C'était une question stupide. Il le savait. Il lui avait demandée si elle était sortie alors qu'il savait très bien que c'était le cas. Elle n'avait pas pu emmener des affaires. Et pourtant, elle portait une très jolie tenue. Une de ces tenues qui avait fait craquer Jay' quand ils s'étaient rencontrés. Lisbeth avait toujours eu du goût. Elle avait toujours été très chic. Simple, mais chic. C'était une des nombreuses raisons pour laquelle il était tombé amoureux. Est-ce qu'il était vraiment en train de penser à cela ? A ce qui avait pu faire battre son coeur ? Alors qu'elle l'avait plus ou moins poignardé ? Et que son coeur ne s'en était jamais vraiment remis. Est-ce qu'il s'en remettrait un jour ? Jay' ne pouvait pas continuer à vivre dans le passé. Après tout, Lisbeth était partie. Elle avait ses raisons qui étaient sans doute mauvaises. Mais elle était partie. Et s'il n'avait pas fait le deuil de leur relation, alors oui, il devait le faire. Une bonne fois pour toute. C'était peut-être pour cela que ... C'était sans doute pour cela qu'il avait proposé qu'elle vienne chez lui. Pour qu'ils mettent les choses à plat. Pour qu'il puisse tourner la page. Pour qu'il puisse se reconstruire. Et penser à autre chose. Ouais. C'était ça. Tout simplement ça. Il devait penser à autre chose. Il devait vraiment tourner cette page. Ca devait se faire. Maintenant. Il devait clôturer ce chapitre, même si ce n'était pas simple. "Ca te va bien." avait-il dit dans un sourire. Un rien lui allait mine de rien. Non, non, non. Ce n'était pas la bonne façon de penser. Il devait ... il devait s'éloigner d'elle. Pas essayer de la comprendre ou bien de faire dans le sentimentalisme. Mais il n'y arrivait pas. Peut-être qu'il lui fallait un bon coup de pied dans le cul, ou quelque chose dans le genre. Lisbeth avait ajouté qu'elle n'avait pas fait que du shopping pour elle. Non. Elle avait aussi pris à manger. Pour dîner. "Tu me connais. J'suis pas très chiant sur la bouffe." Il n'avait jamais été chiant. Il avait toujours mangé de tout. Il n'était pas difficile. Et même s'il n'aimait pas vraiment, il mangeait quand même. Certes, il avait comme un goût d'inachevé, si on pouvait dire ça ainsi. Mais qu'importe. Elle voulait manger français. Ils mangeraient donc français. Ouais. Voilà tout. Ca le dérangeait pas. Au contraire. Souvent, il cuisinait. Pour lui. Pour la caserne. Peut-être que c'est elle qui cuisinerait ce soir. Ca le changerait. Elle acceptait une bière avec plaisir. Alors, il avait été dans la cuisine, direction le frigo. Parce qu'une bière pas fraîche, c'était même pas la peine d'y penser. Le rayon du bas était ... pour les bières. Rayon qui se vidait parfois plus rapidement que prévu. Surtout quand il était en mode déprime. Lisbeth en profita pour lui poser une question. Sur sa journée. Il secoua la tête tandis qu'il reprenait la bière qu'elle venait de décapsuler. "Non." Une journée comme une autre. Et il préférait ça d'ailleurs. "C'est un poil ennuyant quand il ne se passe pas grand chose. Mais j'me dis qu'il vaut mieux ça que des vies perdues. Ou des gens blessés." Il eut un hochement de la tête. Bien sûr, ça l'amusait pas trop de rester à la caserne, à faire la popotte, ou bien jouer au ping-pong. "Mais c'est vrai qu'il manquait un petit quelque chose." Quoi précisément ? Bonne question. Mais un petit quelque chose quand même. Enfin, la journée était finie. Et une deuxième journée commençait. Avec Lisbeth. Il ne savait pas si elle était prête à parler ou pas.

Il était un poil mal à l'aise. A dire vrai, il ne savait pas trop ... Il ne savait pas trop comment se comporter avec Lisbeth. Elle lui avait brisé le coeur. Il constatait que ça faisait encore mal. Est-ce que ça continuerait de lui faire mal ? Ou bien est-ce que ça finirait par lui passer à un moment ou à un autre ? Il n'en savait rien. Il avait envie ... il avait vraiment envie de passer à autre chose. De penser à autre chose. De se dire que ... Et bien, que c'était la vie. Qu'ils n'étaient peut-être pas faits pour être ensemble. C'était peut-être le cas d'ailleurs. Peut-être que ... Peut-être que ... Il n'en savait rien. Et jaylen devait arrêter de se prendre la tête avec tout ça. C'était le moment de clôturer ce chapitre de sa vie. Oui. Et de se remettre en selle. Parce que depuis Lisbeth, il n'avait connu que quelques aventures d'un soir. Et même si le sexe sans attache c'était plutôt chouette, ce n'était pas quelque chose ... qu'il voulait à dire vrai. Non. Il avait besoin d'autre chose. Il avait envie ... en fait, Jay' ne savait pas trop ce dont il avait envie. Tout ce qu'il savait, c'est qu'il ne voulait pas toujours penser à Lisbeth. Et à leur histoire. Et c'était pas simple. "Parfois, il vaut mieux une habitation en cendres que des vies perdues. Tu ne crois pas ?" lui demanda-t-il alors qu'il venait de porter sa bière à ses lèvres. "Un bâtiment en cendres, ça fait toujours chier. J'peux le comprendre, mais c'est mieux qu'un mort." Bien sûr, c'était embêtant de perdre des objets, des souvenirs. Et tout un tas d'autres choses qui pouvaient être importantes. Précieuses. Pour autant, oui, si on lui laissait le choix entre perdre tout ça, ou perdre la vie, il préférait, et de loin, perdre des souvenirs. La vie était précieuse. Même si elle était garce parfois. Lisbeth s'était levée. Pour mettre la plaque à induction en route. Elle avait déjà préparé les casseroles. Et lui avoua qu'elle avait pris du veau. La manière dont elle venait de dire ça avait fait sourire quelque peu Jay'. "Parfait. Ca sera bien bon." Surtout que le veau avait une petite sauce qui dégageait déjà une certaine odeur, même si la plaque avait pas réellement commencé à chauffer. Lisbeth avait fini sa bière et elle demandait si elle pouvait en prendre une autre. "Oui, vas-y, pas de souci." Il n'avait pas dit qu'elle pouvait faire comme chez elle. Il s'était retenu de lui dire. Elle n'était pas chez elle. Elle aurait pu l'être. S'ils avaient été ensemble. Encore. A se demander s'ils seraient mariés à l'heure actuelle. Non. C'était quelque chose à laquelle il devait arrêter de penser. "Y'a le plein de bières. Je ne risque pas d'en manquer." Il secoua la tête. Et si jamais c'était le cas, il prendrait le temps ... Il prendrait le temps d'aller en racheter. En sortant du boulot par exemple. Parce qu'il n'était pas le genre de gars à ne pas avoir de bières à la maison. Non. Du tout.

Si y'avait plus de bière ... Et bien, plus de bière quoi. Mickey lui dirait que c'était pas une mauvaise chose qu'il freine sur la bouteille. Il était pas accro. Mais disons que ... disons que ça lui faisait du bien. Disons que, pendant un temps, ça l'avait aidé à oublier la souffrance. Oublier le départ de Lisbeth. Pour autant, ça ne lui avait pas permis d'oublier. Et il avait toujours cette boule. Ce poids. Et il se demandait bien comment il allait faire pour passer à autre chose. Pour penser à autre chose. Il ne savait pas comment faire. Il ne savait pas quoi faire d'ailleurs. Il le savait. Tourner la page, c'était quelque chose qu'il devait le faire. Il devait juste trouver ... comment le faire. Ca serait tellement simple s'il existait un mode d'emploi pour oublier les ... histoires de coeur qui n'avaient pas fonctionné. Ca serait tellement plus simple. Mais ça n'existait pas. Lisbeth avait fini par s'installer en face de Jaylen. Il redoutait ... Il redoutait la conversation qu'ils allaient avoir. Enfin, son regard ... ne semblait présager rien de bon. Peut-être se trompait-il. Il allait bien voir. Elle avait commencé. "C'est pas que je ne veux pas la lire." Il secoua la tête. "C'est juste que je préfère ... avoir cette conversation. Plutôt que lire un truc dont je n'aurais pas saisi toute la nuance." Oui, bon, peut-être qu'il aurait tout compris ce qu'il aurait pu lire. Peut-être que ça n'aurait rien changé. Peut-être qu'au final, il aurait réussi à faire son deuil de cette relation. Ou peut-être, qu'au contraire, ça n'aurait rien changé. Et ça n'aurait fait que l'enfoncer. Il ne savait pas vraiment comment il aurait réagi à dire vrai. Et maintenant ? S'ils avaient cette conversation, est-ce qu'il la lirait pour autant ? Lirait-il cette lettre après ? Peut-être. Qui sait ? Après quelques minutes d'un silence lourd, enfin, ça faisait peut-être seulement quelques secondes, mais il aurait cru que c'était une éternité, Lisbeth s'était lancée. Lui parlant de sa mère. Elle était morte. Deux jours avant leur rupture. Il voulait ouvrir la bouche. Il voulait lire quelque chose. Mais en fait, ce n'était pas le moment. Non. Il ne pouvait pas. Pas l'interrompre. Il devait attendre. Ne pas la brusquer. La laisser faire. Ainsi, sa mère avait été le déclencheur. Elle était morte. Elle ne voulait pas se laisser emporter par le chagrin, ou plutôt, entraîner Jay' dans une spirale de chagrin. Ca aurait été à lui de décider. A lui de voir s'il voulait être là pour elle. Mais elle ne lui avait pas laissé le choix. Elle avait préféré prendre cette décision pour elle. Pas pour eux. Elle poursuivit son histoire. Indiquant qu'elle avait fait le choix de demander de l'aide. Et de se retrouver dans un centre spécialisé. Elle y était restée un moment. Un an à ce qu'il comprenait. Avant de s'en sortir. "C'était pas à toi de décider pour nous deux." avait-il fini par lâcher tandis qu'elle venait de terminer. "J'avais mon mot à dire là-dessus. J'aurais pu t'aider à surmonter ça." Mais elle avait préféré lui tourner le dos. "Tu me faisais pas assez confiance pour que je puisse faire quelque chose ?" Certes, il avait eu lui aussi quelques petits soucis. Avec cette victime qu'il avait perdu sur ce manège, ce jour là. Mais après quelques mois, il avait réussi. Il avait réussi à s'en sortir. A passer à autre chose. "On dit toujours qu'à deux, on est plus forts." Mais Lisbeth ne le croyait pas. Peut-être qu'elle n'avait pas cru en leur couple. Peut-être qu'au fond, elle ne croyait pas en eux. Peut-être qu'elle n'y avait jamais cru. Il n'en savait rien. Il n'était pas certain de vouloir le savoir. Elle l'avait abandonné. Pour de mauvaises raisons. Alors qu'il aurait pu être là. Mais peut-être qu'elle avait eu peur de l'abandon. Peut-être avait-elle pensé qu'il la laisserait parce qu'il ne pouvait pas le supporter.

Elle était partie ... Lisbeth était partie comme une lâche. Il n'avait guère apprécié qu'elle parte, comme ça, du jour au lendemain. Surtout que ... Surtout qu'il avait pensé que ... Et bien, il avait pensé qu'ils auraient pu se battre pour leur couple. Il avait pensé qu'ils auraient essayé de tout faire pour ... Et bien, pour s'en sortir. Pour essayer de surmonter tout ça ensemble. Mais non. Elle était partie. Il l'avait attendue un moment. Et il se rendait compte que ... En fait, Jay' ne savait pas trop quoi penser par rapport à tout cela. Ok, Lisbeth avait perdu sa mère. Mais est-ce que ça voulait dire pour autant qu'ils devaient s'éloigner l'un de l'autre ? Pourquoi diable avait-elle pris cette décision ? Pourquoi ... pourquoi ... elle ne lui avait pas fait confiance. Elle avait beau dire que ce n'était pas une question de confiance, que ça n'avait rien à voir. Mais si. Au final, elle avait douté de lui. Elle avait douté de Jaylen pour qu'il la soutienne dans cette épreuve. Elle n'avait pas voulu de lui. Ce qu'il lui reprochait, c'était de l'avoir écarté. Alors qu'ils auraient pu essayer de ... Et bien, ils auraient pu essayer de s'en sortir. Mais non. "Tu peux pas dire ça Lisbeth." Il secoua la tête. "On a affronté des choses tous les deux et on s'en est sortis." Pour sûr. "Et je suis sûr qu'on serait arrivés à s'en sortir." Pour autant, elle n'avait pas eu confiance en lui. En leur couple. Elle avait préféré ... s'éloigner de lui. Jay' n'avait pas la science infuse. Il ne savait pas s'ils auraient pu s'en sortir tous les deux. Il ne savait pas s'ils serait encore ensemble à ce jour. Peut-être que ça n'aurait pas changé grand chose. Peut-être que ... Il n'en savait rien. Et il ne voulait pas penser à ce qui avait pu se passer. Il ne voulait pas l'imaginer. Parce que vivre dans le passé, ça ne servait à rien. Du tout. Ca lui faisait du mal. Voilà tout. Lisbeth avait croisé le regard de Jay'. Elle voyait très bien qu'il n'était pas content. Ok, il avait les informations. Mais il était vrai que ... Et bien, que ce n'était pas vraiment ce à quoi il s'attendait. Et il aurait préféré qu'ils se battent ensemble. Mais elle lui avait enlevé ça. Et maintenant, maintenant, il devait guérir. Elle devait guérir aussi. Passer à autre chose. Penser à autre chose. Plus facile à dire qu'à faire mais bon. Lisbeth était ... Toute chamboulée. Elle sanglotait. Elle pleurait. Mais elle se cachait aussi. Elle avait enfoui son visage dans ses mains. Elle n'était pas bien par rapport à tout ça. Il aurait tellement aimé la prendre dans ses bras. Il aurait tellement aimé pouvoir la réconforter. Mais il ne savait pas s'il devait le faire. Ou non. "Au moins, j'pourrais la lire maintenant." finit-il par lâcher. Même si Jaylen n'était pas certain de le faire. Après tout, Lisbeth venait de lui donner une explication par rapport à tout ça. Certes, l'explication ne lui faisait pas plaisir. Il aurait préféré ... Autre chose ... Et encore ... C'était mieux de savoir que c'était à cause de la mort de sa mère qu'elle l'avait quitté. Ca aurait pu être pire. Dans le sens où ... Et bien, elle aurait pu lui dire qu'elle ne l'aimait plus et qu'elle avait des sentiments pour un autre homme. Alors oui, c'était ... déjà ça, en quelque sorte. "T'aurais pas dû t'enfermer comme ça." crut-il bon de le préciser. "Ca aurait peut-être été dur les premiers temps. Mais j'suis sûr et certain que je ne serais pas parti." Du moins, il voulait le croire. Il s'était levé, afin de jeter un coup d'oeil à la nourriture qui était en train de chauffer. Il avait baissé un peu le feu et avait tourné un peu la nourriture, afin que ça ne s'attache pas au fond de la casserole. Ca serait vraiment dommage de manger quelque chose qui était cramé. Comme il était derrière Lisbeth, il avait posé ... ses deux mains sur les épaules de la jeune femme. Peut-être pour la rassurer. Ou peut-être pour qu'elle arrête de sangloter. Parce que même s'il était en colère contre elle, ça faisait mal. Ca faisait mal de la voir comme ça.

Il était peut-être en colère contre Lisbeth. Il ne comprenait pas les choix qu'elle avait pu faire. Il ne comprenait pas pourquoi ... pourquoi elle ne s'était pas battue pour lui. Pour eux. Pour leur couple. Pour autant, cette détresse ... ça le touchait. Oui. Ca le touchait. Et pas qu'un peu. Il ne savait pas ce qu'il pouvait dire de plus. Non. Est-ce qu'il avait envie de la prendre dans ses bras ? Peut-être bien. mais il n'en ferait rien. Pourquoi ? Pour la simple et bonne raison que ... Et bien, qu'il ne voulait pas la laisser croire des choses. La laisser croire que tout était pardonné parce qu'ils avaient parlé. Pourtant, il avait envie ... Oui, il avait envie de tout oublier. Il avait envie de tout envoyer en l'air. De lui dire qu'elle lui avait trop manqué. De lui dire que tout été oublié. Qu'elle ne devait plus penser à tout cela. Mais même s'il le voulait, au plus profond de son être, il ne savait pas. Il ne savait pas si ça pouvait être une bonne chose. A ce moment là, il était ... tout autant perdu qu'elle. Il pouvait se dire qu'il ne l'aimait plus. Souvent, c'était ce qu'il se disait. Qu'il avait fini par l'oublier. Mais en la voyant la veille, en la voyant maintenant ... Ca faisait mal. Ca faisait vraiment mal au coeur. Mais il allait prendre sur lui. Ouais. Il allait prendre sur lui. Et ne rien dire de plus. Il allait se taire. Enfouir ses sentiments qu'il pensait éteints depuis longtemps. Il ne voulait pas se relancer là-dedans. Parce qu'il avait souffert. Il avait vraiment souffert de cette perte. Il n'avait pas envie de souffrir à nouveau. Après, peut-être que ça ne changerait pas grand chose. Pouvait-il croire qu'ils pouvaient reprendre leur histoire ... leur histoire là où elle en était avant cet incident ? Il n'en savait rien. En tout cas, il préféra .... se concentrer quelque peu sur ... et bien, sur la bouffe qui était en train de cuire. Il n'avait pas envie que ça s'attache au fond de la casserole et manger du brûlé. Ca serait vraiment dommange mine de rien. Vraiment dommage. Après quelques minutes, finalement, elle avait fini par se lever, histoire de regarder par elle-même ce qu'il en retournait réellement. Et elle lui demandait des assietes. Alors, Jay' s'était dirigé vers le meuble et avait sorti deux assiettes. Avec les fourchettes et les couteaux. Parce qu'ils en auraient besoin, bien sûr, pour manger. "Tiens." avait-il dit en déposant les assiettes. "En tout cas, ça sent bon." Ca sentait vraiment bon. Oui. Il ne savait plus quoi dire maintenant. Il ne savait pas de quoi parler. Non. C'était un moment gênant. C'était un moment très gênant même. Oui. Est-ce qu'il regrettait .... de l'avoir sauvée et de l'avoir ramenée chez lui ? Non. Jamais. Mais c'était un moment gênant. Jay' récupéra quelques épices et du sel qu'il déposa au milieu de la table. Parfois, ça avait un peu du bon d'agrémenter. Le pompier avait fini par s'installer à table. Jetant quelques coups d'oeil à Lisbeth. Pour voir comment ça allait. Comment diable cette fille pouvait-elle encore faire battre son coeur alors qu'elle avait joué avec lui et qu'elle avait tout abandonné. Qu'elle avait abandonné leur couple. Leur relation.

Que lui dire ? Comment réagir ? Est-ce qu'il pouvait pardonner les choix qu'elle avait fait ? Est-ce qu'il pouvait passer outre sa décision ? Jay' n'avait pas la réponse. Du moins, pas maintenant. Il était encore assez ... comment dire ... Disons qu'il ne s'attendait pas à cela et il ne savait pas vraiment quoi penser de tout cela. Elle avait fait ce qui était le meilleur pour elle. Mais elle n'avait pas pensé à eux. Et c'était sans doute ça qui était le plus triste d'ailleurs. Qu'elle ait pensé à elle. Enfin, d'une certaine manière, elle avait pensé à lui. En pensant qu'il ne pourrait pas la soutenir. En pensant qu'il finirait par partir. Par s'éloigner d'elle. Mais elle avait mal jugé. Elle avait très mal jugé. Car c'était dans ... Et bien, c'était dans l'épreuve qu'on voyait la force. Et Jay' aurait aimé être là. Il aurait aimé être là pour elle. Il aurait voulu l'épauler. Il aurait voulu pouvoir la prendre dans ses bras. La serrer tout contre lui. Seulement, elle avait choisi pour lui. Elle avait choisi de s'éloigner. Elle avait choisi de rester loin de lui. Très loin de lui. Et maintenant ... Maintenant, il ne savait pas si ... Et bien, s'il pouvait pardonner. Il arriverait. A le faire. Pardonner. Sans doute le pourrait-il. Parce que même si c'était pas réglo ce qu'elle avait fait, Jay' n'était pas du genre ultra rancunier. Non. Ce n'était pas son genre. Pour autant, c'était difficile à digéer. Et à comprendre. Alors, pour l'heure, il allait éviter de trop se concentrer dessus. Peut-être lirait-il la lettre ce soir. Dans son lit. Ou pas. Il devait la lire. Maintenant qu'il connaissait la vérité, c'était le bon moment pour oser ouvrir l'enveloppe, sortir la lettre, et la lire. Une bonne fois pour toute. Ca lui ferait sans doute mal encore un peu. Mais il devait le faire. Pour son bien. Pour tourner cette page. Et commencer à écrire un nouveau chapitre.

Alors, oui, il avait détourné l'attention. Préférant se concentrer sur l'odeur qui émanait de la casserole. Ca sentait bon. Et ça semblait être prêt. C'était parfait. Il eut un léger sourire à la remarque qu'elle venait de faire. Par rapport au goût. "Avec une telle odeur, ça serait vraiment étrange que le goût ne soit pas au rendez-vous." Il eut un léger hochement de la tête. "Même si, j'avoue, ça pourrait arriver. Mais ça serait vraiment vraiment étrange." Et pas qu'un peu. Au moment, c'était un sujet de discussion comme un autre. C'était un sujet léger, en quelque sorte. Et ça évitait de penser au malaise. Au fait que ... Au fait qu'ils avaient eu cette conversation qui avait été loin d'être plaisante mine de rien. Mais discussion qu'ils devaient avoir à dire vrai. Elle avait pris les deux assiettes et elle les avait servis. Une pour lui. Une pour elle. En comparaison de celle de Lisbeth, la sienne était vraiment ... remplie. Pour autant, il avait l'estomac un peu noué. Sans doute le fait de la voir. Sans doute le fait de la savoir si proche. Le stress ... Un mélange de tout. Savoir la vérité. Mais que ça faisait mal de la savoir. Ca lui passerait. Ou pas. Lisbeth avait déposé l'assiette devant lui. Il avait porté sa bière à ses lèvres et elle lui avait souhaité bon appétit. "Bon appétit à toi aussi." avait-il répondu en posant sa bière devant lui. Il avait attrapé sa fourchette et il avait mélangé un peu les pâtes au veau et surtout à la sauce de ce dernier. Il avait commencé à manger. Il eut un hochement de la tête. Lisbeth lui demandait ce qu'elle en pensait. Enfin, elle avait juste prononcé un mot mais il savait qu'elle cherchait à en savoir un peu plus sur le plat et savoir si c'était plutôt bon. "Et bien écoute ... Ouais, ça se mange plutôt bien." Et pas qu'un peu. "Ca se mange même très très bien. J'veux dire, la sauce est plutôt à tomber." Et c'était pas trop fort. Enfin, c'était pas non plus une explosion de goût dans la bouche. Quand c'était le cas, ce n'était jamais bien agréable. Trop de saveur tuait la saveur, si on peut dire ça ainsi. "Et toi, t'en penses quoi ?" Il avait l'impression qu'elle était restée suspendue à ses lèvres. Comme si le souffle lui manquait, le temps qu'il réponde. Enfin, c'était peut-être qu'une impression. "Non, je ne travaille pas demain." avait-il dit en secouant la tête. "Sauf s'il se passe un gros truc et que je sois appelé en renfort." Il le ferait. Il partirait si c'était le cas. Oui. Il l'avait déjà fait. Être en repos. Et devoir ... Et bien, devoir partir en plein milieu de sa journée dans le boulot et quoi que ce soit dans le genre. Il l'avait fait. Et il le referait au besoin, c'était certain. Oui. "Au fait, t'as eu le temps ... de prendre contact avec l'assurance ... pour ton appartement ?" C'était peut-être quelque chose dont elle n'avait pas envie d'évoquer. Après tout, hein, elle l'avait échappé belle la veille. Et elle avait peut-être besoin de s'en remettre et de pas forcément parler de ça pour le moment.

Ouais. une discussion ... banale. Ils allaient retomber dans de vieux travers. Sans doute pour éviter d'exprimer ce qu'ils avaient vraiment sur le coeur. Que ressentait Jay ? Là ? Tout de suite ? Il n'en savait trop rien. C'était le bordel dans sa tête. Il savait pourquoi elle avait agi comme ça. Il savait pourquoi elle avait préféré partir. Pour autant, il devait digérer l'information. Qu'allait-il faire de ce qu'elle venait de lui dire ? Est-ce que ... Est-ce qu'il allait lui pardonner ? Pourrait-il tourner cette page qu'il n'avait jamais réussi à tourner ? Peut-être bien. Enfin. Là, tout de suite, c'était pas une mauvaise chose de parler de la sauce. Ouais. "Très bien choisi je dirais même." Il eut un hochement de la tête. "A mon avis, ils ont dû mettre un ingrédient secret dedans. Si bien que les gens tombent sous le charme de leur sauce et ça les oblige à devoir aller en chercher en magasin." Et oui, c'était ça le business. Rendre les gens accro. Ou presque. Pour qu'ils consomment plus. Et qu'ils reviennent. Ou alors, Jay' se faisait complètement des idées et préférait partir sur quelque chose de déconnant afin d'oublier sa peine.

Ce qu'il faisait le jour suivant ? Il n'allait pas au travail, ça, c'était une certitude. Sauf si y'avait besoin de renfort. Alors, oui, il laisserait tout en plan et il irait au travail. Après ... Il ne savait pas vraiment ce qu'il allait faire. Des courses ? Pas vraiment. Il avait ce qu'il fallait. Du shopping ? Pas son genre. Aller voir sa soeur ? A voir. Faire un tour en ville sans but ? Ouais, possible. Il verrait bien selon son humeur. Jay' préférait ne pas faire de plan sur la comète, si on peut dire ça ainsi. Depuis qu'il n'était plus avec Lisbeth, il préférait ... Il préférait voir les choses au jour le jour, en quelque sorte. Parce qu'il avait cherché à se projeter avec elle. Au final, il s'était fait avoir. Il avait été piégé par ses sentiments. Maintenant, ça lui revenait au visage, comme un boomerang. Il en profita pour poser une question à Lisbeth. Sur l'assurance. "J'crois qu'ils ne sont jamais bien pressés." Il secoua la tête. "C'est triste à dire mais ce sont toujours des démarches plus ou moins longues à effectuer." Fallait faire la déclaration, qu'il y ait un retour d'enquête. Et puis encore quelques petites choses. Et au final, l'indemnisation. Ou pas selon les cas. Comment il était au courant de tout ça ? Et bien, parce qu'il était pompier. Ila vait pu aider quelques victimes dans des démarches. Parce qu'être pompier et sauver les gens, c'était la seule chose qu'il faisait. Non. Il se devait, aussi, d'aider les victimes. Les assister si celles-ci en ressentaient le besoin quand elles venaient voir les pompiers à la caserne. C'était pas rare d'en voir débarquer quelques uns. Enfin, passons. "On peut peut-être aller voir." en vint-il à lui dire. "T'auras pas le droit de rentrer chez toi. Mais en tant que pompier ..." Lui, il avait quelques passe-droits. Il n'irait pas jusqu'à dire qu'il faisait ce qu'il veut. Mais ce n'était pas la première fois qu'il se rendait dans des appartements sinistrés et ce ne serait pas la dernière fois. Oh que non. Pas qu'il en profitait. Mais si les victimes avaient besoin de choses qui étaient restées chez elle, oui, il faisait en sorte de pouvoir s'y rendre avec elles et de récupérer quelques petites choses, sans que ça gêne pour autant ... sans que ça gêne pour autant l'enquête et tout ça. Ouais. "Enfin, à toi de voir si tu veux qu'on y aille ou pas." C'était elle qui décidait. Elle et personne d'autre. Pour sûr. Lisbeth en vint à lui poser une question. Sur ... Sur l'échelle. "Ca m'arrive, toujours." Il eut un hochement de la tête. "Toujours un peu réticent, par contre, à cause ... de ce qui s'était passé sur ce manège ..." Il en avait parlé à Lisbeth. C'était ça qui l'avait amené à Perth d'ailleurs. Et c'était comme ça qu'ils s'étaient rencontrés. "Quand je peux l'éviter, j'essaie de le faire." Pas qu'il n'aimait pas l'échelle. Mais il avait peur ... Il avait peur des conséquences. De perdre de nouveau une victime. Ca l'embêterait. Beaucoup d'ailleurs. Ca ne lui était pas arrivé depuis. Et il espérait que ça ne lui arriverait pas. "Enfin, après, ça dépend de si je dois sauver une personne. Ou bien un animal." Ca l’ennuierait de perdre un animal, qu'on se le dise. "Parce que si on utilise l'échelle, c'est parce qu'ils sont dans un arbre." Ils parlaient des chats. "Et là, moins de risque de perdre quelqu'un." C'était un peu morbide comme sujet mais bon.

Il pencha la tête légèrement sur le côté tandis qu'elle parlait de McDo. "Ouais ... j'aurais pas forcément comparé avec McDo." Pas que ce n'était pas bon. Ca dépannait bien mine de rien quand on n'avait pas le temps de faire la cuisine. Ou qu'on n'avait tout simplement pas vraiment l'envie de se mettre derrière les fourneaux. Mais ce qu'ils avaient dans l'assiette, et ce qu'ils proposaient chez le clown, c'était pas la même chose. Pas le même goût. Et pas le même prix. Oui. Rien de tout ça. "Tu m'aurais parlé d'un grand restaurant, oui, ok. Parce que je suis sûr qu'ils ont effectivement des ingrédients secrets." Qui sublimaient le goût. Mais la firme au clown... Ce n'était clairement pas la même chose. Mais alors pas du tout. Enfin, passons. Ca faisait du bien. De parler de tout et de rien. De pas parler de sujets importants ou bien qui pourraient faire mal. Pas qu'il n'en avait pas envie. Mais c'était un peu le cas à dire vrai.

Toutefois, la discussion changea quelque peu. Tournant sur les démarches que Lisbeth avait pu entreprendre auprès de son assureur. Pas qu'il avait envie de la foutre dehors ou quoi que ce soit dans le genre. Non. Mais disons que ... et bien, il avait envie de savoir. Et c'était tout à fait normal. Si elle restait longtemps, Jay' ne savait pas vraiment comment ça pourrait tourner avec elle. Non. Il était vrai que c'était quelque chose de compliqué. Il pensait avoir tourné la page. Mais il se rendait compte que ce n'était pas le cas. Non. Il avait toujours des sentiments pour elle. De l'affection. Il n'aurait pas pensé. Mais la revoir ... ça soulevait des choses qu'il aurait aimé taire. Et malheureusement, ce n'était pas le cas. Malheureusement ou heureusement, difficile de dire. Comment se comporter face à elle ? "J'peux pas vraiment dire." Il secoua la tête. "J'étais sur la grande échelle. Mes collègues sont passés par l'intérieur." Il eut un haussement des épaules. "De ce que j'ai compris, ça semblait aller plutôt bien." Enfin, à ce qu'il avait compris. Il avait lu les rapports de ses collègues. Après, comme il lui proposait, ils pouvaient toujours se rendre sur place. Bien sûr, il rentrerait le premier. Au cas où. Il irait à l'avance et se chargerait de ... Et bien, de vérifier si tout était accessible. Et éviter qu'il n'arrive quelque chose à Lisbeth. Manquerait plus qu'elle se fasse mal ou quelque chose dans le genre. Elle semblait étonnée qu'il lui propose cela et elle lui demanda s'ils pouvaient vraiment le faire. "Bien sûr. C'est pas la première fois que je le fais." Il secoua la tête. "On le conseille pas forcément parce que c'est dangereux. Mais j'l'ai déjà fait à quelques reprises. Pour des victimes." Donc, il ne voyait pas pourquoi il ne pourrait pas le faire. Une nouvelle fois. D'autant plus que c'était pour Lisbeth ... Ok, bon, c'était pas une bonne excuse. Elle lui avait fait du mal après tout. Et Jay' ne lui devait rien. Mais alors rien du tout. Pourtant, il lui avait tendu la main. Il avait envie de le faire. peut-être qu'il n'était pas mécontent de la situation et que ça lui permettait de reprendre contact avec Lisbeth. Que son appartement flambe, oui, bon, ça, c'était pas cool pour elle. Pour sûr. Mais au moins, ils se parlaient. Au moins ils avaient pu mettre les choses à plat. Et peut-être que Jay' arriverait à tourner la page. Ou pas. En tout cas, il voulait croire qu'il allait arriver à le faire.

Lisbeth était curieuse de savoir comment Jay' continuait d'occuper ses journées. Enfin, principalement quand il était en train de bosser. Ce qu'il pouvait faire ... ce qu'il pouvait faire. Les personnes qu'il sauvait. Ou bien les choses qu'il sauvait. Parce que oui. Au final, il ne sauvait pas uniquement des humains. Non. Il s'occupait, parfois, de quelques bestioles aussi. "Oui, ça arrive aussi pour les ruches. Même si c'est plus rare." Il eut un hochement de la tête. "Mais la plupart du temps, quand même, ce sont les chats." Des petits chats. Des mignons petits chats. Chat ou chien ? Pour Jax, peu d'importance. Parce qu'il aimait bien les uns et les autres. Toutes les fois où il se pointait à la clinique vétérinaire parce que ... parce qu'il avait récupéré un chat ou un chien sur la route. Ouais ... Il ne comptait plus les fois à dire vrai. "Après, les ruches, c'est moins drôle. Ca pique ces saloperies." Mais bon, c'était pas comme s'il avait le choix après tout. Oui. C'était pas lui qui décidait des affectations. Et il se contentait d'aller là où on lui demandait d'aller. Voilà tout. "Et ... toi ..." Il avait porté son verre à ses lèvres durant quelques instants afin de boire un peu. Parce que ça donnait soif tout ça après tout. "Tu fais quoi ?" Parce qu'ils avaient beaucoup parlé de lui. Mais pas d'elle.