Accoudé au bar Gabriel se perdait dans la contemplation des nuances brunes de la bière qui trônait devant lui. Le McTavish bruissait joyeusement de voix, rires et claquements de verres sur fond de musique entraînante, l’irlandais appréciait particulièrement cette ambiance qui lui rappelait les pubs irlandais qu’il aimait tant. On ne se refaisait pas, les racines restaient, pour toujours. C’était sans doute pour cette raison que lorsque l’occasion se présentait il ne rechignait jamais à faire la route jusque Bayside, aucun autre établissement dont il avait connaissance ne lui procurait cette sensation de douce nostalgie. Pourtant ce soir-là quelque chose le perturba dans sa tranquillité, une désagréable sensation d’être observé avec insistance attira son attention de l’autre coté du comptoir. Jetant un coup d’œil en diagonale dans cette direction, Gaby croisa le regard foudroyant d’une brune. Nul doute que si ses yeux avaient eu le pouvoir de tuer, le libraire n’aurait pas fait long feu. Retenant à peine un soupir il revint à sa bière dont il prit une longue gorgée. Il ignorait s’il méritait réellement pareille œillade pourfendeuse. Peut-être ? Bien qu’à dire vrai il n’avait fait que repousser les avances un peu trop insistantes et sans doute quelque peu alcoolisées de la femme en question qui, contre toute attente, était revenue à plusieurs reprises à la charge. Cela tenait sans doute plus à son ego d’irrésistible séductrice blessé qu’au réel charme que pouvait avoir un libraire mélancolique et solitaire frôlant la quarantaine. Du moins c’est ainsi que Gabriel imaginait les choses. Après tout il est vrai que la dernière tentative de la brune s’était soldée par un renvoi un peu sec de la part de l’irlandais qui lui avait en substance laissé entendre que ça ne l’intéressait définitivement pas et qu’il valait sans doute mieux qu’elle trouve une autre cible pour jouer de ses charmes. Pas de chance pour elle, elle était tombée sur un mauvais jour et même si ils étaient rares il était des moments où la patience naturelle de Gaby pouvait s’épuiser. Et de toute évidence la demoiselle avait mal pris cet affront, visiblement vexée d’être repartie bredouille avec pour seul mérite d’être parvenu à extirper un prénom à cet irlandais aussi peu causant qu’un garde royal anglais en service. Un coup d’œil succinct dans sa direction confirma à Gabriel le regard sombre qu’elle posait toujours sur lui… Et voilà qu’une autre femme, à qui la première semblait parler, adressa le même genre d’air vaguement outré dans sa direction, avant de quitter celle qui devait être son amie et se diriger d’un pas décidé vers le coin du bar où il se trouvait. Que diable la brune était-elle allée raconter à sa camarade ? Ce qui était sûr c’est qu’il ne s’agissait en aucun cas de paroles élogieuses. Il allait vite être fixé puisque déjà elle arrivait à sa hauteur. « Gabriel ? » Le libraire prit une profonde inspiration. Il n’avait pas la moindre envie d’épiloguer avec la camarade de celle à qui il avait ni plus ni moins mis un râteau. S’étaient-elles vraiment passé le mot dans le seul but de l’empêcher de boire sa bière tranquillement ? Se tournant lentement vers la femme qui avait prononcé son prénom sur un ton relativement peu aimable, Gaby n’eut cependant pas le temps de dire quoique ce soit que la main féminine s’éleva avec vivacité dans les airs avant de venir s’écraser en une monumentale baffe dont le claquement retentit presque à travers tout le pub. Mais à son grand étonnement ce ne fut pas sa joue qui en fut gratifiée… mais celle de son voisin. Le pauvre homme ne devait pas comprendre ce qui venait de lui arriver, du moins pas plus que les autres personnes autour, témoins directs de cette scène digne d’une comédie hollywoodienne. Et avant que quiconque ait réagi la fille s’était éclipsée comme elle était venue. L’irlandais resta interdit quelques secondes, devant le surréalisme de ce qui venait de se passer, avant de poser une main sur l’épaule de son voisin et lui adresser un regard sincèrement désolé et soucieux. « Euh… ça va ? Toutes mes excuses pour ça, je crois que c’est à cause de moi que vous venez de vous prendre cette volée. » Le libraire ne savait vraiment plus où se mettre. « Enfin sauf si vous vous appelez aussi Gabriel et que vous avez eu maille à partir avec cette fille-là. » Mais il fallait reconnaître que ça faisait quand même beaucoup de "si".
« Ca marche, on se voit demain ! Par contre, tu m’excuseras, je dois filer. Louisa m’attend et si je rentre pas à l’heure, tu la connais… » Anders quitta Owen d’une frappe sur l’épaule avant de se volatiliser en pleine nature. Owen finissait son verre et ensuite, il suivrait aussi le même chemin, celui de la sortie. Il avait accepté de sortir après l’entrainement de rugby, comme c’était souvent le cas les mardis soir. L’un des pubs de la ville les plus prisé par le club sportif était bien le McTavish. Cette ambiance irlandaise où le rugby est aussi une religion, l’équipe ne pouvait que s’y sentir bien. D’ailleurs, lorsque les Wallabies affrontait les irlandais pour la coupe du monde de Rugby, l’ambiance était vraiment au plus haut niveau. Pas question de rivalité, dans les pubs, comme dans les stades, l’ambiance est bonne enfant. Et les vrais irlandais qui trainent dans le coin ne regrette jamais de passer par là, en cas de victoire ou de défaite. Face à son verre, seul à présent, Owen termina les quelques derniers centilitres et il était prêt à partir quand quelq’un lui tapota l’épaule à nouveau. Il se retourna et vit ce petit bout de femme qui avait l’air énervée. « Gabriel ?! » le prêtre n’eut pas le temps de répondre qu’il sentie cette chaleur pénétrer dans sa joue. Le claquement avait retenti aussitôt dans ses oreilles. Un silence de quelques secondes et tous les yeux braqués sur Owen dans le bar. Tout le monde avait assisté à cette scène ; il venait de se faire gifler gratuitement après s’être fait appeler Gabriel. La jeune femme s’était envolée aussi rapidement qu’elle n’avait baffé le prêtre qui restait totalement con sur son siège. De l’autre côté, une autre main se posa sur son autre épaule. « Non, non, ca suffit ! » se défend-il avant de ne recevoir une autre gifle. « Euh… ça va ? Toutes mes excuses pour ça, je crois que c’est à cause de moi que vous venez de vous prendre cette volée. » Le prêtre le regarda toujours un peu sonné par ce qu’il venait de se passer. « Enfin sauf si vous vous appelez aussi Gabriel et que vous avez eu maille à partir avec cette fille-là. » Okay donc le Gabriel en question, c’était lui… « Je ne vous remercie pas en tout cas ! » il chercha la jeune femme du regard mais impossible de la trouver. « j’ignore ce que vous avez pu faire mais… visiblement c’était bien mérité ! » le prêtre passa sa main sur sa joue surement encore toute rouge au vue de la chaleur qu’il sentait sous sa main. « Ça réveil… j’étais sur le point de partir et … voilà. Je suis victime de votre succès auprès de la gente féminine ! » Owen ne lui en voulait pas trop, il avait l’air assez sympathique de prime abord.
Un quiproquo digne d’un feuilleton humoristique ou d’une comédie grand public, voilà qui aurait pu qualifier à la perfection la scène qui venait de se jouer au comptoir du McTavish. En réalité Gabriel avait un peu de mal à saisir précisément comment les choses en étaient arrivées là. Jamais il n’aurait cru que le fait d’éconduire cette brune puisse avoir ce genre de répercussions, et moins encore que ce soit son voisin de bar qui ramasse une baffe monumentale à sa place. Et l’irlandais en fut aussitôt profondément désolé et contrit. Si bien qu’il s’inquiéta sans tarder de l’état de l’inconnu. Ce dernier, visiblement sacrément refroidi par cette volée totalement gratuite, eut un léger mouvement de recul lorsque Gaby posa sa main sur son épaule pour s’excuser d’être à l’origine du malheur du pauvre homme dont la joue présentait presque une empreinte parfaite de la main féminine qui s’était abattue dessus. Le libraire arborait un air sérieusement ennuyé, d’autant que la responsable avait filé comme l’éclair après son méfait et qu’elle avait déjà sans doute mis les voiles avec son amie. « Désolé. » A son tour son interlocuteur balaya d’un regard la foule qui reprenait tranquillement le fil de la soirée après cette interruption pour le moins… percutante. « Eh bien à vrai dire c’est peut-être précisément parce que je n’ai rien fait… » Gabriel passa une main dans ses boucles brunes, comme il le faisait souvent lorsqu’il n’était pas tout à fait à l’aise. Et il y avait de quoi ! Après tout son interlocuteur venait de se faire gifler à sa place alors qu’il n’avait rien demandé. « Enfin je l’ai visiblement vexé. Je ne pensais pas que le fait de dire « non » à quelqu’un pouvait conduire à ce genre... de réactions en fait. Ou alors j'ai quelques lacunes en la matière. » Après tout l’irlandais avait toujours eu un fonctionnement un peu différent de celui de la plupart des gens, et, bien qu’il ait fait de nombreux progrès à ce niveau-là, il avait encore parfois du mal à saisir les comportements de ses semblables. Mais alors honnêtement cette fois-ci les choses lui échappaient plus encore que d’ordinaire et tout cela lui paraissait foncièrement excessif. Cependant l’homme qui lui faisait face n’avait pas l’air de lui en vouloir plus que ça, du moins ne lui avait il pas encore retourné la claque qu’il avait pris à sa place. Et à vrai dire Gaby lui en était assez reconnaissant. Sa dernière remarque fit d’ailleurs sourire le libraire. Un sourire amusé. « Je crains que cela tienne plus à son ego de toute évidence blessé, qu’à mon hypothétique succès à vrai dire. » Gabriel observa son voisin de comptoir avec sa joue encore bien rouge avant d’afficher une moue confuse. « Elle n’y est vraiment pas allée de main morte en plus... » Comment se faire pardonner auprès de cet inconnu pour lui avoir causé pareil ennui ? « Vraiment je suis terriblement désolé pour ça. Est-ce que... Est-ce que je peux vous payer un autre verre ou faire quelque chose pour vous ? » Gaby n’avait réellement aucune idée de ce qu’il convenait de faire dans une telle situation et à nouveau sa main vint trouver ses mèches brunes, comme par réflexe.
Owen sentait encore cette chaleur qu’avait provoqué la claque sur sa joue. Il imaginait bien être marqué comme au fer rouge. Il venait sans doute de se faire passer pour un gougeât auprès de la clientèle de ce bar et il pouvait se rassurer qu’aucun croyant venant à son église n’était présent ce soir. Il osait à peine imaginer ce qui pourrait circuler comme rumeur à son sujet si cette scène avait été vu par l’un des fidèles qui se rendait à l’église chaque semaine. Heureusement pour lui, il ne fréquentait que très peu les bars de Redcliff,de peur justement de se faire attraper avec une bière à la main : ‘’le curé c’est un pilier de bar’’. Bah voyons. Et si en plus, on le voit se prendre une claque de la part d’une jeune femme, manquerait plus qu’on lui fasse la réputation de coureur de jupon ou d’emmerdeur. Le genre de chose pas trop compatible avec la fonction de prêtre et dont certain se ferait un malin plaisir de rependre, pour lui nuire. Pas forcément à lui personnellement, mais à tout ce qu’il pouvait représenter : la religion, le christianisme en particulier, cette autorité naturelle que peuvent avoir les prêtres (ou du moins, c’était vraiment le cas il y a encore quelques dizaines d’années, beaucoup moins à présent…) et le raccourci très simple entre prêtre et pédophilie, malheureusement. Ma sa place était encore sauve pour un moment, sauf si quelqu’un avait filmé la scène et allait la balancer sur les réseaux sociaux, il était encore tranquille. Sa gène se résumait seulement à une main sur son visage à l’heure qu’il était. L’homme qui était le légitime destinataire de cette claque s’excusa à nouveau auprès d’Owen qui ne semblait pas lui en vouloir vraiment. Pas rancunier, il ne pouvait pas non plus lui rendre la baffe en retour. « Eh bien à vrai dire c’est peut-être précisément parce que je n’ai rien fait… Enfin je l’ai visiblement vexé. Je ne pensais pas que le fait de dire « non » à quelqu’un pouvait conduire à ce genre... de réactions en fait. Ou alors j'ai quelques lacunes en la matière.» vu sous cet angle, Owen comprenait un peu mieux la situation. « Donc, vous avez refoulé une jeune femme et elle n’a pas su vous reconnaitre à nouveau… » se trompant de cible pour son agression. « Enfin, les nanas se promènent en meutes dans les bars en général… » ce serait sans doute plus logique d’ailleurs que ce soit l’une de ses amis qui ai pris cette initiative. Mais, elle aurait certainement pu s’assurer qu’elle s’adresse à la bonne personne avant de lancer les hostilités. « Je les ai vu ressortir à plusieurs… » fit-il d’un air presque désespéré. « moi qui continue de croire en l’humanité et à la fraternité… » on y était souvent encore loin. Il se redressa quand même, regardant ce Gabriel donc, c’est comme ça qu’elle avait appelé Owen avant qu’il ne comprenne plus rien à la situation. « Elle n’y est vraiment pas allée de main morte en plus… Vraiment je suis terriblement désolé pour ça. Est-ce que... Est-ce que je peux vous payer un autre verre ou faire quelque chose pour vous ? » Owen jeta un œil à l’horloge puis à la porte de sortie et de nouveau à l’horloge. Il n’était pas si tard que ça et s’il s’apprêtait à sortir c’était par ce qu’il s’était retrouvé rapidement tout seul. « Allons-y pour un verre. Sans vouloir abuser de vous… » après tout, c’était son droit de réclamer dommages et intérêt. « Moi c’est Owen au fait. Et inutile de vous présenter en retour… j’ai bien retenu votre prénom, Gabriel. » tout comme l’ange d’ailleurs. Mais si ce dernier était venu apporter une bonne nouvelle pour l’arrivée de Jesus, celui qu’il avait en face de lui n’était pas aussi porteur de chance.
Le visage de Gabriel était probablement aussi pâle que la joue de son pauvre voisin était rouge. Il ne savait plus du tout où se mettre, à la fois désolée et profondément confus. Il faut dire que c’était bien la première fois que quelqu’un se faisait gifler à sa place, si tant est qu’on ait déjà voulu le gifler, mais là n’était pas tellement la question. Déjà qu’il n’y avait rien d’agréable à entrer en contact avec la paume d’une main lancée à vive allure, alors si en plus c’était par erreur… Il y avait de quoi être pour le moins contrarié. Pourtant son interlocuteur, bien que franchement refroidi de prime abord – et à raison –, sembla visiblement ne pas lui en tenir trop rigueur. Gaby, lui, se confondait en excuses, ne sachant comment se faire pardonner cette situation malheureuse. Il était un peu déboussolé par ce qui venait de se passer, peut-être autant que l’homme à coté de lui qui frottait encore sa joue rougie par la force de l’impact. Si on lui avait un jour dit qu’une femme qu’il avait refoulé enverrait une de ses copines le baffer et que cette dernière se tromperait en prime de cible, jamais il n’aurait cru cela possible. Et pourtant… Il y avait vraiment des personnes qui ne tournaient pas rond dans ce monde. Ou alors il y avait bien des choses qui lui échappaient, ce qui était une possibilité tout aussi envisageable. De toute évidence elles échappaient également à son infortuné compagnon. « A vrai dire la jeune femme qui vous a giflé accompagnait vraisemblablement celle que j’ai… euh… éconduit, si je puis dire. Enfin cela n’excuse en rien ce qui vous arrive. Croyez bien que j’en suis profondément désolé. » Le libraire se répétait une fois de plus, mais à vrai dire il ne trouvait rien de mieux que s’excuser encore et encore. Mais tout de même, cette histoire n’avait positivement ni queue ni tête ! Et ça se bousculait un peu dans sa tête. Lui qui se posait souvent un tas de questions, qui cherchait à comprendre les réactions des gens. Il y avait de quoi l’occuper un moment. Et au milieu des circonvolutions de son esprit il cherchait surtout comment se faire pardonner, un minimum tout au moins, et peut-être un peu plus concrètement qu’en renouvelant des excuses à tour de bras. Bien que cela lui parut tout à fait nécessaire au vu de la situation ubuesque dans laquelle ils se trouvaient présentement. Gaby jeta un coup d’œil par-dessus son épaule, cherchant une dernière fois du regard les demoiselles en question, mais elles s’étaient déjà éclipsées sans attendre. « Je crois que vous avez raison, elles ont dû filer ensemble. » Il laissa filer un profond soupir. Ce furent les mots de son voisin qui ramenèrent l’attention de l’irlandais à lui. moi qui continue de croire en l’humanité et à la fraternité… « Oh mais il faut continuer ! », qu’il s’était empressé de répondre sans trop bien savoir pourquoi. Lui qui, plus jeune, éprouvait quelques craintes vis-à-vis de ses semblables, se réfugiant plus volontiers dans les pages d’un livre, comme pour se protéger d’un monde qu’il ne comprenait pas et qui parfois le tourmentait. Pourtant il avait depuis appris à s’ouvrir aux autres, il savait le monde passionnant, empli de surprises et de beauté, de personnes merveilleuses aussi. Il en avait perdu certaines en chemin, il savait ce que la vie pouvait apporter de douleurs infinies. Et pourtant… Pourtant même les blessures les plus profondes pouvaient cicatriser, très lentement certes, très difficilement aussi, mais c’était possible. Et tout cela il l’avait découvert grâce à de formidables et précieux êtres qui avaient pris place dans sa vie, qui l’avaient aidé à surmonter ces épreuves, ses épreuves. Alors oui, il fallait croire encore en l’humanité, croire que l’amour, la fraternité, la bienveillance faisaient bien parties de ce monde et ne demandaient qu’à s’exprimer, qu’à ce que les Hommes leur fassent un peu plus de place dans leur vie plutôt que de se laisser aller à la violence. Enfin ce soir était un mauvais exemple. « Enfin… je crois. », avait ajouté Gaby, un peu plus bas, comme pour lui. Il y croyait oui. Mais il était des jours où c’était moins évident que d’autres. Le libraire avait fini par demander s’il pouvait faire quoi que ce soit pour son voisin, éventuellement lui payer un verre si le cœur lui en disait. L’homme sembla hésiter, jetant plusieurs coups d’œil à l’heure. Gabriel lui laissa le temps de la réflexion. Après tout peut-être n’avait-il pas envie de côtoyer davantage celui qui était à l’origine de son malheur. Il finit par accepter l’offre avant de se présenter. Car avec tout cela si lui connaissait désormais le nom de l’irlandais, ce dernier ignorait le sien. Gabriel lui tendit la main avec un sourire encore quelque peu fragile. Comme pour recommencer par le début, en bonne et due forme. « Owen, enchanté. Vraiment. Enfin je veux dire malgré les circonstances… » Gaby n’était toujours très à l’aise, sitôt que les événements le tiraient hors de sa ‘‘zone de confort’’ il avait encore un peu de mal à retrouver toute sa contenance. Une nouvelle fois il passa une main dans ses boucles brunes. C’était plus fort que lui. Il prit une profonde respiration. « Vous n’abusez pas, loin de là, après tout je suis à l’origine de votre mésaventure alors c’est tout à fait normal. Qu’est-ce que vous aimeriez boire ? », demanda t-il, attendant la réponse d’Owen avant de faire signe au barman. Les commandes passées il se tourna de nouveau vers son voisin. « Hum… Vous aimez lire ? Enfin si jamais vous passez du coté de Toowong, je travaille dans une librairie et euh… Ce que je veux dire c’est que si vous y passiez je serais ravi de vous offrir un livre ou même un café, un thé, que sais-je. » L’irlandais lui adressa un léger sourire. Il se sentait un peu idiot, conscient que quelqu’un de plus sûr que lui ne s’exprimerait sans doute pas de façon aussi maladroite. Oui mais voilà, il avait toujours été un peu à coté de la plaque coté ‘‘comportements normaux’’ en société. Son regard vint s’échouer sur le zinc. « Pardonnez-moi pour ça… », dit-il en faisant un vague geste de la main. « Je crains de ne pas être très doué en société. » Ca lui avait presque échappé, dans un souffle. Lui qui était plus habitué à écouter les autres qu’à parler de lui, ça le surprenait un peu lui-même. « Enfin, vous vous en êtes sans doute rendu compte par vous-même. » Il conclut, comme pour alléger un peu le tout. Un rire timide au bord des lèvres.
« A vrai dire la jeune femme qui vous a giflé accompagnait vraisemblablement celle que j’ai… euh… éconduit, si je puis dire. Enfin cela n’excuse en rien ce qui vous arrive. Croyez bien que j’en suis profondément désolé. » Même si la joue d’Owen était encore un peu rouge et chaude, il n’en voulait pas à cet homme qui, visiblement était un briseur de cœur. Owen était un joueur de rugby et il se prenait parfois des coups plus violents que ça, mais au moins, c’était légitime. Cette fois, on peut dire qu’il n’avait rien fait pour mériter ça. « La prochaine fois que j’entends parler d’un Gaby, je me méfierais. Si jamais on se recroise par ici, car j’ai l’impression que c’est pas la première fois que je vous vois dans ce bar… je saurai que je dois m’éloigner. Mais si non, sans rancune ! » Et puisqu’il lui offrait un verre en retour, les dommages et intérêt étaient payés. « Vous n’abusez pas, loin de là, après tout je suis à l’origine de votre mésaventure alors c’est tout à fait normal. Qu’est-ce que vous aimeriez boire ? », « Va pour la dernière bière ! » il en avait déjà pas mal abusé avec ses coéquipiers qui étaient d’ailleurs déjà tous partis, mais Owen jouait les prolongations. Il ne trainerait pas par contre, le lendemain, il avait la messe dominicale à assurer et là, il ne pouvait pas vraiment se permettre la gueule de bois. Fini les soirées jusqu’à pas d’heure pour Owen les samedis soirs, chaque Dimanche, le prêtre devait être frais et disposé. Qui sait comme il pourrait être soumis aux critiques s’il arrivait émécher un jour. Heureusement pour lui, ce n’était pas encore arrivé. . « Hum… Vous aimez lire ? Enfin si jamais vous passez du coté de Toowong, je travaille dans une librairie et euh… Ce que je veux dire c’est que si vous y passiez je serais ravi de vous offrir un livre ou même un café, un thé, que sais-je. » Owen posa une main sur l’épaule de son interlocuteur, comme pour le rassurer. « Je passerai à l’occasion quand je serai dans le quartier. Mais vraiment, ca va aller ! On a pas eu besoin d’aller les secours non plus. » s’amusa le prêtre. « Par contre, si elles reviennent avec toutes la bande et qu’elles me sautent à nouveau dessus, on renégociera le contrat ! Pour l’instant, une bière suffit ! » « Pardonnez-moi pour ça… Je crains de ne pas être très doué en société. Enfin, vous vous en êtes sans doute rendu compte par vous-même. » Owen n’allait pas en rajouter une couche mais il confirma d’un léger signe de la tête. « Il faut de tout pour faire un monde ! Vous êtes encore capable de sortir pour voir du monde, finalement, c’est ce qui compte ! et bon… une librairie alors ? Vous me donnerez l’adresse ! Je suppose que pour être libraire, il faut un minimum de savoir être, vous devez pas être si peu doué… en société du coup ! Je crois que si quelqu’un s’était pris une giffle à ma place, j’aurai été aussi maladroit que vous ensuite… » le serveur disposa deux verres sur le comptoir devant eux, Owen pris alors le sien afin de trinquer avec Gaby. «A la vôtre ! » le prêtre nota dans son téléphone l’adresse de la librairie où travaillais Gaby, termina son verre et lui promis un passage, sans être capable de dire quand, mais une promesse était une promesse, Owen fera un bond d’ici quelques temps dans le commerce. Après avoir fini son verre et un ultime remerciement, il était pour lui de tirer sa révérence.
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