le passé, Leena en était consciente — mais elle ne voulait pas pour autant se laisser submerger.

Les feuilles sur lesquelles elle avait imprimé les coordonnées des écoles étaient restées en plan sur son bureau, l’espace de 48h. Le nom de Clara l’avait stoppée net dans ses démarches et elle s’était laissée le temps — le temps de quoi exactement ? De méditer, de peser le pour et le contre, de faire un choix. S’engouffrer ou non dans la faille. Mettre de côté le reste. En somme : oser.

Et puis, parce qu’elle avait fait trop de chemin pour renoncer, elle avait décidé que c’était Clara qu’elle irait voir, justement. Peut-être qu’il y avait un vague espoir que Clara accorde plus d’importance à sa demande au nom de ce qui les avait liées ; ou peut-être juste que la perspective d’un visage familier était simplement plus plaisante que s’adresser à un inconnu, surtout pour ce genre de sujet. Même si elle avait derrière elle huit d’années d’engagement au sein d’une association londonienne qui militait et œuvrait contre le harcèlement scolaire, le sujet restait toujours complexe et intime pour Leena, qui se retrouvait parfois légèrement fragilisée — au fond, les histoires étaient si semblables, et lui rappelaient la sienne.

Le contact avec le directeur avait été bon d’emblée, il s’était montré intéressée par le sujet, et s’engageait plutôt volontairement à coopérer. Par son biais elle avait pris rendez-vous avec Clara, et elle arriva en début d’après-midi au lycée, son sac bien garni de toute la documentation qu’elle pouvait avoir en sa possession pour appuyer ses propos, et en guise d’exemple. Son discours était prêt : après tout, elle avait l’habitude maintenant de faire de la prévention auprès des jeunes et de monter des sessions dans les écoles. Toc toc toc. Le bureau de Clara était face à elle, et elle sentit son cœur s’accélérer — il était inutile de faire comme si elle n’était pas sous tension, non seulement le projet qu’elle voulait proposer lui tenait à cœur mais ce n’était pas rien de se retrouver face à Clara, fantôme de son passé, qu’elle avait abandonnée derrière elle, d’une certaine façon. « Salut Clara ! » Leena lui sourit doucement, bien au fait de la particularité de la situation. Malgré toutes les choses qu’elle avait imaginées dire alors, pas une ne sembla décidée à franchir la limite de ses lèvres. « Je... te remercie de me recevoir. Ça me fait plaisir de te voir. Comment vas-tu ? » Clara avait changé bien sûr, mais elle avait gardé ce regard perçant et ce petit quelque chose de volontaire dans l'attitude. C'était elle — Leena l'aurait sûrement reconnu sans problèmes. Elle nota juste qu'elles devaient probablement faire la même taille, plutôt petite. Incapable d'ajouter quoi que ce soit, elle attendit un geste de Clara, en proie à un léger vertige de se retrouver aussi concrètement plongée dans des souvenirs qu'elle s'était pourtant évertuée à mettre de côté.
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Message(#)No remedy for memory / Clara EmptyJeu 21 Déc 2017 - 0:12

Sa tête avait été ailleurs toute la journée. Quelque part entre la Terre et les nuages, nombre de personne avait dû se répéter pour qu’elle puisse prendre connaissance des informations de la journée. Clara n’écoutait pas, se remémorant sans cesse l’histoire du petit Adam Scofield, des souvenirs qu’elle avait de cette journée, de la façon dont elle avait vécu les évènements et des conséquences désastreuses qu’avait eu le sort du petit Adam dans les vies de son entourage. Elle n’était qu’une enfant, mais si elle devait marquer le jour où elle s’est retrouvée obligée à grandir, c’est celui-ci : le moment où elle a appris toutes les horreurs que l’on pouvait infliger à un enfant et surtout la pénibilité de ne pas savoir laquelle était celle qui avait été endurée par son ami. Elle n’avait fait que penser à ça, une boule à l’estomac lui ayant coupé l’appétit ou tout besoin d’aller auprès des élèves faire son travail. Elle avait finalement décidé de passer l’après-midi à attendre tranquillement dans son bureau, celle qui – elle l’espérait – allait lui faire penser à autre chose. Ses souvenirs de Leena sont très lointains. Après l’enlèvement, Clara n’avait pas cherché à se rapprocher de la famille. La chose lui semblait bien trop indécente. C’est aujourd’hui qu’elle se rend compte du contact perdu avec celle qui a pourtant partagé sa peine qu’elle se dit qu’elle aurait dû montrer plus de zèle à l’époque. C’est probablement ce remord-là qui empêche Clara de penser à autre chose.

Ses yeux fixent la cours du lycée dans l’attente que l’heure prévue du rendez-vous arrive. Est-ce que la jeune femme allait la reconnaître ? Venait-elle en connaissance qu’elle aurait face à elle la petite Clara Davis, l’amie d’Adam ? Ou bien, n’avait-elle pas fait attention au prénom donné par le proviseur ? Après tout, des Clara Davis, ça doit être courant non ? L’idée d’aller vérifier ses homonymes sur internet la frappe un instant, avant que sa raison ne vienne lui faire remarquer que c’était quand même un petit peu loin et que ça Leena savait, soit pas.

Seul acte productif de la journée, Clara avait posé soigneusement sur son bureau tout ce qu’elle détenait qui concernait les raisons réelles de la venue de la jeune femme : la prévention contre le harcèlement scolaire. Elle ne savait pas vraiment pourquoi elle ne faisait que ressasser de vieux mauvais souvenirs. Elle n’avait pas l’intention de rouvrir ce chapitre-là de sa vie, surtout avec une personne beaucoup plus concernée qu’elle. Le thème de ce rendez-vous serait les actions dans lesquelles elle peut se plonger, rien d’autre. Fermement décidée à se montrer plus active, elle se réinstalle à l’arrière de son bureau, rangeant d’un côté les exemples de campagnes menées, les documentations qu’on lui demande dès qu’un étudiant est suspecté d’être en danger. Quand elle regarde son maigre pactole, elle ne peut s’empêcher de penser qu’il faudrait effectivement y mettre plus d’effort.

On toque à la porte. Automatiquement, le visage de la jeune femme se lève vers la pendule qui indique l’heure prévue. Elle avait finalement réussi à penser à autre chose, elle n’avait pas vu le temps passé. Ne voulant pas faire attendre la jeune femme, elle se précipite à la porte pour lui ouvrir non sans se forcer à essayer de ne montrer aucun stress. « Salut Clara ! » annonce la jeune femme face à elle, Clara se perd un instant à essayer de repérer des traits, à observer ce qui reste de l’adolescente qu’elle a connu, à chercher à la reconnaître alors que c’est évident que face à elle, se tient la grande sœur d’Adam. La conseillère affiche un sourire en réponse après quelques secondes de reconnaissance. « Bonjour Leena, je t’en prie entre ! » Et du bras, elle désigne son bureau, les sièges juste devant près à l’accueillir. « Je... te remercie de me recevoir. Ça me fait plaisir de te voir. Comment vas-tu ? » Qu’elle ajoute, sans avancer. On peut sentir la gêne – ou plutôt la timidité – à s’accueillir comme de vieilles amies. N’ayant jamais été très tactile, ou même démonstrative, Clara ne sait comment agir, si elle doit la traiter en amie ou comme une personne professionnelle qu’elle rencontre dans le cadre de son travail. «  ça me fait plaisir aussi, donne moi tout ça, je vais te débarasser. » dit-elle en tendant les mains vers elle, incapable de plus. Les dossiers de Leena en main, elle s’avance, espérant que la jeune femme la suive. « Je vais très bien et toi ? J’ai été assez surprise quand le proviseur m’a donné ton nom pour cette entrevue. Je me réjouie pas mal de travailler avec toi, je sens qu’on a beaucoup de chose à nous dire toi et moi. » exprime t-elle avant que la pensée d’Adam ne lui revienne, elle ne voulait pas spécialement reparler de ça, mais juste rattraper le temps perdu.
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Message(#)No remedy for memory / Clara EmptyJeu 4 Jan 2018 - 17:31

Le moment de flottement, qui ne dépassa pourtant pas une fraction de secondes, sembla durer une éternité. Pendant cet infime espace Leena sentit ses pensées tourner si vite qu’elles lui parurent faire du bruit, comme un moteur en surchauffe — le visage de Clara était de marbre, indéchiffrable, et tout d’un coup elle s’imaginait le pire : la rancœur, l’hostilité, la méfiance. Après tout elle aurait eu toutes les raisons de lui en vouloir, ni Leena ni sa famille n’avaient vraiment entouré les proches d’Adam, obnubilés par leur chagrin et leur incompréhension, et par leur refus d’admettre la vérité. Leena s’en souvenait très clairement, comme si l’événement datait d’hier : il lui avait fallu des jours et des jours pour enregistrer, pour accepter qu’il ne reviendrait pas, qu’elle n’avait plus son frère et que le monde continuait de tourner de la même manière, pour tout le monde, avec ou sans Adam. Même lors de la cérémonie faite à l’école, pour permettre aux enfants de s’exprimer, où ses parents avaient refusé d’aller. Leena s’en souvenait comme d’un film auquel elle avait assisté, elle revoyait sur leurs visages la douleur ou la surprise des enfants, mais un mur invisible l’avait empêchée alors de ressentir quoi que ce soit. Puis un sourire cassa le masque de Clara et Leena sentit que l’air ambiant avait changé instantanément ; de l’air parut de nouveau s’insuffler dans ses poumons. Elle tendit la pile de dossiers qu’elle portait comme une automate, un peu gênée encore, ne sachant pas trop quoi faire de son corps. Mais sa raison la rappela à l’ordre : l’attitude de Clara était des plus accueillantes, et elle ne devait pas laisser le passé et ses doutes s’immiscer entre elles.

Leena entra donc dans le bureau et s’installa sur l’un des fauteuils, goûtant sans trop de plaisir l’un de ces moments où on ne sait pas trop sur quel pied danser, si l’on doit lancer le sujet soi-même ou attendre que l’autre prenne la parole et invite à l’action, si l’on doit parler de tout et de rien pour enclencher la machine ou rentrer tout de suite dans le vif du sujet ; son regard balaya le bureau de Clara, où des documents en rapport avec leur entretien étaient exposés soigneusement. En relevant les yeux elle croisa le regard de Clara, et lui sourit timidement.

Beaucoup de choses à nous dire. Il y avait à la fois tout et rien derrière cette petite phrase et Leena se raidit, en proie à une hésitation étrange. Est-ce qu’il fallait crever l’abcès ? Est-ce qu’elle se faisait des films et voyait le pire alors qu’il n’en était rien ? Comme toujours dans ces situations, la langue de Leena se délia et elle se mit à parler sans s’arrêter : « Ça va, je suis fraîchement de retour à Brisbane après plusieurs années à l’étranger. C’est toujours un peu bizarre de revenir comme ça en arrière. En tout cas c’est super ton boulot ! ça fait longtemps que tu travailles à St Anthony ? J’ai pas mal travaillé avec des personnels éducatifs quand j’étais à Londres, j’étais très investie dans une association qui s’occupe de harcèlement scolaire. Du coup j’ai vraiment envie de continuer ça ici, c’est quelque chose qui me tient très à cœur. J’ai vu que tu avais pas mal de doc de ton côté, est-ce que tu sais ce qui se fait par ici ? Je ne sais pas si le lycée organise des interventions sur ce thème mais je me disais que ça pourrait être pas mal de monter quelque chose autour de ça, à la fois pour sensibiliser les élèves et pour éventuellement permettre à certains de parler… » Elle se tut un peu brusquement, le temps de reprendre ses esprits et de couper sa tirade. « Désolée, je parle toujours trop quand je suis un peu stressée… » Elle lui sourit doucement. « Ce n’est pas forcément évident, parfois, de replonger dans le passé, n’est-ce pas ? » Après tout, la meilleure des attitudes à adopter était bien souvent la franchise.
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Message(#)No remedy for memory / Clara EmptyLun 8 Jan 2018 - 17:09

Elle l’invite à entrer à l’intérieur du bureau et attrape au passage la pile de dossier que Leena a apporté pour leurs entretiens. C’est lourd, mais le sourire de la blonde ne faiblit pas. Elle se sent prise entre deux façons d’agir, partagée entre l’idée de mettre le passé à plat et celle de parler d’avenir plutôt que de ressortir de vieilles douleurs. Pourquoi Leena est là ? Officiellement, c’est professionnel, la question ne devrait même pas se poser. Pourtant, c’est ce genre de situation qui a lieu, il est bien difficile de ne pas se demander s’il n’y a pas autre chose. Evidemment, la question ne se pose même pas et plutôt que de continuer à se prendre la tête, Clara ferme la porte derrière elle et prendra place sur son fauteuil après avoir posé sur son bureau les documents de Leena. Elle ne perd pas plus de temps dans ce silence. Elle voit bien que son rendez-vous n’est pas à l’aise – et elle le comprend – continuer d’agir comme si elles marchaient sur des œufs n’allait pas aider leurs affaires ou les faire avancer alors sans perdre plus de temps, Clara communique, exprime sa joie –parce que malgré tout la visite est agréable – que de revoir Leena et de possiblement travailler avec elle, même si elle a besoin d’en savoir plus sur ce qu’elle est devenue. Les réseaux sociaux sont une chose, mais ils ne permettent que d’avoir une vague idée de l’avenir de certain quand ceux-ci ne font pas tout pour faire croire à leur intérêt. Elles ont effectivement beaucoup de chose à se dire, mais Clara ne pense pas en premier lieu à cet évènement qui les a tant marqués. Il est préférable de ne pas laisser le fantôme d’Adam hanter la pièce. « Ça va, je suis fraîchement de retour à Brisbane après plusieurs années à l’étranger. C’est toujours un peu bizarre de revenir comme ça en arrière. En tout cas c’est super ton boulot ! ça fait longtemps que tu travailles à St Anthony ? J’ai pas mal travaillé avec des personnels éducatifs quand j’étais à Londres, j’étais très investie dans une association qui s’occupe de harcèlement scolaire. Du coup j’ai vraiment envie de continuer ça ici, c’est quelque chose qui me tient très à cœur. J’ai vu que tu avais pas mal de doc de ton côté, est-ce que tu sais ce qui se fait par ici ? Je ne sais pas si le lycée organise des interventions sur ce thème mais je me disais que ça pourrait être pas mal de monter quelque chose autour de ça, à la fois pour sensibiliser les élèves et pour éventuellement permettre à certains de parler… » Bon, elle n’était pas préparée à autant de verve. Clara étant une personne assez discrète, elle ne parvient pas à masquer sa surprise devant Leena. Finalement, il semblerait que la jeune femme n’ait pas de problème à communiquer. « Désolée, je parle toujours trop quand je suis un peu stressée… » Elle avait remarqué vu la dose d’information, mais plutôt que de faire une remarque inutile dessus, Clara se contente de répondre en souriant. « C’est pas grave. Tu anticipe déjà mes questions, ça nous fait gagner du temps. » C’est une bonne façon de voir les choses en tout cas. « Ce n’est pas forcément évident, parfois, de replonger dans le passé, n’est-ce pas ? » Elle marque un temps de silence. Le souvenir d’Adam qu’elle essayait d’empêcher de l’envahir ressurgit à nouveau. Elle pose les yeux sur la brune, tant de déceler son intention avant de se dire qu’il est préférable finalement de ne pas éviter le sujet, du moins, si ça ne la met pas mal à l’aise. « Non, je dois dire que depuis ce matin, c’est vraiment difficile de penser à autre chose. » Qu’elle admet, sans se demander si c’est une bonne chose d’admettre que cet entretien réveille ces vieux souvenirs. « Après toutes ces années, c’est …. » Pas évident, elle l’a dit. Clara ne sait pas quoi ajouter, elle a toujours été très secrète sur les choses qu’elle ressent et de partager là, tout de suite, y’a un bloquage qui se fait. Parler d’elle lui parait tellement indécent qu’elle ne s’y risquerait pas. « Enfin, j’imagine que ça doit être plus difficile maintenant que tu es revenue, cette ville doit être pleine de vieux souvenirs à ne pas déballer. » Elle s’imagine qu’il avait été plus facile d’évoluer à Londres, là où personne ne savait, là où le spectre de son petit frère n’allait pas surgir à chaque coin de rue. « On peut en revenir aux campagnes anti-harcèlement si tu le souhaites. C’est encore un sujet récent, donc le lycée n’a pas développer d’entreprise vraiment marquante. On essaie juste de former les professeurs à être vigilants. »
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Message(#)No remedy for memory / Clara EmptyDim 14 Jan 2018 - 17:51

Leena avait beau prendre sur elle pour ne pas se laisser gagner par le stress, elle remarqua tout de même le regard que lui lança Clara — probablement assommée par son flot de paroles — et sentit l'inquiétude la menacer de nouveau. Après tout, c'était culotté de faire ce qu'elle avait décidé de faire : débouler comme une fleur dans la vie de cette fille dont elle ne savait finalement rien, si ce n'était une seule et unique chose, un évènement tragique qui avait probablement dû marquer l'année de ses dix ans. Baissant les yeux sur ses genoux, Leena tripota machinalement le tissu de sa robe. Cet entrelacement de discours — références au passé, projets scolaires — la mettait mal à l'aise, alourdissait l'atmosphère, elle le savait très bien. Simplement il était bien plus facile de prendre des chemins détournés que d'y aller frontalement, et Leena n'avait absolument aucune idée de comment se comporter face à cette jeune femme qui avait sa vie propre, son existence bien à elle dont Leena n'avait aucune idée, et peut-être ni l'envie ni le temps de se replonger dans le passé. Mais quand elle reprit la parole, les mots qu'elle prononça interpellèrent Leena, qui releva les yeux, cherchant le regard de son interlocutrice. Après toutes ces années. Elle y avait pensé... Et puis, cette phrase directe, uniquement destinée à elle, qui manqua d'arracher une larme à Leena. Cela voulait dire que Clara mesurait que c'était difficile pour Leena et qu'elle s'en inquiétait, et c'était un fait si rare — puisque ses propres parents n'en parlaient même pas — que le geste la toucha en plein coeur. « Oui... C'est gentil de dire ça. C'est rare... Enfin. » Elle se tut, un peu gênée, mais un petit sourire sincère illuminait son visage. Après tout, c'était tellement logique : Clara avait la présence d'esprit de penser à ce que ressentait la soeur d'Adam tout simplement parce qu'elle avait très proche d'Adam. Quoi de plus naturel ? « Ça me fait plaisir en tout cas, de voir qu'il n'est pas oublié. Je me souviens très bien de toi, tu sais, et de comment vous étiez toujours fourrés ensemble. C'est peut-être un peu étrange de le dire des années après et dans ces circonstances mais je m'en suis toujours voulu de n'avoir fait aucun effort auprès de toi, de ses amis. J'avais l'impression que ni rien ni personne ne comptait plus à ce moment-là, mais j'avais tort. J'espère que ça a été pour toi après en tout cas, mais je vois que tu m'as l'air de t'en sortir très bien, je suis contente pour toi. » Elle sourit de nouveau. Pourtant elle était étonnée d'elle-même : ces mots, elle ne pensait jamais les dire. Mais Clara avait désamorcé quelque chose, sans le savoir. « C'est vrai que ce n'est pas du tout agréable, j'avais en partie choisi de partir à Londres pour fuir Brisbane... Mais le pire reste mes parents. » Elle eut un petit rire, et un geste de la main, comme pour dire allons, passons à autre chose, pour cacher son trouble. « Encore quelques phrases et ça va se transformer en séance de psy, mais bon, j'imagine que dans ton métier tu es habituée ! » Avec un petit effort, elle essaya de ramener son attention sur le sujet principal de cet entretien. Une chose était certaine : la sensibilité de Clara, qu'elle ressentait, la rassurait, car elle était certaine que celle-ci comprendrait alors la valeur de son engagement et serait intéressée par ses projets. « C'est un très bon départ de former les profs, vous faites ça comment ? Il y a un psy référent aussi, ou pas ? Ça peut être intéressant de s'associer avec lui, et de bien le former si besoin ? »
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Message(#)No remedy for memory / Clara EmptyJeu 25 Jan 2018 - 0:04

Dès que Leena commence à aborder le sujet, il devient évident pour Clara qu’Adam ne restera pas coupé loin de cette conversation. Elle avait voulu épargner à son invité d’avoir à déballer des souvenirs douloureux en traitant du sujet elle-même, elle ne voulait pas la mettre dans une position délicate, ce rendez-vous est professionnel, pourquoi ressasser ce fait personnel et douloureux ? Mais, si c’est elle qui l’introduit, alors pourquoi ne pas répondre. Oui, depuis tout ce temps, le petit Adam Scofield était dans ses pensées. Oui, elle avait pensé à la difficulté de revenir dans un endroit où les gens connaissent une façade vraiment douloureuse et censée être privée de votre vie. Oui, elle se doute qu’il n’est pas facile de garder la face quand une personne l’identifie dans la rue, ou en lisant son nom. Clara s’en rendait compte, parce qu’elle-même pendant des années avaient été la copine du disparu, jusqu’à ce que ça s’estompe, que son entourage change sans savoir ce qui était arrivé, ou son lien dans cette affaire. « Oui... C'est gentil de dire ça. C'est rare... Enfin. » Qu’elle confesse, Clara reste stoïque. Pour elle, c’est naturel. L’empathie, c’est important. « Ça me fait plaisir en tout cas, de voir qu'il n'est pas oublié. [… ] J'espère que ça a été pour toi après en tout cas, mais je vois que tu m'as l'air de t'en sortir très bien, je suis contente pour toi. » Elle esquisse un sourire. De son côté, il n’y avait jamais eu de rancœur sur le fait qu’elle n’ait pas été consultée par Leena au moment de la disparition. Clara enfant avait géré ça de son côté, sans être sous le feu des projecteurs et ça lui convenait très bien comme ça. Elle savait déjà à cet âge que le manque d’intérêt pour sa personne n’était pas une mauvaise chose, juste que chacun doit gérer son deuil à sa façon. « Tu sais, je ne pense pas que ce soit nécessaire de t’en vouloir pour ça. Tu avais ta peine, et je pense que, de devoir la partager avec d’autres personnes qui n’étaient pas aussi proche que toi de lui l’aurait minimisé, ou t’aurais empêché de l’exprimer correctement. J’ai géré la mienne à ma façon, maintenant, la vie a continué. » Triste constat. Mais, Clara veut dire que le temps a fait son œuvre, il a rendu la chose moins difficile et leur a à tous donné la force de continuer à vivre avec cette cicatrice. « Encore quelques phrases et ça va se transformer en séance de psy, mais bon, j'imagine que dans ton métier tu es habituée ! » Que Leena ajoute en essayant de rire, elle n’a pas tort, Clara se sent bien philosophe sur le moment, mais on peut appeler une déformation professionnelle. « Je ne te cache pas que, j’ai pas assez poussé les études pour traiter correctement ces sujets là. » Qu’elle avoue sans honte avec autodérision, ce qui a pour effet d’alléger l’atmosphère. Leena s’empresse de poursuivre, de traiter d’un autre sujet, celui pour lequel elle est venue. « C'est un très bon départ de former les profs, vous faites ça comment ? Il y a un psy référent aussi, ou pas ? Ça peut être intéressant de s'associer avec lui, et de bien le former si besoin ? » Elle hoche la tête. Leena ne doit pas savoir que les lycées australiens n’ont pas autant de budget pour mettre tout ça en place. « On se réunit une fois par mois, où je note les élèves qui semble en difficulté, on en parle avec les professeurs et je me met en charge de les rencontrer. On tente de comprendre ce qui ne va pas, de faire réagir. » Qu’elle explique, avant de sortir de ses dossiers quelques photos. « L’an dernier, nous avons tenu une journée dédié au harcèlement, avec beaucoup de prévention, des temps d’écoute, des diffusions de court-métrage et on a mis en place une boite au lettre où les élèves peuvent dénoncer ce qu’ils voient anonymement. C’est maigre mais, c’est tout ce que nos moyens nous permettent de mettre en place. Comme j’ai dit, c’est encore très nouveau comme problème de société. Enfin, le fait qu’on y remédie enfin. ».
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Message(#)No remedy for memory / Clara EmptyDim 28 Jan 2018 - 23:24

La vie a continué. Sans le vouloir, Clara venait de prononcer une phrase qui avait touché Leena un peu trop en plein coeur, et elle dut faire tous les efforts du monde pour ne pas laisser les larmes lui monter aux yeux. C'était un tout : remuer le passé, retrouver Clara, se remémorer sa petite tête blonde aux côtés de celle d'Adam, évoquer la disparition, lui avouer ses regrets, entendre de tels mots — adorables et apaisants — de la bouche de Clara, et puis, ça. La vie qui continue, qui reprend ses droits, après n'importe quel drame. Le monde qui ne s'arrête pas de tourner. Pour personne. Le temps qui passe et panse les blessures et arrive même à faire oublier un beau matin tout le chagrin et toute la peine, tout le désespoir du monde. En effet, la vie avait bien continué ; Leena aurait été bien mal placée pour dire le contraire, au vu de son parcours, de ses voyages, de la façon dont elle s'était lancée tête baissée dans sa vie tandis que ses parents s'agrippaient aux souvenirs, bloqués des années en arrière, chacun à sa façon. Mais c'était une façon de continuer comme une autre — refuser d'accepter la vérité et se battre, baisser les bras et boire, après tout, chacun sa bataille. En réalité, et c'était ce qui soudainement broyait le coeur de Leena, la seule personne pour qui la vie n'avait pas continué, c'était Adam. Jusqu'à preuve du contraire ! aurait hurlé sa mère, scandalisée. Mais Leena n'avait jamais eu cet espoir. Elle releva les yeux vers Clara, ravalant ses émotions, lui offrant un petit sourire triste. « Merci. » Pas besoin de s'exprimer d'avantage sur le sujet : tout est dit, elle sait qu'elles se comprennent.

Quelque part, maintenant que l'abcès était crevé, Leena se sentait un peu plus libérée et à son aise pour aborder le sujet premier qui l'avait amenée jusqu'ici. Machinalement elle remit une mèche de cheveux derrière son oreille, changea de position, tira sur le bas de sa jupe. Comme Clara abordait le coeur du sujet, Leena l'écouta avec attention. Cependant, elle ne put pas retenir sa surprise et fit les grands yeux quand Clara expliqua que c'était une fois par semaine, puis elle hocha la tête, prenant un peu plus conscience des choses. Elle ne s'était pas rendue compte combien le harcèlement était un sujet beaucoup plus étudié en Angleterre, et pour lequel les écoles et les établissement accordaient plus de personnel, plus de moyens. Elle se sentit soudain un peu idiote de n'y avoir pas pensé avant. « Oh... C'est vrai que je ne m'étais pas figurée les différences entre l'Angleterre et nous. » Elle eut un petit sourire d'excuse. Néanmoins ses idées allaient bon train, et elle avait sorti son petit carnet pour notre deux trois idées. « C'est une excellente initiative cette journée en tout cas, c'est peu mais c'est déjà ça, ça permet au moins une occasion de s'exprimer pour ceux qui le veulent. Ça a donné quoi, jusqu'à maintenant ? Est-ce que tu as été confrontée à des aveux particuliers, des cas qui méritaient que l'on se penche dessus ? Et les élèves ont réussi à discuter, tu as trouvé qu'il y avait de l'échange ? C'est une très bonne idée les court-métrages, il n'y a rien de mieux pour interpeller et faire réagir. Je m'en suis déjà servie, et pendant un moment on avait aussi une troupe de théâtre qui jouait des scènettes de la vie quotidienne pour mettre en situation le harcèlement. C'était interactif, les élèves pouvaient ensuite intervenir, demander à tel ou tel personnage de changer son comportement. Ça peut être une idée pour la suite... Mais il faut des moyens. » On en revenait toujours au même point, et Leena avait bien compris ce qui retenait le lycée. « Tu as un bon contact avec les profs ? Ils semblent à l'écoute des élèves ? » Elle réfléchissait en même temps à la meilleure manière d'étoffer leurs moyens d'action. « Tu penses que le lycée accepterait si les journées de prévention harcèlement étaient développées, mais uniquement avec des interventions de bénévoles ? Ça ne leur coûterait rien, on utiliserait juste les locaux. Ce serait un bon compromis, non ? » Il y avait tant à faire, se dit-elle en reposant son stylo et en attendant l'avis de Clara. La tâche lui semblait soudainement bien plus colossale qu'au premier abord.
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Message(#)No remedy for memory / Clara EmptyMar 30 Jan 2018 - 0:11

Triste constat qu’elle se prend à exposer. Oui, de l’eau a coulé sous les ponts et la vie a continué. Clara a appris à panser ses blessures, à vivre avec ce qu’il s’était passé et aujourd’hui, ce n’est que quand un fantôme du passé intervient pour lui remettre en mémoire les évènements qu’elle se prendre à regretter le petit garçon, à se demander ce qui lui est vraiment arrivé, ce qu’il aurait pu devenir. Derrière ce constat très accablant, se cache malheureusement la réalité. Le temps atténue la douleur. Face à Leena, elle se prend à être coupable de ses propos, d’avoir avancé, non pas oublié mais d’avoir su évolué et compartimenté ce qui était arrivé. Elle se sent coupable, parce que l’évènement est horrible et ne doit pas être effacé comme une marée détruit les châteaux de sable. Mais la conversation entre les deux jeunes femmes tournent. C’est un silence d’abord, durant lequel elles se comprennent mutuellement, captent les sentiments de l’autre et c’est un retour aux moutons, brusque, mais c’était là le but originel de cette rencontre. « Oh... C'est vrai que je ne m'étais pas figurée les différences entre l'Angleterre et nous. » Clara n’était jamais allée là-bas. Elle ne peut qu’adresser un sourire de compassion face à la réalisation qu’à Leena. Elle ignore tout de comment ça se passe là-bas et n’attend que plus d’explication. Pour le moment, ses entreprises sont minces, mais ça ne fait que très de peu depuis que la société a pris conscience de ce qui se joue dans les cours de récré. « C'est une excellente initiative cette journée en tout cas, c'est peu mais c'est déjà ça, ça permet au moins une occasion de s'exprimer pour ceux qui le veulent. […] Ça peut être une idée pour la suite... Mais il faut des moyens. » Et bien, Leena a des questions. Au fur et à mesure qu’elle parle, Clara prend en note, elle l’écoute attentivement, griffonnant dans son cahier les points relevés, les réponses, les sujets que la conversation l’inspirait à traiter plus tard. « Tu as un bon contact avec les profs ? Ils semblent à l'écoute des élèves ? » Elle tend la tête sur le côté, ce qui indique que c’est un ni oui, un ni non. Juste que cela dépend du professeur en question. Il en existe encore qui pense que c’est parfaitement naturel qu’il y’ait des têtes et des pieds. « Tu penses que le lycée accepterait si les journées de prévention harcèlement étaient développées, mais uniquement avec des interventions de bénévoles ? Ça ne leur coûterait rien, on utiliserait juste les locaux. Ce serait un bon compromis, non ? » Et bien, en parlant avec Leena, elle se rend compte qu’il reste encore beaucoup de travail et que ses initiatives restent des tentatives timides. « Si cela permet à l’école de ne pas dépenser un sous, je suis sûre que ça ravira le directeur. Après, je suis d’opinion que, si on veut entreprendre quelque chose, il faudra de toute façon du budget. » Parce qu’au dela des bénévoles. Il faut un projet concret, du travail, un véritable acte de sensibilisation. « Pour ce qui est des journées, je dois dire qu’elles n’ont pas révélé de cas grave de harcèlement. On n’a reçu que très peur de lettre au final, mais les élèves sont au courant qu’ils peuvent venir me voir. L’équipe pédagogique et moi-même essayons d’être présent au maximum, seulement, tout dépend des professeurs, certain prennent plus au sérieux la chose que d’autre. Pour l’année prochaine, j’avais songé à confier un projet de plus grande envergure aux élèves, à justement la création d’un court métrage et des débats en classe. Malheureusement, on ne sait jamais ce que les élèves ont en tête et ce qui les fait réagir. »
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Message(#)No remedy for memory / Clara EmptyLun 12 Fév 2018 - 18:36

Le problème dans ce genre de situation restait toujours le même : l’apport de fonds. Et ce n’était jamais une mince affaire, aussi noble que soit la cause. Leena avait bien sûr quelques idées, glanées ça et là quand elle était investie dans l’association londonienne. Mais il y avait quelque chose de plus simple là-bas, de plus spontané aussi, lancer des campagnes de financement, faire des flash mob, solliciter les associations plus ou moins liées à la cause ; il lui semblait alors que tout était plus facile et plus envisageable. Ici à Brisbane, principalement parce qu’elle ne connaissait pas assez les réseaux et les rouages associatifs, elle avait tout d’un coup l’impression de faire face à un mur infranchissable. Notant au fur et à mesure des points dans son carnet, Leena essayait de garder la tête froide. Chose pas forcément aisée quand le sujet d’Adam avait fragilisé ses pensées — mais la présence de Clara, liée à son frère, prenait curieusement la place du petit poids qui équilibre la balance. « Oui, tu as raison. Malheureusement, je ne sais pas trop comment ça marche par ici les récoltes de fonds pour ce genre de projet… Tu t’y connais toi ? J’avais songé à prendre rende-vous avec des associations nationales contre le harcèlement, mais je ne me sens pas trop à l’aise de leur soutirer des informations pour monter ensuite un truc indépendant. » Elle s’installa un peu plus en arrière dans son fauteuil, dans une attitude plus propice à la réflexion. Seulement alors elle se rendit compte de l’étrangeté de la chose : se retrouver dans un lycée à Brisbane après toutes ces années pour parler de harcèlement scolaire, n’était-ce pas particulièrement ironique ? Elle entendit au même moment la sonnerie qui marquait la fin d’une période, et les souvenirs qui s’y associèrent n’étaient pas particulièrement joyeux. Ses années lycées s’étaient mieux passées que son collège à Samsonvale, c’était indéniable, mais cette période de sa scolarité n’était clairement pas celle qu’elle aimait à se souvenir. Il lui semblait que les insultes et les petite grosse et sale moche qu’on lui avait balancé à l’époque s’étaient gravées à l’encre indélébile dans chaque cellule de sa chair. Aussi ces couloirs, ces salles de classe alignées les unes à côté des autres, ces bureaux, ces bruits de pas et de conversations et de rire, tout cela formaient une boule plutôt désagréable que Leena s’efforça de laisser de côté. « C’est plutôt agréable à entendre en tout cas, s’il n’y a pas eu de problèmes. Et si il y a déjà toi et un petit groupe des profs qui sont sensibilisés au sujet, c’est un moindre mal ! » Elle sourit d’un air encourageant, même si le fait de s’entendre dire que certains professeurs ne prenaient pas le sujet au sérieux avaient toujours le don de l’énerver. Pourquoi le corps enseignant s’acharnait-il à refuser de prendre certains problèmes à bras-le-corps ? « C’est une super idée le court-métrage ! Si c’est bien encadré je pense que ça peut servir à la fois de moyen d’expression et d’éveil au sujet. Tu as déjà organisé des évènements de la sorte, même sur d’autres thématiques ? » Elle se rendit compte qu’elle ne savait pas forcément exactement en quoi consistait le rôle de Clara au sein de l’établissement, car selon les pays les tâches pouvaient varier. « Je ne sais même pas exactement ce en quoi tes journées consistent » s’excusa-t-elle gentiment, curieuse d’en apprendre plus sur un engagement qui l’intéressait particulièrement.
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Message(#)No remedy for memory / Clara EmptyJeu 15 Fév 2018 - 20:45

Le constat est là. Si on veut apporter un travail de qualité, il faut du budget, il faut pouvoir payer des personnes compétentes, du matériel adapté et investir parce que concrètement, on n’a jamais rien sans rien dans ce monde. Malheureusement, le directeur de l’établissement ne semble pas être de son avis et en attendant d’avoir de quoi le convaincre du bienfondé de l’initiative, Clara en est rendu à trouver d’autres solutions pour son projet. C’est blasant, mais c’est une partie de son travail que de s’adapter au manque de fond public. Elle tâche de ne pas être trop décourageante face à la bonne volonté de Leena. « Oui, tu as raison. Malheureusement, je ne sais pas trop comment ça marche par ici les récoltes de fonds pour ce genre de projet… Tu t’y connais toi ? J’avais songé à prendre rende-vous avec des associations nationales contre le harcèlement, mais je ne me sens pas trop à l’aise de leur soutirer des informations pour monter ensuite un truc indépendant. » La tête de six pieds de long qu’elle arbore en dix longs sur le fait que, non, elle ne sait pas comment s’y prendre. Lorsqu’il s’agit de voyage scolaire, de célébrations qui sont liés à l’amusement des élèves, il y’a toujours l’opportunités de les voir préparer de quoi lever des fonds, que ce soit avec un match amical avec une autre team, ou bien une vente de gâteau. Seulement, si le projet ne les implique pas directement. C’est plus compliqué. «  Lors de projet, on essaie de faire participer les élèves à la collecte. Je dois dire que là, si on doit faire dans leur investissement, je serais plutôt dans l’optique de lancer une page de financement participatif dont je peux parler dans la newletter aux parents. Mais ça, c’est jamais très sûr que ça fonctionne. » Non, parce que bizarrement, s’il existe une partie de la population absolument pas préoccupée par les activités des élèves, c’est bien les parents qui préfèrent foutre leur thune pour acheter des iphone à mille dollars à leur tête blonde plutôt que de les éduquer à être respectueux. Mais ça, c’est un débat qui n’a pas lieu d’être dans la conversation. « C’est plutôt agréable à entendre en tout cas, s’il n’y a pas eu de problèmes. Et si il y a déjà toi et un petit groupe des profs qui sont sensibilisés au sujet, c’est un moindre mal ! » Oui, en effet. Seulement, il reste nombreux les professeurs à penser qu’ils n’ont pas à traiter de ce problème, à ne pas voir qu’ils sont les premiers spectateurs. Elle a beaucoup de conversation où elle tente de leur faire savoir ce rôle, malheureusement, ça ne prend pas. Eduquer, c’est long. « C’est une super idée le court-métrage ! Si c’est bien encadré je pense que ça peut servir à la fois de moyen d’expression et d’éveil au sujet. Tu as déjà organisé des évènements de la sorte, même sur d’autres thématiques ? » Elle hoche la tête. Ce qu’il y’a avec les idées, c’est que c’est facile de les avoir mais qu’il est plus compliqué de les mettre en pratique. Parce que y’a pas le temps. Pas les moyens. La hiérarchie qui ne veut pas. Qu’elle n’est pas celle qui décide. Tout ça. « Je ne sais même pas exactement ce en quoi tes journées consistent » avoue finalement Leena, ce qui interrompt Clara dans ses pensées. A vrai dire, c’est assez simple. En Angleterre aussi, ils doivent en avoir des conseillers. « C’est moi qui écoute les élèves, quand ils ont un soucis, des problèmes personnels. Je les aide à se construire un futur, à appréhender l’avenir, et je les encadre surtout. Je me retrouve beaucoup à devoir gérer les têtes brûlées. C’est ça mon job, basiquement, je suis là pour jouer les guides. » Et c’est très ironique, compte tenu du fait que Clara n’a aucune idée de ce qu’elle fait bien qu'elle soit en train de faire en sorte que Leena ne se rende pas compte que Clara est sûrement perdue dans la vie que ses élèves. Evitant donc que la brune la relance à ce sujet, elle finit par taper dans ses mains en proposant "Bon, et si on faisait une liste d'idée pour commencer, histoire de voir ce qu'on peut proposer et ce qui relève de l'utopie?" Qu'elle propose avant qu'elles ne se mettent toutes les deux à collaborer sur le projet à venir.
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