Ce soir était soir de fête. J’avais fini par boucler ce fichu article sur l’amour au 21e siècle quand on a déjà divorcé, eu des gamins, eu une maison et des dizaines d’actifs, et qu’on réalisait que notre amour était poly, et que sa définition d’idylle se résumait en partouzes différentes et dépareillées à tous les deux jours. Jamie avait été particulièrement pointilleux avec les hypothèses que j’avançais et avec les résultats que j'en tirais, et si j’avais appris à travailler avec son sens du détail à la limite de l’abusif pour plaire à ses beaux yeux et à mes hauts standards, là il avait très certainement frôlé un nouveau niveau dans la pyramide du travail bien fait. 19h était sonnée quand j’avais enfin eu le ok final du big boss, et un shot secret enfilé derrière les portes de verre de la cuisine partagée avait célébré ma réussite. À ça s’ajoutait le bonheur d’un good deed, la possibilité ce soir de réunir deux âmes esseulées qui avaient tant en commun, qui auraient très bien pu être un copié collé l’un de l’autre tellement ils me semblaient bien assortis, faits du même moule. Dans le coin gauche, nous avions Charles. L’un des meilleurs potes de Tad, petit riche britannique à la voix haut perchée. Il aimait le luxe, il avait grandi dans l'opulence, et ses goûts hautains et dispendieux avaient souvent suffit à me faire rouler des yeux à l’époque où je sortais avec Tad, où il me traînait à ses soirées entre potes. Charles était difficile à cerner parfois, souvent, derrière son air fermé et ses petites manies, mais la majorité du temps je n’avais qu’à penser à la phrase, la blague ou l’action la plus snob qui me venait à l’esprit et j’étais certaine de tomber dans le mile au sujet du personnage. Dans le coin droit, nous avions Jessie, cheveux dorés comme les blés, yeux bleu ciel d'été, accent anglais à couper au couteau. Des études en marketing qui rendait sa personnalité hyper axée sur les détails, les apparences, le beau, le parfait. Une naissance à Londres, une adolescence à Oxford, une émancipation à Brisbane et des vacances d’été chaque année à la maison de campagne des parents à Edinburgh. Le même amour pour la bourgeoisie, le même humour douteux, le même sourire à 100 dollars, le même chromosome aussi. « Je te dis, dès l’instant où il va te voir, ce sera le coup de foudre assuré. » que je chante, Charles qui vient tout juste de franchir les portes du pub, qui a fini sa course en se postant fièrement à mes côtés. Il a fait l’effort de mettre un peu moins de pommade dans ses cheveux, bien, bien. Et ce pantalon lui fait un fessier relativement correct, ce qui risque de passer crème. « Excellent timing. » je suis toute en compliments, ce qui devrait lui mettre encore plus la puce à l’oreille. Devant moi, ma pinte de bière est déjà bien entamée, et je fais signe au serveur de passer prendre la commande du garçon avant qu’il ne s’installe face à mon regard enjôleur, racoleur, au fond du booth. Lui ayant déjà fait le topo par texto, j’en ajoute quand même un peu, question de le mettre en contexte, et de le calmer face à la possibilité plutôt haute qu’il rencontre ce soir son âme soeur. « Si je te dis, cheveux blond, yeux azur, sourire à tomber, cul d’enfer, ça te parle? » mon descriptif est vendeur, mes rétines brillent, et je me réjouis déjà de tout le bien que cette intervention risque de faire à mon karma une fois qu’ils se seront dit i do. « Charles, j’te présente Jessie. » et le moment est enfin arrivée, l’attente est terminée. J’invite le brun à se lever, à tendre la main, à rencontrer le futur homme de sa vie. Pour l’histoire, le Hazard-Perry avait toujours été gay à mes yeux ; malgré ses petites histoires de grand charmeur et ses conquêtes fantômes que je n’avais jamais pu voir à l’époque pour attester, il était bien difficile pour moi de lui accorder le moindre libre arbitre. Misant sur le love at first sight, je me dis que le regard qu’il risque de me renvoyer là en sera un de gratitude, de remerciement, maintenant qu’il tourne la tête dans ma direction après avoir détaillé son date du soir. Et s'il décide de faire sa farouche, le jeu n'en sera que plus amusant encore.
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Dernière édition par Ariane Parker le Mer 21 Fév - 15:31, édité 1 fois
Confusion's all I see, frustration surrounds me, solution, bid farewell, sedation, what the hell? The iron lung collapsed from the pressure and the swelling, I can hardly breathe at all. Dead end roads and warning signs, destination nowhere in sight △
ariane & charlie
Après être passé chez mon dealeur de soirées, plus connu sous le nom de Seung-Jin mais répondant au doux surnom de SJ, afin de planifier très rapidement une partie de mon week-end (moyen le plus efficace que j’avais trouvé pour éviter d’avoir à passer plus de temps que nécessaire à en compagnie de ma fratrie à la ville), j’étais tout de même repassé par la maison. Me faufilant en catimini afin d’être certain de ne pas croiser Gauthier et Théodora, afin d’épargner à mon humeur déjà massacrante depuis plusieurs mois suite aux dernières révélations qui avaient eu lieu au sein de la famille, une entrevue désagréable, j’étais parvenu à atteindre ma chambre sans croiser âme qui vive. J’avais sauté rapidement sous la douche avant de m’habiller, jetant mon dévolu sur un jean noir Lacoste, un tee-shirt Christopher Kane et une veste EFM noire, agrémentant le tout d’une paire de baskets blanches. J’avais pris quelques instants pour me coiffer, sans en faire de trop, persuadé de toute façon que je me donnais du mal pour rien. Sans savoir ce que la rousse me réservait, j’avais l’intime conviction qu’elle me tendait un plan tordu dans lequel je me jetais pourtant à corps perdu. Et le fait que, bien que conscient de l’échec probable de cette soirée aux côtés d’Ariane et de ma soi-disant âme sœur, je décidais quand même d’y aller, laissait entrevoir le désespoir dans lequel ma vie personnelle s’était enfoncée. Voilà depuis la fin de l’hiver que rien n’allait comme je le voulais, Maura et Ryleigh décidant de joindre leurs forces pour faire de ma vie un enfer, Gauthier était venu y ajouter sa touche personnelle en nous annonçant qu’il était en fait le père d’un garçon de cinq ans que j’avais côtoyé pendant près d’un an en ignorant tout de notre lien de parenté. Vous avez dit tordu ? Il me semblait que cet adjectif était encore trop faible pour représenter la réalité des tourments qui agitaient nos vies, bien malgré moi. J’avais choisi de faire le trajet jusqu’au pub où Ariane m’avait donné rendez-vous à l’aide d’un chauffeur privé et avec une ponctualité quasiment parfaite, je m’étais présenté devant l’établissement, poussant la porte de celui-ci en cherchant la rousse du regard. La dernière fois que j’avais eu le malheur de faire une soirée ici, j’avais rencontré Hannah mais les choses s’étaient finies d’une bien tragique façon, me causant une humiliation qui avait directement décroché sa place dans le top trois des déconvenues les plus cuisantes de ma vie. C’était donc avec une double appréhension et au moins autant de réserve que, les mains dans les poches de ma veste, j’avais réduit la distance qui me séparait de la rédactrice du courrier du cœur de GQ. Et à peine étais-je arrivée à sa hauteur que je l’entendais déjà exulter avec un enthousiasme qui finissait de me rendre totalement sceptique quant aux plans que m’avait prévu la demoiselle : « Je te dis, dès l’instant où il va te voir, ce sera le coup de foudre assuré. » Le contraste entre sa voix enjouée, son excitation palpable que je devinais au fond de ses yeux brillants et ma moue renfrognée était saisissant. Encore plus lorsque mes sourcils s’arquaient légèrement lorsque je l’entendais employer le pronom personnel "il". « Pardon ? » m’étais-je exclamé, affichant une moue scandalisée. « Parker, je te préviens, si… » avais-je commencé à la menacer mais déjà elle ne m’écoutait plus, son regard se portant sur ma tenue, la jugeant avec la sévérité d’un futur acquéreur face à la marchandise, me coupant avec un : « Excellent timing. » Si d’habitude l’art de savoir manier le compliment savait calmer mon attitude morose et désabusée, ce n’était pas le cas cette fois-ci. Alors qu’elle se chargeait d’interpeller le serveur qui passait non loin de nous, je décidais de taire un instant mes doutes, persuadé que tout ça n’était qu’une tentative de plus de la rousse de me déstabiliser. Sans que je sache pourquoi, Ariane avait toujours aimé m’attaquer au sujet de ma vie sentimentale, me poussant sans relâche dans mes retranchements en remettant en cause ma sexualité à chaque fois qu’elle en avait l’occasion. « Votre plus vieux whisky et sans glaçons. » avais-je adressé au serveur qui s’était aussitôt mis à l’œuvre, me tendant quelques instants plus tard un verre contenant le liquide ambré que j’avais commandé. « Si je te dis, cheveux blond, yeux azur, sourire à tomber, cul d’enfer, ça te parle ? » La moue boudeuse, j’avais haussé les épaules, pas le moins du monde convaincu : « J’te dirai que ça dépend de comment l’ensemble s’organise. » A dire vrai, j’avais une préférence toute marquée pour les jolies brunes, surtout lorsqu’elles avaient des yeux bleus, mais je me retenais bien de le mentionner, ne pouvant m’empêcher de songer que ma description dépeignait Ryleigh avec un peu trop de précision. Si quelqu’un avait bien trouvé sa vocation, c’était Ariane. Elle se plaisait à jouer les cupidons sans relâche, cherchant toujours le match parfait entre ce que je me plaisais à appeler ses victimes, juste par esprit de provocation. Pourtant, il fallait bien lui reconnaître au moins ça, l’ex petite-amie de Tad était douée lorsqu’il s’agissait d’assortir les autres, de trouver leur paire parfaite. Et comme le disait la formule consacrée, c’était souvent les cordonniers les plus mal chaussés : sa rupture avec mon meilleur ami restait un caillou dans sa chaussure, une expérience qu’elle avait vécu comme un échec et qui lui était longtemps restée en travers de la gorge. Alors que je venais tout juste de porter mon verre à mes lèvres, je l’entendais qui jubilait de nouveau, son excitation grandissante ne faisant qu’augmenter mon angoisse. Pour sûr, si je survivais à cette soirée, la médaille du mérite me reviendrait de droit. « Charles, j’te présente Jessie. » Toujours aussi dubitatif, plus vraiment certain de vouloir me prêter à ce jeu sordide, je m’étais tout de même retourné, mes principes de gentleman anglais me poussant à accorder à la demoiselle question au moins trente secondes de mon attention, le temps de la saluer avant de mettre les voiles. Et l’expression de franche déconvenue mêlée à une surprise évidente que j’affichais en découvrant ledit Jessie, qui était bel et bien un homme, valait certainement des millions. Le fixant d’un air béat qui ne trouvait que rarement sa place sur mes traits, je détournais les yeux vers Ariane pour lui lancer un regard assassin dont j’avais le secret. Mais elle m’enjoignait à le saluer d’un regard appuyé. Et sans savoir à quel moment je m’étais décidé à lui obéir, je m’étais levé de la chaise sur laquelle j’avais pris place quelques instants plus tôt pour lui tendre une main. Jetant un regard d’appel à l’aide à Ariane qui loupait ostensiblement les signaux d’alarme que je lui envoyais, je me retrouvais à lui serrer la main avant de grommeler dans ma barbe un petit : « Charlie. Charlie Hazard-Perry. » sans même me sentir coupable de paraître tout à fait rude. Pour sûr, elle aurait ma peau et je comptais bien me venger dès que l’occasion s’en présenterait. Face à notre nouvel arrivant, le serveur alerte et réactif s’inquiétait de savoir ce que notre compagnon pour la soirée allait consommer. Profitant que le fameux Jessie soit occupé à choisir sa boisson auprès du barman je me tournais vers Ariane : « Dis-moi que c’est une blague Parker ? » Mais le sourire de toute fierté qu’elle me servait me faisait bien vite comprendre que l’âme sœur en question dont elle m’avait parlé un peu plus tôt était bel et bien cet homme qui se trouvait face à moi. « Je te jure que tu vas me le payer. » Foi d’Hazard-Perry cet affront ne resterait pas impuni. Perdant alors toute mes connaissances en matière de séduction (et d’interaction sociale la plus basique qui soi), je regardais le jeune homme avec des yeux de merlan frit. Comme si la situation en elle-même n’était pas assez gênante, il avait fallu que la surprise et le courroux qui me saisissaient à l’instant présent, grillent toutes mes connexions synaptiques, me faisant perdre ma verve légendaire. J’avais alors choisi de boire cul sec mon verre de whisky, demandant à être resservi dans la seconde qui suivait d’un geste au serveur, avant de me tourner vers mon date de la soirée. « Alors comment t’as eu le plaisir de rencontrer Parker ? » demandais-je à Jessie, l'alcool qui me brûlait la gorge me permettant de retrouver un semblant de contenance, faisant clairement raisonner dans mon apparent compliment, un sarcasme grinçant.
Il le remarquera seulement s’il porte attention - mais j’étais contente de le voir, Charles. C’était un peu un drapeau blanc que je levais, ma façon à moi de recoller les quelques bribes post-rupture, l’Ariane infecte que j’avais pu être pendant plusieurs mois, détachée, diffuse, alors que j’évitais comme la peste tout ce qui me rappelait Tad et le reste. Coeur brisé et ego éclaté m’avaient semblé être deux arguments particulièrement efficaces pour me fermer à ceux qui jadis étaient comme une famille de remplacement, comme des frères et soeurs choisis sur le volet, trop cons pour avoir été inventés de toutes pièces, et surtout parfaits dans leurs imperfections. Bien sûr, le fait que Nadia ait rompu d’avec Elio à la même période que moi avec Cooper avait aidé au détachement, et toutes les deux contre le monde entier, on s’était planquées ailleurs, on s’était fait croire que la vie n’avait pas besoin de rien d’autre que ce qu’on pouvait y créer en duo. La vérité était moins simple, quand on voyait comment ma meilleure amie avait pâti de s’être fermée à la bande, et comment, après quelques mentions à peine d’eux et les étoiles dans les yeux plus tard elle avait refait un pas, timide, dans leur direction, et moi à sa suite. Nadia évitait Elio pourtant, et pour ma part, j’étais allée direct à la rencontre de Tad, j'avais réglé les points manquants, réparé ce qu’on avait cassé en dizaines, puis en centaines de morceaux. Et on s’était réapprivoisés, au détour d’une cage d’escaliers, à un show des Street Cats, à une soirée à son appartement, à une nuit à deux. Si la situation entre l'italien et moi était encore à définir, si ça me semblait aussi simple que ce que je voulais croire, ce n’était pas dit que nos déboires d’avant nous rendrait aussi immondes, aussi difficiles à gérer que dans nos pires moments. Tout allait bien avec Tad, tout était stable, suffisamment pour que je me tâte à piquer Charlie, à retisser un semblant de lien, à tenter de voir s’il était toujours un adversaire de taille, ou s’il m’avait reléguée aux oubliettes. Ce serait mentir effrontément que de dire que je n’avais pas eu le sourire de la conquérante tout l’après-midi à préparer mes manigances, l’anglais à un texto près de découvrir mon plan machiavélique. Ce genre de piège était monnaie courante entre nous deux avant, et retrouver si facilement, si naturellement le rythme avec lui m’avait apparu comme le plus grand, le plus salvateur des soulagements. « Si quoi? » tout de suite la méfiance, tout de suite les mauvaises intentions, et je n’ai à peine le temps de saluer sa tête de riche gosse à deux balles qu’il m’attaque - et que je chante, impassible. C’est tout juste si je ne le flatte pas d’un battement de cils et d’une bouche en coeur pour le terrifier à des niveaux encore jamais atteints. Bien sûr que je trame quelque chose, bien sûr que nos retrouvailles ne seront pas banales, que je ne me contenterai pas juste de lui dire qu’il m’a manqué, que sa tête à claque, ses habitudes de princesse, ses manies de bourge et autres traits typiques le caractérisant ne me faisaient pas plaisir à voir, à revoir, dans l’immédiat. « Maman est fière. » il fait des efforts, Charlie, satisfaisant mes oreilles en commandant un whisky straight up, pas comme ces petites fillettes que j’avais remarqué au bar, qui ajoutaient une cuillère d’eau, qui tournaient la glace 5 fois dans leur verre avant de boire le liquide ambré. Amateurs. Installé face à moi, le brun me donne l’impression d’être un tantinet stressé - c’est que ma surprise lui fait de l’effet. Il me donnait presque envie de lui sortir le joint de sûreté que j’avais toujours dans mon sac, le temps qu’il chill out un peu. Ça allait bien se passer ; l’amour est aveugle, et s’il se cambre bien, il risquait de faire oublier n’importe quel tract pré-date à quiconque. Néanmoins, je n’ai pas le temps de le gratifier de mon expression des plus mystérieuses, avant que le futur objet de son désir ne daigne se montrer le bout du nez. Et Charles qui fait volte-face vers moi, qui profite d’un moment d'inattention de Jessie pour me poser la question, celle qu’il croit suffisante pour me faire balayer mes doutes sur son orientation sexuelle, comme si j’allais le juger pour aimer autant que moi ce qui se trouve en bas de la ceinture d’un XY. « C’est pas très gentil pour notre invité. » que je réprimande, la voix douce, qui murmure, les iris qui ne lâchent pas ceux de mon ami. Sa menace me fait rire, lui qui se croit tout permis à prévoir déjà sa vengeance. Je la balaie, faussement naïve, du revers de la main. « Ah, mais si c’est juste ça. » ni d’une ni de deux, ma main se dépose sur l’avant-bras du serveur qui s’apprêtait à reprendre sa course après avoir noté la commande de Jessie. « Vous mettrez son whisky sur ma facture. » ça se dit fils de riche et ça parle de paiement même pas 15 minutes après être arrivé - la jeunesse était bien ingrate de nos jours. De retour à nos sièges, la conversation se lance entre les garçons, et c’est empli d’une grande fierté que je les regarde, les écoute, les admire. Charlie parle de moi comme il en parle toujours, Jessie rebondit tout sourire. « J’ai été à GQ pendant un semestre, Ariane a été ma superviseure. » et pour être tout à fait honnête, il n’était pas mal du tout pour gérer toutes les dick pics que je recevais à outrance sur mon courriel de boulot, et mes comptes sur les réseaux sociaux. Encore aux études, la tête pleine de projet, il est de ceux qui façonneront l’avenir de demain, et si le Hazard-Perry joue bien ses cartes, il pourrait s’afficher façon #relationshipgoals à ses côtés. « Tout jeune, tout frais. » que je commente discrètement, à l’oreille de Charlie, pour faire état de la qualité de la marchandise. Puis, c’est le moment douceur, le moment dédicace, là où s’ils sont attentifs, ils verront passer une pointe de franchise à travers mes piques et mes vannes, mon sarcasme et mon cynisme. « Charles est l'un de mes meilleurs amis. » pause, m’assurant que tout le monde a bien entendu l’ampleur de la chose, et que je pourrai me servir de cette jolie vérité pour acheter un peu de sympathie plus tard, peut-être. « Du moins, quand il est poli et qu’il cheers avec nous. » on dépose le verre de Jessie sous ses yeux, et j’encourage le mouvement, plutôt enthousiaste pour la peine.
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Elle feignait l’innocence, jubilait de voir le piège qu’elle m’avait tendu se refermer autour de moi. Elle était insupportable, invivable et je devais bien être masochiste à continuer d’apprécier sa compagnie. Etait-ce justement parce qu’elle me menait la vie dure et que ceux qui pouvait s’en vanter ne se comptaient que si les doigts d’une main que je persistais à la laisser se jouer de moi ? Très certainement. « Maman est fière. » gassouillait-elle, m’agaçant un peu plus, si tant est que cela soit encore possible. C’était pire que tout ce qu’elle m’avait fait jusqu’ici. Remettre en question ma sexualité était une chose, m’imposer un date avec un homme en était une autre. Le dénommé Jessie était arrivé, stéréotype de l’australien avec ses cheveux blonds et sa peau bronzé, à l’exception qu’il avait l’air un peu moins lourdaud que la majorité des natifs de mon pays d’accueil. Profitant qu’il soit occupé à commander son verre, je menaçais Ariane sans vergogne. « C’est pas très gentil pour notre invité. » Si un regard pouvait tuer, j’étais à peu près certain que la jeune femme gîrait sans vie sur le comptoir du bar. Et j’avais la réplique cinglante sur le bout de la langue, prêt à dégainer, argumentant que ça n’avait rien de très gentil pour l’invité en question de lui faire miroiter de vains espoirs quant à l’issue de cette soirée. Mais je me retenais, contraint et forcé de rester murer dans mon silence car le serveur en avait fini avec Jessie qui s’était de nouveau tourné vers nous. Je me contentais de lui souffler une menace à l’oreille, qu’elle balayait d’un revers de la main : « Ah, mais si c’est juste ça. » avant que je ne me retourne pour faire face à notre compagnon pour la soirée. « Vous mettrez son whisky sur ma facture. » enchaînait-elle, l’air de rien en me laissant me démener pour trouver quoi dire à ce fameux Jessie que je ne connaissais ni d’Eve ni d’Adam. Me saisissant alors du seul point commun entre nous qui me venait à l’esprit (à savoir la rousse qui était à l’origine de notre rencontre), je lui demandais comment il en était venu à croiser la route de la jeune femme. « J’ai été à GQ pendant un semestre, Ariane a été ma superviseure. » répondait-il, ignorant mon malaise ou trop poli pour en faire état. « Tout jeune, tout frais. » entendais-je la rousse me susurrer à l’oreille, me tirant un léger sourire en coin qui venait creuser une petite fossette dans ma joue. Ne la laissant pas me déstabiliser plus qu’elle ne l’avait déjà fait, je poursuivais le fil de la conversation. « Parker en superviseure. En voilà un concept intéressant. » raillais-je, grinçant. « Tu as du mérite, c’est indéniable. » Si à l’accoutumée, je n’étais pas du genre à lésiner sur les piques à l’égard de la jeune femme, ce soir, j’étais décidé à me montrant particulièrement mordant, sachant malgré tout qu’elle ne s’en formaliserait pas outre mesure. « Charles est l'un de mes meilleurs amis. » intervenait-elle alors, en opposition totale avec mon attitude revêche. Et à nouveau, je souriais doucement, un peu plus sincèrement et un peu moins sarcastiquement cette fois-ci. Le compliment ne m’échappait pas et si je n’en laissais rien paraitre, il me touchait. Parce que si je n’étais pas le genre à me laisser aller à ce genre de démonstration d’affection, notre relation était, elle, placée sous le signe des vacheries que nous aimions nous balancer au visage. Nous étions deux gamins infernaux, intenables ensemble, fatiguant. Il n’y en avait généralement pas un pour rattraper l’autre, nous poussant mutuellement à aller toujours plus loin jusqu’à ce que l’autre finisse par déclarer forfait (ce qui n’arrivait que de façon très anecdotique). Je m’étais autorisé un petit regard vers la jeune femme, signe très discret pour lui signifier que j’avais bien entendu, mais qu’elle ne m’aurait pas aussi facilement en me brossant dans le sens du poil. « Du moins, quand il est poli et qu’il cheers avec nous. » avait-elle ajouté sur un ton qui nous ressemblait déjà bien plus. Le serveur était venu déposer le verre manquant sur la table et suivant les directives d’Ariane, j’avais concédé à trinquer avec eux. « A notre rencontre et à vos retrouvailles, je suppose. » avais-je lancé, à l’attention de Jessie. C’était déjà assez fatiguant de me battre contre Ariane, je pouvais bien concéder à Jessie de lui accorder dix minutes de mon attention. « Mais, conseil d’un ami qui te veut du bien, fui pendant qu’il en est encore temps, après Parker a tendance à refermer ses griffes sur ses victimes, et la suite n’est pas jolie à voir. » J’avais insisté volontairement sur le terme ami, espérant qu’il comprendrait le message sous-jacent et, qu’à défaut, Ariane s’en offusquerait au point de s’étouffer avec son Whisky qu’elle venait de porter à ses lèvres comme nous tous. Mais le blond ne semblait pas se laisser démonter aussi facilement par mes tentatives pour lui faire peur, s’autorisant même à sourire à mes attaques gratuites. « T’as pas l’air à plaindre pourtant. » qu’il me relançait, la moue presque taquine. Jouant de mes doigts sur le rebord de mon verre de whisky, je répondais dans un sourire : « Le jour où un Hazard-Perry pliera face à l’adversité n’est pas encore arrivé, même face à Parker. » Je bombais presque le torse, le menton haut pour appuyer mes propos, jouant le coq sous les yeux d’Ariane qui se moquait déjà de moi, je le sentais. « Et d’ailleurs, il faisait quoi pour toi à GQ ? Pas le café j'espère. » demandais-je à l’intéressée à propos de Jessie, curieux de savoir le domaine dans lequel il trempait. Il avait le physique qui correspondait à l’image de marque de GQ et aurait très bien pu apparaitre en couverture du magazine qui traitait avant tout des tendances modes pour hommes à son origine.
Ravie, que je suis ravie. Si la conversation va bon train, c’est principalement parce que Charles a arrêté à s’en prendre à mes intentions tout sauf honorables à ses yeux, et qu’il s’est enfin muni d’un sourire respectable, d’une posture invitante, d’un peu de charisme qui ne lui fait pas de tort. Et comme une maman fière, je me cale dans mon siège, le verre entre les doigts, j’observe, j'apprécie. C’était monnaie courante de se vanner lui et moi, c’était notre raison d’être que de se piquer et mine de rien, sans que je ne lui en souffle qu’une seule bribe, ça m’avait manqué. Reprendre mes marques avec Tad avait ça de bon que maintenant, je ne me sentais plus trop comme une inconnue pour la fine équipe, que j’y retrouvais tranquillement ma place d’outsider à la langue piquante. Et Charlie, malgré son animosité précaire sur le moment, semblait tout autant disposé que moi à relancer la joute là où on l’avait laissée, un an et des poussières plus tôt. Et voilà que le brun se lance sur la chasse, que dis-je, la quête de la meilleure histoire à mon sujet, de rumeurs, de ragots de bureau desquels Jessie l’abreuverait comme un bleu. « Fallait juste connaître les bonnes heures pour lui parler. » oh qu’il marque un point le petit, et que je me note mentalement de lui composer une jolie lettre de recommandation lorsque le temps sera venu. Fallait savoir qu’avant le premier café, et qu’après le cinquième, il y avait de quoi me trouver plus intraitable encore qu’à mon habitude. Effrayant, oui, je sais. Mais c’est suffisant pour ne pas me lyncher devant l’anglais, et si le potentiel qu’il gratte pour en savoir plus est toujours là, je me complais d’un sourire bien large, et d’un battement de cils qui chante, qui danse. « Quand je te disais que j’étais pas si compliquée, quand on prenait le temps d’analyser la bête. » ce n’était qu’une suite de mécanismes de défense, qu’un peu de poudre magique de sarcasme et d’une pas pire dose d’ego et on retrouvait l’Ariane en modèle limité. Une fraction à casser, un code à comprendre, et on arrive à me désamorcer assez facilement pour que ce soit de l’histoire ancienne la minute d’après. Demandez à maman, ou à Nadia, ou même à Hugo. S’ils le peuvent, vous le pouvez vous aussi. Comme si Jessie lit dans mes pensées, il se charge de confronter dans une moue mignonne, pointant Charlie qui râle beaucoup pour quelqu’un qui a accepté si rapidement et si facilement mon invitation ce soir. J’arque la nuque, écoutant ce qu’il peut bien avoir comme excuse, avant qu’un fin rire vienne s’échapper de mes lèvres, résonnant contre les parois de mon verres. « Le jour où une Parker pliera face à l’adversité n’est pas encore arrivé, même face à Charles. » que je rétorque, mot pour mot, aussi piquante que sincère. Nous deux, c’était une guerre sans fin qui ne verrait jamais de vainqueurs, et on s’en portait très bien. « Vous vous complétez bien. » qu’elle est innocente la voix de Jessie, qu’elle est douce, naïve, et j’ai presque envie de lui demander comment on se sent au pays des arcs-en-ciel, si c’est vrai que les licornes sentent la barbe à papa et que le soleil siffle au lever. « On a nos moments. » à la place, je précise, pour la forme. Fallait pas non plus s’attendrir et croire qu’on faisait principalement dans les effluves sentimentales ; ni le Hazard-Perry ni moi était bien doué là-dedans de toute façon. Autant y aller avec ce que l’on connaissait et faisait de mieux, c’est à dire les attaques de vannes à gogo. Et il fait la conversation le brun, il s’intéresse, point boni pour lui et pour son air avisé qui écoute ce que le joli blond empli de candeur a à raconter sur mon sujet. Puis, c’est l'heure de l’interrogatoire sur la vie professionnelle de monsieur, et je partage un regard complice avec Jessie lorsque Charles parle de café. « Le meilleur. » comme si un stagiaire ne servait qu’à ça, comme si un sous fifre était immanquablement attitré à la machine à café dans la seconde où il posait le pied à nos bureaux. Je savais pas comment ça se passait au quotidien chez ABC, mais à GQ, on traitait nos gens avec un minimum de respect. Sauf quand ils accompagnaient le boss à Noël, mais ça c’est une autre histoire. « J’étais à la gestion des réseaux sociaux, du blogue, du podcast. Les trucs en ligne. » que Jessie finit par expliquer, renchérir en prouvant qu’il sait faire beaucoup, et autre chose que de m’apporter un cold brew de son plein gré, tous les matins, sans que je ne demande rien. Ce gamin allait aller loin dans la vie, à anticiper les besoins caféinés des gens comme ça. « Il me censurait aussi. » et je laisse planer le mystère, sachant tout de suite que Charlie aura bien envie de rebondir sur le potentiel contenu qu’on avait dû retirer de mes chroniques ou enregistrements pour cause de trop salace. « Juste une fois. » il a de la verve le gamin, j’aime de plus en plus. No wonders que je le vois bien pâmé aux lèvres du brun ; il ne lui laisserait pas gagner la première joute, et sûrement pas la deuxième non plus, sous les draps. « C’est pour ça que je trouve que vous avez déjà un bon point en commun. » et une petite vanne supplémentaire, haussant avec intention le sourcil. La magie se met un peu plus en place, Jessie qui timidement se rapproche de quelques centimètres de Charlie dans le booth.
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ariane & charlie
Sans parvenir réellement à le croire, je me surprenais moi-même à jouer le jeu, faisant la discussion à ce fameux Jessie qui était visiblement mon âme-sœur d’après la soi-disant experte en la matière. Si je pouvais sincèrement douter de la connaissance qu’Ariane avait de ma personne, puisqu’après presque six ans passés à me côtoyer, la rousse persistait à remettre en question mon orientation sexuelle, je ne pouvais nier que la conversation se faisait presque plus facilement avec le jeune homme que je ne l’aurai cru. « Fallait juste connaître les bonnes heures pour lui parler. » qu’il répond lorsque je lui conseille de fuir Ariane tant qu’il en a encore le temps. Sa réplique me tirait d’ailleurs un petit rire alors que la rousse jubilait à côté de moi : « Quand je te disais que j’étais pas si compliquée, quand on prenait le temps d’analyser la bête. » Je levais les yeux au ciel avec exagération. « C’est sûr qu’en s’y prenant à peu près bien, on peut tomber sur une Parker de bonne composition quelque part entre dix heures et dix-heures quinze. » raillais-je, fossette creusée sur la joue alors que Jessie me renvoyait la balle en prenant presque la défense d’Ariane. « Je comprends mieux pourquoi tu l’as choisi. » notais-je alors en lançant un regard à la jeune femme, l’œil lourd de sous-entendus. Charmant, la langue bien pendue, qui n’hésitait pas à voler à son secours pour sauver son honneur quand bien-même elle n’avait besoin de personne, il n’y avait pas à se demander bien longtemps pourquoi Jessie avait retenu son attention pour en faire son stagiaire. « Le jour où une Parker pliera face à l’adversité n’est pas encore arrivé, même face à Charles. » répétait-elle en reprenant quasiment mot pour mot mes propres paroles. Je lui lançais un clin d’œil pour toute réponse, l’air goguenard. « Vous vous complétez bien. » concluait alors le jeune homme, l’air d’un sexologue jugeant l’alchimie d’un couple en crise. Et cette idée me faisait légèrement marrer, parce que c’était une image qui correspondait bien au duo que je formais avec Ariane, l’amour et le sexe en moins, nous étions deux enfants terribles, incapables de se dire simplement l’affection que nous nous portions mutuellement autrement qu’en nous balançant des amabilités au visage. C’était une mécanique bien huilée, qui n’avait pas eu le temps de rouiller, même pendant un an d’éloignement. « On a nos moments. » avait simplement relevé Parker et je m’étais contenté d’hocher la tête en signe d’approbation, portant mon verre à mes lèvres pour boire une gorgée de Whisky. Je m’inquiétais ensuite du rôle attribué par mon amie à mon apparent date de la soirée, lui demandant s’il était uniquement chargé de la préparation de ses cafés. « Le meilleur. » se moquait-elle, rebondissant sur mes propos. « J’étais à la gestion des réseaux sociaux, du blogue, du podcast. Les trucs en ligne. » répondait alors Jessie, pour satisfaire ma curiosité. Mon attention se reposait alors sur lui alors que j’hochais doucement la tête. « Un community manager, doublé d’un web master multifonction. Intéressant » soufflais-je en entrant volontairement dans le jeu d’Ariane, sachant d’avance qu’elle allait s’extasier de me voir complimenter Jessie. J’étais plutôt séduit par l’idée de lui laisser miroiter l’espoir de voir son poulain conclure ce soir, avant de briser net tous les films qu’elle avait bien pu se faire dans la tête. Il fallait dire que la présence d’Ariane à mes côtés avait tendance à faire ressortir une part de sadisme en moi que je ne laissais s’exprimer que très rarement. « Il me censurait aussi. » ajoutait-elle, en me mettant l’eau à la bouche de façon volontaire, j’en étais certain. « Juste une fois. » la reprenait-il, pas effrayé à l’idée de s’opposer à la rousse qui dissuadait souvent les moins téméraires par sa langue bien pendue. « J’peux savoir ce qui était suffisamment choquant pour mériter une quelconque censure ? Parce que ce n’est pas le but justement, de transgresser les tabous ? » C’était un point commun que nous avions elle et moi, nous étions très à l’aise avec la sexualité en général. Et si je pouvais me montrer parfois assez pudique sur mes histoires personnelles, ça n’était en rien lié une quelconque gêne à l’évocation du sexe mais plutôt parce que j’avais la fâcheuse tendance à éluder toute question personnelle jugée trop intime ou inadéquate (comprenez par-là toute question qui nécessitait que j’évoque mes états d’âmes). « C’est pour ça que je trouve que vous avez déjà un bon point en commun. » Et je me tournais vers elle, s’en me dépeindre de mon sourire en coin : « Doucement Cupidon, tu vas finir par effrayer notre ami. » Et la réaction de Jessie ne se faisait pas attendre, il avait sûrement côtoyé suffisamment Ariane pour savoir exactement où elle allait avec ses allusions à la pelle : « Il en faudra bien plus. » répondit-il, me mettant aussitôt mal à l’aise avec le ton lourd de sens qu’il employait à présent. Coincé entre Parker et lui, je ne donnais pas cher de ma peau à l’issue de la soirée. « D’ailleurs, tu fais quoi dans la vie toi ? » me demandait-il alors avant de me jeter un coup d’œil par-dessus son verre qu’il portait à ses lèvres. Lancé sur un sujet qui me passionnait, je me décoinçais aussitôt, l’œil brillant, la langue déliée pour lui parler de mon métier : « Je travaille pour ABC Radio en tant que journaliste. » commençais-je alors. « J’ai commencé quand c’était encore Jamie Keynes le rédacteur en chef. » ajoutais-je en supposant que Jessie devait bien visualiser qui il était. « J’suis spécialisé en géopolitique et mes sujets de prédilection restent ceux qui concernent les crises du Moyen-Orient. » C’était ce qui m’avait toujours motivé à vouloir devenir journaliste, la complexité de ces situations, les histoires compliquées, enchevêtrées, les issues incertaines. « Pour l’instant, on me laisse plutôt couvrir les événements politiques locaux. » dis-je un peu amèrement. J’avais soif d’aventures et d’expédition. J’avais hâte qu’on me laisse ma chance de prouver tout ma valeur à la face du monde. « Mais ça ne sera pas le cas longtemps. » ajoutais-je finalement dans un sourire fier. Je n’avais jamais eu peur de passer pour ambitieux ou trop confiant. C’était ce qui me permettait de ne pas avoir peur d’être le meilleur dans mon domaine, la raison pour laquelle j’étais sorti major de promo à la fin de mes études, ce qui m’avait valu de réussir à entrer chez ABC malgré mon jeune âge. Je savais ce que je valais et je n’en avais pas peur le moins du monde.
Il est chiant, à faire comme si Jessie ne l’intéressait pas. Il manque de politesse, de tact, de discrétion, de gratitude. Charles qui pense que je ne vois pas clair dans son jeu et qui en rajoute une couche, en faisant comme s’il s’intéressait aux tâches du blond à GQ alors que je sais très bien qu’il se moque, qu’il n’entre pas dans le jeu, qu’il fait juste joli pour garder son blason doré sans heurts. Et j’en profite pour être plus entreprenante, pour ne lui laisser qu’une brève brèche, la voix beaucoup trop enjouée pour qu’il ne soit à l’aise, pour qu’il ne sente pas la vacherie planer au-dessus de sa tête. « Que veux-tu, je sais que tu les aimes polyvalents. » que Jessie ait été en mesure de faire le boulot de presque tout le monde à l’équipe web de GQ était une chose, de rendre Charlie encore plus mal à l’aise en était une autre. Et je babille, et je retourne au programme principal, le coup d’oeil amusé avec l’ancien stagiaire qui dévoile une histoire au bureau à laquelle le Hazard-Perry s’intéresse un peu trop. Au moins, Jessie profite de sa confession pour se rapprocher du brun, leurs bras se touchent, leurs souffles s’emmêlent presque et tout subtilement, je lorgne sous la table pour m’assurer que la possibilité d’une main baladeuse puisse être faisable. « Oh, jamais je n’aurais osé toucher à ce qu’elle écrit, ou ce qu’elle enregistre. » soit-il béni. Autrement, y’auraient des membres en moins sur ce petit bout d’homme, dont un particulier qui rendrait la fin de la soirée de Charles particulièrement dramatique. Il me remerciera plus tard de lui assurer un happy ending. « C’était pour mon message d’insultes aux idiots qui n’avaient pas vidé le frigo de leurs vieux lunchs périmés. » le suspense ayant assez duré, j’en profite pour rectifier l’histoire et donner l’heure juste à Charlie qui ne manque pas la moindre occasion d’avoir des détails croustillants sur moi ; alors que ce serait sur son date d’où il devrait vriller son radar. Note mentale de l'engueuler dès que Jessie ira aux toilettes, d’arrêter de se la jouer hot and cold, c’était cool strictement entre 2001 et 2007. « J’ai anticipé que 14 synonymes pour les traiter de ratés malpropres et sans ambition n’étaient peut-être pas la meilleure technique de négociation. » parce que c’est vrai que là, j’avais assuré côté lexique incendiaire. Et malgré la diplomatie du jeune homme, j’en étais arrivée à atteindre mon objectif, à savoir que les porcs avec qui je bosse daignent ramasser leurs cochonneries qui s’étalaient sur les tablettes publiques. Bandes de dégeulasses. Mon verre entre les paumes, j’écoute Charles qui maintenant, plus loquace sûrement d’avoir eu de quoi de nouveau à se mettre sous la dent à mon propos, raconte sa propre ascension chez ABC. Une partie qui semble s’inspirer d’un show me yours i’ll show you mine, une conversation où il se bombe le torse et babille sur ses propres exploits de carriériste au cul bordé de pierres précieuses. Merde que ça m’avait manqué de l’entendre jacasser comme une adolescente sur ses fiertés. « Notre Jamie? » Jessie coupe la parole, tourne la tête vers moi, cerne le personnage sans même que j’en rajoute. Il était là à l’arrivée du Keynes et avait eu droit à la crème de la crème en terme de mauvaise première impression. J’hoche de la tête de la positive, non sans avoir envie de changer de sujet si son plan est de parler du boss parce que bon, passer mes semaines à le voir dans son feu roulant de sautes d’humeur me convenait parfaitement - pas besoin d’en faire des heures supplémentaires ici. « Allez, dis-lui donc que tu te vois te la péter comme reporter international. » je me cale dans mon siège, le regard vers Charles qui parle avec entrain, qui vise probablement de prendre la place d’un dude hyper fancy dont le nom rime avec Buckingham, qui est une figure modèle pour eux, les anglais, de sauver le monde par ses écrits, d’être un héros parmi nous les vulgaires hommes, et de se balader en Rolls-Royce entre ses diverses entrevues d’une heure sur la paix dans le monde ou la pauvreté à irradier. « Le grand Charles à travers le monde, sur tous les fronts, tous les téléviseurs. » et je frissonne de sarcasme, exagérant le geste, comme si la simple image de sa tête de riche gamin au sourire Colgate sur tous les médias du monde me donnait le pire cauchemar possible - et c’est un peu vrai, faut dire. « J’espère que tu penseras encore à nous, pauvre petit peuple, quand on bossera toujours comme des cons sur nos projets de magazine indie lu par 4 personnes tout au plus, y compris nos mères. » faussement larmoyante, faussement dépitée, j’imagine tout un scénario avant de prendre une longue gorgée de scotch comme conclusion bien dramatique. Même dans un monde idéal, Charlie ne m’oublierait pas - je m’en assurerais quotidiennement. « Tu lui as parlé de tes textes, Ariane? » comme l’illumination et Jessie demande, probablement que mon speech l’a réveillé, où la conversation d'ascenseur qu’on a eu tous les deux, quand il a ramassé le carnet de notes et d'idées et d'entrevues tombé hors de mon sac et mis son gros nez de juif dedans malgré mes remontrances. Mon regard est noir qu’il ait ouvert sa trappe à ce sujet, lui qui fait partie du groupe restreint de gens sachant de quoi il est question, de quoi ce projet de jadis retourne, mais je canalise mon cynisme sur Charles, parce que Jessie est encore si jeune, si innocent, et que le Hazard-Perry lui, en a vue d’autres me concernant. « Nah, Charles s’intéresse pas à mes écrits - sauf quand ils expliquent le meilleur moyen de mettre n’importe quel bel apollon dans son lit en usant de la technique du moindre effort. »
Confusion's all I see, frustration surrounds me, solution, bid farewell, sedation, what the hell? The iron lung collapsed from the pressure and the swelling, I can hardly breathe at all. Dead end roads and warning signs, destination nowhere in sight △
ariane & charlie
C'était un guet-apens et je n'avais pas moyen de m'en sortir sans essuyer quelques défaites que j'acceptais de bon cœur, songeant que j'aurai tout le loisir de mûrir ma vengeance dans les jours à venir. « Que veux-tu, je sais que tu les aimes polyvalents. » qu’elle répliquait, Ariane, le regard lourd de sous-entendus. « Je te confirmerai ça quand j’aurai mon premier stagiaire à la radio. » Je me la jouais innocent, de celui qui ne voyait pas clair dans son petit jeu. Tel un contorsionniste, je me faufilais entre les perches qu’elle me tendait comme autant de pièges dans lesquels elle espérait me voir tomber. Mais c’était sous-estimer mon obstination et l’importance de mon ego. Parce que, quand bien même elle avait du mal à l’admettre, Jessie ne m’intéressait pas. Du moins pas de la façon dont elle l’aurait souhaité. En revanche, je ne pouvais nier que sa conversation était agréable. Aussi, je n’avais pas envie d’avoir à lui refuser ses avances. Pour savoir ce que c’était que d’être celui de l’autre côté – merci Ryleigh – je ne souhaitais pas à quiconque de vivre cette expérience déplaisante. « Oh, jamais je n’aurais osé toucher à ce qu’elle écrit, ou ce qu’elle enregistre. » se défendait aussitôt Jessie lorsque je lui demandais en quoi consistait la censure qu’il avait appliqué à Ariane. « C’était pour mon message d’insultes aux idiots qui n’avaient pas vidé le frigo de leurs vieux lunchs périmés. » Et Jessie avait aussitôt embrayé : « J’ai anticipé que 14 synonymes pour les traiter de ratés malpropres et sans ambition n’étaient peut-être pas la meilleure technique de négociation. » A les écouter, un sourire en coin était venu se loger sur mes lèvres, comprenant sans peine le genre de vendetta qu’avait dû livrer la rousse contre les mal propres de chez GQ. Finalement l’ancien stagiaire de Parker était venu m’interroger sur mes propres exploits professionnels et je ne m’étais pas fait prier pour lui donner un aperçu de mes talents, faisant mention de l’ancien rédacteur en chef d’ABC qui avait récemment migré avec le magazine pour lequel Ariane travaillait. « Notre Jamie ? » avait-il demandé confirmation à cette dernière qui avait brièvement hoché la tête en signe d’approbation avant de reporter l’attention sur moi, pas prête de me laisser m’en tirer à si bon compte : « Allez, dis-lui donc que tu te vois te la péter comme reporter international. Le grand Charles à travers le monde, sur tous les fronts, tous les téléviseurs. » Un petit rire m’avait échappé avant que je ne vienne boire une gorgée supplémentaire de mon whisky. « Bien-sûr que c’est comme ça que je me vois, et avoue que toi aussi, tu me vois bien couvrir la presse internationale et inonder les ondes de ma belle gueule. » Je jouais les fiers coqs, me faisant mousser un peu au passage tout en sachant qu’Ariane s’occuperait bien vite de mon ego qui commençait à prendre trop de place avec nous à cette table. « J’espère que tu penseras encore à nous, pauvre petit peuple, quand on bossera toujours comme des cons sur nos projets de magazine indie lu par 4 personnes tout au plus, y compris nos mères. » Et la réflexion me faisait réfléchir. « Tu te vois lancer ton propre magazine, Parker ? » lui demandais-je aussitôt, la curiosité piquée par ce qu’elle venait de dire. Mais Jessie reprenait ses droits sur la conversation, pas vraiment effrayé à l’idée de s’interposer entre le duo d’enfants terribles que nous formions avec la rousse. Il saisissait alors l’occasion pour poser une question à son ancienne superviseuse. « Tu lui as parlé de tes textes, Ariane ? » Et c’était un regard de mort qu’il obtenait comme première réponse, ce qui n’avait rien d’étonnant quand on savait à quel point le sujet de l’écriture était touchy pour la rousse. Et je devais avouer que l’audace du blond me plaisait. C’était qu’ils n’étaient pas nombreux ceux qui s’aventuraient, téméraires, à affronter Ariane. « Nah, Charles s’intéresse pas à mes écrits - sauf quand ils expliquent le meilleur moyen de mettre n’importe quel bel apollon dans son lit en usant de la technique du moindre effort. » J’acceptais l’attaque, l’encaissant avec un petit haussement d’épaules, comme pour me dédouaner. Mais au-delà du coup derrière la nuque qu’elle venait de m’infliger, c’était davantage le reste de sa réponse qui m’intéressait. « Je dirai surtout que tu as peur de mon avis incisif, Parker. » que je venais la tacler en retour, lui faisant payer son affront. « J’ai bien eu vent de ses premiers pas d’écrivaine, mais elle refuse en bloc de me laisser y jeter un coup d’œil. » Et ce n’était pas faute d’avoir essayé, insisté lourdement, insupportable comme je savais l’être parfois face à elle. « Pourtant, je suis un lecteur assidu, presque investi même. Je pourrais toujours essayer de t’éclairer de mes lanternes. » J’accordais à Ariane, un petit sourire en coin, presque moqueur avant de poursuivre : « Mais ça supposerait que tu me laisses l’occasion de me moquer de toi, peut-être. » Je la taquinais volontairement quand nous savions tous les deux que j’étais loin d’être le genre à m’embarrasser de critiques négatives quand il n’y avait pas de raison valable pour les servir. Si l’on me prêtait une attitude de princesse – comportement qui m’avait valu un surnom adéquat qui me collait à la peau et me poussait bien souvent à forcer le trait – c’était parce que je ne tardais jamais à exposer mon point de vue, notamment lorsque les choses n’allaient pas dans le sens que je leur avais prêté. En revanche, si je n’avais pas un ego à défendre, j’attaquais rarement sans motif valable. Et je connaissais suffisamment Ariane, lisant avec assiduité chacune de ses parutions dans GQ, pour savoir qu’il y avait du potentiel sous sa caboche. C’était une femme remarquable, à l’esprit vif et au style mordant : un cocktail détonnant qui me plaisait aisément, quand même bien j’aurai préféré me couper les deux mains plutôt que de l’admettre à voix haute. « Elle t’a laissé t’y mettre le nez sans te couper la tête ? C’est qu’elle doit drôlement t’estimer. » Parce que nous avions bien un point commun elle et moi : les épanchements sur nos états d’âmes, nous avions ça en sainte horreur. Et quiconque s’aventurait un peu trop près de nos jardins secrets respectifs devait le faire à ses risques et périls. Nous étions sauvages, elle et moi, secrets même, l’ego bien trop gros pour laisser au premier qui s’en réclamait digne l’opportunité de nous toucher droit au cœur.
Comme il mord, comme il s’emballe, comme il aime s’imaginer sur tous les fronts, à babiller, à faire honneur au pauvre petit peuple de ses belles grandes phrases, de ses mots intelligents, de sa tronche qui touchera bien trop vite au botox rien que pour paraître au top à la caméra. « Au moins à la télé, je pourrai zapper. » que je nargue, arquant innocemment la nuque, battant des cils. Et la beauté de la chose s’il devenait populaire, c’était que les groupes de hate envers lui verraient le jour, que les commentaires désobligeants sur son cas me donneraient des munitions, que toutes les critiques sur son travail m’enracineraient bien confortablement à sa fenêtre pour les lui rallier de ma douce voix de crécelle. De ses projets de domination mondiale par les infos internationales, on passe à mes propres plans, et c’est un regard noir dont je couvre Jessie alors qu’il s’emporte tout seul, qu’il dévoile un secret. Je m'en veux direct de pas l'avoir égorgé plus tôt, limite, l’envie de tout nier en bloc est grande, présente, brûlante. S’il s’enlise trop dans cette pente glissante-là, je me ferai un plaisir de le ramener sur terre, avec ou sans un membre en moins. « Comme n’importe quelle adolescente sur Tumblr, ouais. » que je rétorque du tac au tac à Charles qui se met le nez creux avec le magazine, qui l’a fait tiquer. Diminuer le jeu, diminuer l’ampleur, cacher mon air furax par le pourtour du verre de scotch qui le comble à la perfection. Non, c’est pas de tes affaires Charlie, c’est pas des tiennes non plus Jessie, c’était un truc d’avant, une idée dont j’ai discutée à la va vite avec Marianna, rien de bien concret, et de toute, je n’ai pas le temps. Je n’ai pas l’énergie, je n’ai pas l’horaire, je n’ai pas le contenu, je n’ai pas les moyens. J’ai la motivation, j’ai l’énergie, j’ai les idées ; mais depuis quand cela suffit, mhm? « Aw, t’es mignon. La journée où je voudrai entendre ton avis sur mes nouvelles de soft sexu mettant en vedette un étalon aux cheveux d’ébène, je te dirai. » et comme il ne comprend visiblement pas à mon expression fermée que peu importe ce qu’il dira je ne lui cèderai pas, je pense bien de lui clarifier la situation, de préciser la chose non sans le ménager. Il est brillant Charles, il a du mordant, de la matière grise. Ça ne lui prendra pas trop de temps à capter le get the fuck outta there dissimulé derrière mes remerciements presque polis pour son offre qu’il étale de sarcasme et de cynisme tout sauf nécessaires. « J’en attendrais pas moins de toi. C’est probablement ce qui te sauverait à mes yeux. » au moins, je sais que si j’avais le moindrement besoin de faire descendre mes écrits, il serait là. Y’avait au moins ça de vrai, dans tout son désintéressement. Et ça pique, ça me gave, ça m’énerve de m’être fermée à ce point alors que la soirée promettait tellement. Oh well, sa faute si son comportement de gamin qui se croit tout permis lui casse l’amour de sa vie. « C’était pas prévu. » que justifie mollement Jessie, lorsque Charlie demande de but en blanc d’où et de comment l’ancien stagiaire a pu mettre la main sur ce que j’avais bien pu rédiger dans mes si précieux cahiers. « Je reviens, je vous prends d’autres verres? »eet comme s’il sentait que ça n’était pas la meilleure ambiance pour choper du mâle, le blond se lève tout candide, prend nos commandes, dérive vers le bar non sans regarder à quelques reprises par-dessus son épaule au cas où mes mains en viennent à dépecer Charlie maintenant que son seul témoin clément est allé brouter d’autres paturages. « Charles. » mon ton est incisif, suffisamment pour qu’il lève les yeux vers moi dans la seconde. « J’pense qu’il est temps de se rendre à l’évidence. » et j’humecte mes lèvres, avant de prendre une longue inspiration, sérieuse plus que je ne l’ai été depuis longtemps. « Jessie est trop bien pour toi, tu lui briserais le coeur. T’es pas prêt pour un mec comme lui. » et je chante, et je dérive, et je laisse l’altercation prise personnelle plus tôt couler le long de mon dos comme de l’eau sur les plumes d’un canard. Jessie toujours à quelques mètres de nous, je ravale, et ma hargne, et mon scotch, et la pique est si douce, si facile, si salvatrice que je me demande pourquoi je l’ai gardée si longtemps à l’intérieur. « De toute façon, tu saurais pas quoi dire sur ce que j’écris. Tu connais rien en la matière. » et ça fait mal par où ça passe, parce qu’il n’est pas au meilleur de sa forme, amoureusement parlant. Ce que j’ignore toutefois, qu’il se garde de me dévoiler, pour des raisons évidentes, et ce sur quoi je n'aurais probablement même pas appuyé en connaissance de cause, si j'avais su. Mon sourire est carnassier lorsque le jeune blond revient à notre table, et pose le round 2 sous nos yeux. « Toujours à parler de ça? » il est mignon, mais pas tant que ça. Mes iris vers lui, ça va pas aller s’il prend tant ses aises non plus. « Si t’avais pas ouvert la boîte de Pandore aussi. » il hoche doucement de la tête, plus pensif que désolé, et c’est ça qui m’énerve. Parce que je sais qu’il a toujours une idée derrière la tête, et que peu importe les crocs que je montre, il foncera direct dans l’abime si je ne lui mets pas un frein… « Non, mais parce que je me dis que ça vaudrait peut-être la peine de t’ouvrir un truc en ligne et de tout mettre dessus et... » … assez vite. J’inspire pronfodément, rageuse. Et là, c’est le vide complet, le silence, celui qui capte de suite qu’aucune issue n’est possible. « … et j’me la ferme. » voilà que je respire mieux, voilà que l’ambiance est tout de suite beaucoup plus légère. « Bien, bien. » et ma tête se tourne vers un Charles toujours aussi spectateur. « T’as vu pourquoi ça a toujours bien fonctionné entre nous deux. » qu’il prenne des notes.
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ariane & charlie
« Aw, t’es mignon. La journée où je voudrai entendre ton avis sur mes nouvelles de soft sexu mettant en vedette un étalon aux cheveux d’ébène, je te dirai. » La pique était facile, presque servie sur un plateau d'argent. Aussi, je me contentais d'en rire un peu, prenant une nouvelle gorgée de mon whisky. « J’en attendrais pas moins de toi. C’est probablement ce qui te sauverait à mes yeux. » qu'elle rétorquait lorsque j'avais mentionné la possibilité de me moquer d'elle et je ne pouvais m'empêcher de me demander si elle avait saisi l'humour qui se cachait derrière mes propos ou si, toute à son courroux, elle n'avait pas simplement prit la réflexion au pied de la lettre. « C’était pas prévu. Je reviens, je vous prends d’autres verres ? » répondait alors l'ancien stagiaire de la rousse lorsque je lui avais demandé comment il avait réussi à convaincre Ariane de le laisser la lire. Et flairant sûrement la tension qui avait suivi ses propos, il s'était éclipsé vers le bar, avant même que je n'ai eu le temps de lui répondre. « Charles. J’pense qu’il est temps de se rendre à l’évidence. » avait-elle commencé, attirant mon attention alors qu'un sourcil inquisiteur venait se hausser sur mon front. « Jessie est trop bien pour toi, tu lui briserais le cœur. T’es pas prêt pour un mec comme lui. » Quel dommage, songeais-je en mon for intérieur avec un sarcasme évident. « Je suis presque déçu de te poser tant de soucis. » répliquais-je alors, presque machinalement dans un haussement d'épaules. « De toute façon, tu saurais pas quoi dire sur ce que j’écris. Tu connais rien en la matière. » J'accusais le coup, pas préparé à une attaque de cette ampleur. Si les piques au sujet de ma vie sentimentale – ou absence de, en l’occurrence – avaient toujours fait légion entre nous, elles étaient toujours teintées d'une certaine bienveillance habillement dissimulée sous les attaques et les sarcasmes. Cette fois, en revanche, Ariane était mordante, piquante, délibérément blessante, me rendant coup pour coup, me faisant payer cet affront que j'avais eu d'oser m'intéresser à ce qui lui tenait à cœur. Et c'était mon ego qui en prenait pour son grade, déjà mis à mal par mes altercations répétées avec Ryleigh et ces dix années de séparation que j'avais instauré, bon gré mal gré, entre nous. C'était un léger sourire – plus proche de la grimace cependant – , rire jaune mort dans l’œuf qui était venu étirer mes lèvres un bref instant. « T'as sûrement raison. » capitulais-je, déposant les armes, pas même honteux de m'avouer vaincu. Parce que c'était toujours moins pire que de reconnaître qu'elle avait fait mouche, appuyant sur le seul endroit où ça pouvait faire mal. Si elle n'aimait pas que je me mette le nez dans ses affaires, je préférais encore me trancher les deux mains sur l’instant plutôt que d'évoquer Ryleigh, même à demi-mot, pour laisser entrevoir cette faiblesse manifeste qui me collait à la peau depuis que j'étais venu en ce monde. Je préférais encore passer pour un amateur, ignorant tout des aléas des relations intimes, des tourments des sentiments et de l'intolérable souffrance qui incombait le cœur amoureux. Et je m'étais aussitôt muré dans mon silence, me refermant comme une huître, pour me tourner vers la seule chose qui ne me décevrait jamais : un verre de whisky. L'ivresse du moment était passée et je n'avais plus le cœur à jouer la comédie, à faire enrager Ariane en lui mettant des bâtons dans les roues, à semer son parcours vers mon coming-out d'embûches. C'était un mécanisme de défense qui se déclenchait automatiquement chez moi, quand bien même je ne lui en voulais pas un instant à la rousse, d'avoir osé m'attaquer alors que j'étais déjà à terre. Parce qu'elle ne savait rien, parce que j'étais toujours trop fier, trop secret sur ce qui me touchait réellement, pour laisser à quiconque un véritable accès à mon cœur. C'était compréhensible, au fond, quand on connaissait mon histoire dans sa totalité, quand on savait que la seule personne à qui j'avais jamais laisser la porte ouverte s'était finalement retournée contre moi, m'abandonnant, me tournant le dos au pire moment qui soit. Même ma famille, même Debra ne connaissaient que les grandes lignes, celles que j'avais bien voulu leur donner, épargnant les détails les plus compromettants pour ma personne, mais les plus cruciaux pour comprendre de quoi il en retournait exactement. Je les laissais deviner dans une lueur de mon regard, dans un tressautement de ma lèvre inférieure, dans mes soupirs tantôt outrés, tantôt agacés, ce qu'il en était de la vérité. Et finalement, c'était Jessie qui était revenu auprès de notre duo toujours muré dans un silence de plomb : « Toujours à parler de ça ? » qu'il demandait avant qu'Ariane ne vienne répondre, faisant tomber la sentence avec une sécheresse évidente dans la voix : « Si t’avais pas ouvert la boîte de Pandore aussi. » Et sur ce coup-ci, je ne pouvais que la rejoindre, regrettant presque d'avoir osé ouvrir la bouche à propos de ses débuts dans l'écriture. « Non, mais parce que je me dis que ça vaudrait peut-être la peine de t’ouvrir un truc en ligne et de tout mettre dessus et... et j’me la ferme. » avait-il surenchérit, avant de se rendre compte qu'il n'était plus le temps de la taquiner à ce propos, sentant la colère qui montait doucement au nez de la flamboyante rousse. « Bien, bien. » entendais-je vaguement Ariane répondre quand j'étais déjà ailleurs, loin de cette conversation à laquelle je n'avais plus la moindre envie de participer. « T’as vu pourquoi ça a toujours bien fonctionné entre nous deux. » qu'elle répliquait finalement. J'avais hoché la tête, un nouveau sourire en coin – plus persuasif celui-ci – venant percer le masque d'impassibilité que j'avais aussitôt revêtu. Si Ariane pensait que je courberais l'échine face à elle, même après ce coup qu'elle venait de me porter, c'était qu'elle ne me connaissait pas. Cependant, déposant un billet sur la table, je me redressais, prêt à partir. « Je n'ai presque pas vu Ollie de la semaine et ça va bientôt être l'heure pour lui d'aller se coucher. » informais-je alors, m'attirant le regard étonné de Jessie. « Terminez la soirée sans moi. » Et sans demander mon reste, en ignorant volontairement les deux yeux qu'Ariane posait sur moi, j'avais pris mes clics et mes clacs pour filer à l'anglaise rejoindre la villa Hazard-Perry, réclamant plus que jamais l'apaisement que c'était que de retrouver la candeur de mon neveu pour lui lire une histoire avant de le laisser dormir.