I walked a minute in your shoes – they never would've fit, I figured there's nothing to lose, I need to get some perspective on these words before I write them down. We won't say our goodbyes, you know it's better that way, we won't break we won't die, it's just a moment of change, all we are, all we are is everything that's right. ☆☆☆
Venait-elle plutôt du trop-plein d’alcool de la veille ou du vague à l’âme qui ne le lâchait plus ? La nausée qui l’avait pris au réveil ne l’avait en tout cas pas quitté de la journée, pas plus lorsqu’il avait quitté au petit matin les draps et l’appartement d’une inconnue qu’il avait oubliée aussi vite que lorsqu’il avait rasé les murs du commissariat à l’heure encore matinale où seul le policier assigné à l’accueil de nuit lui avait adressé un salut resté sans réponse, Anwar s’agrippant à la rambarde de l’escalier pour atteindre le premier sous-sol, les vestiaires, et s’offrir un tête-à-tête nécessaire avec la douche. Il y était resté ce qui lui avait semblé une éternité, l’eau chaude glissant sur ses épaules sans parvenir à estomper l’impression d’être frigorifié, le whisky de la veille probablement responsable du bourdonnement persistant dans ses oreilles, et la lourdeur dans sa poitrine trouvant assurément sa justification ailleurs. Le retrouvant dans leur bureau une heure plus tard Patton avait eu du flair – sans surprise – à ce sujet à peine les yeux posés sur le visage défait de son collègue, les mèches blondes en bataille et encore à demi-humides sur son crâne et le regard vitreux malgré l’aspirine avalée à la va-vite peu avant son arrivée « J’espère que c’est pas cette histoire avec l’éducatrice qui te fout dans des états pareils. T’as fait ton job, ON a fait notre job. T’as rien à te reprocher, passe à autre chose. » qu’elle lui avait balancé sans fioritures, jamais du genre à prendre les gens et les choses avec des pincettes. « J’ai juste un peu trop levé le coude hier, laisse-moi le temps d’atterrir. » avait de son côté simplement grommelé le brun, la mention de Jacobs tiraillait sur sa conscience sans qu’il ne veuille l’admettre et le SMS de Tess reçu à l’aube et auquel il n’avait pas répondu terminant de creuser la culpabilité latente qu’il se traînait depuis des jours. « Je vais nous chercher des cafés, tu m’fais presque de la peine. À mon avis les gueules de bois c’est comme le blond, c’est plus de ton âge. » s’était alors gentiment moqué le lieutenant avant de quitter le bureau, le regard noir et en même temps piteux d’Anwar lui arrachant un rire qui avait ôté au policier tout espoir de donner le change. Au moins pour le reste de la matinée.
Les effluves d’alcool s’estompant peu à peu au fil de l’après-midi, il avait par ailleurs eu tout le loisir de dessaouler vitesse grand V devant la dose rébarbative de paperasse dont lui et son adjointe avaient dû s’acquitter, évitant ainsi une énième remontrance du service administratif réclamant certains papiers depuis plusieurs jours, voire plusieurs semaines. Et entre les deux il y avait eu la pause déjeuner, le ventre du brun uniquement rassasié d’une pomme grignotée à la va-vite lorsqu’il était rentré chez lui nourrir Ibis, et Lonnie croisé dans un couloir à son retour et qu’il avait alpagué d’un « Hartwell ! Tu pourras passer dans mon bureau en fin de journée ? Faut qu’on ait une discussion toi et moi. » peut-être un peu plus brusque qu’il ne l’aurait souhaité, mais sans qu’il n’ait le temps ou la patience pour reformuler ou arrondir les angles dans l’immédiat. Mais une chose était certaine, les quatre cafés et le second aspirine aidant Annie avait retrouvé l’intégralité de ses capacités de réflexion au moment où, comme demandé, le jeune policier avait frappé à la porte du bureau au moment où Patton s’étirait en faisant craquer ses doigts. « Ça t’ennuie de nous laisser un moment ? » que lui avait alors demandé le brun, moyennement scrupuleux quant au fait de la mettre plus ou moins à la porte, mais ne souhaitant pas qu’elle assiste à la conversation. « T’es l’équipier dont tout le monde rêve, toi, tu sais ? » Le sarcasme palpable, elle avait quitté son bureau et attrapé sa veste d’un côté et son briquet de l’autre. « Je referme derrière moi ? » Passant déjà à côté de Lonnie tandis qu’Anwar répondait « Oui, s’il te plait. » elle avait jeté un œil au petit bleu et presque semblé avoir pitié de lui. Il ne faisait pas bon être dans le collimateur d’Anwar les jours où il était levé du pied gauche, et elle avait presque été tentée de lui faire remarquer avant de quitter le bureau. Indiquant silencieusement la chaise de l’autre côté de son bureau, l’inspecteur avait suivi Lonnie du regard jusqu’à ce qu’il s’asseye, et s’appuyant sur le dossier de son fauteuil en croisant les bras il avait décidé de ne pas y aller par quatre chemins « Adam Scofield, ça t’évoque quelque chose ? »
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Tout se passait bien et c'était ce qui lui faisait le plus peur ces temps-ci. C'était trop inhabituel pour un Lonnie à qui la chance n'avait jamais souris, qui se retrouvait toujours coincé entre le marteau et l'enclume dès que les décisions importants se dressaient devant lui. Trop beau pour être vrai et pourtant le policier avait troqué l'éternel froncement de sourcil par un sourire gênant qu'il affichait constamment et qui commençait à rendre son entourage mal à l'aise. C'était peut-être Greta ou bien les affaires qui se résolvaient facilement, ou encore cette mère détenue qui semblait plus déterminée que jamais à faire appel de son jugement. Dans les couloirs du commissariat il était passé de "celui à qui on demande tout" à "celui qui cache forcément quelque chose et que personne n'approche", des vacances, en quelques sortes. Les pieds sur un bureau magnifiquement bien rangé, et ça n'avait pas été le cas depuis un long moment faute aux dossiers qu'on empilait les uns sur les autres sans même lui demander son avis, Hartwell avait ce sourire que seul les crétins ignorants ont et ainsi posé devant le spectacle qu'offrait le commissariat il avalait sans compter les cacahuètes qui lui serviraient sans doute de dîner ce soir. « Hartwell, raccompagne cette dame à l'accueil et efface le sourire de ton visage veux-tu ? » Que Bates avait aboyé en sa direction alors qu'une cacahuète manqua sa bouche de quelques centimètres pour venir s'écraser sur le sol. Lonnie c'était redressé en hâte, sorti de ses vacances, et avait fait disparaître les miettes de sa chemise d'un geste de la main tout en adressant un signe de tête au lieutenant qui s'était détourné dans un soupir las. Le policier avait pointé du bras le chemin et emboîté le pas d'une dame d'un certain âge tenant son sac dans ses mains comme ci le diable en personne avait pour mission de le lui prendre. Avec un vague "merci" murmuré à travers ses lèvres vieillies la femme avait quitté le poste lentement alors que Lonnie croisait le regard inquisiteur et mal luné d'un Anwar au visage défait et sombre. « Hartwell ! Tu pourras passer dans mon bureau en fin de journée ? Faut qu’on ait une discussion toi et moi. » Simple, clair, précis. Lonnie avait déglutit et ravalé le "bonjour" qu'il avait presque formulé en voyant approcher la silhouette de l'inspecteur, considéré jusque là comme un ami et non plus comme un collègue. Trop beau pour être vrai, n'est-ce pas ? Il fallait bien que tout ce bonheur se casse un jour la gueule devant le visage incrédule d'un Lonnie qui avait été trop con pour y croire. C'était peut-être pas grand chose, juste une question sur une affaire ou bien une invitation à la soirée karting dont tout le monde parlait, mais le ton sec d'Anwar n'était en rien le signe que Lonnie aller passer un bon moment dans son bureau en fin de journée. Le reste du temps fut si long que le policier avait considéré plusieurs fois l'idée de prendre ses jambes à son cou en prétextant une excuse à la mord-moi-le-nœud tel "j'ai laissé le four allumé, mais aussi vrai qu'il était parano Lonnie était loin d'être lâche et quand il avait frappé contre la porte d'Anwar c'était dans l'idée de tirer tout ça au clair, calmement. Le partenaire de l'inspecteur ayant pris congé ce dernier avait indiqué la chaise en face de lui et les jambes tremblantes de Lonnie avait presque crié de soulagement lorsqu'il avait pris place. « Adam Scofield, ça t’évoque quelque chose ? » Yep, le bonheur avait pris une belle mandale dans la gueule. Adieu, petit ange parti trop tôt. Lonnie avait soupiré lourdement devant le regard accusateur de l'inspecteur avant de défaire le nœud de sa cravate qui semblait se resserrer de plus en plus. « Tout dépend de comment tu le demande, en ami ou en inspecteur ? » Faire de l'esprit n'était pas forcément le point fort de Lonnie et, à peine les mots avaient-ils franchis ses lèvres, il avait détourné le regard. « C'est un gamin qui a disparu depuis bien trop longtemps maintenant, et personne ne semble vouloir le retrouver. » La vérité était la seule solution, de un parce qu'il ne savait pas mentir, de deux parce qu'il ne pouvait pas cacher l'émotion dans sa voix à chaque fois qu'il parlait d'Adam. « Je connais sa sœur, Leena, c'est une amie, proche. » Et les dossiers qu'il avait emmené chez lui constituaient la preuve que Lonnie avait merdé quelque part et que le temps était venu d'en parler.
La fatigue et le manque de sommeil avaient sans doute leur part de responsabilité dans le peu de patience dont disposait Anwar ce jour-là, mais le ton résolument sec avec lequel il avait interpelé Lonnie n’était lui pas le fruit du hasard et servait un but bien précis : celui de le faire cogiter pour le reste de la journée afin qu’il soit cuit à point au moment de rejoindre son bureau. Et c’était bien l’air qu’avait le jeunot lorsqu’il avait frappé à la porte du bureau, que l’équipière d’Annie avait quitté non sans y aller d’une légère dose de sarcasme pour laisser les deux hommes en face à face. Lui laissant le temps de s’installer sur le fauteuil en face du sien, le brun avait laissé passer quelques secondes mais décidé de ne pas s’embarrasser de sous-entendus ou de demi-questions : il était question d’Adam, et par conséquent le nom d’Adam avait été la première chose prononcée, plantant définitivement le décor et avec lui l’attention particulière que l’inspecteur portait à la réaction de Lonnie. Soupirant avec dépit, ce dernier avait défait le nœud de sa cravate dans une tentative malheureuse de chercher un peu d’air, et n’avait reçu d’Anwar qu’un regard teinté d’impatience lorsqu’il avait questionné « Tout dépend de comment tu le demande, en ami ou en inspecteur ? » La réponse à cette question dépendait clairement de la réponse que le jeune homme aurait à proposer à la question précédente, et plutôt que de lui offrir le moindre commentaire Anwar avait secoué la teinte, l’enjoignant à fournir rapidement une explication. Valable, de préférence. « C'est un gamin qui a disparu depuis bien trop longtemps maintenant, et personne ne semble vouloir le retrouver. » Sans sourciller, l’australien d’adoption s’était néanmoins surpris à songer que cette réponse il aurait totalement pu la fournir lui aussi, si la question lui avait été adressée. Adam était devenu l’un de ces dossiers poussiéreux après lesquels plus personne – hormis la famille – n’espérait la moindre résolution, le genre de dossier que la persévérance d’un flic ou deux à relire cent fois les mêmes rapports en espérant y trouver quelque chose de plus différent que la fois précédente ne rebutait pas. « Si plus personne ne s’y intéresse je suis curieux de savoir pourquoi c’est ton matricule qui apparait comme dernière consultation du dossier. » Autrement dit son matricule de gamin à peine sorti de l’enfance à l’époque où cette enquête avait été ouverte. Visiblement plus chamboulé qu’il ne voulait le faire croire par l’évocation de cette affaire, Lonnie avait fini par cracher le morceau « Je connais sa sœur, Leena, c'est une amie, proche. » et malgré lui Anwar avait arqué un sourcil. Il n’avait pas vraiment envisagé la possibilité que Leena soit mise sur le tapis, ou qu’elle puisse s’avérer être une connaissance commune. Mais il en connaissait moins sur les fréquentations de Leena que sur celles de Tess – ou tout du moins l’avait-il toujours pensé jusqu’à ce que les récents événements ne lui fassent remettre cette certitude en question. « Proche ? » s’était-il alors autorisé à questionner sans vergogne, le flic prenant le pas sur l’homme comme souvent lorsqu’étaient portés à sa connaissance des faits dont il ignorait jusque-là l’existence. « Donc, si je sors mon téléphone et que j’envoie un message à Leena pour lui demander si elle connaît un Lonnie Hartwell, elle confirmera ton histoire ? » Joignant le geste à la parole, il avait récupéré son smartphone sur le bureau et fait mine d’ouvrir Whatsapp ; Pour jauger la réaction de Lonnie plus que par véritable intention de déranger Leena. « Il se trouve que c’est également une amie. Et je préfère m’assurer qu’elle n’est pas importunée pour n’importe quoi à propos de cette histoire, tout ça a déjà fait suffisamment de dégâts chez les Scofield. » La mise en garde prenant des airs moins revêche cependant, Anwar attendait de plus amples explications de la part de Lonnie pour lever définitivement le doute quant au fait que le dossier de la disparition d’Adam ne faisait pas l’objet d’une simple curiosité malsaine. Les parents Scofield avaient eu leur lot de fausses pistes et d’espoirs menant à des culs de sac, tous étant souvent le fait d’enquêteurs débutants trop zélés, persuadés que se frotter à de vieux cold cases leur permettrait de résoudre l’affaire de la décennie et d’en obtenir les lauriers. Et Lonnie, tout à sa bonne volonté et son fond résolument bon, pouvait correspondre au profil du jeune flic en recherche d’une reconnaissance qu’il n’obtenait pas au sein de sa brigade.
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Si la mouche de la bonne humeur et de l’excitation l’avait piqué aujourd’hui il n’en était de même pour Anwar qui avait dû avoir à faire avec sa cousine moins compatissante qui l’avait rendu bougon ainsi qu’impatient, du moins il l’avait été quand Lonnie était entré dans le bureau. D’une ambiance chaude et amicale il était passé à quelque chose de plus sombre et froid qui n’amènerait rien de bon dans la conversation, et quand l’inspecteur avait congédié sa partenaire le Hartwell savait que c’était pour ne pas avoir de témoin de ce qui allait se passer. Depuis leur dernière conversation le policier avait eu tendance à voir Anwar comme un ami plus que comme un collègue, si bien qu’il cherchait souvent sa présence dans les moments de solitude et qu’il appréciait de plus en plus le partage de certaines tâches entre les deux unités. Mais ça n’était clairement pas cet homme-là qu’il avait en face de lui en ce moment, celui-là était plus du genre à froncer les sourcils et à soupire d’impatience plutôt que de distribuer des sourires et des œillades amicales. Mais jamais Lonnie ce ne serait attendu à ce que la conversation tourne autour d’Adam, ce gamin que tout le monde semblait avoir oublié, le dernier né de la famille Scofield qui hantait souvent les pensées du policier au point de les tendres vers la paranoïa. Il soupira lourdement, rangea ses mains tremblantes dans les poches de son jean avant de lancer à l’inspecteur une phrase piquante, un peu sarcastique qui n’allait sûrement pas arranger la situation. Anwar, bien décidé à ne rien laisser passer même sur le ton d’un humour un peu lourd, avait hoché la tête vers le bleu et cela voulait clairement dire qu’il n’était pas d’humeur à causer pour ne rien dire. Lonnie avoua ses torts, sa relation avec Adam tout en lâchant au passage un sous-entendu comme quoi il était le seul à se soucier de ce gamin et de sa disparition qui n’avait jamais eu aucun sens. « Si plus personne ne s’y intéresse je suis curieux de savoir pourquoi c’est ton matricule qui apparait comme dernière consultation du dossier. » La cage s’était refermé sur un Lonnie incapable de fournir des explications, se contentant de se mordre la lèvre et regardant vers le plafond et en priant pour que ce dernier s’écroule sur sa tête. Ça ne pouvait pas durer éternellement après tout, quelqu’un aurait forcément regardé au mauvais endroit et le Hartwell aurait été découvert d’une manière ou d’une autre. Mais le fait que ça soit Anwar, l’un seul ici pour qui le jeune policier avait de l’admiration comme de la sympathie, ça lui foutait l’estomac en l’air. « Il fallait bien que quelqu’un le fasse. » Sur un ton de défi qui lui avait arraché les lèvres Lonnie avait plongé son regard sur Anwar avant d’enfuir furtivement sa tête dans ses mains, grattant un sourcil, se pinçant le nez. « Écoutes, je sais que c’est pas la meilleure de choses à faire et que ça va à l’encontre de ce qu’on fait au quotidien, mais j’avais besoin de réponses, pour moi et pour sa famille. » ça n’était pas assez pour s’expliquer mais c’était tout ce qu’il avait sous la main à ce moment précis. Alors il avait mis Leena sur le tapis, comme pour se dédouaner d’un mensonge qu’il lui avait partagé, et même si la jeune femme n’était pas forcément d’accord avec les méthodes employées Lonnie s’était persuadé qu’il faisait ça aussi un peu pour elle. « Proche ? » Le regard d’Anwar en disant long sur ses pensées et le nom de Leena ne semblait lui être inconnu, le bleu hocha alors la tête à l’affirmative avant d’inspirer un bon coup pour se redonner du courage. « Proche. » Il ne voulait pas trop en dire de son adolescence et de cette période charnière pendant laquelle la jeune femme avait été d’une grande aide pour lui, la confidente de ses pensées les plus sombres et – une fois seulement – celle vers qui il avait trouvé du réconfort à l’abri d’un arbre dans la cour du lycée. « Donc, si je sors mon téléphone et que j’envoie un message à Leena pour lui demander si elle connait un Lonnie Hartwell, elle confirmera ton histoire ? » L’inspecteur avait saisi son téléphone jusque-là posé sur le bureau devant lui et le policier avait encouragé son geste d’un signe de la tête. « Passe-lui le bonjour pour moi. » Encore une fois ce ton de défi qui lui allait si mal, qui brûlait ses lèvres, mais le seul qu’il arrivait à avoir dans des moments comme celui-ci, même en présence d’un ami qu’il avait toujours respecté. « Désolé. » qu’il murmura à demi-mots sans avoir le cran de regarder Anwar dans les yeux, de peur que celui-ci ne décide de l’expédier pour de bon dans la salle des archives à grands coups de pieds dans le cul. « Il se trouve que c’est également une amie. Et je préfère m’assurer qu’elle n’est pas importunée pour n’importe quoi à propos de cette histoire, tout ça a déjà fait suffisamment de dégâts chez les Scofield. » Il avait raison, sur toute la ligne, et même si Leena était au courant des agissements de son ami Lonnie n’allait aucunement la mêler à cette affaire encore plus qu’elle ne l’était déjà. « C’est justement pour ne plus que ça fasse de dégâts que j’ai fait ça… » Sans s’en rendre compte Hartwell s’était levé de sa chaise et avait fait le quatre cent pas dans le bureau, agrippant ses doigts pour les tordre. « Il est peut-être mort ce gamin et tout le monde s’en fout. » Le murmure de sa voix s’était transformé en un souffle brûlant, exaltant presque d’une colère qu’il avait trop souvent retenu. « Si c’était le mien jamais j’aurai baissé les bras, peu importe les putain de flics paresseux. » Lonnie tremblait, son visage était rendu rouge par la colère et l’indignation de savoir qu’il allait être puni pour quelque chose qui lui semblait logique, vital même. Le souci c’est qu’Adam n’était pas son fils, ni même un cousin éloigné qui aurait pu « justifier » le fait qu’il ait rapporté des documents chez lui malgré l’interdiction formelle de mettre son nez dans des histoires qui ne le concernait pas le moins du monde. Les mains sur les hanches et un air désabusé sur le visage le policier avait baissé les épaules dans un signe de soumission. « Je mettrai un terme à tout ça et je comprendrai que tu en parles à Bates ». Sous l’épée de Damoclès le bleu avait déjà sa place attribuée, et il attendait maintenant la sentence comme un chien qui aurait pissé sur la moquette et qui devrait se confronter aux regards de ses maîtres.
Il y avait probablement un peu de vrai dans les paroles de la mère de Tarek. Dans cette façon qu’elle avait de lui reprocher, souvent, de la traiter comme une suspecte et de s’adresser à elle comme s’il menait un interrogatoire plutôt que comme s’il avait une discussion avec son épouse. Le fait était qu’Anwar avait fini par s’habituer à être celui qui posait les questions et qui exigeait des réponses, assez pour que son attitude professionnelle ne finisse par déteindre sur son attitude personnelle, et bien qu’il tâchait encore de faire croire le contraire son face à face avec Lonnie n’était pas tant guidé par une quelconque conscience professionnelle que par la méfiance d’un ami pour les vautours qui par le passé étaient déjà venus importuner les Scofield. Bien sûr il observait et côtoyait désormais Lonnie depuis suffisamment longtemps au sein du commissariat pour ne pas douter que ses actions étaient guidées par de bonnes intentions, qu’il n’y avait dans cet intérêt pour l’enquête sur la disparition d’Adam ni dessein sournois ni curiosité malsaine … Mais un peut-être un excès de zèle, qui sait ? Une volonté maladroite de vouloir faire ses preuves, de montrer qu’il pouvait être bon à plus que ce pourquoi les membres de son équipe l’utilisaient. Il aurait pu y avoir un peu de cela dans le ton qu’avait utilisé le jeune policier pour rétorquer « Il fallait bien que quelqu’un le fasse. » en guise de justification, avant de se montrer plus mesuré au moment d’ajouter « Écoutes, je sais que c’est pas la meilleure de choses à faire et que ça va à l’encontre de ce qu’on fait au quotidien, mais j’avais besoin de réponses, pour moi et pour sa famille. » Et si Anwar n’avait pas eu le loisir de rétorquer que l’initiative venait en tout cas bien de lui et non pas de la famille en question, ce n’était que parce que déjà Lonnie avançait son second argument comme on avançait ses pions sur un échiquier. Il se disait proche de Leena, et tandis que l’inspecteur insistait sur le mot et que la recrue répétait « Proche. » le brun scrutait pour tenter de déceler le coup de bluff éventuel. Un coup de bluff du genre de celui qu’il avait utilisé à son tour en sortant son téléphone pour faire mine d’envoyer un message à Leena, pour ne récolter en fin de compte qu’un « Passe-lui le bonjour pour moi. » insolent immédiatement ponctué du « Désolé. » du bonhomme qui craignait subitement d’avoir dépassé les bornes. Usant du même regard sévère que celui employé parfois avec son fils lorsqu’il tirait trop sur la corde, le policier s’était fendu d’un « Je préfère. » qui donnerait sans doute injustement l’impression à Lonnie, regard fuyant, d’être traité comme un adolescent plutôt que comme l’adulte qu’il était. Marquant néanmoins une pause, Annie avait fait son possible pour ravaler son excès flagrant de paternalisme avant de consentir à justifier à son tour les raisons de cet interrogatoire officieux. Il n’y avait pas de mal à rouvrir un vieux dossier, au fond, mais il y en avait toujours un peu quand se rouvraient par la même occasion les vieilles plaies d’une famille en ayant déjà suffisamment bavé. « C’est justement pour ne plus que ça fasse de dégâts que j’ai fait ça … Il est peut-être mort ce gamin et tout le monde s’en fout. » D’abord résigné, Lonnie s’était mué en l’espace de quelques secondes en cette boule de frustration que la suite n’avait fait qu’illustrer « Si c’était le mien jamais j’aurai baissé les bras, peu importe les putain de flics paresseux. » et qui l’avait fait quitter sa chaise pour arpenter le bureau dans sa largeur. Croisant les bras tout en laissant son dos s’enfoncer dans le dossier de son fauteuil, Anwar avait secoué la tête et objecté d’un ton volontairement neutre « Mais ce n’est pas le tien, et raisonner de cette façon t’empêche d’envisager les choses avec objectivité. » Une objectivité dont étaient en revanche pourvus les flics que le jeune homme qualifiait de paresseux, oubliant momentanément de faire preuve d’humilité face à ceux qui avaient enquêté à l’époque où lui n’était encore qu’un collégien boutonneux. « Tu as eu le dossier sous les yeux, alors tu sais pertinemment qu’une unité entière est restée dédiée à cette enquête pendant plusieurs semaines … Mais je suis sûr qu’ils seraient enchantés qu’un petit bleu vienne leur expliquer comment ils auraient dû faire leur boulot. » Le ton à nouveau empreint de sévérité, Anwar espérait au moins lui donner l’occasion de réfléchir la prochaine fois qu’il cracherait un peu trop précipitamment dans la soupe, puis d’une voix plus pondérée il avait repris « Crois-moi, j’ai eu l’occasion de rencontrer un ou deux des enquêteurs qui ont bossé là-dessus, et ne pas avoir réussi à retrouver Adam reste un des regrets de leur carrière. Tout comme tu en auras probablement quelques-uns à la fin de la tienne, parce qu’aucun flic n’est infaillible et que des enquêtes qui se terminent en cul-de-sac il y en aura toujours … C’est injuste, c’est frustrant, mais plus vite tu l’accepteras moins difficile ce sera de vivre avec le moment venu. » Penaud, reprenant cet air qu’il avait de toujours hésiter à s’excuser de tout, Lonnie avait soupiré en abaissant les épaules. « Je mettrai un terme à tout ça et je comprendrai que tu en parles à Bates. » Quittant à son tour son fauteuil, Anwar était venu s’asseoir sur le rebord de son bureau et avait jaugé le jeune homme quelques secondes avant de lui accorder une réponse « Je ne compte pas en parler à Bates. » Quoi soit dit en passant se foutait probablement bien de savoir que l’une de ses recrues faisait des heures supplémentaires sur de vieux dossiers une fois rentré chez lui, pourvu qu’il n’en entende pas parler. « Mais tu ne peux pas emporter la copie d’un dossier chez toi comme ça, sur un coup de tête. S’il y a le moindre problème ou si un document fuite, et que tu es la dernière personne à avoir consulté le dossier, c’est à toi qu’on viendra demander des comptes. » Et là autant dire qu’ils auraient de véritables ennuis et qu’il ne s’agirait pas simplement de justifier de ses motivations face à un bougon d’inspecteur. « Si tu veux continuer à t’informer sur ce dossier grand bien t’en fasse, mais fait en sorte de te couvrir, toujours. Et à moins qu’il n’y ait un coupable à appréhender ou une réponse tangible à apporter à la disparition de leur fils, les Scofield ne doivent pas en entendre parler – ils ont eu suffisamment de faux espoirs. J’ai ta parole là-dessus ? » C’était probablement peu cher payé en comparaison du savon qu’avait semblé craindre Lonnie lorsqu’il s’était senti démasqué.
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Pendant de longs mois il s’était persuadé de n’avoir rien fait de mal alors que ses yeux parcouraient inlassablement les mêmes lignes encore et encore. Après tout il était flic, c’était son boulot de mener des enquêtes afin de démêler le vrai du faux, que cette dernière ce reporte à la disparation d’Adam ou non Lonnie s’était convaincu qu’il ne faisait que son travail et qu’il serait lui qui apporterait les réponses attendues depuis de si longues années. Derrière les mensonges qu’il se racontait à lui-même afin de mieux faire descendre la pilule se cachait pourtant une vérité saillante qu’il avait toujours refusé de voir en face, il n’avait pas le droit de faire ce qu’il faisait, bonnes intentions ou pas. Assis sur cette chaise comme un suspect, faisant face à cet inspecteur qu’il considérait comme un ami mais qui, lui aussi, ne faisait que son boulot, Lonnie sentait le poids d’une culpabilité profonde s’installer sur ses épaules. Le bleu jouait d’insolence, argumentait ses phrases par des piques acérées qu’il n’aurait jamais eu dans une toute autre conversation, surtout pas avec Anwar qui lui avait toujours témoigné du respect et de l’empathie. Il se sentait victime de cette justice qui, selon lui, n’avait pas fait le nécessaire pour retrouver ce gamin, et jamais il n’avait pensé qu’il pourrait très bien être un suspect lui aussi. L’inspecteur avait toutes les balles dans son camp et puis Lonnie parlait plus il sentait sa rhétorique se fendre sous les questions longuement réfléchies et pleine de sens d’Anwar qui roulait des yeux et s’offusquait devant le moindre petit signe d’insubordination. Il utilise Leena comme argument, comme énième remarque teintée d’impertinence, mais ce rend très vite compte que ses paroles dépassent sa pensée alors qu’il formule des excuses à demi-mots. « Je préfère. » Comme un père qui fait la morale et dont Lonnie a tellement manqué quand il était plus jeune. C’est peut-être ça qu’il lui faut en fin de compte, une bonne remise à zéro des compteurs afin de lui montrer qu’il n’est pas le seul à pâtir des choix qu’il fait et des actions qu’il mène. Pour rien au monde il n’avait voulu blesser la famille Scofield, eux qui avaient tant souffert, tant dépensé d’énergie dans cette recherche qui semblait pourtant vaine. Adolescent blessé dans son estime qui fuit le regard paternaliste d’un mentor Lonnie avait ravalé sa salive pour ne pas s’attaquer de nouveau à cette injustice qui faisait de lui le puni plutôt que le sauveur. Les arguments que le bleu avançait n’avaient de sens que pour lui et le regard insistant d’Anwar était le signe que ces derniers ne tenaient pas la route, que malgré toute la bonne volonté du monde il n’était pas en mesure de prendre les décisions et d’ouvrir à nouveau ce dossier comme on le ferait avec un vieux journal intime. Lonnie parle d’Adam comme d’un frère, d’un fils, sans doute pour combler son manque d’attaches familiales, mais là encore les arguments ne sont bons qu’à se faire démolir pièces par pièces alors que son regard se perd de nouveau vers le plafond afin de retenir une colère qu’il sait fatidique. « Mais ça n’est pas le tien, et raisonner de cette façon t’empêche d’envisager les choses avec objectivité. » Objectivité qui était l’un des maîtres mots de leur boulot et qui demandant une certaine retenue dans la plupart des enquêtes. Affalé sur la chaise, les mains tremblantes et le regard hagard Lonnie s’était levé pour faire les cent pas et il savait pertinemment que les paroles de l’inspecteur étaient non pas pour l’enfoncer mais pour le secourir d’une éventuelle mise à pieds qui l’aurait détruit. « Je sais bien … mais reconnait au moins que tous les moyens n’ont pas été envisagés pour retrouver Adam. » Parce que pour lui ils auraient dû appeler la cavalerie, faire toutes ces choses que l’on ne voit que dans les films, même si il sait que la plupart tirent bien plus de la fiction que de la réalité. C’était une rage noire, contre les autres, contre lui-même, et il se noyait peu à peu dans cette marée de questions auxquelles personne n’avait jamais trouvé de réponses. « Tu as eu le dossier sous les yeux, alors tu sais pertinemment qu’une unité entière est restée dédiée à cette enquête pendant plusieurs semaines…Mais je suis sûr qu’ils seraient enchantés qu’un petit bleu vienne leur expliquer comment ils auraient dû faire leur boulot. » Touché. Le ton sec mais juste Anwar venait de balancer à Lonnie une chose à laquelle il n’avait jamais pensé, le mépris total qu’il avait eu pour les agents déployés sur cette enquête et qui, comme lui, n’avaient pas arrêté de chercher des preuves menant à Adam. Baissant les yeux, petit garçon pris sur le fait d’une bêtise qu’il ne peut pas expliquer, la voix de Lonnie s’emmêle alors qu’il cherche quelque chose à répondre, tout, n’importe quoi qui pourrait justifier son comportement, mais la vérité c’est que rien ne peut le justifier et que lui aussi aurait très mal pris qu’une recrue s’incruste de telle manière dans l’une de ses enquêtes. « Crois-moi, j’ai eu l’occasion de rencontrer un ou deux des enquêteurs qui ont bossé là-dessus, et ne pas avoir réussi à retrouver Adam reste un des regrets de leur carrière. Tout comme tu en auras probablement quelques-uns à la fin de la tienne, parce qu’aucun flic n’est infaillible et que des enquêtes qui se terminent en cul-de-sac il y en aura toujours … C’est injuste, c’est frustrant, mais plus vite tu l’accepteras moins difficile ce sera de vivre avec le moment venu. » Un petit sourire se glisse sur les lèvres de Lonnie alors que sa course interminable se termine et qu’il rejoigne sa place, expirant un soupir et baissant les épaules. « Je le connaissais ce gamin, il était… plein de vie et souriant et gentil… » Les images d’Adam lui reviennent en mémoire et c’est un nouveau coup dur pour le Hartwell qui n’arrive pas à fixer son regard autre part que sur ses chaussures, évitant tout contact avec l’inspecteur qui n’a pourtant rien fait d’autre que de l’aider depuis le début de la conversation. « Encore aujourd’hui je me dis qu’il va revenir, comme ça, d’un coup, avec le même sourire et qu’on fera comme si il ne c’était rien passé. » Douce utopie qui berçait la vie d’un Lonnie trop rêveur, sûrement trop proche pour travailler sur cette affaire. Si Anwar le dénonçait il prendrait ses responsabilités, qui à se faire mettre au placard pour quelque temps, parce qu’après tout l’inspecteur n’avait fait que son travail, et cela l’était tout autant de dire les choses afin d’éviter que les erreurs se répètent. Anwar avait pris place sur le rebord du bureau, jugeant le bleu du regard alors lui n’arrivait pas à voir autre chose que le sol du bureau. « Je ne comptes pas en parler à Bates. » Lonnie avait retenu un soupir de soulagement alors qu’il osait fixer son regard dans celui de l’inspecteur. Et même si Bates pouvait bien se foutre de l’erreur qu’avait commise le fait qu’Anwar décide de ne pas lui en parler voulait tout dire pour le Hartwell, soulagé de savoir que - malgré tout - il pouvait compter sur cet ami si précieux à ses yeux. « Merci. » Que la recrue soupire pensant être sortie d’affaire pour le moment. « Mais tu ne peux pas emporter la copie d’un dossier chez toi comme ça, sur un coup de tête. S’il y a le moindre problème ou si un document fuite, et que tu es la dernière personne à avoir consulté le dossier, c’est à toi qu’on viendra demander des comptes. » Encore une fois les paroles du mentor étaient teintées d’une vérité que Lonnie n’avait pas voulu entendre avant, qui lui semblait dérisoire à l’époque mais qui, maintenant, prenait un sens encore plus lourd dans la bouche d’Anwar. « Et je ne veux pas avoir de problèmes, vraiment. Je ferais en sorte de ne plus mettre mon nez dans les affaires des autres, même si ça me mets dans une rage folle. » Sourire aux lèvres, timide et presque caché, Lonnie savait que cette conversation était une première mise en garde, et si Anwar avait été indulgent ce coup là rien ne pouvait prévoir qu’il le serait autant au prochain dérapage. « Si tu veux continuer à t’informer sur ce dossier grand bien t’en fasse, mais fait en sorte de te couvrir, toujours. Et à moins qu’il n’y ait un coupable à appréhender ou une réponse tangible à apporter à la disparition de leur fils, les Scofield ne doivent pas en entendre parler – ils ont eu suffisamment de faux espoirs. J’ai ta parole là-dessus ? » Honteux, fautif d’avoir essayé de faire les choses sans même prendre le temps de réfléchir à ce qui était bien ou mal Lonnie avait levé les yeux, de nouveau, vers l’inspecteur dont le ton était redescendu vers quelque chose de plus amicale, de moins acerbe. « La dernière chose que je voulais c’était leur causer du tort. » Leena, ses parents, la mémoire d’Adam, ils ne méritaient pas d’être autant remués par un gamin avide de réponse, mis en colère par la disparition d’un ami. « Tu as ma parole, bien sûr. » Elle valait ce qu’elle valait, mais jamais plus Lonnie ne voulait entendre ce ton dans les paroles de celui qu’il considérait comme un ami. « J’étais…tellement en colère que j’ai pas vu le mal qu’il y avait derrière. » Confessions d’un malheureux qui ne pensait pas à mal, qui voulait juste retrouver le sourire d’un copain. « Désolé que tu ais du employer ce ton avec moi, je serais un meilleur homme la prochaine fois. » Pas de parole en l’air, de promesses vaines, Lonnie se devait d’attirer le respect de la part de ses paires, et plus jamais il ne voulait entendre les sermons d’Anwar.
Lonnie n’en démordait pas et voulait se persuader que si le petit Scofield n’avait toujours pas été retrouvé cela voulait forcément dire que tout n’avait pas été tenté, que le boulot n’avait pas été bien fait – qu’il manquait quelque chose. Et Anwar ne l’en blâmait pas entièrement au fond, il avait été habité des mêmes sentiments et avait eu les mêmes questionnements, mais la vérité c’est qu’ils étaient vains et que le brun tendait éviter à Lonnie de perdre autant de temps qu’il n’en avait perdu à refaire le passé et le cheminement des événements. La disparition d’Adam était une tragédie teintée d’une injustice certaine, mais les choses étaient arrivées et à moins d’un miracle les éléments qui manquaient à la résolution de cette énigme ne tomberaient pas du ciel … La faute à pas de chance, au fond. « Je le connaissais ce gamin, il était … plein de vie et souriant et gentil … Encore aujourd’hui je me dis qu’il va revenir, comme ça, d’un coup, avec le même sourire et qu’on fera comme si il ne c’était rien passé. » Et on le voyait bien, là, le regard de la jeune recrue que les dizaines, les centaines de dossiers n’avait pas encore terminé de décourager, le fatalisme qui n’avait pas encore planté sa graine et planté ses racines en profondeur. « Je sais … Et je ne suis pas en train de dire que tu ne peux pas te soucier de toute cette histoire, ou de comment elle pourrait terminer. Mais ne va pas te griller face à des flics chevronnés en faisant des allégations sans réfléchir, parce que les flics parlent entre eux, d’un poste à l’autre tout fini toujours par se savoir. Tu m’suis ? » Lui-même n’avait pas encore eu vent de la curiosité de Lonnie, il ne l’avait fait venir dans son bureau que pour s’assurer que tout cela n’irait pas à nouveau éclabousser les Scofield … Mais il n’avait aucune envie d’entendre dire un soir, au comptoir d’un de ces bars à flics qu’il fréquentait avec autant d’habitude que les autres, qu’un petit bleu nommé Hartwell cherchait un peu trop les emmerdes. Pour le reste, l’inspecteur était d’avis que les choses pouvaient en rester là et que le big boss n’avait pas besoin d’être mis au parfum, ce à quoi Lonnie murmura un « Merci. » visiblement soulagé. « Et je ne veux pas avoir de problèmes, vraiment. Je ferais en sorte de ne plus mettre mon nez dans les affaires des autres, même si ça me mets dans une rage folle. » A surveiller malgré tout, donc. Mais maintenant qu’il savait son petit secret éventé auprès de quelqu’un d’autre peut-être Lonnie y réfléchirait-il à deux fois avant de prendre une éventuelle mauvaise décision … Anwar ne pouvait que l’espérer, au fond. « La dernière chose que je voulais c’était leur causer du tort. » avait en tout cas assuré le jeune homme avec une visible sincérité « Tu as ma parole, bien sûr. J’étais …tellement en colère que j’ai pas vu le mal qu’il y avait derrière. » Estimant que le message était passé et que la leçon était retenue, Anwar s’apprêtait à nuancer le propos de Lonnie pour le dissuader de toute auto-flagellation mais ce dernier avait été plus rapide en ajoutant « Désolé que tu ais du employer ce ton avec moi, je serais un meilleur homme la prochaine fois. » Le dos retournant s’appuyer contre le dossier de son fauteuil, le brun avait observé un court instant le regard du policier avant de répondre « J’ai tendance à m’emporter un peu vite quand il est question de mes amis, je voulais simplement éviter qu’il soit causé du tort aux Scofield … Ne le prends pas personnellement. » La volonté de ne néanmoins pas perdre la face lui interdisant de formuler des excuses – qui sous-entendraient qu’il avait mal agi – en bonnes et dues formes, Anwar espérait malgré tout que Lonnie n’y voit pas un désaveu. Il restait un bon élément, à la fois comme policier et comme personne, et loin de l’inspecteur l’envie de tuer dans l’œuf une bonne volonté qui manquaient parfois cruellement à certain dans ce travail. Quittant son fauteuil, le policier s’était dirigé vers la machine à café, l’air définitivement plus détendu que lorsque cette discussion avait commencé « Tant que t’es là, sortant du placard le second mug qu’il gardait pour les « invités » - flanqué d’une pip-up Coca-Cola dont le vintage était supposé excuser la légèreté de la tenue – comment ça se passe ces derniers temps, dans ton équipe ? Ça s’arrange ? » Le délai raisonnable durant lequel on pouvait s’autoriser à traîner les petits bleus comme des larbins était dépassé, et Annie osait espérer que les capacités de Lonnie commençaient à être exploitées. « Café ? » Il demandait, mais il n’avait pas attendu pour mettre la tasse sous la cafetière et lancer le programme espresso. Dans le pire des cas ce serait un double shot de caféine pour Anwar, qui au même titre que le taux de sucre dans son sang n’en avait pour ainsi dire jamais assez.
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Combien de flics étaient passés par là ? Qui d’autre s’était retrouvé, comme lui, assis sur une chaise à ne pouvoir rien dire de plus que des excuses, à ne pouvoir rien faire à part contempler le mur en serrant les fesses ? Lonnie avait cette fâcheuse tendance à penser qu’il avait le monopole du malheur, que ce qui lui arrivait en ce moment n’était jamais arrivé à quelqu’un d’autre que lui et qu’il était toujours le vilain petit canard de toutes les histoires. Anwar démontait patiemment les œillères du policier, lui faisant ainsi comprendre que ça n’était pas juste de s’en prendre de cette façon à des flics qui n’avaient fait que leur boulot, qui s’étaient résignés à mettre de côté leur vie familiale pour se concentrer sur cette affaire, sur Adam. Ça, tous ces éléments gravitant autour de la disparition du jeune garçon, ça n’avait jamais eu d’importance dans la tête têtue de Lonnie qui n’avait d’yeux que pour la finalité de l’histoire, Adam n’avait jamais été retrouvé et il devait bien blâmer quelqu’un. Penaud, les bras croisés sur sa poitrine afin de contrôler une respiration devenue délicate, Hartwell relève les yeux de temps à autre pour éviter que la situation ne prenne encore plus des allures de rencontre parent/prof où l’étudiant ne sait plus quoi faire à part regarder ses pieds et prier en silence. Tout ce qu’il voulait, au fond, c’était revoir son ami, prendre une bière, ou deux, ou quinze au bar du coin et n’en avoir rien à foutre de l’enquête. Mais la rhétorique de l’inspecteur était affutée et les mots qu’il adressait à Lonnie n’avaient pas pour but de le soumettre mais plutôt de l’élever afin de devenir plus pragmatique, plus intelligent, afin de ne plus laisser les émotions prendre le pas sur les affaires. Tête baissé le rouquin avait pleuré la disparition de son ami dans des mots, s’était excusé de la façon grotesque et dangereuse avec laquelle il avait traité les choses, les mots de l’inspecteur faisant effet sur un Lonnie dont les convictions d’avoir fait le bien se muaient en impressions d’avoir tout gâché. « Je sais… et je ne suis pas en train de dire que tu ne peux pas te soucier de toute cette histoire, ou de comment elle pourrait terminer. Mais ne vas pas te griller face à des flics chevronnés en faisant des allégations sans réfléchir, parce que les flics parlent entre eux, d’un poste à l’autre tout fini toujours par se savoir. Tu m’suis ? » Acquiesçant d’un signe de la tête discret mais direct le bleu se redresse un peu dans son siège, abandonnant cette position de soumission pour quelque chose de plus adulte reflétant l’état d’esprit dans lequel il espérait se trouver. « Bien sûr, on me tire déjà assez dans les pattes alors si je pouvais éviter de me faire un croche-pied tout seul… » Parce que la dernière chose dont il avait besoin c’était d’être le sujet d’une rumeur allant bon train dans les bars ou vers les machines à cafés. Le policier hausse un maigre sourire sur ses lèvres alors qu’il se répandait de nouveau en excuse, trop n’étant pas encore assez à ses yeux. L’image d’une Leena mise au courant puis consternée par l’attitude de son ami au sujet de cette histoire était aussi déterminant pour lui que les mots coriaces mais indulgents d’Anwar, et le bleu n’avait aucune envie de perdre son amie qui – de nombreuses fois – lui avait gentiment demandé de laisser tomber. Pire que la perte de son emploi Lonnie ne supporterait pas la perte de ses amis, surtout de la jeune femme qui avait toujours été d’une précieuse aide dans des moments où le policier ne pensait pas pouvoir se relever. « J’ai tendance à m’emporter un peu vite quand il est question de mes amis, je voulais simplement éviter qu’il soit causé du tort aux Scofield… Ne le prend pas personnellement. » C’était ce qui pouvait s’apparenter les plus à des excuses de la part de l’inspecteur, et Lonnie savait très bien qu’il pouvait perdre la face maintenant après le discours qu’il lui avait tenu. Maigre sourire sur les lèvres le policier avait hausser les épaules, non pas par désinvolture mais pour exprimer le fait que cette discussion avait été bénéfique et que jamais il ne retiendrait les paroles d’Anwar comme des piques acérées destinées à lui faire de la peine ou à remettre en cause son boulot. « Pas de soucis, je comprends. » La curiosité du Hartwell fut néanmoins piquée au vif, Leena n’avait jamais mentionné l’inspecteur ni même évoqué qu’elle avait des amis, autre que lui, dans les forces de l’ordre. « Si je peux me permettre, comment tu as rencontré Leena ? » Un brin indiscret le rouquin avait posé son regard sur Anwar qui avait quitté son fauteuil pour rejoindre la machine à café, signe que l’altercation entre les deux hommes appartenait maintenant au passé. « Tant que t’es là, comment ça se passe ces derniers, dans ton équipe ? Ça s’arrange ? » Le bleu se pinça les lèvres tout en profitant de cet instant de calme pour étirer ses membres endolories par de longues secondes d’immobilisation. « Disons que je me fais entendre, chose que je ne faisais pas avant. » Sans taper du poing sur la table Lonnie avait trouvé une manière plus sérieuse et professionnelle de se faire comprendre par ses collègues. Il n’avait jamais été du genre ‘grande gueule’, de ceux qui savent s’exprimer afin que tout le monde écoute, mais le policier avait trouvé une manière plus adéquate afin de se faire respecter un minimum par ses paires. « Je leur apporte des choses auxquelles ils n’avaient pas forcément pensés avant, tout en incluant un peu de sarcasme histoire de dire que je ne me laisserai pas faire… Mais toujours dans le respect. » Le rouquin afficha un sourire alors que l’inspecteur désigna la cafetière d’un ton interrogatif. « Café ? » Le policier se redressa, se levant même afin de faire circuler le sang dans son corps qui avait tenu la même position trop longtemps à son goût. « Oui, merci. » Cette hache de guerre bien enterrée (même si il savait qu’à la moindre erreur de sa part Anwar n’hésiterai pas à lui enfoncer dans la tête) le Hartwell se dirigea vers la porte depuis laquelle on pouvait voir, à travers la vitre, l’ébullition du commissariat ainsi que les allés et venus du personnel se mêlant avec ceux de potentiels suspect. « Je me dis qu’un jour ils en auront tellement marre qu’ils finiront par laisser tomber. » Tout en gardant les épaules levées le policier s’était approché d’Anwar et du café qui finissait lentement sa course dans la tasse. « Et puis je crois que j’en ai surtout marre de battre dans le vent. Autant leur prouver que j’ai des choses à apporter dans l’équipe plutôt que de rester dans mon coin à me lamenter. » Pas peu fier d’avoir réussi à enfiler son big boy pants Lonnie s’adossa contre le bureau de l’inspecteur, faisant face à la vitre depuis laquelle tout le monde pouvait le voir, un maigre sourire sur les lèvres.
Partagé entre le regret de s’être emporté un peu vite en prêtant à Lonnie de plus mauvaises intentions qu’il n’en avait en réalité, et la volonté de ne pas perdre la face en admettant carte sur table qu’il s’était trompé, Anwar avait tenté d’arrondir les angles pour lier les deux sentiments, présentant au jeune policier des excuses qui ne se nommaient pas mais qui, il l’espérait, lui serviraient néanmoins de leçon. Pas de nature contrariante, le bonhomme s’était fendu d’un « Pas de soucis, je comprends. » scolaire, qui aurait pu suffire à refermer la parenthèse si un brin de curiosité ne l’avait pas piqué au point d’enchainer presque directement « Si je peux me permettre, comment tu as rencontré Leena ? » L’air soudainement songeur, comme si la question réveillait chez lui des souvenirs que la situation actuelle rendait douloureux, il avait machinalement rangé dans sa poche le téléphone avec lequel il menaçait de contacter Leena quelques instants plus tôt pour corroborer l’histoire de Lonnie. « Tu connais Tess, sa meilleure amie ? » Celle-là même à qui Anwar n’avait pas adressé la parole depuis des semaines, les punissant ainsi autant elle que lui sans pour autant se sentir capable de faire machine arrière. « C’était ma voisine, quand on était plus jeunes. Et c’est la marraine de mon fils, surtout. » Pas du genre à étaler sa vie privée à tort et à travers sur son lieu de travail, Anwar n’était pas certain d’avoir déjà mentionné l’existence de Tarek auprès de Lonnie ; Mais soit, il n’y avait rien de secret là-dedans non plus. « J’ai baby-sitté Adam quelques fois, avant que … enfin voilà. » Avant qu’il ne disparaisse, donc, et que le brun ne devienne de toute manière trop pris par sa propre paternité pour avoir encore le temps de s’occuper des enfants des autres. Mettant ainsi un point final à l’interlude souvenirs d’enfance, l’inspecteur avait quitté son fauteuil pour proposer un café à Lonnie comme on offrait un calumet de la paix, et s’affairant autour d’une cafetière qui ne comptait assurément pas ses heures dans ce bureau, il en avait profité pour s’enquérir de l’avancée de la situation du jeune policier dans son service. Semblant choisir soigneusement ses mots, ce dernier avait affirmé « Disons que je me fais entendre, chose que je ne faisais pas avant. » marquant une courte pause avant de reprendre d’un ton néanmoins affirmé « Je leur apporte des choses auxquelles ils n’avaient pas forcément pensés avant, tout en incluant un peu de sarcasme histoire de dire que je ne me laisserai pas faire … Mais toujours dans le respect. » Quittant à son tour sa place, Lonnie était allé se poster près de la porte du bureau d’un air pensif, ajoutant enfin « Je me dis qu’un jour ils en auront tellement marre qu’ils finiront par laisser tomber. » avant de revenir à nouveau vers Anwar pour récupérer la tasse de café qu’il lui tendait – et pour ce faire le jeune homme hériterait du la vieux mug Kellogg’s d’ordinaire réservée aux invités, qu’ils soient de la maison ou entendus comme témoins. « Et puis je crois que j’en ai surtout marre de battre dans le vent. Autant leur prouver que j’ai des choses à apporter dans l’équipe plutôt que de rester dans mon coin à me lamenter. » Arborant un sourire qui cachait difficilement sa satisfaction face aux résolutions de Lonnie, Anwar avait fait tinter son mug contre celui de son collègue « On dirait que les choses sont sur la bonne voie. » Parce que le rouquin avait enfin décidé de saisir ses opportunités plutôt que d’attendre simplement sagement qu’on les lui donne, tout d’abord, et parce que si le reste de son équipe laissait faire et ne tenter pas de s’y opposer sans doute étaient-ils un peu plus décidés qu’il ne l’étaient au départ à prêter une oreille à ce que le petit bleu avait à dire. « Si mon propre bleu pouvait faire preuve du même sens de l’initiative. » n’avait d’ailleurs pas pu s’empêcher de penser Anwar à voix haute, Banks en étant lui toujours au stade où le brun n’aurait pas été surpris qu’il demande aussi l’autorisation pour lacer ses chaussures. Ça et le fait que les mois passants il terminait toujours la tête dans l’évier lorsqu’ils descendaient à la morgue, persuadant peu à peu l’inspecteur que les homicides n’étaient définitivement pas faits pour lui, et que la bonne volonté ne suffirait pas à changer la donne.
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Sans vraiment en prendre la forme les paroles qu’Anwar avait distribuées à Lonnie en guise d’excuses étaient suffisantes pour le bleu qui était passé à deux doigts de perdre la confiance si précieuse de son collègue et ami. Bien conscient que l’inspecteur ne voulait pas revoir de sitôt Lonnie dans son bureau pour une histoire semblable le Hartwell avait fait la promesse de ne pas réitérer les conneries qui l’avaient amené ici en premier lieux, le dossier d’Adam étant bien trop proche de son cœur pour qu’il puisse avoir un jugement impartial vis-à-vis des efforts qui avaient été fournis par les agents de l’époque. Alors qu’Anwar rangeait son téléphone dans sa poche, mettant ainsi fin à la menace Leena qui planait au-dessus de sa tête, Lonnie s’empressa de questionner l’inspecteur sur l’origine de sa relation avec la jeune femme qui semblait être un point important dans leurs vies respectives. « Tu connais Tess, sa meilleure amie ? » Le bleu avait rassemblé les souvenirs de ses dernières conversations avec Leena, et le prénom que venait de citer Anwar lui disait vaguement quelque chose, comme une tâche flou dans le paysage. « De nom seulement. » Jamais il n’avait eu le plaisir de rencontrer la jeune femme quand bien même elle occupait une grande place dans la vie de Leena, mais il était vrai que le rouquin n’avait pas forcément cherché à en apprendre plus sur la vie de la jeune femme, bien trop occupé à remué le passé. « C’était ma voisine quand on était plus jeunes. Et c’est la marraine de mon fils, surtout. » Lonnie avait haussé un sourire, il était au courant de l’existence de ce fils qu’Anwar n’avait jamais caché, même si il n’avait jamais eu de conversation avec l’inspecteur concernant cet aspect de sa vie privée qu’il souhaitait, et bien, garder privé. « J’ai connu Leena plus jeune aussi, au lycée, elle a été là pour moi dans un moment difficile. » Peu de personnes ici ignoraient le parcours du Hartwell et cette sordide histoire qui l’avait propulsé sur le devant de la scène à un si jeune âge, Anwar y compris. « J’ai baby-sitté Adam quelques fois, avant que … enfin voilà. » De toute évidence il était compliqué pour Lonnie comme pour Anwar de traiter du sujet, ni l’un ni l’autre ne souhaitant remuer le couteau dans une plaie, ancienne certes, mais encore bien ouverte. « Tu as donc plusieurs cordes à ton arc, si jamais je dois faire garder mon chat je penserai à toi. » Par ‘mon chat’ il entendait ‘le chat de la voisine’ qui passait plus de temps avec lui qu’avec son propriétaire. Pour enterrer la hache de guerre Anwar fit bourdonner la machine à café, offrant à Lonnie la tasse des invités qui était sûrement passé entre plusieurs mains, innocentes ou non, avant les siennes, mais le bleu était loin d’être en droit de réclamer la tasse prestige, cadeau uniquement réservé aux amis de longue date.
La conversation dérive sur Lonnie, son équipe et la place qu’il y prenait. Haussant les épaules bleu avait confié sa volonté d’arrêter de s’apitoyer sur son sort pour enfin se sortir les doigts et faire ses preuves, chose qui avait don d’étonner ses petits camarades qui n’avaient encore jamais remarqués que Lonnie avait une voix, et qu’il n’avait plus peur de la faire entendre. Hartwell avait saisi la tasse tendue par l’inspecteur tout en le remerciant du regard, préférant de loin la chaleur du café à la froideur de la conversation qu’ils avaient eu quelques minutes plus tôt. « On dirait que les choses sont sur la bonne voie. » Lonnie ne pouvait être qu’en accord avec les paroles de l’inspecteur, il avait enfin trouvé un moyen de mettre un terme aux piques acérées de ses collègues qui le voyait maintenant comme un membre de l’équipe et non plus comme un cafard constamment fourré dans leurs pattes. « On dirait bien oui, je n’ai pas encore ma place sur la photo de Noël mais je compte bien m’y attaquer cette année. » Loin de lui pourtant l’envie de rejoindre le côté beauf de la force Lonnie avait pourtant toujours eu ce désir de se sentir accepté, peu importe qu’il doive cocher la case ‘faire un barbecue chez John, sa femme, et leur triplés diaboliques’. « Si mon propre bleu pouvait faire preuve du même sens de l’initiative. » Hartwell haussa un sourire sur ses lèvres avant de finir son café d’une traite, entendant déjà les paroles fleuries de Bates qui hurlait que quelqu’un lui dise où était ‘Johnny’. « Laisse lui un peu de temps, il finira pas comprendre. Sinon tu le prends à part dans ton bureau, crois-moi que c’est diablement efficace. » Le bleu avait déposé la tasse sur le bureau avant de saluer Anwar d’un signe de la tête, le remerciant silencieusement de lui avoir mis ce coup de pied au cul dont il avait besoin.