Quand sa sœur lui avait proposé d’aller avec elle au Brisbane Health Fest, Leonardo lui avait tout simplement ri au nez par téléphone – avant de comprendre qu’elle ne blaguait pas vraiment. Après tout, qui aurait bien pu penser à l’inviter à un quelconque événement social et sportif en espérant qu’il accepte de son plein gré ? Il n’aurait sûrement pas été jusque là-bas tout seul, et à vrai dire il n’avait même pas vraiment fait attention aux plusieurs petits dépliants qui avaient été affichés un peu partout dans la ville de Brisbane. Mais puisque c’était Milena qui lui proposait un tel rendez-vous, il ne put s’empêcher d’accepter. Après tout, il lui avait bien promis de la revoir dès que possible après ses retrouvailles avec Cade, mais entre une chose et l’autre de chacun de leurs côtés ça n’avait pas pu se faire de suite après. Et même si l’idée d’un festival de sport polluant de gens ne l’enchantait peut-être pas autant qu’elle le devrait, l’idée de passer un peu de temps avec Milena suffisait à sauver la situation – sachant qu’avec leurs vies respectives ça pouvait parfois être un peu compliqué de trouver des moments où ils étaient tous les deux libres et disponibles, il n’allait pas vraiment cracher dessus. En fin des comptes, il allait peut-être même apprécier l’idée de faire du sport – pas trop intense évidemment, le football australien n’était même pas à prendre en considération – en compagnie de son aînée, qui sait ? Dans tous les cas il n’en saurait rien s’il restait enfermé dans son cher petit studio, donc il allait au moins faire l’effort d’essayer. C’est pas comme s’il avait eu de bien meilleurs plans pour la journée en question ou la semaine qui venait, donc il n’avait vraiment aucune raison de refuser l’invitation.

Le jour J, Leonardo se pointa au Brisbane Health Fest avec un petit quart d’heure d’avance, histoire d’avoir le temps de trouver l’atelier où les deux Grimes s’étaient donnés rendez-vous. Après avoir bataillé un petit peu avec son aînée au téléphone, le benjamin avait réussi à la convaincre à le rejoindre au sport le moins extrême qu’il avait pu trouver sur le site du festival – le yoga. Ceci expliquait donc la simplicité de sa tenue ; il était paré de son meilleur jogging gris (le seul qui n’avait pas de tâche ou trou douteux) ainsi que d’un t-shirt de la Pride de Brisbane, le tout couronné par un tapis de yoga rose qu’il portait à son épaule et des lunettes de soleil qui n’étaient à ce moment-là pas posées sur ses yeux. Assez rapidement, Leonardo trouva l’atélier en question, en grande partie grâce à des gros panneaux colorés qu’on ne pouvait tout simplement pas rater. Milena s’y trouvait déjà, et il se dépêcha de la rejoindre – son tapis bougeant doucement d’une épaule à l’autre, toujours collé à lui. « Coucou coucou, j’espère que je t’ai pas trop fait attendre ? » Elle n’avait pas l’air d’être sur place depuis bien longtemps, et de toute façon il n’était nullement en retard. Voyant qu’une séance allait bientôt se terminer, il posa son tapis par terre, attendant patiemment que leur tour vienne. « Comment ça va, depuis le temps ? Rien de nouveau côté coeur ou travail ? » Leonardo posait une telle question, mais à vrai dire sa vie à lui n’était pas spécialement palpitante à ce moment-là ; la plupart de ses soirées se ressemblaient, avec un pot de glace – ou autre cochonnerie – devant Netflix, et voilà. Pas de crush, pas de sex friend, pas de copain, rien du tout. Depuis leurs dernières retrouvailles la situation n’avait pas spécialement avancé, ce qui l’attristait quelque peu, bien qu’il essayait de pas trop y penser. « Avec un peu de chance, cette mini-séance va nous permettre à tous les deux de renouer contact avec notre corps pour retrouver l’équilibre avec la nature. » S’il avait pris un ton de voix un peu moqueur en répétant bêtement le slogan du dépliant de la pub, il devait avouer qu’il croyait un petit peu à tout ce qu’il venait dire. S’il n’avait jamais vraiment suivi des cours de yoga, c’était un peu pour lui le moyen parfait de tester une telle activité – et qui plus est, en l’excellente compagnie de sa sœur.

Le Brisbane Health Fest, voilà une manifestation qui aurait pu se dérouler sans que tu n’en entendes jamais parler. Malheureusement, ce n’était pas une manifestation localisée, elle s’étalait dans toute la vielle et tu avais croisé en sortant de ton cabinet des groupes de coureurs de plus en plus nombreux alors que les jours passaient. Le seul sport que tu avais apprécié pratiquer était la danse, qu’elle soit de salon ou plus contemporaine, et tu avais bien conscience que beaucoup ne considéraient pas cela comme du sport. Tu n’avais jamais autant le temps de te consacrer à cette pratique mais tu faisais au mieux. Tu avais entendu tes collègues parler du Health Fest depuis plusieurs jours quand tu avais reçu un texto de Leo prenant des nouvelles. Tu avais alors eu l’idée de joindre l’utile à l’agréable et de lui proposer de passer du temps ensemble tout en faisant un peu de sport. Tu savais que ton frère était encore moins sportif que toi mais cela n’avait pas d’importance à tes yeux. Toutes les personnes ayant passé un peu de temps a Health Fest en revenaient enchantés et tu avais besoin de te changer les idées. Ton frère n’avait pas été très emballé quand tu lui avais proposé l’idée mais vous aviez réussi à tomber d’accord sur une séance de yoga. Tu aurais préféré quelque chose qui te permettrait d’arrêter de penser plutôt que de faire le vide en toi et de tenter des poses pas possibles mais tu n’émis pas beaucoup de réticences quand ton frère te proposa cette discipline. Vous vous étiez ensuite mis d’accord sur un jour et une heure pour vous retrouver. Cela faisait un petit moment que tu n’avais pas vu Leo alors peu importe que vous alliez faire du yoga, l’essentiel était bel et bien de vous retrouver. Le jour J finit par arriver et tu avais pris ta demi-journée au cabinet. Tu n’avais pas envie d’avoir à sacrifier ton après-midi avec Leo parce que tu avais un rendez-vous en fin d’après-midi. Tu avais été travailler le matin et tu t’étais changée dans ton bureau. Autant dire que tu n’avais pas échappé à quelques taquineries de la part de tes collègues quand ils t’avaient vus quitter les lieux en tenue de yoga. Tu as bien conscience d’être quelqu’un qui est toujours concentrée sur sa tâche, qui fait peu de pauses et qui s’accorde peu de répit, les taquineries ne sont jamais infondées voilà pourquoi tu préférais ne pas relever. Tu confiais à Elora la tâche de te contacter qu’en cas d’extrême nécessité avant de quitter le cabinet et de prendre la voiture en direction du terre plein où se déroulait le cours. C’est sans surprise que tu eus du mal à te garer mais les organisateurs avaient prévu des parkings assez étendus. Tu marchais donc jusqu’au lieu de rendez-vous où tu ne trouvais pas Leo pour l’instant mais ce n’était pas surprenant, tu étais bien en avance. Tu décidais de poser tes affaires à un endroit où vous pouviez bien voir la scène et qui n’était pas trop bondé malgré le fait que les élèves du cours précédent semblaient traîner un peu des pieds pour quitter les lieux ne laissant que peu de place où s’installer. Tu eus à peine le temps de retirer les élastiques tenant ton tapis que la voix de Leo se fit entendre : « Coucou coucou, j’espère que je t’ai pas trop fait attendre ? » Un grand sourire se dessina sur ton visage et tu allais prendre ton frère dans tes bras pour le saluer. Tu avais traversé une période difficile ces derniers mois avec la disparition d’Elisabeth. Tu n’étais pas habituée à perdre des personnes qui t’étaient si chères et tu avais compris à quel point la vie était fragile. « Bien sûr que non, je viens d’arriver. Comment tu vas ? » Lui demandas-tu en lui montrant ton tapis pas encore installé. Tu ne tardais d’ailleurs pas à l’étaler sur l’herbe alors que Leo te demandait : « Comment ça va, depuis le temps ? Rien de nouveau côté coeur ou travail ? » Tu te souviens de cette discussion que vous avez eue lors des essayages pour le mariage d’Eva. Tu aurais aimé avoir des choses à lui raconter, tu aurais aimé pouvoir lui dire que tu étais un peu moins seule mais c’était le contraire. Tu avais perdu une amie qui était chère et c’était difficile à gérer pour toi. « Je vais bien, le cabinet se porte à merveille, nous avons quelques nouvelles recrues, c’est plutôt agréable. » Lui dis-tu avec un petit sourire. Cela voulait surtout dire que le cabinet se portait bien et attirait de plus en plus d’individus talentueux. « Cupidon ne m’a pas rendu visite par contre La Faucheuse a fait une apparition dans ma vie ces derniers temps. » Dis-tu en marquant une légère pause et en installant le tapis que tu fixais au sol avec ton sac à main et tes chaussures que tu enlevais. « Une bonne amie à moi est décédée il y a un mois, une maladie rare et incurable. J’ai encore du mal à me dire qu’elle n’est plus là. » Dis-tu en haussant les épaules. Tu sentis les larmes te monter aux yeux mais tu les retins, comme tu les avais toujours retenues depuis ton adolescence. « Avec un peu de chance, cette mini-séance va nous permettre à tous les deux de renouer contact avec notre corps pour retrouver l’équilibre avec la nature. » Tu laissais échapper un petit rire. Tu n’étais pas du genre à croire ce genre de choses mais après tout pourquoi pas ? Essayer ne coûtait rien alors tu allais bien voir. « Je suppose qu’on aura le verdict dans une heure. » Dis-tu à ton frère avec un clin d’œil. « Qu’as-tu à me raconter de beau de ton côté ? » Lui demandas-tu ensuite.

Si Leo et Milena étaient bien plus proches que les circonstances ne l’auraient prédit, ils avaient tous les deux une vie assez remplie, tout compte fait. Elle avait tout un cabinet à gérer et une carrière qui pouvait parfois prendre beaucoup de son temps et de son attention – ce que son frère ne lui reprochait pas, sachant à quel point elle s’était battue pour en arriver où elle était. Quant à lui, même s’il avait l’impression de perdre un peu son temps à côté de son aînée, il devait avouer qu’entre un rendez-vous et l’autre il finissait par perdre la notion de repos de temps à autre. Mais d’un autre côté, leurs occupations respectives rendaient chacune de leurs rencontres encore plus importantes et appréciables, tout simplement parce que ça n’arrivait pas tous les jours. Ça lui faisait quelque peu étrange de la voir en tenue de yoga, étant plutôt habitué à la voir parfaite et élégante en toutes circonstances, ou presque – mais l’ambiance relâchée du Brisbane Health Festival ne pouvait que leur faire du bien à tous les deux. La retrouver dans ses bras était peut-être quelque peu étonnant, mais il ne refusait jamais ce genre de démonstrations d’affection qu’il n’avait que trop peu connu au sein de sa famille. « Bien sûr que non, je viens d’arriver. Comment tu vas ? » Leonardo répondit au tac-à-tac pendant qu’il allongeait son tapis à côté de celui de sa sœur, histoire d’être côte à côté tout au long du cours. « Ma foi, pour l’instant ça va. Normalement, le yoga devrait pas être au-dessus de mes forces. » Après tout, c’était peut-être bien le sport – si on pouvait le considérer comme tel, cela allait de soi – qu’il pouvait espérer pratiquer sans trop de soucis. « Je vais bien, le cabinet se porte à merveille, nous avons quelques nouvelles recrues, c’est plutôt agréable. » Pendant que Milena répondait, son cadet l’imitait en enlevant ses chaussures, tout en écoutant attentivement ce qu’elle lui répondait. « Cupidon ne m’a pas rendu visite, par contre La Faucheuse a fait une apparition dans ma vie ces dernier temps. Une bonne amie à moi est décédée il y a un mois, un maladie rare et incurable. J’ai encore du mal à me dire qu’elle n’est plus là. » Leonardo ne put s’empêcher de s’en vouloir un instant – ça faisait déjà un mois qu’il ne s’était plus vu ou parlé en profondeur, sinon il l’aurait sûrement appris bien plus tôt. D’un autre côté, n’ayant pas connu l’amie en question il n’aurait peut-être pas pu l’aider autant que leurs connaissances communes. Le deuil était quelque chose de bien compliqué à gérer, et il n’y avait pas vraiment de manuel pour savoir comment le faire ; tout ce qu’il espérait, c’était qu’elle s’en remette peu à peu, malgré le temps que ça pouvait bien prendre un tel processus. « Oh, je suis désolé Milou, je savais pas… Mes condoléances, vraiment. » Il espérait qu’elle allait s’en remettre malgré le coup dur que ça pouvait être, et cela allait de soi – si besoin était, il n’était qu’à un message de distance de son aînée, malgré tout ce qu’il pouvait avoir de prévu. Il essaya de lui faire changer un peu des idées en ironisant sur ce que la brochure leur avait vendu au sujet du yoga, et il ne put s’empêcher de sourire quand elle laissa échapper un petit rire, aussi insignifiant cela pouvait bien paraître. « Je suppose qu’on aura le verdict dans une heure. Qu’as-tu de beau à me raconter de ton côté ? » Il dut réfléchir un instant pour savoir ce qu’il pouvait bien répondre, tout simplement parce qu’il ne s’était rien passé d’extraordinaire. « Hm, quoi donc… côté cœur c’est toujours aussi mort. J’ai "appris" à réparer des toilettes l’autre jour, avec Danny, donc si besoin est… » Bien évidemment, personne n’aurait eu la mauvaise idée de faire appel à Leonardo pour de telles tâches – surtout pas Milena, qui était bien au courant de son penchant à tout casser, lui-même y compris. « Et j’ai vu Cade bien évidemment, mais ça tu le savais déjà. » S’il avait pu en parler à Danny notamment, il se rendait compte qu’il avait envie et besoin d’avoir cette même discussion avec sa sœur – et les mots sortaient avant qu’il n’ait eu le temps d’y réfléchir. « Et… j’aurais jamais cru dire ça, mais ça m’a fait beaucoup de bien de le retrouver. Ou de le trouver tout court, pour être honnête. C’était presque… naturel. Comme si ça avait toujours été censé être comme ça. » Entre-temps leur enseignant était arrivé, et tout le monde s’était installé en tailleur – ce que Leonardo ne tarda pas à faire aussi. Il baissa sa voix d’un ton, n’ayant pas encore fini de parler à Milena, tout en essayant d’écouter ce qu’on leur disait – c’est-à-dire, un petit speech d’introduction au yoga, le fait d’être au contact de son corps et des ressentis et tout ce genre de bonnes paroles. « Mais on a pas beaucoup parlé depuis. Je sais pas trop ce qu’il en est entre Nunzio et lui… » Ce qui le rassurait, c’était qu’aucun de ses deux frères n’avait mentionné une éventuelle catastrophe – et pas de nouvelles ça rimait avec bonnes nouvelles, n’est-ce pas ?

Vu ton train de vie, tu devais avouer que te retrouver dans un cours de yoga en plein air surprendrait un grand nombre de personnes dans ton entourage. Rare sont les moments où tu t’autorises à relâcher la pression, à te détendre. Tu n’as jamais été hyperactive mais il semble qu’il y ait toujours quelque chose qui ait besoin de ton attention. Au fond, il n’y a qu’une fois chez toi que tu peux réellement souffler. Dommage que tu n’aies personne qui t’attende chez toi pour souffler avec toi. Mais ce n’est pas le moment de penser à cela, ce n’est vraiment pas le moment. Retrouver ton jeune frère va te faire beaucoup de bien, tu n’en doutes pas une seule seconde car Leo a toujours eu le don de te rendre ta bonne humeur. L’hiver n’a pas été simple à gérer pour toi avec la disparition d’Elisabeth, les changements au cabinet et le travail qui te tombait dessus mais tu étais bien décidée à avancer malgré ces épreuves. Le printemps était revenu ce qui te rendait déjà un peu le sourire. « Ma foi, pour l’instant ça va. Normalement, le yoga devrait pas être au-dessus de mes forces. » Un petit sourire apparut sur ton visage. Cela t’avait toujours amusé de voir ton jeune frère peu passionné par le sport. Cade s’était lancé dans des tonnes d’activités sportives dès son plus jeune âge, toi tu t’étais contentée de la danse et du cheerleading quand tu étais jeune mais pas Leo. Tu avais essayé de l’aider à trouver l’activité sportive parfaite pour lui mais cela s’était avéré très infructueux. De ton côté, tu n’étais pas certaine que le yoga soit fait pour toi mais pour le savoir il fallait essayer et pour l’instant tu n’avais jamais tenté l’expérience. « J’espère car je compte sur toi pour me montrer l’exemple. » Dis-tu à ton frère avec un clin d’œil. Suivre le lead de quelqu’un pour une fois ne te fera pas de mal. Tu ne peux t’empêcher de remarquer que tu n’as pas réellement quelqu’un sur qui te reposer dans ton entourage. Tu prends les décisions et tu dois les assumer parce qu’il n’y a personne pour prendre les coups avec toi. Tu n’avais jamais envisagé la situation sous cet angle pourtant, c’est ainsi que tu fonctionnes depuis ton arrivée à Brisbane. Oh tu as ta famille et ton entourage sur qui tu peux compter mais au final, dans ta vie de tous les jours, c’est toi qui mènes la danse seule, sans béquille pour t’aider à affronter le monde qui vous entourait. Quand Leo te demanda des nouvelles, tu ne pus t’empêcher de lui mentionner que tu avais perdu une amie à toi. Ton frère ne la connaissait pas mais c’était important à tes yeux qu’il sache que si tu n’étais pas au top de ta forme, c’était aussi à cause de ça. « Oh, je suis désolé Milou, je savais pas… Mes condoléances, vraiment. » Il était normal qu’il ne sache pas et ce n’était pas de sa faute. Ce n’était de la faute de personne d’ailleurs car la maladie d’Elisabeth était une maladie rare et génétique contre laquelle aucun d’entre vous n’aurait pu l’aider à lutter. Tu avais donc mis ton énergie ailleurs, pour l’aider à régler la question de la garde de son fils avant qu’il ne soit trop tard. Mais tu n’avais jamais eu à gérer un deuil auparavant et tu essayais de gérer le mieux possible. « Tu ne pouvais pas savoir. Je n’avais jamais perdu personne avant Elisabeth, je … J’espère que je n’aurais pas à perdre quelqu’un d’autre avant un long moment. » Finis-tu par dire parce que tu n’avais pas envie de revivre la perte d’un être cher. Tu avais été épargnée jusque là, peut-être auras-tu la chance de l’être encore un peu par la suite ? Tu ne voulais cependant pas t’étendre sur ce sujet, tu préférais demander à ton frère s’il avait des choses à te raconter vu que vous ne vous étiez pas vus depuis un mois. « Hm, quoi donc… côté cœur c’est toujours aussi mort. J’ai "appris" à réparer des toilettes l’autre jour, avec Danny, donc si besoin est… » Tu lèves un sourcil aux paroles de ton frère. Quel est le lien entre l’apprentissage pour réparer les toilettes et la vie amoureuse de ton frère ? Tu ne sais pas trop et cela te laisse pensive. Tu ne peux t’empêcher de remarquer que c’est la deuxième fois que le nom de Danny arrive dans la conversation autour du sujet de la vie amoureuse de Leo alors tu finis par lui demander : « Ce Danny n’a fait que t’apprendre à réparer les toilettes ? Il ne pourrait pas par exemple … jouer un rôle dans ta vie amoureuse ? » Lui demandes-tu avec un faux air innocent avant d’ajouter : « Et je préfère faire venir un plombier pour mes toilettes pour l’instant. » Lui dis-tu pour le taquiner un peu. Il fallait bien que tu te montres taquines et curieuse sinon tu ne serais pas une vraie sœur non ? Et puis c’était une question légitime, peut-être que tu te trompais ou alors tu mettais le doigt au bon endroit sans le savoir. « Et j’ai vu Cade bien évidemment, mais ça tu le savais déjà. Et… j’aurais jamais cru dire ça, mais ça m’a fait beaucoup de bien de le retrouver. Ou de le trouver tout court, pour être honnête. C’était presque… naturel. Comme si ça avait toujours été censé être comme ça. Mais on a pas beaucoup parlé depuis. Je sais pas trop ce qu’il en est entre Nunzio et lui… » Tu hoches la tête. Cela ne t’étonne pas vraiment que Cade et Leo s’entendent bien. Ils auraient toujours dû bien s’entendre mais leur différence d’âge et le côté rebelle de Cade à l’époque ont fait qu’ils n’ont jamais réellement pu se connaître. Pour eux, cette deuxième rencontre était bénéfique et tu savais que Cade était soulagé que cela se soit bien passé vu que vos retrouvailles à vous n’ont pas été des plus calmes. « Ce n’est pas étonnant que vous vous entendiez bien. Si vous aviez pris le temps d’apprendre à vous connaître réellement avant, vous auriez vu que vos points communs étaient bien plus nombreux que vos différences. » Dis-tu à ton frère en prenant place sur le tapis. « Mes retrouvailles avec Cade ont été plus tendues mais c’était à prévoir, notre relation ces dernières années était remplie de non-dits et d’absence. » Dis-tu en haussant les épaules. « Mais comme toi je n’ai pas de nouvelles de ses retrouvailles avec Nunzio, je ne sais même pas s’ils se sont revus en vérité vu que notre frère est aux Etats-Unis ces derniers temps. » Dis-tu à Leo car votre frère était en mission pour son agence de publicité sur votre terre d’accueil.

Voir sa sœur dans un tel environnement lui semblait assez étrange, le yoga étant beaucoup plus proche de sa personne à lui que de la sienne à elle – mais ça leur permettait de se voir dans un environnement bien plus convivial et relaxant. « J’espère car je compte su toi pour me montrer l’exemple. » Sa sœur lui apprit le décès d’une amie à elle, ce qui l’étonna quelque peu malgré le fait qu’il ne l’ait jamais rencontrée. « Tu ne pouvais pas savoir. Je n’avais jamais perdu personne avant Elisabeth, je… j’espère que je n’aurai pas à perdre quelqu’un d’autre avant un long moment. » N’ayant jamais vraiment perdu quelqu’un avant et n’ayant pas l’habitude de voir son aînée dans un tel état, Leonardo ne savait pas vraiment quoi dire pour la consoler – mais il se rendait bien compte qu’il n’y avait rien qu’il pouvait dire qui l’aurait aidée avec son deuil. Alors, il lui offrit un simple demi-câlin, la serrant d’un bras pour lui rappeler qu’il était toujours là, dans le bien comme dans le mal. C’était peut-être bien tout ce qu’il pouvait faire, mais il espérait que ce soit suffisant. Il essaya aussi de lui remonter le moral en blaguant sur ses cours de plomberie avec Danny, ce qui lui permit de changer facilement de sujet. « Ce Danny n’a fait que t’apprendre à réparer les toilettes ? Il ne pourrait pas par exemple… jouer un rôle dans ta vie amoureuse ? Et je préfère faire venir un plombier pour mes toilettes pour l’instant. » Leonardo ne put s’empêcher d’éclater à rire, ce qui fit par ailleurs tourner la tête d’une dame à ses côtés, visiblement emmerdée par une telle démonstration de joie. Sans vraiment y prêter attention, il répondit au tac-au-tac à sa sœur. « Toucher aussi méchamment non pas un mais deux sujets sensibles ? C’est vraiment bas ça, tu m’étonnes que tu gagnes tes procès après. » Des années plus tôt, Leonardo aurait sûrement très mal pris de telles remarques, mais depuis le temps lui avait fait comprendre que de telles taquineries n’avaient rien de méchant – c’était normal dans tout rapport frère/sœur, chose qu’ils n’avaient pas beaucoup eu le temps de partager depuis son départ. « Plus sérieusement, il a déjà essayé. Plusieurs fois. Et ça a très mal marché. » En plus de ça, l’histoire avec Andy prouvait bien que le Danny n’était peut-être pas le mieux placé pour donner des leçons en matière de relations. Non pas que le benjamin des Grimes pouvait se vanter d’exploits au sujet, très loin de là. « Et toi ? Toujours pas de Cupidon et de Prince charmant dans ta vie ? Savoir si on finira tous les deux avec des chats. » S’il essayait de la taquiner comme elle venait de le faire, il savait au moins qu’ils n’allaient jamais vraiment être seuls – même si l’idée de terminer sa vie sans quelqu’un pour partager son amour ne l’enchantait pas tellement. Ensuite, tout naturellement, la conversation se tourna vers ses retrouvailles avec Cade, qui venait de faire son plus majestueux retour dans leurs vies. « Ce ‘est pas étonnant que vous vous entendiez bien. Si vous aviez pris le temps d’apprendre à vous connaître réellement avant, vous auriez vu que vos points communs étaient bien plus nombreux que vos différences. » Elle n’avait pas tort. Après tout, les deux frères étaient radicalement opposés à la vie et aux valeurs que leurs parents avaient essayé de leur inculquer, et ils avaient absolument tout fait en leur pouvoir pour s’en détacher. « Mes retrouvailles avec Cade ont été plus tendues, mais c’était à prévoir, notre relation ces dernières années était remplie de non-dits et d’absence. » Ses deux aînés avaient partagé bien plus de temps ensemble qu’avec Leonardo, ne serait-ce qu’à leur départ pour leurs études. Mais n’ayant pas spécialement eu de contacts à partir de ce moment-là, ils ne savaient pas trop comment ils avaient évolué depuis, du moins jusqu’à leur arrivée à Brisbane. « Mais comme toi je n’ai pas de nouvelles de ses retrouvailles avec Nunzio, je ne sais même pas s’ils se sont revus en vérité vu que notre frère est aux Etats-Unis ces derniers temps. » Le cours ayant commencé, Leonardo faisait gaffe à garder sa voix à un volume raisonnable pour que ses voisines ne l’engueulent pas – même si la râleuse semblait le regarder très mal. « Honnêtement, je sais pas trop comment ça va se passer. Je sais que j’ai eu un peu de mal avec Nunzio quand il est revenu comme une fleur, et je pense pouvoir dire que Cade est légèrement moins diplomate que moi. Sans parler de leurs différents communs. » D’un côté y’avait le rebelle de la famille, de l’autre le petit fils à ses parents qui avait toujours eu ce qu’il voulait. Bien évidemment, des étincelles s’annonçaient. « J’espère juste qu’on aura pas à jouer les médiateurs. Si besoin est je le ferai évidemment, mais ça promet d’être cocasse si on en arrive là. » Suivant les mouvements de leur enseignant, Leonardo s’étirait les bras et les jambes et tous ces muscles qu’il laissait normalement s’atrophier, ayant l’impression d’être un monsieur âgé qui redécouvrait le sport après un an au lit. « M’enfin. Avec un peu de chance, pour une fois tout se passera à merveille dans cette famille. » Pour une fois, il avait vraiment envie d’avoir une vraie famille. Mais pour ça, fallait que ses deux frères mettent leurs différents de côté, ce qui n’était pas gagné d’avance.

Tu n’étais pas venue à cette séance de yoga pour parler d’Elisabeth. Ton frère ne la connaissait pas de toute manière donc il n’y avait rien qu’il pouvait faire pour t’aider à surmonter cette épreuve. Ce qui était le plus dur dans cette histoire c’était que tu n’avais pas perdu qu’Elisabeth. Tu avais aussi perdu Gauthier et Gabriel qui étaient tous les deux repartis en Angleterre avec l’ex-mari d’Elisabeth. Ne connaissant aucun des amis de la jolie blonde sur Brisbane, tu te retrouvais seule à devoir gérer ce deuil et ce n’était pas tous les jours faciles. Elisabeth avait été une très bonne amie, une amie à laquelle tu t’étais beaucoup confiée et inversement, ne pas pouvoir l’appeler quand tu avais besoin de parler te brisait le cœur. Mais tu profitais des bras de ton frère autour de toi, de cette chaleur qui te montrait qu’il était là, que tu n’étais pas toute seule non plus. Tu espérais que tu n’auras pas à perdre une autre personne de ton entourage dans les mois ou les années à venir, tu n’avais pas envie de revivre ça. Tu étais reconnaissante à ton frère d’amener un changement de sujet. Il te parla de ses expériences de plomberie et une nouvelle fois de ce Danny. Il était censé être un ami mais peut-être qu’il y avait autre chose là-dessous ? Tu tentais donc d’en savoir plus de manière pas très subtile mais au moins Leo ne sembla pas se vexer. « Toucher aussi méchamment non pas un mais deux sujets sensibles ? C’est vraiment bas ça, tu m’étonnes que tu gagnes tes procès après. » Tu laisses à ton tour échapper un petit rire. Leo marque un point. Tu ne t’en rends pas toujours compte mais il y a des habitudes professionnelles que tu laisses échapper dans ta vie privée. C’est plus fort que toi malheureusement mais tu n’as pas envie que ton frère se sente comme devant un juge. « L’essentiel c’est d’obtenir une réponse. » Lui dis-tu avec un grand sourire qui se voulait innocent. Ton frère n’avait pas l’air très en colère contre toi après tes remarques donc c’était déjà ça. Tu cherchais réellement à le taquiner plus qu’autre chose. « Plus sérieusement, il a déjà essayé. Plusieurs fois. Et ça a très mal marché. Et toi ? Toujours pas de Cupidon et de Prince charmant dans ta vie ? Savoir si on finira tous les deux avec des chats. » Bon, tu pensais tenir quelque chose mais apparemment non. Tu notais que ce Danny avait quand même tenté quelque chose donc tes intuitions n’étaient pas si mauvaises que ça. Que les choses n’aient pas fonctionné c’était une autre histoire et tu aurais été désolée pour ton frère si ce dernier semblait attristé par la chose ce qui ne semblait pas être le cas. « Tant pis pour lui et tant mieux pour celui qui réussira sa tentative. » Lui dis-tu avec un clin d’œil. Tu n’avais pas oublié les questions de ton frère te concernant. Le problème c’est qu’il n’y avait rien de nouveau à dire à ce sujet depuis votre dernière rencontre. Mais l’idée que vous alliez finir tous les deux seuls avec des chats commençait à se faire de plus en plus sentir. Enfin, les chats seraient une option pour toi, ce n’était pas des animaux avec lesquels tu étais à l’aise. « De mon côté l’horizon est bien désert, je n’ai vu aucun homme venir me sauver de ma solitude sur son cheval blanc. Promis, tu seras le premier à le savoir si c’est le cas. » Lui dis-tu avec un petit sourire. En ce moment, avec le décès d’Elisabeth et les nouvelles arrivée au cabinet, tu n’avais pas le temps de te poser trop de questions sur ta vie amoureuse et tu en étais reconnaissante à ton emploi du temps car tu savais que cela ne te mettait jamais dans de très bonnes dispositions quand tu avais le temps d’y penser. L’approche de ton trente-cinquième anniversaire en décembre te faisait déjà bien assez peur comme ça. La discussion se tourna ensuite vers un sujet bien plus tranquille pour tous les deux qui était l’arrivée de Cade à Brisbane. Ton frère était arrivé précipitamment, sans prévenir et en espérant que tout allait rouler comme sur des roulettes. Manque de chance de ton côté, les retrouvailles n’avaient pas été de tout repos. Que les choses se soient bien passées avec Leo ne te surprenait pas, les deux frères avaient beaucoup de points communs et un passé commun presque vide, ils pouvaient repartir de zéro. « Honnêtement, je sais pas trop comment ça va se passer. Je sais que j’ai eu un peu de mal avec Nunzio quand il est revenu comme une fleur, et je pense pouvoir dire que Cade est légèrement moins diplomate que moi. Sans parler de leurs différents communs. J’espère juste qu’on aura pas à jouer les médiateurs. Si besoin est je le ferai évidemment, mais ça promet d’être cocasse si on en arrive là. M’enfin. Avec un peu de chance, pour une fois tout se passera à merveille dans cette famille. » Tu ne savais pas non plus comment les retrouvailles de Nunzio et Cade allaient se passer. La vérité c’était que Nunzio avait l’art d’irriter n’importe qui dans votre fratrie, même toi. Mais vous aviez réussi à passer au-dessus de tout cela alors c’était sans doute possible pour Cade et lui. Cela ne voulait pas dire que ça se ferait en un jour par contre. Tu comprenais que Leo n’ait pas envie de jouer au médiateur mais il fallait s’attendre à ce genre de rôle dans le futur. De ton côté, tu avais encore pas mal de sujets à aborder avec Cade avant que tu ne puisses le faire entrer dans ta vie sans avoir peur qu’il reparte quand tu auras cligné des yeux. « Rien ne se passe jamais à merveille dans notre fratrie. Mais Cade et Nunzio ont grandi, avec un peu de chance après avoir tout mis sur la table, on pourra enfin essayer d’être une vraie fratrie. Nos parents sont assez loin pour ne pas venir y mettre leur grain de sel. » Dis-tu en haussant les épaules. Tu ignorais ce que le futur vous réservait mais tu ne voulais pas être trop pessimiste non plus. « Cade t’a dit pourquoi il était à Brisbane ? » Le fait que ton frère soit à Brisbane après avoir été mis à pied du FBI ne te disait rien qui vaille et tu voulais savoir s’il avait donné plus d’information à Leo. Une voix retentit soudain et des personnes étaient montées sur la scène. « Ah, ça a l’air de commencer. » Dis-tu à ton frère en prenant place sur ton tapis. Il n’y avait aucun doute, c’était Leo qui allait bien rigoler devant ton manque de souplesse et de relaxation.

Si on comprenait aisément comment Milena pouvait bien s’en sortir dans le milieu du droit au vu de son caractère toujours plus-que-déterminé, elle n’avait rien du tyran sans pitié que leur père avait pu être même à l’extérieur du tribunal. En tout cas, il pensait bien qu’elle aurait aisément pu le remettre à sa place si besoin était, mais tel n’était pas – encore – son but. « L’essentiel c’est d’obtenir une réponse. » Il se contenta de lui tirer la langue en guise de réponse, tel un gamin malpoli, avant d’enchaîner sur le bilan désastreux de sa vie sentimentale, toujours aussi vide. Mais son aînée semblait avoir bien plus d’espoir que lui en la matière. « Tant pis pour lui et tant mieux pour celui qui réussira sa tentative. » Leonardo haussa des épaules, montrant qu’il essaye de ne pas donner trop d’intérêt à la question – même s’il devait avouer que la solitude commençait à se faire sentir, il avait des choses bien plus importantes à faire. « De mon côté l’horizon est bien désert, je n’ai vu aucun homme venir me sauver de ma solitude sur son cheval blanc. Promis, tu seras le premier à le savoir si c’est le cas. » Un tel dessin fit pouffer Leonardo de rire. S’il y avait bien quelqu’un qui n’avait pas besoin d’un prince charmant pour la sauver, c’était bel et bien Milena. Quant à lui, en revanche… « J’y compte bien ! J’ai déjà mon costard de prêt si un jour mariage il y a. Et je ne compterais rater ça pour rien au monde ! » Ensuite, la conversation se tourna vers un sujet tout aussi important à ses yeux : ses retrouvailles avec Cade, qui avaient eu lieu quelques jours plus tôt. Malgré ses plus grandes appréhensions, les choses n’auraient pas pu mieux se passer entre les deux. « Rien ne se passe jamais à merveille dans notre fratrie. Mais Cade et Nunzio ont grandi, avec un peu de chance après avoir tout mis sur la table, on pourra enfin essayer d’être une vraie fratrie. Nos parents sont assez loin pour ne pas venir y mettre leur grain de sel. » Effectivement, ils étaient suffisamment éloignés de leurs parents pour créer des rapports sans qu’ils n’interfèrent. Et si Milena et Damien étaient restés en contact avec, ils restaient adultes et parfaitement conscients des défauts de leurs géniteurs. « Honnêtement, je pense pas qu’on devrait se faire trop de souci. ‘Fin, faudra attendre le retour de Damien et qu’ils se décident à se retrouver, mais on peut pas trop y faire grand-chose pour l’instant. » Après tout, Cade et Damien étaient adultes et vaccinés, et leurs frères ne pouvaient pas les diriger outre mesure. « Cade t’a dit pourquoi il était à Brisbane ? » Leonardo n’eut pas vraiment le temps de répondre avant que sa sœur ne reprenne la parole. « Ah, ça a l’air de commencer. » Leonardo écouta aussi attentivement qu’il le pouvait les quelques enseignants qui se trouvaient sur la scène, et imitant tous les autres il s’assit en tailleur, faisant attention à garder le dos bien droit comme on les incitait à le faire. La question de Milena l’avait quelque peu étonné, tout simplement parce qu’il ne se l’était jamais tout à fait posée. Il avait cru comprendre que Cade était en Australie pour des sortes de vacances plus ou moins forcées mais pas tout à fait… la situation restait très confuse, et il ne savait pas tellement quelle était la bonne réponse. « Je dois t’avouer que non, et je me suis pas tellement posé la question. T’sais, au bout du troisième frère qui débarque chez toi à l’autre bout du monde, tu prends les choses comme elles viennent. » Ce qui n’était pas faux, mais maintenant qu’elle lui avait mis la puce à l’oreille il devait avouer qu’il était bien curieux de connaître la réponse. Il avait considérablement baissé la voix pour qu’ils puissent entendre les consignes des exercices à venir tout en parlant, mais il parlait suffisamment fort pour que Milena puisse l’entendre sans trop de soucis. « Tout ce qu’il m’a dit, c’est qu’il est ici en vacances, mais du coup j’sais pas trop. Il s’est pas installé définitivement dans le coin, si ? Il compte retourner aux USA à un moment ? » Les États-Unis n’étaient peut-être pas la porte d’à côté, mais au moins ce n’était pas aussi loin que l’Europe par exemple. Mais même si Cade décidait de retourner à Los Angeles, ça n’aurait sûrement pas été pareil que s’il avait déménagé à Brisbane – option pour laquelle Leonardo ne pouvait s’empêcher d’espérer. Ils avaient déjà connu assez de soucis en la matière pour qu’il n’ait pas envie de perdre un frère qu’il venait de retrouver. « Dans tous les cas, j’te dirai si j’en sais plus. On est censé se revoir l’un de ces quatre, mais on n’a pas encore de date précise. » L’enseignant leur demanda de se relever, et Leonardo s’exécuta en même temps que tous les autres élèves du cours. Ils durent s’étirer avec des exercices très classiques, qui avaient sûrement pour but de chauffer leurs muscles et éviter des crampes des plus violentes en plein exercice. Non pas que Leonardo ait été une flèche en la matière, s’il devait être tout à fait honnête.

Ta vie amoureuse était bien loin d’être un sujet très passionnant ces derniers temps. Mais ce n’était pas pour cela que tu ne répondais pas aux questions de ton frère. Tu n’avais pas beaucoup d’amies de confiance à qui te confier au sujet de tes sentiments alors ton frère allait très certainement être le premier sur la liste des personnes qui seraient au courant de tes aventures. Et ta première aventure allait très certainement être le mariage d’Eva. « J’y compte bien ! J’ai déjà mon costard de prêt si un jour mariage il y a. Et je ne compterais rater ça pour rien au monde ! » Un sourire se dessina sur ton visage. Il te tardait à toi aussi de voir ton amie se marier à l’homme qui la rendait si heureuse. Tu savais mieux que personne que faire fonctionner un mariage ce n’était pas facile. Tous tes clients s’étaient mariés en étant persuadés que jamais ils n’auraient besoin de tes services et toutes les histoires n’étaient pas tragiques. Certaines étaient simplement dues à des couples qui n’arrivaient pas à faire marcher leur histoire. Alors voir des contres exemples comme celui que te montrait Eva depuis que tu la connaissais, c’était ce qu’il fallait pour te redonner espoir dans cette institution. Alors que tu essayais robe sur robe, la discussion dériva bientôt vers l’arrivée de votre frète aîné à Brisbane. Tu n’y avais pas pensé au premier abord mais cela devait faire plus de dix ans que Leonardo n’avait pas vu Cade. Les retrouvailles avaient dû être étranges mais peut-être que c’était mieux comme ça. Sans doute que c’était plus facile pour repartir du bon pied parce que finalement leur passé commun au sein des Grimes ne pouvait pas vraiment venir entacher leur nouvelle relation contrairement à ce qui se passait entre Cade et toi. « Honnêtement, je pense pas qu’on devrait se faire trop de souci. ‘Fin, faudra attendre le retour de Damien et qu’ils se décident à se retrouver, mais on peut pas trop y faire grand-chose pour l’instant. » Il avait raison, vous ne pouviez rien y faire pour l’instant. Tu te retins de faire remarquer à Leonardo qu’il ya avait de fortes chances pour que Cade soit reparti aux Etats-Unis avant que Damien ne revienne de sa mission mais après tout, tu ne savais rien des plans de ton frère, ni de ce qui l’amenait réellement en Australie. Est-ce qu’il allait mettre le FBI derrière lui ? Seul l’avenir vous le dira et c’était un problème pour un autre jour. « Tu as raison, nous ferons ce que nous savons faire de mieux, nous improviserons. » Lui dis-tu avec un petit sourire complice. Alors qu’il te racontait ses retrouvailles avec votre frère, tu ne pus t’empêcher de lui demander si Cade s’était confié sur la raison de son débarquement sur ce nouveau continent. Parce que de toute la fratrie, c’était certainement celui qui avait le moins à gagner en déménageant dans ce nouveau pays. « Je dois t’avouer que non, et je me suis pas tellement posé la question. T’sais, au bout du troisième frère qui débarque chez toi à l’autre bout du monde, tu prends les choses comme elles viennent. Tout ce qu’il m’a dit, c’est qu’il est ici en vacances, mais du coup j’sais pas trop. Il s’est pas installé définitivement dans le coin, si ? Il compte retourner aux USA à un moment ? Dans tous les cas, j’te dirai si j’en sais plus. On est censé se revoir l’un de ces quatre, mais on n’a pas encore de date précise. » En vacances … Oui, si seulement s’était vrai. Tu pris quelques instants avant d’ouvrir la bouche. Après tout, qu’est-ce que cela changerait de dire à ton cadet la véritable raison de la venue de votre frère ? Avait-il besoin de savoir que Cade avait été mis à pied du FBI ? Certainement mais pas de ta bouche en tout cas. Quant au possible retour de Cade aux USA, tu n’en savais malheureusement pas plus que ton frère et quelque chose te disait que Cade n’en savait rien non plus. Tant que tu ignorais ce qui l’avait mis à pied, tant que tu ne savais pas ce qu’il fuyait, il t’était impossible d’évaluer la situation malheureusement. « De ce que je sais il ne s’est pas installé définitivement dans le coin non. Par contre, c’est plus des vacances forcées qu’il est en train de prendre, des vacances dont il ne connait pas encore la date de fin donc je ne sais pas ce qu’il compte faire exactement et je suis prête à parier que lui non plus. » Tu ne pus t’empêcher de te demander s’il fallait envisager que votre aîné allait avoir besoin de tout votre soutien pour faire face aux répercussions de ses actes mais pour l’instant tu n’en savais pas assez pour envisager ce genre de situation. Après une pause que tu n’avais réussi qu’à moitié dû à ton manque de souplesse, tu dis à ton frère : « Je pense que je ne vais pas pouvoir me lever demain. La prochaine fois, soit tu m’amènes danser, soit on reste chez toi. » Dis-tu à ton frère avec un petit sourire alors que le professeur terminait le cours en vous saluant. « Un thé glacé pour se remettre de nos émotions ? » Proposas-tu alors que tu remettais tes chaussures. Tu ne savais pas si ce cours allait t’avoir détendu mais il t’avait permis de passer du temps avec ton frère ce qui était le principal.

Malgré ses nombreuses appréhensions qu’un rien suffisait à réveiller, Leonardo était le genre de personne qui essayait de prendre la vie comme elle venait, sans trop se poser de question – le mot "essayer" étant à souligner, ceci étant dit. S’il échouait bien souvent, une telle attitude avait brillé à chaque retrouvailles des Grimes à Brisbane, où il avait été le premier à s’exiler. Il lui avait peut-être fallu du temps pour se faire à l’idée de cette nouvelle réalité familiale, mais les choses s’étaient assez facilement faites par elles-mêmes en fin des comptes. Et en ce qui concernait les futures retrouvailles entre Cade et Damien… il ne pouvait pour l’instant rien y faire. « Tu as raison, nous ferons ce que nous savons faire de mieux, nous improviserons. » Connaissant l’ego que ses deux frères aînés pouvaient par moments partager, Leonardo n’aurait pas été étonné que Milena et lui aient à intervenir, et si besoin était il allait certainement les prendre par les oreilles pour les enfermer dans une pièce jusqu’à ce que paix – ou mort, la première à venir – s’en suive. Mais à l’heure qu’il était, ils ne pouvaient que prendre leur mal en patience et attendre de voir quelle serait la suite des événements. C’était deux grands adultes qui pouvaient très bien régler leurs éventuels différents par eux-même, sans que le reste de la fratrie ait à intervenir. Bien évidemment, Leonardo ne pouvait qu’espérer que les choses se passent aussi bien qu’entre Cade et lui. Même s’il n’avait jamais espérer tous les retrouver à l’autre bout de l’Océan Pacifique, il aurait bien aimé avoir une vraie famille, sans que leurs parents puissent mettre leur nez dans leurs vies à eux. « Comme d’habitude. La vie serait pas drôle sans une bonne dose de dramas et improvisation, n’est-ce pas ? » Suite à cela, le benjamin se mit à raconter comment s’étaient passées les retrouvailles entre Cade et lui. S’il devait être honnête, tout à son sujet l’étonnait. Non seulement le pourquoi du comment il s’était retrouvé à Brisbane alors qu’il menait une vie bien posée aux Etats-Unis, mais aussi à quel point les choses s’étaient bien passées entre eux. En fin des comptes, il avait compris qu’ils n’avaient jamais été ennemis. Puisque Cade était parti alors que Leonardo n’était qu’un enfant, ils n’avaient juste jamais eu le temps de se connaître – et malgré ce qu’on aurait pu penser, il ne pouvait pas lui en vouloir d’être parti de la maison familiale. Ensuite, il demanda à Milena si elle en savait plus en ce qui concernait la durée du séjour de leur aîné en Australie. Ça l’aurait légèrement embêté de devoir dire au revoir à un frère qu’il venait de retrouver, encore plus s’ils s’entendaient mille fois mieux que prévu – mais malheureusement, elle n’avait pas tellement de réponse précise à lui donner. « De ce que je sais il ne s’est pas installé définitivement dans le coin, non. Par contre, c’est plus des vacances forcées qu’il est en train de prendre, des vacances dont il ne connaît pas encore la date de fin donc je ne sais pas ce qu’il compte faire exactement et je suis prête à parier que lui non plus. »  Le fait que Milena parle de vacances forcée ne fit pas forcément tilter Leonardo ; jamais il n’aurait pu s’approcher de la réalité au sujet. Il se disait que travailler au FBI devait demander un mental en acier, ce qui justifiait des vacances bien étendues que l’on accordait aux employés histoire de préserver leur état physique et mental. Pour le coup, Cade ne l’avait pas vraiment contredit au sujet, et il n’allait pas poser plus de questions. « Eh, j’imagine que c’est mieux que rien. Au moins il ne reste pas qu’une petite semaine, quoi. » Après tout, ç’aurait été tout simplement inutile pour lui comme pour eux. Suite à ça, les deux Grimes essayèrent de suivre le cours aussi assidûment que possible, malgré la difficulté de certaines poses – et visiblement, Milena n’avait pas vraiment apprécié cela. « Je pense que je ne vais pas pouvoir me lever demain. La prochaine fois, soit tu m’amènes danser, soit on reste chez toi. » Leonardo ne put s’empêcher de pouffer de rire, s’imaginant danser aux côtés de son aînée. « Si on se fait ça, j’espère que y’aura un hôpital pas trop loin – tu vas en avoir besoin, pour le coup. » Alors qu’ils ramassaient tranquillement leurs affaires, tout le monde quittait l’atelier pour libérer la place pour les suivants. « Un thé glacé pour se remettre de nos émotions ? » Pour le coup, ils avaient effectivement besoin de boire quelque chose de bien frais à ce moment-là. « Tu me connais, qui suis-je pour refuser ? » Après tout, fallait bien croire qu’elle le connaissait comme ses poches.