| Let's give a hand and have a drink - Maze |
| | (#)Ven 18 Mai 2018 - 12:01 | |
| Un bref regard sur ma montre. J'ai encore le temps de repasser déposer quelques affaires chez moi avant de me rendre au Mctavish. Car dossiers sous le bras, il n'est pas question de les laisser au théâtre ou de les apporter au rendez-vous établi avec Maze. D'un message reçu hier, c'est pour marquer le coup de notre courte collaboration ces deux dernières semaines que la proposition m'a été faites d'aller prendre un verre ensemble au pub. Détente et non plus travail sont donc de mise à l'inverse de mes dossiers trouble-fête. Pourtant, si l'on pourrait croire à une lourde charge de travail sur la journée, la taille des dossiers en témoignant, c'est bien l'inverse que je me suis vu attribué avec la Northlight Company ces quelques dernières semaines. La conception de décor portée à sa finalité pour le nouveau spectacle de notre metteur en scène, c'est un simple travail de tri qu'il me reste à faire dans cette période de bouclage de projet. Et bien que j'aime toujours apporter de l'aide aux artisans pour les détails des finitions en atelier, c'est bien plus un rôle de superviseur qui m'a été donné. Là où même mes passages au théâtre se sont fait plus rare, simplement présent sur quelques répétitions en costumes pour indiquer les tracés des décors au sol aux comédien. Je n'ai plus qu'à attendre leur installation prochaine pour le voir sublimé de ces acteurs. Et au final, c'est dans mon propre appartement qu'il me reste le plus à faire au milieu d'un travail d'archivage habituel à chaque fin de conception de décors. Régi par un argument simple mais efficace : il faut bien passer à autre chose. Car fin de réalisation signifie aussi devoir choisir quoi conserver comme archives et se séparer du non-essentiel. Vrai calvaire pour certains, chose aisée pour d'autres. J'ai pour ma part habitude d'opérer avec pragmatisme sur cette dernière ligne droite : conserver les croquis préparatoires, classer les plans réalisés par ordinateur pour finalement me délaisser des maquettes. D’une part par manque de place, d’autre part parce qu’elle ne sont pas des plus essentielles pour la mémoire du projet. Une destruction de mes réalisations en carton plume pure et simple qui aurait rythmé mes journées si ça n'était mon engagement de dernière minute sur un projet imprévu. Un appel qui m’avait d’abord surpris à la lecture du nom affiché sur l’écran de mon téléphone : Maze Crawley. Car en dépit d'une charge de travail amoindrie avec la compagnie, mon statut de scénographe n'a pas été laissé de côté pour autant.
Bien qu'il ne soit pas dans mes habitudes de m'engager sur deux projets à la fois, peu désireux de bâcler l'un au détriment de l'autre, c'est cette période de creux au sein de la Northlight Company qui m'a permis de répondre présent à l'appel en urgence de Maze. Rencontrée quelques mois plus tôt à ma sortie d'un spectacle de la compagnie, c'est bien vite que nos contacts professionnels ont été échangés. Désireuse de connaître le scénographe de la mise en scène, parler de mon métier l'entraînant à parler du sien et à nous accorder pour rester dans le carnet d’adresse de l'un comme de l'autre. Et bien que nous n'avons pas eu besoin de nous recontacter depuis, son nom m'était toujours familier des diverses newsletters que nous nous envoyions mutuellement. C'est donc avec curiosité que je me suis empressé de décrocher son appel téléphonique pas des plus anodins. Une courte exposition du problème, une prise de rendez-vous et l'accord était conclu à son plus grand soulagement et à mon plus grand enthousiasme : son scénographe habituel n'étant plus disposé à poursuivre le travail sur sa préparation d'une scène musicale, je me chargerai de reprendre sa suite. Deux semaines pour rebondir sur le terrain préparé par le précédent scénographe, la tâche ne fut pas des plus aisées mais elle sonnait à mes oreilles comme un air de défi pas pour me déplaire. D'autant plus que la collaboration avec Maze rendait compte d'une entente cordiale et d'une efficacité essentielle à la situation. Et bien que je préfère de loin pratiquer mon métier au service de la dramaturgie au théâtre, c'est avec plaisir que je me suis vu apprécier le travail sur un festival. Alliant expérience enrichissante et part d'amusement. Et de ce travail en urgence, c'est rapidement que le projet a été amené à sa conclusion. Avec comme dernière image celle des musiciens s'entraînant sur la scène crée à cet effet n'ayant pu assister à leur concert le jour J, date exigeant ma présence au théâtre.
C’est donc riche de cette collaboration que mes pas empruntent le chemin jusqu’au pub non sans un dernier regard sur ma montre : 19:56. Ponctuel de nature, c’est tranquillement que j’y parviens alors que Maze et moi nous sommes accordés ce matin via les réseaux sociaux de l’heure de rendez-vous aux alentours de 20:00. Percevant déjà quelques personnes profitant du bon temps de la soirée pour prendre leur verre en extérieur, c’est de mon téléphone que ma main se saisit à présent pour y formuler un dernier message :
- Spoiler:
Maze Crawley Message aujourd'hui 19:56
Hello Maze, je suis bien arrivé devant le pub. J'attends légèrement à l'écart car il y a du monde. A tout de suite
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| | | | (#)Ven 18 Mai 2018 - 23:21 | |
| Cela ne faisait même pas un an que Maze avait accepté ce nouveau poste à Brisbane, et elle avait pourtant déjà eu son lot de problèmes. Entre les artistes capricieux qui annulaient leurs venues à la dernière minute, ceux qui étaient trop saouls pour monter sur scène, les agents qui demandaient à ce qu'une montagne de conditions soient réunies et de règles respectées à la lettre; Maze avait quelques fois de quoi sérieusement s'arracher les cheveux. Pourtant, elle adorait son job plus que tout et ne l'aurait lâché pour rien au monde. Les horaires chaotiques, les imprévus, le stress, tout cela faisait partie du challenge que le métier de Chargée de projet événementiel représentait. Et la jeune femme avait toujours adoré relever les challenges. Si exercer le métier de ses rêves signifiait sacrifier un peu de sa tranquillité d'esprit et adapter sa vie privée, alors d'accord, il en serait ainsi. A l'âge de 16 ans et après son tout premier concert, Maze était ressortie avec des étoiles plein les yeux et avait décidé du métier qu'elle exercerait plus tard. Elle aussi voulait faire rêver les gens en programmant des musiciens talentueux. Aujourd'hui, elle avait enfin la chance d'être en contact avec des artistes internationaux alors que dix ans auparavant, elle se contentait de danser et de chanter sur leurs derniers albums seule comme une imbécile au milieu de sa chambre. Son côté fangirl était bel et bien toujours présent encore à 28 ans, mais elle avait toutefois appris à le contenir quelque peu en présence de ces mêmes artistes. Même si elle en mourait d'envie, elle aurait en effet difficilement pu expliquer à son patron pour quelle raison elle s'était jetée au cou du leader de ce groupe très connu. Non, Maze savait se comporter correctement et rester professionnelle...même si cela ne l'empêchait pas de quémander une photo ou un autographe ici et là de temps à autre. Ce qu'elle aimait également dans ce métier, c'était la cohésion qui existait au sein de son équipe et de ses prestataires. Elle avait pour habitude de travailler avec les mêmes personnes et de voir les mêmes visages au quotidien depuis son arrivée à Brisbane. Cela créait véritablement un climat de confiance et permettait même de faire preuve d'une certaine sérénité au milieu du chaos que l'organisation d'un concert pouvait représenter. Elle savait qu'elle pouvait compter sur les différentes personnes qui l'entouraient. Ou tout du moins, c'est ce qu'elle avait pensé jusqu'à présent. Mais, quelques jours auparavant, Maze était tombée des nues en apprenant que leur scénographe les laissait tomber pour une raison qui lui semblait encore bien obscure et étrange aujourd'hui. A l'occasion de grands concerts avec des têtes d'affiches qui en feraient rêver plus d'un, Maze et son équipe avait en effet pour habitude de faire appel à un scénographe afin d'offrir au public une mise en scène dont ils allaient se souvenir pendant longtemps. Les musiciens eux-mêmes étaient toujours ravis et avaient encore plus d'énergie à offrir à ces occasions-là. Mais voilà que leur prestataire les laissait en plan, à quelques jours d'un concert particulièrement important pour le festival. La jeune femme avait l'habitude de gérer les situations urgentes et stressantes. Elle avait cette capacité à garder la tête froide afin de pouvoir réfléchir plus vite et trouver une solution, mais il fallait avouer que ce jour là, elle avait complètement paniqué. Heureusement pour elle, Maze s'était souvenue d'une soirée fort agréable qu'elle avait passé à un spectacle de la Northlight Company. La jeune femme avait toujours adoré le monde du divertissement : que cela soit les concerts, les comédies musicales ou le théâtre. N'ayant quitté sa ville natale de Londres qu'un an auparavant, elle avait passé jusqu'à présent une grande partie de ses soirées dans le West End, le quartier regroupant la majorité des grands théâtres londoniens. Ce genre de spectacles ne cesseraient jamais de l'éblouir et de la faire rêver à travers le jeu des acteurs, les histoires racontées et les magnifiques mises en scène. Et côté mise en scène, le spectacle de la Northlight Company avait su la scotcher également. A tel point qu'elle avait demandé s'il lui était possible de rencontrer le scénographe. C'était ainsi qu'elle avait eu l'opportunité d'entrer en contact avec Andreï. Ils s'étaient tout de suite bien entendus et avaient échangé longuement sur leurs métiers respectifs. Maze se félicitait d'avoir été un peu intrusive ce jour-là en demandant à le rencontrer, puisque cela lui avait par la suite permis de le contacter pour savoir s'il serait disponible et d'accord pour remplacer leur scénographe et, par la même occasion, leur sauver la vie. La jeune femme n'avait pas de plan B à l'époque et elle avait prié pour qu'il accepte, ce qu'Andreï avait fait. Elle avait été particulièrement impressionnée par ses capacités d'adaptation -après tout, il avait l'habitude de travailler pour le théâtre, ce qui était bien différent de la mise en scène d'un festival- et la maîtrise avec laquelle il avait repris le travail inachevé par le précédent scénographe. Travailler avec lui avait été un véritable plaisir, et une réussite complète pour le concert en question. Le public, ainsi que toute l'équipe du festival, avaient été conquis par son travail. Andreï n'ayant malheureusement pas pu assister au concert qu'il avait aidé à préparer, Maze s'était fait une note pour penser à l'inviter à l'un de leurs prochains événements. Il méritait d'ailleurs probablement d'être invité à vie à leurs événements étant donné la maestria avec laquelle il leur avait sauvé la mise. C'était donc tout naturellement que la jeune femme avait décidé de l'inviter à boire un verre pour commencer, afin de le remercier une nouvelle fois de vive voix.
Maze venait d'arriver au pub Mctavish et l'endroit était sans surprise complètement bondé. Peut-être aurait-elle dû choisir un autre endroit...mais l'ambiance du pub était tellement sympathique qu'elle adorait s'y rendre malgré la foule permanente qui s'y trouvait. Alors qu'elle se demandait comment elle allait retrouver Andreï parmi tout ce monde, son portable vibra justement dans son sac. Maze commença donc à fouiller dans ce dernier, comme partie à la recherche du Graal. En effet, son sac à main avait tendance à être rempli de nombreux objets -souvent inutiles- ; à tel point qu'y chercher quoi que ce soit devenait presque une tâche impossible. Néanmoins, la jeune femme finit par mettre la main sur son portable. Elle venait de le sortir fièrement, quand elle remarqua qu'elle avait fait tomber un autre objet par terre en plein milieu de la rue. Elle y jeta un coup d'oeil et se baissa pour le ramasser très rapidement et aussi discrètement que possible quand elle comprit de quel objet il s'agissait : un pot en plastique sur lequel on pouvait très distinctement lire "pâte à prout". Non, contrairement aux apparences, Maze n'était pas restée coincée à l'âge de 5 ans. En revanche, son équipe oui. Tous ses collègues s'étaient mis d'accord pour lui offrir ce magnifique cadeau pour fêter le bouclage d'un gros dossier. Sur le moment, recevoir ce cadeau l'avait beaucoup fait rire. Mais à présent, elle se sentait juste totalement ridicule ; d'autant plus qu'elle croisa le regard d'un jeune homme avec un sourire en coin qui avait visiblement bien vu toute la scène. Maze reprit son téléphone, l'air de rien, en tentant de conserver le peu de dignité qu'il lui restait : avec cette foule, le sms d'Andreï tombait à pic ! Elle regarda aux alentours à l'entrée du pub, avant de finalement poser ses yeux sur la personne qui l'intéressait. Maze s'approcha de lui avec un sourire aux lèvres et, tout en le saluant et en l'invitant à entrer pour qu'ils puissent se chercher une table, ne manqua pas de le remercier à nouveau. "Un grand merci d'avoir répondu à mon invitation. Je te préviens, tu commandes autant de verres que tu veux ce soir, l'addition est pour moi ! C'est le minimum que je puisse faire après le coup de main que tu nous as donné et tout le travail que tu as fourni en si peu de temps...Sur ce coup-là, t'as vraiment joué les Superman et je peux t'assurer qu'on t'en est tous très reconnaissants !" Maze s'avança vers une table pour s'y installer : n'étant que deux, ils n'avaient pas eu trop de mal à trouver une petite place parmi la foule déjà présente. "Cela t'arrive souvent de sauver la mise à des gens de cette façon, à la dernière minute, ou bien c'était une première pour toi ?" |
| | | | (#)Lun 4 Juin 2018 - 6:14 | |
| Ca n’est qu’une attente de courte durée devant le pub avant que mon regard ne capte celui de Maze à l’écart de la foule. Un sourire aux lèvres auquel je m’empresse de faire écho, rangeant dans ma poche de veste mon téléphone inutile à présent que nous nous sommes retrouvés au milieu de l’abondance de personnes. Pourtant, malgré une courte attente, ce sont quelques images qui parviennent à se remémorer à moi. Mon esprit profitant de ce fin laps de temps pour remonter dans mes souvenirs : il faut dire que bien que je sois retourné de temps à autres au Mactavish depuis la St Patrick accompagné de mon frère, je ne peux m’empêcher de repenser au conflit qui a eu lieu entre Clément, son ami Bonnie et moi dans ce lieu même. Clément, usant des poings contre un individu du bar pour finalement se faire virer de celui-ci. Se retournant contre son ami et moi dans une colère jalouse insensée. Son ami se révélant être le charmant inconnu de mes soirées. Partant tous deux de notre côté pour laisser notre désir s’épanouir au sein de mon appartement. Si le choix de ce bar par Maze est pour m’enchanter, appréciant la continuelle festivité du lieu, il est à présent indissociablement lié à Clément et Bonnie dont je n’ai depuis un certains temps plus de nouvelles. Ni à la Northlight Company où Clément ne peut exercer en tant que danseur ou comédien en raison d’une blessure, et il ne me viendrait pas à l’idée de venir recontacter Bonnie par téléphone. Trop personnel peut-être. Inapproprié. Me contentant de quelques pensées furtives à son propos comme celle-ci sans autre besoin quelconque. Des pensées vite balayées en fendant la foule pour aller retrouver Maze, m’encourageant d’un signe de tête à la rejoindre à l’entrée du pub.
Enthousiaste à sa suite, c’est avec amusement que j’accueille la remarque de Maze tout en nous dirigeant vers une table libre. Beaucoup ayant préféré une place dehors ou près du bar, il ne nous est pas difficile de nous y installer. Fin sourire, ponctuant notre installation par mon commentaire d’un ton léger “Je ne me serais pas vu refuser une telle proposition ! Et je suis ravi d’avoir pu aider : tu as bien fait de m’appeler en urgence ” Car face à la dead line qui se rapprochait à grands pas, il m’aurait été bien difficile de boucler une reprise de création si Maze s’était tourné vers moi plus tard. Au final, nos timings ont fini par bien s’aligner. Une chance. D’autant plus que je n’aurais pas pu demander meilleure entente avec l’équipe si bien que c’est avec une déception non feinte que je n’avais pas pu être présent au concert. Bien qu’un pot avait été pris avec toute l’équipe, tout s’est déroulé assez rapidement sans pouvoir réellement en profiter. Le sms de Maze et son invitation palliant à ce fait. Déposant sur le dossier de la chaise ma veste, me retournant tout à fait pour répondre à Maze elle aussi tout à fait installée. “Je dois t’avouer que ça a bien dû m’arriver une fois quand je ne travaillais pas encore pour la Northlight Company mais il y a bien longtemps… En revanche, j’avais déjà officié dans l’évènementiel auparavant ce qui a pas mal aidé je pense.” Peut-être l’une des seules raisons pour lesquelles je peux remercier mon année passée à Sydney : malgré une période de doutes, j’y aurai expérimenté pas mal au sein du domaine de la scénographie. Car il y a bien eu un lot d’expériences enrichissante au milieu des collaborations déplaisantes. Et, à présent libéré du stress de l’approche de la fin de projet, invoquant l’humour à ma remarque “Les problèmes de dead lines et d’imprévus de dernière minute c’en est devenu presque une tradition, à croire qu’il n’y a pas de bons projets sans ! ” Mais même en riant, la remarque n’est pas anodine. Car du haut de mon chemin de carrière, je ne crois pas avoir travaillé sur un seul projet qui n’ai pas eu son lot d’emmerdements. Et-ce depuis mes débuts sur Londres jusqu’à la Northlight. Que ce soit avec un comédien, une livraison de costumes, un nombre de projecteurs ou des délais de fabrication variables, le stress est si quotidien qu’on finit par s’y faire. Mais j’ai toujours eu la chance de ne pas voir un acteur du projet partir avant qu’un point final ne soit mis à sa réalisation, contrairement au cas récent de Maze. Pas pro de la part de son scénographe, j’étais tombé des nues en apprenant la manière dont il l’avait laissé en plan sans raisons valables. D’autant plus que j’ai cru comprendre qu’ils n’en étaient pas à leur première collaboration ensemble. “D’ailleurs, tu as eu des nouvelles de ton scénographe depuis ? Ou bien son nom a définitivement été rayé de ton carnet d'adresses ? ” Car je devine qu’il doit être difficile d’adopter une décision franche et définitive dans un cas comme celui-là. Si pour moi la décision aurait été catégorique, il est légitime de se demander ce qu’il en est pour Maze. D’autant plus que dans un milieu comme celui-ci, les nouvelles se répandent vite.
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| | | | (#)Sam 9 Juin 2018 - 13:36 | |
| Maze commanda sans hésiter un verre de vin rouge. Cela faisait-il prétentieux comme boisson ? Elle aimait simplement prendre un verre de vin le soir, de temps à autre, la plupart du temps emmitouflée dans un plaide sur son canapé et prête à bingewatcher des heures durant les derniers épisodes de ses séries préférées. Son emploi du temps ne le lui laissait que très peu l'occasion de s'adonner à ce genre de soirées ; elles étaient donc particulièrement appréciées et précieuses aux yeux de la jeune femme. Comme le disait une bien sage chanson "Il en faut peu pour être heureux". En bonus, le vin avait ce pouvoir fabuleux de faire baisser sa glycémie; et cela n'était de loin pas négligeable pour une diabétique. Peu étonnant que cela soit très vite devenu sa boisson de prédilection. A cette pensée, quelques souvenirs lui revinrent en mémoire. Lorsqu'elle était encore en Angleterre, ses amis avaient pour habitude de la charrier car elle était en général la seule personne à prendre du vin quand toutes les autres personnes autour d'elles discutaient vivement, un verre de bière en main. A vrai dire, elle n'avait jamais été une grande fan de bière. Décidément, Maze ne pouvait rien faire comme tout le monde. Mais elle avait la curieuse impression qu'Andreï n'était de toutes façons pas du genre à juger les gens, surtout pas pour un innocent verre de vin. "Et je suis ravie que tu aies répondu à mon appel à l'aide !" Elle ponctua sa phrase d'un sourire sincère. "Vraiment ? Je ne savais pas que tu avais déjà travaillé dans l'événementiel par le passé ! Dis-m'en plus !" Maze était toujours friande de découvrir le passé professionnel de ses collègues -tout comme celui de ses amis d'ailleurs-, d'autant plus quand ils avaient travaillé dans le même domaine qu'elle ou dans quelque chose de très proche. Son propre parcours était assez peu original : elle avait fait des études de Communication puis enchaîné avec une école de commerce. Ses stages, son année en apprentissage et ses premiers contrats avaient toujours été dans le domaine de l'événementiel. En revanche, plusieurs de ses expériences professionnelles ne touchaient absolument pas au domaine du divertissement qui la passionnait tant. Elle avait en effet travaillé pour des grosses entreprises et organisé à cet effet des événements très corporate et ça n'était clairement pas sa tasse de thé. Néanmoins, elle restait plutôt fière de son parcours et du fil conducteur qu'elle avait suivi depuis ses 16 ans et ce fameux concert qui l'avait décidée à se lancer dans cette voix. Même s'il lui arrivait de temps à autre de se demander si elle n'aurait pas voulu essayer d'autres choses avant de se dédier corps et âme au monde de l'événementiel. Elle avait par exemple toujours rêvé de pouvoir participer à l'animation de film comme Monstres & Cie mais il n'y avait qu'un petit hic dans ce beau projet : elle ne savait absolument pas dessiner...Et compte tenu de son piètre coup de crayon, aucun cours de dessin au monde n'aurait pu la faire s'améliorer dans ce domaine là. Son métier actuel requérait d'ailleurs qu'elle dessine des plans à l'occasion et son équipe ne manquait jamais de se moquer d'elle dans ces moments là. Au moment même où Andreï se mit à parler de deadlines et d'imprévus, le téléphone de Maze se mit à vibrer sur la table. Elle venait de recevoir un SMS concernant un projet en cours. Elle ne put retenir un sourire en observant cette coïncidente synchronisation entre son portable et les paroles du jeune homme. "C'est vrai, ne m'en parle pas !" Elle éteignit son téléphone après avoir jeté un rapide coup d'oeil à l'appel au secours qu'elle venait de recevoir. "Mais j'essaye de décrocher et d'apprendre à déléguer...c'est hyper difficile je trouve !" Il serait toujours temps pour elle de répondre au message qu'elle avait reçu une fois rentrée chez elle. "On a des métiers très prenants et assez stressants...Mais d'un autre côté, c'est tellement gratifiant de voir un projet se concrétiser ! Je peux en baver pendant des mois nuit et jour...et tout oublier à la fin d'un événement en me disant simplement que ça valait vraiment le coup. Je ne sais pas si c'est pareil pour toi ?" Cependant, Maze ne pouvait s'empêcher de se demander de temps à autre si ce genre de vie était tenable dans la durée. Était-ce vraiment compatible avec une vie de famille ? Ça n'était pour le moment pas dans ces projets, mais elle se doutait tout de même que cela finirait par l'être un jour ou l'autre. "Des nouvelles de mon scénographe ? Wooo...non pas du tout. Je l'ai effectivement banni de mon carnet d'adresses. Je suis déjà plutôt rancunière au quotidien dans ma vie privée, mais quand ça touche au professionnel j'ai tendance à l'être encore plus ! La façon dont il nous a tous laissés en plan à la dernière minute était tout simplement inacceptable." Peut-être Maze était-elle légèrement excessive...mais elle ne voyait de toutes façons pas comment elle aurait pu à nouveau accorder sa confiance à cette personne pour un autre événement. Cela lui était tout bonnement impossible. |
| | | | (#)Jeu 5 Juil 2018 - 3:59 | |
| La table toute trouvée, c’est naturellement que la commande de nos boissons vient s’intercaler entre nos remarques bienvenues. Et il n’y a pas à douter que Maze et moi étions sur la même longueur d’onde dans cette collaboration. Autant reconnaissant à Maze de m’avoir offert cette opportunité d’opérer dans un festival qu’elle ne me semble l’être de lui avoir sauvé la mise, ce serait peu dire que nos verres sont bien mérités. Et si celui de vin rouge de mon interlocutrice aurait bien pu me faire de l’oeil, c’est sur une habituelle bière que mon choix se porte. Fidèle à la tradition portée par le pub Irlandais, non sans un certains air de déjà vu. Souriant à la pinte sitôt apportée de ce fin sourire d’un souvenir lointain sur les lèvres. Car c’était bien en présence de Bonnie la dernière fois que je portais ma pinte à ma bouche dans l’enceinte du Mactavish. Levant mon verre en direction de celui de Maze avant d’en prendre une gorgée : ce soir, l’ambiance est réellement à la détente. Et c’est par un hochement de tête que j’en viens à acquiecer à la remarque d’une Maze curieuse d’en connaître un peu plus sur mon parcours passé. Car s’il est vrai que ma spécialité dans le domaine de la scénographie reste l’art dramatique, il reste rare ceux qui parviennent à ne se cantonner qu’à une seule spécificité. Et je ne suis pas de cette exception qui confirme la règle. Tant mieux d’un point de vue de l’expérience, mon vécu à Sydney m’aura au moins permis de philosopher à ce propos. Reposant ma pinte sur la table que pour mieux rebondir à la question de Maze. “Ca n’a été que sur une courte période d’un an durant laquelle je n’étais sur aucun projet de mise en scène lorsque je suis arrivé sur Sydney.” Les changements d’un metteur en scène à un autre souvent synonyme d’une période de creux, d’autant plus si l’on porte certaines exigences aux projets recherchés. “J’ai eu l’occasion de toucher à plusieurs branches de l’évènementiel… Je dirais certaines plus en accord avec ce qui me plait dans le métier de scénographe que d’autres. ” Un rire fin en écho à ces quelques épisodes me revenant en mémoire de l’importance de bien distinguer l’évènementiel artistique du commercial. “Les collaborations avec les marques, très peu pour moi. En revanche, c’est toujours un plaisir de se prêter au jeu des festivals, mon regret étant peut-être celui de ne pas avoir pu participer au Sydney Festival de janvier pour m’y être pris trop tard ! Je ne sais pas si tu as déjà eu l’occasion d’y assister mais leur programmation reste toujours très prometteuse.” Car la déception laissée de côté, si le nombre de mes participations sur des projets dans l’évènementiel reste minime je n’en suis pas moins friand et partager expérience professionnelle et personnelle à ce propos reste toujours plaisant. Et c’est porté par cette même idée que j’en viens à mon tour à me questionner sur le parcours de Maze, les chemins menant vers l’évènementiel souvent diverses et variées. “Et pour ta part, tu as toujours travaillé au sein de festivals ? Ou bien ça n’est que ton domaine de prédilection du moment ?” Mon intérêt d’autant plus éveillé qu’il m’a été donné de voir l’investissement phénoménal que Maze investit dans ces projets. De ces types d’investissement que je n’ai toujours connu qu’auprès de personnes passionnées. Si Maze fait parti de ces passionnés, j’avais également vu juste en évoquant divers rebondissements indissociables de tout projets. Pas toujours aisé à manier si l’on ne souhaite pas être surbooké où même dans une soirée comme celle-ci Maze reste sollicitée. Mon regard suivant celui de Maze en direction de son téléphone aussi vite éteint que s’étant mis à sonner. Et je ne peux qu'acquiescer à sa remarque pleine de bon sens : si nos métiers restent des métiers de collaboration, déléguer certaines parts de notre travail à d’autres demande toujours un effort particulier. Peut-être même plus important que si la tâche était restée entre nos mains, la volonté de garder un oeil sur celle-ci souvent bien plus grande. Profitant de sa courte pause pour rebondir sur ses paroles découlant de son appel “Je pense que décrocher reste le plus dur. Même sans être sollicité on finit par toujours y penser par nous-même…” Mais au final, il est vrai que le jeu en vaut la chandelle. Je n’ai d’ailleurs jusqu’ici pas trouvé de meilleur sentiment de satisfaction que celui de voir l’un de mes décors enfin monté sur scène sous la lumières des projecteurs, sublimé par les comédiens. L’esprit récompensé du travail accompli en bonne et due forme. “Je n’aurais pas pu faire un meilleur résumé ! Et une fois lancé dans le milieu, c’est ce qui permet de continuer d’avancer. Sans cette petite dose de contentement au rendu final, je crois bien que l’on aurait tous rendu le tablier !” Un état d’esprit que je sais similaire à mon frère. Travaillant nuits et jours sur ses maquettes pour tenter de faire valider ses projets, son taux de satisfaction cependant bien plus difficilement comblé face au jugement de certains professeurs. S’accrochant cependant toujours autant dans le domaine de l’architecture et la conscience professionnelle toujours au rendez-vous. Bien moins le cas de l’ancien scénographe de Maze qui aura joué avec le feu sur ce projet. Inacceptable, je suis bien d’accord. Et si l’on a tendance à tous se connaître dans le métier, il ne me tarde pas de rencontrer celui-ci. “Depuis mes débuts je n’avais encore jamais assisté à une situation comme celle-ci. Des comédiens qui nous lâchent avant les premières répétitions, c’est déjà arrivé mais à ce stade le travail n’est pas enclenché et on peut toujours trouver un remplacement. Mais qu’un membre de l’équipe quitte le projet à quelques semaines de la déchéance, une première.” Prenant une gorgée de ma bière, ponctuant mon propos. Le caractère spontané de notre conversation entraînant des propositions tout aussi spontanées à se formuler. “En tout cas si tu as besoin d’un scénographe pour tes prochains projets, n’hésite surtout pas ! Même si mon travail avec la Northlight m’en empêche, je pourrais toujours te faire suivre des numéros. ” Un grand sourire venant parer mon visage. “D’ailleurs, la nouvelle création de la compagnie sera bientôt à l’affiche, si ton emploi du temps te le permet ça me ferait plaisir de te faire parvenir une invitation” Limitées à un certains nombre pour les comédiens et moi-même, je n’aurai aucun mal à lui en faire parvenir une. Hors de question que mon frère ne manque lui non plus l'événement. Nos retrouvailles gage de la reprise de nos vieux rituels, celui d’aller au théâtre ensemble en tête de file.
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| | | | (#)Mar 24 Juil 2018 - 1:19 | |
| Cela lui faisait du bien de pouvoir discuter de tout ça avec quelqu'un qui ne travaillait pas au quotidien avec elle mais qui, pourtant, rencontrait les mêmes problèmes. Cela avait un côté rassurant de savoir que tout le monde devait faire face à des deadlines serrées, à des imprévus stressants, et à des caractères avec lesquels il était difficile de travailler. Maze écouta d'une oreille particulièrement attentive les histoires d'Andreï au sujet de son passé de professionnel de l'événementiel. Elle ne put retenir un sourire lorsqu'il évoqua les collaborations avec les marques. "Ce qui me plait dans ce domaine, c'est de pouvoir offrir un événement mémorable au public alors je comprends parfaitement que l'aspect commercial ne t'ait pas plu...c'est exactement la même chose pour moi !" Elle avait bossé au sein de suffisamment grosses entreprises beaucoup trop corporate à son goût pour être sûre de ce qu'elle avançait. Si au moins ses employeurs avaient bien voulu la laisser organiser des fêtes de fin d'année ou des journées de lancement de produits qui sortent un peu de l'ordinaire...Mais non. Ils avaient tous choisi de rester imperméables à ses propositions et de continuer de ne penser qu'à eux et leurs produits plutôt que de chercher à créer une véritable expérience client intéressante et marquante. C'était une autre raison pour laquelle Maze adorait son travail actuel : elle y avait beaucoup plus de libertés pour s'exprimer et on lui faisait confiance. Si elle avait une idée qui sortait un peu de l'ordinaire, on la laissait en général la mener jusqu'au bout. "Je n'ai pu m'y rendre qu'une seule fois mais j'ai adoré le Sydney Festival ! De toutes façons, s'il y a un événement qui a trait de près ou de loin à l'art ou à l'industrie du divertissement en général, tu peux être sûr de m'y trouver. On devrait essayer d'aller ensemble à la prochaine édition ; ça me ferait super plaisir !" Et elle était tout à fait sincère en disant cela. Elle n'avait aucun doute sur le fait qu'Andreï serait un très bon et très intéressant compagnon de festival. Un nouveau sourire vint éclairer le visage de Maze à la question du jeune homme. "Je pense que ça a toujours été mon domaine de prédilection. En revanche je n'ai pas toujours travaillé dedans. J'ai commencé par des petits stages puis des contrats courts dans les départements communication et événementiel de grosses entreprises barbantes n'ayant pas à coeur de laisser la créativité de quiconque s'exprimer. Ça m'a en revanche appris les ficelles du métier malgré tout, mais j'étais incapable de m'épanouir dans ce genre d'environnement. Ma passion a commencé à l'âge de 16 ans après mon tout premier concert. Je suis ressortie de la salle avec des étoiles plein les yeux et c'est à ce moment précis que je me suis décidée à travailler dans l'événementiel. Ma passion a toujours concerné l'industrie du divertissement et je suis ravie de pouvoir enfin exercer le boulot de mes rêves dans la branche qui me passionne ! Mais bon, je suis un peu en train de te raconter ma vie du coup, excuse-moi !" Elle se mit à rire en songeant qu'elle était incorrigible. Si on la lançait sur le sujet de l'événementiel, de la musique, des pièces de théâtre, des comédies musicales et autres spectacles...elle était capable de parler des heures durant. Or ça n'était pas toujours du goût de son interlocuteur, même si présentement elle avait la sensation qu'Andreï était plutôt dans le même cas qu'elle. "Tu as l'air tout aussi passionné que moi pour ton travail...je me trompe ?" Il était difficile d'en douter, d'autant plus qu'elle l'avait maintenant vu travailler et qu'il semblait dédié corps et âme aux projets dans lesquels il se lançait. Maze acquiesça vivement à ce que le jeune homme venait de dire, ravie de voir qu'il était dans la même situation qu'elle. "Exactement ! Je ne peux pas m'empêcher de penser à un projet tant qu'il n'est pas terminé. C'est même certainement la dernière chose à laquelle je pense avant de m'endormir, et la première qui me vient à l'esprit en me réveillant. C'est moralement exténuant mais aussi formidablement galvanisant !" Le milieu dans lequel ils travaillaient tout deux était résolument ambivalent. Et si cela s'avérait en effet éreintant, c'était aussi probablement pour cet aspect là que leurs métiers leur plaisaient tant. Ne fallait-il pas être un peu schizophrène ou masochiste pour les exercer finalement ? C'était une question qui méritait considération... Elle but une gorgée de son verre de vin lorsqu'Andreï revint sur le sujet épineux de son lâcheur de scénographe, comme pour noyer ce souvenir dans l'alcool. "Ne m'en parle pas, je crois qu'on a trouvé la perle rare de la conscience professionnelle !" Elle sourit légèrement. Cette histoire lui restait encore en travers de la gorge mais elle était contente de pouvoir en rire maintenant que tout était passé. En revanche, elle détestait toujours autant ces situations où elle plaçait mal sa confiance en quelqu'un. Mais ce moment grisant se dissipa rapidement lorsque le jeune homme lui proposa son aide pour de futurs projets. "Ça serait avec grand plaisir ! En revanche, je ne travaille qu'avec les meilleurs donc ça sera toi, sinon personne !" Elle ponctua sa phrase d'un sourire en coin pour appuyer ce trait d'humour. Elle ne doutait pas que les connaissances d'Andreï devaient être également très talentueuses. Cependant, elle avait particulièrement apprécié de pouvoir travailler avec lui et elle se réjouissait que cela puisse potentiellement se reproduire à l'avenir. "Volontiers, j'adorerais venir, merci ! Quant à toi si tu vois un concert qui t'intéresse, n'hésite pas à me le dire surtout. Tu seras le bienvenu." Cette perspective de pouvoir partager des sorties culturelles avec quelqu'un d'aussi passionné qu'elle l'enchantait d'ores et déjà. |
| | | | (#)Mer 8 Aoû 2018 - 1:50 | |
| Si la collaboration n’aurait pas pu mieux se dérouler entre Maze et moi-même, ça n’est qu’à présent que nous apprenons réellement à appréhender le parcours de l’autre et bien plus encore la façon dont nous percevons notre propre profession. Et sur ce point, pas étonnant que nous nous soyons si bien entendu sur le lieu de travail puisqu’il semblerait qu’en ce qui concerne l'événementiel, nous partageons les mêmes idéaux. Désireux d’apporter au public une expérience unique autant vivante que créative et artistique, loin de nous l’idée de vouloir faire nos marques dans le commercial. Hochant la tête à la réponse de Maze en écho de mes propres paroles. Il n’y pas a dire : l’expérience auprès de grandes enseignes ne vaut pas le reste que se soit en tant que chargée de projet ou scénographe. Ou même en tant que simple public, l’exemple du Sidney festival vite évoqué. Car s’il est vrai que j’aurais fortement apprécié prendre part à la scénographie d’un tel événement, il n’y a pas à dire que le fait d’y avoir participé comme simple festivalier m’a amplement réjouis. Curieux de connaître l’avis de Maze à ce sujet, certains qu’il en serait de même pour elle. Chose qu’elle a tôt fait de me confirmer des plus enthousiastes, mon étonnement venant s’ajouter à sa dernière proposition : celle de me joindre à elle pour la prochaine saison. Me prenant de court, c’est pourtant avec un grand sourire que j’accueille sa proposition que je ne sens pas seulement de circonstance. Ayant moi-même déjà réservé pour la première semaine du festival en janvier 2019, réitérer l'expérience auprès de Maze ne peut être qu'amusant et enrichissant. Et étonnement, cet argument seul suffit à me montrer de plus enthousiastes. "Et bien écoutes, ça serait avec plaisir ! J'ai déjà bouqué dans mon agenda la première semaine en janvier prochain donc si les dates te conviennent on pourra checker la programmation ensemble." Théâtrale et musicale bien évidemment, mais également danse, cirque et toute autre discipline. Ce type de festival étant toujours l'occasion de découvrir de nouvelles choses. Enfin pour l'heure, c'est à propos de Maze que j'en apprends un peu plus, sa réponse comblant les attentes de ma question. Comprenant mieux d'où lui vient sa ferveur au travail et de quelle façon elle s'est familiarisée avec le milieu d'une passion de longue date. Ayant suivi un parcours marqué par plusieurs expériences plus ou moins satisfaisantes avant de pouvoir pleinement s'épanouir dans le domaine souhaité, c'est en me retrouvant dans ses propos que mon oreille se montre d'autant plus attentive. Reposant mon verre après y avoir pris une gorgée à sa dernière remarque, mon hochement de tête à la négative venant se joindre à son rire comme pour mieux la rassurer. "Crois-moi, si je n'y trouvais pas d'intérêt je n'aurais pas pris la peine de poser la question ! " Ma franchise désireuse de lui fournir une certitude sur ce point, bien trop conscient de la nuance entre raconter sa vie et partager son expérience. Car si je serai plutôt porté à me désintéresser du premier, je n'en suis pas moins friand du deuxième. De cette même façon c'est la question qui m'est retournée, encouragé par le récit de Maze pour lui faire part du mien, ayant bien compris que ma passion répondait à la sienne. Acquiesçant à son égard. "Et je crois bien qu'aujourd'hui, je ne pourrai plus me voir sans un projet en scénographie !" Mon travail presque comme me définissant, envisager son arrêt me semblant tout bonnement impossible. "J'ai commencé assez tôt à me former auprès de metteurs en scène, d'abord en tant qu'assistant à la mise en scène pour finalement me tourner vers la scénographie assez rapidement. Et depuis que j'y suis rentré à travers le théâtre, j'ai eu la chance de pouvoir m'y consacrer exclusivement ! Mais il faut dire qu'avant ça, c'était plutôt au métier de comédien que je pensais me destiner avant de me rendre compte qu'être sur les devants de la scène n'était pas fait pour moi... Il faut de tout dans le spectacle vivant !" De l'acteur jusqu'à la régie en passant par les costumiers ou l'attaché de production. Tout un monde.
Quoique faisant face à des obligations et charges différentes, les problèmes rencontrés liés à la profession n'en sont pas moins similaires tout comme les raisons qui nous poussent tous deux à persévérer dans notre domaine malgré son lot de difficultés. Des difficultés pas des moindres, et-ce presque quotidiennes si l'ont en croit les raisons qui m'ont menées à collaborer avec Maze sur ce festival. Bref rappel du non-professionnalisme du scénographe qu'il m'a été donné de remplacer, Maze préférant balayer son souvenir d'un revers de la main. Mon rire venant se superposer à sa touche d'humour clôturant un sujet fâcheux. Et c'est bien vite que j'en viens à proposer ma candidature si l'envie lui venait de réitérer notre collaboration, ne mettant cependant pas de côté mes obligations auprès de la Northlight Company. Une solution alternative même évoquée pusqu'il me suffirait de piocher dans mon carnet d'adresses pour pallier au problème. Maze, enthousiaste à l'idée me coupant cependant dans mon second élan de ce même ton humoristique : si je suis le bienvenue sur tous nouveaux projets, je peux bien me garder mes contacts pour un autre usage. Autant flatté de cette gêne qui peut m'être habituelle qu'amusé. "La Northlight va devoir accepter que je ne leur dévoile pas toutes mes idées dans ce cas ! " Façon légère de réappuyer sur ce désir de collaboration, profitant de l'instant pour lui faire part d'une nouvelle proposition. Celle d'assister au prochain spectacle de la compagnie. Et c'est avec ce même sourire, verre en main, qu'une réponse positive de ma part vient s'ajouter à la sienne, répondant de même à son invitation. "Sur ce coup-là, il m'est aussi impossible de refuser ! D'autant plus que ça doit faire très longtemps que je n'ai pas eu l'occasion d'assister à un concert." Et pourtant, dire que j'en ai fait serait un euphémisme tant ma période de vie londonienne a été marquée par des sorties en tous genres, ne manquant aucun passage de mes groupes fétiches. La musique comme domaine de prédilection secondaire, c'est naturellement que je me plais à en aborder le sujet avec Maze qui n'a pas manqué de me faire percevoir cette passion commune à travers son métier et son parcours. "Tu as un style de musique de prédilection ou bien c'est en général l’événement qui te pousse à assister au concert ?" Bien conscient que si la profession nous pousse toujours à aller chercher inspiration ailleurs comme je pourrais aller voir une pièce de théâtre pour en étudier le décor plutôt que pour en apprécier le spectacle, nous pouvons tous aussi bien laisser de côté le travail l'espace d'un instant et seulement profiter de ce qui est dicté par nos goûts.
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| | | | (#)Sam 25 Aoû 2018 - 1:07 | |
| Plus elle discutait avec Andreï et plus de vieux souvenirs semblaient refaire surface. Maze venait de se rappeler d'une citation qui avait marqué une étape dans son projet professionnel. "If history were taught in the form of stories, it would never be forgotten." - Rudyard Kipling. L'Anglaise avait travaillé sur le storytelling - a.k.a l'art de raconter des histoires- à l'occasion de son mémoire de fin d'études. Pendant ses recherches, elle était tombée sur cette citation qui lui avait immédiatement plu pour plusieurs raisons. Déjà, parce qu'elle s'était fait la réflexion que si son professeur d'Histoire au lycée avait pris la peine de raconter et de vivre ses cours et non pas juste de débiter des phrases monotones et insipides, peut-être que sa culture générale se porterait un peu mieux aujourd'hui. Et d'autre part, cette citation traduisait tout ce qu'elle souhaitait transmettre à travers les événements qu'elle organisait. Il ne s'agissait pas simplement d'amasser un maximum d'entrées aux concerts. Non, Maze avait à coeur de raconter une histoire, de mettre en scène des protagonistes, de faire vivre des émotions au public. Si tout cela était bien fait, tout le monde en ressortait gagnant : le public qui avait passé un moment inoubliable, et ses patrons qui avaient un peu plus pérennisé leur activité. En effet, le mémoire de Maze avait conclu qu'utiliser la technique du storytelling permettait non seulement de susciter des émotions chez sa cible, mais également de créer un phénomène d'attachement et donc de fidélisation par la même occasion. Et c'était plutôt logique après tout : les événements que l'on avait appréciés, on y retournait...pas vrai ? Et quoi de mieux que de se rendre au Sidney festival pour entendre et vivre de jolies histoires ? "Je me débrouillerai pour que ces dates conviennent, on fait ça ! It's a done deal." Elle lui lança son air le plus décidé accompagné d'un grand sourire sincère. Elle avait du mal à avoir de la visibilité sur son emploi du temps et elle ne faisait jamais de plan sur la comète trop longtemps à l'avance ayant peur de se retrouver réquisitionnée à la dernière minute pour une urgence. Pour la frontière vie privée/vie professionnelle, on repassera. Mais elle avait accepté ce travail en connaissance de cause et, jusqu'ici, cet aspect ne l'avait jamais dérangée outre mesure. Par ailleurs, elle n'avait jamais fait faux bond à qui que ce soit lorsqu'elle avait été appelée en urgence et elle était donc plutôt certaine de pouvoir s'accorder une semaine de non-disponibilité complète et totale dans le cadre du Sidney festival. Dans le pire des cas, elle aurait toujours la possibilité de faire passer ça pour une semaine de benchmark de la concurrence pour convaincre d'éventuels réfractaires à son absence. Maze se réjouissait déjà à l'avance, telle une petite fille à la veille de Noël, de participer à cet événement en compagnie d'Andreï. Elle était également ravie qu'il ne soit pas complètement barbé par toute l'histoire qu'elle venait de lui raconter. Elle avait vraiment tendance à s'éterniser lorsqu'elle se lançait dans le récit de son parcours professionnel, et plus d'une personne le lui avait déjà fait comprendre. Savoir que ce n'était pas le sentiment du jeune homme la rassurait, d'autant plus qu'elle était friande de ce genre d'histoires et qu'elle était contente d'avoir pu lui retourner tout naturellement la question. Elle adorait découvrir de quelle manière la passion avait laissé place à une vocation pour d'autres personnes. Elle acquiesçait énergiquement de la tête et sans même s'en rendre compte à chaque nouvelle phrase d'Andreï. "Je trouve qu'être dans les coulisses, c'est tout aussi passionnant que d'être sur le devant de la scène. Découvrir comment tout ça fonctionne backstage, ça a un petit côté magique je trouve. Et c'est comme un privilège parce qu'on peut voir des choses qui ne seront jamais accessibles au public...Public qu'il me plait d'ailleurs d'appeler dans ce contexte là "le commun des mortels". Je dis ça en toute humilité bien évidemment." Elle se mit à rire pour souligner le fait qu'elle ne disait pas cela sérieusement. Loin d'elle l'idée d'être condescendante avec son public cible. En revanche, elle se sentait en effet véritablement privilégiée de pouvoir oeuvrer à la mise en place d'événements et de découvrir chaque fois un peu plus le fonctionnement côté coulisses de ces derniers. "Et tu n'as jamais eu envie de remonter sur les planches ? Une fois de temps en temps ?" Maze de son côté était musicienne mais elle ne s'était jamais sentie assez douée pour un instrument au point de monter un groupe et de se produire sur scène. Pourtant, ça n'était pas l'envie qui lui manquait, bien au contraire. Mais elle avait tellement papillonné d'un instrument à l'autre qu'elle n'avait pas l'impression d'en maîtriser véritablement un comme il se devait. Elle ne put retenir un sourire en se disant intérieurement qu'Andreï et elle avaient bien plus de points communs qu'ils ne l'imaginaient. Et le fait qu'il ait apprécié leur collaboration au point de vouloir réitérer cela la touchait tout particulièrement, notamment car elle ressentait la même chose. "Je voudrais pas avoir de problèmes avec la Northlight surtout ! Mais j'adorerais véritablement pouvoir retravailler avec toi." Elle se répétait quelque peu, mais c'était aussi sa façon à elle de lui prouver à quel point elle lui était reconnaissante. "Il va falloir remédier à cela au plus vite alors ! Tu es plutôt grands artistes internationaux, ou petites scènes locales ? Ou les deux ? Un conseil : réponds les deux. Ça te permettra d'assister à un concert de plus que ce qui était prévu initialement dans l'invitation, et en plus tu pourras comparer les deux et me dire en connaissance de cause celui que tu as préféré. En somme, c'est comme si tu participais à une étude de marché pour nous, c'est parfait !" Et puis ça lui permettrait de justifier le fait qu'elle l'invitait à deux concerts, juste au cas ou, même si ses patrons n'étaient pas particulièrement regardants de ce point de vue là. Et "étude de marché" était un bien grand mot pour une simple question qu'elle lui poserait et qui se résumerait concrètement à "Alors ? T'en as pensé quoi ?!". Elle fit mine de réfléchir quelques secondes avant de répondre à sa dernière question, prenant cela très au sérieux. On ne rigolait pas avec la musique. Bon, si, un peu quand même. "J'adore la musique Pop-Rock à la base, mais après j'adore découvrir de nouvelles choses. Je vais voir pas mal de scènes locales par ici, ne serait-ce que pour découvrir de nouveaux artistes que l'on pourrait programmer, et j'ai vraiment eu de très belles surprises. Au final, j'aime bien me laisser porter par un événement, m'y rendre sans trop d'attentes. Je peux détester un style de musique, mais adorer l'énergie que le groupe déploie sur scène et de ce fait être complètement emballée par leur prestation. Ça va faire extrêmement cliché de dire ça mais les concerts c'est une grande part de "feelings". Et de scénographie aussi !" Elle ponctua cette dernière remarque d'un sourire en coin. "Et toi alors ? Un style de musique préféré ? Des spectacles sur lesquels tu préfères travailler ? Un style de pièce favori en particulier ?" Décidément, Maze faisait passer un véritable interrogatoire au jeune homme sans véritablement s'en rendre compte. Mais elle avait sincèrement envie d'en apprendre plus sur lui. |
| | | | (#)Jeu 13 Sep 2018 - 17:25 | |
| J’ai toujours trouvé important d’aller voir des spectacles, de se rendre à des festivals, un concert ou toute autre forme forme de représentation scénique d’autant plus lorsque l’on travaille dans la branche. Car outre le fait d’apprécier l’instant, ça n’est jamais avec le regard d’un simple spectateur que l’on y assiste. Le travail n’est jamais bien loin et je ne peux comprendre ceux qui se disent du spectacle vivant mais qui ne trouvent d’intérêt qu’à se représenter et non à s’intéresser à une quelconque programmation. L’enrichissement que l’on tire à adopter la position du public étant tout aussi important si ce n’est plus que celle que l’on peut tirer de notre expérience personnelle. L’esprit critique s’en retrouvant d’autant plus aiguisé, du recul pouvant être apporté à son propre travail et de nouvelles idées pouvant émerger de ce qui a été vu précédemment. Et c’est à ce titre que le choix de réitérer l’expérience du Sydney festival s’est imposé de lui-même. Car s’il est toujours difficile de prévoir à l’avance de quoi l’emploi du temps sera fait sur de longues périodes, je sais par expérience que les débuts janvier sont des remises en route pour beaucoup d’entre nous. Décembre ne prévoyant aucun temps mort dans le monde du spectacle vivant malgré les fêtes, le travail à fournir au début de chaque nouvelles années reste pour ma part surtout administratif permettant aisément une semaine, ou du moins quelques jours à un festival de cette ampleur. Une semaine de bon temps, certes, mais toujours de réflexion et source de renouvellement dans mon travail de scénographe. Puisque comme l’a si bien dit Maze, au final il ne se passe jamais une seconde sans qu’un rien ne soit relié à notre métier. Et c’est de bon coeur que j’hoche la tête à sa réponse affirmative de trouver le temps pour des créneaux début janvier. Autant réjouis à l’idée de passer une semaine en sa compagnie, lui découvrant une personnalité et un répondant des plus sympathiques, qu’à celle de pouvoir échanger directement avec quelqu’un du milieu. Allant souvent à la rencontre des artistes en fin de représentation, l’expérience à deux ne pouvant être qu’une passerelle de plus. Et c’est de l’expérience personnelle de Maze dont mon oreille se fait toute ouïe, la rassurant bien vite sur mon ennui potentiel dont il n’est pas question. Apprenant toujours un peu plus à la connaître à travers sa passion et bien plus encore au travers de notre passion partagée de nos métiers respectifs. Mon propre témoignage venant s’ajouter au sien, révélant un peu plus mon parcours en survol de Moscou à Brisbane. Évoquant même sans rentrer dans les détails mes débuts de formation en tant que comédien dont je me suis bien vite distancé. Car si le théâtre a toujours sonné comme une évidence, le chemin à emprunter n’a pas été des plus clairs. Après trois années passées à l’école de théâtre d’art académique de Moscou, je n’aurais pas même passé le concours de fin de cursus. Bien qu’enrichissant, je m’intéressais bien plus au final aux cours dispensés pour mes camarades en cycle de mise en scène que mon propre cycle de comédien. Tant mieux d’une certaine façon puisque cela m’a permis de suivre et collaborer avec ce metteur en scène londonien, simple intervenant dans notre école et à qui je ne manque pas d’envoyer continuellement mes newsletter. Aujourd’hui satisfait de mon rôle dans l’ombre des projecteurs, intermédiaire discret entre les comédiens et le public : les pieds dans le monde du spectacle mais cependant hors de la scène. A la frontière du regard externe et de l’acteur du déroulement du spectacle, c’est mon rire qui vient s’ajouter à celui de Maze face au terme choisi pour désigner l’ensemble des spectateurs. Comprenant l’humour quoique trouvant la comparaison assez pertinente : c’est vrai qu’il y a de cette idée de privilège de pouvoir à la fois assister au spectacle comme aux coulisses et aux répétitions. C’est d’ailleurs bien poussé par ce désir de tout connaître que, déjà petit, la poésie d’un spectacle ne me suffisait pas et qu’il n’était pas rare de me retrouver à attendre devant les coulisses pour savoir qui régissait la représentation. Souvenirs de mon enfance qui me reviennent rarement en mémoire, préférant les balayer intérieurement d’un revers de la main alors que j’en viens à répondre du même entrain à l’interrogation de Maze.
“Et bien je t’avoue que l’idée n’a jamais refait surface. J’ai bien dû me visualiser sur scène une fois ou deux mais ça n’a fait que renforcer ma volonté de ne pas y remettre les pieds ! Comme tu le dis : je me sens déjà assez privilégié de pouvoir être entremetteur entre les planches et le public pour ne pas avoir besoin de plus m’exposer. ” M’exposer étant l’une des choses, si ce n’est la chose que je suis le plus amené à fuir. Très peu pour moi. En revanche, je ne serais pas étonné de voir Maze volontaire dans l’expérience : “Mais je te renvois la question : tu t’es déjà essayée au théâtre ou à la musique ? Le fait d’assister à tant de scènes t’as peut-être donné envie de tester, si ce n’est de te lancer là-dedans ?” Même simplement en amateur : il me semblerait logique d’avoir au moins voulu tenter l’expérience une fois. Surtout lorsque l’on sait que pour ma part, c’est le fait d’avoir assisté à plusieurs concerts de mes groupes fétiches de l’époque que je m’étais lancé dans l’apprentissage de la guitare. Pas bien fructueux, c’est plutôt vers le piano que je me suis tourné par la suite préférant laisser les talents de guitaristes à mon frère. Pas que je sois bien plus doué en piano non plus mais cela reste toujours mieux que les instruments à corde. Au final, mon talent reste bien placé dans la conception de décors. Toujours pas du genre à m’éparpiller dans les activités, c’est en revanche plus qu’enthousiaste que je me verrais renouveler les collaborations avec Maze quitte à partager mon temps de travail entre ses projets et ceux de la Northlight. Riant face à l’enthousiasme de Maze, tout aussi frappé par la sincérité de sa proposition de me faire parvenir des invitations à ses concerts. “Alors c’est décidé : je me porte volontaire pour cette petite étude de marché et si tu as besoin de mes services sur n’importe quel évènement je saurais bien me libérer.” Et, abordant le thème des concerts, c’est naturellement que j’en viens à m’enquérir de ses genres favoris ou ce qui la pousse à apprécier un événement plus qu’un autre. Profitant de son court temps de pause pour prendre une gorgée de mon verre, curieux de connaître sa réponse.
Assister au concert pour l’expérience totale qu’il propose, là où la dynamique d’un groupe et la mise en scène comme le lieu et l’espace importe autant que la musique en elle même : c’est décidément de points communs en points communs que je découvre Maze hors du cadre de notre collaboration. Un fin hochement de tête venant ponctuer son sourire en coin : ça n’est pas moi qui risque de la contredire au sujet de la scénographie. Sans que la majorité ne s’en rende compte, il y a réellement de la scénographie partout et pour tout. Au théâtre certes. Mais également pour chaque concerts, scènes ouvertes, évènements privés, expositions et magasins. Et si de par notre travail ensemble j’avais déjà compris l’importance qu'accordait Maze à chaque détails d’un événement, je n’en suis que plus assuré. Ne me confortant que plus dans cette proposition de participer ensemble au Sydney festival qui risque d’être des plus prometteurs. Et c’est à son tour de me renvoyer la balle sur la question. Bien qu’habituellement rebuté par les demandes multiples me concernant, il en est tout autre lorsqu’il s’agit d’aborder une passion. Rebondissant dessus sans temps mort, sourire aux lèvres. “Je ne peux que te suivre sur ta façon d’aborder un concert : c’est un peu de la même façon que je m’y rends ou que je vais assister à une pièce de théâtre. Bon, même s’il est vrai que j’ai eu une forte période punk rock qui n’a pas fini de me suivre, c’est en m’ouvrant un peu plus à d’autres styles musicaux que j’ai pu découvrir des groupes aux performances live incroyables !” Et le terme m’ouvrir n’est pas des moindres. Il faut dire que j’ai bien eu cette phase jeune et con à être condescendant envers les autres styles musicaux mais qui m’est bien vite passé. “Et en ce qui concerne mon travail, c’est toujours bien plus une question de metteur en scène que de choix de pièce qui va déterminer ou non mon envie de travailler avec la personne. Même s’il est important que le projet m’emballe, c’est surtout l’entente avec lui qui décidera du reste. Il m’est déjà arrivé d’avoir à faire la scénographie d’une pièce que je portais en horreur mais parce que la collaboration semblait évidente et que le regard que portait le metteur en scène sur la pièce était un renouveau total, au final j’en suis venu à apprécier la pièce à sa juste valeur !” Un autre aspect de mon travail que j’apprécie grandement : cette remise en question permanente qu’avait abordé Maze plus tôt, mais aussi accepter que même son propre avis arrêté et tranché sur un sujet peut drastiquement changer. M’arrêtant cependant un instant, comme m’amusant de cette nouvelle pensée qui vient prendre place dans mon esprit : “Bon, et je ne peux garder secret bien longtemps que, sans tomber dans le cliché, je jure essentiellement par Tchékhov.” Un sourire en coin : même loin de la Russie on ne se refait pas. “Beaucoup de metteurs en scène contemporains se sont emparés de ses oeuvres la saison dernière et la version de Kouliabine en langage des signes était une merveille !” Tant au niveau du travail de mise en scène, de l’investissement et du jeu des comédiens avec cette contrainte du muet et de la scénographie. Et encore c’est bien peu dire. Dire que tout scénographe aurait aimé être de ce projet est un euphémisme, et je n’ai pas manqué de le recommander à n’importe quelle occasion. “D’ailleurs, si du côté théâtre tu désires des recommandations de spectacles autre que la Northlight, n’hésites pas à me demander ! De même si tu as entendu parler d’autres évènements culturels, je suis toujours preneur.” Toujours ce même sourire dans sa direction : cette collaboration offre décidément bien plus de choses à partager.
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| | | | (#)Mer 3 Oct 2018 - 20:03 | |
| Jamais Maze n'aurait soupçonné pouvoir s'entendre si bien avec Andreï. Et pourtant, plus leur conversation avançait et plus elle avait l'impression de se découvrir des points communs avec lui, tant du point de vue de leurs passions respectives que de leurs caractères. Si elle était bien souvent excessive dans ses réactions, elle était contente de savoir que le jeune homme ne semblait pas trouver la réaction qu'elle avait eu avec son ancien scénographe complètement disproportionnée. Et sur ce coup là, ses collègues avaient été tout aussi compréhensifs. Étant tous au moins aussi paniqués qu'elle suite à cet abandon soudain, ils n'avaient fait aucune remarque suite aux vociférations de Maze à l'attention du lâcheur. Et les vociférations en question avaient été quotidiennes pendant un certain temps, au moins jusqu'à ce qu'Andreï ne débarque sur son cheval blanc pour tous les sauver de cette mauvaise passe. Maze était extrêmement attachée à son travail et très pointilleuse, et il ne mesurerait sûrement jamais à quel point elle lui était reconnaissante. Mais outre cette reconnaissance éternelle, la britannique était également intéressée par le parcours de son ami. "Je comprends totalement. J'ai un ami qui est également passé par le stade des planches avant de rejoindre les coulisses. Et maintenant il songe à nouveau à remonter sur le devant de la scène ! Au fond de nous, on est peut-être fait dès le départ soit pour l'ombre soit pour la lumière...et on finit toujours par retourner à notre premier amour." Il y avait tant de réalisateurs devenus acteurs, et d'acteurs devenus réalisateurs, les exemples ne manquaient clairement pas. Mais ne finissaient-ils pas toujours par se tourner davantage vers l'un ou l'autre aspect du métier ? Maze était justement en train de se demander ce qu'elle ferait s'il était question d'elle quand Andreï le lui demanda. "J'ai fait quelques concerts ici et là quand j'avais 16 ans, avec des amis. Clairement rien de professionnel. Je joue de la guitare et je suis en train d'apprendre la batterie et je ne te cache pas que des fois, en observant les premières parties de nos groupes, ça me démange de monter sur scène pour voir ce que ça fait. Être aux premières loges pour apprécier l'euphorie des concerts, et même avoir la chance d'être à l'origine de l'euphorie en question....ça doit être quelque chose !" Elle était musicienne depuis un certain temps maintenant, même si elle avait changé de nombreuses fois d'instruments de prédilection. Et pourquoi s'adonner à la pratique d'un instrument si ça n'était pas pour jouer sur scène ? Elle n'avait toujours pas éclairci ce mystère et pourtant elle continuait d'avoir l'irrépressible envie d'apprendre à jouer du violon, du saxophone, du piano...Il ne lui manquait qu'un peu plus de temps pour mettre ses plans à exécution malheureusement. Monter sur scène en tant que guitariste ou batteur lui plairait indéniablement. Le stress, la montée d'adrénaline avant de pouvoir finalement se déchaîner et tout donner au public ; oui, à bien y réfléchir elle donnerait cher pour pouvoir vivre cette expérience au moins une fois. Mais elle ne pourrait jamais se passer de l'organisation de l'événement en amont, parce qu'elle avait l'intime conviction qu'elle était faite pour ce travail. Mais les deux ne seraient certainement pas incompatibles occasionnellement. "Je pense que ça ne serait pas fait pour moi sur le long terme. Mais deux ou trois fois par an, pourquoi pas ? J'ai plus qu'à essayer de convaincre mes boss de mes talents incommensurables de musicienne !" Elle ne put s'empêcher de rire à cette idée. Ce qui serait certainement leur réaction à eux-aussi. Mais il n'était pas impossible qu'ils finissent par capituler et accepter de la laisser monter sur scène au moins une fois, quitte à essuyer les plâtres d'un échec cuisant par la suite. "Et en ce qui concerne le théâtre....je suis très mauvaise pour cacher mes émotions et je réagis de manière tellement spontanée que je pense que je serais une bien piètre actrice ! Mais bon, il paraît que tout s'apprend..." Ceci dit, devenir acteur était un travail de longue haleine et il était sûrement malgré tout un peu tard pour elle pour s'y mettre. Mais la Britannique étant touche à tout, elle n'aurait pas dit non à une séance d'initiation pour découvrir ce métier très particulier. A partir du moment où on lui proposait de faire quoique ce soit en rapport avec l'industrie du spectacle ou plus largement du divertissement, il était de toutes manières rare qu'elle donne une réponse négative. Un large sourire s'afficha instantanément sur son visage quand Andreï accepta à la fois de se porter volontaire pour sa frauduleuse étude de marché, tout en renouvelant son invitation à l'aider au besoin. "Parfait, je n'en attendais pas moins de toi !" Son sourire s'élargit encore un peu plus lorsqu'il évoqua sa période punk rock. "On est donc encore sur la même longueur d'onde décidément ! Quant au punk rock...maintenant ma curiosité est piquée au vif, j'ai très envie de voir ce que donne Andreï Tedevski dans la fosse d'un concert de punk rock !" Elle ne le connaissait finalement que dans un contexte professionnel, et elle avait maintenant vraiment hâte de le découvrir en tant que spectateur. Elle hochait mécaniquement la tête en écoutant chacun des mots qui s'échappait de sa bouche, se demandant un peu plus à chaque seconde qui s'écoulait s'il n'était pas son pendant masculin. "Je comprends totalement ce que tu veux dire ! Quand je me suis lancée dans le métier, mon père m'a dit de ne jamais oublier que, et je reprends ses mots, "Un projet fabuleux au départ peut devenir une vraie merde. Par contre un projet qui te semble être une vraie merde dès le départ ne deviendra jamais fabuleux." Et il ne faisait pas tant référence au projet en lui-même qu'aux équipes avec lesquelles j'allais travailler. C'était sa façon à lui de me dire de faire confiance à mon instinct et de ne pas accepter un projet si le courant ne passait pas, dès le départ, avec le client. Donc je me retrouve totalement dans ce que tu dis ! Le côté humain de notre travail a une importance capitale pour la réussite de l'événement, et ça permet aussi de faire de belles découvertes de temps en temps." Et de belles rencontres, comme la leur. Même si elle s'y intéressait déjà auparavant, son petit doigt lui disait qu'elle allait s'intéresser encore plus au théâtre à partir de maintenant, et se confronter à ce domaine d'un oeil neuf. Elle se mit à rire en l'entendant parler de cliché. "Je ne considèrerai jamais quiconque comme un cliché. Il faut savoir qu'à Noël, je suis la première à dégainer mes décorations, à m'installer sur mon canapé pour regarder tous les téléfilms de Noël et à passer en boucle "All I want for Christmas is you" au grand dam de mes voisins. Donc côté cliché, tu es sauf !" Son visage rieur laissa place à une expression laissant transparaitre la surprise. "En langage des signes sérieusement ?! J'aurais voulu voir ça, ça devait être un très beau défi !" Elle était très impressionnée par cette idée. Maze avait toujours voulu apprendre la langue des signes mais elle n'avait jamais pris l'initiative de s'inscrire à des cours. Elle avait énormément de respect pour les gens qui n'étaient ni sourds, ni muets, mais qui se donnaient la peine de l'apprendre. Alors adapter une pièce de théâtre en langage des signes...elle en était admirative. "Et bien tu risques de regretter ta proposition et d'être bombardé de sms dans les temps à venir ! Et compte évidemment sur moi pour t'envoyer tous les bons plans dont j'entendrai parler, ou mieux, pour t'y traîner de force avec moi !" Elle se réjouissait déjà d'avance de tous les événements auxquels ils allaient pouvoir participer ensemble. "Quand je nous entends parler, je me demande si on sera un jour capables de partir à la retraite. Ne plus avoir de coups de bourre à gérer, ne plus pouvoir courir partout, ne pas avoir à se contenir devant des égos surdimensionnés...on va s'ennuyer !" Et même si elle disait cela en rigolant, il y avait dans ses mots une grande part de vérité. Ce qui était certain, c'était que Maze serait tout bonnement incapable de passer une retraite à ne rien faire. |
| | | | (#)Ven 19 Oct 2018 - 4:13 | |
| Jeu de question-réponse, cela fait bien un moment déjà que la soirée avec Maze a dépassé le stade d’un simple verre de remerciement pour service rendu. Quoique sachant déjà de notre collaboration que notre entente était bonne, c’est difficilement que je me serai imaginer échanger autant à propos de mon propre parcours comme elle à propos du sien. Bien au-delà qu’exposer simplement notre CV professionnel, c’est avec une vraie volonté de partage et d’en savoir plus sur ce qui anime l’autre dans sa profession et le monde du spectacle vivant que nous en venons à plus nous livrer autour de notre verre. Et bien que peu habituel pour ma part d’autant développer sur un quelconque sujet, la question est différente lorsqu’il s’agit d’une passion évoquée en commun et de mon métier qui reste l’une des seules choses dont je suis capable de parler plusieurs heures durant. Trouvant une certaine familiarité auprès de Maze toujours plus enthousiaste au fil de la conversation, une nature que j’ai vite compris curieuse et extravertie qui n’est pas sans me rappeler le caractère jovial de Leena. Et c’est amusé de ce parallèle que mon aisance à voyager d’un sujet à l’autre se profile, le contraste de nos deux personnalités futile lorsque la même passion dans notre travail nous anime. Proposant pour l’occasion de venir tous deux au Sydney festival qui ne manque pas d’être prometteur ou encore de partager nos invitations pour spectacles et concerts. C’est alors naturellement que la question de monter à notre tour sur scène se profile et se pose. Ma propre expérience sur les planches bien que peu glorieuse m’ayant permis de découvrir ma profession actuelle, je ne serais en revanche pas étonné de savoir Maze autant épanouie sur scène que derrière le feu des projecteurs. La cause attribuée à sa présence et forte personnalité, éléments clefs pour assumer le simple fait de se tenir devant un public sur un espace scénique dédié. Et c’est riche de cette question que je viens à apprendre qu’en plus de la guitare, c’est de la batterie dont joue Maze avec une volonté de peut-être monter sur les planches si l’occasion lui ai donnée. Une pensée attrapée en plein vol survolant la conversation à propos de mon frère qui, contrairement à moi, manie tout aussi bien la guitare comme instrument de musique. Et c’est un rire qui vient accompagner ma réponse, sincèrement enjoué à l’idée de venir assister à une première partie de concert avec Maze à l’affiche. “Tu peux être sûre que j’irais me joindre à l’euphorie du public ! Et si je peux en plus de ce rôle te voir évoluer dans l’une de mes scéno, je crois qu’on pourra dire que l’on a atteint un beau stade de collaboration !” Et si Maze n’hésiterais pas à quémander auprès de ses supérieurs une audition pour se trouver à son tour sur scène, la question est bien différente pour ce qui est de la pratique théâtrale. Moins bien certaine de faire une bonne comédienne que bonne musicienne, elle n’a pas tort sur un point : si le talent y est pour quelque chose, il n’est que part infime de la raison pour laquelle un comédien le devient. Volonté, travail et apprentissage étant toujours le meilleurs moyen d’évoluer comme pour tout, le spectacle vivant ne faisant pas exception. “Si ça te dis d’essayer, plusieurs cours sont dispensés au théâtre où réside la Northlight Company ou même simplement des stages : ça peut toujours être une bonne expérience. Et tu verras que la spontanéité au théâtre peut sauver de bien des situations !” La capacité d’un comédien de rebondir à la réplique de son partenaire ou d’improviser dans certains cas relevant bien plus parfois de l’instinct qu’autre chose.
Instinctivement, continuant ce jeu de question-réponse, c’est à mon tour d’en révéler un peu plus sur mes centres d’intérêts sur la question musicale. Et il n’y a pas à dire qu’après avoir appris le goût de Maze pour la guitare et la batterie que je suis d’autant plus enclin à parler de mon état d’esprit pour me rendre à un concert ou de mon passé punk rock toujours au goût du jour. Quoique la période Doc Martens, blouson en cuir et crâne rasé me soient passés, il n’en reste pas moins que la maxime punk is not dead me revient toujours en mémoire. Ayant d’ailleurs surfé sur la vague punk après son apogée, il n’y a pas de raisons que je m’en sois détourné depuis. Quoique comprenant très bien qu’il soit difficile de m’imaginer avec le look et la mentalité en plein concert en comparaison avec ma réserve naturelle. Riant de même à sa remarque que pour celle d’imaginer Maze se déchaîner sur scène “Je ne réponds plus de moi si l’occasion se présente !” Car ce type de concert est bien l’un des rares moments où il est possible de me voir dans l'extraversion la plus totale. Amis depuis mon vécu à Londres avec Leena, elle est la première à pouvoir témoigner. Ayant fait une grande majorité de mes concerts avec elle, y aller ensemble avait bien marqué une nouvelle étape dans notre amitié. Si échangeant à propos des concerts qu’il nous a été donné l’occasion d’assister notre état d’esprit en s’y rendant était similaire avec Maze, il en est de même à propos de notre façon de choisir un projet ou les personnes avec qui l’on désir travailler. Alternant toujours entre centres d’intérêts personnels et relation avec notre travail, le lien est aisément établi avec notre façon d’aborder nos collaborations et celle qu’il nous a été amené d’entreprendre ensemble. Au final, pas étonnant que malgré la semaine de rush pour reprendre le travail laissé tombé du scénographe l’efficacité et la complicité furent au rendez-vous. Philosophant de la même façon à son propos. “Ton père n’aura pas menti ! J’ai jamais vu personne s’épanouir dans un projet auquel il ne croyait pas dès le début. Avec toutes les contraintes à côté et les aléas naturels communs à toutes créations, impossible de s’en sortir et d’aboutir à quelque chose sans une confiance et une certitude à toute épreuve.” Et quelque chose de sûr, c’est que je ne me suis jamais trompé en plaçant ma confiance dans Tchékhov. Son oeuvre littéraire comme ses possibilités d’adaptation scénique multiples, qu’importe de tomber dans le cliché russe. Mais c’est bien la dernière préoccupation de Maze. En profitant elle aussi pour me donner un autre aperçu des facettes de sa personnalité autrement impossible à connaître dans le cadre strict du travail. Rebondissant à son rire par une note d’humour“Tes voisins peuvent bien supporter cette petite extravagance une fois par ans sous la forme de rituel !”
Pour l’heure, le rituel instauré entre Maze et moi au cours de cette soirée reste celui du partage et des propositions. De la même façon que précédemment, c’est avec entrain que j’en viens à parler d’une pièce vue quelques temps plus tôt, proposant aussitôt de lui faire si besoin des recommandations. Une proposition sur laquelle elle n’hésite pas à rebondir : question spectacle, pas besoin d’y réfléchir à deux fois. Et c’est prenant du recule sur la juste remarque de Maze que je me rends qu’il n’y a au final pas non plus besoin d’y réfléchir à deux fois. Finissant mon verre devant moi avant un court instant de pause“ Je crois qu’il nous sera tout bonnement impossible de prendre notre retraite… Il faut se préparer à passer du côté senior du spectacle vivant !” Mon humour s’ajoutant une fois de plus au sien, c’est pourtant pensant bel et bien mes mots qu’ils sont prononcés. Mon travail bien trop ancré dans ma vie et mon quotidien, me définissant presque, il me serait impensable de me voir arrêter du jour au lendemain la scénographie. L’expérience forgeant le métier, je ne vois au final aucune raison de mettre un terme à la profession sous couvert d’âge trop avancé. Si fatigue il y a, il suffira de dormir. “L’avantage c’est qu’avec l’âge on pourra s’autoriser à soumettre un peu plus les égos surdimensionnés à nos quelques exigences, le sexagénaire faisant figure d’autorité” Un dernier rire ponctuant ma voix. Bien que je ne sois pas du genre à mâcher mes mots, Maze et moi n’avons pas manqué de rappeler que l’artiste à l’égo mal placé est difficilement remettable à sa place. Et j’avoue regretter de ne pas l’avoir plus souvent fait.
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| | | | (#)Jeu 20 Déc 2018 - 18:45 | |
| Maze se mit spontanément à rire lorsque son ami -puisqu'elle pouvait résolument l'appeler ainsi à présent- évoqua l’idée de la voir en concert et, en bonus, dans l’une de ses scénographies. Le challenge était beau et le spectacle promettait. « Je ne suis pas certaine que le public en aurait pour son argent avec ma prestation par contre. Mais ça se tente ! Et puis je te trouverais bien une petite place sur scène avec moi histoire que l’histoire soit complète. » L’idée avait beau être folle, la jeune femme aurait vraiment apprécié pouvoir la mettre en pratique d’une manière ou d’une autre. Peut-être que cela commencerait à devenir envisageable d’ici quelques mois, lorsqu’elle maîtriserait un peu mieux la batterie. Ses yeux s’éclairèrent presque instantanément quand Andreï évoqua les cours et les stages de théâtre qui étaient dispensés. Cet homme était décidément plein de ressources. Maze ne regrettait pas un seul instant de l’avoir invité ce soir-là. Si elle se doutait qu’elle allait passer un bon moment en sa compagnie, elle n’imaginait pas qu’ils allaient si bien s’entendre. Professionnellement, ils se ressemblaient tous deux beaucoup. Maze étant d’une part toujours à la recherche d’un nouveau défi à relever, et d'autre part l’industrie du divertissement occupant une place toute particulière dans son cœur, cette histoire de stages de théâtre lui plaisait beaucoup. « Je ne savais pas ! Mais honnêtement, je pense que ça me plairait beaucoup d’essayer. Pour voir. Mon futur challenge sera donc de réussir à me débloquer une plage récurrente dans mon emploi du temps pour pouvoir m’initier au théâtre. Mais tu es sûr qu’on ne peut pas être…un peu trop spontané quand même ? » Parce qu’il y avait être spontané façon commun des mortels, et être spontané façon Maze. Et les deux étaient bien différents l’un de l’autre. Sans le vouloir, elle était toujours un peu trop dans l’excès dans ses réactions, et elle n’était pas certaine que cela soit particulièrement adapté à la pratique du théâtre. D’un autre côté, peut-être que cela lui permettrait enfin d’être plus mesurée et de mieux se contrôler. Et qui sait, cela pourrait s’avérer utile face à des clients agaçants ou des scénographes qui la lâchaient à la dernière minute et à qui elle avait tout bonnement envie de tordre le cou avant de leur arracher la tête. Qu’est-ce qu’on disait déjà ? Ha oui. Être mesurée.
Tout sourire, Maze imaginait maintenant sans mal Andreï en plein concert. Passionné qu’il était par son métier, elle le visualisait bien l’être tout autant quand il se rendait à des événements en lien avec ses centres d’intérêt. « Avec un tel teasing, je vais faire en sorte que l’occasion se présente rapidement, compte sur moi. » Et elle ne manquerait pas de tenir sa promesse. Ils avaient beau avoir tous deux un emploi du temps de ministre, ils semblaient bien partis pour se retrouver régulièrement à l’occasion de divers événements, ce qui la réjouissait d’ores et déjà. Elle hocha doucement la tête en l’écoutant, encore une fois d’accord avec lui, comme depuis le début de leur conversation. « Et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle mon dernier projet s’est si bien déroulé. J’ai fini par trouver un scénographe en qui j’avais une confiance aveugle et qui a su nous porter jusqu’à la clôture de l’événement. » Elle sourit. Elle ne pouvait pas s’empêcher de revenir de temps en temps sur le fait qu’il lui avait vraiment sauvé la mise, et qu’il avait géré leur projet d’une main de maître malgré l’urgence et la désorganisation qui régnaient bien malgré elle. « Je suis bien d’accord pour mes voisins ! Si jamais tu as envie de leur passer le mot… » Parce que visiblement, quand c’était elle qui leur expliquait ce genre de choses, cela semblait faire bien peu d’effet. « Je leur ai pourtant déjà proposé de venir faire une session karaoké avec moi mais ils avaient pas l’air emballés…Étrange ! » Très étrange en effet que des personnes ne souhaitent pas s’adonner à la reprise d’un titre culte de Mariah Carey avec une voisine qu’ils connaissaient à peine.
La brune se mit à rire une nouvelle fois en les imaginant tous deux passer « du côté senior du spectacle vivant ». « Je nous imagine parfaitement bien déambuler avec une canne dans les coulisses, en râlant parce que tout n’est pas parfaitement parfait. Peut-être qu’on pourra aussi organiser des événements VIP réservés aux seniors ?! Je suis sûre que ça ferait un carton. » Il suffisait juste d’adapter l’événement après tout. Il était certain qu’un concert de punk-rock ne trouverait certainement pas preneur auprès de ce public. Mais il y avait sans nul doute d’autres choses plus appropriées à exploiter. Maze jeta un coup d’œil à une horloge accrochée dans le bar et se rendit compte avec surprise que le temps avait filé bien plus vite qu’elle ne le pensait. Elle fit un geste discret en direction du serveur pour lui demander l’addition, songeant qu’Andreï aimerait probablement rentrer chez lui avant une heure indue, et que de son côté elle était également censée s’enquérir du coup de fil qu’elle avait reçu tout à l’heure. Elle n’allait pas pouvoir ignorer ses possibles problèmes et urgences jusqu’à la fin des temps malheureusement. Mais cette pause lui avait fait le plus grand bien. « Alors là. Si les sexagénaires font effectivement figures d’autorité, j’ai à présent bien hâte d’en devenir une. Faire taire quelques clients un peu trop sûrs d’eux ? J’en rêve ! » Elle aurait donné cher pour pouvoir le faire ces derniers temps. Elle s’était déjà dit que si elle décidait un jour, pour une raison ou pour une autre, de démissionner, elle en profiterait pour appeler quelques clients afin de leur dire leurs quatre vérités et se sentir un peu plus légère. Mais cela lui était encore impossible pour le moment, et elle tenait toujours à son job jusqu’à preuve du contraire. En revanche, elle était à présent contente de pouvoir se réjouir des projets qu’Andreï et elle avaient en commun dans les temps à venir. Ils ne tarderaient pas à se revoir, et rien n’aurait pu lui faire plus plaisir. |
| | | | | | | | Let's give a hand and have a drink - Maze |
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