Je crois que Bayside allait devenir mon nouveau chez-moi. Je n’avais pas vraiment l’habitude de venir par ici mais depuis que j’étais revenue avec Arthur pour aller au parc aquatique avec son fils, j’avais particulièrement apprécié le coin. Ce n’était pas à côté de chez moi, il fallait prendre la voiture et rouler pendant plusieurs dizaines de minutes mais ca en valait la peine. J’avais ce sentiment de pouvoir m’évader et de quitter la ville pour quelques heures. C’était plaisant et mon quotidien restait derrière moi. Aujourd’hui j’avais décidé d’aller sur le port. Plutôt un port de plaisance qu’un port de pêcheur à vrai dire mais c’était bien mieux ainsi. J’aurais la vue en plus et l’odeur en moins. Sentir le poisson et l’iode de l’océan salé n’était pas ce que je préférais quand je cherchais à venir me ressourcer. Là, j’avais vu sur des bateaux, des navires aussi beaux les uns que les autres et je préférais ne pas imaginer leur prix, ne pas imaginer qui sont les propriétaires ni leurs revenus. Je crois que je ne pouvais même pas avoir idée. Je n’étais pas de ce monde et même si j’avais la chance d’avoir une famille adoptive qui vivait bien, qui avait des revenus confortables, ce n’était pas non plus l’abondance. Mais peut être que ma mère biologique elle possédait l’un de ces bateaux tiens. Il manquerait plus que ça que je la croise ici, en train de se faire dorer la pilule sur un voilier. Ces gens qui s’exposent à la vue de tous pour dire « regardez, nous avons gagné notre vie, et vous pauvre misérable, vous nous observez avec vos étoiles dans les yeux. » oui, alors merde qu’est ce que je foutais ici en fait ? En quelques secondes j’étais passée d’admirative à dégoûtée de tout ça. Je fis alors demi-tour quand derrière moi, j’entendis une petite voix crier mon nom « Noa ! Noa ! » et cette voix s’approchait de plus en plus. Je me retournais alors et vis Abel courir vers moi, cette petite tête brune m’avait reconnue de loin, je ne pouvais être que fière de ça. Je me demandais alors avec qui il pouvait bien être. Ce serait cool qu’Arthur soit aussi dans les parages. Mais en voyant la jeune femme qui courrait derrière lui, avec un air plutôt paniqué, j’avais rapidement compris que c’était plutôt Angela qui accompagnait le bonhomme. « Eh salut mon prince ! » dis-je ne me baissant pour l’embrasser sur la joue lorsqu’il était enfin à côté de moi. «  je crois que tu as fais peur à maman ! » lui dis-je en voyant la jeune femme arriver presque essoufflée. « Désolée ! »

Angelina commençait à manquer d'imagination pour les sorties d'Abel, du moins dans le quartier de Redcliffe. Elle s'était donc dit que changer d'environnement pour une fois pourrait être rafraîchissant pour elle et son fils. Accompagné de leur chien Nox, un magnifique husky de deux ans, Angelina avait donc pris la direction de Bayside pour une jolie balade le long du port. Même si la proximité de l'eau la stressait un peu, les étoiles dans les yeux d'Abel en regardant les bateaux lui confirmaient qu'elle avait fait le bon choix en l'emmenant ici. L'air marin et la jolie vue leur faisaient à tous les deux le plus grand bien. Abel venait d'avoir quatre ans, il grandissait à vue d'oeil et dévéloppait de plus en plus de vocabulaire. Il faut dire qu'Angelina comme Arthur mettait un point d'honneur à le stimuler et à lui apprendre tous les jours de nouvelles choses. Les problèmes de comportement d'Abel n'en étaient plus, le petit bonhomme était désormais beaucoup plus calme, bien loin de la terreur qu'il était avant qu'Arthur n'entre dans sa vie et incarne la figure d'autorité qu'il manquait. C'était donc un petit garçon épanoui et plein d'entrain qu'Angelina avait à ses côtés. Un peu trop fougueux même parfois puisqu'il fallait constamment le surveiller pour être sûr qu'il ne s'échappe pas. Angelina avait même investie dans un bracelet où étaient inscrites ses coordonnées au cas où il lui traversait l'esprit d'échapper à sa surveillance. Ca n'était jamais arrivé jusqu'ici car Angelina était super vigilante et elle touchait du bois. Néanmoins, Abel avait une fâcheuse tendance à courir vers des gens que Angelina connaissait rarement. Comme aujourd'hui par exemple lorsqu'il s'élança vers une brune en hurlant. "Abel attends!!!" Le temps que la fille se retourne , Angelina l'entendit donner un petit nom à son fils et haussa les sourcils. Mon petit prince ? Mais c'était qui cette fille ? La jeune maman avait un tas de questions en tête et tentait de faire appel à sa mémoire pour reconnaitre à qui elle avait affaire. Angelina afficha un sourire poli avant de rattraper Abel par la main. "Oui effectivement, Maman aimerait comprendre !" Ca ne pouvait venir que d'Arthur. Le prénom lui disait quelque chose. "Tu es une amie d'Arthur c'est ça ? Et une amie d'Abel aussi apparemment." releva t-elle non sans se départir de son sourire.

Depuis le temps que j’entendais parler de cette fameuse Angela, la mère du fils d’Arthur et donc, son ex. J’avais suivi épisode par épisode, j’avais droit presque chaque semaine, depuis qu’Arthur savait qu’il était père, à un résumer de ce qu’il se passait entre lui et cette nana. Leurs premiers pas tumultueux, tendus où Angie avait peu confiance en Arthur. Normal en même temps, elle avait élevé Abel toute seule, les premiers mois, les premières années et d’un coup, un père tombé du ciel. Arthur avait du apprendre à faire connaissance avec son fils mais à aucun moment, je n’avais douté de lui. Bon, c’est sûr, c’est pas à lui que j’aurais attribué la palme du père parfait à la base, il était pas vraiment destiné à ça, du moins, pas si soudainement. Mais j’avouais qu’il s’en sortait plutôt bien et ca faisait plaisir à voir. Angelina avait mené la vie dure à mon ami. D’après Arthur, elle n’était pas trop capable de dire ce qu’elle voulait mais qui pourrait lui jeter la pierre ? Pas évident de voir débarquer un homme dans la vie de son fils du jour au lendemain, qui plus est, son père. Ce qui finalement s’est plutôt bien conclu puisqu’Arthur me confiait que ces derniers temps, tout se passait bien mieux, la pilule était avalée et leurs relations étaient bien plus fluides. Alors Angela ne savait en effet pas qui j’étais mais moi j’en savais pas mal à son sujet. "Oui effectivement, Maman aimerait comprendre !" Après avoir salué le bonhomme je relève la tête et tends la main à Angela. « Noa ! » mais elle l’aurait sans doute deviné puisque son fils s’était amusé à crier mon nom à travers le port jusqu’à me retrouver. "Tu es une amie d'Arthur c'est ça ? Et une amie d'Abel aussi apparemment." J’acquiesçais d’un signe rapide de la tête. « Exacte ! Et j’ai fais la connaissance d’Abel il y a peu de temps. On a passé une journée au parc aquatique pas loin d’ici d’ailleurs. » journée assez riche en émotion et en révélation à vrai dire. « Enchantée d’enfin pouvoir faire ta connaissance ! » et c’était sincère. J’ignorais si c’était le cas pour elle, après tout je n’étais qu’une amie d’Arthur mais potentiellement capable de recroiser Abel assez souvent.

A part Nina, Carlisle et Kane, Angelina n'était pas habituée à voir son fils avec d'autres adultes. Elle avait tendance à oublier que lorsque son fils était chez son père il pouvait être amené à faire d'autres rencontres sans qu'elle soit forcément au courant. C'était même monnaie courante chez Arthur qui contrairement à son ex avait un cercle amical beaucoup plus étendu. Au début, ça la faisait tiquer un peu, de savoir que son fils était amené avoir un peu de monde de temps en temps sans qu'elle puisse vraiment contrôler qui croiser son chemin. Les enfants en bas-âge étaient influençables et Angie ne voulait pas que son fils se sente bousculé. Mais au fur et à mesure que ses relations avec le père de son fils s'étaient apaisés, Angie avait acquis une vraie sérénité à l'égard du partage de la garde. Elle avait totale confiance en Arthur, elle savait que tant qu'Abel était avec son papa, rien ne pouvait lui arriver et elle pouvait désormais dormir sur ses deux oreilles les soirs où il n'était pas avec elle. Noa semblait donc faire partie de ce fameux cercle amical et Abel avait l'air d'être plutôt familier avec la jeune femme. C'était une jolie brune, une beauté particulière et une petite moue mutine qui devait la rendre inoubliable aux yeux de son fils. Angie n'eut pas d'hésitation à lui serrer franchement la main de la jeune brune, ajoutant un sourire de circonstances pour se rendre sympathique. Elle savait qu'elle n'avait pas vraiment bonne presse dans les amis d'Arthur, elle l'avait déjà expérimenté en se confronter à une amie d'Arthur qui l'avait totalement humiliée devant Abel en plein milieu d'un parc public. Mais cette fois-ci c'était différent, celle qui se présentait comme Noa n'avait pas du tout l'air d'avoir quelque chose contre elle. "Enchantée Noa, je m'appelle Angelina. Je suis contente de te rencontrer ! Je suppose que les amis d'Abel sont aussi mes amis !" dit-elle en riant. Elle regarda Abel qui n'avait que d'yeux que pour l'amie d'Arthur. Son fils était-il en train d'affirmer son attirance pour les brunes ? Il y avait fort à parier, Abel pouvait être un vrai petit séducteur. "Est-ce que tu veux te joindre à nous ? On allait prendre un Milkshake au petit kiosque ? Comme ça, ça sera l'occasion de faire connaissance !" Angelina n'était pas du tout du genre sociable auparavant mais elle comptait bien faire des efforts. Elle se sentait moins seule que lorsqu'elle était revenue à Brisbane et cela venait surtout de sa nouvelle envie de se faire des connaissances auprès de qui elle pourrait faire oublier son ancienne mauvaise réputation.

"Enchantée Noa, je m'appelle Angelina. Je suis contente de te rencontrer ! Je suppose que les amis d'Abel sont aussi mes amis !" J’avais presque envie de lui dire que je savais déjà comment elle s’appelait mais bon, ce n’était pas nécéssaire. J’étais ravie qu’elle ne me voit pas comme une adversaire. Je m’étais souvent demandée comment était réellement cette Angelina. Bien sûre, j’avais vu des photos d’elle, j’en savais déjà pas mal à travers les récits d’Arthur mais maintenant, j’allais pouvoir avoir mon propre avis. « Je crois pouvoir dire qu’on est amies alors ! » en tout cas, j’espérais être dans la bonne case pour Abel mais je pense ne pas me tromper en disant qu’il m’appréciait. Si nan, il n’aurait peut être pas pris le risque de courir à travers le port pour venir me trouver. "Est-ce que tu veux te joindre à nous ? On allait prendre un Milkshake au petit kiosque ? Comme ça, ça sera l'occasion de faire connaissance !" La proposition n’était pas déplaisante. Puis, comme j’étais venue ici dans le seul but de m’évader un peu, je n’avais rien d’autre de prévu. Rien que du temps libre devant moi et j’avais le sentiment que ce moment de partage n’allait pas être désagréable. « Avec plaisir ! » je regardais Abel avec ses petits yeux qui brillaient. « Un milkshake est le bienvenu en plus ! » je me permets alors de prendre la direction du kiosque, j’étais passée devant il y a peu de temps et j’avoue qu’avais déjà eu l’eau à la bouche mais je n’avais pas trouvé raisonnable de prendre un goûter toute seule. Maintenant que j’étais accompagnée, la donne avait changée. « Depuis le temps que j’entends parler de toi… » dis-je pour lancer la conversation. « enfin, depuis que vous avez bien chamboulé la vie d’Arthur ! » ça n’avait rien de négatif. « Abel l’a beaucoup changé ! J’peux le voir de jour en jour ! » même si finalement, avec Arthur nos rencontres étaient de plus en plus éloignées, nous ne manquions pas de nous tenir informer de nos vies par messages via les différents réseaux sociaux. Je ne ratais pas une miette de ce qu’il se passait dans sa vie et inversement. Nous pouvions compter l’un sur l’autre, réellement. « J’imagine que ça a du changer pas mal de choses pour toi aussi… » pas évident de devoir partager son fils du jour au lendemain quand on a eut l’habitude d’en avoir l’exclusivité si longtemps.

Le silence dans l’habitacle de la voiture se faisait pesant, et n’était troublé que par les coups de frein et d’accélérateur d’Anwar et sa conduite brusque. Lorsque la radio s’était mise à grésiller Patton s’était emparée du talkie et avait demandé transmission avant de se voir répondre un « Marina zone Sud. Capitainerie avisée de votre arrivée. » qui avait arraché au brun une grimace embêtée. Ce n’était pas vraiment le moment de se mettre mal avec la capitainerie par-dessus le marché ; Son bail de location d’emplacement arrivait bientôt à expiration. « C’est reçu pour équipage 51. Terminé. » Comme s’il était agi là d’une invitation, Anwar avait enfoncé un peu plus la pédale d’accélérateur, et l’habitude aidant la Lieutenant de police avait simplement attrapé la poignée au-dessus de sa portière. Et sachant très bien que lorsqu’il était mal luné il ne fallait pas compter sur Anwar pour crever l’abcès le premier, l’inspecteur se révélant beaucoup plus efficace pour infliger la punition du silence, elle s’était fait violence « Je ne dis pas que ça me plaît, tu sais. Si encore on avait un autre suspect, un début de piste ou je ne sais pas … » Mais ils n’avaient rien, pas d’autre piste, pas de suspect supplémentaire … Seulement Noa Jacobs, son mobile, et son absence d’alibi. « Peut-être que c’est vraiment elle. » avait même fini par souffler la policière, dont Anwar la connaissait suffisamment pour deviner qu’elle ne croyait pas entièrement à ce qu’elle disait. « Quand est-ce que « peut-être » est devenu satisfaisant ? » Ça ne l’était pas, Dieu sait qu’Annie ne s’en satisfaisait pas, et que son équipière ne devrait pas s’en satisfaire elle non plus. Et comprenant qu’elle ne tirerait rien de lui et de son humeur de chien la jeune femme n'avait rien dit de plus, se contentant de s’enfoncer dans son siège tandis que l’Inspecteur filait à toutes allure vers la Marina de Bayside en empruntant ses raccourcis habituels. Il y songeait pourtant, au fait que Jacobs était peut-être vraiment coupable, il n’avait pas la prétention de penser ses intuitions infaillibles … Mais il n’avait pas de certitude, et cela ne lui convenait pas. Coller en taule quelqu’un sans être sûr qu’il ou elle le méritait, ça ne lui convenait pas, et partant de là tout – absolument tout – était une excuse suffisante pour attiser les braises de sa mauvaise humeur. Le feu qui ne repassait pas au vert assez vite, la circulation, et même le soleil qui tapait malgré l’hiver et lui avait fait maudire le fait de venir à la Marina pour coffrer quelqu’un quand la seule chose dont il avait envie c’était de sauter sur le Borealis et de prendre le large pour avoir la paix au moins pour les quarante-huit prochaines heures. Garé en bataille sur un bout d’esplanade, la mention « police » attachée au pare-soleil comme justification quand en réalité Anwar n’avait besoin d’aucune excuse pour se garer comme un âne, les deux policiers avaient remonté la zone piétonne en balayant la foule derrière leurs lunettes de soleil, et repérant finalement la silhouette de leur suspecte aux abords du kiosque et en compagnie de deux autres personnes. « Un môme, il manquait plus que ça. » qu'avait grogné Anwar entre ses dents, déjà pas satisfait de procéder à cette arrestation mais encore moins à l’idée de le faire devant un enfant. Mais c’était comme ça, c’était le boulot. « Noa Jacobs ? » Arrivés à distance raisonnable du trio, les deux policiers avaient discrètement désigné le badge attaché à leur ceinture pour se désigner de manière officielle, bien que l’un et l'autre n'aient aucun doute quant au fait que la brune se souviendrait très bien d’eux. « Vous êtes en état d’arrestation dans le cadre de l’enquête menée sur le meurtre de Dustin Anderson, je vais vous demander de nous suivre. Vous pourrez passer un coup de téléphone une fois au poste si vous souhaitez contacter un proche ou un avocat. » Et avant que ne lui prenne l'envie de protester, ou pire, de résister, le policier avait laissé son regard glisser sur l’autre femme et sur le garçon qui l'accompagnait, avant de revenir à Noa pour lui conseiller « Ne m’obligez pas à vous passer les menottes devant un enfant, coopérez. » d’un ton toujours ferme, mais qu’il avait tenté de rendre moins sévère - presque désolé.

Spoiler:

Il y a un an, Angelina aurait détesté l'idée de rencontrer une amie de son ex. Sans doute par jalousie ou possessivité elle aurait été hors d'elle de constater qu'Abel connaissait quelqu'un qu'elle ne connaissait pas. Dieu merci, ils avaient fait du chemin depuis et rencontrer des connaissances d'Arthur n'était plus source de conflit pour l'ancien couple. Du moment que la personne en question était recommandable... Noa n'avait pas l'air d'être quelqu'un de qui elle devrait se méfier alors elle lui avait naturellement proposé de venir partager un milkshake avec eux. Après tout la journée était radieuse et Abel avait l'air d'apprécier la compagnie de Noa. "Oui je me doute que t'as du entendre parler de moi..." dit-elle en grimaçant. Si il y avait bien une chose qu'elle n'avait pas particulièrement envie de sa voir c'est ce que disait Arthur derrière son dos. Le fait qu'elle lui ait caché l'existence de son fils pendant des années n'avait clairement pas joué en sa faveur et si aujourd'hui Arthur faisait partie intégrante de la vie d'Abel, Angelina savait que son ex garderait toujours un peu de rancoeur à cause de ce lourd secret. Et honnêtement comment lui en vouloir... Mais peu importe, le fait est qu'il ne devait pas avoir dit tant de mal que ça d'elle à Noa puisque la belle brune se montrait très chaleureuse que ça soit avec Angie ou Abel. Et ça fait plaisiri à voir, de savoir qu'Abel était entouré par ce genre de personne quand il n'était pas avec elle.... "Oui ça a changé énormément de choses mais finalement ce n'est pas plus mal, je peux de nouveau avoir une vie de femme et..."

Mais Angelina n'eut pas le temps de terminer sa phrase puisqu'un type surgit de nulle part pour apostropher Noa. Angelina avait vu assez de descente de flics dans sa vie, que ça soit au Canva ou lorsqu'elle était jeune pour comprendre immédiatement ce qui était en train de se passer.  Un type qui débarque de nulle part et qui vous interpelle par votre nom complet vous interrompt rarement pour vous apprendre une bonne nouvelle. Angelina n'en revenait pas mais lorsque le type montra son badge, le doute n'était plus permis. La fameuse Noa qu'elle venait à peine de rencontrer était en train de se faire arrêter devant ses yeux et ceux de son fils. Etait-ce fait exprès ? Depuis quand étaient-ils là ? Allait-elle devoir les suivre ? Et si oui, qu'allait-elle faire d'Abel ? Putain alors ça, Arthur allait l'entendre et pas qu'un peu.  "Maman il fait quoi le Monsieur ?" Angelina s'empressa de prendre Abel dans ses bras par réflexe. Elle ne savait pas du tout de quoi il en retournait mais elle n'avait aucune envie que son fils assiste à ça. Elle s'écarta de quelques pas, toujours Abel dans les bras qui ne savait pas si il devait rire ou pleurer, si il devait avoir peur. Même Angelina qui était dans l'incompréhension la plus totale ne savait pas trop comment réagir. "Mais qu'est-ce qu'il se passe ? Un meurtre, sérieusement ?" Envolé les bonnes pensées bien intentionnées qui voulait que Arthur ne soit entouré que d'enfants de choeur et de personnes recommandables. Angelina venait de découvrir que Arthur avait tout bonnement exposé leur enfant à une supposée meurtrière. On marchait sur la tête. C'était d'autant plus déconcertant que le flic en question n'avait pas du tout l'air d'avoir envie de déconner et qu'il n'avait pas l'air d'en être à son coup d'essai. Angelina n'en revenait pas du timing merdique de la situation, la seule chose dont elle avait envie à ce moment précis c'est d'être le plus loin possible de Noa et de peu importe ce qu'elle avait fait pour en arriver à avoir les flics aux trousses. Ce n'était définitivement pas une situation normale pour un enfant de quatre ans.

On s’approchait du kiosque qui faisait les milkshakes et croisait plusieurs personnes qui en avait dans les mains. J’en avais l’eau à la bouche et je crois qu’Abel aussi vue les yeux qu’il avait à chaque fois qu’un milkshake lui passait devant. Il s’en léchait les babines et c’était assez drôle à voir. Je n’avais pas d’enfant et je n’étais franchement pas pressé d’en avoir. J’étais loin de me soucier de ma fameuse horloge biologique comme on dit. Celle qui fait tic tac dans la tête de nombreuses femmes et qui sonne l’alarme quand on voit pas les années passer. Certaines nanas flippaient de ne pas pouvoir avoir d’enfant une fois passer trente cinq ans. Mais pas de panique les filles, tant que la ménopause ne nous guette pas, tout est encore possible. Bon, ca devient certes plus compliqué mais faut pas baisser les bras pour autant. Et en toute sincérité, je pense que la ménopause me fera coucou bien avant que l’envie d’avoir un gosse ne me vienne. J’étais bien dans cette vie-là, cette vie d’adulte avec beaucoup moins de responsabilités qu’on ne voulait me coller à la peau. Enfin, qui sait, peut être que si je trouvais le mec parfait, je changerai d’avis. « Oui ça a changé énormément de choses mais finalement ce n'est pas plus mal, je peux de nouveau avoir une vie de femme et... » et ? Je me tournais pour voir ce qui avait bloqué Angelina dans son élan et à à peine deux mètres de moi, l’inspecteur Zehri. « Noa Jacobs ? » Mes yeux se posèrent directement sur Angelina et Abel, j’avais compris ce qu’il se passait, humiliation complète et encore plus quand ces paroles sortirent de la bouche de l’inspecteur. « Vous êtes en état d’arrestation dans le cadre de l’enquête menée sur le meurtre de Dustin Anderson, je vais vous demander de nous suivre. Vous pourrez passer un coup de téléphone une fois au poste si vous souhaitez contacter un proche ou un avocat. » Je restais de marbre, le regardant s’approcher encore de moi, menottes en main. Il allait donc réellement me passer les bracelets au poignet ? Ici, devant des dizaines de personnes, devant un gamin, devant l’ex de mon ami avec qui j’étais en train de faire connaissance. Plusieurs sentiments s’étaient alors emparés de moi : colère, peur, dégoût envers l’inspecteur, j’étais perdue. Qu’allait-il se passer ensuite ? J’étais pourtant persuadé que l’inspecteur savait très bien que j’étais innocente. Qui pouvait me croire coupable d’une telle affaire ? Restant totalement immobile, Anwar insista. « Ne m’obligez pas à vous passer les menottes devant un enfant, coopérez. » coopérer… c’est donc tout ce que je devais faire. Me retourner et le laisser me mettre les menottes, me laisser enchaîner sans broncher. Devant un enfant, elle était donc là sa manière de faire. La belle aubaine tiens. Je tendais alors mes mains, devant ou derrière je n’avais aucune idée de comment faire. Je sentie le fer froid se poser sur ma peau. Je sentais mon pouls accélérer, mon cœur battre d’une telle force dans ma poitrine. « Mais qu'est-ce qu'il se passe ? Un meurtre, sérieusement ? » c’était bien ça la question oui… sérieusement ? Je n’osais même plus chercher un quelconque réconfort ou soutien chez Angelina. J’avais compris au son de sa voix que j’étais déjà bonne à payer pour un crime que je n’avais pas commis. « on peut y aller ? » je n’avais pas envie de rester une seconde de plus ici et je savais que me débattre n’était absolument pas la meilleure chose à faire. L’étape suivante : appeler mon avocat, qu’il me sorte de là et vite.