Le soleil se faisait timide sur Brisbane aujourd'hui alors que Izzie s'était réfugiée à l'arrière de son petit salon de tatouage pour fumer un joint à l'abri des regards. On était sûrement quelque part dans le milieu de l'après-midi et Izzie avait ouvert aux alentours de 15h. Elle avait un client vers 21h mais c'était à peu près tout, elle avait profité de ce moment de libre pour venir nettoyer et chiller un peu ici puis peut-être choper quelques clients au passage. Les fêtes de Noël étaient finies, les ados du quartier avaient du avoir leur fric de leurs parents et certains comptaient sûrement se rebeller un peu en utilisant le dit fric pour se faire encrer la peau pour toujours. Izzie avait une clientèle relativement jeune car elle cartonnait sur Instagram avec ses 60 000 followers. Les milennials de la ville se précipitaient chez elle, lui faisant acquérir ainsi une réputation que beaucoup de jeunes tatoueurs lui enviaient. Elle avait le contact facile avec les clients, et sa coolitude y était clairement pour quelque chose. Les gens retenaient rapidement son nom et revenaient toujours, même parfois juste pour lui dire bonjour. Pour passer un moment avec elle. Ce genre de choses toutes simples qui lui donnaient parfois l'impression d'avoir une existence qui avait du sens. Izzie était quelqu'un de familier, du genre à vous prendre par le coup au bout de trente secondes de discussion et a vous affublé de tout un tas de petits surnoms. C'était une bonne commerçante et ses prix étaient finalement correct comparé à son amour pour l'argent facile. Son joint entre ses lèvres elle pensait à la prochaine petite opération marketing qu'elle pourrait faire pour se rapport des clients lorsqu'elle entendit la petite clochette de la porte d'entrée s'agiter, annonçant l'arrivée d'un client. Bingo ! Elle adorait voir les clients venir tout seuls à elle, prospecter, c'était pas vraiment son truc. Heureusement qu'elle portait ses oeuvres d'art sur son corps, car parfois elle n'avait vraiment pas le courage d'expliquer à quel point elle aimait ce qu'elle faisait et qu'elle y mettait du coeur. Izzie se leva de son énorme fauteuil de cuir et passa le rideau de perle qui la séparait de la pièce principale du salon. L'intérieur du salon était plutôt cosy, une collection de casquette sur le mur, des magasines Vice un peu partout et un écran branché sur MTV en sourdine. Des dessins de tatouage toutes sortes encadrées sur les murs. On était à mi-chemin entre la chambre d'un mec et d'une galerie d'art, l'équilibre parfait où un mélange d'odeur de weed et de yankee candle prenait rapidement au nez, occasionnant même parfois des migraines chez certains de ses clients. Une magnifique brune se tenait devant elle, l'air franchement un peu paniqué. Izzie lui adressa un sourire, toujours son joint à la main et s'approcha d'elle. "Salut beauté, qu'est-ce que je peux faire pour toi ?"

Ton tatouage te faisait mal. Cela faisait quelques jours que c’était le cas et tu pouvais voir ta peau rougir autour de ce dernier mais au début tu n’y avais pas réellement prêté attention. Vu le stress sous lequel tu étais en ce moment en attendant les réponses pour ton diplôme et en préparant tes prochaines auditions, ton tatouage était le dernier de tes soucis. Tu t’étais dit que cela passerait aussi vite que c’était arrivé. C’était bien entendu une erreur que de penser une chose pareille. Quelques jours plus tard la situation s’était empirée, du moins à tes yeux. Ce tatouage, tu l’avais fait à Sydney, en sortant de la clinique spécialisée et il avait une signification toute particulière pour toi. Tu racontais à la plupart des gens que c’était une lubie d’adolescente et que cela ne voulait rien dire de spécial, que tu avais juste envie d’un tatouage mais ce n’était pas vrai du tout. Toutefois, tu n’avais nullement envie de partager ton épisode anorexique avec les personnes qui composaient aujourd’hui ton entourage. Ne sachant pas réellement quels tatoueurs étaient doués et en lesquels on pouvait avoir confiance, tu avais contacté une amie à toi de l’université qui s’était fait tatouée dernièrement pour lui demander où tu pouvais te rendre. Certes, il aurait peut-être fallu courir à l’hôpital mais tu y avais passé bien assez de temps et tu espérais que ce n’était rien de grave. Cela faisait moins d’un an que tu avais ce tatouage mais tu pensais qu’il s’était bien cicatrisé. Une fois une adresse rentrée dans ton téléphone, tu ne tardais pas à te mettre en route vers l’antre de ce tatoueur. Cela te faisait toujours bizarre de rentrer chez un tatoueur. Si tu n’avais pas vécu ce que tu avais vécu, il ne te serait jamais venu à l’idée de te faire un tatouage, toi qui détestes te faire du mal. Mais tu avais fini par passer le pas, sans regret. Tu avais espéré ne pas avoir à revenir dans un tel endroit mais la vie était drôlement faite. Une fois arrivée à l’adresse indiquée, tu garais ta voiture avant de te diriger vers la devanture qui t’intéressait. De dehors, tu trouvais que cela ne payait pas de mine mais apparemment c’était l’un des meilleurs salons de la ville, l’un des plus en vogue du moment. Tu haussais donc les épaules avant de passer la porte et tu ne pus t’empêcher d’avoir un petit haut le cœur. Il y avait des dizaines d’odeurs qui se mélangeaient et tu mis quelques secondes à t’y habituer. Décidant de ne pas perdre de temps, tu te présentais au comptoir où une femme attendait en train de fumer ce que tu identifiais comme un joint vu l’odeur qui s’en dégageait. Typique … Ou du moins c’était en accord avec l’image que tu avais de ces endroits. « Salut beauté, qu'est-ce que je peux faire pour toi ? » Beauté … Tu avais déjà entendu ces mots prononcés par des hommes à ton égard, de bien mauvais dragueurs mais jamais par une femme. Tu doutais qu’elle était en train de te draguer toutefois. Levant ton poignet, tu le posais sur le comptoir. « Bonjour. Je viens vous voir car je me suis faite tatouée en mars l’année dernière et depuis quelques jours mon tatouage fait des siennes. Il est devenu rouge et me gratte. Je voulais voir si c’était grave et si je devais vraiment aller à l’hôpital. » Tu ne pus t’empêcher de prier pour que tu n’aies pas à mettre tes pieds dans cet hôpital où tu allais déjà régulièrement pour voir un psychiatre.

À l'approche de sa potentielle cliente, Izzie éteint son joint dans le cendrier et le pose dedans. Elle le rallumerait plus tard, inutile d'incommoder la jolie brune qui se tenait devant elle avec une mine plutôt paniquée. Elle se doutait que ça ne donnait pas forcément une bonne première impression à certaines personnes, mais tant mieux, ça faisait le tri. Ça lui évitait d'avoir des clients fermés d'esprit qui ne comprendrait pas son délire, sa vibe, ce qui faisait d'elle une excellente tatoueuse en plus d'une artiste à part en entière. Mais soit, là en l'occurence, au vue de la demande, Izzie préférait avoir les mains libres. Elle ne perdit pas de temps pour lui annoncer le problème ce qui plut à Izzie, elle détestait perdre son temps. Il s'agissait donc d'un tatouage qui s'infecte, Izzie fronce les sourcils et se redresse un peu. Elle déteste reprendre la merde des autres, elle tatouait depuis ses quatorze ans mais elle avait toujours fait attention à ce qu'elle faisait, jamais un de ses clients n'avait rencontré le moindre soucis et elle avait du mal à croire que des gens manquent de sérieux quand il s'agissait de tatouer la peau de quelqu'un à vie. La jeune brune posa son poignet sur le comptoir et Izzie se pencha dessus, elle ne voulait pas toucher tout de suite, pour le moment elle était encore au stade de l'observation, tentant de comprendre ce qui avait bien pu se passer. Le tatouage était très joli ceci dit, et elle aurait bien aimé en connaitre la signification. Il y avait toujours une histoire particulière derrière chaque tatouage, Izzie pensait même que les tatouages matérialisaient les grandes lignes de la vie d'une personne. D'où l'intérêt d'être attentif aux explications d'un client qui venait ancrer sa peau. "Mais non tu ne vas pas aller à l'hôpital..." la rassura Izzie. "Enfin ça dépend, tu l'as fais y'a combien de temps et surtout où ?" Le but n'était pas de la faire paniquer, si le tatouage était récent, il était parfaitement normal qu'il gratte un peu et forme des boutons, ça arrivait sur bien des peaux ça faisait partie du processus de cicatrisation, ça pouvait être très chiant et douloureux mais normal ça passait. Izzie en profita pour détailler un peu la tenue de la jeune femme qui se tenait devant elle. Un vieux réflexe qu'elle avait adopté au fil des années, une vieille habitude qui était venue en même temps que ses pulsions de kleptomane. L'apparence en disait généralement long sur les gens et Izzie parvenait à savoir en un coup d'oeil si elle pouvait voler ou pas la personne qui se trouvait en face d'elle. Là en l'occurence, évidemment, elle ne ferait rien pour la simple raison qu'elle ne volait jamais ses clients. Ils se chargeaient déjà de la payer et ça lui suffisait.

Tu n’avais jamais été le genre de fille à paniquer au moindre petit problème, à la moindre petite douleur. Mais avec ton tatouage, tu commençais à être un peu inquiète. Tu avais pensé que cela passerait tout seul dans un premier temps mais quand cela n’avait pas été le cas, tu avais préféré te rendre chez un tatoueur. Après tout, ce n’était pas comme si ce tatouage était nouveau, tu l’avais fait en mars de l’année dernière donc il ne devrait plus s’infecter aujourd’hui. Vu que c’était ton premier tatouage et que tu n’avais pas eu de précédent avant aujourd’hui, tu ne pouvais t’empêcher de paniquer un peu. D’où ta présence dans ce salon de tatouage assez étrange dans lequel tu n’aurais peut-être pas mis les pieds si une amie à toi ne te l’avait pas recommandé. Une fois à l’intérieur, tu ne manquais pas de noter l’odeur de joint ambiante qui te fit te boucher le nez quelques instants. Fumer ne t’avait jamais attiré, peu importe ce qui se trouvait dans la cigarette ou le joint. Mais tu laissais les autres faire comme bon leur pensait. Tu étais venue dans un seul but et tu ne tardais pas à évoquer ce but avec ton interlocutrice qui tu l’espérais était la tatoueuse et pas la secrétaire s’il y en avait une sinon tu devras réexpliquer ton problème encore une fois. La femme en face de toi regarda ton tatouage avec attention avant de te demander : « Mais non tu ne vas pas aller à l'hôpital... Enfin ça dépend, tu l'as fais y'a combien de temps et surtout où ? » Ouais, l’hôpital tu préfèrerais éviter … Tu savais au fond que ce n’était pas vraiment comparable d’aller à l’hôpital voir un psychologue qui t’aidait à ne pas retomber dans des travers anorexiques et aux urgences pour te faire traiter ton tatouage mais bon, tu préfèrerais éviter tout de même. Parler de ton tatouage n’était pas quelque chose dont tu avais l’habitude vu qu’il était discret, on te posait peu de questions mais il allait certainement falloir que cela change. « Je l’ai fait en mars 2017. Jusqu’à aujourd’hui je n’ai eu aucun problème. J’habitais à Sydney avant, je l’ai fait dans un salon qui était recommandé par des amis à mes parents. » Dis-tu en haussant les épaules. Quand tu avais dit à tes parents que tu voulais te faire tatouer, ils avaient essayé de t’en dissuader sans succès avant de se dire que si tu allais réellement le faire, il valait mieux que ce soit dans de bonnes conditions. Ils avaient donc demandé conseil à des amis à eux qui s’étaient fait tatouer. « Vous êtes tatoueuse depuis longtemps ? » Demandas-tu à la jeune femme. Voilà un métier auquel tu n’avais jamais pensé de ton côté. C’était un métier artistique certes mais tu n’avais jamais été des plus douée avec tes mains. Toi c’était la comédie qui te faisait viber.

Prête à s'improviser une nouvelle vocation, Docteur Izzie était toute ouïe, mais la réponse de la jeune fille lui fit froncer les sourires. Elle était bien curieuse de savoir quel était le con qui avait produit un si mauvais travail alors qu'elle avait sûrement du mettre le prix. Izzie ne s'attendait pas du tout à ce que la jolie brune lui apprenne qu'elle avait fait son tatouage il y a bientôt un an et sa surprise se lut sur son visage. Elle ouvrit des yeux ronds et eut un petit mouvement de tête qui montrait qu'elle comprenait maintenant son inquiétude. "Ah ouais quand même..." Elle ne voulait pas la faire paniquer, vraiment pas, mais la situation était étrange tout de même. Izzie lâcha son poignet car elle n'était plus très sûre de vouloir y toucher, elle posa son index sur son menton en signe de réflexion avant de croiser les bras sur sa poitrine en poussant un soupir. Cette pauvre poupée avait besoin de réponses rapidement et il appartenait à Izzie de faire un bon diagnostic pour mettre fin à ses inquiétudes. Peut-être que la meilleure solution était de lui conseiller d'aller voir un médecin ? Izzie poussa de nouveau un soupir avant de déclarer. "Bon écoutes, je préfère que tu prennes rendez-vous en urgence avec un dermato. Je suis pas sûre d'être capable de faire quoique ce soit pour toi, je pense que c'est pas très grave mais c'est mieux que tu consultes dans le doute. Il va sans doute te donner une crème et tout va rentrer dans l'ordre. En attendant, essaie de pas trop toucher." la conseilla t-elle avec un sourire plein de bienveillance. Elle était désolée de ne pas pouvoir plus l'aider mais elle savait, même si parfois Izzie pouvait être immature et irresponsable, qu'en cas de problème de réactions allergiques lorsque le tatouage avait déjà un moment, le dermato était la meilleure solution. "Pour me faire pardonner, étant donné que je t'ai pas été très utile, si jamais t'as de nouveau envie de te faire tatouer et que tu t'es bien remise de cette mésaventure, hésite pas à venir te faire tatouer ici je te ferais un prix." Parce que Izzie aimait l'argent mais elle savait aussi se montrer commerçante, elle avait négocié de bons petits coups marketing de la sorte et elle en flairait un bon. La nana avait l'air aisée et le bouche à oreille devait bien fonctionner de son côté, elle avait sûrement un tas de petites copines branchées qui devaient avoir des tableaux Pinterest de tatouages chopés sur Tumblr. Un tas de futures clientes potentielles qui trouverait sûrement hyper cool de se faire tatouer par une tatoueuse super connue sur instagram comme Izzie. Elle savait que dans son cas, les filles de la ville aimait bien venir chez elle et poster ses oeuvres sur les réseaux sociaux, à croire que le salon d'Izzie était un incontournable de Brisbane bien qu'il empestait la weed et que la tatoueuse star était un peu timbrée. Après tout elle tenait un salon de tatouage, pas un service d'urgence. Sa potentielle future cliente lui demanda alors depuis quand elle faisait ce métier, un énorme sourire se dessina sur les lèvres de la jolie métisse. "Légalement ou illégalement ?" dit-elle avec une lueur de malice dans les yeux. "J'ai commencé à 14 ans, donc ça fait environ douze ans." Elle éclata de rire, un peu comme une maniaque, sa cascade de cheveux s'agitant dans tous les sens. "Mon dieu ça me rajeunit pas tout ça. Et toi tu fais quoi ? T'as d'autres tatouages ?" s'amusa t-elle en prenant son visage entre ses mains, les deux coudes sur la table. Elle adorait faire de nouvelles rencontres et cette jolie petite brune avec son visage poupon n'avait pas l'air d'être une badass tatouée. Izzie adorait les contradictions et on dirait bien qu'une était rentrée dans son magasin.

Il n’avait jamais été question pour toi de te faire tatouer contre l’avis de tes parents et dans un salon lugubre. Tu avais fait ce tatouage parce que tu avais besoin de te rappeler de cette épreuve. A la base, tu ne pensais jamais te faire tatouer, tu n’étais pas fanatique du concept alors tu avais veillé à le faire dans de bonnes conditions. Voilà pourquoi, le fait que ce tatouage se réveiller pour faire des siennes aujourd’hui n’avait rien de rassurant. Mais tu n’avais pas envie de te faire du souci pour rien voilà pourquoi tu te retrouvais aujourd’hui de nouveau dans un salon de tatouage. Et il ne fallait pas être un génie pour voir que tu n’étais vraiment pas dans ton élément. « Ah ouais quand même... » Tu levais les yeux vers la femme en face de toi. Dans le genre pas du tout rassurant, elle ne pouvait pas faire mieux. Tu savais que les problèmes liés au tatouage arrivaient la plupart du temps dans les mois suivant ce dernier mais ce n’était pas ton cas et la tatoueuse en face de toi ne semblait pas très rassurée de cette situation. « Bon écoutes, je préfère que tu prennes rendez-vous en urgence avec un dermato. Je suis pas sûre d'être capable de faire quoique ce soit pour toi, je pense que c'est pas très grave mais c'est mieux que tu consultes dans le doute. Il va sans doute te donner une crème et tout va rentrer dans l'ordre. En attendant, essaie de pas trop toucher. » Tu avales difficilement ta salive. Tu as du mal à croire que ce n’est pas grave, si ça ne l’était pas alors pourquoi ta peau était-elle rouge et urticante ? Dès que tu sortais de ce salon de tatouage tu allais aux urgences pour voir un dermatologue. Tu étais à la limite de la crise de panique, si tu devais encore attendre, tu allais réellement paniquer. Quand tu étais tombée dans ton anorexie, tu en avais eu conscience au tout début, un petit peu, tu aurais pu faire quelque chose mais le mal s’était répandu trop vite, tu avais besoin de ce corps de rêve pour percer, Janice te l’avait dit. Tu ne voulais pas recommencer dans le même engrenage cette fois. « Je … J’espère vraiment que ce n’est pas grave je … Je vais aller aux urgences. » Dis-tu simplement en laissant ta manche retomber sur ton tatouage. Mieux valait en cacher la vue, cela te permettait de l’oublier un petit peu même si la démangeaison était toujours là. « Pour me faire pardonner, étant donné que je t'ai pas été très utile, si jamais t'as de nouveau envie de te faire tatouer et que tu t'es bien remise de cette mésaventure, hésite pas à venir te faire tatouer ici je te ferais un prix. » Tu fis un petit sourire à la tatoueuse en face de toi. C’était gentil de sa part mais tu n’avais prévu aucun tatouage dans ton futur. Tu savais que beaucoup d’acteurs avaient des tatouages mais tu préférais garder ton corps à peu près vierge pour éviter de perdre une heure supplémentaire de préparation chaque jour de tournage pour les dissimuler. Enfin, si tu arrivais à tourner quelque chose un jour. Ton tatouage au poignet était petit et discret alors ce serait facile à dissimuler si les producteurs décidaient que c’était nécessaire. « Merci mais je n’ai pas prévu d’autres tatouages, je n’avais pas prévu de me faire tatouer un jour en vérité mais j’en avais besoin à ce moment là. » Dis-tu en haussant les épaules. « Tu t’appelles comment ? » Demandas-tu un peu brutalement à la femme en face de toi. Tu ne pouvais pas continuer à l’appeler la tatoueuse éternellement dans ton esprit. Tu ne pus t’empêcher de te montrer curieuse et de lui demander si elle faisait ce métier depuis longtemps. Après tout ce salon semblait avoir une bonne réputation et cela se gagne avec le temps. « Légalement ou illégalement ? J'ai commencé à 14 ans, donc ça fait environ douze ans. Mon dieu ça me rajeunit pas tout ça. Et toi tu fais quoi ? T'as d'autres tatouages ? » Illégalement … Cela ne te serait jamais venu à l’idée que des gens puissent faire ce métier illégalement. Mais tu aurais dû t’en douter. Tu savais que beaucoup te prenaient pour une naïve mais tu préférais juste suivre la loi, c’était plus simple pour toi. « Et ça vous plaît toujours ? » Parce que douze ans c’est long quand même, tu espérais que tu ne te lasseras pas de ton futur métier, quel qu’il soit. « Non, je n’ai pas d’autres tatouages, je n’ai rien d’autre à mettre sur ma peau pour toujours, rien d’important en tout cas. » Pour toi, il fallait qu’un tatouage ait une signification qui pourrait durer pour toujours pour se faire tatouer. « Et je viens de décrocher mon diplôme en journalisme mais je cherche à devenir actrice. » Et tu espères être en train de tenir ta chance.

Il faut l'avouer, Izzie est un peu déçue lorsque la jeune fille lui annonce qu'elle n'a pas prévue de faire d'autres tatouages pour le moment. Elle avait vraiment compté sur le fait qu'elle puisse le faire de la pub par le boucheà oreille en se faisant tatouer dans son salon. Elle ne sait pas comment font les gens qui résistent si facilement à l'appel de l'aiguille alors qu'à partir du moment où elle y avait goûté elle ne s'en était plus jamais passé. Elle présumait qu'un tas de gens pouvait faire sans car être tatoué relevait aussi d'une forte créativité mêlée à une personnalité affirmée, elle ne doutait pas que la jeune fille qui se tenait devant elle était de ceux-là mais elle avait simplement choisi de ne pas s'en recouvrir. Izzie hausse les épaules, un peu déçue et chope une carte de visite à côté du grand iMac qu'elle pose sur le comptoir. "Dommage, en tout cas si jamais tes copines ou tes copains ont envie de se faire tatouer, dis leur qu'ils viennent de ta part et je les arrangerai." promet la jeune métisse en lui adressant un sourire. "Je m'appelle Izzie. Et toi ?" Elle misait sur un prénom un peu hispanique, elle avait tout de la jolie latina. Izzie enviait ce genre de beauté femme-enfant, elle avait l'impression d'avoir grandi d'un coup et elle trouvait de plus en plus que ses trente ans se lisaient sur son visage mais elle faisait avec. Izzie était de ces femmes qui savaient qu'elle était plus qu'un simple physique surtout car elle s'épanouissait dans son art. La jeune femme en face d'elle était également une artiste puisqu'elle lui apprit qu'elle venait de décrocher un diplôme en journalisme mais qu'elle cherchait à devenir actrice. Izzie ne put s'empêcher écarquiller les yeux. "Ici à Brisbane ?" Elle avait du mal à croire qu'on puisse percer dans cette ville, sans doute car sa vision de Brisbane était totalement viciée par tous les malheurs qu'elle avait rencontré au fil de sa vie. Brisbane lui apparaissait être trop petite pour les grands talents, ce qui était en réalité une idée toute faite qu'elle avait puisque Brisbane regorgeait d'opportunités. Izzie n'avait juste pas encore eu l'occasion de comprendre l'étendue de ce qu'était capable de lui offrir son pays, elle qui rêvait des Etats-Unis... "Et ça se passe comment jusque là ? Tu comptes t'y prendre comment pour décrocher un oscar ?" Il n'y avait aucun mépris dans sa voix, bien au contraire, Izzie aimait rencontrer des gens qui avaient des rêves, des passions et qui faisaient tout pour les atteindre. C'était ce qui nous maintenait en vie après tout, l'espoir qu'un jour on puisse réaliser ses rêves... De pouvoir s'épanouir. Izzie savait qu'elle avait énormément de chance de vivre de sa passion et c'était ce qu'elle souhaitait à tout le monde. "Je te souhaite toute la réussite du monde en tout cas." rajouta Izzie avec douceur. Elle espérait juste que cette magnifique jeune fille ne se perdrait pas dans les méandres du succès qui pouvaient parfois mener à l'excès et aux mauvaises décisions. Mais elle avait l'air d'être une fille avertie, avec la tête sur les épaules. Alors après tout pourquoi pas... Qui ne tente rien n'a rien.

Tu ne manques pas de remarquer la déception dans le regard de ton interlocutrice quand tu lui avoues ne pas vouloir te faire tatouer de nouveau. Peut-être que ce sera le cas un jour, quand tu auras autre chose à immortaliser, à ancrer sur ta peau à jamais. Tu fais parti des gens qui ont besoin d’une réelle signification derrière un tatouage. Tu ne te vois pas te tatouer quelque chose juste pour le plaisir. Tu peux comprendre que la femme en face de toi voit ta peau presque vierge comme un canevas qu’il faudrait recouvrir mais ce n’est pas pour toi malheureusement. Tu n’as pas manqué de remarquer les différents dessins présents dans la salle d’attente, une chose est certaine, la femme en face de toi est douée. Et elle a l’ait gentille et rassurante. Tu avais eu besoin de ça pour te faire tatouer la première fois. Elle attrapa une carte de visite qu’elle te tendit en te disant : « Dommage, en tout cas si jamais tes copines ou tes copains ont envie de se faire tatouer, dis leur qu'ils viennent de ta part et je les arrangerai. » Tu hoches la tête. Tu peux bien faire ça. De toute manière c’est grâce au conseil d’une amie que tu avais atterrie ici alors tu pouvais bien continuer le bouche à oreille que semblait vouloir instaurer la propriétaire de ce salon de tatouage. « Je n’y manquerai pas. » Dis-tu en rangeant la carte de visite dans ton sac à main. Tu ne sais pas si tu en auras besoin, il suffira de donner le nom du salon et n’importe qui pourrait chercher sur Google où il se trouve et ce qu’il propose. Enfin, si le salon avait un site internet bien entendu. « Je m'appelle Izzie. Et toi ? » Mettre un nom sur le visage en face du tient est important. Izzie, c’est joli, un nom rempli d’insouciance à tes oreilles pour une femme qui devait l’avoir laissée derrière elle il y a longtemps. « Moi c’est Mia. » Dis-tu tout simplement pour te présenter. Tu ne sais pas vraiment pourquoi ni comment mais tu te retrouves à confier à Izzie ce que tu veux faire de ta vie, le rêve que tu poursuis. Certainement que tu ne la reverras jamais, ou alors par hasard alors tu peux bien prendre le risque. « Ici à Brisbane ? » Tu ne peux t’empêcher de sourire. Sa surprise est totale. Elle ne s’est jamais imaginée qu’on pouvait se lancer dans une telle carrière en Australie et pourtant, quand on cherche un peu, il y a pleins de belles choses à faire à Brisbane. Hochant la tête tu lui réponds : « A Brisbane d’abord, puis en Australie et peut-être un jour ailleurs. Mais il y a pleins de beaux projets à Brisbane. » Il fallait simplement pouvoir être casté pour un faire partie ce qui était une toute autre histoire. Mais tu étais prête à tout pour y arriver. « Et ça se passe comment jusque là ? Tu comptes t'y prendre comment pour décrocher un oscar ? Je te souhaite toute la réussite du monde en tout cas. » Le sujet de ta réussite future semble réellement intéresser Izzie. Tu te demandes si elle est sérieuse ou ironique dans sa question sur les Oscar. Ce n’est pas un but en soit pour toi, tu as juste envie de faire une carrière dans le cinéma, de pouvoir jouer la comédie toute ta vie, le reste ne sera qu’un plus si cela arrive un jour. « Je suis en train de passer des castings, je passe beaucoup de castings. Il y en a un que j’ai peut-être une chance de décrocher, je croise les doigts. » Dis-tu en les croisant réellement. Tu as tellement envie de décrocher ce rôle … Alors tu continues à te battre. « Mais ce n’est pas facile, je persévère. Et si je ne gagne jamais d’Oscar c’est pas grave, du moment que je peux continuer à exercer ce métier. » Dis-tu un sourire aux lèvres. Peut-être qu’un jour tu en auras plus envie, pour l’instant tu veux rentrer dans ce milieu.

Des rêves, Izzie en avait aussi quand elle avait 12 ans. Ces rêves là n'avaient pas subsisté, hélas, jusqu'à ce qu'elle atteigne la vingtaine. Entre temps c'était comme si l'univers entier avait conspiré à lui faire perdre tout espoir qu'un jour elle puisse se sortir du milieu dans lequel elle était né. Elle rêvait de strass, de paillettes, imaginait qu'un jour elle rencontrerait un mec qui l’emmènerait loin de la misère et qui lui donnerait la vraie définition de l'amour. Allongée dans le lit superposé qu'elle partageait avec un de ses frères dans une chambre minuscule, la petite Ivory s'imaginait des horizons aux couleurs plus chatoyantes où elle aurait un papa, une maman : une vie normale en somme. Tout dans sa vie lui rappelait que le bonheur l'avait mis sur liste d'attente, et nombreuses étaient les questions existentielles qui venaient la hanter lorsqu'elle cherchait le sommeil tard le soir. Ses rêves de danse, de chant avaient fondu comme neige au soleil lorsqu'elle avait réalisé qu'elle ne faisait pas partie de ces gens-là, ceux qui avaient un peu de marge pour changer les choses, ceux qui en avaient le cran surtout. Chose qu'elle n'avait pas. A force qu'on lui répète qu'elle n'était qu'une sale gosse à problème elle avait fini par en prendre toutes les couleurs au point de ne se croire incapable de faire quoique ce soit. Ses rêves de devenir médecin ou avocate, envolés eux aussi. Finalement elle avait donné raison à tout le monde en se contentant de se livrer à des activités criminelles qui lui avaient tout de même permis de garder le cap et de se construire un business lucratif autour du tatouage.
Alors oui, à voir cette magnifique brune tenter sa chance, prendre le risque de poursuivre ses rêves Izzie était envieuse d'autant de bonne volonté. La flamme qui brillait dans ses yeux ne laissait nul doute sur la motivation qu'elle allait mettre en oeuvre pour tenter de réaliser ses rêves. Même quand Izzie lui fit la réflexion de vouloir tenter quelque chose à Brisbane, Mia avait de quoi lui répondre. Elle lui souhaitait sincèrement le meilleur, un avenir plein de réussites sous le feu des projecteurs si c'était ce qu'elle souhaitait. "Enchanté Mia." Et en plus elle avait un prénom adorable. Cette nana avait un vrai charm,e ce côté femme enfant qui plairait sûrement aux directeurs de castings. "C'est tout le mal que je te souhaite, ma jolie." Elle jeta un coup d'oeil à l'heure affichée sur son téléphone et poussa un long soupir. Le temps avait défilé et elle avait plusieurs messages sur Instagram auxuqels elle devait rapidement répondre avant que des clients ne lui filent bêtement entre les doigts. Elle ne voulait pas mettre Mia à la porte mais elle ne pouvait rien de faire plus pour elle étant donné l'état de son tatouage. "Bon, je dois préparer les aiguilles pour mon prochain client, je suis vraiment désolée de ne pas pouvoir t'aider mais je suis sûre qu'un bon dermatologue sera quoi faire pour toi. Surtout prends soin de toi, et qui sait peut-être qu'on se reverra. Après tout Brisbane n'est pas si grand que ça." Elle lui adressa un sourire radieux, Izzie se doutait qu'il y avait peu de chance pour qu'elles se recroisent mais comment savoir, peut-être qu'un jour l'envie d'un nouveau tatouage la ménerait jusqu'à elle. Après tout, il n'y a que les montagnes qui ne se croisent pas.