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 benny ▲ walking on the moon

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benny ▲ walking on the moon Empty
Message(#)benny ▲ walking on the moon EmptyLun 4 Juin 2018 - 18:33

walking on the moon - Giant steps are what you take, I hope my legs don't break. We could walk forever, oh we could be together. Walking on the moon.
« Je passe te rejoindre et on y va ensemble? » un banal texto envoyé, et on avait planifié le reste comme si de rien n'était. Comme s’il s’agissait d’une représentation devant public, comme si on était attendu pour assister à une mise en scène, prendre place dans une salle à la lumière tamisée pour regarder les deux grands dadais que nous étions, que nous serions probablement toujours autant à la fin de la soirée, désarticulés et malhabiles, incertains et maladroits. Parce qu’au final, on ne savait pas trop où se mettre, comment faire, Ben et moi. Pas plus qu'avant, encore moins maintenant. Et parce qu’à travers, c’était pas non plus dit qu’on allait défrayer des frais en double pour une babysitter, quand on pourrait partager les coûts et laisser notre marmaille en duo le temps qu’on se prenne à être des adultes. Alors Noah et moi avions embarqué dans un taxi un peu avant l’heure convenue. On avait joué à compter les nuages dans le ciel, à se montrer l’un l’autre les tâches de peinture qui restaient au coin de nos ongles, et d’un geste vif alors qu’il regardait ailleurs, j’avais gratté le surplus question de faire présentable, au moins un peu. Le trajet comme tant d’autres fois entre notre maison et l’appart des Brody, la voiture que l’on acquitte de son labeur une fois nos deux silhouettes devant l’immeuble, et la course dans les escaliers où chaque marche est montée en double, et où le rire de mon gamin résonne comme un grand écho, comme une promesse de bonheur communicatif contre les murs de béton et les fenêtres fermées. J’ai fait un boulot phénoménal pour garder ma tête de trop penser, pour ne pas voir une importance supplémentaire lorsque j’avais enfilé la dite robe mentionnée à la blague plus tôt, lorsque j’avais passé un trait de brosse dans mes cheveux, eu l’impression de jouer à la poupée en appliquant un peu de mascara - et en évitant de me crever un oeil par la bande. Parce que je me disais qu’au final, ce n’était qu’une énième bonne soirée avec Ben. Rien de plus. Parce qu’au son des trois coups que j’applique sur sa porte ; et de la quinzaine supplémentaire que Noah y bombarde à son tour, y’avait pas de quoi en faire tout un plat, y’avait rien de plus qu’un test à la clé, qu’une tentative de voir si on était prêts tous les deux, ou s’il ne s’agissait que d’une grosse blague. Pas besoin de se prendre pour ce que nous n'étions pas. Une grosse blague qui rosit mes joues lorsque le brun apparaît dans l'embrasure, qui file un extra moiteur sur mes paumes de main direct, qui me fait manquer un battement devant le ridicule de la chose ; et le fait qu’une toute petite semaine au Japon avait paru comme un mois entier sans entendre ses blagues à la con, sans voir en direct son sourire d’enfant à une seconde de faire un mauvais coup. La cérémonie des gamins qu’on laisse derrière se fait sans heurts, sachant que j’avais apporté dans mon sac de quoi compléter la collection impressionnante de jeux vidéos qu’Adam possède déjà, et ainsi hypothéquer une soirée où ils auront le nez collé au téléviseur pendant que l’adolescente chargée de les surveiller pourra s’en donner à coeur joie sur les selfies snapchat.  

Puis, il n’y avait plus de chaperons. Puis, on se retrouvait dans un nouveau taxi, siège arrière, vers la destination convenue quelques jours auparavant. Et le silence était un brin malaisant, parce que le verdict approchait mine de rien. Parce que malgré les promesses et la dédramatisation, n’en restait qu’on y était. Qu’après un an et des poussières, c’était là le moment où tout pouvait y trouver son compte - ou pas. Où on essayait, à tâtons, où ni lui ni moi n’avait envie de penser à plus de 5 minutes en avance et encore. Rester dans le moment présent m’allait bien, et un coup d’oeil dans sa direction alors qu’il semble tout autant pensif que moi me confirme que ça n’a pas besoin d’être compliqué, qu’on peut juste laisser la soirée aller, qu’on peut juste faire comme si, comme toujours, comme d’habitude, et aviser. « Selon l’adresse, ce serait ici... » d’un toussotement, le chauffeur attire notre attention dans son rétroviseur, avant de pointer sur la gauche. Bien loin de ce à quoi on peut s’attendre, devant nous s'étale une dédale de ruelle, au bout de laquelle apparemment se trouve le resto déniché sur Yelp, des reviews qui n’en finissaient plus d'encenser l'endroit, et un menu qui avait fini par me conquérir en quelques clics. Pas du tout rassuré, le bonhomme garde les mains sur le volant mais passe un regard par-dessus son épaule et ajoute avec sa voix grave « Prenez ma carte, y'a mon numéro. Et ne traînez pas trop longtemps dans le coin vous deux. » comme un papa inquiet par l’aspect mort du quartier où on a atterrit, par les gens pas particulièrement clean qui sont attroupés un peu plus loin, et probablement le fait qu’on n’ait ni Ben ni moi l’air d’être capables de se fier à nos notions de self défense si le côté louche de la place nous isole au détour d’un coin de rue, demandant à ce qu’on vide le contenu de nos poches au sol. « Ça ira. » peut-être que c’est la naïveté de voir le monde en rose au quotidien, peut-être aussi que c’est le fait que Brody est avec moi et que je sais très bien qu’il fera une super diversion si un gang de rue nous accoste, mais je n’ai pas si peur que ça lorsque je m’extirpe du véhicule, et même lorsque la dite bagnole repart en sens inverse. Et on se met lentement en marche, et on partage un regard en coin aussi, moqueur, le mien confirmant que le risque en vaut la chandelle si les photos illustrant le menu sont véritables et qu’on marche bel et bien vers le graal. « Alors, y’a fallu que tu inventes une excuse à Adam pour éviter qu’il te bombarde de questions? » la conversation finit par se faire toute seule, innocente petite question, maintenant que nos pas s’enfoncent dans le potentiel crado du coin, vers la pseudo adresse au bout de l’allée, vers ce qui semble être trop clandestin et hip pour avoir une vue sur une artère principale, et une affiche simplifiant les recherches. Les iris rieurs, je poursuis. « Noah a été hyper facile à distraire, j’ai eu qu’à lui exhiber une nouvelle ration de chocolat au yuzu et direct il oubliait le monde qui l'entoure. » je l’avais eue facile avec la terreur, et même si les dernières semaines n’avaient pas été des plus douces vu son comportement en dents de scie à l’école, n’en restait qu’il était comme sa mère. Si on impliquait du sucre dans l’équation, tout se passait pour le mieux. Impolie, j’interromps en levant le doigt, jugeant que les banalités peuvent être mises en suspens le temps que j’ai repéré de possibles sauveurs. « Oh, eux. Suis-les, suis leur piste! » et j’éclate de rire en réalisant que j’y ai mis beaucoup trop d’entrain, mais qu’il s’agit là peut-être de notre seul indice sur où et comment le restaurant de ce soir sera trouvable.  « Ils ont l’air sérieux ; tu penses qu’ils en sont à leur combientième rencart? » la remarque qui glisse toute seule sur mes lèvres, comme si encore une fois on était au-dessus de tout ça, comme si on ne faisait pas partie de ce jeu-là, et qu’on y était juste pour le fun, juste pour voir. On se transforme en deux creeps, filature qui finit par traquer en retrait le couple devant nous, réalisant une poignée de minutes plus tard que mes suppositions étaient bonnes et qu’ils nous ont guidés sans le savoir devant la porte d’entrée du commerce dont le chauffeur de taxi doutait - et qui maintenant s'apparente à une petite victoire à mes yeux.
 
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Message(#)benny ▲ walking on the moon EmptyMer 13 Juin 2018 - 14:37

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Comme on se débat pour replier une tente de camping, le Brody désarticula ses jambes afin d'entrer tout entier dans l'habitacle du taxi hélé par Ginny, sans se plaindre ni réclamer que le siège avant soit avancé pour plus de confort -l’habitude d'être à l'étroit en voiture jouait autant que son envie de ne pas les retarder pour des broutilles. C'est donc les genoux quasiment sous le menton et la ceinture bouclée qu'il se considéra assez installé pour que le chauffeur puisse démarrer, et Ben adressa un rictus amusé à l'autre passagère avant de reporter son attention tantôt sur ses doigts comme un enfant, tantôt sur l'extérieur comme un cabot attendant que l'on ouvre la fenêtre de la portière. Étrangement, il ne fit pas la conversation. Malgré tout le mal qu'il se donnait pour avoir l'air tout à fait normal, détaché, lui pouvait sentir sa gorge sèche, nouée, qui l'empêchait de toute manière de dire quoi que ce soit. Il ne s'était pas découvert une soudaine timidité maladive, non ; il était nerveux. Et il se sentait un peu ridicule. Il se répétait en boucle qu'il n’y avait pas de quoi en faire tout un plat, de ce resto. Mais il craignait de mettre les deux pieds dedans ; le plat, et le resto. Ce genre d'enjeux le paralysait, quoi que le bout de ses doigts et de ses pieds tapotaient les environs à portée au rythme de la pop banale résonnant à la radio. Tout cela avait un côté très officiel et peu naturel. S'ils se voyaient, ils en riraient bien fort de leurs airs de Monsieur et de Mademoiselle apprêtés, chacun dans leur coin avant d'être face à face, une nappe à carreaux entre eux. Encore une fois, il jeta un coup d'oeil du côté de son rencard. La dernière fois qu'elle avait concrètement fait un effort d'allure pour lui (qu'il ait noté), c'était lors de leur rencontre organisée par Deb. Avec le temps, l'intérêt laissant la place à l'amitié qu'on leur connaissait, il avait cessé de remarquer autre chose que son large sourire contagieux. Elle avait bien sorti la robe, comme elle avait dit qu'elle le ferait. Il n’avait rien dit à ce sujet, l’aurait-il dû ? Ginny lui sourit à nouveau, et il fit de même automatiquement ; il n'en fallait pas plus pour les rassurer un peu. Elle était toujours elle, il était toujours lui. La voiture s'arrêta à l'entrée d'une ruelle glauque, le genre de passage qui hurle “allée du crime” et qui les condamnait à se faire racketter puis poignarder à la fin de la soirée -c’est Hollywood qui l’a dit. Benjamin lui-même arqua un sourcil perplexe, mais il s'en remit au jugement d'une Ginny déterminée, sûre d'elle. Alors il régla le taxi et la suivit, adressant un haussement d'épaules au chauffeur. Au pire, on meurt. “On pourrait finir en Thomas et Martha Wayne, fit-il après avoir rattrapé la brune en deux foulées, plus détendu à l'extérieur comme ses pattes de gazelle, et grâce à nous Adam deviendra Batman, et Noah sera Robin.” Il était évident que les rôles ne pourraient pas être inversés, Ben ne pouvant concevoir que son fils soit le sidekick en collants, aussi stylé soit-il. Moira serait leur Batgirl toute indiquée, et Brisbane n'aurait plus jamais rien à craindre grâce à son équipe de pré-adolescents en masques et leggings. Leurs gamins avaient toujours un peu été leurs héros à leurs yeux. Noah, définitivement un battant, autant durant les épreuves que dans l'après, le retour à la vie normale qu'il avait peu connue avant d'élire résidence à l'hôpital. Adam, la force de caractère en puissance, celui qui survivrait sur une île déserte, dans une invasion de zombies, sur une autre planète. La vie les avait déposés auprès de leurs parents, mais honnêtement, ils n’avaient pas la prétention de savoir ce qu'ils faisaient, si ce n'était de leur mieux, tous les jours, au jour le jour, quand bien même leur mieux pourrait laisser à désirer. Au final, c'était Benjamin qui se sentait, à cet instant, comme un gosse lâché dans la nature, un oiseau jeté du nid, et il ne savait toujours pas ce qu'il faisait, concrètement. Improviser, aviser, comme telle était sa spécialité. Ses mains s'étaient logées dans ses poches, ses yeux vérifiaient le bout de ses chaussures à chaque pas. “Même pas, répondit-il à Ginny à propos de la nécessité de dissimuler l'objet de leur sortie, mais il m’a durement négocié des frites tous les soirs de la semaine prochaine pour pas qu’il en parle à sa mère. Elle, je voudrais pas qu’elle pose de questions.” Ou plutôt, qu’elle ne se gène pas pour donner son avis, l’imposer, critiquer, pester, demander des détails, des explications, un droit de veto, de confirmation, car Loan avait un caractère de feu et se sentait tant dans son bon droit qu’importe ses exigences qu’il n’aurait pas été étonnant que la nouvelle prenne des proportions que benjamin préférait éviter, hypothèse ou réalité. Côté Ginny, Noah s’était laissé distraire, et Ben se garda de demander tout haut quel genre de gamin pouvait bien aimer le yuzu, ou encore, quel était déjà ce truc au nom bizarre dont elle lui avait sûrement déjà parlé sans qu’il n’écoute -ni qu’il en ait quoi que ce soit à faire de cette bouffe de hippie en vogue qu’il n’acceptait d’ingurgiter que pour lui faire plaisir. Sa religion, c’était le gras. D’ailleurs, l’avocat s’inquiétait un brin du choix de restaurant de la jeune femme, à commencer par ce quartier qui ne ressemblait à rien d’autre qu’un coupe gorge, mais il devait avouer que Ginny ne l’avait jamais déçu en matière de découvertes culinaires et de bonnes adresses -pas à voix haute cela dit. La Sydney Bristow intérieure de la brune se manifeste lorsqu’elle pointe du doigt, sans gêne, un couple sur le trottoir d’en face. Ben plissa les yeux, analysa, décortiqua ; “Le troisième, je dirais.” estima-t-il, plutôt sûr de lui. “La main dans le bas du dos, c’est soit qu’il doute de rien, soit que c’est pas leur premier date et qu’il est déterminé à conclure.” L’un ou l’autre, il y a de l’attente, de l’espoir, du rapprochement, et le tactile n’est jamais anodin, qu’importe à quel point l’on peut faire mine de ne pas avoir d’arrière pensée. “Elle m’a bien l’air du genre à l’avoir fait poireauter trois rencards, parce que c’est comme dans les films et qu’il faudrait pas passer pour une fille facile.” ajouta-t-il en la jaugeant rapidement, l’allure, le battement de cils, le sourire. Les femmes n’étaient, à ses yeux, qu’à base de communication non-verbale, de signes à attraper au vol, parce que dire les choses seraient trop faciles, et tellement moins drôles autrement. “Mais la vérité c’est que ça change rien, parce que si elle est naze au pieu, il va quand même la jeter et il aura que ses yeux pour pleurer sur ses trois restos d’investissement.” Le tout s’écoula de sa bouche avec un tel naturel qu’il ne s’entendit qu’après coup tenir le discours du goujat de première -ou du réaliste, question de point de vue- juste en face de celle qui, ce soir-là, n’était plus qu’une amie, mais son propre date, celle envers qui, à l’entendre, il appliquera ces mêmes principes manquant cruellement d’empathie. Accusant le malaise, la respiration stoppée, il jeta un coup d’oeil à Ginny, lèvres pincées et maudissant sa maladresse. Sauvé par la devanture du restaurant qui apparut devant eux, l’établissement prit soudain un intérêt disproportionné ; “Hm… Oh ! Hé, on y est ! Et en un morceau !” Tant pis pour Batman et Robin. Il espérait, au moins, que ce qu’ils économisaient sur le loyer terminait dans l’assiette. Il eut une pensée pour la scène que lui avait fait une conquête, un soir, concernant le partage de l’addition, et alors qu’il n’étaient même pas encore à table Benjamin se demanda dans quel camp se situait Ginny, si elle se fâcherait tout rouge comme lorsqu’il menaçait de la laisser gagner à Tekken. Attiré par une autre enseigne plus loin dans la rue, il tourna la tête pour voir un fast-food à deux pas d’eux, l’odeur de frites et de burgers gras émanant comme un doux parfum aux alentours. “Regarde, un backup plan.” fit-il à Ginny avec un sourire en coin, sans songer qu’ils puissent réellement finir la soirée là-dedans -ou vraiment ?
 
LOONYWALTZ
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benny ▲ walking on the moon Empty
Message(#)benny ▲ walking on the moon EmptyMer 13 Juin 2018 - 18:26

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Ce serait cliché de le dire, encore plus de me l’avouer, mais à la seconde où j'entends Ben se mettre à déblatérer des âneries, nous donner un rôle d’à peine 5 minutes dans un remake australien version petit budget de Batman à même une ruelle crado de Redcliffe, tout va bien, tout va mieux. Ça me fait penser à toutes les blagues qu’il avait cumulées, quand Noah était blotti dans son lit d’hôpital, ça me fait penser aux nuits blanches à éplucher les papiers du divorce, ça me fait penser à la toute première fois où on s’est vus - et où je flippais comme toujours en zone inconnue, en zone ennemie. « Hey, mais j’ai pas de collier de perles. »  ç’aurait bien été le comble d’ailleurs, qu'en plus de la robe et du semblant de maquillage, j’ai ajouté des bijoux à l’équation. En perdre la moitié entre la salle de bain et le taxi, briser l’autre partie maladroitement ; l’effet du collier n’aurait probablement pas été aussi classe que lorsqu’il s’arrache du cou de la pauvre Martha, s’éclate au sol dans un bruit dramatique, la pluie en trame sonore. Comme il s’agit éventuellement d’un bon signe dans sa prévision, et que c’est peut-être à lui, à ses grandes jambes et à son sourire Colgate que nos possibles assaillants s’attaqueront, je lève la main à hauteur de son regard, et jure solennellement comme si ma vie en dépendait. « Promis, si je te survis, je passe en mode tante May et je les exposerai au maximum de laboratoires chimiques pour les faire muter en insectes en ton honneur. » ce serait la moindre des choses in memoriam du Brody qu’Adam et Noah développent peinards leurs super-pouvoirs en attendant sagement de recevoir ensuite leurs lettres pour Hogwarts. Oui, ils auraient des vies occupés, nos marmots. « T’as pas dû t’opposer tant que ça, pour les frites. » parlant d’eux, j’accompagne le bruit de nos pas sur le bitume de la question innocente du moment, à savoir ce qu’il avait dû faire pour que son mini se comporte en parfait gentleman à mon arrivée, aucun coup de coude dans les côtes de ma propre progéniture, aucune allusion, rien. La mention de sa mère, toutefois, laisse bien sûr une marque, infime petit soucis de ne pas être à la hauteur qui se niche au creux de mes réflexions, qui attendra probablement le pire moment pour me faire regretter, pour me tourner en paquet de nerfs ambulants - un peu plus que je le suis maintenant? J’y survivrai pas. « On organisera un focus group avec elle, Edward et Ezra si ça arrive ; question de nous faire douter encore plus. » encore là, vaut mieux en rire, et même si celui que je laisse entendre est jaune, ce n’est pas sans apporter une couche d’inquiétudes de plus. Et des deux, je prévoyais déjà que ce serait Edward qui aurait le plus de mal à faire une place officielle à Ben dans nos vies, malgré le fait qu’il y soit et pas juste ambiant depuis plus d’un an. Mécanisme d’auto-défense parfaitement dressé, si j’avais pu facilement perdre pied et sombrer dans les méandres de tout ce que la mère et les pères auraient pu avoir comme dossier pour s’opposer à whatever it was, entre les coups d’oeil et les sourires que je partage dans l’instant avec Ben, je reporte notre attention sur d’autres gens. Un couple non loin et allant probablement dans la même direction que nous, un duo que l’irlandais prend plaisir à décrire, anticipant la suite des choses pour eux, m’arrachant un sifflement de surprise sur la finale. Way to go pour dire tout haut ce qu’apparemment le type doit penser tout bas. « Ou peut-être qu’ils se moquent de nous, eux aussi. »  et la voilà, la Ginny naïve qui reprend du service, tourne la tête vers lui, prunelles brillantes. « Peut-être qu’ils m’ont entendue, qu’ils voient à quel point on est désarticulés nous-mêmes, qu’ils nous montrent comment faire, qu’ils s’amusent. » que je propose, alignant mon regard sur eux un instant, puis sur nous. On pouvait bien se plaire à leur prêter des intentions, quand notre non-verbal montrait clairement notre inconfort et à quel point, si on se rendait au fatidique troisième rendez-vous, on ne s’en sortirait probablement pas mieux qu’eux, si ce n’est pire. « Elle le regarde pas comme si elle prévoyait lui faire pleurer l’investissement. Et il a pas l'air si désespéré. » call me romantique, ou simplement observatrice. Quand on passe sa vie dans l’ombre à particulièrement adorer longer les murs pour déranger le moins possible, on en finit par développer une capacité à scruter le visage des gens, à comprendre parfois ce qui passe une fraction de seconde sur leur expression avant de disparaître. Ou alors, le soleil m’aveugle, et j’ai tout faux. Postés devant le restaurant choisi avec soin sur le web, Ben a tout le loisir de repérer un dinner dans l’angle - et proposer un changement de plan par la bande. Pas du tout vexée qu’il doute de l’endroit où je nous ai réservé des places, j’hausse innocemment l’épaule. « On a dit qu’on ferait les choses bien. »  simple constatation, simple rappel. Qui sonne tout de même relatif quand on y pense. C’était quoi, faire les choses bien? C’était s’installer face à face dans une salle à la lumière tamisée, parler d’où on se voit dans 5 ans, commander la bouteille de vin la plus vantarde sur la carte juste pour se donner du coffre? Essayer de cacher ses tares, miser sur ses qualités, et rendre très clair ce qu’on cherchait d’une relation? J’en doute, je doute que ce soit nous tout court. Je prends tout de même le temps de me pencher à la fenêtre, observer un peu l’intérieur, réaliser qu’en effet, même si l’idée de faire les choses bien sonnait correctement il y a quelques temps, quand on a décidé de tenter, juste pour voir, je nous reconnais pas là. Je reconnais pas la Ginny qui initie des batailles de nourriture sans se demander une seule fois si c’est proscrit, si on peut se faire jeter dehors pour la peine. Je reconnais pas le Ben qui multiplie les occasions de lâcher casually n’importe quelle citation de Star Wars comme si de rien n’était, et qui ne trouvera sûrement pas son bonheur devant un menu impossible à transformer en catchphrases marrantes. L’instant d’après je fais volte-face vers lui sous l’impulsion, un sourire beaucoup plus confiant sur les lèvres. « … et on a aussi dit qu’on se prendrait pas la tête. » un hochement de la tête décisif et j’engage le chemin vers le fameux fast food qui sent bon jusqu’à ici. À l’intention du fameux couple que l’on suivait tout à l’heure et qui est toujours à l’extérieur du restaurant, posé sagement dans la file d’attente, je lance un regard moqueur additionné d’une main que j’appuie tout au centre du dos de Ben, narquoise. Et je justifie, la voix qui chante. « Quoi? Je peux brouiller les pistes moi aussi. »

Le son de la porte qui tinte, la vague de gras étouffante qui nous caresse les joues, le cuisinier bedonnant qu’on voit dans toute sa splendeur, appuyé sur le comptoir du fond à rager contre le dernier score sportif affiché à l’écran suspendu au-dessus de nos têtes, tout ça, c’est cool. C’est nous. C’est la caricature du type que je vais pouvoir dessiner sur l’endos de la serviette à main. C’est la course à qui dévissera sournoisement le plus de salières sur son chemin pour jouer les mauvais coups de bacs à sable à quiconque les usera ensuite. Et c’est aussi le menu le plus simple de l’univers, le plus calorique du coin sûrement, mes yeux directement accrochés et les frites au cheddar qui me font plus qu’envie. « Ma tactique, c’est encore de prendre tous les pires trucs sur le menu, ceux qui se mangent le plus mal. » bien sûr que je pense aux nachos tartinés sur mes gencives, devenu un classique entre nous deux depuis ce soir-là. Mes épaules descendent doucement, je sens une possibilité d’avoir un peu plus confiance en la suite maintenant que l’environnement s’y prête mieux, qu’on n'a pas besoin de s’imaginer être observés et notés pour chaque parole et chaque geste non plus. Dans la confidence, c’est à Ben le pote que je parle, à Ben le type cool, celui à qui j’ai toujours dit la vérité, envers et contre tout. « Ça va peut-être aider à ce que je sois moins nerveuse. J’ai les mains qui tremblent là, c’est con. » banalement, avant de réaliser que je parle aussi au Ben en rencart, au Ben à qui je dois démontrer que 77% c’est bien mal nous connaître. « On dit pas ces choses-là, right? » et étrangement, le rire qui suit est un peu plus léger que tous les autres.

 
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benny ▲ walking on the moon Empty
Message(#)benny ▲ walking on the moon EmptyLun 25 Juin 2018 - 12:30

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Il avait la prétention d'avoir un bon jugement à propos des autres. Notamment grâce à son travail et le nombre incalculable de spécimens qui avaient bénéficié de ses services à tarif réduit. Et aussi, parce qu'il était un homme. Quand il voyait un congénère, il savait à peu près ce que cette personne avait en tête. Il y avait des codes, des comportements qui se répétaient comme un motif sur du papier peint. Dans le cas du petit couple dont il avait livré l'analyse, le jugement ferme et définitif, alimenté de sa propre expérience en la matière, Ben était catégorique et bien sûr de lui. Cependant, il n’était pas fier de la manière dont ce décryptage avait traversé des lèvres, et le regard en coin qu'il jeta du côté de Ginny le rassura autant qu'il le surprit ; elle n’avait pas fait l’amalgame qui la pousserait à se méprendre totalement sur ses intentions -bien qu'il ne sache pas vraiment lui-même ce qu’elles étaient, au final, lui qui s'était embarqué là-dedans à l'aveugle. La brune avait donc sa propre interprétation de la scène romantico-dégoulinante qui animait le trottoir d'à côté, se moquant un peu de ceux-là et d'eux-mêmes, soulignant leur air gauche, malhabile, mal assuré. “Ah ouais ? Bah j'ai pas besoin d'aide. J'ai mes propres techniques, tu vois.” répondit-il, les mains derrière le crâne et les bras en V au-dessus de sa tête, l'air de vainqueur qui ne craint rien, ne doute de rien -et encore moins de lui-même. Des techniques, il en avait bien toute une tripotée, mais s'il fallait en nommer une dans la minute, il réalisait qu'il en serait incapable. Parce que Ginny s'était déjà prouvée hors de tout schéma connu, et en cela Benjamin avançait à tâtons. Faut être soi-même, diraient les films, et il s'y efforçait. Cela n’aurait plus le moindre sens d'essayer de jouer un rôle, gommer quelques défauts ici et là -les après-midi devant la console, jamais de la vie - ou encore glisser un bobard pour enjoliver la réalité -bien sûr que son cabinet avait un succès fulgurant. Elle n’était pas une nana sortie de nulle part, dégotée vite fait sur une quelconque application pour chiens en rut. Ils se connaissaient assez bien et depuis assez longtemps pour qu'elle perce à jour la moindre tentative de drague classique. S'ils étaient vraiment amoureux ? -les deux pecnots sur l'autre trottoir, bien évidemment. Ben haussa les épaules, ne persistant à voir qu'un type avec des espoirs et une hypothétique idiote naïve à son bras. “Pt’être bien.” acquiesça-t-il tout de même, remettant ses mains dans ses poches.

Arrivés devant le fameux restaurant pour lequel ils n'étaient heureusement pas morts en chemin, ni l'un ni l'autre, épargnant aux mômes un destin de lourdes responsabilités, quelque chose s'était imposé à eux avec une fulgurance commune. Le lieu n'était pas déplaisant, malgré l'allure de l'environnement tout autour. La file d'attente faisait comprendre que la notoriété décelée sur internet par Ginny n’était pas volée. Les prix allaient dans ce sens, de même que les intitulés de plats tenant tous sur deux lignes. Ça y allait en matière de poissons dont il n’avait jamais vu le nom, et des potages de fruits et légumes formant des mélanges auxquels il n’aurait jamais songé. Cela ressemblait, à s'y méprendre, à l'établissement parfait pour un date digne de ce nom, et même si Ben avait souligné la présence d'un diner bien moins prétentieux juste à l'angle, il admettait malgré tout que s'ils s'en tenaient à leur volonté de faire les choses bien, comme le disait Ginny, alors le choix était tout indiqué. Le tout était de savoir s'ils étaient prêts à se coller ce genre de pression, s'ils en avaient envie, et s'ils sauraient passer outre leur impression d'être deux clowns dans une marre de grandes personnes pour passer une vraie bonne soirée. À ça, ils avaient la réponse en réalité. Benjamin, lui, était prêt à suivre n'importe quel mouvement instigué par la jeune femme dans une direction ou l’autre afin qu’elle ne termine pas déçue si le choix lui revenait. C’est finalement vers l’autre bout de la rue qu’ils se dirigèrent avec un regard entendu, laissant le plan A derrière eux bien volontiers. Ginny glissa une main dans son dos, moqueuse et malicieuse, et Ben fit mine de s’en offusquer comme une prude pucelle, la main sur sa bouche en rond avant de lui adresser un clin d’oeil coquin. “Je pourrais te faire pleurer, attention.” fit-il avec sa plus belle imitation de voix de fille. Et il entreprit le chemin jusqu’au diner en tortillant du cul dans les règles de l’art sur une paire de talons imaginaires.

Le fast food avait tout du cliché américanisé tout droit sorti d’un vieux film où les vestes en cuir noir, les cheveux gominés et les longues jupes à pois sont encore à la mode. Près de la porte des toilettes, il y avait même un jukebox pour satisfaire leurs envies de recréer un bout de Pulp Fiction. Les solos étaient du côté du comptoir à la tranche métallique qui brillait comme l’avant d’un camion. Une famille, une bande de potes et un petit couple adolescent siégeaient côté banquettes. Sur le menu, du trop gras, trop salé, trop sucré, des shots de diabète et de cholestérol comme ils les aimaient. Sous les semelles de ses pompes, Ben nota que le carrelage collait de restes de coke renversé, de tâches d’incident de ketchup, et de frites écrasées après une bataille de nourriture. Ils s’installèrent sur les dernières banquettes qui ne soient pas complètement éventrées, lâchant un petit soupir d’aise -et de soulagement- au passage. Ca sentait le grillé, le frit, le fromage fondu. Si l’on mettait de côté les cris de bataille des gosses trois rangées plus loin, des exclamations aux expressions incompréhensibles des collégiens deux rangées plus loin, et les bruits gutturaux des pelles que se roulaient les tourteaux juste derrière eux le tout sur fond de rockabilly démodé, l’endroit était parfait. Chacun avait sa carte, et les yeux rivés sur les menus. Personne n’arrivera à garder une allure sexy avec n’importe quel plat figurant sur la double page. “Avec un hot dog bien tartiné de sauce, t'arriveras peut-être même à t'en mettre sur la robe.” suggéra Ben avec un sourire complice, ravi d’avance de pouvoir se moquer ouvertement de sa maladresse, et il ajouta avec un sourcil arqué grivois de beaufitude assumée ; “Et tu seras obligée de l'enlever, mince alors.” Puis il eut un sursaut de malaise ; mais, c’est Ginny. C’était son date, mais pas n’importe quel date, et c’était une femme, mais pas n’importe quelle femme, et il voulait rester lui-même, mais pas n’importe comment quand même. Cette schizophrénie le trimbalait intérieurement d’une émotion à l’autre et d’une attitude à son parfait opposé. Il se racla la gorge, prit un air sérieux et finta un intérêt grandissant pour le menu. “J’crois que je vais tenter le Monster Triple Cheese Burger, avec extra bacon parce qu'il n’y a jamais trop de bacon (c’était un dicton typiquement Brody). Ils disent que si on arrive à vider l'assiette, le dessert est offert. Et je suis un homme de défis, vois-tu.” Au pire, il n’y arriverait pas et son ego en prendrait un coup. Ginny se moquerait gentiment en terminant ses frites. Il devrait payer deux milkshakes au lieu d’un. Mais ils n’étaient plus à une pointe de ridicule près, bien sapés dans le diner de quartier craignos et maladroits comme s’ils n’avaient jamais vécu un tête-à-tête de leur vie. Ginny s’avoua nerveuse, et Ben se sentit si soulagé de ne pas être le seul à avoir l’impression d’être pris de tremblotte qu’il souffla un petit rire. “Non, clairement, c'est pas vendeur.” dit-il à contrario de sa pensée, prenant une moue comme dégoûtée par tant de manque de confiance en soi que dégageait la jeune femme, comme prêt à se lever et partir. Mais il passa une main par dessus la table afin de prendre celle de Ginny, et avec la plus grande fausse compassion, avec son plus beau pétillement de gosse sur le point de faire une vanne préparée avec soin, il reprit ; “Mais je comprends. Après tout, t’as sûrement rêvé de ce moment tous les jours depuis un an et des poussières, et ça y est, t’y es. L'homme parfait, le cadre parfait… C'est émouvant, je sais.” Entre sa grosse tête et son estomac plein, il y avait de grandes chances pour que Benjamin ne puisse plus passer la porte du diner à la fin du repas pour rentrer chez lui. Ou chez elle. La suite, il n’y pensait pas encore. Du moins, il en faisait abstraction. “Et t'en fais pas, si tu doutes, je serais là. Moi et mon GHB de secours.” Il avait beau se mordre la joue, son sourire au coin de sa bouche s’agrandissait de seconde en seconde.

 
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benny ▲ walking on the moon Empty
Message(#)benny ▲ walking on the moon EmptyMer 27 Juin 2018 - 16:19

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Ma main chaste dans son dos, les allers retours que font son bassin pour ajouter au drame de la pimbêche qu'il personnifie, et la voix bien perchée qu’il m’accorde pour les besoins de la scène. J’éclate de rire, arrive à sa hauteur, ignore l’autre couple qui nous regarde peut-être ou pas, j’ai oublié. Mon attention est uniquement et strictement vrillée vers le fast food dans notre ligne de mire, et les quelques mètres supplémentaires qu’on franchit tous les deux vers un semblant de soirée qui est déjà beaucoup plus à notre image. « J’étais si assurée de conclure au premier rendez-vous, pourtant. » et je soupire, m’assure d’user du ton le plus sérieux que j’ai en stock, roule des yeux à m’en faire mal aux nerfs optiques. La vérité, c’était que je savais absolument pas comment me comporter tout court, comment lire ses signaux, comment lui envoyer les miens. Mon dernier rendez-vous officiel remontait à Edward et toute la mascarade entourant les parents, et avant ça, les semblants de rencard que je pouvais partager avec Ezra étaient toujours complétés de paroles chuchotées, de baisers volés, de coup d'oeil s par-dessus l’épaule pour s’assurer que Matt était toujours pris dans les filets de Jena le temps qu’on gratte une minute supplémentaire et une autre. J’avais aucun référent, aucune base, aucun indice et si j’arrêtais pour quelques secondes seulement de réfléchir à toute vitesse et d’envoyer une dose impressionnante de questions d’un côté à l’autre de mes méninges façon ping pong, j’aurais bien sûr réalisé qu’on en était pas à notre premier date, Ben et moi. On bâtit pas ce genre de complicité en se croisant au détour d’un couloir, on développe pas tout un catalogue impressionnant d'inside jokes en se saluant distraitement avant de passer son chemin. Aucun de nos moments passés ensembles auparavant n’avait eu l'appellation officielle qu’on souhaitait donner à ce soir, mais les faits étaient là. Si manger au restaurant, se faire rire l’un l’autre comme deux gamins et terminer sur le canapé Brodyesque ou l’avalanche de coussins à raz le sol McGrathique à faire un marathon de films d’horreur et/ou à se saigner en duo à Mario Kart jusqu’au petit matin, on avait de l’expérience dans le domaine. Et ç’aurait été beaucoup plus facile, sans la pression sur mes épaules, sans mes lèvres que je me fais violence de ne pas trop pincer, serrer l’une contre l’autre. Installée sur la banquette du diner face à Ben, j’arrive même à effleurer une touche typique maladresse signée Gin, en soulignant le sort prédestiné de ma pauvre propreté qui aura la vie dure si je commande tout ce qui me fait envie, extra fromage pour le show. Je tapote sur la table, drumroll nécessaire. « Les paris sont ouverts. Entre mon visage et mes vêtements, qui finira en plus piteux état en premier? »  Ben a assisté à nombreux de mes déboires et pourrait facilement identifier mes moments aussi forts que gauches, entre les brûlures en cuisine, les coupures dans l’atelier, les dégâts monumentaux partout où ça compte. S’il souligne que ma robe ne sera plus des nôtres, je dénote à peine, prise entre mes oreilles pudiques qui font déjà par habitude le filtre de 95% de ses paroles lorsqu’elles sont axées sur du trop olé olé pour moi. Mais c’est bien sûr ce qu’il pointe sur le menu comme objet de son désir qui sature mon champ de vision direct.  « On dirait qu’il va te gober vivant, sur la photo. » R.I.P. Benjamin, lui et son estomac sans fond qui ont peut-être enfin trouvé adversaire à leur taille finalement, en un burger rassemblant tous les ingrédients inimaginables en cuisine sous deux buns bien huilés.

Puis, je me redresse dans mon siège. Hausse le sourcil, assiste à sa tirade de beauf dans les règles, lui laisse toute la place pour me faire verser une fausse larme devant tant de bonté et une si grande âme. Une fois qu’il a mis un point à saveur drogue de pre-teens à sa phrase, je sens un long, un fin, un moqueur sourire se dessiner sur mes lèvres. « Attends un peu Brody. » ma voix est narquoise, et s’il se retient d’éclater de rire, et s’il arbore à son tour la même expression de gamin à deux doigts de faire une bêtise que moi, je ne perds pas de temps pour lever mon poignet libre à hauteur de champ de vision. Et je perds mon regard vers la montre de Wonder Woman qui y trône fièrement - circa Ben et Ginny se disent les vraies choses dans les escaliers - avant de compléter ma pensée avec amusement. « Tu peux bien parler, va. » et lorsque j’ai assez fait traîner mon accusation, je replante mes pupilles dans les siennes, victorieuse. « Ça t’a pris 30 minutes et quelques pour passer ton premier commentaire grivois sur ma robe. »  et ça, c’est limite inquiétant. L’humour de Ben était sa valeur sûre, son acquis. Le genre de truc qu’il dégainait en toute situation et son joker, ça je vous l’apprends pas, c’était tout ce qui touchait de près ou de loin à des blagues salaces, à la limite du malaise. Il s’amusait à flirter gros comme le bras, surtout avec moi vu mon inconfort constant, il n’en manquait jamais une et là… et là, il avait pris un immense retard sur sa moyenne habituelle. « T’es aussi nerveux que moi, aussi nerveux que moiiii... » et je danse sur mon siège, et je chante, et je nargue, les yeux brillants, le sourire qui ne fait que grandir. Il va râler, il va trouver la meilleure excuse qui peut lui venir à l’esprit dans la seconde, il va sûrement s’en sortir comme d'habitude avec sa réactivité d’avocat mis au pied du mur encore et toujours ; mais c’est trop tard. On est sur le même bateau, on est tout aussi incertains l’un que l’autre, on patauge dans les mains moites et les petites toux de stress. J’ignore si c’est parce que je me moque ouvertement de lui et qu'il le mérite, ou si c’est relié à l’impression nette qu’encore une fois on est à deux là-dedans et pas seul chacun de son côté, mais je respire mieux, j'ai le coeur plus léger. « L’homme parfait peut garder son GHB pour ses autres proies. J’suis immunisée à force. » j’hausse les épaules, bats innocemment des cils et retourne au menu que j’effleure encore un peu. Pas consciente du potentiel glauque de notre conversation, juste du fait que sous la table, j’ai sournoisement retiré mes ballerines trop serrées, tellement pas habituée à porter autre chose que de vieilles Converse usées que mes pieds ont élu année après année comme baskets officielles. Jambes ballantes, mes orteils tapotant distraitement sur ce qui, de longues minutes durant, je prends pour une patte du booth où nous avons élu domicile. More on that later. On finit par passer à notre table prendre notre commande, et évidemment, le Monster Triple Cheese Burger, avec extra bacon ne génère absolument aucune réaction du cuistot malgré nos grands airs de dadais, lui qui ne nous accorde pas plus d'intérêt qu’à quoi que ce soit d’autre le distrayant du match qui se joue sur la télé cathodique au coin. Mais quand il lorgne vers le dessous de la table vite fait, qu’il secoue la tête de désapprobation, et qu’une seconde plus tard je regarde moi-même ce qu’il a bien pu voir, mon visage se tétanise, mes joues passent au corail ascendant homard. C’est pas le barreau sous mes orteils agiles, c’est pas la patte de la table sur laquelle je laisse mes pieds se balader, mais bien la jambe de Ben. Ginny, what have you done?! « Oh, désolée. Je pensais que… la table... » personne n’aura jamais vu quiconque ramener ses jambes vers soi en un temps aussi record, et additionner le geste de la plus longue gorgée de coca possible de prendre avant l’étouffement.

Malaise passé, ou ravalé c’est selon, les assiettes sont préparées derrière le comptoir, les différentes discussions des autres clients s'additionnent aux cris de victoire et pleurs de défaite à l’écran, et aux parfums variés qui augurent que notre repas est presque prêt. Quand on vient finalement poser la monstruosité que Ben a commandée pour satisfaire à sa façon son orgueil de mâle alpha, je laisse aller un sifflement de surprise auquel j’ajoute un hochement de tête entendu, annonce mon plan de match. « Pour la postérité, faut filmer. » malhabile, sans grâce aucune, j’attrape mon portable et passe sous la table, niant que mes cheveux s’accrochent dans un semblant de chewing gum dans l'élan, avant de traverser de son côté de siège pour activer la caméra et prendre un point of view digne de ce nom. « Mis à part la pire indigestion de l’univers, on célèbre comment si l’homme gagne contre la bête? » le déclic sous mes doigts annonce que le documentaire mettant David et Goliath édition hamburger est commencé. Le chef attend, bras croisés, et je zoom au maximum sur le visage de Ben pour rendre le tout autant ridicule et mal cadré que stressant au possible. Y’a rien de pire pour bâtir la tension à l’écran que des poils de nez en gros plan et une lèvre tremblante pour y ajouter du mouvement. « Attention, c’est pour rendre verts de jalousie Adam et Noah. Même pas de PG-13, s'te-plaît. » petit rappel prude, parce que comme il a recommencé à blaguer façon macho, on n’est jamais trop sûr de la suite. La suite, justement. « … pas que ça doive l’être, ou pas, mais je... »  et un autre malaise, et une autre piqûre de rappel me montrant bien facilement à quel point j’étais incapable de garder un semblant de poise plus que 5 minutes de suite avant de retomber dans mon old self, awkward au possible. « Le chrono est lancé, mange! » distraction parfaite, le cuisinier bedonnant voit fort probablement la panique dans mon regard lorsqu’il appuie l’air blasé sur la petite minuterie au creux de ses doigts craquelés.

 
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benny ▲ walking on the moon Empty
Message(#)benny ▲ walking on the moon EmptyMar 17 Juil 2018 - 11:28

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Un homme de défis avec un estomac vide, mais un estomac noué, voilà ce qu'était Ben. Il n’avait jamais été moins sûr de finir pareil monstre de pain, viande, légumes et fromage, et honnêtement il ne savait pas trop ce qui l’avait pris de jeter son dévolu là-dessus. Ce n’était pas qu'il n’avait pas faim, c'était qu'entre sa gorge constamment sèche, son ventre tordu par tout ce que la situation avait d'exceptionnel et de bizarre, il en perdait l'une de ses principales caractéristiques ; avoir perpétuellement envie de manger. Sans faim, à pas d'heure, de tout et n'importe quoi, il mastiquait, grignotait, devant la télé, au volant, entre deux audiences, au bureau. Néanmoins, sur le moment, s'il existait une télécommande de l'espace-temps, il aurait pu faire avance rapide sur tout cet épisode jusqu'au verdict final. Là où Ginny, comme une de ces pimbêches de téléréalité toutes calquées sur l'exact même modèle à la variation blonde, brune, rousse, donnerait une note à leur soirée qui le qualifierait ou non pour la suite de l'aventure. Mais il fallait passer par là. Et il savait qu'ils passeraient un bon moment, car cela était toujours le cas. Il savait que cet endroit, c'était eux, que le revers gauche de Ginny qui menaçait de faire tomber le ketchup à chacun de ses mots mimés en grand, c'était elle, et que le Monster Triple Cheese Burger extra bacon, c'était carrément lui. N'avait-il pas passé l'âge de croire que l'on attire l'attention d'une fille en lui tirant les cheveux et qu'on impressionne ladite fille avec des prouesses aussi stupides que de se rendre malade d'une indigestion de junk food ? Ça sentait la fausse bonne idée à plein nez, mais il était désormais en plein dedans, et il n’était plus question de faire marche arrière. Ginny le lui mettrait sous le nez pour les dix prochaines années à la moindre occasion. Non, il était trop tard, l'honneur Brody était en jeu, le défi était lancé. Benjamin, l'air toujours largement plus assuré qu'il ne l'était réellement depuis le top départ de ce test grandeur nature, se retrouvait ici et là dans le naturel qu'il avait à débiter des stupidités en maintenant l’expression la plus sérieuse qui soit. Mais la jeune femme le perça à jour sans mal. Il nota la montre qui jurait complètement avec la robe, et l'air vainqueur qu'elle affichait alors qu'elle entonnait cet air qui le narguait, et qui la rassurait. “Quoi ?! Pfeuh. Non. Nope. Pas du tout.” Bien sûr qu'il était mort de nervosité. “C'est pas comme si c'était mon premier date. J'en ai eu plein, des dates, okay ?” Pas comme celui-ci, aucun ne comptant vraiment autant, aucun n’ayant la moindre importance, la moindre signification à ses yeux. “Je suis pas nerveux. J'ai aucune raison de l'être. Je suis dans mon élément, totalement. Un vrai poisson dans l'eau.” Ô déni complet qui ne dupait personne, masque de bébé boudeur arboré derrière ses bras croisés, les yeux qui roulent dans leurs orbites d'une façon désabusée. Le tout menaçant à chaque seconde de s'effondrer et le laisser admettre que la dernière fois qu'il s'était autant senti au bord de la panique remontait à l'examen du barreau. Et alors que le bout du pied de Ginny venant se coller à son mollet aurait habituellement été franchement encouragé, Ben se sentit accablé par l'énorme pression des attentes de la brune qu'il croyait deviner par-là. Il se faisait tous les films du monde dans un best of culcul dont il ne se voyait pas endosser le moindre rôle. Il fit disparaître la moitié de son soda en une gorgée. Elle le taquinait forcément. Elle avait saisi qu'il tenait bien moins la nervosité devant elle dans un diner perdu que devant toute une Cour de justice. Et elle lui retournait un peu le cerveau avec des armes qu'il aurait lui-même pu employer s'il ne craignait pas le moindre pas de côté. C'était forcément ça, de la stratégie.

Il n'aurait jamais autant pu confirmer toutes les hypothèses de gens fort diplômés à propos de ceux qui mangent leurs émotions qu'en commandant le fameux burger. Bien entendu, Benjamin nota le regard du cuistot sous la table ; check de propreté ou de longueur de robe laissant apparaître un petit amuse-bouche couleur chair, ce sont les pieds nus de Ginny que ses yeux trouvent avant de juger lourdement. Comme s'il n’en avait pas vu d'autres plus sales encore aux heures avancées de la nuit dans un quartier pareil. Comme s'il n’avait jamais eu leur âge, et moitié moins en mentalité. Quoi qu'il en soit, toutes les grandes théories conspirationnistes de Ben autour des intentions de l'australienne tombèrent à l'eau au même moment où elle rabattait ses jambes de son côté. Le soulagement fut presque aussi grand que la déception, et le brun maudissait encore une fois la dualité qui écartelait cette soirée d'un côté comme de l'autre. “Pas de problème.” assura-t-il, ce qui n’était bien évidemment pas tout. Il se pencha alors sur la table, s'approcha autant que possible, lui fit tendre l'oreille, couvrit sa bouche de la vue du cuistot et souffla ; “Il y a autre chose qui peut être dure comme un pied de table, si jamais.” Et il retourna au fond de sa banquette, fier comme tout. Débattre de son niveau de beaufferie, à quel point celui-ci pouvait être aussi exaspérant que drôle, lourd et ridicule tout à la fois, pouvait les tenir occupés avec le sourire aux lèvres jusqu'à ce que les plats soient préparés puis servis. L'appétit de Ben s'ouvrit comme par magie tandis qu'il devinait l'approche imminente de son défi burger, narines grandes ouvertes, à six heures, quatre heures, une heure… Et là, sur la table. En équilibre précaire sur son bun, un empilage d'aliments suintants d'huile si malmenés sur la plaque de la cuisine que le tout semblait hurler à l'aide, à la grâce, la fin de ses souffrances. Ginny le rejoint de son côté de la table, passant par dessous ; Benjamin leva des yeux rieurs et gênés vers le cuistot qui assistait à cela après le coup du pied. C'est pas du tout ce que vous croyez, assurait-il avec un sourire crispé à souhait, et l'homme s'effaça dans le même mutisme qui le caractérisait depuis qu'ils avaient mis le pied dans cet endroit. Anyway. “Mets le bon filtre surtout. Pas la couronne de fleurs de mes deux, là.” reprit l'irlandais à l'intention de Ginny, born ready, caméra dégainée, tandis qu'il tortillait du derrière sur le cuir de la banquette comme un enfant. Il ôta sa veste, remonta ses manches, défit deux boutons à sa chemise, cala sa serviette autour de son cou façon bavoir absolument glamour, et il était prêt. Il était plus que prêt d’ailleurs. Il avait à nouveau confiance en ce puits sans fond qu’était son estomac, à sa capacité à se foutre de sa sensation de satiété, et en sa vitesse d'exécution. La vidéo était lancée, c’était son moment. Il ne manquait que le prix, la récompense ; la lune, le soleil, les étoiles ? “Avec un antidiarrhéique.” répondit-il. Ginny bafouillait, que le cuistot s’impatientait, et Ben avait les crocs d’un lion prêt à bondir. Il coupa court à toute fioriture qui continuait de le séparer de son grand défi ; “On cause ou on bouffe ?” On bouffe. Top départ, chrono lancé. Stratégique, le brun s’empara de ses couverts et divisa le burger en plusieurs petits. Il piquait, coupait, gobait, mastiquait et avalait avec un bon ratio, bouchée après bouchée. Rapidement le coin de sa bouche s’orna de miettes de bun collées à la sauce barbecue. La serviette se tachait petit à petit d’éclaboussures de gras et d’une grande trace de ketchup façon saignement de nez. Une gorgée d’eau évacua le cheddar qui collait aux dents d’une manière Ginnyesque. Croc, croc, gloup, la première partie passa, puis la deuxième, et le chrono s’accéléra pour la dernière, la plus difficile. Chaque bouchée s’ajoutait à la grosse boule de plâtre qui macérait désormais dans son ventre. Finalement, enfin, heureusement, il en vit le bout. “La dernière bouchée…” murmura-t-il en brandissant les morceaux de steak, oignon et salade piqués au bout de sa fourchette bien devant le téléphone de Ginny. La bouchée de la gloire. Et elle disparut. Fork drop. Benjamin s’affala complètement dans la banquette, la peau du ventre bien tendue. “Finalement, soufflait-il comme un marathonien en bout de course, y’avait… peut-être… trop de bacon…” La vidéo toujours ininterrompue, il laissa sa tête glisser mollement sur son épaule et, dramatiquement, sur le lit de mort de son estomac à l’agonie, poursuivit son élan de diva hollywoodienne ; “Fils, si tu vois ceci, sache que…” Petit silence pour le suspense qui sentait la mauvaise blague à plusieurs mètres à la ronde comme un pet foireux. “...je t'ai toujours laissé gagner à Street Fighter.” Et il conclut la scène par une imitation léchée de la mort de Marion Cotillard dans Batman.

Clap de fin, c’était dans la boîte. Ben se redressa soudainement et lança au cuistot avant qu’il ne perde complètement patience face à pareil spécimen ; “Je peux avoir une pinte pour faire glisser le tout ?” Avec un clin d’oeil à Ginny, il assura, torse bombé du macho cliché ; “Les gènes irlandais feront le reste.” L’homme avait roulé des yeux jusqu’en Asie et s’en était allé. Les deux adolescents tardifs firent une repasse sur leur film indépendant mêlant action, suspense et émotion, et Benjamin en était plutôt satisfait. Il se réjouissait même d’avance de le montrer à Adam et de voir sa tête déconfite -il l'interpréterait comme de la jalousie ou de l’admiration, mais il y aurait plus de chances que le bonhomme soit en réalité en train de se facepalmer intérieurement de voir son père se comporter de la sorte face à une fille. Ginny toujours près de lui, il surprit son regard pourtant bien vissé dans le sien effectuer une glissade furtive sur sa robe. Dieu seul savait comment une trace de gras du burger avait imprégné le tissu à une dizaine de centimètres de l’encolure. “Oh damn, on dirait que tu attires vraiment les tâches malgré toi.” Ben s'attela immédiatement au problème avec toute la bonne intention du monde, avant de saisir le potentiel double sens de sa propre phrase. Des tâches comme toi, croyait-il lire dans les yeux de Ginny. “Me regarde pas.” fit-il en dressant un index d’avertissement. Machinalement, il avait utilisé sa propre serviette/bavoir complètement sale afin de tenter d’éponger le gras. Autant dire que cela allait de mal en pis sur la poitrine de la jeune femme. “Oh. Ooooh. Okay, ça ne s'arrange pas. Désolé.” bafouilla le brun, honteux, et décrétant qu’il était plus sage qu’ils gardent chacun tous leurs membres le long de leur corps pour toute la durée de cette soirée.

 
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Message(#)benny ▲ walking on the moon EmptyMer 25 Juil 2018 - 0:44

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Le regard du cuistot sur moi qui m’arrête direct, ouvre grand mes yeux, désarticule ma mâchoire. J’ai l’air d’un poisson hors de l’eau manquant d’air, soufflant à sa perte le temps de réaliser que je jouais du pied, sous la table. Que Ben s’est retrouvé au centre d’un flirt innocent de bout d’orteils et de talon malhabile, et qui maintenant était souligné d’un soupir de bonhomme las qui en avait vu d’autres. Par contre, c’est tout sauf le cas pour ma part, et mes joues écarlates s’agencent parfaitement à la bouteille de ketchup dans l’angle que je me retiens d’attraper pour en vider son contenu tel une bombe de fumée censée distraire l’attention de tous avant de disparaître par la fenêtre. Brody qui excuse le geste en ne lui accordant pas la moindre importance aidant un brin à ma respiration, avant de reprendre ses traits moqueurs, sourire en coin, confession soufflée qui suffit à m’achever maintenant qu’il sous-entend ce que mes oreilles chastes se gardent d’emmagasiner. « J’en prends note. Non, je veux dire, je note pas, non mais, je… oula. » et elle bégaie Ginny, elle secoue la tête, joue des doigts, exhibe son téléphone, et se trouve maintenant un boulot bien plus important, une tâche cruciale à laquelle dédier toute sa tête et ce qui reste. Une seconde et je me retrouve assise à côté de Ben, un clic et la caméra est enclenchée sous ses demandes exigeantes que j’aurais pu prévoir connaissant le spécimen, et son statut de reine des médias sociaux à assouvir en usant des bons stickers, des filtres au potentiel aussi flatteur que cocasse. « Là, t’as un doublé de chien qui lèche et d’yeux qui envoient un laser quand t’ouvres la bouche. I’ve got you covered. » de l’index je tapote, aligne, zoom, centre, jouant mon rôle au sérieux le temps de reprendre contenance, d’oublier qu’à peine plus tôt j’étais à même de me transformer en créature de drague lourde d’awkwardness. À l’arrivée de la bête, je retiens un soupir entre la surprise et la terreur, me rappelant tout de même que j’agis à titre de supportrice, et que si Ben se sent de démonter ce monticule de gras, de viande et de sel, c’est tout autant mon moment de gloire pour lui offrir tout le soutien dont il aura besoin entre la première bouchée et l’horrible dernier morceau. « Et après ils disent que le romantisme est mort. » lorsque Ben me répond d’un souffle que l’indigestion sera probablement maître mot de notre fin de soirée, c’est le soulagement de nous retrouver qui fait le reste. Nos conneries, notre répartie discutable additionnée d’humour douteux, ça fait du bien. Ce sont des repères qui me guident à travers les éclats de rire que je lâche de l’entendre grogner de faim, puis d’épuisement, puis de faim à nouveau. Les larmes aux yeux et la caméra qui tressaille à chaque fois qu’il replonge sur son burger qui, malgré de premières minutes consacrées à se voir découpé et ingurgité, semble toujours avoir la même grosseur à mes yeux malgré le temps qui passe. Franchement épatée par le dernier sprint du brun, j’assiste en retenant le moindre son de sortir de ma bouche, muette, interdite, à la part finale qu’il enfourne presqu’au fond de sa gorge sans se permettre de marge d’erreur. Lui laissant la conclusion on camera officielle, je chuchote tout de même à l’écouteur de mon téléphone, une fois qu’il enchaîne sur son regard vide de mort surjouée, un « T’inquiètes pas Adam, je changerai ses derniers mots au montage pour une blague de pet sans soucis. » gardant sauf l’honneur du gamin et son score plus que parfait - et mérité - à Street Fighter.

L’accalmie post-Monster Triple Cheese Burger est suivie de l'écho de mon soda que je termine bruyamment, presque déshydratée par toutes les calories ingurgitées par Ben. Nos rires, nos cris de surprises, notre boucan de compétition ont fait place au retour de la télévision en trame de fond, et aux conversations murmurées et ponctuées de pleurs de bébé dans l’angle. Assez, que je ne réalise qu’une fois le brun s’activant à dégainer sa serviette pour porter son attention vers ma robe le geste qu’il s’apprête à faire. Oh, qu’il a déjà fait, apparemment. « Celle-là c’est pas ma faute, elle s'est imposée toute seule sans que je le réalise. » et j’hausse de l’épaule, le double sens de sa phrase qui trouve le double sens de la mienne. À l’instar de la tâche qu’il s'époumone à chasser, moi, j’ai rien à dire à son sujet, pas de grand râle à lâcher, pas de critique à faire. « Puis, c’est pas grave si elle est tenace, ça s’accorde plutôt bien avec le motif. » oui, c’est dommage pour ma robe, mais ce n’était qu’une question de temps avant que je fasse un mess de ce qui comporte mon look du soir de toute façon. Pourtant, le tout aurait été cocasse, le tout aurait été fun, s’il n’avait pas passé une bonne minute à se donner corps et âme à frotter ce qui, si j’avais eu un semblant de puberté, ressemblerait à une base de poitrine normale. Seigneur Dieu, et la voilà à nouveau qui rougit de plus belle, Ginny la prude de service. « Ben... » oui, ça sonne comme un avertissement, et ce n’est plus all fun and games de parler à double-sens et de s’envoyer des piques inoffensives, c’est le melting pot de ses restes de burger qui s’étalent sur toute mon encolure, et ses mains qu’il retire comme une décharge électrique sous ma supplication de gamine de 10 ans pas encore à l’aise avec son corps - le serais-je un jour? « … je suis toute trempée, là. »  que je trouve à rajouter dans tout mon malaise, avant de porter mes paumes à ma bouche, vague de panique qui m'assaille, et de sentir mon regard qui s’agrandit plus que de raison, réalisant ce que je viens d'énoncer. « Tu dis rien. Rien, tu ajoutes absolument rien. » catégorique, je lève un doigt agressif à son intention, le lui fiche sur les lèvres en sachant très bien que ce n’est qu’une question de temps avant qu’il ne renchérisse, encore plus grivois. Une question de temps avant qu’il ne renchérisse oui, et avant que j’ajoute une nouvelle gaffe au topo, incapable de rester en place, mes bras plus grands que dans mon souvenir qui repassent trop vite le long de mon corps en même temps qu’on pose sa pinte sous ses yeux, et que mon mouvement la renverse à la seconde où elle touche la table. Déversement de houblon sur le torse et sur les cuisses de Ben, puis sur ce qui me reste de robe potable, et c’est tout juste si le cuistot nous file sa vieille lavette salle pour qu’on se gère sous un coup d’oeil dégoûté au possible.  « … oups. » qu’il me semble bien ridicule mon constat, maintenant que mes mains se risquent à attraper le linge humide et à m’en servir pour éponger mon dégât sur la table, puis sur Ben. Dans l’empressement, j’en oublie à mon tour la localisation de mes efforts, et la proximité de sa boucle de ceinture me confirme que j’ai pas affaire là, que c’est pas autorisé, qu’encore une fois je suis la pire des loques humaines et que tout ceci vaudrait mieux si je repassais à nouveau sous la table - ce que je fais, me cognant la tête sur le poteau au passage, oui, mais surtout pour m’éloigner de la zone Brody à risque.

Essoufflée par mes maladresses et empestant la friture, la bière et le bacon, j’ai l’idée du siècle lorsque mes rétines se posent sur l’arrière-comptoir où un étalage de merch à l’effigie du diner me confirme qu’il existe encore un peu de bon sur cette Terre. D’un signe de tête assuré, je confirme à l’avocat que j’ai tout en main - ce qui, en soit, devrait nous terrifier tous les deux - avant de m’extirper du booth pour me poster devant la caisse, retrouvant au passage mon air candide habituel plus mes pas m’éloignent de tout gâcher à nouveau en face de Ben. « Je prendrais deux t-shirts, s’il-vous-plaît. » « Y’ reste que des XXX-L. »  à ma voix qui chante, la serveuse me répond le plus sèchement possible, avant que je dégaine la carte, et qu’elle me file ma demande en accompagnant le tout de la plus maigre des politesses ; et presqu’aucun regard à ma discrétion. Je sens officiellement qu’on n’est plus du tout les bienvenus ici lorsqu’on me tend un sac de papier kraft brun supplémentaire. Mes pas finissent par retourner piteusement à la hauteur de notre table où nos vestiges s’étalant d’un bout à l’autre de nos places me confirment qu’on a bel et bien la malchance aux fesses depuis le début de la soirée. « Ils m’ont donné mes frites pour emporter. Je pense que c’est le jargon poli pour “vous dégagez, maintenant”. » et je pouffe de rire en invitant Ben à se lever. Retenant à peine un éclat puis un autre quand on finit par passer à la hauteur du chef qui nous envoie le mauvais oeil, je termine hilare sans aucune retenue possible lorsque mon regard s'accroche à mon reflet dans la glace de la salle de bain et que je fais finalement état des dégâts. Un coup d’eau froide sur le visage, la robe lavée à la va vite que je cache ensuite sous l’amas trop long trop large de tissu affichant le logo du restaurant en gros dans le dos, et je m’extirpe de l’établissement un peu après Ben, le retrouvant probablement au soulagement de tout le staff sur la ruelle d’en face. « Même en mode XXX-L, t’arrives à pull off le look à la perfection. C’est ridicule d’avoir de si bons gênes. » que je râle, roulant des yeux, le rire tout de même un peu plus facile. Entre mes doigts, je déplie distraitement le rebord du sac où mes pauvres frites cheddar se sont retrouvées, elles qui me semblent bien seules si je veux le rejoindre au département de ceux au ventre repu et à l’appétit comblé. En piquant une frite, entamant une marche aléatoire, j’affirme convaincue « Par contre, la prochaine fois on fait une cure de jus et 4 heures d’elliptique au gym du coin. » question d’équilibre. L’air frais aide à me remettre les idées en place, à calmer la folie des attouchements impudiques, à redonner un aspect un peu plus ludique, un peu plus léger à notre conversation. Jusqu’à ce qu’on tourne apparemment dans la mauvaise allée, et qu’à la clé, une voix surgisse de derrière nous, vindicative, et pas le moins du monde à prendre à la blague. « Vous deux. À gauche, et on traîne pas. » wait, est-ce qu’on serait en train de se faire menacer?

 
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benny ▲ walking on the moon Empty
Message(#)benny ▲ walking on the moon EmptyMar 7 Aoû 2018 - 17:08

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L’esprit concentré sur sa besogne, le brun passa complètement à côté du message entre les lignes articulées par une Ginny dont il était habitué aux interprétations très littérales -et qui se laissait faire, la serviette sale appuyée et frottée contre sa robe afin d’atténuer une tâche qui grandissait et grossissait sur sa poitrine, étalant gras, sel et sauce jusqu’à lui donner une allure totalement grotesque. Elle se fit optimiste, et Ben répondit sur le même ton, dédramatisant en lançant un pique presque trop simple au passage ; « En plissant les yeux, l’illusion d’optique ferait presque croire que t’as des boobs. » Et il poursuivit, constatant seulement une fois les dégâts rendus irréversibles que toute sa bonne volonté ne faisait qu’empirer les choses pour le malheureux bout de tissu. La jeune femme se décomposait, le visage écarlate virant un peu plus au rouge ketchup derrière les mains qui couvraient sa bouche ; mais il était trop tard, il avait entendu, il n’en avait pas raté une seule miette, et il jubilait tant, gonflé d’égo, qu’il en oubliait presque qu’il ne s’agissait que d’une maladresse, de termes bénins qui provoquaient pareil tsunami de honte uniquement parce qu’il était lui, et qu’il donnait tout leur sens à ces mots d’apparence innocent. Lèvres pincées, scellées par l’index autoritaire de Ginny, Benjamin pouffait, ricanait par le nez, les yeux embués par tous les éclats de voix dont il était ainsi privé. Il acquiesça d’un vif signe de tête et mima une clé verrouillant sa bouche à double tour et dont il jeta la clé par dessus son épaule comme les enfants jurent de garder un secret le temps de la récréation. Il n’en pensait pas moins, frustré au plus haut point par cette montagne de vannes toutes plus excellentes les unes que les autres qui s’empilaient et saturaient son crâne, tristes de ne jamais avoir de public pour les entendre et rouler des yeux au ciel avec un rictus d’amusement inavoué. La face toujours plus dépitée face à leur cirque qui enchaînait les mauvais numéros de clowns, on déposa la bière sur la table ; elle effectua immédiatement un salto arrière raté, s’étala sur la surface à peine nettoyée de tous les petits bouts de salade et d’oignon que Ben avait semés en dévorant son burger, désormais collante de houblon fraîchement servi. Un tiers sur la table, un tiers par terre, et le reste sur l’irlandais qui pleurait intérieurement tout ce gâchis. « Je savais pas que c’était concours de t-shirt mouillé. » commenta-t-il, un peu dépité, pas encore blasé ; mais la bière était sacrée de père et fils au pub des Brody, en Irlande, et ce genre d’incident était forcément suivi d’une courte période de deuil. Ce fut l’application de la lavette sur son entrejambe qui coupa court à son moment de recueillement. Ses yeux tombèrent sur la main de la Ginny entreprenante malgré elle une fois encore, glissèrent sur son bras, remonta sur sa tête basse. « J’admire ta dextérité, sacré coup de poignet. » fit-il, ne pouvant décemment pas laisser passer cette occasion-là de souligner tout ce que la situation avait de… délicate. La brune s’échappa par dessous la table, et Benjamin ne retint pas un rire moqueur cette fois ; « Bah, tu t’en vas déjà ? » l’air de ne pas comprendre pourquoi, innocent au regard malicieux. Et à force de joutes grivoises, de tripotages maladroits, de scènes improbables, Benjamin avait oublié sa nervosité paralysante ; c’était Ginny, c’était ce qui l’avait pétrifié au départ, et c’était désormais pour cette même raison qu’il était à nouveau aussi à l’aise que d’habitude.

La jeune femme quitta la table avec une expression si sûre d’elle que, lui, n’en fut que moins rassuré. Hors de question de la quitter du regard ; il la suivit de près jusqu’à la caisse affichant les goodies du diner, tourné sur la banquette, un bras sur le dossier, les yeux plissés. Lorsqu’il aperçut les t-shirt, il loua intérieurement le génie de Ginny -ils ne pouvaient pas avoir l’air plus ridicules qu’ils ne l’étaient déjà, après tout. Elle revint avec ses frites à emporter. La partie de Ben scandalisée par ce genre de stratagème visant à leur faire comprendre qu’il était temps qu’eux et leur poisse maladive quittent les lieux se tut, et comme souvent, la fierté pris le dessus ; « De toute manière, on allait se tailler, fit-il sans manquer de croiser le regard du cuistot. C’est pas un terrain à notre hauteur. » Lui n’était pas embarrassé du désastre qu’ils laissaient derrière eux, l’allure entre Bagdad et Tchernobyl qu’avait pris leur table et qui leur valait tous les regards aux divers degrés de jugement tandis qu’ils passaient devant les autres banquettes et rejoignaient la porte. Changement de look express en passant par la case toilettes, Ben enfila quand même sa veste par dessus son tout nouveau t-shirt au motif rétro parce qu’il était important de garder un minimum d’allure en toutes circonstances -exception faite de toute bataille impliquant un burger géant- et même Ginny nota que cela suffisait à faire le job. « T’aurais au moins pu en profiter pour rembourrer ton soutif. » rétorqua-t-il, prétendument snob et trop bien pour elle. En la voyant entamer ses frites au cheddar, il ne put s’empêcher de lancer un chronomètre mental pour savoir combien de temps il lui serait nécessaire pour tacher ce vêtement-là aussi. Puis elle bafouilla quelque chose à propos de faire de l’exercice, et son oreille sélective fit le tri d’elle-même. « Eh, être canon c’est un sport à part entière. Et crois-le ou non, mais c’est épuisant. » Tous ces filles, cette admiration, ces regards rivés comme des projecteurs suivant ses pas sur la scène de sa vie. Une bonne constitution, quasiment pas d’entretien, pas à la recherche d’une silhouette à la Dwayne Johnson, Benjamin s’était toujours satisfait de sa silhouette et ne ressentait aucun complexe -ces amis l’ayant vu finir la soirée à poil ou quasiment à plusieurs reprises (parce qu’il jugeait que c’était ainsi qu’on était le plus confortable sur un flamant rose gonflable pendant une pool party) pouvaient également l’attester. Il allait très certainement enchaîner sur une autre stupidité quand on les prit à part.

C’était le genre de situation dans laquelle personne ne s’imaginait vraiment. Elle se voyait dans les films, les séries, et l’on se préoccupait plus de plaindre les personnages dans l’écran plutôt que de se demander ce que l’on ferait soi-même. C’était une situation où il fallait flipper, éventuellement paniquer, mais sûrement pas souffler avec une ironie étrange ; « Le voilà, notre moment Wayne. » La soirée était pourtant bien assez mémorable en l’état, mais l’univers s’était visiblement mis au défi. Qu’est-ce qui pouvait être plus terrifiant qu’un date en bonne et due forme avec Ginny McGrath ? Plus awkward qu’un concours de bouffe ? Plus gênant que de se faire virer d’un resto paumé d’un quartier glauque ? La réponse était présente devant eux, en sons et lumière, et armée d’un couteau agité avec une nervosité peu rassurante. « Mate, on fait que passer. Tu devrais attendre les gros pigeons à la sortie de l’autre resto. » tenta de raisonner Benjamin qui se demandait s’ils vivraient le même scénario s’ils étaient sagement allés dans l’établissement du plan A originel. Si ce cirque n’était pas une punition pour avoir refusé de faire les choses autrement, et dévié vers le diner au moment de donner le ton de leur soirée. « La ferme, Blanche Neige. » Oh well, l’humeur n’était pas à la négociation. L’homme compensait le mètre qu’il maintenait entre lui et eux par son bras tendu et son prolongement aiguisé. La nervosité de son mouvement poussait à se tenir comme des statues. « C’est quoi le délire ? Sortie de couple assortis ? » qu’il ricana en toisant les t-shirts. L’irlandais eut une pensée pour tout ce que Ginny et lui avaient déjà d’assortis ; sweats, casquettes achetés à Disneyland, gosses accidentels. « Longue histoire. Sois pas jaloux. » rétorqua-t-il en lui envoyant un clin d’oeil et un baiser provocateurs, l’instinct de survie visiblement manquant à l’appel pour quelques secondes. « Fais pas le malin. Passe ta montre. Toi aussi. » Il se tourna vers Ginny, menaçant avec une tremblote évidente. « Laisse-la tranquille. » tenta Benjamin, se sentant un court instant pousser des ailes et redevenant immédiatement la cible de la lame pointant son ventre. « Ok, ok. » Il ne mourrait pas en héros pour une montre Lego. Non, merci. D’ailleurs, l’homme fut particulièrement décontenancé de se retrouver avec pareil butin digne d’une caméra cachée entre les mains. « C’est quoi ça ? Mais vous êtes quel genre de guignols ? » On était venus éclaircir la même question, mate, pensa le brun tandis que sa bouche soufflait furtivement ; « C’est c’lui qui dit qui est. » La seconde suivante, il vit le bout de son nez toucher celui de l’assaillant enhardi et quelque chose de froid plaqué à sa gorge, son dos fusionnant avec les briques de la façade du bâtiment derrière lui, et pris d’une sérieuse envie de pisser.
« T’as dit quoi ?
- … Portefeuille et chaussures ?
- C’est ça. »

 
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benny ▲ walking on the moon Empty
Message(#)benny ▲ walking on the moon EmptyVen 10 Aoû 2018 - 4:30

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J’aurais pu être insultée, me braquer, le prendre à la dure, me sentir plus coupable encore que jamais. À la place, je reviens vaillamment aux côtés de Ben, retenant mon rire de pouffer, mordant l’intérieur de ma joue sous l’hilarité. C’est beaucoup plus amusant de me précipiter hors du diner avec lui, d'imaginer une vanne et une autre à l’intention de la caissière et du chef, de rigoler à la sienne, de renchérir de la mienne. « En plus, c’est hyper dangereux comme endroit. Y'a des ustensiles coupants et des coins pointus partout. Prochaine étape : la mort. » à noter que le baby proof de la maison de mes parents une fois Noah né avait été une excuse pour eux de me garder en un morceau cela dit. Parenthèse fermée, aller simple aux toilettes le temps de rafraîchir - tenter de - la tenue souillée que j'étrenne malhabilement, de la cacher sous un t-shirt trop grand et informe qui sent encore la friture de fond de tiroir, et je retrouve Brody hors de l’établissement. Il a fait l’effort de passer sa veste, d’agencer comme il a pu le vêtement avec un look de grande personne, mais je le souligne bite, insiste à peine. Beaucoup trop obnubilée par ma portion de repas, par mon dîner que j’engloutis au fil de nos pas sans vraiment l’envie de faire autre chose que de laisser aller notre flot habituel de conneries. Là, comme ça, on se ressemble. À picorer dans un sac de papier kraft, à imaginer des scénarios et des hypothèses jouant soit avec les aliens, soit avec les super-héros, soit avec le potentiel douche de Ben, soit avec n’importe quel truc à manger possible et impossible sur cette Terre. Lorsqu’il lorgne sans vergogne sur mon décolleté - absence de, il ne manque pas de le souligner - je joue le jeu aussi mal à l’aise que possible. Mains sur les hanches et sourcils froncés pour la peine. « C’était le plan originel d'enfin t'offrir un double D, mais t’as gobé toutes mes réserves autrement. » d’une main, je soulève le coton pastel recouvrant l’étendue des dégâts pour lui montrer que ma pauvre robe, elle, est fichue. En même temps, montrez-moi un seul vêtement de ma garde-robe qui est encore à son état originel. Non, bon, voilà ce que je pensais. J’ai lâché prise, à force. Trottinant dans les dédales d’un quartier qu’on ne nous a pas forcément recommandé, mais qui fait changement des rues plus populeuses et touristiques de la ville, il y a l’avocat qui décide de reprendre du service, pédant à souhait, balayant mon pseudo-compliment d’un étalage de beaufitude qui m’arrache un éclat de rire bien senti, puis un roulement d’yeux pour tout de même rester un minimum dans mon personnage. « T'es sûr que tu ne veux pas retourner à l'intérieur, entraîner tes mimiques de tombeur devant miroir? » je serai prête à le laisser le temps de l’exercice, et par laisser je veux clairement dire rester en retrait pour tout documenter et m’en servir le jour où j’aurai besoin de lui négocier la plus grosse part de gâteau ou les derniers biscuits de la boîte. J’allais reprendre, ma prochaine idiotie prévoyant se mouler à un jeu de mots qu’il marinait, ou à toute autre pique dont il avait le secret, lorsqu’on nous immobilise brusquement. La voix inconnue, les gestes pressés, je fais à peine volte-face que Ben murmure à mon oreille. « Cours Bruce, cours. » incapable pour l'instant de voir le sérieux de la chose ; ou incapable d’être sérieuse tout court quand le grand brun est dans les parages, je n’ai même pas le temps de valider qu’il ne s’agit pas juste d’une blague avant d’assister à la scène suivante.

Brody en profite pour bomber le torse, ou du moins, donner l’impression d’avoir le tout en contrôle. Penaude, au ralenti, le coeur pas à l’aise du tout, je finis par tendre mon poignet sous la menace, la montre qui suit le mouvement et qui se retrouve dans la paume du type louche dans son rire gras, dissipé. Il se moque et mon regard noir n’y fait rien, ni même le force de sortir de son potentiel danger au possible. Une exclamation de surprise s’échappe de mes lèvres, pas tant rassurée par leurs échanges, encore moins par les petites craques que l’irlandais trouve bon d’ajouter à son discours. « Benjamin! » inquiète, effrayée. Apparemment, je ne suis pas la seule. Un mouvement vers l’avant, notre interlocuteur se précipite et amène avec lui dans sa course Ben qui finit plaqué sur les briques. « La montre. Elle a juste une valeur sentimentale. » mes mots déboulent, comme mes gestes, et je sépare la distance entre eux et moi avec insistance, distrayant du mieux que je peux, les mains qui tremblent mais la voix qui reste posée, trop calme, trop sérieuse. « Mais ça par contre, c’est le real deal. » il fronce les sourcils, il est à une seconde tout au plus de retourner agiter sa lame sous les prunelles de Ben avant que je ne glisse mes doigts dans mes cheveux, décrochent les boucles d’oreilles en diamant à mes lobes, les lui tende sans y penser à deux fois. C’est fou ce que des parents en mal d'amour et d'attention de leur plus jeune peuvent faire, peuvent croire pouvoir acheter avec un vulgaire bijou. Cadeau d’anniversaire que j’ai pensé porter ce soir juste parce que l’idée de les étrenner à un moment où je célébrais une esquisse de vie loin de celle tracée par eux me semblait assez ironique pour être amusant. Jusqu’à ce qu’il grogne un peu, demande assurance.  « Envoyées directement de Londres, par mes parents. Presque 3000 pounds. » like your ass que je me retiens de dire, mon regard se relevant tout de même vers Ben en espérant qu’il ait compris le potentiel marrant de la chose et qu’à travers, il souffle un peu malgré le gabarit effrayant de la position dans laquelle il se trouve. « Mouais, on dirait pas du toc. » ses grosses mains rugueuses me piquent le duo scintillant, avant de glisser le tout dans la poche de son pantalon comme si de rien n’était. « La montre à 10 balles a une valeur sentimentale, mais pas les boucles d’oreilles? C’est quoi votre problème? » « Longue histoire. » grommelant, il ne perd toutefois pas le nord, et même si les pendentifs ont de quoi payer largement notre caution, le gros bourru attend tout de même qu’on lui lance aux pieds nos portefeuilles, nos chaussures, et nos portables, après que le mien et sa sonnerie incriminante de Mortal Kombat nous ait vendus et lui ait rappelé qu’au vingt-et-unième siècle, la technologie était de son côté. « Face au mur, fermez les yeux. On va faire un test, vous allez vous la boucler pendant 1 minute. » puis, le salut salvateur, l'alléluia, la dernière demande de sa part à laquelle j’obéis sans même douter une seule fois que Ben ne fasse pas de même. Silence, entrecoupé des pas du voleur de grand chemin qu’on entend finalement claquer à quelques mètres de nous dans notre dos, jusqu’à ce que le son ne soit qu’un faible écho nous confirmant qu’il n’est plus dans les parages. « Ses tests sont nettement moins cools que les nôtres. » et je soupire, réalisant enfin mon coeur qui bat la chamade, ma peau glacée, le risque évident que j’ai ravalé d’un masque potentiellement trop stoïque pour ne pas m’effrayer. Est-ce qu’on venait vraiment de vivre ça? Mes orteils déjà sales de bitume crasseux le confirment.

« C’est peut-être ça que doctor love voulait dire. 77% de chances de crever au premier rendez-vous. » je relativise, me détachant de la façade pour réduire l'espace entre Ben et moi, m’assurant qu'à son tour, il reprend ses esprits. Que même s’il fait quotidiennement le fort et le fier, y’a plus à avoir peur, y’a plus à jouer, il reste qu’à souffler et qu’à reprendre contenance en attendant de penser à la suite, et au potentiel de plan qu’il nous reste. Ce qui, malheureusement maintenant, n'augure pas très bien. Faisant fi du résultat merdique dans lequel on se trouve, je poursuis sur la lancée de l’humour, comme il s’agit de notre langage premier de toute façon. « Ça va? Ou tu veux que j’aille prendre une marche rapide plus loin, le temps que tu te remettes virilement de tes esprits? » la prochaine étape sera de l'entendre m'assurer qu’il a des allergies à la poussière de ruelle pour justifier des larmes de crise de nerfs qui pourraient facilement naître au coin de ses yeux. Un coup d’oeil à la va vite et il semblerait que ses paupières n’aient pas besoin de battre sur elles-mêmes pour lui sauver la face sans que je ne réalise les effets du stress et de ses relents sur sa peau de pêche. « T’as de la sauce burger, là. » pouffant de rire compte tenu de la dernière fois où quelqu’un - lui - m’a dit ce genre de chose, c’est un index curieux et investi d’une mission bien précise que je lève à son intention, atteignant ses fossettes, frottant doucement les vestiges de son repas gargantuesque en poursuivant, moqueuse. « Mais contrairement à ce qu’avancent certaines personnes sans preuves fondées, dans ton cas c’est la vérité. Et pas une excuse pour te bécoter. » sur la pointe des pieds, je laisse couler un rire avant de finir mon travail, et de le retrouver relativement propre, si on oublie l’odeur de bière stagnante sur son pantalon et de gras de bacon collé à ses cheveux. « Alors, qui de toi ou de moi a donné les mad karate kicks qui l’ont fait s’enfuir? Je t’avertis, si tu prends cette version, je dirai que c’est moi qui avait les nunchakus. » retrouvant pleine posture sur mes talons, mes mains se glissent dans mes poches - vides, ou presque, là où je sens la montre WW toujours au poste. Au moins ça, c’est sauvé. Puisqu'il le faut, réfléchissons à une issue possible, à un moyen de ne pas terminer la nuit avec un membre en moins ou tout autre lot de malchances plus nombreuses les unes que les autres. Dans l'angle, je crois apercevoir sans grande certitude une voiture de patrouille, un flic qui tourne le coin, et qui peut-être nous a vus. Comme timing, on aurait pu faire mieux. « C’est pas la limousine à laquelle je m’attendais, mais ça peut facilement nous transporter du point A au point B. » ou simplement nous orienter et/ou nous permettre de terminer la soirée en mode Cops, poursuite à gogo à travers les rues de Brisbane à la recherche du malfrat qui a osé s’en prendre à nous.

 
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Message(#)benny ▲ walking on the moon EmptyVen 7 Sep 2018 - 16:28

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Est-ce que c'est pour de vrai ? Ben se posait la question régulièrement, le regard agard glissant sur la scène, les protagonistes, et retombait sur terre aussi sec à chaque fois que la voix de l'agresseur s'élevait, agressive et grasse. Était-ce bien lui qui vivait, à cet instant, le scénario classique du braquage de rue qui n'arrivait habituellement qu'aux autres ? Il commençait à croire qu'en réalité, cela finissait par tomber sur à peu près tout le monde. Généralement, est-ce que cela n'impliquait pas une cagoule noire, des larmes et un super-héros pour les sauver in extremis ? Car lui ne s'était certainement pas révélé à la hauteur d'un héros quelconque, et plutôt incapable de gérer une situation ayant tout le potentiel de dégénérer. Un peu spectateur de la scène entre deux vannes qu'il aurait mieux fait de ravaler, le brun ne se sentait pourtant pas en panique. S'il ne s'était jamais demandé comment il réagirait dans pareille situation, il en avait la réponse malgré tout ; bien sûr qu'il avait un fond de peur, comme une longue note grave résonnant profondément dans son estomac, ses entrailles lestées de plomb et son palpitant gelé, mais il adoptait un calme d'automate tandis qu'il se déléstait lui-même de sa montre, ses chaussures et son portefeuille avec l'obéissance de l'écolier que ses parents auraient rêvé qu'il soit. Le tout était bon marché. Se posant furtivement sur Ginny, son regard assista avec autant d'impuissance que de stupeur à l'échange qu'elle marchandait avec le type pour sauver la montre en vulgaire plastique qu'il lui avait offerte plutôt que les boucles en pierres bien réelles. Et il ne pouvait pas l'empêcher, conscient qu'ouvrir la bouche était désormais un risque à ne plus prendre le concernant. Elle n'était pas à plus d'un mètre de lui, mais avec le voleur faisant barrage, elle lui paraissait étrangement hors de portée. Il n'y avait rien d'autre à faire en dehors de subir la situation, attendre que les minutes passent, et qu'on veuille bien les recracher à la rue un peu plus légers en monnaie et en fierté. Leurs affaires n'étaient déjà plus les leurs, amoncelées aux pieds de l'homme au pactole en demi-teinte par rapport aux risques pris. Sans plus faire la moindre vague, Benjamin se tourna, comme demandé, face au mur dont il avait senti la froideur dans son dos durant ce qui lui avait semblé durer entre une seconde et une éternité. Il observait constamment Ginny dans le coin de l'oeil, jaugeant au mieux à quel point elle était ébranlée, ou non, par le courant d'air qui venait de les dépouiller. Mais tous deux paraissaient également sonnés, et surtout soulagés, maintenant qu'ils étaient à nouveau seuls dans la ruelle.

L'irlandais souffla un coup, sentant soudainement ses muscles s’engourdir, ses jambes s'enfoncer dans du coton. Il lâcha un rire nerveux pourtant, de ceux qui sont à la fois déplacés et indispensables afin d'atterrir face à une dure réalité en douceur. “C’est la partie de “un, deux, trois, soleil” la plus naze ever.” commenta-t-il. Son regard plus sérieux que les mots qui traversaient ses lèvres demandait, lui, si la jeune femme allait bien. Même s'il était difficile d'être à l’aise dans ses baskets (faute d’en avoir encore), dans l'immédiat, compte tenu des émotions dont ils se remettaient. Sa bouche était pâteuse, son esprit dissipé entre l’instant présent et celui qui venait de prendre ses jambes à son cou. Comme un court-circuit, après avoir douté que les événements se déroulaient bel et bien, il n’arrivait pas à croire que les choses avaient en effet pris fin. “Ou on vient de se prendre toutes les déboires possibles des 23% qui restaient en une soirée, et à partir de ce point plus rien ne peut nous arriver.” A moins qu’il ne reste, à tout hasard, un ou deux pourcents de poisse prêts à leur tomber dessus, comme une punaise sous les pieds nus de Ginny par exemple, ou une fiente d’oiseau chutant droit sur la veste de Ben. A dire vrai, à ce stade de la soirée, absolument plus rien ne pouvait l’étonner. Se passant de commentaires sur les doutes qu’insinuait Ginny à propos de sa masculinité, Benjamin se résigna à reprendre leur chemin, quel qu’il soit avant cet événement ou après. Il gardait ses mains dans ses poches, la tête un peu basse, dépité de constater que le monde entier pouvait admirer le trou dans sa chaussette gauche qui donnait un aperçu de ses orteils négligés. Il songeait aux papiers d’identité qu’il allait devoir faire refaire, toute la paperasse dont il se serait bien passé, la carte bleue sur laquelle il devait faire opposition, le nouveau téléphone qu’il allait devoir acheter -ce qui n’était pas un si mauvais point, réflexion faite. La jeune femme trouvait le moyen de plaisanter là où lui réalisait que leur histoire ferait un bon top 1 des pires dates de l’histoire de l’humanité. Et il aurait presque voulu que les choses fonctionnent. Il l’avait cru possible l’espace d’un instant. “Je crois que je préfère autant qu'on oublie malencontreusement d'évoquer cette partie de la soirée.” fit-il avec un léger sourire et un petit coup de manche final sur le coin de sa bouche pour s’assurer que toute trace de burger avait disparu cette fois.

Au bout de la rue, la vision d’une voiture de police dépita Ben plus qu’elle ne le soulagea. Ils étaient à cent mètres tout ce temps ? Malgré son travail, le brun ne portait pas spécialement les forces de l’ordre dans son coeur. Mais il y avait désormais un peu moins de place pour la compassion qu’il éprouvait pour ses anciens clients avant ce soir. Ginny avait raison sur un point ; faute de chaussures, ils n’allaient pas rentrer à pied, et faute de monnaie, ils ne pouvaient payer un taxi. C’était la voiture de police, ou rien. Il soupira. “Ca pourrait avoir un potentiel super classe si on arrive à leur faire activer le gyrophare.” se résigna-t-il, et il approcha des agents en traînant les chaussettes. Brièvement, il leur raconta leur histoire et parvint à faire fit des regards un brin amusé qu’ils portaient sur leur accoutrement post-burger slash post-agression. Ils acceptèrent de les raccompagner, et Ben leur indiqua son adresse. A l’arrière, sur la banquette qui avait peut-être accueilli pas mal de culs de délinquants divers et variés, le brun peinait à trouver un moyen de caser ses longues jambes -ce qui était un problème dont il avait l’habitude depuis qu’il avait gagné une tête entre ses quinze et seize ans. Pas moyen de se sentir confortable, il n’en avait que plus hâte de retrouver son appartement. La route ne serait pas trop longue, malgré le refus des policiers d’activer la sirène qui leur aurait instantanément dégagé le passage. “Tes boucles d'oreilles… t'aurais vraiment pas dû.” murmura Benjamin à Ginny une fois la voiture démarrée. Mais ce qui était fait était fait. “On va dire que c’est un investissement dans la durée. D’ici vingt ou trente ans, la montre sera collector et tu pourras en tirer peut-être plus que l’autre plouc en mettant tes bijoux en gage.” Du moins, il aimait le croire plutôt que de penser qu’elle avait troqué ses diamants pour un bout de plastique.

 
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benny ▲ walking on the moon Empty
Message(#)benny ▲ walking on the moon EmptyMar 18 Sep 2018 - 4:34

walking on the moon - Giant steps are what you take, I hope my legs don't break. We could walk forever, oh we could be together. Walking on the moon.
Le Ben que je connais prend une bonne poignée de minutes avant de refaire surface - ce à quoi je ne tiens évidemment pas rigueur. Encore sous le choc, j’adapte mes orteils à la froideur du béton, ignorant volontairement les restes de déchets et autres items tout sauf proprets qui pallient notre route de malheurs. L’entendre voir le côté positif de la chose m’arrache un rire entre l’hilarité nerveuse et le soupir de soulagement ; et c’est bien le mieux que je puisse faire compte tenu de la situation que je commence à peine à assimiler maintenant loin du danger. Le silence de la ruelle fait le pas sur la fuite bruyante de notre assaillant plus tôt, et mes épaules se détendent doucement à chaque parole que le Brody articule à mon intention. « J’aime mieux ça. Bon après, j’éviterais tout de même les endroits escarpés, les rues passantes et les boutiques de vaisselle en porcelaine, juste pour être sûrs. » sachant que de base j’étais bien la reine des maladresses, fallait pas non plus chercher le mal là où on savait pouvoir le trouver. Il commence doucement à fuir le lieu du crime et je ne mets pas très longtemps à me pointer à sa hauteur, trottinant au rythme de ses grandes enjambées, le regard au sol pour tenter d’éviter cailloux, pierres pointues, ou n’importe quoi passible de me filer le tétanos dans les 15 minutes à venir. « C’est dommage qu’il ne nous ait pas fracassé la tête sur le bitume. On aurait eu le parfait alibi de la perte de mémoire comme ça. »  et je bats des cils, hoche tout de même du menton lorsqu’il fait mention de ce volet de la soirée qu’on gardera pour les archives, pour l’anecdote dans quelques mois, quand la poussière sera retombée - littéralement. L’ironie de la voiture de patrouille qui tourne le coin n'amuse pas du tout Ben, et si je cache mon coup d’oeil amusé et le rire qui va avec, c’est docile que j’accélère ma marche pour que le bolide ne parte pas en sens inverse sans nous avoir aperçus. « Tu penses qu’ils le feraient?! » enjouée par la sirène, par les lumières, par les klaxons, par le spectacle tout en son et en lumière que Brody et moi espérons. Trop, et mes rêves déchus qui finissent déçus par la bande. Ils l’ont pas fait. Et ils ont pas non plus avancé leurs sièges les flics, nous refilant un banc arrière contrit d’où j’ai rapatrié mes jambes contre mon torse, pieds sur l’assise de façon à ce que Benjamin soit le moindrement du monde confortable, lui et ses pattes de gazelle.  

Je suis perdue dans mes pensées à écouter la radio et les différents appels portés sur la ville, les quartiers à déconseiller, les malfrats en fuite, lorsque le brun casse le silence, mentionne le vol assisté des boucles d’oreille comme une erreur. Secouant la tête de la négative, je me cale un peu plus dans mon siège avant de tourner la tête vers lui, honnête, un brin déçue tout de même. « J’ai qu’à attendre à mon anniversaire ou à Noël pour en voir de nouvelles apparaître. Ça a du bon d’avoir des parents friqués qui culpabilisent. » si ma voix se veut légère, si mes propos sont le moindrement dépourvus de sentiments, n’en reste qu’à l’intérieur, c’est un peu plus compliqué. Mais pas au programme de ce soir, pas à l’agenda, pas mon intention de parler de ça, de parler d’eux plus longtemps. « C’était exactement le plan. » jouant malicieusement des sourcils, voilà qu’il est bien plus facile de retrouver nos marques à rigoler, à fabuler, à hypothéquer n’importe quelle parcelle de blague même la plus effritée juste parce que. « Ben? Tu sais de quoi je rêve, là, tout de suite? » à mon tour de relancer, à mon tour de piquer sa curiosité le temps d’un tournant, et la bagnole qui est à peine à cinq minutes de la demeure Brody. « De prendre une longue douche et... » ouvrant à nouveau de grands yeux comme l’habitude de ce soir et mes remarques à double-sens trop facile trop naïves m’ont apprises, je panique de désapprobation, bien qu’il soit trop tard, ou presque. « Tsss. Une vraie douche, je pue. » à peine je bouge que je sens les différents parfums du casse-croûte, du bandit, de la ruelle, de la soirée jusqu’à maintenant transpirer de tous les pores de ma peau. Innocente jusqu’au bout, y’a même un sourire qui suit, et une inspiration assurée. « Et de commander de la pizza. Et de regarder des films jusqu'à pas d'heure. » une soirée typiquement nous, en somme. Un rendez-vous comme tous les autres qu’on a pu cumuler pendant presque deux ans, sans les voir comme ça, jamais. Un moment comme il y en a eu tellement avec lui, sans fioritures, sans extras, sans prises de tête. Juste être ensemble suffisait. Ceci amenant cela. « Pourquoi on a voulu jouer aux adultes, déjà? » curieuse, enfantine.

La voiture se stationne au 17 Redcliffe peu de temps après, sans gyrophares, sans traitement policier VIP. La suite logique de l'ascenseur, le chemin de croix entre le couloir et la porte de l’appartement, et l’impression qu’à partir de maintenant, comme Ben l’a assuré, tout devrait aller pour le mieux. En théorie. « Vous revenez tôt. » la babysitter au taquet qui accuse, levant la tête de son portable blasée comme personne, et le silence dans le salon qui semble un brin inquiétant connaissant nos gamins et leur complicité quasi innée. « On s’ennuyait trop des deux terreurs. » que je chante, cherchant les garçons des yeux, le sarcasme qui claque dans ma voix, le ton qui monte un peu de ne pas les voir installés à la renverse sur le canapé. « Maman! Je veux rentrer. » Noah dévale rapidement, son sac sur l’épaule, l’air décidé. Un coup d’oeil incertain par-dessus mon épaule à Ben, avant de prendre l’autre bonhomme dans mes bras. « Ils se sont disputés, apparemment y’a l’un d’eux qui a triché et depuis ils se parlent plus du tout. » « Noah, qu’est-ce qui est arrivé? Adam? » la question qui franchit mes lèvres avec douceur, loin d’une accusation, passe de mon fils à celui de Benjamin qui finit par nous rejoindre à son tour. « J’veux juste partir. » nuque arquée, et des questions plein le regard. Mes prunelles finissent par trouver celles de Ben à nouveau, et y’a du dépit qui s’y cache, de la déception, un peu de tout ça et encore. « Il restait 1% apparemment. »

 
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Message(#)benny ▲ walking on the moon EmptySam 22 Sep 2018 - 17:03

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Doctorants en Tetris, Ben et Ginny parvinrent à tenir à deux sur l’étroite banquette arrière de la voiture de police. Le jeune homme, à la fois trop secoué, trop blasé, et trop fatigué pour ça, ne songea pas à tous les gens de fluides qui avaient pu recouvrir ce tissu troué, la morve, la bave, le vomi dont il restait pourtant une délicate fragrance imprégnée jusque dans les fibres de la ceinture de sécurité.Il devait avoir de la sauce burger dans le nez, qui sait. Déçu et las face à tournure de leur soirée à deux, leur grande sortie d’adultes, la petite chance qu’ils s’étaient donnés pour jauger de la nature de l’affection qu’ils avaient l’un pour l’autre, Ben avait observé le paysage urbain quelques minutes avant que le silence ne lui paraisse trop pesant. En réalité, il ne voulait pas y penser, il ne voulait pas réfléchir, à ce que ce fiasco signifiait pour eux, s’il devait signifier quoi que ce soit en dehors du fait que deux poissards formaient forcément un méga-aimant à emmerdes. Le seul détail sur lequel il revint fut le moment où Ginny troqua ses boucles d’oreilles contre le morceau de plastique qui ornait son poignet. Et il savait, au fond, qu’elle n’avait pas effectué cet échange pour lui faire plaisir dans un moment où ce qu’il aurait pensé de la perte de la montre n’avait pas la moindre importance ; il avait conscience que si son instinct du moment avait été de protéger ce bout de rien, c’était parce qu’il avait réellement plus d’importance que de vrais bijoux. Sans s’en émotionner, il le remarquait à sa façon, et la réponse de Ginny à sa remarque lui donna raison. Il savait que c’était, de ne pas être en phase avec ses parents, même si leurs passifs avec leurs géniteurs étaient drastiquement différents. “Et on dit que les filles sarcastiques ne sont pas sexy.” fit-il pour détendre l’atmosphère, un sourire au coin des lèvres. Qu’il sache, personne ne disait réellement cela, mais il trouvait que cela sonnait bien pour un compliment signé Brody doublé d’une plaisanterie pour balayer l’amertume. Et puis, il n’y avait pas meilleur moment pour la complimenter sur son apparence qu’après toutes leurs péripéties, à cet instant précis. Mais derrière le sourire, l’irlandais était contrit, partagé ; il n’était pas habitué aux dates qui importaient, à ceux qui terminaient mal, et encore moins au combo des deux. Il voulait croire que ce n’était qu’un acte manqué, mais dans leur cadre actuel et face aux paroles d’une Ginny qui se remplongeait dans la peau de la bonne pote, il devinait qu’ils effectuaient plusieurs pas en arrière. Alors le plus bizarre n’était pas la tournure des événements, mais à quel point Ben s’en sentait déçu. Et c’était l’ampleur de cette déception qui faisait remonter à la surface cette éternelle peur de s’attacher, de s’ouvrir, de s’engager. “J’sais pas. C’était stupide.” souffla l’irlandais en haussant des épaules. Stupide comme de s’appuyer sur app au design cartoonesque pour se décider à faire le premier pas. Il n’était pas prêt pour tout ça. Comme toujours. Il ne l’était jamais. Il le serait toujours.

“C’est vrai que tu pues.”
souligna Ben une fois hors de la voiture, après avoir remercié les policiers qui les avaient crachés sur le trottoir face à son immeuble. La différence d’odeur entre l’air extérieur et le renfermé de l’habitacle se discernait d’autant plus une fois le nez dehors. Il ne pouvait pas manquer l’occasion de lancer ce petit tacle. Lui et Ginny arrivèrent à l’appartement et firent immédiatement face à une scène de drame Shakespearien, Noah et son sac sur l’épaule, Adam bras croisés sur le canapé, et la babysitter démunie. Le pourcentage de poisse résiduel leur tombait dessus, ce qui n’avait ironiquement rien d’étonnant lorsque se trouvait un gosse miraculé dans l’équation, lui qui regroupait à lui seul tous les affronts aux statistiques possibles. “On va s’en occuper, merci.” Et Benjamin congédia l’étudiante avec une paie moins généreuse qu’elle ne l’aurait espéré pour le job de ce soir. Ce n’était pas la première fois qu’elle gardait Adam, elle connaissait les horaires habituels du père et pouvait donc deviner lorsque quelque chose d’inhabituel avait lieu. Et cela avait commencé par le fait d’avoir l’oeil sur deux bonhommes au lieu d’un, et de ne pas avoir subi dix minutes de mélodie gutturale derrière la porte à minuit passé avant que la porte ne s’ouvre sur une bimbo déjà à moitié désapée. Ceci étant dit, elle savait donc filer discrètement et disparut en moins de deux. La cape de papa enfilée sur ses épaules, le brun s’approcha de son fils à la moue boudeuse. “Adam, tu peux m’expliquer ?” Il tourna la tête, serra les bras sur son torse et pinça sa bouche. “Qu’il s’en aille, c’est qu’un sale bébé.” Objection : argument irrecevable, vous avez le même âge. Pas le moment de plaisanter, Maître Brody garda son remake de Phoenix Wright pour lui seul. “Mais vous êtes potes, vous pouvez pas partir fâchés.” Le regard noir du petit garçon se posa sur lui comme deux canons fumants. Puis il glissa ses fesses hors du sofa et partit en direction de sa chambre. “Watch me.” jeta-t-il avant de claquer la porte, un art qu’il maîtrisait déjà bien avant l’adolescence.

L’écho du loquet fut la dernière chose qu’ils entendirent avant qu’un lourd silence ne s’installe. Benjamin ne se sentait pas le courage de prendre le problème à bras le corps, et à voir Noah, ce n’était de toute manière pas ce soir qu’une résolution diplomatique du conflit aurait lieu. Ses yeux se levèrent vers ceux de Ginny, un rictus désolé. “Je sais.” Ils feraient mieux de partir, elle le pensait, il le savait, et la soirée ne pouvait pas finir autrement pour eux. Sans savoir comment dire au revoir, Ben ne contenta de l’escorter jusqu’à la porte. Il ne se risqua pas au moindre contact avec la jeune femme et conserva une main dans la poche, l’autre sur la poignée de la porte d’entrée. “Rentrez bien.” dit-il avec un faible sourire et le rythme cardiaque sans dessus-dessous. Selon le théorème Brody, toute la poisse leur était tombée dessus ce soir, et plus aucune ombre ne devrait tâcher le tableau la prochaine fois. Mais il n’était pas certain de vouloir retenter l’expérience. Celle-ci lui avait suffit pour constater que Ginny s’était grignoté une plus grande place dans son coeur qu’il ne l’aurait pensé. Il avait été nerveux et il avait eu peur pour elle. Il avait été bien, très bien, un court instant. Désormais, il ne savait quoi penser, et il ne voyait aucune pirouette de clown pour se tirer de là.

 
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