En arrivant chez Cassandra c'était souvent la même chose, tout un tas de souvenirs refaisaient surface et je pense que c'était la même chose pour elle. On passait nos soirées à se confier, et, avec une coupure de dix années, nous trouvions toujours une histoire, une anecdote à raconter. Nos soirées passaient donc très vite car nous étions toutes les deux curieuses de savoir comment l'autre avait comblé tout ce temps. La petite fille que Cassandra était avait laissé place à une jeune femme positive et dynamique, et à une confidente parfaite. Elle savait écouter et me faire rire."Oh, toi, tu sais comment passer une bonne soirée !"  "Oui, j'suis prête à faire une nuit blanche. Ou à camper dans le salon." J'avais éclaté de rire à l'idée. Parfois, il était difficile de réaliser que nous étions maintenant adultes et non pas encore les petites filles d'autrefois. "Et toi alors, comment tu vas ?" J'allais bien. J'étais au dixième chapitre de mon prochain romain et j'avançais tout doucement. La vie à Brisbane était douce et me plaisait. J'avais parlé à mes parents sur facetime quelques heures avant de partir en direction de chez Cassandra et tout allait pour le mieux pour eux également. Ma vie n'avait pas d'ombres au tableau et j'étais chanceuse. Je me sentais d'autant plus chanceuse lorsque j'étais face à Cassandra qui, comme je le savais, avait connu des problèmes sentimentaux. J'avais également connu une affreuse rupture, mais je m'en étais remise et je ne savais pas si c'était le cas de mon amie. Je n'évoquais pas le sujet, mais elle me parlait assez souvent d'Antoine. Moi, je m'étais éprise d'un jet setteur, j'étais folle amoureuse de lui mais lui s'était totalement fichu de moi. Evidemment, en y repensant, j'avais été très naïve et cette rupture avait été un bon moyen de terminer mon premier roman à succès mais cela n'en demeurait pas moins la raison du trait que j'avais tiré sur l'amour. Je n'y croyais plus et en écoutant mon amie, je me disais que j'avais raison. J'espérais retrouver l'amour, mais je n'y croyais plus. J'étais un paradoxe à moi seule. Cassandra, elle, ne s'était jamais totalement remise de sa relation et je le savais. Pourtant, elle était toujours radieuse quand je la voyais. « Je vais bien ! Qu'est ce que tu nous as cuisiné de bon ? Et sans te couper en plus ! » Je lui avais dit cela en lui souriant, je savais que je pouvais me permettre de blaguer sur ses petits soucis de santé, je la connaissais depuis tellement longtemps.

Lorsque je vivais à Londres il y'a encore trois ans, les soirées et les fêtes étaient monnaie courante et se déroulaient parfois même en pleine semaine puisque la plupart des jeunes de l'élite n'avaient pas réellement d'activité. Selon moi, dépenser le quart du compte en banque de ses parents en un week end n'était pas une activité à proprement parler. Les soirées de Londres étaient déjà bien différentes de celles d'Australie. Puis il y avait quelque chose de toujours très chic dans chaque soirée, même la plus débauchée. A mes premières sorties, j'appréciais de pouvoir me saouler au champagne, tout en soignant mes gueules de bois à l'eau minérale et aux petits déjeuners fraîchement préparés par le room service si je dormais à l'hôtel ou par notre personnel si je dormais à la maison. Puis, en grandissant, j'avais réalisé que si le champagne était distingué et cher, il me donnait surtout de graves migraines. « Ouais, sans me couper. C'est un exploit. Ca a pas fait geyser, heureusement. » Mon amie m'avait fait rire, j'aimais sa façon de prendre à la dérision ses petits soucis de santé. J'aimais beaucoup Cassandra et je pense que cela était dû au fait de pouvoir être moi même et de ne pas prendre de pincettes. Si j'avais envie de rire de tout, avec elle, c'était possible. Ce soir, le contraste avec les soirées luxueuses d'il y a quelques années se faisait sentir : une salade composée toute simple mais délicieuse et un petit plat familial. Rien à voir avec les buffets apéritifs concoctés par les meilleurs traiteurs. Cependant, en me servant la salade que Cassandra avait préparé, il n'y avait aucun endroit où j'aurais préféré être. La simplicité du moment me suffisait et me relaxait et j'avais appris à préférer ce genre de soirée intimiste et où il était possible de venir en jogging si l'envie s'en faisait sentir. Je m'étais apprêtée car j'aimais ça et non parce que je m'y sentais obligée. Cependant, les personnes que je choisissais pour être mes amis avaient évidemment leur rôle à jouer là dedans : je m'entourais maintenant uniquement de personnes simples et qui ne se formalisaient pas si je n'avais pas mis de mascara pour venir les voir. C'était rafraîchissant. Comme la salade. « Elle est super cette salade, tu me reçois toujours bien! » Malgré sa façon de se dévaloriser, je ne me souvenais pas d'une fois où j'avais été mal reçue chez Cassandra. Et même si c'était le cas, sa seule compagnie me suffisait à passer une bonne soirée. « Alors, quoi de neuf depuis ces quelques jours sans se voir? » Je n'osais pas évoquer le sujet d'Antoine et de si elle s'en remettait mais, comme à mon habitude, attendrais que Cassandra veuille se confier.

Mon ventre criait déjà famine mais il était à peine vingt heures et je devrais patienter avant de dîner si je ne voulais pas me réveiller au milieu de la nuit avec la même sensation. « Le vin c’est mon truc, d’ailleurs pour l’apéritif, j’en veux bien un verre! Tu prends quoi toi? » J’avais suivi Cassandra dans le salon et, rassurée par mon verre de vin qui comblerait sûrement ma faim, je m’étais assise sur le canapé prête pour une vraie discussion entre filles, entre potins et mise à jour sur nos vies respectives. En parlant de retrouvailles, Cassandra me fit penser à Porthos, un ami d’enfance - de mon enfance à moi car à l’époque, lui était déjà un adolescent, voire même un jeune adulte - que j’avais retrouvé dans son propre restaurant. Il semblerait que Brisbane soit une ville pleine de surprises, si elle m’étonnait, ce que mon amie venait de me dire confirmait mon étonnement. « Elijah, Elijah… Rappelle moi qui c’est? Et ton ex! T’en as trop, faut me préciser tout ça, raconte moi tout!» J’étais une amie fidèle et loyale mais ici, ma mémoire me jouait des tours. J’avais beaucoup de mal à me souvenir de tout ce que l’on me racontait, le plus souvent parce que je remplissais déjà mon cerveau de tas d’idées en vrac pour mon livre. Je ne savais pas vraiment si cela m’excusait mais c’était une circonstance atténuante. J’adorais Cassandra et ses histoires m’intéréssaient réellement, j’étais donc un peu honteuse de ne pas me souvenir. Ma dernière soirée avec la jolie brune remontait à deux semaines et le constat était sans appel, ma vie ne ressemblait en rien à ce qu’elle était avant. Si j’avais laissé passer deux semaines avant de revoir une amie lorsque j’habitais à Londres, j’aurais eu des tas de choses à raconter : un défilé, la rencontre avec des stars lors d’événements mondains ou encore comment j’avais participé à la création de la dernière robe de mes parents. Ici, la vie était différente. Pourtant, en réfléchissant et en remettant mes souvenirs en place, je me rendais compte qu’ici aussi les choses suivaient leur cours. J’avais revu Maze et nous nous étions perdues en forêt, j’avais retrouvé Porthos, et, surtout, j’avais exposé mon projet de roman illustré à Tess. « Bah écoute, moi aussi j’ai revu du monde. J’ai revu Porthos, tu sais le fils des amis de mes parents. C’était un choc aussi, sa vie a totalement changé. Puis, j’ai bien avancé sur mon roman aussi… » Je n’allais pas m’étaler sur le sujet Porthos car Cassandra ne le connaissait pas mais, par contre, j’avais laissé un blanc après ma phrase concernant mon livre pour attiser la curiosité de mon amie. J’étais sûre que cela l’intérésserait et, c’est de cette façon, en évoquant des tas de sujets différents, que la soirée et la discussion avaient débuté.

Depuis mes seize ans, j’avais remplacé le champagne par le vin blanc et j’avais d’ailleurs été accusée d’être une diva car aux événements de mes parents, je demandais à en avoir une bouteille lorsque seules les bulles étaient prévues. J’étais juste chiante, pas une diva. « Très bon choix ! Je sais pas à quoi on trinque mais je ne connais aucune mauvaise raison de boire du vin... » J’avais lancé un grand sourire à mon amie et l’avais regardé me rapporter un verre et me servir. « Allez, santé ! » Nous avions trinqué et ainsi lancé la soirée. J’espérais que le vin me ferait patienter jusqu’au dîner mais c’est finalement les histoires de Cassandra qui me tenaient en haleine et me faisaient oublier que j’avais réellement envie de manger. C’était comme lorsque j’écrivais et que j’en oubliais même de manger, tellement captivée par mon histoire. Malheureusement, ces instants se faisaient rares et j’étais en ce moment plutôt confrontée à la page blanche. J’espérais que cette soirée me ferait oublier ce genre de soucis du quotidien.  « Ca va je te taquine, et puis, t’as le droit d’avoir des ex ! J’avoue que moi je me suis arrêtée à un seul mais ça m’a suffit ! » Charlie m’avait brisé le coeur et je n’avais jamais eu le courage de retenter l’expérience douloureuse qu’était l’amour même si dire que cela ne me manquait pas serait mentir. « Elijah, Elijah… je vois vaguement qui c’est je crois ! » Je me souvenais de beaucoup de détails concernant ma vie à Londres et j’en étais contente car cela m’y rattachait. Quitter la ville avait été une grande étape dans ma vie et avait amené beaucoup de changements. Cela m’avait demandé pas mal de courage et j’étais plutôt fière de ce que j’étais en train d’accomplir même si cela n’avançait pas aussi vite que ce que j’imaginais. Je ne risquais rien car malgré la distance, je continuais à vivre sous la protection de mes parents. « Le seul Priam que je connais est mon voisin, je garde son chien quand il s’absente. Vu où il habite, si c’était ton ex, je le saurais je pense ! » L’air de Cassandra me fit réaliser que nous parlions peut-être du même Priam et cela marquerait une étrange coïncidence ainsi qu’une cachotterie de la part d’une de mes meilleures amies. Cependant, plutôt que de bouder, ceci me fit sourire et j’attendais maintenant avec impatience de plus amples explications. « T’as raison, pas grand chose a changé depuis notre transfert de Londres à Brisbane, tu me fais toujours autant de cachotteries ! » La situation me faisait rire et c’est sans hésitation que j’avais suivi Cassandra jusqu’à la table où je m’étais assise, prête à entamer le repas tout en discutant de mon livre. « J’ai super faim !  » lançai-je. « Figure toi que j’ai proposé à Tess, tu sais mon amie illustratrice, de collaborer avec moi. On va faire un roman illustré ! Elle a plein d’idées, c’est vraiment top. Puis comme je t’avais dit, ça va parler d’un mec qui va réaliser les rêves de la fille dont il est amoureux depuis le lycée, tout ça dans un contexte de science-fiction, pour changer un peu de ma première histoire totalement basique. » J’avais fais une pause, consciente que je parlais à toute vitesse, heureuse de partager cela avec mon amie de Londres. Je m’étais servie un peu de salade et avais rempli l’assiette de Cassandra, sans vraiment penser à si cela était correct ou non. Nous nous connaissions depuis toujours et aucune gêne n’existait entre nous. J’étais à l’aise et je passais une excellente soirée en sa compagnie, ayant toujours plus hâte d’en savoir plus sur toutes ses histoires amoureuses.

Les soirées entre filles étaient quelque chose d’indispensable à toute jeune femme et ce à n’importe quel âge. Aujourd’hui âgée de vingt-huit ans, Greta avait pourtant une vie sociale un peu moins mouvementée que la plupart des personnes de son âge et ce en partie à cause de son “métier”. Il était difficile de parler de métier à proprement parler, ses heures de travail étaient flexibles et elle était son propre patron. Pourtant, impossible pour elle de se relâcher totalement et de prendre des libertés sous prétexte qu’ici, à Brisbane, elle n’avait pas de pression de la part de son éditeur. Certes, elle n’en avait pas encore, mais n’en aurait jamais si elle ne se concentrait pas et ne se mettait pas sérieusement à l’écriture de son second roman. Réussir dans ce monde était compliqué, encore plus sans une notoriété déjà existante - merci papa et maman. C’est ce que Greta cherchait, le challenge, et elle était prête à vivre une vie un peu plus paisible pour y arriver. Mais voir ses amis et entretenir un minimum de vie sociale était tout de même important et elle profitait de cette soirée avec joie. « En plus je crois qu’il est rare qu’on ne boive pas quand on se voit, c’est grave tu crois ? Il faudrait qu’on sorte se boire un café ou un smoothie de temps en temps, ça nous éviterait de passer pour des alcooliques … Enfin, je crois que je n’arrêterais jamais d’aimer autant le vin ! » Le bon vin français était quelque chose de rare et de coûteux en Australie mais c’était toujours avec le même plaisir que Greta le dégustait et cela était encore mieux lorsqu’elle était en bonne compagnie. Piquant quelques feuilles de salade accompagnées de garniture, c’est avec gourmandise que la jeune femme commençait son repas. Entendre Cassandra parler de rupture la fit sourire, Greta était plus que bien placée pour savoir combien une rupture pouvait être douloureuse : elle traînait la sienne depuis dix années sans jamais s’en être vraiment remise. « C’est horrible le rupture, je vais pas te rappeler dans quel état j’étais après Charlie... » Ce nom revenait toujours dans les discussions avec ses amis et Greta devinait combien cela pouvait être ennuyant et gênant pour eux mais impossible de s’en empêcher. « Je sais pas ce qui est le pire, une unique rupture après une relation qui comptait beaucoup ou plusieurs ruptures de petites relations... » Songeuse, Greta ne savait pas réellement l’importance de chacune des relations de son amie. Tout ce qu’elle savait, c’était qu’elle aussi avait beaucoup souffert et cela avait participé à les rapprocher toujours plus. « On a vraiment pas été gâtée avec les hommes… Je te propose de plus parler d’eux, t’en dis quoi? Ils le méritent pas ! » Ce n’était pas qu’elle voulait clore la conversation, plutôt qu’elle estimait qu’elles étaient deux femmes fortes, indépendantes et intéréssantes et qu’elles pouvaient parler de tas de sujets différents sans évoquer leurs ex. Déjà, cela était douloureux et, en plus, ils faisaient partie du passé. Manger, boire et rire, voila ce qui était réellement important. Prendre des nouvelles et savoir ce qu’il se passait dans la vie de l’autre. Cette fois, c’était encore de son livre que Greta devait parler et si elle pouvait parfois avoir peur d’ennuyer les gens si elle en parlait trop, avec Cassandra, c’était différent et c’était même elle qui demandait à avoir plus de détails. Des détails sur lesquels Greta ne pouvait pas forcément la renseigner. « C’est même pas que je ne veux pas t’en dire plus, c’est que pour l’instant mes idées sont vraiment vagues… Je pense par exemple que mon personnage principal va trouver le job de ses rêves à la fille qu’il convoite, ce genre de choses. Des trucs simples pour commencer puis j’irai de plus en plus loin. Si t’as des idées, je suis preneuse ! »  Chaque idée était bonne à prendre. Même si l’histoire était plutôt claire dans la tête de Greta, l’expliquer et la coucher sur papier était bien plus difficile. Elle y travaillait mais ne préférait pas trop en discuter pour le moment, en attendant d’y voir un peu plus clair. Savoir que son amie achèterait et lirait le livre lui faisait énormément plaisir et c’était déjà un début. « Tout va bien de ton côté niveau professionnel ? » Il fallait que Cassandra parle un peu d’elle, après tout, c’était elle qui était à l’initiative de cette soirée et tout ne tournait pas autour de ce second roman. Greta voulait se vider la tête et ne faire qu’en parler ne l’aiderait probablement pas.

Le fait de déjà penser au prochain moment où elles se reverraient montrait combien les deux jeunes femmes passaient un bon moment. Alors qu’elles étaient encore en train de dîner et de discuter, Greta et Cassandra pensaient déjà à leur prochain rendez-vous, et, visiblement, l’idée était toute trouvée. Cependant, à l’évocation de la banane, Greta prit un air dégoutée. Comme si elle était quelqu’un de nareux, qui accordait une importance à l’hygiène des aliments, alors qu’elle était tout simplement écœurée par ce fruit. « Tu ne sais pas encore que je déteste la banane ? » Greta avait souri à son amie et avait continué. « Mais l’idée de se faire une après-midi smoothie ne me déplaît pas, on tient déjà notre prochain rencard ! » Amusée de désigner leurs moments passés ensemble comme étant des rencards, Greta continuait à manger avec le même sourire sur le visage. Parler à son amie rassurait Greta, à son âge, beaucoup de filles avaient déjà un polichinelle dans le tiroir, ou même des enfants déjà grands, étaient mariées et avaient une vie déjà bien rangée. Les deux jeunes femmes, elles, en étaient encore à parler de leurs ex et à rêver d’un simple smoothie. Elles vivaient au ralenti et pouvaient passer pour de vieilles filles aux yeux de la plupart des gens, mais Greta s’en fichait. Vu ses déboires amoureux, elle n’était pas pressée. Certes, elle rêvait de se marier, mais pas avec n’importe qui et, à vingt-huit ans, elle s’estimait encore jeune. « Ouais je crois qu’on est obligées de vivre au moins une rupture, je connais peu de couple qui sont ensemble depuis toujours, c’est beaucoup trop beau… Ca doit exister, mais pas pour nous malheureusement ! » C’était un idéal de vie, se mettre avec un homme au lycée puis finir sa vie avec lui. Pour Greta, cela aurait été parfait, elle ne voyait pas d’intérêt à enchainer les hommes comme certaines personnes peuvent parfois le faire. Trouver un homme bien, et du premier coup, ce devait être magique. Malheureusement, ni elle, ni Cassandra ne connaitrait ça. « Pareil, on verra … » Greta ne réalisait pas que quelques jours après avoir vu son amie elle partirait en blind date avec un garçon qui lui ferait tourner la tête. Pour le moment, elle se sentait bien. « Franchement j’ai bien avancé depuis que je me suis associée à Tess, je suis moins stressée qu’avant, plus motivée. » L’optimisation de leur temps de travail avait été clair, efficace et permettait à Greta de se fixer des échéances où elle devait envoyer ses écrits à Tess. Il était donc plus facile pour elle d’organiser ses journées. Malheureusement, les choses ne semblaient pas aussi bonnes du côté de Cassandra. « Serieux ? Je savais pas, qu’est-ce qu’il se passe ? Rien de grave j’espère ? » Greta avait rarement entendu Cassandra se plaindre et elle était étonnée de voir que son boulot ne semblait plus lui plaire. Son inquiétude était due à cela et elle espérait que tout ça n’était qu’une lassitude quant à sa position et non pas les suites d’un événement plus grave. Ecoutant la réponse de son amie, Greta continuait à manger avec appétit et à boire son vin, se disant qu’elle devrait probablement repartir en transports en commun, ou le lendemain.

Greta n’avait pas un emploi du temps extrêmement chargé mais il était vrai qu’elle s’accordait beaucoup de temps seule chez elle afin de travailler. Il était assez difficile sans horaires de travail fixe de se forcer à se mettre au travail et à s’y tenir sans aucune distraction mais la jeune auteure savait qu’il était important d’être efficace. Si elle n’était pas un minimum sérieuse, son second roman ne verrait jamais le jour et Greta ne pourrait continuer à vivre que grâce à l’argent de ses parents, ce qu’elle ne souhaitait pas. Si ces derniers n’y voyaient aucun inconvénient, l’indépendance que cherchait Greta en s’installant à Brisbane signifiait également d’être autonome financièrement. De plus, elle rêvait de connaître un second succès et s’assurer d’être réellement douée pour l’écriture. La proposition de Cassandra était donc plutôt judicieuse. « Tu dis quoi de mercredi dans 2 semaines ? Ca fait long mais j’ai déjà un truc le week end prochain… » Il était difficile de pouvoir faire rentrer tout le monde et tout ce qu’elle avait envie de faire dans son agenda mais Cassandra était importante et c’est sans hésiter que Greta lui proposa son premier créneau libre pour qu’elles aillent se boire un smoothie. Après tout, manger healthy et se calmer un peu sur l’alcool ne ferait pas de mal. Puis Cassandra évoqua la possibilité qu’elle connaisse des gens en couple depuis une éternité. Ce concept était en effet possible mais Greta avait beau réfléchir, elle ne pensait à personne. Faisant une moue et s’appuyant sur son coude en repoussant son assiette terminée, elle continua. « J’ai la chance de pas avoir de couples parfaits dans mon entourage, ça m’aide à relativiser... » Et Cassandra continuait à parler et Greta acquiescait, totalement d’accord avec ce que disait son amie. Si elles s’entendaient aussi bien, c’était également parce qu’elles étaient souvent sur la même longueur d’ondes. « Je suis d’accord, je pense que plus les années passent plus les ruptures doivent être douloureuses… Je sais pas trop, c’est pas comme si j’avais eu des tas de relations non plus ! » L’auteure riait, se moquant gentiment d’elle-même et de son incapacité à se remettre avec quelqu’un après sa rupture avec Charlie. Cassandra le savait bien et après dix années, il était maintenant possible de rire du sujet. « Ouais, c’est ça, on s’est lancées dans un roman illustré. Elle est hyper douée, je vais bientôt proposer le début du roman à une éditrice, on verra ce que ça donne... » Peu sûre de ce deuxième ouvrage, Greta buvait le verre que Cassandra lui avait resservi avec un air songeur. Tout allait bientôt se jouer et ces moments étaient stressants. Cependant, elle ne devait pas se laisser distraire pour autant car le livre qu’elle allait présenter n’était pas fini et si il plaisait à Kaecy Wilson, il allait falloir très vite le boucler pour imaginer un éventuel succès. Visiblement, Greta n’était pas la seule à être dans un tournant au niveau professionnel. « C’est vrai que l’ambiance des bureaux, la pression et tout ça, ça doit être difficile à gérer. Je me rends pas trop compte je ne connais pas ce milieu… Tu voudrais changer ? Tu as des pistes ? » Greta avait beau ne pas être employée, elle se doutait qu’il n’était pas si simple de quitter son travail ou même d’en trouver un autre alors elle essayait de trouver les mots justes pour pouvoir conseiller son amie. Passant aux desserts et ayant presque terminé les bouteilles, les filles arrivaient presque déjà à la fin d’une soirée qui avait passé vite grâce à leurs discussions.