Une soirée avec Kane. Ça me faisait vraiment bizarre de me dire que j'allais le revoir, le retrouver après nos nombreux baisers pendant le concert de Paramore. Ariane et Lene ont carrément été jalouses de notre attirance, jalouses au point de nous planter en plein concert, ce qui ne m'avait pas gêné le moins du monde, il faut bien l'avouer. Je souris légèrement à mon miroir et inspecte ma tenue. Je n'ai pas voulu en faire trop et j'en ai peut-être pas fais assez. Mes yeux glissent sur l'horloge au-dessus du canapé et je soupire. Si je prends le temps de me changer, je vais être en retard et c'est bien quelque chose que je déteste : les gens en retard. Alors, je reste vêtue comme je le suis : un jeans slim noir légèrement usé au niveau des chevilles, mes vans noires old skool et un t-shirt blanc légèrement transparent en guise de haut. J'attrape ma veste en cuir noir, prête à affronter la fraîcheur des nuits à Brisbane. Certains penseraient que je suis folle mais il ne fait plus que quinze degré le soir et je ne peux pas me permettre d'être malade... Je sors rapidement de la maison, que je ferme à double tour, mets mes écouteurs dans mes oreilles et je me dirige vers la station de bus la plus proche de la maison. Je me suis arrangée pour trouver un pub sur ma ligne de bus pour ne pas avoir à prendre ma voiture. Pourquoi ? Parce qu'elle est hideuse et que j'aime trop nos sessions baisers dans la voiture de Kane pour oser louper ce moment si je prends mon tas de ferraille avec moi. Le trajet jusqu'au pub est plutôt rapide mais pas assez pour moi. J'ai hâte de le retrouver, de le voir après ces quelques jours de messages intensifs mais je dois admettre que j'ai aussi un peu peur. Que dois-je faire en le voyant ? Un signe de la main, un bisou sur la joue, un câlin, rien ? Je suis une vraie potiche quand je m'y mets mais je réfléchis douze mille fois plus avec lui que ce que j'ai pu réfléchir avec n'importe qui ces dix dernières années. Il est bien trop important pour moi pour faire une connerie et j'ai vraiment envie que tout soit parfait. C'est risqué, j'en demande surement trop et, étant miss catastrophe, on risque d'être dans une sacré situation sous peu mais bon ... Je souris quand je vois mes deux voisins s'embrasser. Je souris et je rêvasse, au point de louper mon arrêt. Et c'est quand je vois le pub de l'autre côté de la vitre que je saute sur le bouton pour demander l'arrêt. Bon et bien, j'aurais un peu de marche pour me remettre les idées en place avant de le voir. Descendue du bus, je retrousse chemin et bouge la tête au rythme des chansons. Je n'écoute pas Paramore aujourd'hui. J'écoute Black Veil Brides et c'est tout aussi bien. C'est... différent mais la voix du chanteur... Adieu monde cruel. Arrivée devant le pub, je garde ma musique dans les oreilles, ferme les yeux et me mets à chanter ' Wake Up ' à voix basse. Ohohoh, ohohoh, wake up. C'est Andy Biersack qui me dit de me réveiller et d'arrêter de croire que je suis lesbienne. Oui, il a écrit cette chanson pour moi, c'est bien connu. J'ouvre les yeux et... il n'y a personne. Un coup d'oeil sur ma montre. Je ne suis pas en avance, juste pile à l'heure. Il m'a posé un lapin. Lene m'a balancé. Il s'est rendu compte que je ne valais rien. Insécurité puissance mille.

Nuit mouvementé. Matinée éprouvante. C’est pour ça que je suis chez mes parents ce soir. J’ai passé toute l’après midi dans la maison familiale. J’ai eu besoin de me rapprocher d’eux parce que j’ai eu une belle frayeur aujourd’hui au boulot. J’essaie de me changer les idées et c’est bien dommage qu’on ne soit plus en été parce que me prélasser sur un transat’ et profiter de la piscine, ça aurait été parfait. Non, à la place j’ai fait une sièste et j’ai regardé la télé jusqu’à ce que mes parents rentrent du boulot. Je les avais pas prévenu de ma venue, mais j’ai toujours la clé de la maison sur mon trousseau. Ma mère rentre en premier.

« Qu’est ce qui se passe Kane ? »

Apparemment ça se voit sur ma tronche qu’il s’est passé quelque chose.

« Rien, t’inquiètes pas. J’attends que papa soit rentrer pour vous raconter. »

Alors elle essaie d’être discrète mais elle envoie un message à mon père pour lui dire de pas rentrer tard. Elle décrète que je reste manger ce soir et je ne comptais pas faire autrement de toute façon. C’est limite si j’ai pas envie de dormir dans mon ancienne chambre pour ne pas être tout seul cette nuit. On verra comment je me sens. Du coup avec ma mère, on va faire des courses au supermarché, histoire d’avoir tout ce qu’il faut pour faire un super dîner. Un truc que j’aime. J’essaie d’ignorer les regards inquiet qu’elle me lance mais au bout d’un moment je suis obligé de lui faire une remarque.

« Tout va bien. Je te jure. Arrête de faire cette tête. »

« Tu me connais je me fais tout un tas de film. »

« C’est juste… Un truc qui s’est passé au boulot aujourd’hui. »

Elle hoche la tête et reprend de remplir le caddie. Moi je suis un peu dans mes pensées mais j’essaie de m’occuper l’esprit.

Je termine de mettre la table quand mon téléphone se met à sonner. Ma mère est aux fourneaux, mon père en train de regarder les actualités. J’ouvre de grands yeux quand je vois le nom de Wendy sur l’écran.

« Merde ! »

Ma mère me regarde et je file dans une autre pièce pour pouvoir parler tranquillement.

« Hey Wendy…! Je suis désolé j’ai eu une journée de fou j’ai complètement oublié le rendez vous. Je suis trop désolé je passe la soirée en famille du coup… »

Parce que j’ai pas envie d’aller en ville là maintenant. Je veux rester au calme ce soir.

J'ai toujours les écouteurs dans les oreilles et je regarde les bus passer. Un bus, deux bus, trois bus. Je déglutis difficilement et j'essaye de me calmer. Je regarde l'heure sur mon téléphone et je soupire légèrement. Je tourne en rond depuis dix bonnes minutes et je ne sais pas quoi faire ? Appeler Kane ou ne pas l'appeler ? Lui laisser du temps ou rentrer à la maison, carrément déçue de ce qui vient de se passer. Va-t-il venir ? Ou va-t-il se la jouer comme moi à l'époque ? Mais c'est les kilomètres qui nous ont éloigné, ce sont les décalages horaires et les océans nous séparant qui ont tout foutu en l'air. Mon estomac se resserre sur lui même et se tord. J'ouvre les messages sur mon téléphone et je cherche ceux de Kane. Je relis nos textos et oui, on avait bien rendez-vous ici il y a plus de vingt minutes. Et, comme à chaque fois, paniquée, confuse et perdue, j'appelle ma mère qui décroche rapidement. " Il est pas là. On avait rendez-vous il y a vingt minutes et il est pas là maman. Tu crois qu'il s'est moqué de moi ? Tu crois que c'était sa façon de se venger ? Me faire craquer à nouveau et me laisser poireauter comme une pauvre conne ? " Parce que c'est comme ça que je me sens à ce moment même, comme une pauvre conne. Une pauvre conne qui attend devant un pub où personne ne la rejoints. J'ai l'air d'une pauvre fille et je me fais pitié. Mais je pensais que tout allait bien entre lui et moi, que nous étions sur la même longueur d'onde. Foutaises. Mensonges. Trahison et disgrâce aussi, au passage. " Appelle le Wendy, peut-être qu'il est dans les embouteillages, peut-être qu'il a été retenu au travail... Appelle le ma chérie " Je ronchonne doucement et je finis par l'écouter me dire que je dois l'appeler et décider quoi faire ensuite. Je peux très bien aller le manger toute seule ce burger, je peux très bien la boire seule cette bière. Je n'ai besoin de personne pour sortir et passer du bon temps. Je l'écoute et... Je sais qu'elle a raison mais ça va me sembler bien fade, tout ça. Elle raccroche - parce qu'elle en a marre de m'entendre geindre et me trouver des excuses - et je finis par composer le numéro de Kane. Je n'ai pas le temps d'ouvrir la bouche qu'il dégaine une excuse. " Hey Wendy…! Je suis désolé j’ai eu une journée de fou j’ai complètement oublié le rendez vous. Je suis trop désolé je passe la soirée en famille du coup… " Et il me plante aussi, par la même occasion. Interdite, je regarde le bus me passer devant et cligne des yeux plusieurs fois avant de répondre. " Oh. Ok " Je souffle doucement et traverse la route. Mon arrêt de bus est de l'autre côté. Une voiture klaxonne et je lui fais un doigt d'honneur. " Bonne soirée alors " Que je lui lance, un peu sèche, m'asseyant sur le banc à l'arrêt de bus, prête à raccrocher. Journée de fou. Il m'a oublié. Il m'a oublié. Ça fait mal. Beaucoup trop mal. Je ne suis peut-être pas si importante que ça, au final.

Elle ne dit pas grand chose à l’autre bout du téléphone. Peut être que j’aurai dû la laisser parler en premier au lieu de lui lancer mon petit laïus d’un coup comme ça ? Je ne sais pas. C’est trop tard de toute façon, pas la peine de réfléchir trop longtemps là dessus. Je sens qu’elle est déçu et je peux la comprendre. Mais j’ai de bonnes raisons. Raisons qu’elle ignore. Ca vaudrait sûrement le coup de lui expliquer un peu mieux cette histoire, surtout que j’ai pas mal pensé à elle après coup. Je voulais lui envoyer un message pour lui dire que je vais bien mais je me suis dit qu’elle avait d’autres chat à fouetter que d’apprendre mes mésaventures. Surtout que c’est pas hors du commun dans mon boulot. Elle a assez de soucis avec sa mère, c’est pour ça que je ne sais pas si c’est une très bonne idée de lui dire ce qu’il s’est passé.

« Attend… »

Parce que oui elle a l’air de vouloir raccrocher et oui j’ai finalement décidé de lui expliquer un peu la situation, même si ce n’est pas judicieux. Bien que mes parents soient à présent au courant de ce qu’il s’est passé pour moi la nuit dernière, je suis bien content d’être dans une pièce à part pour parler à Wendy. C’est privé ces trucs là.

« J’ai cru que j’allais y passer aujourd’hui. Au boulot. Au milieu d’une intervention… J’ai vraiment cru que c’était la fin… J’ai passé quelques heures à l’hôpital et j’ai rien mais j’ai eu très peur et… J’ai pensé à toi mais je voulais pas t’inquiéter. Et je sais toujours pas si c’est une bonne idée de te dire tout ça mais j’ai pas envie que tu m’en veuilles parce que je m’en veux déjà beaucoup d’avoir zappé notre rendez vous. Je sens que t’es déçu et je comprends mais… Je me sens pas de sortir en ville ce soir. »

Je me mordille la lèvre. J’aurai presque envie de l’inviter à manger chez moi avec ma famille mais la dernière fois que j’ai invité une fille à rencontrer ma famille ça s’est plutôt très mal fini. Donc non, je me retiens de faire cette proposition.

« Si tu veux on peut aller manger ensemble un midi dans la semaine ? »

J’ai très envie de prévoir un autre rendez vous avec elle avant qu’on ne raccroche. Ca prouverait que je n’ai pas complètement tout foiré avec elle. Non quand même, un simple oubli, ça peut arriver à tout le monde, surtout quand on a de bonnes raisons. Elle ne va pas me rayer pour ça non ? Non. J’espère pas.

Debout, au milieu du trottoir, le téléphone à l'oreille, je tente de me retenir de lui raccrocher au nez et de pleurer. Fais chier, fais chier, fais chier. Il m'a oublié et maintenant, il n'est plus disponible. Je viens de me faire planter. On vient de me poser un lapin. Ce n'est pas la première fois mais c'est la première fois que ça me touche autant. Mon coeur a mal mais je ne veux rien montrer. Je suis un peu sèche, mon ton est monocorde mais j'essaye de me contenir. Ce n'est pas grave. " Attend... " Attendre quoi ? Attendre une excuse à la con alors que j'attends mon bus. Je me sens vraiment mal à l'intérieur et je n'arrive pas à comprendre pourquoi ça me touche autant. Ça ne devrait pas. Un ami qui fait un faux plan, ce n'est pas bien grave, ça arrive à tout le monde. " J’ai cru que j’allais y passer aujourd’hui. Au boulot. Au milieu d’une intervention… J’ai vraiment cru que c’était la fin… J’ai passé quelques heures à l’hôpital et j’ai rien mais j’ai eu très peur et… J’ai pensé à toi mais je voulais pas t’inquiéter. Et je sais toujours pas si c’est une bonne idée de te dire tout ça mais j’ai pas envie que tu m’en veuilles parce que je m’en veux déjà beaucoup d’avoir zappé notre rendez vous. Je sens que t’es déçu et je comprends mais… Je me sens pas de sortir en ville ce soir " Assise sur le banc de l'arrêt de bus, ses mots me serrent le coeur. Merde. Voilà pourquoi on attend les raisons, les explications avant de s'exciter miss Carmichael. Mais c'est si facilement de ronchonner avant d'avoir toutes les cartes en mains. Bien entendu, tout ça est arrivé lors de mon jour de congés. Ce n'est pas drôle sinon, voyons. " Quelle infirmière t'as prise en charge ? T'es sur que ça va ? " Que je demande hâtivement. Parce que bon, on sait tous qu'inhaler trop de fumée, ça peut détruire les poumons. Et je ne veux pas qu'il arrive quoi que ce soit à Kane. " Pourquoi ce n'est pas une bonne idée de m'en parler ? Tu as peur que je vienne jouer à l'infirmière avec toi ? " Je ris doucement avant de reprendre mon sérieux face à la route et à mon bus que je laisse filer. " Si tu veux on peut aller manger ensemble un midi dans la semaine ? " Je l'écoute et fronce un sourcil. Il ne peut pas me voir mais dans ma tête, ça réfléchit à cent à l'heure. " La semaine ? T'es de nuit ? T'es en arrêt ? T'es sur que tu n'as rien Kane ? " Et je m'inquiète parce que je suis comme ça, je m'inquiète énormément et pour absolument tout. " On peut se faire dans la semaine oui, je suis de nuit donc si on pouvait soit se voir pour un petit-déjeuner aux alentours de huit heures ça serait cool ... Ou un repas mais plutôt sur les coups de treize heure trente... " Que je puisse dormir un petit peu avant de le voir. " Tu restes pas tout seul ce soir hein ? " Je passe du coq à l'âne. Du grand Wendy... Mais ma voix s'est adoucie. Et si je l'avais perdu ? Et s'il avait péri dans cet incendie ? C'est un risque et je le sais...

Elle s’inquiète de l’infirmière qui m’a pris en charge et je réfléchis à la question parce que j’en ai vu quelques unes passer.

« Y’a surtout eu Nora… Mais oui je vais bien. »

Nora, une jolie rousse qui a des origines hongroises. Je sais, on a eu le temps d’en parler. Pas aujourd’hui, non. C’était plutôt très bref comme échanges aujourd’hui. Elle avait beaucoup de boulot et j’avoue, je n’étais pas d’humeur à taper la discut’. Encore trop retourné par tout ça.

Wendy plaisante. Tant mieux. Ca fait du bien de l’entendre rire. Elle ne doit pas trop m’en vouloir. J’espère. Je lui propose d’aller manger ensemble un midi et elle me pose tout un tas de question. Je me mordille la lèvre. Je ne sais pas pourquoi je suis si nerveux alors qu’il s’agit d’une simple conversation téléphonique.

« J’ai rien. J’ai eu un check up complet à l’hôpital. Je suis de nuit oui… »

C’est pour ça que le midi ça peut le faire. Après quelques heures de sommeil, je serai opérationnel pour un repas le midi avec elle. Aujourd’hui, je bosse pas, j’ai toujours les mardis soir de libre pour aller aux soirées open mic. Sauf ce soir, j’avais prévu de voir Wendy a la place. Je reprends donc le boulot le lendemain soir.

« Un petit déj c’est bien oui. Et non je suis pas seul ce soir. Je vais rester chez mes parents. »

Comme un enfant, mais j’en ai pas honte. Je sais reconnaître quand j’ai besoin de mes proches. J’ai la chance qu’ils soient toujours la pour moi.

« Donc on a qu’à dire… jeudi à 8h ? Je passerai à l’hôpital te chercher. »

Parce que je finis à 6h et donc j’aurai tout le temps de me doucher, me changer et me rendre à l’hôpital pour y être à 8h. C’est un bon timing. Je laisse un léger silence s’installer avant de reprendre la conversation.

« Je t’aurai bien invité chez mes parents ce soir, on est pas encore passé à table… Mais la dernière fois que j’ai invité une fille à voir ma famille elle m’a largué l’heure qui suivait… »

Je ferme les yeux fort après avoir dit ça. Je me sens con. Pourquoi j’ai fait cette précision ? Pourquoi parler de mon ex ? Elle en a certainement rien à faire. Et est-ce que j’étais en train de sous entendre qu’on est en couple elle et moi ? On dirait bien que oui… C’est comme ça que je le sens depuis le concert de Paramore. Je crois que je vais peut être trop vite dans ma tête mais c’est plus fort que moi.

Je suis plutôt en colère après lui quand il me dit qu'il ne viendra pas. Et quand j'apprends pourquoi il ne viendra pas, je me sens coupable. Je me sens coupable d'avoir jugé avant d'avoir tous les éléments en mains. Pourquoi est-ce que j'ai fait ça ? Comment est-ce que j'ai pu me permettre d'émettre un jugement sur Kane, de penser qu'il se jouait de moi ? Je m'en veux mais je ne peux pas faire tourner tout ça autour de moi. Parce que ça n'a rien à voir avec moi. Je m'inquiète pour lui et je me demande qui s'est chargé de lui. Qui est la personne qui a pris son cas en mains et n'a pas été foutu de me prévenir. " Y’a surtout eu Nora… Mais oui je vais bien " Nora. Soit. Je ne la connais pas vraiment et elle ne me connait définitivement pas assez pour savoir ce que Kane représente pour moi. J'assimile l'information et je continue avec mes questions. J'en pose un maximum pour tout savoir, comme si c'était mon patient. Et je tente de dédramatiser la situation même si ce n'est pas facile. Il va bien. S'il n'est pas en observation à l'hôpital c'est qu'il va bien. Voilà ce que je répète à mon cerveau. En boucle. Pour ne pas l'oublier. " J’ai rien. J’ai eu un check up complet à l’hôpital. Je suis de nuit oui... " Je l'écoute et tente de réguler mon rythme cardiaque. Arrête de paniquer Wendy. S'il te dit qu'il va bien, c'est qu'il va bien. J'espère vraiment qu'il ne me ment pas. Et ce n'est pas le moment présent qui m'inquiète mais bien le futur, cette nuit et celles qui vont suivre. " Un petit déj c’est bien oui. Et non je suis pas seul ce soir. Je vais rester chez mes parents " Je souris légèrement. Il n'y a rien de mieux que ses parents quand ça ne va pas. " D'accord... Mais si ça ne va pas, tu m'appelles ok ? Même au beau milieu de la nuit, c'est clair Kane ? " Mon portable est toujours en sonnerie la nuit, au cas où il arrive quelque chose à ma mère. Ce soir, si le téléphone sonne, je risque d'être deux fois plus paniquée. " Donc on a qu’à dire… jeudi à 8h ? Je passerai à l’hôpital te chercher " Je souris légèrement et monte dans mon bus. Je m'installe au fond, sur un siège et je réponds doucement " Ok... N'hésites pas à entrer dans l'hôpital si je ne suis pas dehors. Je finis à 7h mais tu sais comment ça se passe ... Entre l'heure de fin de service et la réelle fin du service ... " Si un cas arrive à 6h55, je ne peux pas dire "débrouillez-vous, je finis dans cinq minutes". Ce n'est pas mon genre et puis... Je dois faire mes preuves pour qu'ils m'embauchent à la fin de mon stage, si un poste est vacant. Ça aussi ça va être beaucoup de stress mais j'essaye de ne pas y penser pour le moment. " Je t’aurai bien invité chez mes parents ce soir, on est pas encore passé à table… Mais la dernière fois que j’ai invité une fille à voir ma famille elle m’a largué l’heure qui suivait… " Je déglutis légèrement et mon regard se pose sur les arbres et la route qui défile sous mes yeux. Je vais bientôt devoir descendre pour prendre un autre bus et dans une petite vingtaine de minute, je serai sur mon canapé entre de boire de la bière et de manger la pizza réchauffée d'hier soir. " T'inquiètes pas... " C'est tout ce que je suis capable de dire. " Faut être prudent avec ce genre de choses " Que je lance en souriant légèrement. Oui, très prudent. Sinon notre famille s'attache à quelqu'un et quand la personne part... Voilà quoi. Je l'ai vécu avec mon ex et ma mère. Et je n'ai pas envie de repasser par-là de sitôt. " Profites de ta famille avant de retourner au boulot " Que je lui souffle doucement. Je descends de mon bus, traverse la rue et attends le suivant. " Mais tu peux être sûre que si c'est moi la prochaine que tu présentes, je m'enfuirais pas deux heures après... " Que je lui souffle doucement. " On s'est déjà perdu de vue deux fois. Et même si on dit jamais deux sans trois... La troisième fois sera quand l'un ou l'autre finira entre quatre planches. Le plus tard possible " Que je précise rapidement. Je ne referais pas cette erreur, il peut en être sûre. " Allez, va profiter de tes parents et on se voit jeudi... Prends soin de toi Kane " Finis-je par souffler, attendant qu'il réponde et / ou raccroche. Kane, Kane, Kane... Mon rythme cardiaque revient doucement à la normale. Ça faisait bien longtemps que je n'avais pas stressé à ce point... Et ça, ça voulait tout dire.

Elle veut que je l’appelle au milieu de la nuit en cas de besoin. Ca me touche. Un sourire tendre se forme sur mes lèvres. Elle insiste légèrement alors je me sens dans l’obligation de lui répondre quelque chose.

« C’est noté. »

Je ne sais pas si je le ferai réellement cela dit. Je ne sais pas si j’oserai. Non mais de toute façon y’a pas de raison. La nuit va bien se passer. Je vais dormir comme un bébé dans ma chambre d’enfant, d’ados. Plein de souvenirs dans cette chambre qui est toujours la mienne à l’heure d’aujourd’hui. Mes parents ne l’ont pas transformé en Airbnb ou en bureau.

Elle me prévient qu’elle sera sûrement en retard et ça ne m’étonne pas du tout. C’était couru d’avance même. C’est toujours comme ça. Moi même je ne suis pas sûre de finir à 6h comme convenu.

« Y’a pas de soucis. Je te tiendrais au courant si je suis en retard aussi. »

Ca risque d’être souvent comme ça entre nous maintenant que j’y pense. Mais c’est pas plus mal. On se comprend comme ça. Je n’aurai pas de remarques à ce propos. Quand je parle de ma famille, je regrette aussitôt et Wendy me rassure à ce niveau là. Ca va, j’ai pas fait de trop grosse gaffe. Je préfère pas faire plus de commentaire là dessus et passer à autre chose. Sauf qu’elle reprend le sujet parlant d’éventuelles présentation avec elle. Ca va, ce qu’elle dit est cool. Elle me fait sourire. Elle est vraiment trop adorable. Elle surenchérit, parlant des décrochages dont on a fait preuve tous les deux aux cours de ces dernières années. Ca fait du bien de l’entendre dire. Elle part de cercueil aussi, un peu morbide, mais je vois tout à fait son point. Elle conclut la conversation d’une douce manière et je rêve de pouvoir caresser son beau visage à ce moment précis. Mes yeux se sont fermés pour l’imaginer.

« Merci… Et oui tu seras la prochaine que je présente. »

C’est une certitude. Déjà je vais leur en reparler au repas ce soir. Ils savent très bien qui est Wendy. A l’époque, il y a 8 ans, j’en avais parlé beaucoup trop souvent. Impossible qu’ils ne s’en souviennent pas.

« A jeudi Wendy. »

J’aime bien comment ça sonne une fois dit. Je raccroche, content d’avoir un rendez vous prévu avec ma jolie blonde.