T’as lâché prise ce soir. T’as passé la journée seul à ranger ton appart’ pour qu’il soit un peu plus chez toi et un peu moins en chantier. T’es venu ensuite dans ce bar et t’as bu. Encore. Et encore. Jusqu’à rire pour un rien. Tu veux essayer de calmer tes pensées. Tu veux te libérer de tes démons. Tu veux passer une bonne soirée mais ça ne marche pas vraiment. Tu cogites beaucoup. Comme souvent. Si tu pouvais éteindre ta cervelle tu le ferais avec grand plaisir. Juste le temps de quelques heures. Pas grand chose. T’as pas de drogue sur toi. T’en as plus. Depuis l’overdose, tu fais presque plus d’écart à ce niveau là. Presque. T’es loin d’être parfait.

Tu files faire un tour aux toilettes parce qu’avec tout ce que t’as bu, faut que t’évacues. Quand tu te laves les mains, tes yeux se posent beaucoup trop longtemps au travers du miroir sur le gars au lavabo à ta droite. Tu fermes les yeux quand tu t’en rends compte. Tu t’exaspères tout seul. Tu sèches tes mains. Le gars s’en va. Tu te regardes dans le miroir un moment. T’es en train de prendre une décision complètement conne mais t’es déterminé. Tu sors, allant vers le bar, tu fais pivoter la première femme apparente sur ton chemin afin qu’elle te fasse face. Tu vas poser tes lèvres sur les siennes pour entamer un baiser. Tu ne lui as pas demandé son accord. Tu as juste agit sous l’impulsion. Tu ne réalises pas que tu vas certainement te prendre une claque. Elle est peut être là accompagné. Tu vas finir avec un poing dans la figure. Y’a de grandes chances. Mais tu t’en fous. Ca te fera du bien. Peut être que ça te remettra tes idées en place. En attendant voilà que tu tentes de glisser ta langue dans la bouche de cette personne random.

Para bailar La Bamba, se necessita una poca de gracia, para mi, para ti, ay arriba, ay arriba.

Ce soir, les deux ministres qui te font office de meilleurs amis sont parvenus à se libérer au même créneau horaire en vue de passer une soirée hautement nécessaire à l'un des bars qu'ils ont soigneusement sélectionné. Tu ne peux t'empêcher de te demander comment Ariane et Kane n'étouffent pas prodigieusement tant ils ont des responsabilités, des rendez-vous qu'ils ne peuvent manquer, des engagements. Tu imagines difficilement retrouver une vie où tu sais, en ouvrant les yeux sur un nouveau soleil, devoir passer ta journée sous le couperet de l'horloge. Bien heureusement, tu perçois que tes amis n'en souffrent pas.

Vous vous êtes entendus pour vous retrouver au bar directement mais tu n'as su t'empêcher de passer devant chez Ariane, enclencher incessamment sa sonnette de manière à faire aboyer le clébard des environs et fuir ton méfait, un sourire de crapule étirant tes lippes, avant que l'alerte rousse ne débarque. Il y a de fortes chances qu'elle détermine instinctivement que tu es de nouveau l'épicentre de ses nuisances mais il est impératif que tu entretiennes ta réputation. De plus, tu es persuadé que ceci motivera la Parker à accélérer la cadence pour arriver au bar.

The Sixteen Antlers, tu ignores ce que ce bar possède de si singulier pour que le duo de choc l'élise, mais il faut bien que tu découvres tous les bars de Brisbane. Tu pousses la porte, balayes la salle du regard, reçois quelques regards ornés de diverses nuances au passage. Kane te fait signe à une table et tu le rejoins, sourire aux lèvres. « Yo bro ! Ça va ? » Tu presses son épaule amicalement et te glisses à côté de lui. Tu sens qu'Ariane va le cuisiner par rapport au paquet que vous avez généreusement laissé sur son paillasson, quelques lunes plus tôt. En parlant de la bête, la voilà justement qu'elle montre sa tête. « Pas trop tôt ! » Tu salues, provocateur. « Vous buvez quoi ? » Tu prends les commandes rapidement et files au bar sans demander ton reste. Pendant que le barman prépare les boissons, tu gravites pour t'approprier les lieux. Puis, alors que tu t'apprêtais à aller récupérer les rafraîchissements, c'est une langue qui vient s'inviter dans ta bouche. Tu laisses l'étrangère visiter les locaux autant qu'elle le désire puis hausses les sourcils une fois que le garçon se distance assez pour que tu puisses scruter ses traits. Audacieux et charmant : un combo intéressant. « C'est que t'as l'air de passer une bonne soirée, » tu commentes en lui offrant un clin d’œil. Tu vois bien qu'il n'est pas sobre, même son équilibre paraît précaire. « Tu veux un verre aussi ? » Pourquoi pas, après tout. Ta tirelire est plutôt grasse en ce moment, autant en profiter. T'es pas du genre à avoir un épargne, tu préfères collectionner les souvenirs.

Get out of your own way

karvisher

À la seconde où mon regard passe de Kane tout pimpant à Levi trop arrogant, j’esquisse un faux haut le coeur qui ressemble à une pré-gerbe faisant paniquer nos voisins dans l’angle.  « Tu remercieras les embouteillages d’avoir canalisé ma rage, oui. » et j’exagère, battant la mesure de mes paupières légèrement maquillées pour l’occasion, l’oeil pas aussi charbonneux que prévu pour avoir été stoppée dans mon élan par un Christian qui se déchaînait à japper sur le paillasson de l’entrée comme s’il se la jouait préparation d'une audition du remake animalier de Rosemary’s baby. Levi en cause encore et toujours, j’ai déjà prévu lui tartiner le visage d’eyeliner quand il aura l’air de se perdre dans ses pensées et d’encore une fois se murer dans une envolée créative, ce qui devrait arriver d’ici la prochaine poignée de minutes si je me fie à son cycle aussi prévisible que répétitif. Dégainant mon plus beau coup d’oeil inquisiteur à la seconde où Kane s’active à ma gauche, c’est par contre complètement intéressée et probablement trop que j’arque la nuque, lui laissant comprendre d’un seul sourire carnassier que ce soir, il n’aura pas le choix de lâcher tous les détails sur la soirée, savoir si enfin il a pu choper son fantasme de toujours - ce dont je doute pas - et s’il a bien fait de se filer de l’eczéma généralisée de paniquer autant avant coït - ce dont je doute absolument. Mais c’était sans compter l’anglais qui me vole la vedette en s’extirpant du sillage du Williamson, offrant les boissons pour piquer le potentiel sympathie sans que j’ai pu faire quoi que ce soit pour défendre ma valeur.  « Le spécial Ariane. T’inquiètes pas, il saura. » je roule des yeux, soupire un brin, me réinstalle dans le booth une fois Levi parti, un signe de la main au barman de ce soir qui est aussi habitué que moi ici, qui sait que lorsqu’une commande de ce genre est passée, ça veut dire qu’il doit sortir ce qu’il a de plus fort dans la seconde. L’accord tacite de mes nombreuses visites faites directement après une journée éreintante au boulot.

Puis, à nouveau, je tourne la tête vers Kane, plus curieuse que jamais, avide de chaque détail, chaque signe, chaque parcelle qu’il laisserait aller sur ses ébats même sans le vouloir. J’aurais continué mon interrogatoire sans limite ni pudeur, s’il n’y avait pas eu à quelques centimètres à peine de ma main baladeuse le portable du McGrath qui traînait, tel un Graal, telle une offrande venue des Dieux. Dans un geste rapide, furtif et presque violent, je l’attrape avant que Kane ne puisse analyser la lueur de malice qui illumine mon visage.  « Il l’aurait pas laissé là s’il voulait pas qu’on fouille. » et j’enserre plus férocement mon dû, ne laissant pas la moindre chance à mon meilleur ami de penser ne serait-ce qu’une seconde à me le dérober à son tour. Le répertoire des textos défile, celui des appels également, rien qui ne m’attire vraiment, presque blasée déjà. Jusqu’à ce que je file vers la caméra, prête à la remplir à pleine capacité de photos floues et tellement désagréables à supprimer à la pièce les unes après les autres.  « Qui l’eut cru? Son potato phone a une caméra quand même pas si à chier. » suffisamment étonnée, je parcours la salle avec la lentille bien ouverte, même pas besoin de flash pour avoir un minimum de résultat convenable. L’idée pointe, à mon tour de quitter mon siège et de partir à l’aventure.  « Si tu veux pas être complice, reste derrière à surveiller les verres. » un baiser goulu sur la joue de Kane, à la commissure de ses lèvres juste parce que j'ai envie de le faire rougir à un point que même les lumières tamisées du bar n’arriveront pas à camoufler son état, et je file en sachant très bien qu’il y a peu de chances qu’il me suive.  « Et si quelqu’un y ajoute du GHB, assure-toi qu’il double ma dose. » un éclat de rire se casse sur mes lèvres carmin.

« Ariane Parker pour GQ, j’ai une question de la plus haute importance à vous poser. » j’ai trouvé dans l’allée longeant le bar un petit groupe hétéroclite qui attend patiemment leurs consommations. À eux, je brandis le portable allumé, la caméra braquée sur leur air niais d’apéro alcoolisé qui se passe visiblement particulièrement bien. « Quel est votre meilleur truc pour camoufler une mauvaise odeur tenace, du genre à s’incruster, à coller, et à jamais partir? » et déjà, un monde de possibles s’offre à moi pour troll le cas de Levi bien comme il faut.

Une soirée improvisé au Sixteen Antlers avec Levi et Ariane, ça va être une très bonne soirée. Ca aurait été mieux avec Wendy dans le coin mais on peut pas tout avoir. C’est déjà pas une si mince affaire de se trouver un moment où on est tous dispo en même temps. Je trouve qu’on ne se voit pas assez mais ça c’est mon côté needy. Heureusement que Wendy vit avec moi, comme ça je suis comblé.

Je glisse un bras dans le dos de Levi quand il me demande si ça va et mon sourire répond pour moi. C’est super gênant pour moi d’être si heureux à des moments ces derniers temps alors que la mère de Wendy est décédé. Mes sourires s’envolent quand je vois son air déprimé, c’est sûr, mais apparemment j’ai le pouvoir de lui changer les idées assez efficacement donc on va dire que c’est pas mal.

« Ca va toujours quand t’es là. »

Bien évidemment. Ariane arrive ensuite, elle est de mauvaise humeur. Je me mets au défi de lui faire changer ça en un temps record. Levi est déjà sur la première tournée.

« Une bière. »

Pour changer. Ariane se la raconte avec son « spécial Ariane ». Je suis déjà venu dans ce bar mais visiblement pas autant qu’elle et elle ne manque pas de le souligner qu’elle est une habituée des lieux.

« Le spécial Ariane, avec un peu de cocaïne dedans ? »

Just a wild guess. Installé à la table, Ariane s’empare du téléphone de Levi et je roule les yeux.

« Tu peux pas t’empêcher ! »

J’essaie même pas de le récupérer parce que je sais qu’elle arrivera à ses fins de toute façon. Et puis ok, peut être que je suis intéressé par le contenu aussi. Juste pour voir si y’a des trucs que je ne sais pas. Qu’il aurait osé mettre de côté dans nos conversations. Je jette des coups d’oeil vers le bar alors que Ariane fait son expédition dans le téléphone de mon ami. Je me retrouve avec un baiser sur les lèvres avant de la voir filer, amusé par sa remarque sur le GHB.

« Ouais ouais je leur dirai de nous laisser le flacon. »

Elle est folle. Je reste donc seul à la table pour garder la place et je lève très haut un sourcil quand je vois que Levi est en train d’embrasser un gars. Oh ? Je me lève aussitôt, ne craignant pas pour notre table. Je tapote l’épaule de la rousse pour lui indiquer Levi quelques mètres plus loin.

« On essaie de nous le voler. »

Non. Je ne suis pas du tout jaloux.

C’est bizarrement plus agréable que ce que t’avais imaginé et tu mets ça sur le compte de l’alcool qui altère ta perception des choses. Alors, voyant que la personne que tu as pris par surprise répond à ton baiser, tu continues, prenant même du plaisir ce qui est une notion assez étrange pour toi dans ce genre de situation. Tu n’as pas l’habitude. T’es fier de ton coup. Tu vas doucement poser ta main sur la joue de l’autre, allant à fond. Tu profites de ces quelques secondes que l’univers te donne pour te confirmer que t’es un bonhomme, un vrai.

Quand tu te détaches pour reprendre ta respiration, tu ouvres les yeux et y’a un gros soucis. Les cheveux long t’ont induis en erreur. C’est. Un. Mec. Tu deviens livide. T’étais si bien quelques instants plus tôt et tout s’écroule en un temps record. T’entends pas ce qu’il te dit, t’es bloqué. Brain freeze. Jusqu’à ce qu’il te propose un verre et c’est clairement la direction que t’allais prendre mais t’as pas envie qu’il pense que t’es intéressé.

« Même deux. »

Et tu files au bar en lui passant devant après avoir croisé son regard parce que, t’es faible et il est plutôt très mignon, même plus que ça. Au comptoir, t’attends pas après lui pour commander. T’espères qu’il va pas te suivre.

« Quatre shot de tequila. »

Juste pour toi. T’es dans l’exagération la plus totale mais il faut à tout prix que tu te laves l’esprit de ce moment que tu viens de passer. Apparemment boire jusqu’à en crever est l’option que tu prends pour effacer ce baiser. Ton coeur bat trop fort. Ton cerveau cogite trop. Tu vas certainement finir cette soirée par terre en ayant perdu connaissance. Ou bien au milieu d’une bagarre. Tes deux options les plus probable pour le reste de la nuit : l’hôpital ou le poste de police.

Para bailar La Bamba, se necessita una poca de gracia, para mi, para ti, ay arriba, ay arriba.

Un large sourire étire tes lèvres dès que tu retrouves Kane, le jeune homme que tu considères tel un frère depuis des années maintenant. Tu tapotes amicalement son épaule et lorsque l'alerte rousse débarque à la table soigneusement retenue par le Williamson, tu prends les commandes, relevant d'un simple rictus aussi narquois que fier son commentaire sur sa fureur apaisée par les embouteillages.

Une fois au bar, tu énumères les rafraîchissements que vos cœurs désirent. Puis, tu vagabondes dans le lieu, t'appropriant l'espace à ta manière. Du coin de l’œil, tu aperçois Ariane pianoter le vieux téléphone portable de Matt qu'il t'a légué à ton retour à Brisbane, Kane ne se privant pas de lorgner en retrait. Puis, sans cérémonie, ce sont les lèvres et la langue d'un parfait inconnu qui s'immiscent contre ta bouche et bien que le contact soit agréable, tu ne te prends pas de suite au jeu de lui rendre ce baiser que tu n'as jamais prié, sous fond sonore des commentaires récalcitrant de la Parker sur l'hygiène.

« C'est que t'as l'air de passer une bonne soirée, » Tu constates à l'allure éméchée du jeune homme qui semble suffoquer à la réalisation qu'il t'ait embrassé. Tu lui proposes un verre, question de détendre l'atmosphère et t'inviter dans cette ambiance altérée par la boisson que la majorité des clients du bar convoitent. « Même deux, » qu'il a la décence de te répliquer avant de filer vers le bar et enchaîner sans merci quatre shots de tequila. « Le mec est assoiffé, » tu commentes en prenant les boissons que t'as préparées le barman et les distribuant à Kane et Ariane. Tu lèves ton verre pour trinquer et l'entrechoques aux contenants de tes fidèles acolytes. Tu ne sais pas où compte se rendre le blond qui t'a dérobé un baiser, mais une chose est sûre : il ne va pas bien et se projette insatiablement vers de douloureuses heures. « Cap d'aller l'embrasser ? » Tu lances à Ariane, intrigué par le cas du jeune homme. Pourquoi user de l'audace à embrasser un inconnu de la sorte si c'est pour s'en évader précipitamment par la suite ? Et ce regard, tu ne l'oublies pas. Il révèle quelque chose de singulier, un genre de sentiment inavoué, âcre mélange de plaisir coupable. « Et j'veux goûter, » tu annonces, ton regard se posant sur le rafraîchissement personnalisé de la chroniqueuse. Tu aspires bruyamment une gorgée et recherches les ingrédients mystères. « Ta coloc' est toujours au beau fixe ? » tu questionnes Kane, faisant référence à l'emménagement de Wendy chez le pompier. Tu t'étais assuré dès le lendemain matin du dépôt du kit pour adultes concocté avec l'esprit doté d'un génie créatif d'Ariane que ce premier n'ait pas eu de répercussions négatives sur la soirée du Williamson. Bien heureusement, l'australien t'avait assuré que sa soirée avait été excellente avant de t'offrir davantage de détails, ce qui te ravit et ce dont tu espères continuerait sur cette ascendante lancée. Si tu ne t'attends pas forcément à ce que Kane se livre aux confidences avec toi dans un lieu public - à moins qu'il le désire et dans ce cas tu l'écouterais bien évidemment - tu désires en priorité t'assurer que ça gaze toujours avec la jeune infirmière.

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« Tu peux pas t’empêcher ! »« Veux pas, plutôt. » parce qu’en vrai, c’était pas une surprise pour personne et encore moins pour Kane, constamment aux premières loges de nos conneries communes, s’embêter à outrance étant notre moyen de communication le plus efficace à Levi et moi. La musique cache à peine mes giggles à chaque grimace que je renvoie à la caméra - et celles que fait un Kane blasé, mais pour le moins à l’écoute lorsque je me lève de table, lui passe la mission du jour avec toute ma confiance dans le regard. « Ouais ouais je leur dirai de nous laisser le flacon. » l’étincelle de gratitude dans mon regard fera son temps, on peut même la confondre avec les quelques bribes de lumière qui éclairent le bar.  « T’as tout compris bébé. » alors que je file en mode interview, presque trop dans mon élément pour ne pas retenir un éclat de rire et un autre. Faisant exprès de me poster à quelques pas d’un Levi de dos qui pourra avoir le luxe de tout entendre s'il s'en donne la peine, je lance la conversation, ravie du retour presque immédiat de la populace sélectionnée pour l’entrevue.

« Du parfum, j’pense. Sinon un bon savon, celui avec de l’exfoliant dedans, tu sais duquel je parle? » et j’hoche de la tête, nettement plus concernée qu’il ne le pense, le hipster au beanie à l’effigie de son groupe indie préféré, logo tellement mainstream qu’il me fait penser à 44 autres groupes identiques, petit soupir dépité pour la peine.  « Abricot ou café? Parce que plus c’est abrasif, plus je prends. » personne n’est étonné de m’entendre manigancer l’opération la plus douloureuse pour laver une peau que j’imagine si hypothétiquement crasseuse que la mention est hilarante. Mon plan machiavélique avorté dans son élan par un Kane en panique qui apparaît à mes côtés, attire mon attention dans l’angle, les relents gutturaux d’un french kiss en bonne et dûe forme qui finissent de compléter le commentaire de mon ami. « On essaie de nous le voler. » j’hausse les épaules, tourne la caméra vers les deux dudes en pleine embrassade, poursuis l’air las. « T’inquiètes, c’est son rebound parce que tu lui as brisé le coeur en chopant Wendy. Il veut juste se venger. » fermant la caméra quand le duo de langues n’est plus, le téléphone trouve sa place dans la poche arrière de mon jeans comme s’il y avait toujours vécu. « Quatre shot de tequila. » mon sourcil se hausse, Levi complète le tableau en revenant vers nous avec nos propres consommations.  « Le mec est assoiffé, » « Ou il mise sur la quantité idéale d’alcool pour désinfecter tout ça. » sans délicatesse aucune, je me charge de la paume d’effacer les quelques traces de bave gluante qui siègent encore sur le menton de l’anglais.  « Cap d'aller l'embrasser ? »   et il m’arrache un éclat de rire Levi, presque déçue d’avoir avalé ma dernière gorgée pour ne pas la voir s’échouer sur le t-shirt de Kane, interdit. « On a 7 ans à nouveau? C'est là où je te demande si c'est avec langue ou sans? » forçant ma voix de fausse ingénue, mon verre se dérobe de mes mains à peine je regarde ailleurs, juste à temps pour rattraper de doigts experts les quelques mèches de Levi qui menaçaient de se tremper dans l’un des meilleurs Scotchka qui m’ait été donné de déguster ici. Évaluant le potentiel malaise de la scène, j’attends à peine avant de faire les quelques pas nous séparant de l’inconnu imbibé de tequila pour passer langoureusement mes bras autour de sa nuque. Avec un peu de chance, Levi occupera Kane qui ne viendra pas se confondre en excuses à ma place pour avoir envahi l’espace vital d’un type qu’on connaît pas, dont on se balance sûrement. Un baiser qui fait plus de bruit que d’effet, mais pour lequel je m’applique tout de même, quelques techniques par ci, un clin d’oeil par là, et une main baladeuse qui fait d’une pierre deux coups en tentant de voir s’il tient sur lui quelques billets échappés dans un plis de veste ou un replis de t-shirt. Nah, rien, à sec. « Roh, me fais pas croire que tu attendais des préliminaires - faites ce que je dis et pas ce que je fais much.  » toujours pendu au cou du blond, j’entraperçois dans l’angle Williamson et qui, à son expression, ne semble pas aller si bien que ça. Forte de nos années d’amitié, c’est déjà en ayant oublié le crush du jour de Levi que je retourne vers le pompier, prête à lui changer les idées d'un “il goûtait même pas Levi, ça empestait trop le citron et l’agave pour” que statuent mes yeux. « Tu fais une drôle de tête, ça va ou on se tire? » murmure à son oreille.

Je ne le dirai pas mais je suis soulagé que Levi soit déjà de retour à notre table. Apparemment le mec embrasse des gars au hasard dans des lieux publics et reprend à vaquer à ses occupations cinq minutes après. Il m’impressionne. Il peut avoir qui il veut. Tout le monde tombe sous son charme. Et comment ils font les mecs pour savoir que l’autre est pas hétéro hein ? Ca c’est un mystère pour moi. Mais en tout cas là, ils ont l’air de s’être trouvé tous les deux, le temps d’un baiser.

J’ouvre de grands yeux quand Levi propose d’embrasser le gars. Puis je me reprends quand je comprends qu’il parle à Ariane. Ok zen Kane, fausse alerte. Clairement si y’a un mec que je dois embrasser, ce sera Levi. D’ailleurs beaucoup sont surpris qu’on ait pas déjà fait cette expérience. Mais y’a eu pas mal de soirée alcoolisé entre nous et des nuits dans ses bras alors… Peut être… Mystère.

Je bois une gorgée de mon verre quand Levi parle de goûter. J’ai peut être légèrement la tête ailleurs là, assez pour que j’en oublie de boire. C’est donc assez. Je redescends sur terre quand Levi me demande à propos de ma coloc avec Wendy.

« C’est parfait ouais ! »

Première fois que je vis avec une copine à moi, il le sait très bien. Avec Diana ont été encore chez nos parents et puis après j’ai eu personne assez longtemps ou assez sérieux pour en arriver là. Il est vrai que la situation avec Wendy était un peu différente vu qu’elle avait besoin de s’éloigner de son père, mais ça n’en reste pas pour le moins quelque chose de tout à fait naturel dans notre relation. Ariane a déjà filé de la table alors je me permets une petite remarque spécial pour Levi.

« Le morning sex est… »

Je fais le signe « ok » avec ma main. Ok c’est pas assez pour décrire véritablement mon ressenti mais comme on est dans un lieu public, je vais garder ça à un minimum. En plus là je fais genre le mec j’ai grave de sexe et c’est vrai, mais, c’est particulier avec Wendy. Levi sait de quoi je veux parler, on en a beaucoup discuté sur le sujet. J’ouvre de grands yeux quand je vois Ariane en train d’embrasser le gars.

« Ok elle l’a fait. »

J’aurai pas cru. Je sais pas pourquoi je doute d’elle encore après tout ce temps. Elle revient assez rapidement, se moque de ma tête qui… ok doit être assez éloquente. Je ne m’empêche pas d’y aller avec ma petite remarque qui est adressé à mes deux amis les plus proches.

« C’est si normal que ça d’embrasser des inconnus ? Je suis pas au courant moi ! Ca m’est jamais arrivé. »

Est-ce que je suis en train de bouder parce que j’ai pas embrassé le gars moi aussi ? On dirait.

Il ne reste pas avec toi. T’es soulagé. Tu cogites. Trop. Ce gars t’as laissé l’embrasser pendant un bon moment sans soucis. Sans finir par te mettre son poing dans la gueule. Chose que tu aurais certainement fait si la situation avait été inversée. Malgré le rejet que tu as ressenti après avoir découvrir l’identité de la personne, tu ne pouvais décemment pas lui en coller une. C’est toi qui a initié le baiser. Un premier shot.

T’espères que tu vas arrêter de penser à tout ça. Mais putain t’arrives pas à oublier combien c’était agréable. Deuxième shot.

Beaucoup trop agréable. Troisième shot.

Tu te retiens de te retourner pour voir où le gars se trouve et puis c’est une paire de bras qui se passent autour de ta nuque alors que t’étais sur le point de t’enfiler le quatrième shot. T’as tout juste le temps de voir une longue chevelure rousse que ses lèvre se posent sur les tiennes. Tu comprends pas vraiment ce qu’il se passe mais t’as la tête qui tourne légèrement alors ton temps de réaction est assez lent. Elle se détache juste quand t’allais le faire. Tes yeux sur elle. C’est bien une femme cette fois. Soulagé. Elle te tripote et t’as l’impression d’être un objet. Comme à chaque fois qu’une femme le fait, parce que t’en retire aucun réel plaisir. Tu te laisses néanmoins faire.

Tu comprends tout à fait sa phrase mais tu saisis qu’elle fait référence au baiser que t’as volé au gars juste avant. Le brun avec ces magnifiques yeux et ce parfum…

« C’est ton pote ? »

Non pas que tu sois intéressé, mais tu te poses la question. D’ailleurs ton regard va vers leur table et ils sont effectivement en train de regarder dans votre direction et la rousse est avec eux d’ailleurs. Elle n’a pas dû entendre ta question et… t’aimes pas que ça te fasse chier au fond. Non.

Quatrième shot.

Le barman te jette un coup d’oeil bizarre.

« Quoi ? Sers moi en quatre autres. »

T’es encore pas assez défoncé à ton goût parce que tu penses toujours à ce gars et ce baiser. Tuez moi.

Para bailar La Bamba, se necessita una poca de gracia, para mi, para ti, ay arriba, ay arriba.

Le goût de l'inconnu persistant contre tes lèvres, tes pensées ne cessent de virevolter vers lui. Pourquoi avoir agi ainsi ? Pourquoi se sentir par la suite si mal ? L'alcool fait des ravages, mais une partie de ton être avait envie d'assurer à cet homme que tout allait bien, tout irait bien. L'autre, en revanche, te prévenait de t'en approcher. Si le blond faisait partie de ceux qui haïssaient sans scrupule les homosexuels ou les rejetaient houleusement, tu ne voulais pas en faire les frais. Plutôt, tu envoyais Ariane pour le distraire voire consoler.

« On a 7 ans à nouveau? C'est là où je te demande si c'est avec langue ou sans? » Tu ris en entendant son commentaire, te satisfais pour le bien-être du type qu'elle morde à l'hameçon. Elle va lui faire tourner la tête, la rousse, tu le sais pertinemment. A moins que les shots ne le rétament avant. Tu goûtes la boisson de la bombe parisienne et interroge Kane sur sa colocation, intéressé et soucieux que ton meilleur ami tisse le bonheur avec la femme de ses rêves. Un large sourire sincère se plaque sur ton visage quand il utilise le qualificatif de "parfait" et tu tapotes son épaule, partageant son bonheur, lorsqu'il s'enthousiasme de sa nouvelle activité matinale. Tu n'étais pas du genre à accorder de l'importance au sexe, tu recherchais l'affection chez un individu et non une telle intimité. En revanche, tu savais que cette proximité toute particulière, le fait de ne faire qu'un avec quelqu'un, était très important pour Kane. « J'suis super content pour toi, bro. Tu le mérites. Comme quoi, tu as attendu pour obtenir le top du top, celle qui devait être faite pour toi. » Tu tapotes ton verre contre sa bière, appuyant la franchise de tes propos.

« Ok elle l’a fait, » que Kane annonce. Tu te félicites intérieurement, bien que tu n'en doutais nullement. « Évidemment. Il lui en faut plus que ça pour ne pas relever un défi. » Ariane vous rejoint, le Williamson conserve son air surpris. « C’est si normal que ça d’embrasser des inconnus ? Je suis pas au courant moi ! Ça m’est jamais arrivé. » Un sourire en coin dégoulinant de malice étire tes lippes et ton regard se plante dans celui de ton acolyte féminine, éloquent. Et si on palliait cette situation ? « C’est parce que tu rougis trop souvent, les gens ont peur de trop te mettre mal à l'aise. Sinon, j'te promets, ils n'arrêteraient pas vu ton joli minois. » Tu lui adresses un clin d’œil et annonces : « J'reviens. » Tu finis ton verre, montres ton briquet de sorte à indiquer que tu sors fumer. Tu ne manques pas en revanche de passer derrière le blond puis poser ton coude contre le bar de manière à faire face à sa silhouette en équilibre précaire sur le tabouret. Tu attrapes un des shots fraîchement disposés sur le comptoir pour l'inconnu et le lui tends, ton regard cherchant à croiser le sien en l'attirant par l'alcool. Une fois qu'il répond un minimum, tu invites : « Je vais cloper dehors cinq minutes, ça t'intéresse ? Un p'tit bol d'air différent. » Tu laisses ta proposition en suspens cinq secondes, le temps qu'elle impacte le fêtard ou pas et tournes les talons pour sortir des Sixteen Antlers et t'adosser à la façade du bar, enflammant le filtre d'une de tes concoctions réalisée avec la Parker.

« C’est ton pote ? » sérieux?! Il doit voir à mon regard qu’à la seconde, il me fait bien pitié de vouloir me gratter la moindre info sur Levi plutôt que d’aller lui demander directement. « Pas tous les jours. » qui finit par rebondir de mes lèvres à ses oreilles, le sourire carnassier que je lui renvoie qui devrait suffire à confirmer que jouer les entremetteuses n’est pas à mon programme du soir, surtout pas quand il a encore mon rouge à lèvres de barbouillé sur sa bouche. Qu’il fasse un homme de lui et arrête de se la jouer bourru, qu’il aille aborder le McGrath comme un homme plutôt que de babiller en adolescente, le potin qu’il attend de pied ferme, pensant que les regards qu’il renvoie par-dessus mon épaule vers la table où mes potes sont installés passent inaperçus. Dude, calme ta puberté et tes hormones deux secondes. « C’est si normal que ça d’embrasser des inconnus ? Je suis pas au courant moi ! Ca m’est jamais arrivé. » d’un teenage dream à un autre, je me faufile aux côtés de Kane et Levi alors que le blond renchérit, l’oeil brillant, à la recherche d’une confirmation quelconque que les jeunes de nos jours agissent ainsi lorsque lâchés libres en lieu public.  « C’est parce que tu rougis trop souvent, les gens ont peur de trop te mettre mal à l'aise. Sinon, j'te promets, ils n'arrêteraient pas vu ton joli minois. » ne manquant pas le coup d’oeil à la volée de Levi, j’en conviens que l’anglais n’a qu’un mot à dire pour qu'on enclenche la seule et unique mission de pousser une ou deux inconnues dans les bras de Kane, qu’il vive sa première fois avec une nobody sous notre courroux.

J’ai à peine le temps de prendre une gorgée de ce qui reste de ma consommation avant que Levi décide qu’il nous a assez longtemps gratifié de sa présence pour ce soir. « J'reviens. »  mon sourcil se hausse, et je suis sa silhouette alors qu’il se lève, une idée derrière la tête à le voir aller. « Comme d’hab. » et mon ton est piquant, juste assez, le sous-entendu lourd de sens que je ne me gêne pas de soulever, quand au final je peux pas dire qu’on n’est pas habitués ni Kane ni moi à voir Levi partir - de nos vies - et revenir quand bon lui semble. La pique que je tiendrai jusqu’à ce qu’il soit hors de mon champ de vision, avant de reprendre le cours de ma vie comme si de rien n’était. Toute mon attention vrillée à Kane, pas le moins du monde incommodée de me retrouver en tête-à-tête avec mon meilleur ami. « Il te manque de bière toi. » d’entrée de jeu, je fais signe au barman qu’on commence à être à sec, un hochement de la tête de sa part qui me confirme qu’il se met sur le cas. Et comme j’anticipe, et comme je pallie la réaction de Kane de voir que finalement Levi est allé roucouler à Monsieur “C’est ton pote?” pour un round two, j’assure, entièrement honnête. « Pour info, t’embrasse mieux. »

C’est vrai que j’ai pas mal attendu pour trouver la femme de mes rêves. J’ai quand même essayé d’en choper quelques unes entre temps parce que l’abstinence c’est pas ce que je préfère. J’ai toujours essayer de faire marcher mes coups d’un soir quand y’avait une once d’espoir. Mais ça n’a jamais fonctionné. Aucune de mes relations n’a commencé par une aventure. C’est pas mon truc. Je suis pas doué pour ça. Je me souviens encore des SMS un peu gênant que j’ai envoyé à Lene pour lui faire comprendre qu’il n’y aurait rien de plus entre nous. Mais en fait elle ne pensait pas que ça déboucherait sur quoi que ce soit donc je me suis juste ridiculiser pour changer. Tout ça pour dire que ouais, Wendy est faite pour moi.

Levi pointe très justement mon habitude à rougir et je fais une petite moue. Je boude. Il file fumer. Ariane souligne que c’est une habitude pour Levi de nous laisser tous les deux. Au fond elle a raison, mais on a quand même la chance de profiter énormément de lui depuis qu’il est de retour en ville. Alors je ne vais pas confirmer ses dires. Je suis loyal à mon ami. Et puis je sais que si je j’oppose à la liberté de Levi j’ai juste tout à perdre et je ne veux pas ça. Surtout pas.

Ma rousse préférée au monde me commande une nouvelle bière. Elle peut pas savoir combien ça me fait plaisir qu’elle soit aussi attentionnée envers moi. Elle me connait si bien. Un très large sourire est sur mes lèvres. Je ne fais plus l’enfant. Un coup d’oeil vers Levi et je remarque qu’il est retourner voir le gars. Ariane dit que j’embrasse mieux et elle est juste parfaite.

« Je t’aime. »

Et je me penche vers elle pour lui déposer un gros baiser sur sa joue tout en la prenant dans mes bras dans une étreinte spontanée.

« Et prend moi pour un fou mais je crois que le gars avec Levi c’est le chanteur de Empire of the Sun. »

Je les ai vu en concert il y a si longtemps, mais ouais, j’ai une bonne mémoire, surtout que j’étais front row ce jour là donc son visage est bien dans ma tête.

« Je me souviens les avoir vu avec Amity Affliction. On va lui demander s’il a des nouvelles de Joel ? »

Je crois que j’aimais plus le couple que Ariane formait avec lui qu’elle même. Je voulais qu’ils soient endgame ces deux là. Pour ça que je ravive cet espoir en le mentionnant. J'étais fan d'eux, je le suis toujours. 

Pas tous les jours ? T’es pas sûr de comprendre ce qu’elle veut dire par là. Dans tous les cas t’as capté qu’elle le connaissait le gars. T’as aussi bien capté qu’elle n’avait pas une haute opinion de toi vu cet air qu’elle arborait. Et le pire c’est qu’elle a raison. Tu ne te considères pas beaucoup plus de ton côté. Tu attends que tes nouveaux shots arrivent sous ton nez et tu te fais violence pour pas te retourner et regarder la table de la rousse et du gars. T’es pas intéressé. Non. Pas du tout.

Alors pourquoi ton coeur fait un truc étrange dans ta poitrine quand tu reconnais son parfum parce qu’il est posté à côté de toi. Tu le vois prendre un des shots qui viennent de t’être servi et tu te détestes de sentir ton coeur battre beaucoup plus vite juste à cause de ça. T’es un peu perdu. Il te propose un de tes propres shot. Ton regard croise le sien et ouais ok. Tu prends le verre sans plus réfléchir. Il t’invite à aller dehors avec lui. Tu bois le shot aussitôt parce que t’as besoin d’au moins ça pour traiter l’information. Il file dehors. Tu hésites. Tu fermes les yeux un bref instant. Tu prends un shot de plus que tu t’enfiles avant de sortir, la tête qui tourne assez.

T’essaies de pas te dire que putain il dégage un truc que tu ne saurais expliquer. Le voir comme ça adossé en train de tirer sur sa clope. C’est beaucoup trop plaisant à ton goût. Tu sors tes propres clopes pour fumer avec lui et tu regrettes de ne pas avoir d’herbe pour que l’effet ait encore plus d’impact sur toi. Pour que tu te laisses aller comme tu l’as fait il y a des années de ça avec ce gars, Richard. Le mélange alcool et herbe te ramène toujours à ce moment là de ta vie.

Tu le regardes. Beaucoup trop.

« J’ai cru que t’étais une femme. J’aurai jamais osé sinon… »

Outch. Le choix des mots. Tu te vends tout seul. Tu l’aurais pas fait malgré que l’envie ait été là. Mais tu te rends pas compte de tout ce que tu sous entends avec cette phrase. Tu tires sur ta clope sans le quitter des yeux parce que putain de merde il est terriblement plaisant à la vue.

« Je… J’étais… »

Pas bien. T’étais pas bien. Tu l’es toujours pas. Quand est-ce que tu l’as été au juste ? Certainement jamais. C’est la triste vérité qui te fait face tous les jours un peu plus. Surtout depuis ces deux dernières années.

« L’alcool… »

Tu hausses une épaule. Tu finis pas tes phrases, t’en commence une autre. Tu fais aucun sens. S’il te comprend, il est doué. Est-ce que t’as envie qu’il te comprenne au fond ? Oui.

Para bailar La Bamba, se necessita una poca de gracia, para mi, para ti, ay arriba, ay arriba.

Tu n'attends pas le blond pour sortir du bar après avoir lancé un regard furtif vers Kane et Ariane qui se bécotent tendrement à la table que tu as quittée quelques minutes plus tôt. Tu produis quelques pas dehors, la brise australienne ondule tes cheveux mi-longs. Tes mains farfouillent tes poches, en extirpent un briquet suivi d'une cigarette artisanale que tu enflammes derechef. Dos contre la bâtisse, une bouffée de cette jouissante toxicité englobe ton être, le berce. Tu souffles doucement puis remarques le blond inhibé t'imiter.

Il te fixe et tu le laisses faire, feins de le constater. Puis, il prend la parole : « J’ai cru que t’étais une femme. J’aurai jamais osé sinon… » Un sourire en coin fend ta joue, tu prends soigneusement le temps de tirer sur ta clope avant de répondre sur un ton détaché, teinté de sympathie : « Je dirai à ma féminité de calmer le jeu à l'avenir, alors. » Tu ne te vexais pas de ses paroles ou autres. Ce n'était pas comme s'il y avait une tare à être une femme et personnellement, tu savais que tes traits ne suscitaient pas l’ambiguïté, ni ta carrure. Tu reconnaissais aussi que tes cheveux semaient parfois le doute, comme si les garçons "normaux" étaient interdits d'avoir les cheveux longs. Ça t'avait toujours exaspéré, ce stéréotype, si bien que dès que tu n'avais eu personne à qui obéir ou rendre des comptes, tu t'étais pris un malin plaisir à te faire pousser les cheveux. Ils représentaient ta liberté et en quelque sorte, ton refus de te plier aux cadres sectaires d'Autrui, ton rejet du monde détestable auquel appartiennent tes parents et ton frère. T'étais de ceux qui aimaient contrarier les traditions, leur asséner un grand coup de pied pour en faire à ta tête.

« Je… J’étais… » qu'il bute, sans te quitter des yeux. Tu croises son regard, prend une nouvelle bouffée de nicotine, patient. « L’alcool… » Tu lui souris, compréhensif. « Ouais. » Tu te mouves de manière à faire face au jeune homme. « Ce sera ton regret de la soirée. » Tu dédramatises, la malice faisant briller les yeux, le sourire toujours aux lèvres. « Tu fêtes ou tu fuis ? » Tu finis par demander en désignant d'un geste de la tête sa cigarette et faisant allusion à tout ce qu'il a absorbé comme alcool.

Get out of your own way

karvisher

Levi qui part enclenche le mode Ariane maman ours comme toujours, maintenant que l’unique priorité reste que Kane passe une bonne soirée. Pour moi, c’est relativement déjà joué, au sens où mon verre se remplit dans la seconde, où je peux très bien finir le tout en me gérant toute seule comme à mon habitude. C’est pour le pompier que je suis un brin inquiète, le sachant plus facilement atteint lorsque les plans des three musketeers ne sont pas tenus en tout et pour tout. Il le dira pas, il fera tout comme, il rigolera, suivra au taquet, finira sa bière, en prendra une autre. Il soulignera rien, profitera du moment présent, retournera chez lui la bouche en coeur. Mais à l’intérieur, ça ira pas. À un moment, il se demandera si c’est sa faute ; et ça, je tolère pas. « Je t’aime. » « Je sais. » que je rétorque avec toute la condescendance qu’il me connaît, l’oeil brillant, le laissant faire office de toute l’affection qu’il porte pour ma petite personne quand la majorité du temps, on m’affuble plus d’insultes que de surnoms sympathiques. Ça va, je le cherche le sourire aux lèvres.  

« Et prend moi pour un fou mais je crois que le gars avec Levi c’est le chanteur de Empire of the Sun. » à peine j’ai bu une gorgée que Kane repart sur ses lubies, cherchant du regard le type qui apparemment roucoule toujours au cou du McGrath, le suit fumer la seconde d’après. « Good for him, on a tous besoin d’une rockstar dans nos draps à un moment ou un autre de notre vie. » et je m’en veux, la conne qui tend la perche, la phrase à peine sortie que le blond renchérit avec sa crédulité, la curiosité au premier rang et la question totalement légitime pour quiconque autre que lui, que moi. « Je me souviens les avoir vu avec Amity Affliction. On va lui demander s’il a des nouvelles de Joel ? » inspirant longuement, je prends le temps de chercher en quelle langue je lui dirai de se mêler de ses affaires poliment, priorité bonne soirée que je me rappelle. Si en français risque d’être trop doux, en anglais trop dur. Un mélange d’espagnol et d’allemand ferait l’affaire sûrement ; faudrait que je m’y mette. « Pas besoin. » anticipant qu’il surenchérisse, je complète, reportant mon attention sur un Kane qui sait tout de la situation, de l’histoire entre Joel et moi, du passé terminé, pas tant que ça à voir, à entendre mon meilleur ami et son espoir de bac à sable. « Tu sais très bien pourquoi. »

J’irai pas gratter l’info au blondinet de secours de Levi, quand je sais très bien what’s going on. « Il est à Brisbane en février. » et seulement en février, le sous-entendu rendant le reste clair, le type qui repart en tournée, l’éternelle ronde des départs, et c’est très bien comme ça. La conversation se termine abruptement sans que j’insiste, plutôt intriguée par le fait que Levi est encore out in the open, et que peut-être on a vu tout faux. Que le “chanteur d’Empire of the Sun” est en fait un violent serial killer. « On va fumer aussi? » avalant encore un peu du contenu de mon verre, je laisse un sourire en coin se dessiner sur mes lèvres, office de drapeau blanc pour la peine. « Et s’assurer que si l’autre est en train de couper Levi en mille morceaux, on puisse au moins aider en tenant les sacs? »