Installé au comptoir de la cuisine, occupé à corriger des copies, tu ne peux t’empêcher de t’arrêter quelques instants pour regarder ton fils qui joue dans le salon quelques mètres plus loin. Abel avait adoré la nouvelle maison et sa nouvelle chambre. La présence d’un jardin et d’un toboggan avait été pour lui un réel plus. Tu étais bien conscient qu’à côté de ce à quoi il était habitué avec la famille richissime de sa mère, ce n’était pas grand chose mais tu ne pouvais pas lui offrir plus financièrement alors tu espérais qu’il ne t’en tiendrait pas rigueur. Si cette maison était la tienne aujourd’hui c’était parce que Lily avait accepté de retirer son offre. Tu t’étais senti trahi quand ton agent immobilier t’avait annoncé qu’elle avait fait une offre, surtout quand tu n’avais pas caché ton enthousiasme quant à cette maison et que tu lui avais expliqué pourquoi tu avais décidé d’acheter un bien immobilier. Il avait fallu ravaler une grosse partie de ta fierté pour aller presque la supplier de retirer son offre. Tu ne pouvais pas proposer plus que ce que tu avais déjà proposé, tu n’en avais pas les moyens. Mais il était clair que Lily les avait, ses années loin de Brisbane avaient été bénéfiques à son compte en banque. C’est ton fils qui te sortit de ta rêverie en venant te demander : « Papa ? Tu viens jouer avec moi ? » Un sourire se dessina sur ton visage. Tu étais toujours émerveillé quand Abel t’appelait papa. Cela n’était pas venu tout de suite mais c’était venu naturellement, au fil des mois. Il avait fallu être patient mais tu l’avais été parce que tous ces changements avaient été brutaux pour toi mais aussi pour ton fils. « Et si on préparait des cookies ? » Proposas-tu à ton fils qui sauta de joie à l’idée de couvrir la cuisine de farine très certainement. Tu devais amener Abel chez Angelina dans quelques heures, autant profiter de ton fils un maximum. Tu lui laisseras quelques cookies et tu amèneras les autres pour une visite surprise. Il ne fallut qu’une dizaine de minutes pour préparer Abel à cet atelier cuisine. Vous vous laviez les mains puis vous enfilâtes un tablier et vous vous mîtes au travail. Aujourd’hui vous alliez faire des cookies au beurre de cacahuète et aux pépites de chocolat. Tu espérais que Lily n’avait pas développé d’allergies ou d’intolérances depuis son départ sinon ces cookies n’allaient servir à rien. A part à passer un bon moment avec Abel bien entendu. C’est dans la joie et la bonne humeur que vous préparâtes les petites cookies et alors qu’ils étaient au four en train de cuire, tu en profitas pour rendre Abel de nouveau présentable. Tu doutais qu’Angelina t’en veuille mais bon, tu n’étais pas toujours sûr de ce que tu pouvais faire ou non avec Abel et tu préférais être prévenant. Tu laissais ton fils jouer le temps de faire cuire les fournées de cookies avant de lui dire de ranger et de prendre les jeux qu’il voulait amener chez sa mère. Une quinzaine de minutes plus tard, vous étiez tous les deux dans la voiture, Abel tenant une boîte de cookies pour chez sa mère et toi ayant posé l’autre sur le siège passager. Tu déposais Abel chez sa mère, le prenant dans tes bras une dernière fois en lui promettant de l’appeler dans la semaine. Tu le laissais ensuite filer en leur souhaitant une bonne dégustation. Tu pris ensuite la direction de chez Lily. Cette dernière t’avait donné son adresse certainement sans s’en rendre compte lorsque vous aviez visité la maison et que vous parliez de vos logements actuels. C’est donc à cette adresse que tu te rendis en espérant ne pas faire erreur. Par chance, quand tu arrivas devant l’immeuble, un monsieur en sortit en te saluant te permettant de sauter la case interphone. Grâce aux boîtes aux lettres, tu trouvais rapidement le numéro d’appartement de Lily. Quelques minutes plus tard, tu frappais à la porte, la boule au ventre. Soudainement, cela te semblait vraiment étrange de venir sonner comme ça chez elle mais … Tu n’eus pas le temps de finir ta pensée que la porte s’ouvrit sur la jeune femme en question. « Hey … » Dis-tu comme l’idiot que tu étais. « Je voulais t’apporter ça, en guise de merci pour la maison. » Dis-tu en lui tendant la boîte de cookies. « Abel l’adore donc merci. » C’était sincère, c’était peut-être maladroit mais tu avais été soulagé de pouvoir acquérir cette maison après deux mois de recherche active.
Tu te sens ridicule. Cette idée t’était venue comme ça, sans prévenir quelques jours plus tôt. En théorie, tu n’avais pas besoin de remercier Lily mais peut-être avait-elle renoncé à la maison de ses rêves ? Dans tous les cas, c’était un geste qui ne pouvait qu’être attentionné, un geste qui ne pouvait pas être mal interprété. La vérité c’était que Lily était de retour à Brisbane depuis plus d’un an déjà et depuis, vos rencontres n’avaient rien été d’autres que des affrontements plus ou moins déguisés. Vous n’aviez jamais discuté du départ de Lily, des raisons qui l’avaient poussées à s’enfuir de la sorte. Pourtant, elle devait savoir que cela t’avait arraché le cœur, que cela t’avait fait aussi mal que le départ de ce père auquel tu refusais aujourd’hui de penser. Au fond de toi, tu savais que Lily était partie pour réaliser ses rêves, des rêves qui contrairement aux tiens si modestes à côté, ne pouvaient pas être réalisés à Brisbane. Et c’était peut-être ça qui faisait le plus mal au fond, savoir reconnaître que tu n’avais jamais été aussi important que ses rêves, que tu ne pouvais pas l’être peut-être malgré tous tes efforts. Tu te dis des fois qu’elle aurait pu te proposer de t’envoler à ses côtés. Tu doutes que tu aurais accepté parce que tu as toujours été très attaché à Brisbane mais les choses ne se seraient pas terminées ainsi. Mais aujourd’hui vous ne pouviez pas changer cela, cependant, il était indéniable que l’absence de conversation à ce sujet pesait toujours sur vos échanges et alors que tu montes les marches vers l’appartement de Lily, tu sais que ce sera encore le cas aujourd’hui très certainement. Pourtant, tu refuses de reculer, il en est hors de question. Maintenant qu’Abel est entré dans ta vie, que tu commences à avoir tes marques, il est temps que tu arrêtes de te focaliser simplement sur ton fils et que tu règles certaines choses comme l’adulte que tu étais censé être. « Oh, Arthur. Salut. » Tu peux comprendre sa surprise, à sa place, tu l’aurais sans doute été aussi. Ce n’est pas tous les jours que l’on trouve son ex sur le pas de sa porte. Mais vous n’étiez plus un couple depuis longtemps, des années. Et en brisant ce couple, c’était votre complicité qui avait disparue avec. Tu tends à Lily la boîte de cookies sans hésiter parce qu’ils sont pour elles de toutes manières. Les autres sont avec Abel. « Ils ont l'air très bon, c'est toi qui les a fait ? » Tu souris en repensant à cette après-midi en cuisine avec Abel. Tu as passé un très bon moment et ton fils a mis sa petite touche à ce remerciement sans réellement le savoir. « Abel m’a aidé. Ca a été notre dernière activité de la semaine avant que je le ramène chez sa mère. » Dis-tu tout simplement à Lily. Tu ne savais pas très bien ce que tu avais raconté à Lily sur Abel et sa mère, pas grand chose très certainement. Deux opposées, voilà ce qu’étaient Angelina et Lily, la preuve que tu cherchais à fuir un souvenir à l’époque encore trop puissant. « Tu n'as pas à me remercier. Tu en avais plus besoin que moi. Puis, cette maison était faite pour vous deux, je ne pouvais pas être égoïste. » La maison était réellement faite pour vous deux, c’était vrai. Mais comme elle le disait, Lily aurait très bien pu être égoïste. Après tout, elle ne te devait rien. « Tu aurais pu l’être. » Dis-tu en haussant les épaules avant d’ajouter : « J’espère que tu trouveras ton bonheur dans de futures recherches. » Lily avait l’air bien installée dans son appartement actuel. Il t’aurait largement suffit quand tu étais seul mais chacun n’aspire pas aux mêmes choses dans la vie, tu l’avais compris de manière brutale tout au long de ta vie. « Tu veux entrer... ? Je peux te proposer un café ou autre chose, pour déguster ces cookies. À moins que tu ne sois pressée... ? » Tu la regardes, étonné. Tu ne pensais pas recevoir une invitation. Tu pensais faire demi tour la laissant déguster les cookies ou les jeter s’ils n’étaient pas mangeables. Tu n’avais pas eu le temps de les goûter. « J’ai le temps mais je ne voudrais pas te déranger. » Dis-tu car tu n’avais pas manqué de noter le regard que Lily avait jeté au dessus de son épaule. Mais Lily se décale de la porte et l’ouvre en grand pour que tu puisses entrer. Tu ne te fais pas prier, sortant tes mains des poches de ton pantalon. Tu es gêné parce que tu ne sais pas quoi faire, tu ne sais pas réellement quoi dire. La vérité c’est que tu ne sais rien de la Lily qui se trouve devant toi, tu ne connais plus la femme qui avait joué un si grand rôle dans ta vie et tu le regrettes, vraiment. « Comment tu vas ? Pas encore lassée de Brisbane ? » Ne pus-tu t’empêcher de demander. C’était plus taquin qu’autre chose mais tu remarquais trop tard que cela pourrait être mal interprété. Tu espérais que Lily comprendrait en tout cas.
Avec Lily c’était toujours compliqué dans le sens où tu ne savais pas sur quel pied danser. Jamais vous n’aviez réellement mis les choses au clair, jamais vous n’aviez parlé de ce passé qui vous liait préférant vous livrer à du ‘small talk’ plutôt qu’à une discussion sérieuse. Cela faisait qu’au final, tu ne savais pas trop à quoi t’attendre quand tu croisais Lily. Bon, cette fois c’était toi qui étais venu chez elle pour lui faire un petit cadeau de remerciement donc tu venais en paix, contrairement aux autres fois où tu ne pouvais nier avoir été plus ou moins agréable. Mais tu avais tes raisons et Lily ne pouvait pas les ignorer. Se faire larguer quelques jours avant de faire sa demande, en pleine période de Noël et avec un mot laissé sur la table de la cuisine de cet appartement partagé avait été dur à avaler. Sept ans plus tard, c’était toujours difficile d’y repenser. Certainement qu’elle s’était dit que tu t’en remettrais, que tu referais ta vie mais tu n’avais pas été capable de faire confiance à quelqu’un depuis longtemps et encore moins de te projeter dans une relation à long terme. L’arrivée d’Abel dans ta vie t’avait fait remettre les choses en perspectives et surtout, t’avait fait prendre conscience que si tu cherchais du long terme, il était peut-être temps d’arrêter de flirter avec des demoiselles dans des bars, ce qui ne menait pas à grand chose à part à un peu de compagnie pour la nuit. Ce que tu recherchais à une époque. Tu ne cachais pas à Lily que tu n’étais pas le seul pâtissier derrière les fourneaux, Abel avait aussi mis la main à la pâte. « Tu as peut-être un futur pâtissier à tes côtés. » Peut-être, peut-être pas. Tu laisses échapper un petit rire parce qu’Abel n’a que quatre ans et pour l’instant tu ne veux pas l’imaginer faire un quelconque métier. Mais s’il veut persévérer dans la pâtisserie, tu seras le premier à l’encourager. Et peut-être que ta voisine qui est dans la restauration lui donnera un coup de main même si elle semble ne pas pouvoir t’encadrer. Tu as encore le temps d’arranger ça pour la carrière de ton fils si ça l’intéresse. « Si c’est ce qu’il a envie de faire, il pourra compter sur moi. » C’est important pour toi de soutenir ton enfant dans ce qu’il veut faire. Tu ne comptes plus le nombre de parents qui veulent pousser leur enfant dans une voie qui n’est pas celles qu’ils veulent choisir. C’est à toi d’essayer de les convaincre et dans ces moments là tu deviens le meilleur allier de tes élèves, celui qui voit à quel point ce genre de situation les fait souffrir. « Je trouverai mais je ne suis pas pressée pour le moment. J'ai le temps. » Tu hoches la tête car tu n’as rien à ajouter à cette déclaration. Tu souhaites à Lily de trouver le bien qui lui convienne le mieux et tu lui seras réellement reconnaissant de t’avoir laissé cette maison à ce moment là de ta vie. Elle t’invita à entrer ce qui te surprit car en général, plus courtes étaient vos interactions, mieux vous aviez tendance à vous en porter tous les deux. Tu décides de ne pas refuser car tu n’es pas pressé et il est peut-être temps de mettre les choses à plat ou au moins de mettre la situation actuelle à plat tous les deux aujourd’hui. Tu ne savais pas si cela allait arriver mais tu ne pouvais t’empêcher d’espérer que les choses aillent dans cette direction car tu avais du mal à savoir sur quel pied danser et cette incertitude te pesait pas mal il fallait l’avouer. Une fois à l’intérieur, tu demandas à Lily si elle allait bien, posant la question qui fâche. Tu ne voulais pas créer de conflit mais c’était une question dont la réponse t’intriguait et tu espérais l’avoir posé sur un ton un peu taquin qui ferait comprendre à Lily que c’était plus une plaisanterie qu’autre chose. Cependant, cela n’a pas l’air d’avoir été le cas. « Je vais bien. J'ai beaucoup de projets en cours depuis que je suis rentrée. Ça me plaît. Et toi ? » Des projets … Tu te demandes de quels projets Lily parle et tu te demandes si tu as le droit de lui poser la question. Mais que serait la vie si on ne prend pas certains risques ? Après tout, Lily n’est pas obligée de te répondre, tu n’étais pas en train de lui mettre le couteau sous la gorge. « Je vais bien, un peu fatigué. La rentrée c’est toujours une période difficile à passer mais la saison de baseball bat son plein alors je ne vais pas me plaindre. Quels sont tes projets dans notre belle ville ? » Lui demandas-tu. Lily connaissait ton amour pour ce sport, plus que beaucoup car tu l’avais traînée à des matchs à une époque. Elle était déjà partie cependant quand on t’a confié la direction de l’équipe de baseball du lycée, ça tu n’y avais pas pensé sur le moment. « Je crois que j'ai posé mes bagages pour de bon et que je ne suis pas prête de repartir. J'ai fait ce que j'avais à faire et voilà. Je n'ai plus de raison de m'en aller. Je te sers quoi ? J'ai un peu de tout, même des jus de fruits et des bières, en passant par du café et du thé. » Tu fus surpris de savoir que Lily ne comptait pas repartir. Tu ne savais pas très bien pourquoi mais à tes yeux, elle s’était transformée en petit oiseau voyageur qui était en train de faire une pause avant de s’envoler de nouveau. Pourtant, son envie d’acheter une maison aurait déjà dû te donner un indice mais trop préoccupé par tes problèmes, tu ne l’avais pas vu. « Je veux bien un thé s'il te paît. Ca se marie mieux avec des cookies que de la bière. » Dis-tu un sourire sur les lèvres. Il était bien trop tôt pour ça de toute manière. Et puis si les cookies étaient trop durs, ça permettrait de faire passer le tout. « Tu as pu faire le tour du monde ? » Demandas-tu à la jeune blonde. Après tout, tu préférais te dire que Lily t’avait quitté pour un rêve qu’elle avait réalisé plutôt qu’un rêve qui n’était resté que ça.
Au final, tu n’avais pas tant d’ex petites amies que certains pourraient le penser. Tu en avais trois ce qui n’était pas énorme mais les trois t’occupaient bien assez pour que tu trouves cela bien suffisant. La moins pire était certainement Marianna qui continuait à t’en vouloir même aujourd’hui d’avoir fait le con quand vous étiez au lycée mais ce n’était pas aussi compliqué à gérer que ta relation avec Lily ou avec Angelina. Cela faisait à peu près un an que les deux jeunes femmes étaient entrées de nouveau dans ta vie et cette dernière avait été bousculée. Tu ne savais toujours pas si tu allais réussir à t’entendre avec Angelina autour de l’éducation de votre fils et de la garde partagée autour des fêtes et des anniversaires mais tu n’avais pas d’autres choix que d’essayer de faire le maximum pour qu’Abel souffre le moins possible de cette situation. Ta plus grande peur était certainement qu’il te dise un jour qu’il aurait préféré ne jamais connaître son père, continuer à ne vivre qu’avec sa mère. Il avait quatre ans, tu ne t’attendais pas à ce qu’il te dise cela maintenant mais il pourrait le faire un jour, en colère, sans se rendre compte de l’impact que pourrait avec ces mots. C’était d’ailleurs étrange de parler d’Abel avec Lily. Il fut un temps où c’était avec Lily que tu t’imaginais avoir des enfants. C’est pour ça que tu avais acheté cette bague, pour faire un pas de plus dans la direction de ce rêve qui t’était cher à l’époque. Tu aurais attendu pour avoir des enfants, vous étiez trop jeunes à l’époque mais si elle ne t’avait pas quittée, vous approcheriez des dix ans de vie commune aujourd’hui. Tu chassais ces pensées de ton esprit, cela ne servait à rien de remuer le couteau dans une plaie que tu essayais de refermer depuis des années. « Tu sembles faire un très bon père. J'ai toujours su que tu en ferais un. » Tu souris mais un sourire timide et quelque peu forcé parce que ça fait mal. Tu as envie de lui demander pourquoi elle s’est enfuie ainsi si elle le pensait sincèrement. Mais peut-être qu’elle n’avait tout simplement jamais envisagé votre relation jusqu’à cette étape. Tu n’es pas certain d’être un très bon père, tu as l’impression de tout faire de travers mais tu ne peux t’empêcher de te dire qu’au moins tu es là pour Abel. Tu es présent pour le voir grandir, pour l’aider, pour le soutenir et tu comptes le faire toute ta vie. Tu refuses que ton fils vive ce que tu as vécu. « Je n’en suis pas si sûr mais en tout cas je suis là, il n’aura pas à grandir sans son père. » Dis-tu en haussant les épaules. Lily connaissait ton histoire familiale dans les moindres détails. Elle était l’une des rares personnes à qui tu avais tout confié et cela t’avait fait du bien à l’époque. Dans ta famille, on te regardait comme si tu étais la cause de tous les malheurs et même si tu avais du mal à croire Lily, entendre que tout n’était pas de ta faute t’avait fait du bien quand tu t’étais retrouvé seul, coupé de tes sœurs et de ta mère. Finalement, vous preniez des nouvelles l’un de l’autre. Rien de spécial, quelque chose d’assez superficiel finalement mais c’était certainement nécessaire parce que vous ne vous connaissiez plus très bien aujourd’hui. « Toujours aussi passionné de baseball à ce que j'entends. » Tu hoches la tête. Même si tu avais refusé l’offre que l’on t’avait faite pour jouer professionnellement au baseball, cela restait ta passion et tu avais tout fait pour garder une dose de baseball respectable dans ta vie. Entraîner la nouvelle génération et aller voir tes anciens camarades jouer dans des stades, cela te suffisait. « C’est ma passion, comme la tienne est le chant et la danse. » Tu n’as jamais été doué dans l’une ou l’autre des discipline ce qui faisait beaucoup rire Lily à l’époque mais tu avais été là pour elle pour la soutenir dans cette voie. Tu te souviens de dizaines de représentations à tous les coins du campus, dans des théâtres. Tu devais avouer ne pas avoir remis les pieds dans ce genre d’endroit depuis longtemps. « Je... Je suis en train de voir pour monter ma propre école de danse en ville. J'ai vraiment envie d'enseigner maintenant et de transmettre ma passion à des petits et grands. Et j'ai rejoins une compagnie il y a quelques mois aussi, un peu dans le style de Broadway. Mais seulement en tant que chorégraphe et professeur de chant et de danse. Être sur le devant de la scène, je crois que ce n'est plus pour moi. » Tu hoches la tête mais tu ne peux cacher ta surprise. Lily et la scène c’était une histoire à part. Tu l’avais vue s’épanouir sur scène et tu n’avais jamais envisagé qu’elle finirait par la quitter. Du moins partiellement vu que désormais elle était juste derrière le rideau. « Félicitations. J’espère que tu arriveras à monter ton école, il doit bien avoir des mini-Lily qui rêvent de ce genre d’endroit à Brisbane. » Dis-tu pour la taquiner un peu. Tu n’avais pas manqué le fait qu’elle ait parlé de Broadway et tu ne pus t’empêcher de demander : « Tu as réussi à monter sur scène à Broadway alors ? » Tu avais croisé la sœur de Lily à quelques reprises ces dernières années mais d’un commun accord, vous parliez de tout sauf de Lily quand le hasard vous mettait sur le chemin l’un de l’autre. Et tu lui en avais été extrêmement reconnaissant. Lily te propose ensuite de boire quelque chose pour que vous partagiez les cookies. Plus tu restais, plus tu savais que la conversation allait être inévitable. « C'est vrai que ce n'est pas terrible avec de la bière. Quel parfum tu veux ? J'ai un peu de tout. » Tu regardes les différents sachets qu’elle te met sous les yeux mais tu as toujours eu une petite préférence pour les thés aux fruits alors tu n’hésites pas très longtemps. « Je vais te prendre celui aux fruits rouges. Merci. » Dis-tu parce que c’était la moindre des choses. T’installant à la table de la cuisine, tu laissais Lily vous préparer les boissons alors que tu ouvrais la boîte de biscuits. Refusant de laisser le silence s’installer, tu demandais à Lily si elle avait pu voyager, un de ses rêves. « Et oui. C'est assez dingue quand j'y pense. Il y a des pays que je ne pensais jamais visiter et... Et pourtant, j'y suis allée. » Elle avait l’air tellement épanouie quand tu l’entendais en parler … Au moins tu avais été forcée de la laissée partir pour quelque chose de mieux que ce que tu pouvais lui offrir. Parce que tu n’aurais pas pu lui offrir un tour du monde. « D'ailleurs.. Je voulais m'excuser pour... Enfin, d'être partie comme ça il y a six ans. » Tu pensais que ce serait toi qui mettrais le sujet sur le tapis, à un moment mais non, Lily semblait elle aussi se rendre compte qu’il était temps de parler de ce sujet. Cela faisait un an qu’elle était rentrée à Brisbane et vous n’aviez encore jamais abordé le sujet. Comme quoi, vous étiez forts quand il s’agissait d’éviter certaines choses. Tu soupires mais tu ne réponds pas de suite. Tu préfères tourner le sachet dans la tasse que t’a tendue Lily avant de dire : « Je ne sais pas s’il y avait une bonne manière de partir. Ca n’a pas été simple à accepter pour moi j’ai … Ca a fait remonter de mauvais souvenirs. » Ton père avait disparu comme Lily, du jour au lendemain alors que tu avais huit ans. Entre le départ de ton père, de tes deux sœurs puis celui de Lily, tu n’avais pas pu en prendre un autre. « Tu sais que je ne t’aurais jamais demandé de renoncer à ton rêve n’est-ce pas ? Je n’aurais jamais essayé de te retenir. Je … » Tu aurais voulu partager ce rêve avec Lily, c’était pour ça que tu avais acheté cette bague. « Je me suis longtemps demandé quelle impression je t’avais donnée pour que tu t’enfuis ainsi. » C’était naturel, quand on perd l’être aimé, on se demande ce qu’on aurait pu faire différemment.
C’est bien la première fois depuis le retour de Lily à Brisbane que vous vous voyiez sans que cela finisse par des cris et des accusations en tout genre. Il y a un an, tu as eu du mal à faire face au retour de Lily à Brisbane parce que finalement tu ne l’avais jamais laissée rentrer de nouveau dans ta vie. Mais tu n’as pas réellement eu le temps de gérer ce retour parce que quelques mois plus tard c’était Angelina qui débarquait avec Abel et le retour de cette ex là était bien plus problématique que le retour de Lily. Parce que oui, Lily tu pouvais l’ignorer, ne pas la croiser pendant des jours, des semaines des fois mais Angelina était la mère de ton enfant, tu étais condamné à l’avoir dans ta vie pour toujours, que tu le veuilles ou non et vu comment s’était terminée votre relation, l’adaptation à sa présence dans ta vie ainsi qu’à celle d’Abel avait pris la plupart de ton temps et de ton énergie. Tu avais croisé Lily de temps en temps mais sans y prêter trop attention finalement car tu étais toujours occupé par autre chose et puis vous n’étiez pas prêts pour discuter de son départ, de l’impact que cela avait eu sur ta vie. Tu ne savais pas si elle pouvait s’imaginer l’horreur que tu avais traversé après son départ. Tu n’avais jamais été quelqu’un qui se laissait facilement abattre mais c’était le départ de trop, l’abandon de trop. Aujourd’hui tu étais bien conscient que Lily aura toujours une place particulière dans ta vie mais tu es incapable de savoir si elle y jouera vraiment un rôle dans le futur. En vérité, après votre conversation tu ne sais pas s’il y aura des raisons de se revoir, tu ne sais pas si faire entrer de nouveau Lily dans ta vie est une bonne idée. Il faudra sans doute décider ça le moment venu, quand la question se posera réellement. Pour l’instant, tu es simplement venue la remercier de t’avoir laissé acheter cette maison sans te ruiner. Elle n’avait pas à le faire après tout, peu importe votre histoire, aujourd’hui elle ne te devait rien. Mais elle l’avait laissée presque sans hésiter quand tu étais venu lui demander si c’était une possibilité. Et Abel adorait votre nouvelle maison bien plus que ton appartement partagé avec Orion donc c’était l’essentiel à tes yeux. Lily te parla de ses projets à Brisbane. Tu n’avais pu t’empêcher de lui demander quand elle repartira mais apparemment elle est, cette fois, bien décidée à rester. Tu sens ton cœur se serrer, tu avais eu six ans d’avance, six ans qui avaient certainement permis à Lily de voir le monde. Mais cela ne t’étonne pas de savoir qu’elle veut monter sa propre école de chant et de danse. « Merci. J'aurais adoré avoir un endroit comme ça quand j'étais petite. Je suis sûre que je ne suis pas la seule à en rêver. » Tu secoues la tête. Non, elle n’est pas la seule à avoir eu ce rêve. Tu as des élèves tous les ans qui entretiennent ce genre de rêve. Plus ou moins sérieusement mais tu en as tous les ans. Et les écoles sont rares, tu ne le sais que trop bien car décidé à aider les plus motivés, tu avais fait quelques recherches de ton côté. « J’ai régulièrement des élèves avec ce genre d’ambition. Je saurai où les envoyer désormais. » Dis-tu avec un simple sourire sur les lèvres. L’école n’était certainement pas encore sur pied mais s’il y avait une chose qui n’avait pas dû changer chez Lily c’est sa persévérance et le fait que c’était une battante. Rebondissant sur le sujet de l’école, tu ne peux t’empêcher de lui demander si elle est montée sur scène à Broadway. Tu te souviens des étoiles que tu voyais dans ses yeux quand elle t’en parlait à l’époque alors tu espérais qu’elle avait réalisé ce rêve. « Je t'avoue que ça n'a pas été facile. J'ai mis un peu plus d'un an avant de rejoindre Broadway mais j'ai fini par y arriver et j'en suis très fière. » Un petit sourire amusé se dessine sur ton visage alors que tu ne peux t’empêcher de remarquer que les étoiles brillent toujours dans ses yeux quand elle parle de cet endroit. Tu ne doutes pas que les choses n’ont pas dû être simples mais elle y était arrivée, comme tu t’y attendais. « On apprécie d’autant plus la réussite quand on met du temps à y arriver. Je suis content que tu aies pu réaliser ton rêve. » Dis-tu sincèrement. Tu ne pouvais t’empêcher de te dire que Lily ne t’avait pas quitté pour rien. Au moins elle avait pu voyager, monter sur scène à Broadway et faire tout ce que tu l’aurais empêchée de faire sans le vouloir, sans t’en rendre compte. Alors que vous êtes tous les deux assis face à face avec votre tasse de thé bien chaude, il ne vous reste plus qu’un sujet à aborder. Et c’est le moment parfait car pour une fois vous êtes au calme, loin des oreilles indiscrètes et cela n’est pas arrivé les autres fois où tu avais croisé Lily. Tu es surpris mais c’est elle qui lance le sujet sur lequel tu ne tardes pas à rebondir. A partir de là, les explications viennent naturellement. « Je m'en doute et je regrette sincèrement la façon dont ça s'est passé. Si je pouvais revenir en arrière, crois-moi que j'aurais agi de manière différente... » Tu lèves un sourcil parce que tu as du mal à y croire. Si elle a choisi cette manière pour partir, c’était qu’il y avait une raison et cette raison était sans doute toujours valable aujourd’hui. De toute manière, vous ne pouviez pas réécrire le passé, ce n’était pas possible. Qu’elle regrette ou pas, cela ne changeait strictement rien. « Ça va peut-être être cliché ce que je vais te dire mais tu n'y es pour rien. C'est moi. J'ai trouvé la bague que tu comptais m'offrir et... J'ai paniqué. J'ai réalisé tout ce que ça engendrait pour le futur, tout ce que ça voulait dire et ça m'a fait peur. Je sais que j'aurais dû t'en parler au lieu de m'enfuir. Je sais que tu aurais compris et que tu ne m'en aurais pas voulu de vouloir attendre encore avant de s'engager pour de vrai. Je t'aimais. Je t'aimais sincèrement et profondément, n'en doutes jamais. Mais je crois que je n'étais pas encore prête pour ça. » Tu l’écoutes parler parce qu’il faut qu’elle t’explique. Au fond de toi, tu avais deviné certaines choses. Il n’avait pas fallu être un voyant pour comprendre que c’était devant la bague que Lily s’était enfuie. Pour toi, la question ne s’était pas réellement posée. Tu aimais Lily et c’était avec elle que tu te voyais faire ta vie. Quand tu regardais ta vie aujourd’hui cependant, elle était bien loin de ce que tu avais pu imaginer à l’époque. « En général les tords restent partagés. » Dis-tu en haussant les épaules. Parce que c’était trop facile de tout mettre sur le dos de Lily. Tu l’avais fait la première année mais quand tu t’étais mis à repenser à cette histoire, tu savais que c’était trop facile. « Ca aurait été bien plus simple si tu m’avais dit tout ça tu sais. » Dis-tu en soupirant. « Te laisser partir n’aurait pas été facile mais je t’aimais trop pour t’obliger à rester. Je t’aurais laissé partir tu sais. » Dis-tu en laissant ton regard se poser sur un objet quelconque. Tu aurais certainement autant souffert mais tu aurais laissé partir Lily si tu étais persuadé que c’était la bonne chose à faire. « Je suis désolé d’avoir voulu aller trop vite mais je ne voyais mon futur avec personne d’autre et … » Tu ne pus t’empêcher de laisser échapper un rictus ironique : « Quand je vois ma vie aujourd’hui, je me dis que c’était un beau rêve mais un rêve rien de plus. » Dis-tu avant d’ajouter : « Au moins tu ne t’es pas enfuie pour rien, tu as réalisé tes rêves, je peux me consoler avec ça. » Dis-tu en haussant les épaules.
Quand Lily était revenue à Brisbane l’année dernière, tu te souviens de la colère que tu avais ressentie. Une colère qui t’avait accompagnée pendant des mois parce que tu aurais préféré que Lily reste à New York ou peu importe où elle habitait. Voir les fantômes de ton passé revenir à Brisbane était quelque chose de difficile à avaler et quelques mois après Lily il y a eu Angelina qui est arrivée avec Abel. C’est certainement cette expérience auprès de ton fils et de sa mère qui faisait qu’aujourd’hui tu étais capable d’avoir cette conversation avec Lily. Tu aurais pu rester en colère très longtemps mais tu es fatigué. Parce qu’être en colère demande de l’énergie et tu préfères la consacrer à ton fils. Tu aurais aimé construire une famille autrement, tu avais pensé que Lily aurait pu être ta nouvelle famille mais c’était un rêve qui s’était bien vite envolé. Quand tu te replongeais dans le passé, tu te revoyais si confiant, si heureux et tu te demandais si tu l’avais été de nouveau à ce point après le départ de la jeune femme. Parler de ses projets professionnels était facile, cela évitait de mettre le doigt sur les sujets qui fâchent, des sujets que vous n’avez pas encore réellement abordés alors que Lily est à Brisbane depuis un an déjà. « C'est vrai ? Ce serait génial, merci ! Bon, ce n'est pas pour tout de suite mais j'espère que ça va se concrétiser assez rapidement. » Si Lily finit par ouvrir son école, et tu ne doutes pas qu’elle y arrivera à un moment ou à un autre, tu n’hésiteras pas à lui envoyer des élèves qui aimeraient réaliser leur rêve. Tu es rancunier, tu le sais mais pas assez pour ne pas donner les meilleures clés à tes élèves pour réussir. Tu tenais trop à eux pour cela et puis tu n’étais pas quelqu’un de méchant, jamais tu ne souhaiteras l’échec du projet de Lily, ce n’est pas ton genre. « Je croise les doigts. » Lui réponds-tu simplement. Elle réussira, tu n’as pas de doutes car si elle a réussi à monter sur scène à Broadway, elle peut réussir à braver l’administration australienne pour mettre son projet sur pied non ? C’est d’ailleurs ce que tu ne peux t’empêcher de lui demander. Si elle a réalisé ce rêve qu’elle t’a préféré. Et tu es soulagé de savoir que c’est le cas. C’est idiot mais savoir que tu n’as pas perdu Lily pour un rêve brisé mais pour une belle réussite te rassure. Peut-être que te quitter était la meilleure chose à faire. Elle ne pouvait pas imaginer l’impact que ce départ allait avoir dans ta vie, personne ne le pouvait. « Tu as raison. Et comme on dit, si c'est trop facile, ce n'est pas drôle. » Certes mais tu te demandes si Lily n’aurait pas préféré un peu moins de galère tout de même. Mais le passé était écrit, il était impossible de revenir dessus. Il était évident que Lily était très fière de sa carrière en Amérique, peu importe les galères auxquelles elle avait fait face à ce moment là. Tu ne réponds rien car il n’y a rien à ajouter à ce sujet. Et alors qu’un silence s’installe, c’est Lily qui amène le sujet qui fâche sur la table. Il fallait que vous en parliez, il était temps que vous le fassiez alors tu lui en étais reconnaissant. Au fond, tu connaissais déjà ses raisons, pourquoi elle était partie. Cela ne voulait pas dire qu’elles étaient plus simples à accepter mais sans jamais vouloir te l’avouer, tu savais au fond pourquoi elle était partie. « Je sais que j'aurais dû t'en parler dès l'instant où j'ai découvert cette bague. Mais... C'est trop tard maintenant. Pourquoi tu m'en avais pas parlé avant ? » Tu hausses les épaules. Tu avais voulu faire la surprise à Lily parce que tu pensais sincèrement que vous en étiez là dans votre relation. Tu ne te voyais partager ta vie avec personne d’autre. Lily avait été là pour toi dans des moments bien difficiles et elle avait été là aussi pour les meilleurs moments et tu aurais aimé avoir ça pour toujours. Il n’y avait pas de raison exacte, tu avais voulu lui faire une surprise. « Je pensais que c’était le bon moment. Je ne voyais que toi dans mon futur et je pensais que c’était le bon moment, la prochaine étape. Je voulais que ce soit une surprise mais je pensais que toi aussi tu en avais envie. Clairement j’étais bien trop naïf à l’époque. » Tu n’avais pas agi ainsi pour lui faire peur ou lui faire une mauvaise surprise. Tu avais réellement pensé qu’elle désirait cela autant que toi et que demander n’était qu’une formalité. Tu ne peux t’empêcher de sourire à ta bêtise. Mais on ne t’y avait pas repris à deux fois … « Je pense que je n'aurais pas réussi à partir sans toi si je te l'avais demandé. Je pense que je t'aurais demandé de partir avec moi. » Tu hoches la tête. Tu regretteras toujours qu’elle n’ait pas pris le temps de dire au revoir, de t’expliquer. Tu aurais été furieux sur le moment mais avec le temps tu aurais compris. En partant ainsi, Lily avait enfoncé le couteau, rouvrant ne plaie béante car elle s’était enfuie de la même manière que ton père, brusquement et sans au revoir. « Et on sait tous les deux que je ne t’aurai pas suivi. » Dis-tu parce que New York c’était le rêve de Lily, pas le tient. Tu n’avais rien qui t’intéressait à New York et si tu l’avais suivie tu n’aurais pas été heureux, tu aurais pu finir par la détester certainement et ce n’était pas une bonne chose non plus. « Arthur... Tu mérites d'être heureux avec une femme qui est prête à t'offrir tout ce que je n'ai pas pu t'offrir lorsque l'on était ensemble. Tu mérites d'être aimé autant qu'elle pourra t'aimer, si ce n'est plus. Ce n'est pas moi mais je suis sûre que cette femme est quelque part, à t'attendre. » Tu ne peux t’empêcher de laisser un sourire cynique se dessiner sur ton visage alors que tu secoues la tête. Tu ne sais pas ce que tu mérites mais tu sais ce que tu as rencontré pour l’instant et ce n’est pas le grand amour. Tu ne sais pas ce qui t’attend dans le futur mais pour l’instant tu as plus l’impression de vieillir seul qu’autre chose. Tu ne peux t’empêcher de dire à Lily : « Tu n’as toujours pas envie de t’engager dans cette voie avec un homme ? Même aujourd’hui ? » Tu ne peux t’empêcher de te demander si c’était avec son rêve que tu étais en compétition ou alors si c’était autre chose. Parce qu’aujourd’hui, Lily revenait à Brisbane ayant réalisé ses rêves et elle ne semblait pas prête à s’engager. « Je ne sais pas si je mérite tout ça Lily. Je ne sais pas si je trouverai ça un jour. » Dis-tu en haussant les épaules. « Personne ne t’a dit ce qui s’était passé quand tu es partie ? Ce que je suis devenu ? » Lui demandas-tu curieux. Peut-être n’avait-elle jamais demandé ou alors ses amis n’avaient pas eu envie de lui raconter que tu t’étais effondré que tu ne ressemblais plus vraiment à l’homme romantique qu’elle avait connue. « En tout cas, je suis sincèrement désolée pour tout ce que j'ai pu te faire. Vraiment. J'espère que... Que tu réussiras à me pardonner.» Si c’est ton pardon qu’elle cherche, elle l’a déjà, plus ou moins. Tu as fini par faire la paix avec cette histoire. Ce n’est pas une partie de plaisir d’y repenser et elle t’a changée mais tu ne peux pas en vouloir à Lily toute ta vie. « Je pense qu’à un certain niveau je t’ai déjà pardonné. L’arrivée d’Abel dans ma vie a changé beaucoup de choses. » Dis-tu simplement. Cela n’expliquait rien du tout mais pour toi cela faisait sens.
Lily avait été à un moment de ta vie une évidence. Tu l’avais aimée comme personne d’autre et c’était cet amour qui t’avait poussé à acheter cette bague quelques mois avant les fêtes de Noël. A l’époque, tu pensais que c’était une bonne idée, que tu avais enfin trouvé la personne qui te complétait. Tu te souviens encore de ce que tu ressentais à l’époque, de ces sentiments qui te faisaient vibrer. Et ça te manquait. Ca te manquait terriblement, en particulier depuis que tu t’étais autorisé à l’avouer. Tu n’avais jamais été destiné à devenir un coureur de jupons invétéré. Tu étais plutôt du genre romantique et fidèle à la base et pourtant, cela faisait des années que tu n’avais pas été en couple. Cela te rendait fier à une époque, aujourd’hui tu étais bien loin de te sentir fier. Lily avait été réaliser ses rêves à l’autre bout du monde et elle était revenue avec pleins de choses à raconter certainement. Toi tu avais simplement continué d’enseigner, essayant de faire au mieux. Tu étais épanoui dans ton métier, c’était dans ta vie privée que c’était plus difficile. Aborder le sujet délicat du départ de Lily avec la jeune femme avait pris un an. Une année entière de rencontres hasardeuses et de mots blessants échangés. C’était étrange en y pensant car Lily et toi vous étiez peu disputés. Vous n’aviez jamais eu de mal à discuter et pourtant il avait fallu un an pour en arriver là. Tu étais conscient que ta rancune était en grande partie responsable mais c’était peut-être mieux ainsi car au moins vous pouviez en parler calmement, sans vous énerver. Il y avait toujours une partie de toi qui ne comprendrait pas ce choix qu’elle avait fait mais comme Lily l’avait dit vous ne pouviez pas revenir en arrière et aujourd’hui, cela faisait sept ans qu’elle était partie, vos vies avaient radicalement changé depuis, vous aviez radicalement changé. Quand Lily te demanda pourquoi tu ne lui avais pas parlé en avancer de ton envie de te fiancer et tu lui répondis le plus honnêtement du monde. Tu pensais sincèrement que vous en étiez au même point, que vous alliez dans la même direction et que vous pourriez réaliser vos rêves ensemble. Mais non, tu t’étais trompé et tu en avais payé les conséquences. « Tu... Tu ne pouvais pas savoir. Je veux dire, ça faisait un petit moment que notre histoire avait commencé et je n'avais jamais évoqué le fait que je ne souhaitais pas m'engager sérieusement. Je crois que je n'en étais pas vraiment consciente moi-même jusqu'à... Jusqu'à ce que je vois la bague. » S’engager sérieusement. Qu’est-ce que cela pouvait bien dire ? A tes yeux, vous étiez déjà engagés sérieusement, vous vivez ensemble à l’époque, tu ne voyais pas ce qu’une bague changerait mais pour Lily elle avait certainement signifié une prison. Une prison invisible bien entendu mais une prison quand même. Un engagement qui l’empêcherait de s’épanouir. Tu aurais aimé qu’il en soit autrement mais il était clair aujourd’hui que tu l’aurais traînée vers le bas avec ton amour de Brisbane et de cette ville que tu ne voulais pas vraiment quitter. « Je ne voulais pas t’empêcher de réaliser tes rêves. Je m’en serais toujours voulu de te retenir. Tu aurais fini par me détester de t’avoir privé de tes rêves même si ce n’était pas intentionnel. Peut-être qu’on ne s’en est pas trop mal tiré. » Lui dis-tu en haussant les épaules. Plus tu l’entendais parler, plus tu étais persuadé qu’elle aurait accepté ta demande plus pour te faire plaisir qu’autre chose. Et ce n’était pas ce que tu voulais, ni pour elle, ni pour toi. Oh oui, tu l’avais détestée, mais pas assez profondément pour que cela ne puisse pas changer. Le temps avait fait son travail, la vie aussi alors qu’elle t’avait joué bien des tours depuis toutes ces années. Face aux paroles de Lily, tu ne pus que t’étonner de l’entendre dire qu’elle n’était toujours pas prête à s’engager. Il se pourrait donc que son rêve ne soit pas la seule chose qui la retienne … « Je ne sais pas, peut-être. Je t'avoue que je ne me suis jamais posée la question depuis. À vrai dire, toutes les histoires que j'ai connu se sont toutes très mal terminées et assez rapidement. J'ai jamais eu le temps de me poser la question. Mais... Comment on sait que c'est la bonne personne ? Comment on sait qu'elle ne va pas brutalement nous quitter, peu importe la manière ? » Tu ignores la vie qu’a vécue Lily ces dernières années mais si elle s’est concentrée sur sa carrière artistique, cela ne te surprend pas qu’elle ne se soit pas posée la question. Ce n’était pas facile de détacher Lily de sa carrière car sa carrière était sa passion. Tu l’avais toujours soutenue mais tu te souviens de soirées où tu aurais préféré qu’elle soit à tes côtés plutôt qu’au studio de danse. A tous les coups c’était une habitude qu’elle avait gardée. Quand elle te pose ses questions, tu hausses les épaules. Malheureusement, il n’y a pas de science exacte pour ce genre de chose. « Tu ne peux jamais en être sûre. Il y a toujours la possibilité que quelqu’un nous quitte. Mais est-ce que ne jamais prendre le risque est ce qui nous rend heureux ? » Tu l’avais cru pendant un long moment mais l’illusion était tombée récemment. « C’est comme avec tes chorégraphies. Tu t’entraînes, sans relâche avec des partenaires différents et puis il y en a un avec qui c’est naturel. Il fini par être une partie de toi et c’est à cette personne qu’il faut laisser une chance. » Tu ne connaissais rien à la danse mais tu te souvenais d’avoir entendu Lily en parler puis des amis alors tu espérais que l’analogie soit la bonne même si tu n’en étais pas persuadé. Lily te dit alors que tu méritais d’être heureux avec quelqu’un et de trouver la personne qui pourrait t’offrir cette vie de famille mais tu n’en étais pas vraiment certain. La vie t’avait amenée à un certain moment où tu n’arrivais plus à te projeter comme avant. « J'ai essayé mais on me disait que ce n'était pas à eux de me le dire mais à toi. Je ne t'oblige pas à y répondre. » Un petit sourire se dessine sur ton visage alors qu’elle te laisse la possibilité de ne pas répondre. Non, tu ne vas pas te défiler même si tu sais déjà que le regard de Lily va se remplir de déception. « Je ne suis pas fier de tout mais je n’ai pas honte non plus. » Dis-tu simplement avant d’ajouter : « Quand tu es partie, ça a été dur pour moi. Heureusement, à la rentrée j’ai pu coacher l’équipe de baseball du lycée mais il était hors de question pour moi de me poser à nouveau. Je … Je ne pouvais pas me voir tomber amoureux, donner ma confiance à quelqu’un. Alors j’ai couché à droite à gauche, sans relâche pendant des années. Je ne faisais pas de fausses promesses, je n’ai jamais aimé manipuler les gens mais j’évitais toutes les attaches. » Dis-tu avant de boire une gorgée de thé. « La seule fois où j’ai tenté ma chance c’est avec la mère d’Abel. En y repensant, le fait qu’elle soit ton opposé parfait a sans doute joué. Mais on se détruisait chaque jour un peu plus et elle a fini par me tromper avant de disparaître dans la nature et de réapparaître l’année dernière avec Abel. » Parce que oui, tu n’avais pas eu affaire qu’au retour de Lily, cela aurait été bien trop simple. « Je suis contente de savoir que tu as Abel dans ta vie. Ça a l'air d'être un chouette gamin. » Un sourire se dessine sur tes lèvres. Tu es fier de ton fils et tu espères continuer à l’être. « Il l’est. Ca n’a pas été simple pour lui mais on est arrivé à construire quelque chose. » Dis-tu avant de lui demander : « Et toi alors ? Pas envie d’enfants non plus ? » Elle semblait pourtant adorer leur transmettre sa passion.
Voilà une conversation que vous n’auriez jamais pu avoir il y a un an de cela. Pourtant, même à ce moment là tu savais qu’il faudrait que vous l’ayez un jour mais tu étais incapable de discuter de son départ avec Lily. Tu n’en avais aucune envie. Son retour surprise avait été un électrochoc et tu avais été des plus désagréable avec la jeune femme. Tu ne t’en voulais pas vraiment parce que Lily était partie presque sans un mot, te laissant seul comme un con en pleine période de Noël et même si tu n’es pas très rancunier de manière générale, il y a des choses que l’on ne peut pas aussi facilement oublier. Mais depuis le retour de Lily à Brisbane, ta vie avait changé en tout point. Quand tu avais croisé Lily la première fois, tu étais encore célibataire, sans attache, en colocation avec Orion. Aujourd’hui, tu étais un père célibataire habitant avec son fils une semaine sur deux dans une petite maison au beau milieu d’un lotissement. On t’aurait dit que tu en serais là aujourd’hui, tu aurais explosé de rire à l’époque mais avec l’entrée d’Abel dans ta vie, tu avais changé. Il y aura toujours une partie de toi qui en voudra à Lily de t’avoir brisé le cœur mais tu n’as plus la force de continuer à la détester. Vous allez certainement continuer à vous croiser encore et encore vu qu’elle semblait décidée à rester à Brisbane alors mieux valait mettre les choses au clair. Tu n’arrivais pas à imaginer ce que pourrait être votre relation aujourd’hui, après cette discussion mais tu verras bien après tout. « Si tu le dis. » Tu ne peux t’empêcher de sourire au rire presque nerveux de la blondinette. Cela te ramène des années en arrière, quand la faire rire était ta mission quotidienne. Lily était tellement sérieuse, elle travaillait tellement pour réaliser son rêve que c’était ton rôle en quelques sortes de lui changer les idées quand vous étiez ensemble, de lui faire prendre des pauses un peu forcées. Tu ne peux t’empêcher de penser que si Lily était restée ou si tu l’avais suivie, l’un de vous aurait fini par détester l’autre car la vérité c’était que vous aviez des rêves trop différents. Cela n’avait eu aucune importance pendant longtemps car tu avais soutenu Lily dans les siens et inversement mais le rêve de Lily ne pouvait pas se réaliser à Brisbane. Tu ne pus t’empêcher d’être étonné quand Lily te dit qu’elle n’était toujours pas réellement prête à s’engager avec un homme. Cela te surpris parce que tu avais toujours pensé que la seule raison de sa fuite était la réalisation de son rêve hors aujourd’hui elle l’avait réalisé donc elle pourrait se projeter dans cette direction non ? Mais peut-être qu’il y avait plus que cela finalement même si tu n’avais rien vu à l’époque. Tu essayais donc de répondre à sa question au mieux. La vérité c’est que tu ignores comment on sait que c’est la bonne personne. Tu es certain d’une chose par contre, c’est que la seule manière de le savoir c’est d’essayer. C’est toujours un risque à prendre mais qui ne tente rien n’a rien n’est-ce pas ? « Je comprends ce que tu veux dire et tu as sans doute raison. » Tu hoches la tête sans rien répondre. Tu n’as pas les pouvoirs magiques de dire à Lily qui sera la bonne personne pour elle. Tu avais pensé l’être pendant un moment mais c’était il y a longtemps. Tu espérais que Lily pourrait trouver ce qu’elle cherchait car même si tu lui avais souhaité beaucoup de malheur pendant un moment, elle ne méritait pas de passer sa vie toute seule. Il fut ensuite question de ta vie après son départ. Tu étais assez surpris que personne ne lui ait rien dit. Tu ne l’aurais pas mal pris si c’était le cas mais cela ne te dérageait pas de lui raconter ta sombre histoire toi-même. Peut-être que cela lui permettra de comprendre pourquoi tu l’avais accueillie avec tant de haine l’année dernière. Elle t’écouta attentivement et tu ne manquais pas la surprise sur son visage ainsi que la culpabilité. Tu ne lui avais nullement raconté ton histoire pour cela. « Désolée... Je me doutais que ça n'allait pas être facile pour toi mais je ne pensais pas autant. Je me sens égoïste de n'avoir pensé qu'à moi et je pense que je le suis. Je n'ai pensé qu'à moi et à mon rêve mais pas une seule fois à toi et à ce que tu aimerais ou pourrais ressentir. Sincèrement désolée pour ça, j'ai été une copine affreuse... » Tu te doutais que dans sa décision de partir, Lily n’avait pensé qu’à elle. Il n’en était pas possible autrement sinon elle ne serait pas partie ainsi. Mais elle n’avait pas été une copine affreuse, elle avait été une très bonne copine. De toute manière, il n’y a pas de bonne manière de quitter quelqu’un. Tu étais tellement amoureux d’elle à l’époque que tu n’aurais pas bien pris ce départ dans tous les cas. « Je ne t’ai pas raconté tout ça pour que tu t’en veuilles mais plus pour que tu comprennes d’où je viens et pourquoi j’avais toute cette colère en moi quand on s’est revu. » Tu ne pouvais pas le nier, le retour de Lily t’avait pris de cours et avait fait ressortir toutes sortes de choses qui n’étaient pas des plus sympathiques. « Et tu n’as pas été une copine affreuse. Il n’y a jamais de bonne manière de quitte son petit ami amoureux. » Dis-tu en haussant les épaules. Le sujet qui vient se mettre sur la table ensuite est Abel. Tu remarques que petit à petit ton fils vient s’installer dans toutes tes conversations et cela te fait sourire. Tu te souviens d’avoir plaisanté avec nombre de tes amis à propos des parents qui ne pouvaient s’empêcher de parler de leurs enfants en toute occasion. « Pour toi aussi, j'imagine que ça n'a pas été simple ? Mais de ce que tu m'en dis, je trouve que tu t'en es très bien sorti ! » Non, pour toi non plus ça n’avait pas été simple, loin de là. Tu avais dû adapter ta vie à l’arrivée d’Abel mais le plus dur avait été de gérer Angelina qui n’avait pas rendu les choses faciles. Elle voulait un père pour son fils mais un père absent apparemment. Enfin elle se contredisait sans cesse et t’avait longtemps détesté de lui enlever son fils une semaine sur deux mais vous commenciez à avancer dans la bonne direction, un miracle. « Non, ça n’a pas été simple. Quand Angelina a débarqué avec un test de paternité j’habitais encore avec Orion, on ramenait des filles à l’appartement un soir sur deux, je sortais presque tous les soirs. Le changement a été brutal mais je n’aurais pas pu laisser mon fils grandir sans son père, je refusais de reproduire ce que mon père m’a montré comme exemple. » Tu n’avais pas grandi avec ton père qui s’était enfui quand tu avais huit ans. Il y avait eu Porthos pour compenser et tu le considérais comme ton père mais ce n’était tout de même pas pareil. Vu que vous parliez de ton fils, tu demandais à Lily si elle voulait des enfants de son côté et sa réponse te surprit : « Je ne sais pas si c'est parce que je vieillis ou non mais... J'aimerais bien être maman. Ça me fait un peu peur de ne pas être à la hauteur mais je me sens prête. » C’était sans doute idiot mais tu pensais qu’elle allait te dire non ou qu’elle n’était pas prête. Parce que même malgré tous tes efforts, ton couple avec Lily était toujours passé en deuxième position derrière sa passion. Un enfant ne pouvait pas passer en deuxième position, tu ne le savais que trop bien. Mais peut-être était-elle prête à faire certaines concessions. « Je suis certain que tu seras une très bonne mère si tu arrives à décrocher un peu de la danse. » Lui dis-tu avec un sourire en coin pour la taquiner. « Mais tu sais que tu es un peu contradictoire. A moins de tomber enceinte par accident et de vouloir élever l’enfant toute seule, il va bien falloir tenter de s’engager. » Lui dis-tu avec un petit sourire sur les lèvres pour faire écho au sujet abordé un peu plus tôt.