Les urgences, c’est l’enfer. Surtout lorsqu’ils mettent quelques heures à venir s’occuper de vous. Alors qu’Ambroise avait vraiment l’impression de souffrir le martyr. Ou alors tout était dans sa tête. Et tout s’est passé plus vite qu’il ne le pense. Pas sûr qu’il entende un jour le fin mot de cette histoire, en tout cas ce que les infirmières lui ont administrés sur ordre du médecin de garde a été plus efficace qu’un doliprane, car il a enfin pu profiter de quelques heures de sommeil. Lorsqu’il se réveille enfin, il a la désagréable surprise de se retrouver dans une petite chambre d’hôpital, avec cette blouse assez immonde. Puis les souvenirs reviennent. Hier, tard dans la nuit – ou tôt le matin –, son état s’aggravant, Sybbie a pris la décision, contre son gré évidemment, de l’emmener aux urgences. Au cas où. Bonnie n’y tenait absolument. L’hôpital n’étant pas tellement l’un de ses lieux favoris, il estimait aussi qu’on avait mieux à faire que de lui soigner une simple angine. Mais les premiers tests n’ont pas dû être concluant pour qu’on prévoit de le garder quelques jours, suivant l’évolution de son état.
C’est ce qu’il apprend de sa sœur, restée à son chevet toute la nuit. Elle a encore la marque du pli des draps sur la joue, ce qui arrive à faire sourire Ambroise un court instant, avant qu’il ne se rende compte qu’elle a dormi sur une chaise. Un soupire, et il lui fait comprendre qu’elle aurait pu rentrer, puisqu’il était entre de bonnes mains. Mais elle n’avait pas voulu qu’il se réveille seul, ici. A la vie à la mort, comme ils disent silencieusement. Les jumeaux inséparables. Elle vient le prendre dans ses bras, lui assurant que tout va s’arranger, mais il lui rétorque la même chose pour l’enjoindre d’aller prendre en peu de repos ou aller en cours. Ou faire ce qu’elle avait prévu de sa journée. Ce n’est qu’après le passage de l’infirmière, qui trouve même que le jeune homme est moins pâle que la veille, que Sybbie consent enfin à partir. Avec la promesse de revenir dès que possible, et d’apporter quelques affaires supplémentaires ainsi que des occupations. D’ailleurs, il lui fait une courte liste des livres qu’il aimerait bien avoir, ainsi que la demande de lui ramener ses cours. Qu’il ne passe pas son temps à ne rien faire. Car pour lui, ça va déjà mieux, et il est très confiant. Les quelques jours de cours qu’il va forcément louper, il compte bien ne pas les rattraper au plus vite et ne pas se laisser distancer. Mesure inutile pour lui, mais ça lui parait d’une grande importance.
Il s’inquiète aussi de ce qu’elle a dit à Clément. Il ne voudrait pas lui causer du souci pour rien. Hier soir, alors qu’il n’était pas au mieux de sa forme, comme depuis quelques jours, il l’a quasiment forcé à sortir comme prévu avec... Avec il ne sait plus qui. Son meilleur ami devait y passer la soirée, ce qui s’est avéré être la nuit entière, puisqu’il n’était pas là à leur départ aux urgences. Son père, ou son oncle, ou Jadyn... Il ne s’en rappelle plus. Sybille l’a en tout cas prévenu dès que possible, lorsque l’ordre du médecin a été de lui trouver une chambre pour les prochains jours. Il devait être six ou sept heures. Et maintenant que dix heures et demi sonne, et qu’Ambroise est devant une espèce de petit-déjeuner confectionné avec les moyens du bord – et de l’horaire –, il espère presque de tout son cœur que son meilleur ami va rappliquer avec un truc un peu meilleur. Même s’il doute que sa gorge inflammée le supportera. Et que Clément va laisser tomber ses cours du matin pour venir le voir. Seul à présent devant son plateau repas, il regrette un peu d’avoir chasser Sybille pour son propre bien, mais il n’a pu faire autrement. Il est trop souvent égoïste même avec sa sœur, et en état de faiblesse il est trop fier pour laisser tomber toutes les barrières, autant qu’elle reprenne un peu de forces puisqu’elle va forcément revenir dès qu’elle le pourra pour lui tenir compagnie, peu importe ses plans pour les trois prochains soirs. Il sourit légèrement, alors qu’il finit de jouer avec son porridge pour en prendre une cuillérée. Si au moins il pouvait avoir un livre... Malgré la fatigue latente, il se pense capable de lire. Mais il s’endormirait sans doute sur les pages.
Mes pas résonnent sur le carrelage froid de l'hôpital et semblent produire un bruit un peu trop fort dans le calme relatif de cette fin de matinée. Derrière le comptoir, une hôtesse d’accueil regarde l'écran de son ordinateur avec un air de dépit mélangé à celui d’ennui, comme si elle n'attendait qu'une seule chose : partir en pause de midi. C'est toutefois un sourire poli et professionnel qu'elle affiche, alors que je m'approche «Bonjour, pouvez-vous m'indiquer où se trouve la chambre d'Ambroise Macleod ? Il a été admis aux urgences au milieu de la nuit et a été transféré dans un service en début de matinée. Je ne sais juste plus lequel c'est mais je …. » « chambre 323» me coupe la jeune femme «Vous prenez l'ascenseur qui est derrière vous, troisième étage puis sur votre droite et c'est la chambre au fond du couloir à gauche » ajoute-t-elle promptement devant ma moue interrogatrice. Je la remercie furtivement puis me dirige vers l'ascenseur dans lequel je m'engouffre rapidement.
Alors qu'il se met en route, mon cœur s'accélère brusquement et ma vue se trouble, m'obligeant à m'appuyer contre la paroi froide de la cage métallique. Le pilote automatique que j'ai mit en route depuis l'appel de Sybbie il y a trois quart d'heures et qui m'a permit de quitter ma répétition de théâtre en plein milieu d'une scène importante, me guidant presque à l'aveugle jusqu'ici, commence tout doucement à s'estomper, me mettant face à la dure réalité : Ambroise est hospitalisé. C'est maintenant le malaise qui me prend, à me dire que je n'ai pas été à l'appartement. Si j'avais été là j'aurais pu l'accompagner moi-même et j'aurais peut-être su ce qui ne va pas. Fort heureusement, Sybbie était là, elle, sans quoi je ne saurais pas ce se serait passé. Dans tous les cas, je n'ai pas attendu longtemps ni même d'avantage d'explications de la part de ma colocataire lorsqu'elle m'a appelé. J'ai tout de suite quitté la scène, parlant d'une urgence, j'ai ignoré les reproches de Jonathan et Josie et j'ai choppé le premier bus qui m'a emmené non loin de l'hôpital. Sur ma route, j'ai croisé un pizza hut et je m'y suis arrêté, pensant que vu l'heure à laquelle je débarque, les repas doivent déjà être servi. Et je connais autant l'horreur de cette bouffe que le côté difficile de mon meilleur ami. Avec un bout de pizza 3 fromages, un bout de pain à l'ail et un muffin je ne peux rien faire de mal, non ?
Lorsque l'ascenseur s'immobilise et que les portes s'ouvrent, je prends une profonde inspiration pour reprendre contenance et sort de la cage. Je regarde autour de moi puis, suivant les indications de la femme à l'accueil, je me dirige vers la droite et traverse rapidement le couloir. Arrivé devant la porte de la chambre 323, je n'hésite pas longtemps et, frappant 4 fois rapidement puis une 5ème fois deux secondes plus tard, comme je frapperais à sa porte à l'appartement, je pousse la clenche et entre. «Salut » lançais-je en m'avançant dans la chambre avec une petite moue. Lentement, je referme la porte et en profite pour me reprendre, m'interdisant d'exprimer trop de compassion ou quoique ce soit qui s'y apparente : il n'a pas besoin que quelqu'un s’apitoie sur son sort. Déposant mon sac sur une chaise, je grimace «Merde... » soufflais-je en sortant le sachet Pizza Hut de mon sac à dos «J'ai prit du pain à l'ail... » je plaque une main sur ma bouche. Acting : on. «Les vampires ça craint l'ail ! » dis-je, inclinant légèrement la tête sur le côté « Avec ta pâleur extrême, tes lèvres sans couleurs et tes cernes...tu vas pas mourir si je t'en donne un bout, pas vrai … ? rassure moi !» un sourire narquois s'affiche sur mon visage alors que je secoue le sachet devant lui « Ah moins que tu ais contracté une intolérance au lactose en quelques heure... dans ce cas la 3 fromages sera pour moi» reprenais-je avec un haussement d'épaule et une moue innocente avant de sourire doucement et déposer le sachet sur la table.
«ça va ? » demandais-je finalement, avec bien plus de sérieux et inquiétude « Sybbie m'a prévenue il y a plus ou moins une heure, j'ai fait aussi vite que j'ai pu» dis-je, sincère. Au final, abandonner ma répétition était très simple et m'a paru comme une évidence. Rien, même ma future carrière, n'est plus importante que le bien être d'Ambroise. Je peux faire ce que je veux et me trouver où je veux, si Ambroise ne va pas bien, il sait que je serais là le plus vite possible.
Bonnie était en train de soupirer face à son porridge quand il entendit toquer à la porte. Sa surprise est grande de reconnaître le motif ; c’est Clément. Il frappe toujours de la même manière, quatre fois rapide plus une fois après deux secondes. Il ne pensait pas le voir aussi vite. Pendant que son ami entre dans la chambre, il regarde vite fait l’heure, et se rappelle plus ou moins qu’il devait être en répétition... Ce qui le surprend davantage, que Clément se soit précipité ici. Il sourit pourtant, bien heureux de le voir mine de rien. C’est au final une bonne surprise. « Hey », répondit-il tranquillement. Il repose sa cuillère et l’observer s’avancer dans la chambre. Et, égal à lui-même, le néo-zélandais ne se précipite pas avec pitié au chevet du lit, il préfère plaisanter en parlant du pain à l’ail qu’il a apporté. Le teint blafard d’Ambroise, largement plus que d’ordinaire, est rapproché de celui d’un vampire. Le jeune homme en rit volontiers, toujours assez doucement, comme un peu fatigué. Il veut surtout ne pas trop en demander à sa gorge douloureuse. « A part me donner légèrement la gerbe je risque pas de mourir non », rétorque-t-il en fronçant le nez. Il n’aime guère l’ail de base, mais en étant malade en plus, ce n’est pas la peine d’essayer. « Mais on sait pourquoi j’ai toujours l’air aussi jeune, je me transforme en vampire ! » ajoute-t-il avec un ricanement. « Allez envoi un bout de ta pizza, j’avais que du porridge et c’est pas que c’est dégueulasse mais c’est pas spécialement bon. »
Il remuait mollement sa cuillère dans son bol, comme pour montrer son dégoût surjoué. Car s’il n’est pas dingue du goût de cette bouille, au moins elle passe bien et rempli son estomac. Mais rien que l’odeur de la 3 fromages lui donne envie d’en croquer un bout. Il s’en prend donc une part, et il mord dedans avant de mâcher consciencieusement. Il n’avait rien pu avaler de consistant depuis hier soir, à cause de ce qu’il suppose être une angine en raison de sa gorge souffrante et de ses ganglions gonflés. Les médecins ne se sont cependant encore pas prononcés. Sybbie lui a dit qu’ils avaient quelques doutes et qu’ils voulaient passer plus d’examens. Pour le moment en tout cas, il n’a plus qu’à se reposer. Avalant finalement son bout de pizza, il hoche la tête pour répondre à son meilleur ami. « Mieux ouais », commence-t-il avant de le laisser continuer pour expliquer que la jumelle MacLeod l’a prévenu il y a environ une heure et qu’il est venu aussi rapidement qu’il a pu. Ce qui tire un sourire en coin à Bonnie, qui regarde son ami. « Je pensais pas qu’tu viendrais aussi tôt j’avoue. T’as dû partir en plein dans une répétition nan ? » La confirmation de ce qu’il pensait tombe. « T’étais pas obligé de tout laisser en plan, ils vont t’en vouloir après. Et puis c’est pas si grave pour moi, j’vais bien. » Il le rassure, et s’en veut presque un peu d’avoir dérangé son meilleur ami alors qu’il sait parfaitement à quel point son théâtre est important. Il n’était pas nécessaire qu’il rapplique immédiatement, en tout cas, n’empêche qu’Ambroise est heureux.
« Hier c’est Sybille qui a insisté pour m’emmener aux urgences », explique-t-il calmement, en continuant de manger sa part de pizza. « C’était un truc comme quatre heures du matin, j’avais pas mal de fièvre, j’arrivais pas à dormir, chaud et froid, enfin bref... Elle a tellement été chiante j’ai abdiqué. » Il hausse les épaules, comme si tout ça n’était pas si grave. Au fond de lui pourtant, il angoisse. Un pressentiment. Il se rassure, têtu comme il est, à imaginer une grippe, ou une angine, ou un truc courant qui a juste atteint son pic d’efficacité contre son corps, mais que tout va rentrer dans l’ordre. Être admis aux urgences, qu’on s’occupe de lui, et surtout les médicaments plus efficaces, tout ça était nécessaire, il le sait. Sa fierté pourtant, agi comme un barrage. « Je ne sais pas trop ce que les médecins ont vu ou dit, juste qu’ils allaient me garder un peu... » Il termine sa part mais laisse le bord trop dur à son goût sur le plateau. En temps normal il l’aurait mangé, mais il n’a pas envie de prendre cette peine aujourd’hui. « Ils veulent faire quelques tests je crois, mais l’infirmière a été gentille ce matin, et optimiste. Elle a raison d’ailleurs j’m’en mieux. D’ailleurs mec, t’as pas un livre ou un truc cmme ça ? Sybbie revient avec mes affaires qu’après les cours... » Passant d’un sujet à l’autre, se plaignant quelque peu du fait de ne pas avoir d’autre activité que la sieste. Il craint encore de ne pas pouvoir dormir, tout simplement. Mais son attitude est assez normale, pour le moment, seule sa pâleur marque sa maladie. Or, il sent la fatigue se pointer, doucement, à force de parler avec un certain entrain.
Ne pas approcher mon meilleur ami avec pitié mais plutôt jouer un rôle inutile et montrer un aperçu de mes talents de comédien.Voilà exactement ce qu'il faut que je fasse. Et, voyant et entendant le rire d'Ambroise, je sais que je suis sur la bonne voix. J'affiche moi-même un sourire lorsqu'il dit qu'il va juste avoir la gerbe et non mourir -je sais bien qu'il n'aime pas le pain à l'aï qu'en vrai j'ai prit pour moi- mais que le côté Vampire pourrait expliquer le fait qu'il ait l'air toujours aussi jeune. Je l'observe, incline la tête sur le côté puis fronce les sourcils et secoue la tête en signe de désapprobation «là, clairement, t'as l'air d'avoir prit 10 ans en une nuit, mon chou » osais-je le contre dire, agrémentant le tout avec un clin d’œil et d'un sourire amusé. Il fini tout de même par le dire de lui donner la part de pizza car le porridge qu'on lui a donné n'est pas spécialement bon. Un coup d’œil vers la bouilli me confirme ses dires et je m'empresse de sortir le carton dans lequel se trouve la part de trois fromages.
Tandis qu'il se redresse pour manger plus convenablement, je décide de m'approcher et tirer une chaise vers le lit pour m'y installer. Déposant mon sac à dos sur le sol, l'inquiétude est plus forte et m'oblige à tout de même demander à Ambroise comment il va. Sa réponse est assez rassurante : mieux. C'est tout ce qu'il dit avant que je ne lui explique pourquoi je ne débarque que maintenant et pas plus tôt. Malgré tout, mon arrivée est assez rapide et étonnante, du moins Ambroise ne s'attendait-il pas à me voir tout de suite, pensant, de manière très juste, que j'ai dû quitté une répétition en plein milieu. «Exactement » lui donnais-je raison avant d'hausser les épaules lorsqu'il me dit que je n'étais pas obligé de venir aussi rapidement, qu'ils vont m'en vouloir et que de toute manière il va bien, lui. « T'aurais pu le dire avant.... » répondais-je, faussement énervé avant de secouer la tête avec un doux sourire « Non mais en vrai quand mon meilleur ami est à l'hôpital je réfléchis pas deux fois et je rapplique. Car figure toi que t'es quand même pas mal important tu sais » je me redresse pour retirer ma veste en jeans «Et puis bon, on est entrain de réviser des scènes dans lesquelles je ne figure pas, donc je ne leur manque pas »
Acting : on, à nouveau. Certes, je ne joue pas dans ces scènes, toutefois ma présence est pas mal importante. Car c'est en observant les comédiens que je saurais comment me comporter lorsque je serais, moi-même, sur scène. Mon absence ne dérange, foncièrement, pas dans le déroulement de la répétition ce matin, mais ça n'empêche pas qu'effectivement, les gens vont m'en vouloir. Peut-être voulaient-il faire quelques italiennes en attendant leur passage ? Enfin peu importe, maintenant je suis là et, comme je l'ai dit, Ambroise est très important donc je ne regrette pas totalement d'avoir quitter le théâtre.
L'australien fini par reprendre la parole, m'expliquant ainsi un peu plus le pourquoi du comment. C'est Sybbie qui a décidé de l'emmener aux urgences cette nuit, vers 4h du matin. Lui ne voulait pas, elle a insisté et il a abdiqué. «ça m'étonne pas » me permettais-je de commenté à mi-voix, sans pour autant déranger la prise de parole du jeune homme qui m'avoue ne pas savoir ce que les médecins ont vu mais qu'ils voulaient tout de même le garder ici pour faire d'autres test. Je grimace un peu, compatissant et priant que son séjour à l'hôpital ne soit pas trop long. Encore une fois, Ambroise me dit qu'il va bien mieux et je commence tout doucement à avoir mes doutes. Ça fait trois fois en même pas 4 minutes qu'il me dit 'qu'il va bien' et je le trouve un peu trop insistant. D'autant que je connais mon meilleur ami et sa capacité hors de normes de garder les choses pour lui. Il ferait un merveilleux acteur en vrai.
Mais je décide bien vite de mettre ce flot de pensée de côté. De toute manière Ambroise, fidèle à lui-même, passe du coq à l'âne en me demandant si je n'ai pas un bouquin car Sybille ne lui a pas encore ramener ses affaires. J'arque un sourcil puis affiche une moue de réflexion et me penche sur le côté pour récupérer mon sac du sol. «Je dois avoir un truc de ce genre,oui » indiquais-je en fouillant pour sortir plusieurs choses que je pose sur le lit d'Ambroise «Alooors ...j'ai mon livre de théâtre ancien, le livre de scénographie que j'ai emprunté à Andreï … d'ailleurs faut pas que j'oublie de le lui rendre » commentais-je plus pour moi-même qu'autre chose « J'ai aussi mon classeur de cours, mais bon j'peux pas te le filer celui-là» ajoutais-je en haussant les épaules avant de sortir un dernier livre « Et 'Antigone' la pièce qu'on est entrain de monter» je pose mon regard sur Ambroise et lui sourit en désignant les 3 livres exposés sur le matelat «fait ton choix ! » indiquais-je «Au pire j'peux aller te voler quelques magasines people dans la salle d'attente » ajoutais-je pour faire un trait d'humour.
Ambroise ne fait que tirer la langue d’une manière très mature lorsque son ami lui rétorque qu’il a pris 10 ans en une seule nuit, en dépit de son allégation de transformation en vampire qui le fait supposément rester jeune. Cet aparté fait assez de bien à Bonnie, ça lui change les idées efficacement et il apprécie que Clément ne montre pas de pitié ou ce genre de chose, qu’il fasse comme si tout allait bien au final. Il aime aussi grandement son idée d’avoir apporté de la bouffe, et opte pour une part de pizza. Il n’est pas certain qu’il pourra manger davantage d’une telle nourriture solide, mais il est heureux d’avoir quelque chose de plus appétissant à se mettre sous la dent. S’attaquant déjà à sa pizza, avec contentement, il regarde du coin de l’œil le comédien s’installer, s’étonnant encore de l’heure. C’est tôt. D’ailleurs, quand il lui pose la question compliquée de comment il va, Ambroise expédie rapidement la réponse de façon à le rassurer sans lui mentir. Il va mieux, ça veut dire que ça a été pire, mais le principal est le présent. Clément comprend vite qu'il faut passer à un autre sujet et explique qu'il est venu dès qu’il a appris. L’australien ne cache pas son étonnement, ni le fait qu’il aurait préféré ne pas déranger ainsi son meilleur ami.
Clément a bien dû quitter une répétition de théâtre – importante, malgré ce qu'il dit – mais il ne serait resté là-bas pour rien au monde en le sachant à l’hôpital. Ambroise sourit légèrement, et rougit un peu (mais c’est peut-être la fièvre), touché, mais ne l’exprime pas par des mots. Il hausse simplement les épaules, avec un regard et un sourire qui en disent assez sur son soulagement de l’avoir à ses côtés. Il aurait pu s’en passer encore un peu, s’étant bien rentré dans le crâne l’importance des répétitions et études de Clément et de toutes ses activités, mais il ne va pas cracher dans la soupe. Il reprend sa pizza après un hochement tête ; il sait que Clément lui ment quelque peu sur l’importance de sa présence à la répétition de ce matin, mais fait comme si de rien n’était. Il garde un peu le silence puis décide de raconter ce qui s’est passé la nuit dernière, comme Sybbie a insisté jusqu’à le faire céder pour l’emmener aux urgences, comment il est vrai qu’il avait l’impression d’avoir touché le fond mais qu’il va mieux, et comment les médecins ont décidé de le garder plus qu’une nuit en observation. Il ne sait pas exactement le pourquoi, mais il sait qu’il en a au moins jusqu’à demain. Il espère aussi ne pas rester trop longtemps. Il insiste encore sur le fait qu’il va mieux, autant pour s’en persuader que pour rassurer Clément, tant il n’aime pas inquiéter les autres.
Il passe ensuite totalement à autre chose, sans se faire reprendre. Un livre ne serait vraiment pas de refus, car Sybille ne sera pas de retour avant la fin de journée et il a besoin de s’occuper. Avoir cette perspective le fait aussi oublier où il se trouve, et pourquoi. Le besoin de s’évader devient plus vital que jamais, bien qu’il s’endormira sans doute sur l’ouvrage. Fort heureusement, Clément a ce qu’il faut. Ou presque. Il a des livres, trois seulement, qu’il expose sur le lit en les présentant un à un. D’abord un livre sur le théâtre ancien, puis sur la scénographie, et pour finir Antigone. Le cœur de Bonnie loupe un battement en entendant le prénom d’Andreï, autant pour le mot en lui-même que parce qu’il sort de la bouche de son meilleur ami. Il se reprend pourtant, du mieux qu’il le peut. Ne pas laisser paraître son léger trouble ; faiblesse d’un malade. « Je vais pas voler tes cours et je vais non plus laisser mon cerveau dépérir en lisant des magazines, te donne pas cette peine », rétorque-t-il à l’humour du comédien. Un sourire en coin, casser par une brève toux. Il reporte ensuite son attention sur les livres, et, se demandant pourquoi il se pose autant de question, choisit son instinct et s’empare du livre de scénographie. « Il attendra bien encore un jour ou deux », fait-il remarquer, se rappelant de sa patience. « Il va bien d’ailleurs ? » Sa question le prend autant par surprise que si elle avait été prononcée par quelqu’un d’autre. Commençant à se perdre dans le livre, c’est son inconscient qui avait parlé pour lui. Le regard vert cependant baissé sur les premières pages du livre sélectionné, Clément ne peut remarquer tout cela.
Recouvrant le contrôle de soi, Ambroise lève son attention sur son ami en arquant un sourcil. « Et tu crois que si tu vas à l’université genre demain tu pourras voir Arnaud ? Pour qu’il te file les cours que je suis en train de manquer, si je dois rester plus longtemps... » Il s’occupera de le contacter plus tard, mais il ne peut plus s’empêcher de vouloir prévoir alors qu’un pressentiment diffus lui fait miroiter encore plusieurs jours coincé à l’hôpital. Mais pour ça, il faudrait encore avoir un mot des médecins, ou du médecin, en charge de son cas. Et ce n’est pas forcément gagné. Lui qui n’a pas tant de patience que cela aimerait au moins savoir ce à quoi il doit s’attendre.
Emi Burton
Dernière édition par Ambroise MacLeod le Mer 14 Nov 2018 - 13:54, édité 1 fois
Même si j’étais en pleine répétition, il m’était impensable de ne pas venir. En vrai je n’ai pas du tout hésité lorsque Sybbie m’a prévenu que l’état d’Ambroise s’était empiré, à tel point qu’ils aient dû aller aux urgences et qu’il va devoir rester hospitalisé quelques temps. J’ai tout de suite tout quitté et je suis parti chopper le premier bus que j’ai trouvé et qui m’a emmené ici. C’était logique et normal à mon sens. Dans le fond, je pense qu’Ambroise m’en voudrait bien plus d’avoir attendu la fin de la répétition pour venir, ayant ainsi pu avoir le loisir de se dire qu’il n’était pas assez important à mes yeux, à tel point que je fasse passer le théâtre avant lui. Ça m’est déjà arrivé à plus d’une reprise, en vrai je fais bien trop souvent passer ma passion devant lui, mais cela ne concernait, jusqu’à présent, que les sorti ou les soirées. Maintenant que sa santé est en jeu, je m’en serais sincèrement voulu si je n’avais pas débarqué le plus vite possible.
C’est donc avec sincérité que je lui explique la situation, chose qui, je le vois bien, le fait un peu rougir. Mon meilleur ami a toujours été mal à l’aise avec les grandes déclarations, d’ailleurs aucun de nous n’a réellement besoin de grands discours pour savoir que nous tenons beaucoup l’un à l’autre. Que je lui dise, donc, qu’il est très important à mes yeux, reviendrait presque à faire une déclaration d’amour. Inhabituel pour chacun de nous, mais clairement vital à mes yeux. J’ai laissé parler mon instinct, cette petite voix qui me dit que je dois faire comprendre à Ambroise que peu importe les situations, il peut compter sur moi et me faire aveuglément confiance. Que j’ai laissé tomber les répétitions est une preuve bien concrète que je n’ai pas totalement oublié le sens de mes priorités.
Passant ensuite à une tout autre sujet, l’australien souhaite savoir si je ne transporterais pas quelques livres avec moi. Il a de la chance, mais pas totalement. Alors qu’en temps normal j’ai toujours un ou deux romans de mon père avec moi, aujourd’hui je ne trouve que ma pièce de théâtre, mon livre de cours de théâtre ancien et le livre de scénographie que j’ai emprunté à Andreï il y a quelques temps. Après réagis à ma touche d’humour concernant les magasines people, Ambroise jette son dévolu sur le livre de scénographie, disant que le russe attendra encore quelques jours de plus « vu sa patience et sa collection de bouquin, je ne pense pas que celui-ci lui manquera tant que ça» donnais-je raison à mon meilleur ami, rigolant doucement.
Et quelque part je m’étonne moi-même de ma réaction. Je suis sûr que si toute cette situation s’était passé avant le trek, j’aurais extrêmement mal prit le fait qu’il choisisse ce livre là. Comme s’il le jette son dévolu là-dessus juste parce que c’est celui d’Andreï. Je ne me serais fait des films, imaginant qu’Ambroise voudrait de nouveau se sentir proche de lui en lisant ce livre etc. Mais aujourd’hui je m’en fou. L’idée qu’il ait put choisir ce livre autrement que par pure curiosité sur la scénographie ne m’effleure même pas l’esprit et lorsqu’en plus il me demande comme va Andreï, c’est sur un ton enjoué et léger que je lui réponds « Ben il se porte bien » dis-je en m’installant sur la chaise, posant mon sac à dos à mes côtés «Comme à son habitude en vrai. Mais j’ai pu en apprendre un peu plus sur lui lors de notre dernière soirée entre comédiens et staff » avouais-je sur un ton des plus naturels avant de poser mon regard sur Ambroise et l’observe quelques instants. « Je …hum … s’il me demande des nouvelles de toi, je dis quoi ?» demandais-je après hésitation «Je veux dire …c’est clairement pas à moi de lui dire que t’es hospitalisé et pis tu me connais, je sais tenir ma langue » continuais-je, haussant les épaules «mais si tu veux le voir je peux lui dire … » encore une fois, cette dernière déclaration est venue bien naturellement, je n’ai pas eu à me forcer à dire quoique ce soit. De toute manière, les querelles qu’on ait pu avoir sont tellement insignifiantes. Et si revoir Andreï lui fait du bien, il n’y a absolument pas de raisons que je refuse cette demande.
« Et évidemment que je peux aller récupérer les cours chez Arnaud» reprenais-je lorsqu’Ambroise me demande si je peux m’arranger pour que son pote me file ses cours qu’il est entrain de rater « On est d’accord, Arnaud c’est bien le gars aux cheveux rbun mi long, lunettes et barbe qui a toujours des t-shirt de geek et une veste en jeans plein de patch de groupe de métal ? » l’interrogeais-je du regard « Enfin je verrais bien. Tu veux que je prévienne tes profs aussi ? Et au niveau de tes affaires Sybbie s’en chargera je suppose. Mais si t’as besoin de quoique ce soit en plus, t’hésiteras pas. Comme par exemple ton pyjama dinosaure ou ton oreiller préféré » ajoutais-je, toujours fidèle a mon humour de merde. Mais en vrai je serais capable de faire beaucoup plus pour rendre l’hospitalisation d’Ambroise bien plus agréable.
Clément est donc là, à la surprise mais au bonheur d’Ambroise. L’entendre lui dire que son ami passe avant tout, qu’il l’aime toujours autant même s’il est souvent pris par sa passion et sa carrière, lui fait chaud au cœur. Peu expansif lui-même, Bonnie se contente de sourire, rougissant légèrement face à cette grande déclaration sincère à laquelle il ne s’attendait pas. Ils n’ont pas besoin de ça en général, mais après ces derniers mois, il trouve que se le dire de temps en temps ne fait pas de mal, et rassure. Car le néo-zélandais n’a que peu, voire pas du tout, diminué son train de vie ; entre répétitions, représentations, danse, études, examens... Ainsi il refuse souvent une soirée ou ce genre de chose, et depuis le temps, Ambroise s’est carrément fait à l’idée. Avec laquelle se faufilait celle, plus pernicieuse, que son meilleur ami ne le ferait peut-être plus jamais passer en priorité. Il devenait méfiant sans le vouloir, puisqu’il n’espérait que rarement de le voir répondre positivement à une sortie. Qu’il se trouve à son chevet aussi vite le soulage immensément. Il peut compter sur lui. Mais ne voulant pas s’attarder sur les grands sentiments, et son petit malaise, il tourne le sujet rapidement sur la lecture.
Il n’a pas de livre sous la main, et ça lui manque intensément. Sybille en rapportera sûrement un ou deux ce soir, si elle juge que ça n’entravera pas son rétablissement qui repose sur beaucoup de repos. Cependant il n’a pas envie d’attendre aussi longtemps. Par fierté, la même qui l’a convaincu que sa maladie passerait d’elle-même, il s’imagine pouvoir s’occuper à autre chose que dormir. En tout cas, il va bien tenter le coup, puisqu’il se sent assez reposer pour lire un peu. Il a besoin de ça, pour penser à autre chose aussi, d’une façon plus vitale. Oublier un instant qu’il est à l’hôpital pour un temps indéterminé. Entre trois ouvrages, il délaisse celui sur l’histoire du théâtre, la pièce Antigone, et porte sa main sur celui traitant de scénographie. Un livre appartenant à Andreï. Et si ce détail l’a guidé, son esprit en minimise fortement l’impact. Puisqu’une pièce de théâtre, de la fiction, aurait été le support parfait pour une évasion. Il préfère se prendre la tête avec un concept dont il n’a qu’une vague idée. Néanmoins cela rejoint son caractère curieux, qui cherche toujours à découvrir. Et puis, s’il peut ainsi mieux comprendre les tenants et les aboutissants du travail du russe, pourquoi pas. Faisant référence à sa patience, et le fait que quelques jours de plus ne seront pas dérangeant, il est presque étonné d’entendre Clément répondre légèrement. Celui-ci lui donne raison, ajoutant qu’avec sa collection de bouquins il y a vraiment peu de chance que celui-là lui manque. L’interrogation furtive traverse l’esprit de l’australien ; est-ce que son ami est déjà allé chez le russe ? Une question très vite balayée par une autre, qu’il ose poser.
Et à laquelle il ne s’attendait pas lui-même. Porté peut-être par l’attitude désinvolte de Clément alors que ce sujet précis est abordé. En tout cas surpris que ces mots sortent de sa propre bouche. Il garde scellée toute pensée qui s’apparente à Andreï, parfois le sceau pour lui-même d’ailleurs, mais plus souvent pour l’extérieur. Et là, il demande comment il se porte. Parce que s’il ne l’avait pas vu depuis des lustres, c’est le mois dernier qu’ils se sont tombés dessus. Pour quelques minutes à peine, juste le temps de savoir que l’autre est en vie quasiment, et de présenter Sybille, puisque tout ceci a pris place à l’Université, dans le secteur architecture. Au final, depuis plus d’un mois, il n’a pas plus de nouvelle. Pas réelles. Quelques sms par-ci par-là, rien qui ne rentre dans le concret, le sérieux. On peut les compter sur les doigts de la main. Depuis qu’il est malade d’ailleurs, Bonnie n’a même pas eu la force de répondre au dernier. Et s’il a une idée de fait qu’il doit plutôt bien se porter, il n’a aucun détail. Il ne tient pas non plus à en donner, il ne pense pas encore que c’est important de préciser qu’il est à l’hôpital à quelqu’un qu’il n’a vu qu’une fois en six mois. Minimisant tout cela, d’une façon efficace, il écoute la réponse de son ami sans retourner dans ses propres pensées. Rester en surface. Rester léger. Rester frivole.
Andreï se porte bien donc, comme prévu. Ayant relevé les yeux sur Clément, Bonnie doit les baisser sur le livre pour cacher son expression à la suite de sa phrase. Il se mord même la lèvre pour se retenir de demander plus d’explications sur ce qu’il a apprit de plus sur le russe, mais aussi sur ces soirées. Sûrement le genre que Clément décline lorsqu’il s’agit de ses potes, mais visiblement il y saute à pieds joints lorsque c’est avec son putain de théâtre. Soupirant lentement et fébrilement pour ne pas laisser l’amertume le submerger de toute part, il finit par hocher la tête en faisant mine d’être réellement intéressé par la quatrième de couverture. Son ami le force à reprendre la parole quand il lui demande ce qu’il devra répondre si Andreï pose des questions. « Que j’vais bien ou que j’suis malade, comme tu veux, ça suffira », rétorque-t-il d’un ton assez sec, sans le vouloir. Il n’apprécie pas l’idée que Clément soit un intermédiaire entre eux. Il n’a jamais apprécié cela, et il pensait que son meilleur ami l’avait compris car la dernière fois, cela avait donné lieu à la plus grande dispute. Il n’est même plus question d’un problème entre le comédien et le scénographe, cette partie là a été réglé depuis longtemps, ils sont à nouveau professionnels. Non il y a quelque chose d’autre... Un blocage chez Bonnie qui l’empêche d’exprimer ou de comprendre ce qu’il veut au fond. Jaloux peut-être que son ami ait plus d’occasions de croiser ce foutu russe, ou incapable d’avouer qu’il aimerait bien sa présence, là, en soutient. Ce dernier point, il sait cependant que c’en est hors de question ; ils ne sont pas assez proches, ils n’ont pas ce genre de relation. C’est idiot.
Il regrette presque à présent d’avoir pris ce livre. Mais s’y tient pour ne pas perdre la face. Le déposant sur sa table de chevet, il ne l’ouvrira qu’au départ de son meilleur ami. Pour être seul face à quoique ce soit qui surgira d’entre les lignes et les annotations en russe qu’il a déjà repéré dans les marges ; lien encore plus intime, trop sans doute. Il dévie immédiatement le sujet sur ses propres cours, qu’il est en train de louper. Et être à la traîne n’est pas un objectif d’Ambroise, alors qu’il veut s’assurer que Clément pourrait récupérer des cours. Il hoche la tête à la description dudit Arnaud, et aussi concernant la prévention des professeurs. Bien Sybille est peut-être déjà sur le coup, de même qu’elle se charge de récupérer les affaires de son frère. Il sourit finalement en coin. « Je vais m'en sortir sans ça je crois… » Le principal soucis à vrai dire, c’était d savoir combien de temps il allait rester, surtout. Et tant qu'il avait des livres, le reste, ça n’avait guère d'importance. Mais il pouvait compter sur Clément et ses blagues nulles, ça, ça ne changera pas, aussi désespérant que ça puisse être. C'est à ce moment qu’un médecin, accompagné de l'infirmière de toute à l’heure – Jess de son prénom –, toque à la porte puis entre. D'abord légèrement surpris de voir que son patient à de la visite, il sourit finalement d'une façon très agréable. Il se présente comme étant le Dr. David, ce qui est confirmé par son badge, puis se tourne vers Clément pour s'excuser par avance, mais il doit lui demander de sortir. Pas longtemps rassure l’infirmière, un petit quart d'heure tout au plus, le temps de l'auscultation nécessaire. Bonnie hoche doucement la tête pour signifier à son ami que ça va bien se passer, et tourne son attention sur le docteur, qu’il n'a pas finit d'observer pour le jauger.
Le ton sec sur lequel me répond Ambroise me surprend quelque peu. En vrai, toutes ses réactions depuis que je lui ai montré le livre d’Andreï ne me laisse guerre présager quelque chose de bon. Alors qu’il était bien enclin à parler et même plaisanter lorsque je suis entré dans sa chambre tout à l’heure, j’ai peu à peu l’impression de le gêner, de n’être plus le bienvenu. J’ai beau me dire que je me fais des films, que rien de tout ça n’est vrai et que ce n’est que mon imagination qui s’emballe, fait est que son ton à changer. Bien que je lui sourisse simplement, hochant la tête pour lui confirmer ma bonne compréhension de ses paroles, je sens la tempête qui commence à se lever en moi et embrumer légèrement mon esprit.
Si entre Andreï et moi tout est entré dans l’ordre, est-ce réellement le cas pour Ambroise et moi ? Je me sais sincère, tout ce que je lui ai dit, je le pensais vraiment. Mais est-ce le cas pour lui aussi ? Ou est-ce simplement une déclaration à sens unique ? Ambroise n’a jamais été expansif sur ses sentiments d’amitiés envers moi, ce n’est donc pas maintenant, alors qu’il n’est pas au mieux de sa forme, que ça va se faire. Toutefois, à part un léger sourire, il n’a montré aucune réaction. Comme si tout lui était égal. Aussi n’est-il pas connu pour parler mais bel et bien pour réagir de manière à me faire comprendre silencieusement que j’ai fait une erreur. Mais laquelle ? Déjà que je n’ai jamais su pourquoi il m’en à tellement voulut lorsque je l’ai invité à nous rejoindre, Andreï et moi, au Mctavish, je me retrouve à nouveau avec ce même sentiment. Comme si je l’avais trahi et déçu, les deux en même temps. Même mon petit trait d’humour concernant les affaires que je pourrais lui apporter ne parvienne pas à remettre de l’ordre dans mes pensées.
Ainsi, j’avoue que l’arrivé du médecin et de l’infirmière vient à point nommé. J’accepte, sans difficultés, de sortir, sous l’ordre du docteur, précisant quand même à Ambroise que je vais me chercher un café et que donc mon retour sera peut-être plus long que la visite du professionnel de santé. Après un dernier sourire, un peu plus forcé celui-là, je m’éclipse et sors dans le couloir. Je le traverse rapidement puis descends au rez-de-chaussée avec les escaliers. Mais, au lieu de tourner à gauche pour aller à la cafétéria, je prends à droite et me dirige vers la sortie.
Une fois à l’air frais, je parcours encore quelques mètres histoire de ne pas bloquer le passage à l’entrée puis m’immobilise et me penche en avant, essayant de contrôler ma respiration qui s’est brusquement accélérée. Les yeux fermés, je m’efforce de concentrer mon esprit sur le compte à rebours partant de 9 et allant lentement vers 0, et non sur ce début de crise de panique. Je déglutis difficilement, mais parvient à chasser l’angoisse assez rapidement, me doutant toutefois que la crise ne va pas partir aussi rapidement et qu’elle éclatera sans doute à nouveau avec bien plus d’ampleur plus tard. Surement ce soir quand je serais seul dans ma chambre. Me redressant, je me passe fébrilement les mains dans les cheveux puis soupire doucement et me frotte le visage, comme si j’essayais ainsi de faire partir les émotions par lesquelles je suis passé.
Après une dernière profonde inspiration, je décide de faire demi-tour et rentre à nouveau dans l’enceinte de l’hôpital. Un peu plus calme qu’avant, je me dirige vers la cafétéria où je m’achète un café ainsi qu’une barre de chocola et me prends le temps de boire plusieurs gorgés de ma boisson en me dirigeant lentement vers la chambre de mon meilleur ami. Et j’ai bien fait de ne pas me presser car au final, au moment où j’arrive dans le couloir, je vois tout juste le médecin et l’infirmière sortir de la chambre d’Ambroise. Alors que je les croise, je m’immobilise et ouvre la bouche mais la referme assez rapidement et leur adresse un simple sourire, me doutant qu’ils ne seront pas amènent à me fournir quelques explications. Baissant le regard, je me remets en route et entre dans la chambre après avoir frapper rapidement. «ça va ? » demandais-je « Ils ont dit quoi ? Y a de la nouveauté ?» je m’installe à nouveau sur ma chaise et pose mon café sur la table de chevet avant d’ouvrir mon kinder bueno « T’en veux un ?» proposais-je la deuxième parti de la barre chocolaté à Ambroise, attendant sa réponse.
Le changement d’humeur de Bonnie l’interpelle lui-même, et il tente de se détendre comme il peut, cependant sa voix sort de façon bien plus tranchante qu’il ne l’aurait voulu. C’est avec amertume qu’il pense à Andreï finalement, entre son envie de le revoir et son refus de l’avouer. De se l’avouer. C’est trop compliqué tout ça, mêlé à sa petite angoisse d’être malade... Catastrophique. Pourtant il ne peut aps en vouloir à Clément, il ne peut rien deviner puisque Bonnie ne lui a jamais rien expliqué. Ce dernier essaye de se remettre d’aplomb aux blagues de son ami, mais il est sans doute trop fatigué pour faire de gros efforts et faire comme si de rien n’était. Le sujet Andreï est clos de toute façon, l’australien s’en est assuré en balançant le sujet des cours qu’il en train de manquer. Il prévoit le cas où il devra rester plusieurs jours, et comment ne pas finir en retard dans le programme. Sybbie aura déjà assez à penser avec les affaires persos et gérer le personnel médical, alors autant prévoir et demander à Clément s’il est disponible. Et puis l’arrivée du médecin tombe au bon moment. Le néo-zélandais part sans broncher, ce qui divise Bonnie intérieurement car il aurait bien aimé du soutien mais il ne peut pas rester non plus.
Alors il se fait bon patient, répond aux questions du médecin, se laisse examiner, ne fait pas de manière et reste silencieux dès que possible. Il n’est pas très à l’aise, et se renferme sur lui-même pour ne pas le montrer. L’infirmière, Jess, fait son possible pour l’aider, mais ça ne marche pas tellement. Elle est souriante et douce, tout ce qu’on peut attendre d’une infirmière. A un autre moment, cela aurait sans doute fonctionné, mais elle est trop étrangère aux yeux d’Ambroise, et il est trop nerveux. Le médecin termine par lui donner les résultats des examens demandés à son arrivée aux urgences. Finalement tout va plutôt bien, à part un virus, mais ça n’est pas n on plus totalement concluant. Le Dr. David estime qu’il y a autre chose, cependant il ne saurait dire quoi, c’est pour cela qu’il préfère encore faire quelques tests et qu’il est venu le voir en personne pour l’examiner sous toutes les coutures. L’étudiant est rassuré ; il se dit simplement que ce ne sont que de trop grandes précautions ou un instinct défaillant, un médecin qui veut trop bien faire son boulot. Alors il se contente de la première explication, puisque la présence du virus a été mise en évidence et explique ses soucis au niveau des bronches, la fièvre, la fatigue... D’autres symptômes ne trouvent pas d’explication immédiate, mais il a confiance. Le docteur donne une liste de médicaments à l’infirmière, qui se chargera du patient tout le temps de son hospitalisation. En termes de sortie, demain les effets des soins se feront normalement assez ressentir pour qu’il puisse sortir en fin de journée ou surlendemain matin.
C’est avec un sourire soulagé qu’il accueille le retour de son meilleur ami, quelques minutes après le départ des deux professionnels de santé. Clément, un café en main, lui présente la deuxième barre d’un kinder bueno. « Non merci », décline-t-il d’abord le petit goûter avant de se mettre à raconter ce qui s’est passé en son absence. « De la nouveauté oui et non, tout d’abord c’est viral, et ça affecte mes poumons, d’où ma toux, mais aussi d’autres endroits et au final c’est assez courant, juste assez virulent chez moi. D’après la question de l’infirmière il m’a donné une plus forte dose pour l’antibio, je sais pas pourquoi exactement. » Il hausse les épaules, et se passe une main dans les cheveux avant de se laisser aller un peu en arrière pour s’appuyer sur ses oreillers relevés pour le supporter en position assise. Il en profite pour reprendre son souffle. « Donc, je pense, ça s’arrête là, mais le docteur a encore des doutes même si mes résultats sont globalement corrects, enfin normaux pour un type malade quoi. Ils vont me filer des trucs, il va encore faire des tests parce que d’après son instinct y’a autre chose, mais aussi pour être bien certain que y’a rien d’autre. » Il sourit ensuite, son humeur bien plus légère que lorsqu’ils ont abordé le sujet Andreï. « Et si tout se passe bien je sors demain en fin de journée, et sinon après-demain matin. Et l’infirmière est gentille, alors c’est déjà ça de gagner. » Il réfléchit ensuite un instant, avant de penser à voix haute, plus pour lui-même que pour Clément. « Et je dirais tout ça à Sybbie quand elle arrivera, y’a trop à expliquer pour le faire par sms. » Il reporte son attention sur Clément. « Tu comptes rester un peu ? » Malgré tout, il tient à un peu de compagnie, et c’est comme si son orage personnel de toute à l’heure était passé.
La crise de panique est venue comme ça, d’un coup, sans que je ne m’y attende. Il n’y a eu aucun signe avant coureur, aucune réelle nervosité. Bien que je sois content d’avoir réussi à la contrôler rapidement et assez facilement, ma petite voix m’informe que je ne serais pas épargner aujourd’hui et que je vais devoir me préparer psychologiquement à l’accueillir et la combattre. Ne connaissant pas l’heure à laquelle elle va frapper, j’espère simplement que ce ne sera pas dans les prochaines heures que je passerais avec Ambroise. Déjà qu’il ne va pas bien lui-même, je n’ai absolument aucune envie de lui infliger ce genre crise en plus. C’est donc avec une certaine appréhension que je rejoins à nouveau la chambre de mon meilleur ami, armé d’un café et d’un kinder bueno.
M’installant sur la chaise qui n’a pas changé de place, je demande à Ambroise de m’informer des nouveautés. Malheureusement, il n’y a rien de tout à fait neuf. Son état est dû à un virus qui attaque ses poumons, d’où sa toux, courant en général mais plus virulent chez lui. Je grimace un peu, compatissant, le médecin préférant tout de même le garder malgré les bons résultats globaux : son instinct de professionnel de santé lui dit qu’il y a encore quelque chose de plus grave qui se trame là-dessous. Toutefois, il y a une excellente nouvelle : si tout se passe bien, il sortira demain après midi ou après demain. « Eh, t’auras même pas le temps de me manquer du coup !» m’exclamais-je avec un clin d’œil et un sourire complice avant d’hocher la tête lorsqu’il me demande si je vais rester un peu «J’vais rester jusqu’à ce que Sybille revienne en fin d’après midi, ou alors jusqu’à ce qu’on me vire » je pose mon regard sur Ambroise «ou que TU me vires» reprenais-je, amusé, avant d’hausser les épaules et mordre dans ma barre de chocolat.
«en tout cas il est cool ce médecin » dis-je après avoir avalé ma bouchée « je veux dire … un médecin qui suit son instinct plutôt que le protocole ça ne court pas forcément les routes. Et au moins tu seras fixé » reprenais-je en attrapant mon gobelet de café. « au fait» reprenais-je afin de changer rapidement de sujet pour pas laisser Ambroise sombrer dans trop de pensées négatives et se faire trop de film «Charles a déjà décidé d’une pièce qu’on va monter l’année prochaine ! » je pose le l’emballage du premier kinder bueno sur la table de chevet et reprend le deuxième «Il n’a pas encore dit le thème, mais ça va être une réécriture d’une pièce classique pour la rendre plus accessible à tout le monde. Et le tout sous fond musical » expliquais-je «Et pour la musique ce sera essentiellement du Queen » c’est avec un large sourire que je regarde Ambroise avant de mordre dans la deuxième barre « Franchement je sais pas comment Charles va se débrouiller, mais on lui fait tous assez confiance pour ça. C’est lui qui va réécrire la pièce et…bref, ça va être franchement grandiose » hochais-je la tête, persuadé que si tout ça se met en place, l’année prochaine va être géniale. « Ah et j’ai décidé avant-hier que j’arrêterais les cours après mon diplôme. J’ai pas envie de me lancer dans un master ou je ne sais quoi, mais je vais plutôt me concentrer à fond sur le théâtre et la danse aussi » je souris et fini ma friandise « Du coup, j’aurais beaucoup plus de temps pour toi, Sybille et tout les autres, et je pourrais reprendre ma vie sociale là où je l’ai laissée» reprenais-je « plus que quelques mois à tenir et on retrouvera nos habitudes du début d’année, promis !» annonçais-je, espérant que ça lui fera plaisir. Moi en tout cas je me réjouis à l’avance pour l’année prochaine, quand les cours s’arrêteront et que mon quotidien ne sera plus rythmé seulement par les cours, les examens et les répétitions.
La visite du médecin se passe mieux que prévu pour Ambroise, qui ne porte guère ces praticiens dans son cœur, surtout lorsqu’il ne les connait ni d’Eve ni d’Adam. Mais le Dr. David est très sympa finalement, même si un peu trop tatillon à son goût. Bonnie s’en serait bien tenu à son virus de l’espèce de bronchite qui le poursuit, les médicaments adéquats, et voilà. Le médecin cependant préfère suivre son instinct dans le temps qui lui est imparti. Car d’ici demain ou après-bonnie, le jeune australien pourra sortir. Il n’imagine pas que le traitement sera inefficace ou qu’on décèlera autre chose chez lui. Alors quand Clément revient, il est presque tout sourire. Il refuse le kinder bueno, mais lui explique sans oublier quoique ce soit ce qui s’est passé durant son absence. De l’absence de réelle nouveauté jusqu’à la décision du médecin de le garder encore bien à l’œil, en passant par l’éventualité d’une sortie dans les 48h. Il ricane légèrement lorsque Clément lui lance qu’il n’aura même pas le temps de lui manque. De son regard à nouveau pétillant, il le regarde. « Shh, j’sais très bien que j’te manque déjà depuis hier, pas la peine de mentir… » répond-il avec cet air complice qui s’accorde si bien à celui de son ami, et qui fait ressortir les quelques couleurs revenues sur son visage.
Il hoche ensuite la tête, heureux de savoir qu’il aura la compagnie de son ami jusqu’au retour de sa sœur. Il n’a pas non plus trop envie de le maintenir ici s’il a mieux à faire, surtout que Bonnie devine qu’il fera une sieste à un moment donné, mais il ne va rien dire pour le moment. Il sourit en coin aux paroles de Clément. « Si tu continues de faire du bruit avec l’emballage oui je risque de te virer », réplique-t-il en indiquant d’un geste de tête le papier plastique du kinder bueno. Il hoche ensuite la tête, redevenant plus sérieux alors qu’il est question du médecin qui s’occupe de lui. « Je suis d’accord, il est cool, mais j’pense qu’il se fait du souci pour rien. » Il assez sûr de lui en disant cela, parce qu’il ne voit pas ce qu’il pourrait avoir d’autre. Mais l’homme n’a pas l’air inexpérimenté et en général, les instincts s’aiguisent s’ils ne le sont pas déjà, il devient alors intéressant de les suivre. Il essaie de ne pas trop penser à ça, aux implications, et remercie silencieusement Clément d’avoir compris rapidement qu’il fallait enchaîner et ne pas créer de blanc.
Ainsi il part sur son théâtre, et la prochaine pièce que veut monter Charles. Son choix s’est porté sur une réécriture d’une pièce classique encore tenue secrète, tout comme le thème général, mais qui sera accompagnée de morceaux de Queen. Arquant un sourire, Ambroise s’amuse de l’annonce. « Sérieux ? Va falloir les droits ça va être coton ! Ça me fait penser à la comédie musicale à Londres, basée sur leurs chansons. Du coup, attends, ça va être aussi une comédie musicale ou juste une pièce de théâtre avec une bande son ? » Assez curieux, Bonnie se plonge là-dedans pour ne pas penser au reste, et ça marche. Il se demande alors si les acteurs vont chanter, ou non, si ça va danser, ou non, ou si ça aura le rôle d’une bande originale comme dans un film. Evidemment, tout le monde fait confiance à Charles pour mettre tout ça au point. L’étudiant ne peut s’empêcher de sourire aussi, parce que, Queen. L’un de ses groupes préférés de toujours. La suite ne l’étonne pas plus que ça lorsque Clément annonce qu’il veut arrêter les études après son diplôme. Les sourcils haussés, Ambroise ne mâche pas ses mots. « Et bah encore heureux ! Vu que le théâtre et tout ça marche pourquoi aller plus loin, t’auras déjà un diplôme ça t’fais une bonne garantie si y’a quoique c’soit, pas besoin de s’acharner sur un master, t’en mourrais. » Arrête, reprise du souffle, légère toux. Ila hâte de ne plus être souffrant.
Il penche ensuite la tête sur le côté, et sourit légèrement, presque attendri. Mais seulement par la naïveté de son meilleur ami, et son aveuglement sur le futur qu’il décrit. « Tu sais aussi bien qu’moi que tu vas en profiter pour être encore plus à fond dans tes castings, ta danse, la compagnie… » Il hausse les épaules. « Mais c’est normal, personne va t’en vouloir de mettre toutes les chances de ton côté pour avoir un début de carrière digne de ce nom. » Il sourit doucement, rassurant. « Mais prends-toi une pause quand même après le diplôme avant de foncer tête baissée, j’crois pas que t’auras de vacances avant longtemps après ça ! Puis en te regardant j’dirais t’es aussi fatigué que moi », avoue-t-il avec l’ombre d’une moue. Ça fait longtemps qu’il ne lui a pas dit, parce qu’il n’en a pas eu l’occasion et parce que Clément avait su se dégager quelques soirées ici et là pour sortir la tête de ses textes et cours. Puis il sourit, comme si de rien n’était, et se rappelle d’un film qui va sortir prochainement et qu’ils doivent absolument aller voir ensemble. Les discussions s’enchaînent, Bonnie parvient à convaincre Jess de ne pas faire partir Clément, et à un moment, alors que chacun est plongé dans un livre en silence, l’australien s’endort paisiblement. Les rêves bercés de petites lettres cyrilliques, parce qu’Andreï a la manie d’écrire des notes – illisibles – dans les marges de ses bouquins, et qu’Ambroise est bien décidé à les déchiffrer. Il ne se réveille qu’à l’arrivée de sa sœur, au final.
Au final je rends compte que mon brusque coup de stresse d’il y a quelques minutes n’avait pas lieu d’être. Bien qu’Ambroise ait été, l’espace de quelques instants, plus distant, il n’en est que plus complice lorsqu’il me dit que dit être certain que je lui manque depuis hier. Je rigole doucement et me penche vers lui «Chaque minutes passer loin de toi est une torture » dis-je sur un ton mielleux ponctuant le tout par un clin d’œil. Ce n’est pas vrai, mais ce n’est pas totalement faux non plus. Il doit sans doute penser le contraire, mais ça ne me fait pas vraiment plaisir de toujours dire non quand il s’agit de sortir faire la fête. Je donnerais beaucoup pour pouvoir le suivre dans ses soirées, mais le théâtre me prend beaucoup trop de temps. Et comme je manque déjà de sommeil, je ne peux pas me permettre de rentrer à pas d’heure.
J’évoque ensuite le médecin, disant qu’il a l’air plutôt cool étant donné qu’il suit son instinct et non le protocole médical, mais Ambroise pense qu’il se fait du souci pour rien. Pinçant les lèvres en une moue de réflexion, j’hoche distraitement la tête, essayant de me convaincre que ce soit effectivement le cas. Mais quelque chose en moi me dit qu’Ambroise se trompe. Il est un peu trop positif à mon sens, un peu trop sûr de lui aussi. C’est le trait de caractère principal de mon meilleur ami, certes, mais j’espère toutefois qu’il ne va pas jouer avec sa santé et faire comme le médecin lui dit de faire !
Changeant très rapidement de sujet pour qu’aucun de nous ne tombe trop profond dans nos pensées, je parle du théâtre et du fait que Charles souhaite réécrire une pièce classique et l’ajuster pour la jouer sur la bande son de Queen. «Tu sais, je ne me fais pas trop de souci pour les droits. Charles n’est pas n’importe qui et dans tous les cas il trouvera un moyen » précisais-je quand Ambroise me parle des droits qui ne seront pas évident à avoir «Mais non, ce ne sera pas une pure comédie musicale. Bien sûr j’espère qu’il y aura un peu de chant et de la danse, mais ce sera surtout beaucoup de texte et … du théâtre aménagé quoi » expliquais-je en rigolant doucement.
Le fait que je veuille arrêter mes études après mon diplôme ne semble pas étonner Ambroise. D’après lui je mourrais si je m’acharnais dans un master alors que le théâtre marche très bien pour moi. J’hausse les épaules en hochant la tête «t’as sans doute raison » soufflais-je avant de préciser que dans tous les cas sans cours j’aurais plus de temps à lui accorder. Toutefois Ambroise est plus que sceptique et me le fait bien comprendre, disant je serais encore plus prit par les castings, avant de dire que c’est normal et que personne ne m’en voudrait de vouloir mettre toutes les chances de mon côté. Il se veut rassurant mais j’ai l’impression qu’en vrai il ne pense pas réellement ce qu’il dit. Toutefois je décide de ne pas y penser et hoche simplement la tête lorsqu’il me dit de me prendre une pause après les examens car je n’aurais sans doute pas de vacances avant longtemps. « De toute manière après nos examens j’avais prévu de t’emmener en Nouvelle Zélande. Ça nous fera du bien tous les deux et j’ai bien envie de te montrer le pays où j’ai grandis. Tu vas en tomber raide amoureux, j’en suis sûr » dis-je avant de me pencher un peu en avant « On se préparera ainsi pour notre roadtrip en Europe » ajoutais-je, souriant « j’l’ai pas oublié celui-là et j’ai vraiment envie de le faire. Et on le fera» déclarais-je sur un ton décidé.
Au final, nous continuons nos discussions, passant d’un sujet à l’autre avant que, naturellement, chacun de nous sorte un livre pour commencer à lire en silence. Au bout de plusieurs minutes j’entends la respiration tranquille et régulière de mon meilleur ami qui m’indique qu’il s’est endormi. Me levant, je reprends délicatement le livre et le referme après avoir marqué la page avant de le poser doucement sur la table de chevet. J’observe quelques instants le visage paisible de l’australien, souriant presque attendrit et me réinstalle sur la chaise pour continuer la lecture de mon propre livre.
Après une bonne heure, la porte de la chambre s’ouvre sur Sybille. Je lui fais rapidement signe de faire doucement et m’avance vers elle pour l’informer de ce que le médecin a dit. C’est au moment où sa sœur s’avance vers lui qu’Ambroise se réveille. « Allez, t’es entre de bonnes mains » dis-je, tandis que m’approche de lui pour le prendre furtivement dans mes bras « repose toi bien. Je reviens demain !» précisais-je avant de me détourner et sortir de la chambre, bien décidé de mettre cet hôpital rapidement derrière moi.