Douglas est arrivé à Brisbane depuis quelques semaines, jusqu'alors, il vivait dans une chambre d'hôtel tout en essayant de trouver une annonce pour une colocation. Entre ses études et tout le reste, il ne lui restait plus beaucoup de temps pour faire le restant.
Quelques semaines plus tard, le jeune Anderson avait enfin trouvé une annonce pour une personne cherchant un colocataire. Les choses avaient suivi leur cours, les deux hommes s'étaient rencontrés, puis Archie, puisque c'est ainsi qu'il s'appelait avait pris sa décision. Douglas emménageait avec lui.
Au départ, tout avec une allure de paradis, le logement était parfaitement rangé, chacun menait sa vie, mais avec les semaines qui s'étaient écoulées, les choses avaient perdu de leur beauté. Le bazar s'installait petit à petit et pour Doug qui ne supportait pas ça, il avait tendance à mettre son nez un peu partout dans l'optique de rendre ce logement vivable.
Plus d'une fois, Archie et Douglas se sont pris la tête, en soit, ils s'entendent bien mais ils sont tellement différents l'un de l'autre que forcément, ils sont obligés de se prendre la tête. Notamment sur le ménage de l'appartement. Et d'ailleurs, le jeune anglais avait fini ses cours un peu plus tôt, il avait révisé pendant plusieurs heures et maintenant, il se mettait au ménage. S'il avait su à quoi il s'engageait, peut-être qu'il n'aurait rien fait..
T’es fatigué. C’est tout. T’es fatigué de t’en prendre plein la gueule. Tellement que tu en arrives presque à oublier les rares sourires sincères de ceux qui ne restent jamais assez longtemps. Ceux pour qui tu aimes donner ton temps – et ceux qui t’ont presque donné envie de ce boulot, au départ. T’es fatigué. Fatigué de mal dormir, fatigué de laisser les cauchemars t’envahir. Ceux qui sont vides de sens, ceux qui sont juste un reflet de toutes les choses que tu n’oses laisser échapper. Tu voudrais que Neptune revienne. Tu voudrais t’allonger près d’elle, et parler. Dire tout ce qui te pesait – y compris son départ – et te sentir un poil plus léger. T’aimerais entendre ses blagues idiotes et voir ses grimaces. Mais elle s’est barrée. Sans même un téléphone – ou du moins, sans te laisser un numéro, sans même te filer un truc pour la contacter. T’as tenté. T’as balancé des e-mails, sans même être vraiment certain qu’elle les lisait – et est-ce que, quelque part, tu n’aurais pas déjà un peu abandonné ?
T’as pas vraiment envie de rentrer. Tu le sens pas, ce soir. Tu te sens pas assez bien pour croiser le regard de ton nouveau colocataire, qui cherche toujours à bien faire. Mais bon, tu n’allais pas rester seul dans cette baraque éternellement. T’es resté longtemps au volant de ta vieille caisse. A fixer la fenêtre, sans savoir quoi faire. Sans savoir si tu allais avoir la force de te lever. Putain, t’es misérable. T’es ridicule, à sombrer pour des conneries. T’es ridicule, à t’étaler ainsi. Dis pas que c’est parce que tout s’enchaine. Dis pas que c’est la faute de Neptune qui se barre. La faute de Caligula qui a décidé de filer ailleurs pour un temps - pour trouver d’autres culs, peut-être plus intéressants. Ta faute à toi, pour être incapable de changer, pour avoir perdu Hadès une nouvelle – et probablement dernière – fois. Et puis, ce colocataire. Tu ne devais pas lui rendre la vie facile, n’est-ce pas ? A t’engueuler un peu avec lui, à l’envoyer chier quand t’avais juste pas envie d’essayer. A ne pas essayer.
T’as trouvé le courage de passer la porte d’entrée. Odeur de produit ménager qui te monte presque au nez. C’est pas que c’est désagréable, c’est juste que tu n’as presque plus l’impression d’être chez toi, tellement les choses étaient rangées. Pourquoi ? Pourquoi est-ce qu’il se donnait toujours du mal pour déplacer les trucs que tu laissais derrière toi ? « Sal … » as-tu commencé, alors que ton regard se posait sur lui. Tu t’es interrompu. « Qu’est-ce que tu fous ? » as-tu repris d’une voix blanche, alors que tu sentais la colère t’envahir. C’est de plus en plus souvent, en ce moment, non ? Cette colère, cette impression que tout implose. « Pose ça. » dis-tu, alors que tu lui arraches presque le bibelot qu’il tient entre les mains pour le remettre brusquement dans le carton. « Pourquoi faut toujours que tu ranges tout comme ça, hein ? C’est une maladie, ou quoi ? » enrages-tu presque. « J’t’ai demandé de ranger ça ? C’est pas à toi, putain. » C’est à Neptune. C’est juste ça.
Les journées se passaient plutôt bien du côté du jeune anglais. Il oscillait ses révisions pour ses cours, son stage au cabinet d'avocats où il avait été embauché puis ses sorties dans les différentes associations où il était bénévole. Ça ne faisait pas si longtemps qu'il était en ville, pourtant, certains endroits le faisait sentir comme s'il avait toujours vécu ici, comme si c'était sa terre natale. Douglas passait alors assez peu de temps à la maison, celle qu'il partageait avec un autre jeune homme d'environ son âge. Ils n'étaient pas les meilleurs amis du monde, mais chacun avec son mode de vie et ils essayaient de cohabiter du mieux qu'ils pouvaient. Pourtant, bien souvent des disputes éclataient sans qu'il n'y est de réelles raisons, mais la gentilesse de Douglas faisait en sorte qu'il battait toujours en retraite, parce que cette maison n'était pas la sienne et qu'elle ne le sera jamais.
Lorsqu'il était à la maison, son côté maniaque faisait qu'il était toujours en train de tout ranger. Ne supportant pas le désordre, il rangeait tout ce qui lui passait sous la main, même si ce n'était pas ses affaires. Il pensait que ça ferait plaisir à Archie d'avoir un endroit propre et rangé dans lequel rentré le soir. Il faisait aussi le ménage une à deux fois par semaine. Pour ce qui est de sa chambre, c'était quasiment tous les jours, voire tous les deux jours s'il n'avait pas le temps le soir. Jusqu'alors, tout s'était passé pour le mieux. Chacun des deux garçons mettaient de l'eau dans son vin, mais ce n'était que pour retarder l'inévitable, et il faut croire que c'est ce soir qui était le soir de trop.
Rentré un peu plus tôt du travail, le jeune garçon s'était affairé au ménage dès lors qu'il avait mis un pied dans la maison. Archie n'était pas là et ça lui facilitait la tâche qu'il soit seul. Douglas avait terminé le ménage, il passait désormais au rangement, et depuis qu'il était arrivé dans. Être maison, il y avait des cartons qui traînaient dans un coin, son côté maniaque fait qu'il se sentit obligé d'exposer les objets entreposés dans ceux-ci afin de pouvoir débarrasser l'endroit. Mais au moment où il commença à prendre un bibelot dans ses mains, la porte d'entrée s'ouvrit et Archie sembla s'arrêter net en constatant ce qu'il faisait. Il avait déjà manifesté son énervement face à la tendance compulsive de Douglas à devoir tout nettoyer et ranger, mais ce soir, il semblait être passé au stade du dessus.
Ne sachant pas vraiment ce qu'il devait dire ni faire, il laissa le jeune homme lui arracher l'objet des mains tout en le regardant stupéfait. Si Douglas ne lui avait jamais fait part de son enfance douloureuse, le geste qu'il eut à son égard le fit reculer de quelques pas, comme si l'étudiant craignait de recevoir un coup. Il en avait déjà trop reçu étant enfant, il n'était pas prêt à subir ça de nouveau. Sans un mot, il laissa Archie déverser sa colère sur lui sans rien dire. Il se contenta d'encaisser, parce que même s'il répondait, il savait que ses interrogations n'étaient pas de réelles questions.
Son tempérament timide, renfermé, sensible et surtout son extrême gentilesse fit qu'il se sentit prit d'un sentiment de culpabilité qui lui rongea l'estomac. Peut-être qu'à l'avenir il devra se contenter de ne ranger et nettoyer que sa chambre, ça lui évitera sans doute les problèmes.
" - Pardon je suis désolé.. Je pensais juste que.. Je pensais que ça te soulagerait que je déballe ces cartons pour te faire moins de travail.."
Mais Archie avait raison, ce n'était pas à lui, il ne devait pas mettre son nez partout juste parce qu'il était incapable de contrôler sa pulsion de voir un lieu propre où qu'il aille.
" - Je suis désolé je ne voulais te mettre en colère. Je vais aller passer la soirée dehors pour te laisser tout seul."
Il n'était pas prêt à subir sa colère toute la soirée, il avait besoin de calme. Douglas ira sans doute se réfugier à l'église puis au cimetière par la suite. Peut-être même qu'il passera la nuit dehors, ou qu'il rentrera que très tard pour éviter les tensions entre les deux hommes.
Tu te sens imploser. Tu te sens exploser. Tu déverses ta colère sur le garçon qui ne semble rien avoir demandé. Il recule quand tu te fais à moitié violent, comme effrayé. Pendant une fraction de seconde, tu te sens monstrueux. Pendant une fraction de seconde, tu te sens hideux. Mais tu continues. Tu continues de lui crier dessus. « Pardon je suis désolé.. Je pensais juste que.. Je pensais que ça te soulagerait que je déballe ces cartons pour te faire moins de travail.. » Rien que ses phrases t’énervent. Rien que ses mots te foutent hors de toi. Le son de sa voix. « Je suis désolé je ne voulais te mettre en colère. Je vais aller passer la soirée dehors pour te laisser tout seul. » Il enchaine et tu voudrais lui foutre des baffes. Tu voudrais lui foutre des claques, juste pour qu’il arrête de geindre comme ça. Juste pour qu’il arrête d’avoir l’air trop gentil. Pitoyable. Misérable, lamentable. « Mais c’est pas possible d’être aussi niais, putain. » que tu grognes entre tes dents. T’as envie de frapper un truc. T’as envie de cogner quelque chose. De foutre le bordel. De tout déranger. Juste pour avoir l’impression de te retrouver. Juste pour cette douce sensation. « Pourquoi tu voudrais m’faire moins de travail ?! Pourquoi t’as besoin de faire ça, hein ? D’être toujours gentil, d’être toujours serviable ? » Tu sens ta voix qui part dans tous les sens. Tu l’entends. Incapable de correctement se moduler. Incapable de se maîtriser. « Sois un connard, cinq minutes. J’sais pas, envoie moi chier, au moins ! » Dis-moi que j’abuse, dis-moi que j’exagère. Dis-moi d’aller me faire foutre. Que je suis pas bien. Que ça déconne grave au fond de mon crâne. « Tu vas faire tout pour me faire plaisir, ou quoi ? » demandes-tu encore, presque hargneux. « Beh tu sais quoi ? J’me tire. T’as même pas besoin de te forcer à te barrer pour me laisser. Comme ça, tu peux rester là à arranger quatre fleurs au millimètre près pour avoir l’impression que tout est putain d’ok et que t’as ta place ici. » Tu l’as presque bousculé. Comme si tu espérais le faire réagir. Tu l’as bousculé, en sachant pertinemment que tu dépassais les limites que tu t’étais fixé. T’as claqué la porte. T’as claqué la porte d’entrée, le plus fort que tu pouvais. Comme si ça allait tout arranger. Comme si ça allait te calmer. Furie. Tu t’es senti complètement abruti moins de trois secondes après. Tu t’es haï tout aussi vite. Peut-être que tu devrais faire demi-tour, et t’excuser tout de suite. C’était même certain. Mais t’as continué, dans ta connerie. T’as continué presque en courant, jusqu’à ce que tu te trouves un semblant de calme. Jusqu’à ce que ton cœur te souffle d’arrêter. Jusqu’à ce que tu t’en veuilles assez. Mauvais Stitch. Gribouillis empli de rouge.
[…]
La mer résonne dans tes oreilles. Le sable froid se glisse entre tes oreilles – tu ne te souviens même pas d’avoir viré tes chaussures, ni même le reste de tes fringues. T’as plongé dans l’eau glacée, juste pour essayer de te remettre les idées en place. Peut-être que tu espérais juste un choc thermique. Ta tête est sortie de l’eau en moins de deux secondes, alors que ton souffle se faisait haletant. Comme si c’était impossible pour toi de reprendre ton souffle. Comme si c’était impossible pour toi de laisser l’air entrer à nouveau dans tes poumons. T’es sorti avec précipitation. T’es sorti, pour te recroqueviller vers tes fringues, tremblant. Calmé. Stitch bleu, glacé.
[…]
Combien de temps es-tu resté là-bas ? Combien d’heures, sans dire un mot, à juste fixer l’océan ? Tu ne sais pas. Il fait juste froid. T’as froid. La chair de poule sur les bras, et les lèvres violacées. Tu trembles de partout, et t’as juste envie de rentrer. De t’excuser. Tu as commandé des sushis, comme si ça allait t’aider. Tu t’es arrangé pour arriver en même temps que le livreur et les attraper. Peut-être que tu n’allais pas le retrouver. Peut-être qu’il avait fait ses valises, et qu’il s’était barré. Tu as ouvert la porte, doucement. Univers presque silencieux. T’es un peu anxieux. Beaucoup. Alors, tu frappes timidement à sa chambre. Peut-être qu’il n’était pas parti … Si ? « Douglas … ? Je … J’suis désolé … J’voulais pas dire ce que j’ai dit et heu … » dis-tu à travers le battant, embarrassé. Sincère, mais embarrassé. « J’sais pas si t’as faim ou si t’as déjà mangé mais … J’ai commandé des sushis, s’tu veux … » finis-tu. Comme une manière de dire que tu t’étais calmé, que tu n’allais plus l’agresser.
Douglas avait toujours été quelqu'un d'extrêmement gentil, qui voulait le bien partout. Même si c'est une vision un peu utopique, il essayait de faire du mieux qu'il pouvait que aider chaque personne qu'il pouvait, et avec son colocataire c'est ce qui se passait. Sachant qu'il n'avait pas forcément le temps de faire le ménage ou autre, il se disait que s'il le faisait lui-même, en plus du fait qu'il était maniaque et ne supportait pas la poussière, ça lui ferait plaisir de rentrer dans un lieu propre sans y avoir touché non ? Au final, il s'était totalement trompé, rien de tout cela ne lui faisait plaisir, il était même très furieux envers lui et alors qu'il crachait son venin sur la seule personne qui se trouvait devant lui, le jeune anglais ne savait plus comment réagir ni quoi dire. Il devait affronter sa colère, peut-être qu'Archie se sentirait mieux après avoir balancé tout ce qu'il pensait, peut-être que ça creverait l'abcès qu'il y avait entre eux depuis que Douglas était arrivé dans ces lieux.
Les propos fusèrent, aucun d'entre eux n'étaient gentils, Archie ne cherchait pas à ménager Douglas et, il allait même jusqu'à lui reprocher d'être gentil. Généralement on reprochaient aux gens d'être méchant, de faire du mal aux autres, et bien cette fois-ci c'était le contraire. Ne désirant pas affronter la tornade plus longtemps, par peur tout simplement qu'il en vienne à lever la main sur lui, il avait décidé de le laisser seul pour la soirée, il trouvera bien un autre endroit où aller, même si ce n'est que se poser au cimetière l'instant que les heures défiler, mais le jeune homme le prit de court et c'est lui qui quitta l'endroit, laissant alors tout seul le jeune étudiant totalement bouleversé par ce qui venait de se passer.
Une fois que la porte avait claquée, Doug était allé dans sa chambre pour réfléchir à tout ce qui venait de se passer. Il s'assit sur le bord de son lit laissant ses pensées défiler à toute vitesse. Il savait pertinemment qu'Archie n'allait pas, et ce depuis qu'il avait emménagé avec lui, il avait espéré que ses soucis pourraient s'arranger, mais toucher à ce carton était visiblement la pire bêtise qu'il avait faite en ces lieux. À qui appartenait-il ? À un proche de sa famille ? À un ami ? Aucune conclusion ne vient s'imposer à lui, mais alors qu'il constata le silence dans la pièce, il n'eut pas le courage de continuer le rangement. Et d'ailleurs, dorénavant, il ne fera plus le ménage dans les autres pièces, il s'occupera que de sa chambre espérant que ça suffise à limiter les conflits entre eux.
Les propos d'Archie raisonnaient dans son esprit. Pour avoir l’impression que tout est putain d’ok et que t’as ta place ici. Avait-il vraiment sa place ici ? Il en doutait fort, et ce, depuis son arrivée. C'est la raison pour laquelle, sans réfléchir plus longtemps, il avait vidé son armoire, ramasser tout ce qui lui appartenait puis il avait bouclé sa valise. Elle était là, à l'entrée de sa chambre. Combien de temps s'était écoulé depuis que le jeune homme avait quitté la maison ? Il l'ignorait, mais les choses ne cessaient de tourner dans sa tête et il avait atrocement mal. La remise en question était difficile, personne ne lui avait jamais reproché d'être gentil, et puis, c'est dans sa nature, il a toujours été ainsi, malgré qu'il aurait pu devenir un connard comme l'a si bien mentionné son colocataire, il aurait pu après avoir encaissé les coups donnés par son père, mais il avait choisi une toute autre voie.
Toujours assis sur son lit, il avait prit un livre de droit dans lequel il s'était plongé, mais malgré sa passion pour ce domaine, il n'arrivait pas à se concentrer pleinement. Tout était prêt, il n'avait plus qu'à faire rouler sa valise et quitter ces lieux, ça signifierait la fin de leur colocation et Archie pourra reprendre pleine possession de sa maison. Mais Douglas n'arrivait pas à faire le dernier pas, celui que le séparait de l'extérieur, il était bien trop inquiet pour son ami et colocataire. Il allait mal et avait besoin d'aide, même s'il ne l'avait jamais demandé, Douglas voulait être là pour lui. Encore ce fichu besoin de rendre tout le monde heureux. Il y a des personnes qui seront à jamais malheureuses, mais il veut essayer, même s'il a vu le résultat ce soir. Archie fait peut-être partie de ces personnes pour qui il ne pourra jamais rien faire, en dehors d'être son punching ball quand rien ne va.
D'un côté, Doug lui en voulait d'avoir été aussi méchant à son égard, il avait appuyé là où ça fait mal et il en était conscient. Même s'il n'avait pas osé verser les larmes qu'il retenait, le jeune homme avait craqué lorsqu'il s'était retrouvé seul. Il avait presque eu l'impression de faire un bond en arrière lorsque son père rentrait et qu'il était ivre. C'était sa hantise et maintenant, il devait affronter Archie. Fallait-il rentrer ce soir ? Si oui, serait-il ivre lui aussi ?
Il ne tarda pas à le savoir puisque la porte d'entrée s'ouvrit, puis des pas se firent entendre dans le salon puis dans le couloir. Ils s'arrêtaient juste devant sa porte. Douglas retient son souffle de peur d'assister à ce spectacle qu'il avait déjà vu bien trop de fois avec son père. À sa voix, tout semblait aller, il avait dû réfléchir aussi de son côté pendant son absence. Douglas se leva et ouvrit la porte de sa chambre, laissant alors vu sur sa valise qui était prête et attendait plus qu'à être tirée hors de cette maison.
" - Je sais très bien que tu pensais ce que tu as dis. Simplement ça fait toujours mal de l'entendre.."
Une fois la porte ouverte, il retourna s'asseoir sur son lit sans toutefois affronter le regard de son interlocuteur.
" - Tu sais.. J'aurai pu devenir le connard dont tu parlais tout à l'heure, la vie aurait pu me faire devenir comme ça, mais j'ai choisi de ne pas l'être. Est-ce que ça te plait réellement d'appuyer là où ça fait mal ? Est-ce que ça te fait jubiler de savoir que tu as le pouvoir de détruire une personne simplement avec tes mots ?"
Il n'avait pas élevé la voix, parce qu'il ne le faisait jamais. Il avait toujours été quelqu'un de calme et posé.
" - Peut-être que les gens que tu côtoie en temps normal sont habitués à ton comportement et qu'ils n'y font plus attention, mais je ne suis pas ton punching ball Archie, je suis simplement ton colocataire, enfin plus pour longtemps. Je n'arrive pas plus à supporter tout ça, toute cette colère que tu gardes en toi, il faut que tu te fasses aider, que tu ailles voir quelqu'un qui pourra t'aider à extérioriser cette douleur qui te ronge de l'intérieur, mais moi je n'y arrive plus. J'ai pas payé pour ça au début, pas pour vivre dans la peur, alors je pense que c'est mieux qu'on arrête là. Tu retrouveras ta maison désordonnée et moi, un peu de calme."
Il lui avait fallu un certain courage pour lui avouer tout cela. Surtout qu'il avait peur de lui, Archie ne s'était sans doute pas rendu compte de l'ampleur avant ce soir. Son discours allait avoir deux effets : soit le faire réagir et qu'il puisse reprendre sa vie en main, soit le mettre autant en colère que lorsqu'il était parti et avait claqué la porte quelques heures plus tôt. C'est vrai qu'en y repensant, Doug n'avait pas mangé, mais la vérité c'est qu'il avait l'estomac tellement noué qu'il était bien incapable d'avaler quoique ce soit.
" - Je ne suis peut-être pas le colocataire de tes rêves, mais ce n'est pas pour autant que tu dois me traiter comme si j'étais inférieur à toi. Tout le monde a ses défauts et j'ai les miens, je n'ai jamais prétendu être parfait et je ne le serai jamais.." dit-il en se levant pour aller se planter devant la fenêtre de sa chambre, les bras croisés comme s'il cherchait à masquer sa vulnérabilité.
La porte qui s’ouvre. Ton regard qui se pose sur la valise. Ton cœur qui se serre. Tu avais merdé. Ça clignotait en rouge dans ton cerveau : tu avais merdé. « Je sais très bien que tu pensais ce que tu as dit. Simplement ça fait toujours mal de l'entendre.. » Tu as grimacé. Tu as grimacé, alors que tes doigts glissaient dans tes cheveux. Abruti. Pauvre abruti. « Douglas, je … » commences-tu. Mais il parle. Il s’installe sur son lit – et non celui de Neptune – et il parle. Doucement. Doucement, mais tu sens toute la détresse dans sa voix. Peut-être une once de colère. De la déception. Est-ce que ça te faisait jubiler de détruire les autres juste avec des mots ? Est-ce que ça te faisait plaisir de simplement détruire les autres ? Sentiment de nausée. C’était ce que tu étais ? Tu te donnes envie de vomir. Ce n’est pas bien compliqué. « Peut-être que les gens que tu côtoie en temps normal sont habitués à ton comportement et qu'ils n'y font plus attention, mais je ne suis pas ton punching ball Archie, je suis simplement ton colocataire, enfin plus pour longtemps. Je n'arrive pas plus à supporter tout ça, toute cette colère que tu gardes en toi, il faut que tu te fasses aider, que tu ailles voir quelqu'un qui pourra t'aider à extérioriser cette douleur qui te ronge de l'intérieur, mais moi je n'y arrive plus. J'ai pas payé pour ça au début, pas pour vivre dans la peur, alors je pense que c'est mieux qu'on arrête là. Tu retrouveras ta maison désordonnée et moi, un peu de calme. » Tu sens ta gorge se serrer. Tu sens tes épaules s’affaisser encore un peu. Et ce sentiment qui grandi, encore et encore. Ce sentiment qui t’envahi. Il avait peur de toi. Il vivait dans la peur à cause de toi. Tu fais peur aux autres. Tu fais du mal aux autres. Mentalement. Physiquement. « Je ne suis peut-être pas le colocataire de tes rêves, mais ce n'est pas pour autant que tu dois me traiter comme si j'étais inférieur à toi. Tout le monde a ses défauts et j'ai les miens, je n'ai jamais prétendu être parfait et je ne le serai jamais.. » entends-tu, alors que ton regard l’accompagne jusqu’à sa fenêtre. T’es toujours sur le pas de la porte. Tu as l’impression que tu as besoin de toute la force du monde, juste pour actionner tes jambes et entrer. Tu as déposé les sushis sur le lit, sans savoir comment commencer. Tu t’es assis sur la moquette. Tu t’es assis, le dos contre le côté du lit. Les pieds en chasse-neige, comme si ça allait te sauver. Tu sens les mauvaises pensées t’envahir. La stupidité. Quelque part, tu as envie de te faire du mal. Tu as envie de continuer ton autodestruction, juste pour savoir si ça allait faire disparaître tout ce qu’il y avait de mauvais en toi. Tu secoues la tête. Tu secoues la tête, pour faire fuir tout ça. Parce que ça ne servirait à rien, pas vrai ? Parce que ça n’aiderait pas. Parce que ça ne vous aiderait pas. « T’as pas … T’as pas besoin d’être parfait. » souffles-tu, doucement. « Au fond, j’crois même que t’es le colocataire que tout le monde rêverait d’avoir. ‘fin. Y’a des gens assez cons pour jamais être contents, genre .. moi. Mais voilà. » essaies-tu de lancer, en forçant un sourire. « Au final, j’suis probablement l’un des pire colocs qu’on voudrait avoir. » ajoutes-tu. Tu t’es arrêté là. Ne serait-ce que pour faire une pause. Ne serait-ce que pour laisser poser tes mots, au moins un peu. Réfléchir aux suivants, surtout. « J’avais pas envie de te blesser. » lâches-tu soudain, alors que tu commences à tripoter la moquette sous tes mains. « Vraiment. C’est … pas en accord avec tout ce que je t’ai balancé tout à l’heure, mais vraiment, j’voulais pas te blesser. Et j’le pensais pas. Pas de la manière négative dont je l’ai dit, du moins. » Tu tentes de formuler autrement. Tu tentes d’expliquer, de t’expliquer. « T’es gentil. Trop, peut-être – et tu risques de te faire bouffer pour ça – mais t’es gentil. Une bonne personne, je veux dire. Pas un idiot. Et … C’est pas si grave si t’aimes bien tout ranger. Mais … J’suis vraiment, vraiment bordélique, tu sais. » souffles-tu. « Laisse-moi le faire, la prochaine fois, ok … ? Ou … Juste, demande-moi. Si tu trouves que je traine trop à ranger, demande-moi. C’est peut-être … Je sais pas, bien aussi ? Genre … Bon pour moi, et peut-être que … Je sais pas comment dire. Tu risques de trouver ça bête, mais … C’est un peu comme si je me rangeais, moi. A l’intérieur. » Peut-être que ça pourrait aider. Peut-être que ça pourrait t’aider. Tu essaies de faire des gestes, pour expliquer. Tu essaies de faire des gestes, pour t’occuper les mains, au moins.
« Tu crois vraiment que je devrais aller voir quelqu’un … ? » demandes-tu, après avoir laissé filer quelques instants. Tu as recommencé à tripoter le sol, nerveusement. A faire glisser tes paumes dessus, comme si le contact allait t’apaiser. « C’était … C’était juste ses affaires. J’aurais pas dû … J’aurais pas dû péter un câble comme je l’ai fait, juste parce que tu y touchais. » confesses-tu, le regard perdu dans le vide. « J’ai l’impression d’péter des câbles tout le temps, en ce moment. » Et tu n’étais même pas sûr que ce n’était que depuis qu’elle était partie. Est-ce qu’elle s’était enfuie parce que tu lui avais fait peur, à elle aussi ? « La seule fois où j’suis venu ici depuis qu’elle est partie, c’était … La dernière fois aussi. » commences-tu, après une grande inspiration. « Pour ranger les affaires qu’elle avait oubliées, et les mettre dans les cartons avant que … Avant que t’arrives. » continues-tu. Tes doigts sont venus se glisser entre tes lèvres. Tu as commencé à te ronger les ongles – comme s’il t’en restait. « J’sais pas, on devait avoir genre … 15, 16 ans quand on a commencé à traîner ensemble. A juste plus se lâcher. Parce que j’me sentais ok avec elle. Comme si j’avais le droit d’être moi-même – pas les morceaux que je t’ai offerts jusqu’à maintenant. Et … Je sais pas. Elle m’acceptait, et inversement. Elle était là, quand j’avais besoin. J’étais là, quand elle avait besoin. Elle m’en voulait pas d’être comme j’étais. Elle m’en voulait pas là où les autres m’en voulaient. J’imagine que c’est toujours le cas. » dis-tu, avant d’inspirer bruyamment. « Et je sais pas … Elle … ‘fin. Elle est imprévisible, parfois, j’te l’accorde. Genre c’était un peu … La surprise, parfois. Souvent, même. Mais là … Elle est partie. Genre … Elle a fait ses valises, et elle est partie. Comme ça. Sans vraiment prévenir. » Tu sens ta voix trembler, un peu. Tu la sens s’éteindre, dans un soupir. « Et j’comprends toujours pas pourquoi, tu vois ? Genre … Pourquoi elle m’a même pas … proposé. Ou je sais pas quoi. C’est égoïste, je crois. Mais … Je sais pas. » Tu fermes les yeux. Tu fermes les yeux, juste pour essayer de remettre un peu d’ordre dans ton âme. Juste pour essayer de ne pas craquer, parce que c’était peut-être inapproprié. « Mais ça justifie pas mon comportement de merde. Ça me donne aucun droit sur toi. » réalises-tu, doucement. Peut-être que le problème, c’était simplement toi. Toi plus que tout ça.
« … Tu vas vraiment partir ? » demandes-tu, après de longues secondes de silence. « Ou est-ce que j’ai le droit à une seconde chance ? » Une occasion pour te rattraper. Une occasion, peut-être pour essayer de réparer tout ce que tu avais brisé.
Au fond, Douglas était pleinement conscient qu'il aurait dû partir pendant qu'il en avait encore la possibilité, dieu sait ce qu'Archie sera capable de faire pour le retenir ici. Il aurait dû partir pendant qu'il était encore seul en ces lieux, désormais il était trop tard, il devait faire face à cet homme qui l'avait brisé avec quelques mots avant de partir en claquant la porte. Qu'avait-il fait ? Où était-il allé ? Malgré cette douleur qui serrait son coeur, le jeune étudiant ne pouvait s'empêcher de s'inquiéter pour son colocataire. Il n'avait pas un fond méchant et il le savait, il fallait juste qu'il en prenne conscience pour remonter cette pente qui lui semblait insurmontable. Même si ça ne lui ai jamais arrivé, bien souvent Doug sait que c'est dans ces moments là que les gens fuient pour aller picoler et oublier tous leurs problèmes. Était-ce le cas ? Archie avait-il bu ? Si oui, la même scène qui jouait dans son cerveau depuis des années avec son père, allait devenir bien réelle ce soir.
Le jeune anglais avait prit son courage à deux mains pour dire tout ce qu'il avait sur le coeur, tout ce qu'il avait ressasser durant l'absence de son interlocuteur. Pourtant, lorsqu'il prononçait ce discours, les mots venaient les uns après les autres sans avoir de réel sens. Construisait-il des phrases correctes ? Il n'en était même pas sûr étant donné que son cerveau fonctionnait indépendamment de son corps, tout du moins, depuis qu'il avait aperçu la silhouette d'Archie entrer dans sa chambre. Ou plutôt, rester sur le seuil de celle-ci.
Suite à ses propos, Archie semblait comme ... bouleversé ? Ou bien il prenait conscience réellement de ce qu'il faisait endurer au jeune homme. Jusqu'alors, il n'avait rien dit pour la simple et bonne raison que ce n'était pas dans son tempérament de se mettre en colère, de dire les choses dans le simple but de blesser ceux à qui les propos s'adressent. Douglas n'était pas ce type de personne et ne le sera jamais. Mais il a le coeur sur la main er voir Archie s'auto-détruire était trop compliqué à supporter pour qu'il puisse réellement lui en vouloir d'avoir agit ainsi. Il devait d'abord déceler ce mal qui le ronge avant de pouvoir pleinement l'aider. Si toutefois il en a la possibilité et si le jeune homme le laisse faire.
Le Archie que Douglas connaissait n'avait jamais été aussi bavard, peut-être parce qu'ils n'avaient jamais vraiment pris le temps non plus pour se connaître, pour s'apprivoiser. Le tout étant, ce dernier était en train de lui présenter ses excuses. Maladroites certes, mais c'était des excuses, et Douglas n'était pas en mesure de les refuser. Il n'était pas rancunier au point de lui en vouloir toute sa vie, il était bien trop adorable pour faire une telle chose. Et puis, il faisait partie des personnes qui croient en la seconde chance.
Au moment où son interlocuteur lui dit qu'il était gentil, bien trop gentil d'ailleurs, et que c'est sans doute ça qui allait le perdre, il ne peut que sentir ce sentiment de culpabilité l'envahir. On le lui avait déjà dit, mais comment pouvait-il devenir ... moins gentil ? Il y avait un mode d'emploi pour construire un meuble mais jamais pour devenir quelqu'un d'autre.
" - Sinon ce qu'on peut faire, c'est que chacun range ses affaires, et pour ce qui des pièces communes on a qu'à instaurer un roulement, comme ça, chacun mettra la main à la patte."
Douglas avait envie de lui dire de mentionner ce à quoi il ne devra plus toucher à l'avenir afin d'éviter de retomber dans ce genre de situation. S'ils pouvaient éviter un nouveau conflit ça n'en sera que mieux. Aussi bien pour l un.qje pour l'autre.
" - Oui je le pense vraiment. Tu sais, ce n'est pas une honte d'aller voir quelqu'un quand ça ne va pas. Au contraire, c'est un pas en avant, pour montrer que tu te reprends déjà en main. Certains trouvent ça bizarre, mais moi, plutôt que d'aller voir un psychologue, je vais à l'église, voir le pasteur, ça m'aide à remettre mes idées en place, à comprendre ce que je dois faire ou ne pas faire et essayer de repartir sur de bonnes bases."
C'était la première fois que Douglas évoquait son mode de vie devant Archie. Ils étaient tellement différents qu'il ne s'attendait pas non plus à ce qu'il comprenne. Il lui demandait juste de ne pas le juger pour sa façon d'agir.
Le jeune Anderson écoutait avec attention tout ce que lui confiait son interlocuteur. Il était en train de lui livrer la raison pour laquelle il avait perdu les pédales depuis quelques temps. Et face à ça, Douglas ne pouvait qu'être compréhensif. Ce n'était pas une simple amie d'après les propos que tenaient Archie, il était amoureux d'elle, et qu'il me qualifie de la sorte ou non, il souffre d'une peine de coeur. D'autant plus qu'elle est partie sans donner de nouvelles et c'est très certainement toutes les questions qu'il se pose qui le ronge de l'intérieur. Mais que pouvait-il faire pour l'aider ? Se transformer en fille ? Non. Essayer de retrouver la demoiselle en question ? Non plus. Peut-être qu'il pourrait l'aider à reprendre goût à la vie, à sortir dans des soirées où il serait à même de rencontrer des gens bien et peut-être de nouer des liens ? Enfin, comme il ne mettait jamais le pied dans ce genre d'endroit ça risquait d'être compliqué, mais au fond, il était prêt à beaucoup pour aider Archie.
" - Je suis partisan du parti qui dit que tout le monde à le droit à une seconde chance, même le pire des hommes, alors je crois avoir répondu à ta question, mais j'ai besoin que tu me promette de ne plus t'énerver comme ça. Je.. J'ai eu peur que tu me frappes et je ne supportera pas de vivre dans la peur une fois de plus, je l'ai déjà fait trop longtemps."
Pendant six ans. Six ans durant lesquels Douglas était effrayé quand il entendait la porte d'entrée. Il ne dormait jamais sereinement de peur que son père ne surgisse dans sa chambre pour déverser sa colère sur lui. Face à lui, il n'était qu'un enfant et ignorait tout simplement qu'il avait la possibilité de changer le cours des choses. Maintenant qu'il en était conscient, il ne laissera plus un climat de peur s'installer. Il n'est pas assez fort pour le vivre à nouveau.
" - Je pense sincèrement que tu devrais essayer de tourner la page de tout ce que tu as pu vivre avec cette fille. Elle est partie et ne reviendra probablement jamais. Je sais que c'est dur à entendre, surtout venant de quelqu'un comme moi mais ... tu dois sortir pour rencontrer d'autres personnes. Tu trouveras forcément une femme qui s'intéresse à toi et vice versa, mais il faut que tu es pu faire le tri dans ton esprit, dans ton passé pour te permettre d'être à cent pourcents dans une nouvelle relation. Tu as le droit d'être heureux Archie. Tu n'es pas un mauvais garçon, tu te laisses simplement guider par ta colère et ta rancoeur."
À l'entendre parler, on pourrait presque croire qu'il est psychologue. Il essayait de trouver les mots justes, les mots qui pourraient faire réagir le jeune homme, sans pour autant le blesser et l'enfoncer dans la noirceur qui semblait déjà bien présente dans son organisme.
Tu parles. Tu parles, comme si ça pouvait aider. Trop peut-être. Mais peut-être que ça te fait du bien. Ou que c’est déjà le premier pas vers quelque chose. Tu hoches la tête, alors qu’il te propose d’instaurer un roulement pour le rangement et le ménage. Peut-être que c’était la meilleure des choses à faire. « C’est … scolaire mais … ça me va. Puis c’est mieux si on en fait un peu tous les deux. » Peut-être que tu te sentirais un peu plus confortable. Un peu moins gamin, en quelque sorte. « Oui je le pense vraiment. Tu sais ce n'est pas une honte d'aller voir quelqu'un quand ça ne va pas. Au contraire, c'est un pas en avant, pour montrer que tu te reprends déjà en main. Certains trouvent ça bizarre, mais moi, plutôt que d'aller voir un psychologue, je vais à l'église, voir le pasteur, ça m'aide à remettre mes idées en place, à comprendre ce que je dois faire ou ne pas faire et essayer de repartir sur de bonnes bases. » Tu hausses les épaules. Tu hausses les épaules, alors que ton index et ton majeur viennent frotter le creux de ta paume. « J’sais pas si c’est vraiment bizarre, en vrai. De pas forcément parler à un psy mais à … quelqu’un d’autre. » lâches-tu, doucement. « … Tu crois en Dieu, non ? Mais genre, dieu Dieu. » essaies-tu d’expliquer. C’était pas dérangeant. Tu ne savais pas comment formuler, mais ce n’était pas dérangeant. « J’veux dire … Je crois en quelque chose, aussi. C’est pas un jugement sur ce en quoi tu crois ou pas. Juste … Le côté … catholique et mmh … toutes les actions que des gens en ont leur nom c’est … parfois … bordélique ? » souffles-tu, avant de lâcher un rire nerveux. En quoi est-ce qu’il croyait ? Est-ce qu’il avait des convictions particulières ? Tu angoisses, un peu. « Mais je peux … Je peux essayer de parler à quelqu’un. Quand même. » Peut-être que ça lui ferait plaisir. Peut-être que ça t’aiderait, aussi. Qui sait ?
« Je suis partisan du parti qui dit que tout le monde a le droit à une seconde chance, même le pire des hommes, alors je crois avoir répondu à ta question, mais j'ai besoin que tu me promette de ne plus t'énerver comme ça. Je.. J'ai eu peur que tu me frappes et je ne supporterai pas de vivre dans la peur une fois de plus, je l'ai déjà fait trop longtemps. » Tes doigts sont venus agiter tes cheveux, encore. Quelque chose t’alarme. Quelque chose t’inquiète. Tu n’étais pas le premier. A le frapper, ou du moins, il pensait que tu étais capable de le frapper. « Je … Merci. » souffles-tu, doucement. « J’essaierai de plus m’énerver, … pas autant que ça. » Parce que c’était impossible de ne jamais s’énerver. Mais, tu pouvais au moins essayer d’être plus doux. « Mais … Je … Tu veux en parler ? C’est pas juste si j’suis le seul à raconter ma vie. » essaies-tu de plaisanter. « … Désolé. » Tu te sentais merdique. Tu te sentais maladroit, sans savoir comment l’aider à se sentir mieux. A se sentir plus rassuré. « J’avais pas l’intension de te frapper … Tu sais ? » Parce que tu étais nul pour te battre. Parce que la dernière fois, c’était avec Ahren, et que tu t’en voulais déjà assez.
« Je pense sincèrement que tu devrais essayer de tourner la page de tout ce que tu as pu vivre avec cette fille. Elle est partie et ne reviendra probablement jamais. Je sais que c'est dur à entendre, surtout venant de quelqu'un comme moi mais ... tu dois sortir pour rencontrer d'autres personnes. Tu trouveras forcément une femme qui s'intéresse à toi et vice versa, mais il faut que tu es pu faire le tri dans ton esprit, dans ton passé pour te permettre d'être à cent pourcents dans une nouvelle relation. Tu as le droit d'être heureux Archie. Tu n'es pas un mauvais garçon, tu te laisses simplement guider par ta colère et ta rancoeur. » Tu t’es mordu les lèvres. Tu as laissé échapper ce petit bruit embêté. Ce petit bruit qui montre que tu es embêté. « … Tu n’as jamais .. remarqué ? » Tu n’avais jamais ramené quelqu’un, depuis qu’il était arrivé ? Tu essaies de te souvenir. Tu essaies de refaire le cours de tes soirées. Est-ce que tu n’avais fait qu’aller chez les autres ? Est-ce que vous n’aviez fait que vous croiser ? « Je suis pas … Pas spécialement hétéro, en fait. » Tu l’observes, un instant. Tu essaies de jeter un regard vers lui, pour savoir s’il te considérait déjà comme un monstre, ou si ça allait. « J’suis pas gay, non plus. Je … J’aime les gens, en quelque sorte. Pas juste … les filles et pas juste … un ou une personne ... ou relation. » Tu baisses la tête. Tu n’as pas honte de toi. La situation est juste … étrange. Etrange pour toi. « J’comprendrais si ça te dérange. ‘fin, ce que j’veux dire par là, c’est que t’as pas besoin d’approuver ça. Mais juste … Pas de discours sur le fait que je brûlerais en enfer, ou … je sais pas quoi d’autre. » Tu essaies de mettre les choses au clair. Tu essaies de le prévenir, pour éviter les malentendus. Pour éviter que la discussion ne dérape. Parce qu’on t’avait déjà assez blâmé pour ça. Parce que tu arrivais encore à te blâmer assez pour ça.
Pour que les choses aillent mieux, Douglas avait pensé instaurer une sorte de secteur pour que chacun puisse mettre un peu la main à la patte. Si déjà chacun d'entre eux se mettaient à ranger leur affaire, peut-être que ça ira mieux entre eux, puis, Archie ne pourra plus lui reprocher de toucher à des affaires qui ne sont à lui, ça pourrait permettre que les tensions s'apaisent un peu. Du moins, il espérait que ça suffirait.
Douglas relève la tête vers son interlocuteur. S'il se sentait plus à l'aise à parler avec quelqu'un, qu'il en soit ainsi, tant que ça pouvait l'aider, ce n'est certainement pas lui qui irait à l'encontre de ça. Certainement pas. Au contraire, il voulait que son colocataire puisse aller mieux, qu'il puisse se sentir bien dans sa peau et peut-être que les deux puissent lier une véritable amitié.
Sans vraiment s'en rendre compte, dans son discours, Douglas venait de révéler sa véritable personnalité. Non pas qu'il en avait honte, mais simplement c'était très souvent sujet de discorde alors ce n'est pas le genre de choses qui confiait lors d'une première rencontre. Mais cette fois-ci, il avait failli et Archie lui avait posé cette fameuse question. Avec un sourire, il lui répondit.
" - Oui je crois en Dieu, j'ai été élevé ainsi dans une famille catholique mais ce n'est pas pour autant que je suis complètement borné sur certains sujets. Quand j'ai besoin d'aide, c'est vers Dieu que je me tourne, je me confie à lui, je lui demande conseil et c'est comme ça que j'arrive à rester sur le droit chemin."
Doug était conscient que c'est quelque chose qui peut paraître étranger pour certaines personnes, et très certainement que c'était le cas pour Archie, mais il n'attendait pas à ce qu'il accepte ce genre de mode de vie. Il lui demandait simplement de ne pas le juger sur la chose.
" - Il y a plusieurs côtés dans la religion tu sais, c'est pas tout blanc ou tout noir, il y a toujours quelque chose de plus nuancé. Je crois en Dieu, je crois qu'il y a quelqu'un au-dessus de notre tête qui peut décider de notre sort, mais je ne suis pas non plus à un extrême de la religion. Et quand bien même ce serait le cas, je sais que c'est parfois dur à comprendre pour quelqu'un qui n'est pas pratiquant."
La religion c'est un peu comme la politique, ce sont des sujets qu'il vaut mieux éviter d'aborder si on veut éviter les disputes.
" - Je ne t'oblige pas à aller parler à quelqu'un Archie, je ne le ferai jamais. Tu fais ce qui te semble juste, mais si tu es plus à l'aise pour parler avec quelqu'un d'autre, je peux être cette oreille attentive si tu le souhaites."
Après tout, les deux jeunes hommes ne se connaissaient pas tant que ça, alors il pouvait bien se confier à lui s'il en avait l'envie. S'il décidait d'aller voir quelqu'un d'autre, alors il ne lui tiendra pas rigueur. C'est que Douglas souhaitait, c'était que son colocataire puisse trouver la paix et être heureux avec lui-même.
Tandis que Douglas se confiait à son colocataire quand au fait qu'il ne souhaitait pas vivre de nouveau dans un climat de peur, c'était sans se rendre compte qu'il venait d'ouvrir la brèche pour parler de son passé avec son père. Avait-il envie de se confier sur ce sujet douloureux ? Avec Archie en plus ? Peut-être que ça lui permettrait de mieux comprendre et d'essayer de mieux contrôler ses excès de colère.
" - Non je n'en sais rien.. Mon père a passé une partie de mon enfance à me frapper parce qu'il était trop ivre pour savoir que ce qu'il faisait était mal. Ma mère s'est barrée sans donner de nouvelles, il n'a pas supporté. Puis il a commencé à boire et à force de boire, il a perdu son boulot. J'ai été obligé de témoigner contre lui et il a terminé en prison par ma faute. Parfois, il m'arrive de m'en vouloir, de me dire que j'aurai peut-être pu faire autrement sans pour autant l'envoyer derrière les barreaux. Et d'autres fois je me dis que c'est la seule chose qu'il méritait réellement.
Le jeune Anderson ne s'était jamais confié sur le sujet à qui que ce soit jusqu'à ce soir. Vient ensuite sur le tapis le sujet de la personne qui pourra rendre heureux son colocataire et sa réponse le surprit plus qu'elle ne l'aurait dit. Il se mit même à rigoler avant de s'arrêter, de peur que ce soit mal pris.
" - Mais tu sais, l'église n'est pas un tyran non plus. Oui il y a certains principes à respecter concernant la foi et la religion, mais tu aimes qui tu veux tant que tu es heureux, ce n'est pas moi qui vait te dire quoique ce soit. Il ne faut pas croire que l'église c'est forcément contre les personnes qui ne sont pas hétérosexuelles, ou même contre les personnes qui ont un enfant avant le mariage. Tout est relatif, il y aura toujours des personnes qui te jugeront parce que pour elles, c'est contre nature, mais je ne fais pas partie de celles là. Je suis croyant, et même si je ne suis pas quelqu'un de très ouvert au niveau vie sociale, je le suis au niveau de l'esprit et je ne jugerai jamais quelqu'un parce qu'il aime les hommes ou les femmes. C'est ta vie, ton coeur, ton corps, tu fais les choix que tu juges bon, ce n'est pas moi qui irait à l'encontre de ce que tu désires faire."
Il voulait qu'Archie soit conscient que Douglas n'était pas un tyran de la religion. Oui il était pratiquant et croyant, mais il n'était pas aussi fermé que pouvait l'être les personnes d'âge plus avancé qui avait reçu encore plus de principes avec une éducation catholique.
Il n’était pas complètement borné. Sur certains sujets. Tu étais déjà un minimum rassuré. Peut-être que ça allait aller. Peut-être que ça pouvait, finalement, bien se passer. « Il y a plusieurs côtés dans la religion tu sais, c'est pas tout blanc ou tout noir, il y a toujours quelque chose de plus nuancé. Je crois en Dieu, je crois qu'il y a quelqu'un au-dessus de notre tête qui peut décider de notre sort, mais je ne suis pas non plus à un extrême de la religion. Et quand bien même ce serait le cas, je sais que c'est parfois dur à comprendre pour quelqu'un qui n'est pas pratiquant. » Tu hoches la tête, doucement. « J’dis pas que t’es extrémiste, eh. Mais … J’sais pas. J’pense pas que ce soit mal, la religion, au fond. Et puis, c’est rassurant, quelque part, tu crois pas ? De juste se dire qu’on est pas tout seul, à errer sans but, comme ça. C’est genre … Ça donne une petite mission, quoi. » souris-tu, doucement . « Mais après, j’crois pas que ce soit justifié de … l’imposer aux autres, ou de faire du mal en son nom. Puis quelque part, … je sais pas. J’aime bien m’imaginer que y’a une présence quelque part, pas forcément au-dessus de nos têtes et .. qu’on n’est pas obligé de cracher sur les autres pour ce qu’ils sont. Genre, c’est pas un concours à qui aura le plus d’adeptes, ou laquelle sera élue best religion ever, tu vois ? » continues-tu. « L’essentiel, c’est que tu te sentes à l’aise, j’imagine. Peu importe en quoi ou en qui tu crois. »
Tu pouvais faire ce que tu voulais. Tu pouvais aller parler à quelqu’un d’un peu plus professionnel que Douglas. Quelqu’un avec qui tu serais à l’aise. Quelqu’un qui pourrait comprendre – ou du moins t’aider. Tu hausses les épaules, doucement. Au final, peut-être qu’il fallait simplement essayer. Et vous continuez. Vous continuez de discuter, et tu essaies de gratter un peu la peinture. Tu essaies de comprendre qui est Douglas. Ce qui le perturbe, autant. Son père. Son père qui cogne, bourré. Une descente aux enfers qu’il te décrit. « J’suis désolé, Douglas. » souffles-tu, doucement. « T’as pas à t’en vouloir, tu sais ? C’est pas une situation facile, pour lui comme pour toi. Puis … Peut-être que ça l’aidera, aussi. De rester loin de l’alcool, et de pouvoir réfléchir à tout ça. » Peut-être que c’était mieux que de cogner inlassablement sur son fils. Peut-être que c’était mieux que de se bourrer la gueule jusqu’à sombrer.
Tu t’es retrouvé à expliquer ton orientation sexuelle. Tu t’es retrouvé à essayer de mettre un peu de lumière sur ta vie, à essayer de faire comprendre qui tu étais. Ce que tu étais. A demander de ne surtout pas juger. De ne pas conseiller sur comment te repentir, sur comment redevenir normal aux yeux de la société. Et puis il rit quand tu lui parles de brûler en enfer. Il rit, et tu te retrouves à rire aussi, un peu nerveusement au départ, puis un peu plus sincèrement. Il t’explique son avis, et tu sens, en fond de ton cœur, une once de soulagement. « Merci, Douglas. » lances-tu, sincère, alors que tu jettes un regard dans sa direction. « J’ai entendu tellement de trucs, même de la part de gens non-croyants, alors … Je sais pas. J’veux dire … Je sais que mes choix plaisent pas forcément. Je peux … comprendre, en quelque sorte. Mais c’est toujours blessant d’être rejeté quand on se sent en confiance et qu’on tente de dire les choses, et qu’on s’fait juste refouler. Comme si d’un coup, y’avait plus que ça qui comptait. Puis … Quand je vois tous ces God hates fags dans la rue … Je préfère … je sais pas. Mettre les choses au clair. » Tu souris, doucement. Peut-être que c’était mieux, plutôt que d’éclater une nouvelle fois contre lui, surpris par une remarque hargneuse. « Faudrait plus de gens comme toi, quand même. Au moins pour les enfants catholiques qui croient en Dieu et qui se font jeter de chez eux pour qui ils sont. » dis-tu, alors que tu te tortilles pour attraper l’assiette de sushis. « Viens là ! » lances-tu à l’attention de ton colocataire. « Faut les manger, quand même. » ris-tu, alors que tu en attrapes un entre tes doigts. « Quand tu dis … Pas très ouvert niveau vie sociale, c’est parce que tu sors jamais … ? » demandes-tu, encore. « Parce que si t’as envie, même si c’est un truc tranquille comme un ciné, tu m’dis, hein. J’serais toujours ok. » Parce que tu lui devais bien ça, au fond. Tu pouvais bien lui montrer que tu étais capable de faire un effort, et que ce n’était pas une simple cohabitation, mais une colocation.
Douglas était assez triste de voir comment les personnes interprétaient la religion. Ils la faisait devenir quelque chose qu'elle n'était pas, ce qui faisait qu'après, des personnes non-croyantes comme Archie avait une fausse idée de ce qu'était réellement la religion. Après c'est comme partout, il y a plusieurs niveaux dans la croyance, Douglas était loin d'être le plus croyant de tous, il était encore assez ouvert sur des sujets dont d'autres ne voudraient même pas entendre parler.
" - C'est pas tant le côté rassurant que je ressens, c'est plutôt le fait de me dire que j'ai toujours quelqu'un, même lorsque je suis loin de chez moi, j'ai toujours mes repères quelque part et ça m'aide à avancer."
Après forcément, il y avait aussi le côté rassurant qu'évoquait Archie, le fait de savoir que quoiqu'il arrive, on est jamais véritablement seul, quelqu'un veille toujours sur nous où que l'on soit, et oui, c'est rassurant. C'est d'ailleurs à ça que le jeune garçon s'est raccroché quand il a été placé en famille d'accueil après avoir condamné son père à de la prison ferme.
" - Je suis tout à fait d'accord, et puis de toute façon, dans la Bible comme tous les autres livres sacrés, il n'en jamais fait mention qu'on a le droit de faire du mal à qui conque en son nom, c'est plutôt tout le contraire. C'est mentionné dans la partie où on évoque les péchés à ne pas commettre durant notre existence."
Suite à ça, Douglas s'était confié à Archie concernant ce qu'il avait subi étant gamin. Ce dernier s'excusa, mais le jeune homme avait juste envie de lui dire qu'il n'avait pas à le faire, il n'était en rien responsable du comportement irresponsable de son père. Et quand bien même ce serait le cas, ce n'est pas lui qui l'a encouragé à boire ni même à frapper son fils, donc il n'a pas à s'excuser, il n'y a que son père qui devrait avoir à le faire.
" - C'est ce qui m'arrive de penser aussi, mais je ne pense cesser de me dire qu'il côtoie quand même de dangereux criminels alors qu'il n'en ai pas vraiment un. J'ai beau lui en vouloir, je ne lui souhaite pas le pire non plus, même je devrais probablement.. Pour être franc, j'appréhende ce jour où il retrouvera sa liberté.. Il devait faire dix ans, et ça fait dix ans.. Si ça se trouve il est déjà sorti et je ne le sais même pas.."
Autant Douglas pouvait paraître adulte sur certains aspects de la vie, autant, quand il évoquait le sujet de son père, il ressemblait encore à l'enfant apeuré qu'il avait été lorsqu'il entendait la porte d'entrée se refermer et son père l'appeler inlassablement avec sa voix pateuse.
Suivant la discussion, Archie évoqua ensuite son orientation sexuelle, et bien que Douglas ne lui ai pas dit qu'il était plus ou moins du même acabit que lui. Il ne pouvait pas se dire pleinement hétérosexuel, mais il ne pouvait pas non plus se qualifier d'homosexuel. Il était comme sa religion, un juste milieu dans tout cela, bien qu'il n'en ai jamais fait part à qui que ce soit. Il était cependant heureux des propos de son colocataire. Ça lui faisait chaud au coeur.
" - C'est la société actuelle qui veut ça, on est jugé pour un physique, pour une manière de se vêtir, pour des opinions politiques, pour une religion, pour une orientation sexuelle. Quoiqu'on fasse, il y aura toujours qui trouvera le moyen de nous critiquer alors autant vivre comme on l'entend non ?"
C'est comme ça qui l'entendait lui, et même si certaines personnes ne jugeaient sans le connaître, même si ces mêmes critiques le blessaient bien souvent, il était fier de rester fidèle à lui-même et ça, ça n'avait pas de prix. Combien de personnes se laissaient embarqués dans des traquenards juste pour se faire accepter d'un groupe de personnes ? Il refusait de devenir ce type de personne, et tant pis si sa façon de vivre déplait.
" - Quand je dis pas très ouvert au niveau de ma vie sociale, c'est simplement que je ne suis pas genre fêtard, à sortir tous les soirs pour aller dans des bars ou autre. Je suis plutôt réservé comme garcon, et entre mon stage, mes études et le temps que je passe dans des associations, je n'ai plus vraiment de temps pour moi-même. Et puis comme certains diraient je suis du genre coincé comme gars tu vois.."
La question c'était de savoir s'il voulait avoir ce temps pour lui ? S'occuper l'esprit en faisant différentes activités lui permettait de ne pas ressasser son passé, de ne pas penser à cette libération de son paternel dont il avait parlé avec Archie quelques instants plus tôt. Car, même s'il ne le disait pas, et que jusqu'ici il n'en avait jamais parlé, chaque jour il y pensait.
Ne pas être perdu. Même lorsqu’on est loin de chez soi. Tu hoches la tête, doucement. Tu comprenais. Tu comprenais son point de vue, aussi. Peut-être que c’était là à ce que tu disais. Peut-être que c’était différent. Tu n’en avais aucune idée. A nouveau, tu as hoché la tête alors qu’il te parlait de la Bible. Tu as hoché la tête. Nulle part, il n’était mentionné de faire du mal aux autres. Et tu étais presque sûr que personne n’avait écrit, au départ, qu’une religion était vraiment mieux qu’une autre. Qu’il fallait être quelqu’un plutôt que quelqu’un d’autre. Tu étais soulagé. Rassuré. Rassuré d’être avec quelqu’un qui pouvait comprendre. Rassuré d’être avec quelqu’un qui pouvait t’accepter. Qui pouvait accepter les autres. Tu n’essaierais pas de le changer. Jamais. Et tu espérais, tellement, tellement fort, que personne ne le changerait jamais.
Et il te parle de son père. Est-ce qu’il côtoyait de vraiment de dangereux criminels ? « Peut-être qu’il n’est pas avec les pires non plus, tu sais. Peut-être que ce n’était pas … drôle pour lui, c’est sûr. Mais peut-être que ce n’était pas ce que tu imaginais non plus. » Tu souffles. Tu souffles, alors que tu t’appuies un peu plus contre le lit. « Mais … Je ne sais pas en fait. » Tu souffles. Tu pouffes, légèrement fatigué de toi-même. « Désolé, j’ai pas la science infuse. J’sais pas ce qu’il a vécu, et je ne le saurais probablement jamais. Mais … Mais … Si jamais il débarque ici, si jamais il te fait du mal … J’le laisserais pas faire. Okay ? Même si, well … J’ai pas les plus gros bras du monde … J’ferais de mon mieux. Promis. » Peut-être que c’était le mieux que tu pouvais lui proposer. Ta présence. Pour toutes ces fois où tu avais été exécrable. Pour toutes ces fois où tu l’avais blessé. Tu pouvais faire quelque chose. Tu pouvais au moins le soutenir quand ce serait compliqué.
Et vous parlez de ton orientation. Tu sens ton cœur se réchauffer. Tu le sens se serrer, doucement, et tu pourrais presque enlacer Douglas. « T’sais, pour le truc de tout à l’heure … J’te demande pas qu’on fasse un pacte ou quoi que ce soit. J’te demande pas de me promettre quoi que ce soit. J’te le dis juste pour que tu le saches. » Pour qu’il n’aie pas l’impression de te déranger si jamais il avait besoin d’en discuter. « Quand je dis pas très ouvert au niveau de ma vie sociale, c'est simplement que je ne suis pas genre fêtard, à sortir tous les soirs pour aller dans des bars ou autre. Je suis plutôt réservé comme garçon, et entre mon stage, mes études et le temps que je passe dans des associations, je n'ai plus vraiment de temps pour moi-même. Et puis comme certains diraient je suis du genre coincé comme gars tu vois.. » Tu hausses les épaules. Tu souffles. « C’est pas grave, tu sais ? De pas passer tes soirées à te prendre des cuites dans les bars. » Tu ris, doucement, avant d’avaler un autre sushi. « Mais faut que tu prennes un peu de temps pour toi, quand même. Parce que sinon … Si tu le fais pas au fur et à mesure, le jour où ça arrive … Tu imploses. Et tu te blesses autant que tu blesses les autres. » Comme tu l’avais fait avec lui. Comme tu l’avais fait avec beaucoup d’autres. « Même si tu te donnes à fond pour les autres … Ne t’oublie pas trop, d’accord ? » demandes-tu. « Le monde ne mérite pas de se passer de gens comme toi. » Est-ce que c’était l’instant où tu t’en allais subtilement ? Est-ce que c’était le moment où tu fuyais calmement, juste pour le laisser savourer l’instant ? Comme dans un film. Comme dans un beau récit. Tu n’en avais aucune idée. Peut-être que tu devais simplement cesser de parler. Alors, tu t’es levé. « Je vais me chercher un verre d’eau. Et probablement mettre le Cercle Des Poètes Disparus sur Netflix. Si t’as envie, t’as l’droit de venir te vautrer dans l’canapé avec moi, et regarder. » Tu as eu un léger sourire. Comme pour l’encourager. Si regarder ce film l’intéressait. Et, tu as filé.
Douglas ne savait plus très bien ce qu'il se passait. Il y a encore quelques instants, ils étaient en train de se crier dessus parce qu'il avait mis son nez dans des affaires qui ne lui appartenaient pas, et maintenant ils étaient tous les deux en train de se faire des confessions sur leur vie respective alors qu'ils ne devraient pas. Ils ne se connaissaient probablement pas assez pour aborder ce genre de sujet, et pourtant c'est bien ce qu'ils étaient en train de faire.
Certes le jeune anglais était croyant et pratiquant, mais il y avait tout de même des limites dans la pratique de sa religion. De la religion en général d'ailleurs. Toutes ces personnes qui osent mettre sur le dos de cette force supérieure le poids de leurs crimes, c'est totalement absurde et jamais il n'acceptera que de telles personnes tiennent ces propos. Jamais dans n'importe quel livre sacré sont marqués de telles choses. Au contraire, c'est mentionné d'être là pour les personnes qui en ont besoin. Enfin ils n'étaient pas là pour faire un cours de catéchisme de toute façon, donc le sujet était clos. Mais le jeune étudiant avait simplement besoin de prouver à Archie qu'il n'était pas celui qui viendrait lui reprocher ses agissements parce qu'ils ne font pas parti du "même monde". Il sera toujours compréhensif avec lui, même s'il ne se cachera pas pour lui donner son avis pour autant.
Puis, Anderson enchaîne sur son père. Dix ans. C'est la durée pendant laquelle il a été enfermé derrière les barreaux et jamais, pas une seule fois, Douglas n'est venu lui rendre visite. Il est partagé entre la rancoeur qu'il a envers lui de l'avoir ainsi blessé étant enfant, alors que sa mère était partie sans crier gare. Mais il éprouvait aussi une certaine culpabilité de l'avoir mis lui-même en prison. Et s'il y avait fait des rencontres musclées ? Des personnes qui lui auraient retourné le cerveau pour l'intégrer à leur bande ? Il ne cessait de se poser des questions, d'autant plus qu'il ignorait la date exacte de sa sortie. Maintenant, il craignait encore plus de sortir dans les rues de peur de tomber nez à nez avec son géniteur. Au fond, peut-être que ces dix années lui ont permis de réfléchir et de se reprendre en main. Peut-être qu'il a changé et qu'il cherche juste à rattraper le temps perdu. Est-ce Douglas lui donnerait cette chance ? Pour l'instant il n'en avait aucune idée. En revanche, pour les propos qu'Archie lui avaient adressé, il en était touché. Beaucoup. Ses yeux brillants le démontrait.
Concernant l'orientation sexuelle de son colocataire, Douglas n'avait rien à ajouter. Sur le coup, il se sentait même coupable d'être ici, peut-être que c'était aussi à cause de lui que ... qu'il n'avait jamais ramené de personnes à la maison.
" - Tu sais si.. Enfin je veux dire.. Si tu as besoin de ramener quelqu'un ici, tu peux me le dire, j'irai passer la nuit à l'hôtel ou bien quelque part pour te laisser tranquille.. Je ne veux pas que tu te prives pour moi.. Ce n'est pas parce que j'ai personne et que j'ai jamais eu personne que tu dois te cacher pour moi.."
Ce serait injuste de l'en priver parce que lui ne connaît pas ce manque là. Puis, le sujet revient sur lui, sur son côté timide et réservé. Sur son absence de sortie et son travail acharné. Évidemment, là-dessus entre Archie et lui, c'était le jour et la nuit, donc il ne s'attendait pas réellement qu'il le comprenne. Mais il espérait tout de même ne pas subir de jugement trop dur de son colocataire.
" - Je.. Oui je sais.. Mais.. Je sais pas, c'est comme si j'en avais besoin.. Je ne suis pas comme tous les autres, passer mon temps à des soirées, boire de l'alcool à s'en faire tourner le cerveau ou même sortir avec tout un tas de femme ou d'homme, ça n'a jamais été ma préoccupation.. Je sais que je ne suis pas normal, en tout cas que je ne suis pas normal par rapport à ce que la société impose aujourd'hui.."
Il en était conscient c'était déjà une bonne chose, mais il n'arrivait pas à y remédier. Quand il prenait du temps pour lui, c'était comme s'il le perdait. Douglas a besoin d'être actif, peut-être pour camoufler un manque d'affection, une absence de parents ou tout simplement parce qu'il avait toujours vécu ainsi et n'avait jamais été initié au restant.
Le jeune étudiant hocha la tête aux paroles d'Archie, le laissant alors quitter la pièce dans laquelle il dormait, mais il ne le suivit pas pour autant. Il avait besoin de calme, de réfléchir à tout ce qui venait de se passer, à ce qui venait d'être dit. Peut-être qu'il était temps qu'il apprenne à vivre réellement. Après tout, il avait tout de même vingt-six ans, bientôt vingt-sept ans, alors il serait temps qu'il s'ouvre aux autres et tente de découvrir la vie et le monde extérieur. Il s'était écoulé une trentaine de minutes avant qu'il ne se décide à quitter sa chambre pour rejoindre son colocataire dans le salon. Il avanca sur la pointe des pieds, comme s'il redoutait de déranger. C'était ça son problème, il était trop gentil, et Archie le lui avait dit. Il devait devenir plus dur, plus ferme et surtout moins naïf.
" - Est-ce que.. Je peux venir ?" demanda-t-il en murmurant comme s'il avait peur de se faire engueuler d'avoir pris une telle décision.
HRP:
Peut-être qu'après ta réponse on pourra clôturer le rp sauf si tu vois autre chose à dire
Peut-être que vous êtes en train de tisser quelque chose. De reconstruire quelque chose. Quelque chose d’un peu mieux que tous les pots brisés que vous vous étiez jetés. Quelque chose avec des paroles un peu moins tranchantes. Peut-être que ses mots t’aidaient à aller de l’avant, finalement. « Tu sais si.. Enfin je veux dire.. Si tu as besoin de ramener quelqu'un ici, tu peux me le dire, j'irai passer la nuit à l'hôtel ou bien quelque part pour te laisser tranquille.. Je ne veux pas que tu te prives pour moi.. Ce n'est pas parce que j'ai personne et que j'ai jamais eu personne que tu dois te cacher pour moi.. » Tu l’as écouté, un peu surpris. Tu as retenu un rire de justesse. « T’inquiète pas pour ça, d’accord ? » Tu pouvais aller chez les autres. Tu pouvais, toi, prendre une chambre. Vous pouviez vous faire silencieux. « Puis si jamais tu … Tu veux ramener quelqu’un … T’embête pas pour moi, ok ? » souris-tu doucement. Tu n’irais pas râler. Peut-être que tu le taquinerais un peu le lendemain, comme tu l’aurais fait avec Neptune, mais sans plus. Et tu l’écoutes, encore. Tout un tas de femmes ou d’hommes, eh ? Tu souris, doucement. Peut-être qu’il cachait bien son jeu, au fond. Peut-être qu’il ne savait pas lui-même ce qu’il voulait. Qui il était. Peut-être que ce soir, tu n’allais pas l’embêter avec ça. « L’opposé n’est pas considéré comme … normal non plus, t’sais. Pour cette société-là. Alors … Ce n’est pas si grave. Tant que t’es heureux au final. » Tant qu’il se sentait bien. Même si c’était seul, même si c’était avec quinze chats, ou simplement avec l’élu(e) de son cœur. Tu lui souhaitais simplement d’être heureux. « Et … Si ça peut te rassurer, Neptune n’est pas si normale que ça non plus. Je dirais bien que c’est de la faute de la chambre, mais … J’suis pas comme il faut non plus. Alors. Mettons ça sur le dos de la baraque entière, et te tracasse pas pour le reste. »
Tu souffles. Tu souffles, souris, et tu décides qu’il est temps pour toi de filer. Tu t’éclipses. Tu as pris le verre d’eau que tu t’étais promis, et tu as commencé à parcourir Netflix pour trouver le film. Tu n’as pas cherché à spécialement à l’attendre. Peut-être juste un peu. Peut-être quelques secondes, avant que tu ne te décides à appuyer sur le bouton. Et il s’est lancé. Grandes lettres blanchâtres annonçant la production. Et ce démarrage sur la préparation du cortège. La musique qui vient envahir la pièce. Et tu t’es perdu dans ce film. Tu t’es complètement égaré, à boire les paroles des acteurs. Et tu l’as entendu, finalement. « Est-ce que.. Je peux venir ? » Et tu as souri. Tu t’es décalé, en lui faisant signe de venir s’installer. « J’vois pas pourquoi tu pourrais pas. » souris-tu. Pourquoi est-ce qu’il ne pourrait pas, avec toi, partager les rêves de ce professeur peut-être un peu fou.