Une chose en entraînant une autre, tu t’es retrouvé obligé de déménager en catastrophe parce que t’as mal calculé ton coup. Tu voulais pas payer un mois de loyer supplémentaire « pour rien » alors voilà qu’il faut que tu gères tout en deux jours. Bien évidemment, la plupart de tes potes sont tous occupé ce weekend. Vous vous retrouvez à trois pour tout déménager. Owen est dans le lot. Tu vas te retenir de lui faire des remarques désobligeante pour les prochaines heures. Il te rend un grand service et il comprendra que l’absence de taquinerie est ta manière de lui dire merci. Après tout, il est ton frère, c’est son devoir de te filer un coup de mains dans les moments où tu en as besoin. Tu savais que tu pourrais compter sur lui. Il reste une épaule sur laquelle tu t’es déjà reposé quelques fois. Tu crois pas avoir été aussi gentil en retour mais bon, t’es le petit frère, t’as le droit. C’est ton rôle à toi aussi d’être chiant. Tu l’es quand même beaucoup moins qu’avant. T’as mûri. Contre toutes attentes, t’es un adulte responsable. Ou du moins le plus responsable que tu peux l’être. Par rapport à y’a quelques années, c’est le jour et la nuit. Le fait que le groupe se soit séparé a aidé à ce que tu fasses moins de conneries. Y’a moins de tentations.

T’avais prévu le coup, t’as un pack de bière avec toi pour terminer ce déménagement comme il se doit. Ton pote embarque une bouteille et file avec le van que vous avez loué. Il a d’autres chats à fouetter et tu peux pas lui en vouloir. T’aurais fait pareil. Tu sors ton téléphone de ta poche et tu vas sur ton app Uber Eats.

« Je nous prends chinois, ça te va ? »

C’est ta façon de l’inviter à manger sans le dire directement. T’as peut être envie de passer un peu plus de temps avec ton frère. T'es pas du tout installé mais y'a un canapé et une table basse. Ca suffit pour manger.

Juste après avoir fini sa messe dominicale, Owen s’était rapidement changé, troquant son étole contre un jogging assez décontracté pour être à l’aise pour le déménagement de son frère. Il avait bien sûr accepté de lui donner un coup de main mais lui avait surtout précisé qu’il ne serait pas là avant 11h. Ca avait pas l’air de déranger Ash qui en avait peut être profité aussi pour faire une dernière grâce matinée avant de s’y mettre. Owen était surpris de voir qu’ils n’étaient que trois. Il se demandait où était tous ces fameux amis dont Ash parlait tout le temps, pour une fois qu’il ne s’agissait pas d’aller seulement boire un coup, il n’y avait plus grand monde. Mais bon, Owen remplissait bien son rôle de grand frère pour cette fois.
Tout allait assez vite, Asher n’avait pas non plus beaucoup de chose à déménager et tant mieux. A trois, ca aurait pu prendre beaucoup plus de temps mais quand Owen posa les yeux sur son téléphone pour voir l’heure, la journée avait quand même filé assez vite et il allait bientôt être l’heure de manger. Son ventre semblait s’en être rappelé au moment où il avait vu qu’il était presque 20h. « Je nous prends chinois, ça te va ? » il hocha la tête, chinois, américain ou indien, peu importe, il avait faim. « C’que tu veux ! » fit il en prenant une bière dans le pack à proximité et allant se poser dans le canapé qui n’était surement pas à sa place définitive. « Comment t’as trouvé cet appartement ? » il lui semblait être pas mal. « On va plus être très loin maintenant… » il pouvait même voir le toit de son église qui était à quelques centaines de mètres plus bas. « Tu pourras venir à la messe aussi. » fit-il avec un grand sourire, plutôt provocateur, il se doutait bien qu’il ne verrait jamais Asher y mettre les pieds. « et j’vais pouvoir surveiller mon petit frère maintenant, c’est pas beau ça… » et éventuellement se rendre compte quand Jane viendra rendre visite à Ash et pas à Owen, mais ça c’était une autre histoire.

Chinois ce sera donc. Owen n’est pas difficile et c’est un de ces côtés que tu apprécies le plus, même si souvent ça te tape sur le système parce que le mec est un saint. Le mec est parfait. Le mec n’a pas besoin de se justifier d’être célibataire et sans enfants parce que le mec est prêtre. Un putain de prêtre. Le pire dans l’affaire c’est que tu peux même pas véritablement être triste pour lui de louper les joies du sexe parce que… ben t’en as pas non plus et t’es pas prêtre.

Tu commences à pianoter sur ton téléphone, prenant des menus pour pas te foutre de sa gueule. Boisson, repas, dessert. Tu prends du coca en boisson parce qu’ils offrent pas la possibilité de prendre d’alcool, ce qui est regrettable. Owen te demande comment t’as trouvé l’appart’. Tu lui réponds sans lever la tête de ton téléphone.

« Un pote. Son père habitait là. Il a eu un accident. Il est en chaise roulante maintenant. Ils ont vendu. Ils étaient pressé, besoin de fric. Je l’ai eu pour moins que ce qu’il vaut vraiment. »

Une opportunité comme une autre pour toi. Tu leur as rendu service, c’est comme ça que tu vois les choses. C’est vrai que vous n’allez pas être loin maintenant. Tu y as pensé quand cette offre est venu un peu de nulle part. Mais ça te dérange pas. Après toutes ces années à être loin de lui, peut être que c’est le moment de recoller tous les morceaux. Même si techniquement, vous n’êtes pas en froid. Vous n’êtes pas non plus les frères les plus proches de la terre. Loin de là même. Un coup d’oeil à ton frère et tu paies ton panier en quelques cliques, t’en as quand même pour 40$. Tu te fous pas de la gueule de ton frère avec ce Katsu Donburi. Tu réalises pas que c’est pas chinois mais japonais ce que t’as pris. Y’avait écrit Asian, t’as pas trop réfléchit. Ca avait l’air bon, c’est tout ce qui compte. Tu cherches ton adresse dans tes notes parce que tu ne la connais pas encore par coeur et tu remplis le formulaire pour la livraison, terminant ta commande. Tu t’installes sur ton canapé qui est tout simplement, ton unique meuble avec la table basse et c’était des trucs qui étaient déjà sur place. Que ton pote t’a laissé.

Tu lâches un rire quand Owen dit que tu vas pouvoir venir à la messe.

« Ouais compte sur moi. »

Tu n’en penses pas un mot mais ça te fait bien rire. Il dit qu’il va te surveiller, nouveau rire.

« Ma vie est tellement passionnante. »

Mais la vérité c’est que t’es pas sur une bonne pente depuis un moment. Avoir arrêté le groupe depuis un an c’est ce qui a évité à ce que ta chute n’arrive plus vite.

« Tu vas faire une liste de toutes les filles que je ramène chez moi ? »

Tu fais un sourire entendu mais au fond t’es en train de te dire qu’il va falloir que tu sauves les apparences. T’as décidé depuis tes 30 ans de plus t’obliger à faire quoi que ce soit. Ce qui en résulte en une vie sexuelle quasi nulle et t’es très bien comme ça. Mais là du coup… Tu verras. Tu penses pas qu’il va réellement chercher à te suivre à la trace.

« Et j’ai une chambre en plus. Je vais voir pour louer. Je connais un gars qui fait ça et c’est plutôt intelligent. »

Ou comment faire des compliments à ton frère sans que ce soit trop direct. Mais le sourire que tu lui offres veut tout dire.

« J’essaie de prendre exemple sur toi. Saint Owen. »

Tu l’appelles comme ça depuis presque toujours et encore plus quand il a annoncé qu’il devenait prêtre. C’était juste tout tracé. Tu bois une gorgée de ta bière et tu vois une notification sur ton téléphone.

« On sera livré dans quarante minutes. »

« Un pote. Son père habitait là. Il a eu un accident. Il est en chaise roulante maintenant. Ils ont vendu. Ils étaient pressés, besoin de fric. Je l’ai eu pour moins que ce qu’il vaut vraiment. » Owen était même pas surpris par cette réponse en mode jemenfoutisme de son frère. Comme on dit, le malheur des uns fait le bonheur des autres et là, Asher avait fait une belle occasion semble-t-il. « J’suis partagé entre me dire que t’es un petit merdeux opportuniste ou juste chanceux. » surement un peu des deux. Owen ouvrit les deux bières qu’il avait devant lui et en glissa une devant son frère qui avait toujours les yeux rivés sur son téléphone. Il devait finaliser la commande.
Voyant la proximité entre l’appartement et l’Eglise, Owen avait tout de suite pensé à le faire venir à la messe du dimanche matin, sans grande conviction et peut être un peu par provocation. Le rire sincère et franc de son frère le fit sourire à son tour. « Ouais compte sur moi. » « On a du bon vin. » fit il en levant sa canette vers son frère. « A cet appartement ! A cet homme en chaise roulante ! » il fit un clin d’œil avant de claquer sa canette contre celle d’Ash et ensuite en boire quelques gorgées. Les déménagements, ça donne soif. « Tu vas faire une liste de toutes les filles que je ramène chez moi ? » un signe de la tête. « Et j’vais noter le temps qu’elles passeront chez toi-même. Elisa : 10 minutes, Camber 20 minutes, jackpot pour Jordan avec 45 minutes ! » En réalité l’appartement d’Owen était bien trop loin et bien trop à l’écart de celui-ci pour lui permettre d’espionner son frère et tous les deux savaient bien qu’il ne s’y prêterait pas. Asher n’aurait pas pris le risque de s’installer si près de son frère s’il était un gros psychopathe du contrôle. Owen avait bien l’intention de n’absolument rien changer à ses habitudes, ne serait-ce que se promettre de venir rendre visite à son frère peut être un peu plus souvent, n’ayant plus aucune excuse pour esquiver. « Et j’ai une chambre en plus. Je vais voir pour louer. Je connais un gars qui fait ça et c’est plutôt intelligent. » Owen hocha la tête. Prenant le compliment directement pour lui. Une façon pour son frère de lui faire un aveu sans trop assumer, mais quand même. « Tu pourras en effet dire à cet homme que l’idée est brillante ! » Owen lui ne regrettait pas, il s’entendait très bien avec Tess en plus. Et il pouvait se permettre quelques plaisirs qu’il ne pouvait pas avant. « J’essaie de prendre exemple sur toi. Saint Owen. » Ah quand même ! «Quand est-ce que tu vas arrêter avec ça ? » Ce surnom qui suivait Owen depuis leur plus jeune homme. Alors qu’en réalité, Owen a toujours été loin d’être un sait durant sa jeunesse notamment. Bon, c’était à nuancé depuis qu’il était devenu prêtre en effet. « Avant d’être un Saint il faut accomplir deux miracles, j’en suis loin. A moins, que je ne sois pas encore au courant ! » Le timing était ensuite lancé. 40 minutes avant la livraison, ca voulait aussi dire 40 minutes à devoir combler par une réelle discussion. A moins qu’Asher ait une console cachée quelques parts, mais rien à l’horizon, ils n’allaient pas avoir le choix que de vraiment communiquer. Il était peut être là le premier miracle. « Au fait, on s’est pas revu depuis que tu m’as envoyé à cette soirée pour célibataire… » cette soirée où le corps d’Owen a été vendu pour 650 dollars, cette même soirée où il avait du justifier de n’être ni Homo, ni pédophile parce qu’il était prêtre.

Merdeux opportuniste ET chanceux. Les deux. Et tu le lui dis avec ce regard amusé que tu lui lances et ce sourire amusé. Owen te file une bière et tu le remercies d’un bref signe de tête avant de boire tout de suite une gorgée. Il parle de vin quand il parle de l’église. Touché. Il connait tes intérêts. C’est ton frère après tout. Ton grand frère. Il te connait depuis toujours. Toute ta vie. Mais il sait pas la moitié de tout se qui se trame dans ta tête en permanence. Et heureusement.

Tu lèves ta bière pour trinquer, réalisant que t’as déjà entamer ta bière sans problème. Pas de temps à perdre pour boire. Owen se fait tout un film à propos des filles et du temps que tu passerais avec elles. Ca te fait sourire de le voir aussi à fond. Comme quoi t’as toujours bien cette image de gars qui baise à fond encré dans sa tête. Très bien. Que ça continue malgré cette troisième année que tu entâmes dans ton abstinence. Tu tiques un peu sur sa dernière proposition. Jordan. C’est un prénom de mec ça. Mais tu dis rien. Tu enchaînes la conversation le plus naturellement du monde. Tu le caresses dans le sens du poil. Tu savais que ça allait lui faire plaisir. Normal. Alors t’es obligé de te moquer un peu de lui et ça marche. T’es content de toi. Il te parle encore de ses deux miracles. Le premier c’est surtout qu’il te supporte toujours après toutes ces années. Tous ces haut et bas dans ta vie. Tu penses surtout à la fois où il a pris l’avion dans la minute après avoir appris ton overdose. Pour toi tu mets ça de l’ordre du miracle mais en fait c’est juste parce qu’il t’aime malgré que tu aies toujours été un petit con avec lui. Avec tout le monde. T’as quand même l’impression qu’il ait jamais vraiment capté ton mal être, malgré l’overdose. Pour aller jusque là c’est que ça va pas du tout. Mais t’as réussi à sauver les apparences. Comme toujours. Tu touches plus à ça et t’as l’air d’aller bien c’est que ça va bien. Non. Donc ouais, t’es un vrai miracle quand on y pense et Owen y a beaucoup contribué. S’il n’avait pas été là avec toi à l’hôpital, t’aurais pas pris les mêmes décisions. Tu sais pas s’il le sait. Tu ne le diras sûrement jamais.

Il parle de la soirée célibataire où tu l’avais entrainé. Ca te fait sourire beaucoup trop largement. Il t’en a pas reparlé depuis et ça remonte. Tu l’avais oublié. Tu t’es dit qu’il avait du se barrer après s’être rendu compte de la supercherie et qu’il n’y avait donc rien à raconter à ce propos. Mais apparemment y’a du croustillant là dessous.

« Parce que t’es resté ? Je te crois pas… »

Ca te fait rire que de l’imaginer, mais de voir son visage, tu comprends qu’il est vraiment resté.

« Ben voilà ton premier miracle. T’as pas craqué. »

Parce que tu sais qu’il n’a pas cédé. C’est d’Owen qu’on parle. Il est droit. Il est fidèle à son dieu. Il sait ce qu’il fait. C’est réellement ça sa voie. Il l’a trouvé lui. Au moins. Tu lui en es un peu jaloux. Un peu beaucoup.

« Faut vraiment qu’on fasse quelque chose pour que tu sois moins canon parce que ça doit être tellement dur d’être toi… »

Tu sais ce que c’est - en toute objectivité - c’est de famille. Et tu te fais souvent draguer. Et depuis ces dernières années, tu esquives toutes ces avances. Plus ou moins subtilement. Tu sors seul la plupart du temps, donc c’est tranquille. Quand y’a des potes avec toi c’est un peu plus délicat. Mais pour l’instant t’as toujours réussi à te barrer avant que la fille ne finisse chez toi ou que tu ne te retrouves dans son appart’ à elle. Vous êtes pareil niveau filles Owen et toi. Sauf que lui il veut peut être les baiser contrairement à toi. Mais y’a que toi qui le sait. Tu gardes tout ça pour toi. C’est pas bon. Tu le sais. Mais qu’est ce qui est bon ? Pas grand chose. L’alcool. Ouais. Ca c’est bon. Et tu bois un peu plus ta bière.

Si cette soirée commençait à remonter, Owen s’en souvenait encore très bien. C’est vrai qu’elle aurait pu être amusante, s’il n’avait pas fait vœux de chasteté et si pour lui, garder sa queue entre ses jambes n’était pas un défi presque quotidien. Enfin, il n’était absolument pas charmé par cette jeune femme qui avait déboursé jusqu’à 650 dollars pour lui. C’était son amie en réalité qui avait payé pour qu’elle se retrouve à devoir passer la soirée avec lui. Au moment même où il avait annoncé la couleur, qu’il était prêtre, elle s’était lancée dans des accusations, mettant Owen dans une catégorie de prêtre dont il ne voulait même pas être assimilé. L’actualité menait la vie dure à ces curés qui, comme Owen, n’avaient rien à se reprocher et qui finalement représentaient une majorité du corps pastoral. Toutes ces histoires de pédophilie, d’homosexualité au sein des hommes de foi, c’était compliqué à gérer. Tous étaient mis dans un même panier et personne n’avait le bénéfice du doute. Les prêtres pédophiles semblaient être devenue une vérité générale qui restait encré dans les crânes de bon nombres de personnes qui voudraient reprocher tous les maux du monde à la religion et ceux qui la représentent. « Parce que t’es resté ? Je te crois pas… » Resté c’était une bien grand mot. C’est-à-dire qu’il n’avait pas eu le temps de pouvoir faire quoi que ce soit, qu’on lui avait déjà collé un bracelet autour du poignet et foutu assis sur une chaise, attendant que ces jolies demoiselles fassent monter les enchères. « Tout s’est passé très rapidement… j’allais pas attendre plus de dix minutes, mais j’ai pas eu le temps d’attendre en fait ! » On va pas se mentir, Owen avait une belle gueule et bon nombre de fois il avait entendu que c’était bien dommage qu’un homme comme lui ai fait vœux de chasteté. Vendre son âme et son corps au Christ, quel gâchis. Les billets tombaient rapidement, trop rapidement au gout du prêtre aussi. « Ben voilà ton premier miracle. T’as pas craqué. Faut vraiment qu’on fasse quelque chose pour que tu sois moins canon parce que ça doit être tellement dur d’être toi… » Le prêtre roula des yeux. Il prenait le compliment, si c’en était un. « Tellement dur oui… Mais en réalité, j’ai eu affaire à une sacrée conne ! » pardon pour le mot employé. « Elle était pas mal mais elle avait rien dans l’crâne, ça a tout gâché ! Alors, elle m’a bien facilité la tâche, t’en fais pas ! J’ai eu droit au ‘’il parait que vous êtes gay et donc comme c’est interdit vous vous faites plaisir avec des gamins’’ …» silence, Owen était assez dépité de devoir se défendre à ce propos à chaque fois. « je l’ai remercié et j’me suis barré. Mais, j’te remercie pas pour ça. C’était quoi l’idée de cette soirée ? Ton intention ? A part me faire chier ou me tester ? » simple curiosité de la part du prêtre, c’était comme un jeu que son frère avait mis en place depuis longtemps, tester Owen, le titiller jusqu’à ce qu’il craque sans doute.

Donc il s’est fait embrigader contre son gré à cette soirée. Ca te fait trop marrer de l’imaginer. C’est à cause de toi à la base, mais la suite est hors de ton contrôle. Il aurait pu se barrer mais le destin en a voulu autrement. Tu te dis qu’au moins il a un truc fun à raconter grâce à toi. Parce que bien sûr, c’est grâce à toi. Bien sûr, ça lui changera de sa vie que tu imagines complètement monotone avec son vin et son église. La vérité c’est qu’il y a tellement plus dans la vie que le sexe. Y’a l’alcool et la musique. Y’a qu’à ça que tu t’accroches de ton côté. Mais ouais, niveau histoires folles, t’en as un tas avec toutes ces années en tant que rockstar que tu as passé sur les routes et en soirée. Owen ne connaît pas ça.

Tu lâches un rire quand il parle d’une conne. La vérité c’est que tu aimes vraiment beaucoup ton frère. Surtout quand vous passez des moments comme celui là avec une certaine complicité que vous essayez d’ignorer pour continuer le mythe des frères qui se détestent. Mais non. Vous avez grandit. Vous avez mûri. Vous êtes plus proche maintenant. La vie a fait que ton frère a pris une place importante dans ton coeur. Oui. Toujours cette overdose qui revient dans ta tête. C’était tellement un virage dans ta vie. Et il était là. Tu ne l’oublieras jamais. Reconnaissant jusqu’à la fin de tes jours. Peut être que tu devrais lui dire un jour. Il sait. Ca fait toujours plaisir de l’entendre dire quand même. Il sait. Ok.

Tu sens un léger pincement à ton coeur quand il parle de ‘gay’ mais ça va. Tu gères. T’as l’habitude. Et il te questionne sur les fondements de cette soirée. Tu souris, amusé qu’il cherche une vraie raison.

« Je crois que j’étais ivre à ce moment là, j’avais une idée très claire. Je te promets. »

Tu te marres. Tu te sens drôle.

« Mais je me souviens plus. »

Tu bois ta bière parce que c’est une des meilleures choses au monde que de boire de l’alcool. Tu regardes Owen, toujours ton sourire aux lèvres. Tu passes bizarrement un bon moment avec lui.

« Avoue c’était fun. Tu oses pas le dire. Tu veux pas avoir à me remercier. T’inquiètes pas, je n’ai pas besoin que tu me le dises en tout mots. Je le vois dans tes yeux. »

Est-ce que tu parles pas plutôt pour toi là Asher ? Ta gueule.

« Après ouais ça doit être super chiant les remarques qu’on te fait à chaque fois. Même moi je me suis lassé… »

Et c’est vrai. Tu le fais moins chier avec ça. Surtout parce que ça attrait à l’homosexualité et que tu préfères éviter ce sujet. Trop délicat.

Owen avait pas connu la vie de rockstar, c’est sûre mais en réalité, pour rien au monde il n’aurait eu envie d’y gouter. D’autant plus si c’était pour finir comme Asher à faire une over dose, obligeant Owen à lui porter secours cette fois-là. Il avait toujours ignoré les raisons qui l’avait poussé à ça, Asher n’en ayant jamais vraiment parlé et Owen n’ayant pas poussé l’investigation très loin. Peut être qu’il préférait ne pas trop savoir au final. Mais pour autant, la vie d’Owen n’était pas un long fleuve tranquille, il ne passait pas l’ensemble de son temps dans les murs de l’Eglise ou derrière le confessionnal à attendre que des gens viennent lui demander pardon en confessant leurs conneries. N’en déplaise à certains, Owen avait une vie assez chargée et épanouissante pour lui : ses entrainements et matchs de rugby, ses soirées au club house du stade, les soirées avec ses amis devant des matchs, des virées en moto… Bon, ça tournait pas mal autour du sport, du rugby mais c’était aussi son identité, ce depuis qu’il était gamin. Il avait grandi dans cet univers, héritage de son père et grand-père et tradition familiale. Ce n’était pourtant pas quelque chose qu’il partageait avec son frère, qui s’était tourné vers la musique depuis très jeune, jamais vraiment attiré par le rugby mais Owen ne lui en avait jamais tenu compte. Au contraire, il avait été très admiratif de son frère et avait écouté chacun de ses titres sortis. Bon, il n’écoutait pas pour autant ses albums en boucle mais il connaissait chaque chanson quand même. De temps en temps, il lui arrivait encore de mettre un morceau ou deux de temps en temps.
Alors qu’Owen tente de savoir pourquoi Asher l’avait attiré dans cette fameuse soirée qui n’était pas un très bon souvenir pour le prêtre, la réponse n’était pas réellement surprenante mais pas pour autant satisfaisante. « Je crois que j’étais ivre à ce moment là, j’avais une idée très claire. Je te promets. Mais je me souviens plus. » et Owen voyait son frère rire à ses conneries, une sorte de fierté quand même. « Tu dois être content rien qu’en imaginant la scène, hein. Manquerait plus que tu m’sorte que c’est toi qui a filé les tunes à cette nana pour qu’elle achete sa soirée avec moi. » nan, Owen se doutait bien qu’il ne serait pas allé jusque-là, mais bon… s’il était ivre comme il dit, qui sait ! « si c’est le cas, t’as perdu inutilement 650 dollars ! » qu’Owen aurait préféré mettre directement dans sa poche. On a beau dire que les prêtres ne doivent pas vivre dans l’abondance, un peu d’argent supplémentaire de temps en temps ne lui ferait pas de mal. « Avoue c’était fun. Tu oses pas le dire. Tu veux pas avoir à me remercier. T’inquiètes pas, je n’ai pas besoin que tu me le dises en tout mots. Je le vois dans tes yeux. » Owen sourit et acquiesce d’un léger signe de la tête. « En réalité, ca aurait pu l’être ! Si, je ne m’étais pas pris des accusations à la con ! » L’actualité n’était pas très bonne pour le corps ecclésiastique ces derniers temps, d’autant plus avec ces histoires de pédophilie et de complicité de l’Eglise en France qui font mine de rien, le tour du monde et ce film qui ne devrait pas tarder à sortir dans les salles… Owen avait du soucis à se faire pour les semaines à venir, ce ne serait surement pas la dernière fois qu’il aura à se défendre sur le fait qu’il n’était ni gay, ni pédophile et que bien sûre, s’il apprenait que quelqu’un agissait ainsi dans son entourage parmi les prêtre, il le dénoncerait et se battrait contre ça. « Après ouais ça doit être super chiant les remarques qu’on te fait à chaque fois. Même moi je me suis lassé… » Ah ! « Merci ! » et ca sortait du cœur. « mais… lassé ? Genre, on t’a déjà dis quelques chose à propos de ça ? » si même on s’en prenait à sa famille, que ce soit pour rire, pour titiller ou quoi, c’était des sujets suffisamment sérieux pour qu’au bout d’un moment, ca ne soit plus si drôle que ça.

Tu fais non de la tête sans hésitation quand il émet l’hypothèse que tu aies filé le fric à la meuf. Non. Tu dépenses pas ton fric de manière aussi inconsciente. A part sur l’alcool. T’aurais jamais été si loin pour une blague. Surtout que ton frère est beaucoup trop canon pour qu’il ait besoin d’un tel coup de pouce. Il se sous estime. Tu le laisses penser. Il a été acheté pour 650$. T’es impressionné. C’est pas mal quand même.

Tu fronces un peu les sourcils quand il parle d’accusations à la con. Tu as une petite idée de quoi il en retourne. Tellement relou sérieux. Les gens font chier. Et il s’intéresse à ce que t’as à dire sur le sujet. Ton vécu. T’as pas de soucis à en parler alors tu réponds sans trop y réfléchir.

« Ouais. Pas si souvent mais quand même, à chaque fois que tu viens sur le tapis et que je mentionne que t’es prêtre, y’a une remarque de merde qui se fait entendre. Y’a toujours un connard au milieu pour parler de pédophile. »

Après tu es pas bête. Tu sais que c’est une réalité dans le monde de l’église. C’est un stigmate. C’est un tabou. Mais c’est bien réel. Juste pas pour ton frère. Il est pas comme ça. Il est beaucoup trop bon.

« Chiant que les conneries des autres aient des répercussions sur toi qui a rien demandé. »

Et tu penses fort aux conneries de Trevor qui ont enchainé la fin de Empire Of The Sun. Ca fait toujours mal d’y penser. Tu vivais ta meilleure vie. C’est fini. A cause de lui. Le monde es fucked up de toute façon. Tu le sais depuis toujours. Tu vis dedans parce que t’as pas le choix. T’es né. Tu te démerdes. Même si t’as rien demandé. Mais si tu peux le faire dans un environnement où tu te sens bien, c’est mieux. La musique et l’alcool, c’est là où tu te sens bien. La drogue aussi. Oui mais t’as fait une croix dessus Asher. Ca me manque. Ca aidait pour t’évader c’est sûr.

Et puis ça sonne à l’interphone. Tu te lèves pour aller ouvrir au livreur qui est bien chargé. T’as commandé en abondance. Tu sais que s’il en reste, ce sera pour ton prochain repas. Comme tu détestes faire la cuisine, c’est parfait. Mais quelque chose te dit que tu vas tout manger, parce que t’es bien affamé.

« Tu fais quoi demain ? »

Que tu relances la conversation alors que tu sors toute la bouffe pour enfin dévorer tout ça.