« RETENEZ L’ASCENSEUR ! » s’écria Yasmine tout en s’élançant vers la porte à grandes enjambées. Les cheveux légèrement humides sous la capuche de sa parka, elle ne prit pas le temps de chasser les gouttelettes d’eau qui lui étaient tombées sur le bout du nez, et courut jusqu’au point nommé, une boîte rectangulaire calée sous le bras. Rentrant le ventre et levant les bras pour se glisser juste à temps dans l’interstice, elle manqua de se faire tailler un short au passage. Pour autant, ça ne l’empêcha pas de lancer un « Merci beaucoup. » tout essoufflé à celui, ou celle, qui avait eu la gentillesse de répondre à son cri de désespoir. Un coup d’œil à sa gauche, tandis qu’elle replaçait son sac en bandoulière en travers de sa poitrine, et elle s’aperçut qu’il s’agissait bien d’un celui, à qui elle adressa d’ailleurs un sourire fugace – sincère et reconnaissant, néanmoins « Bonsoir. » fit-elle simplement, et marchant jusqu’au fond, elle se laissa adosser contre la paroi, déjà épuisée. Pourtant, elle n’avait même pas commencé sa garde.
Seulement, le temps était à l’orage, à Brisbane. Au sens propre, comme au sens figuré, à croire que la météo tournait en fonction de l’humeur des habitants de cette planète. Ce soir, il semblait qu’une bonne majorité avait le blues, et pas de la façon la plus mélodieuse qui soit, à en juger par le grondement intempestif du tonnerre qui fit dangereusement vaciller l’éclairage. Très furtivement, la jeune femme jeta un coup d’œil par-dessous sa capuche en direction de la silhouette postée dos à elle. Cherchant à rassurer ses élans anxieux quant au fait d’être entrée de son plein gré dans une boîte minuscule, régentée par l’électricité qui plus est, elle le fixa un instant. Mais comme il semblait plutôt serein, elle ne s’attarda pas. Retirant sa capuche pour faire sécher ses cheveux humides de pluie, Yasmine souffla sur sa frange en bataille, la replaça, puis se mura dans un silence poli. Au dehors, il tombait des trombes d’eau depuis quelques heures déjà. Entre le trafic pénible de fin de journée, et l’obstination de la jeune femme à faire tout et son possible pour éviter d’utiliser son chemin habituel dans l’espoir de ne pas tomber sur Ginny, ou Hassan, ou les deux, elle sentait que la fin de soirée serait compliquée à gérer pour elle. Car qui dit orage et pluie, dit aussi accidents plus ou moins graves ; aussi cynique fût sa pensée sur le moment, elle qui savait plutôt gérer son temps et l’accorder en fonction des besoins des autres, eut un élan d’égoïsme singulier en jetant un regard amer à la petite boîte qu’elle avait emmené avec elle, et qu’elle tenait maintenant sur sa hanche comme un bébé qu’on berce. Elle n’aurait probablement pas le temps de jeter un œil à ses fiches de révisions, celles qu’elle avait déniché dans le grenier des Khadji le matin-même, et qui l’avait accompagnée durant tout son parcours à l’école d’infirmière. Elle soupira intérieurement. Sloan le lui reprocherait la prochaine fois qu’ils se verraient, l’accusant gentiment de repousser chaque fois un peu plus l’échéance juste parce qu’elle craignait d’échouer à l’examen qui occupait toutes ses pensées depuis la mi-août. Et il n’avait pas tort, le bougre ; de ce fait, elle n’essaierait même pas de lui faire entendre le contraire, même si ça la démangerait comme une vilaine piqûre disgracieuse à l’arrière de son cerveau. Elle était peut-être motivée, parée à l’éventualité de passer ses heures libres à potasser, le manque de sommeil, et son état d’esprit à la limite de la dépression nerveuse lui donnait tant de fil à retordre, qu’elle sautait sur toutes les occasions pour s’exempter de cette tache qu’elle s’imposait à elle-même. Il était question de son avenir, mais plus encore qu’avant, elle le redoutait, et parce qu’elle ne voulait alarmer personne à ce sujet, elle s’interdisait d’en parler ; que ce soit à Sohan et à ses parents, à qui elle n’avait encore rien dit ; à Hassan, qu’elle préférait garder à l’œil de loin, pas tout à fait à l’aise avec l’idée de s’être à moitié fourvoyée devant Ginny ; à Clara qui avait d’autres chats à fouetter en ce moment, ayant son propre avenir à composer. Yasmine gérait seule, c’était comme ça qu’elle fonctionnait. Si elle finissait par craquer, elle serait la seule à blâmer.
Une violente secousse la fit sortir de ses pensées. Par réflexe, elle se rattrapa à l’épaule du jeune homme devant elle, et laissa tomber sa boîte de fiches à leurs pieds. Les dizaines et dizaines de cartons de couleurs, classés par catégories, procédures et difficultés, se déployèrent au sol, ce qui eut le don de la faire de nouveau soupirer, mais tout haut, cette fois-ci. La main toujours posée sur l’épaule du jeune homme, elle la récupéra, puis s’excusant d’un signe de tête, elle lui demanda « Ça t’embête de m’aider à les ramasser, hum, Tad ? » Il avait une blouse, il faisait donc partie du personnel de l’hôpital, qu’importe le service – et dans ces cas-là, le tutoiement était de mise, et comme son prénom était inscrit sur sa poitrine, elle se permit de l’utiliser sans faire de chichis. Tad, Tad, Tad… se répéta-t-elle, les sourcils légèrement froncés, avant de mettre de côté cette impression de déjà-entendu, pour ajouter « Ça prendra deux minutes à tout casser. » Elle chercha son regard, espérant y trouver la lueur d’espoir qui lui manquait à ce moment-là, puis sans attendre, elle s’agenouilla au centre de la cabine. Occupée à rassembler ses fiches de révision, elle n’eut pas conscience du silence soudainement retombé dans l’ascenseur après qu’il ait interrompu sa descente. Dans quelques secondes, Yasmine s’apercevrait sans doute qu’ils étaient bloqués, mais pour l’heure, elle mit du cœur à l’ouvrage, la tête complètement ailleurs.
Il avait tendu le bras sans réfléchir au moment où il avait entendu que quelqu’un criait pour que l’on retienne l’ascenseur. C’était instinctif, bien que souvent, il lui arrivait d’y réfléchir à deux fois avant de le faire parce qu’il y’a toujours quelqu’un de plus en retard que le retardataire qui allait le mettre lui aussi, en retard, mais perdu dans ses pensées, il n’y avait pas songé et dieu merci, après que la jeune femme ayant donné l’ordre ait réussi à s’immiscer dans la boite de ferraille supposée l’emmener au sous-sol, personne n’a relancé la demande indiquant à Tad qu’il avait bien fait cette fois de ne pas être égoïste bien que ce ne soit pas le défaut qu’on emploierait le plus souvent pour le décrire. Il se contente d’acquiescer à ses remerciements, à son message de bonne soirée quand elle les formule avant de revenir à son imagination débordante. Il parait distrait, voir un peur fermé à la conversation. Ce n’est pas forcément le cas, Tad a juste la tête ailleurs, à des lieux d’ici à se représenter cet ascenseur que bientôt, il espère, il ne verra plus. Depuis un moment, il fait le point et là, c’est dans cette intense réflexion qu’il est pris, encore et toujours.
Du moins, jusqu’à ce qu’une secousse manque de le faire tomber au sol en le déséquilibrant. Ce qui vaut également pour la demoiselle qui partage l’ascenseur avec lui et qui se rattrape à son épaule, il ne manque pas de l’aider en passant un bras autour de sa taille qu’il reprend aussitôt. La suite, c’est le souvenir de quelque chose qui tombe au sol, d’un fracas et son regard se pose bien rapidement sur le contenu du paquet qui était-il y’a encore quelques secondes tenu fermement sous le bras de la brune. « Ça t’embête de m’aider à les ramasser, hum, Tad ? » Le fait qu’elle sache son prénom l’interpelle et le réveille alors qu’il cherche encore à comprendre ce qu’il se passe, d’où vient la coupure et si l’ascenseur va bientôt se remettre en mouvement où s’ils vont devoir attendre. Non pas qu’il soit en proie à des crises ou quoi que ce soit, juste que c’est chiant mais toute son attention vient à la jeune femme et à ses fiches qui ne vont pas tarder à absorber l’eau ramené de l’extérieur par tous les visiteurs qui on eut droit à la pluie d’aujourd’hui. « Ça prendra deux minutes à tout casser. » Qu’elle précise, il n’a pas répondu alors qu’il est déjà dans l’optique de se baisser et sans attendre, on dirait presque qu’il plonge tant son geste est précipité. « Oui, bien sûr ! » Et il y met les mains, tentant de sauver ce qui n’a pas encore trop trop pris l’eau mais sans laisser pour autant le reste en berne. Sa main attrape et dépose tout à grande vitesse dans la boite de Yasmine, sans faire attention au couleur ou quoi que ce soit, le plus important, c’est de ramasser. Son regard se perd au détour de quelques cartes sur le contenu qu’elle présente, sur leur titre et les schémas qu’elles décrivent. Tous les deux s’empressent et après quelques secondes de ramassage, ils reprennent de la hauteur. Les yeux de Tad ne quittent pas la boite, il compatit à la pensée que tout devait être rangé et au temps qu’elle va perdre à tout remettre en ordre, le genre de galère d’étudiant qu’il connait bien. « Tu es étudiante ? » Qu’il demande, par curiosité, au moins parce qu’elle ne parait pas d’en avoir l’âge mais que ce serait vexant de faire la remarque. « Je demande par curiosité, j’ai vu deux trois-cours que j’ai suivi inscrit sur tes notes. » Qu’il explique, sans vouloir être trop curieux avant d’ajouter. « La dernière fois que l’ascenseur a été bloqué, ça leur a pris une heure pour le libérer donc, autant papoter non ? » Mais là encore, faudrait-il qu’elle se soit rendu compte qu’ils sont bloqué. « T’inquiète, ça arrive souvent, personne n’a encore fini dans la quatrième dimension. »
Le bout des doigts trempant dans la bouillasse ramenée de l’extérieur, Yasmine se joignit à la bonne volonté de son compagnon de galère pour ramasser ce qui lui appartenait. Dans l’ascenseur, le silence régnait, à peine rompu par leur empressement à réparer l’incident qui venait de se produire. Et ce n’était pas gênant de se retrouver en compagnie de quelqu’un qui jugeait que garder le silence lorsqu’il n’y avait rien à dire, c’était la meilleure solution pour préserver la paix dans le monde. Puisqu’ils semblaient l’un et l’autre profondément enfoncés dans leurs pensées, Yasmine se laissa donc contaminer par la tranquillité environnante, concentrée sur sa tâche, les lèvres réduites en une ligne mince qui traduisait néanmoins sa contrariété. Toutes ses fiches étaient plastifiées, et quel soulagement de penser qu’elle n’aurait pas à toutes les passer au nettoyage après les avoir rassemblées et rangées dans l’espace qui leur appartenait. Mine de rien, elle y tenait, à ces petits bouts de papier. Ils représentaient tous ses rêves, tous ses espoirs, alors que l’avenir auquel elle aspirait lui paraissait tellement hors de sa portée, effrayée par l’échec, terrorisée par sa métamorphose. Absorbée au point que ses sourcils se rejoignirent au centre de ses deux yeux en amande, et qu’elle rétrécit en accumulant les fiches devant elle, elle se dit que qu’importe le désordre sommaire qui régnerait maintenant dans la boîte qui, au fur et à mesure se remplissait à nouveau, il valait mieux qu’elle ait à y mettre un peu d’ordre pour les reclasser comme il fallait, plutôt que de les recopier dans leur intégralité, et perdre du temps qu’elle n’avait pas de toute façon. Aux prises de ses pensées immédiates, l’infirmière poussa néanmoins un gros soupir de soulagement lorsqu’ils terminèrent de ramasser, et tandis qu’elle s’octroyait une courte pause pour adresser un regard de remerciements à Tad qui se relevait déjà, elle récupéra le couvercle de la boîte, y trifouilla rapidement pour redresser les fiches placées de travers, et la referma, mais la laissa au sol, avant de suivre le mouvement, et de se lever, elle aussi.
« Quoi ? » dit-elle d’abord, interpellée par la question de Tad. Elle baissa la tête pour ouvrir son sac, puis en sortit une petite bouteille de solution hydroalcoolique qu’elle brandit dans l’espace qui les tenait à distance, malgré les dimensions étroites de l’endroit qu’ils occupaient « Tends les mains. » lui demanda-t-elle avec ce qu’il fallait d’autorité, et elle largua une noisette de produit au creux de ses paumes, puis au creux des siennes, et se frictionna les mains, avec dans le geste, la maîtrise de l’habitude. Ayant marqué une pause dans leur conversation, elle tacha d’en reprendre le cours. Après avoir soigneusement rangé son désinfectant, et s’être penchée pour récupérer sa boîte de fiches qu’elle serra tout contre sa poitrine, elle se remit les idées en place, et lança en souriant un peu « Oh, non. » Pas vraiment, pas encore, faillit-elle ajouter, mais elle ne dit rien de plus. Elle avait un instant oublié qu’elle portait sa parka, aucun moyen pour lui de savoir qu’elle travaillait ici alors qu’elle avait déjà revêtu le haut de sa tenue pour être plus rapidement opérationnelle en arrivant aux urgences. Elle lui sourit plus franchement cette fois-ci, et secouant la tête une fois, elle reprit « Je travaille ici. Comme toi, apparemment. » Elle le désigna du menton, posant ses yeux vert clair à hauteur de sa poitrine poinçonnée par un badge avec son nom et son poste inscrit dessus « C’est un bon indicateur en règle générale, Tad. La morgue, hein ? » Elle lui lança un dernier regard pour lui faire comprendre qu’elle avait beau lui tourner le dos un court instant, elle continuait à l’écouter parler tout de même, et elle se dirigea de deux pas vers le tableau de commandes de l’ascenseur. Immédiatement, elle remarqua qu’aucun des boutons n’étaient éclairés à l’exception de celui des secours, ce qui eut le don de faire tressaillirent ses sourcils. Yasmine retourna la tête dans la direction de Tad. Ne quittant pas l’expression de perplexité qui commençait à faire son chemin dans son esprit, elle dénota le ton détaché avec lequel le jeune homme lui déroula sa science sur le sujet ; étaient-ils vraiment coincés ? Soumise à l’évidence, elle laissa poindre un rire – un peu nerveux, mais pas trop « Pas encore. On sera peut-être les premiers, qui sait. J’espère que t’étais attendu nulle part. » Elle cessa graduellement de rire, puis hésitant une seconde à peine, et rabattant une mèche humide derrière son oreille, elle regarda à droite et à gauche de la porte de l’ascenseur. Sauf que son regard se redirigea vers le tableau de commande qu’elle fixa avec l’air de ceux qui n’y connaissent absolument rien, mais qui essayent, néanmoins « Je crois qu’on est vraiment coincés cela dit. Qu’est-ce qu’on fait ? » Il n’y avait pas de quoi paniquer, la jeune femme le savait ; pourquoi paniquer dans ces circonstances, ça ne faisait qu’empirer les choses, et finalement, si ce n’était poireauter avant qu’on vienne les délivrer, ils ne risquaient pas grand-chose, non ? Le silence se réinstalla quelques secondes à peine, avant qu’un autre rire s’échappe de ses lèvres, et que confuse face à la myriade de boutons éteints devant son nez qu’elle froissa, elle pivota, et se laissa adosser contre le porte close. Se tournant par la même occasion vers Tad, elle lui fit « Tu sais ce que je me demande dans ce genre de situation désespérée ? C’est idiot, mais ça aide vachement à relativiser. » Elle se racla la gorge pour chasser les sourires qui gonflaient sa voix, cala un peu mieux la boîte qu’elle tenait dans les bras, et annonça avec tout le sérieux qui s’imposait, le ton profond, et la mine soudainement cérémonieuse « Qu’est-ce que ferait Beyoncé ? »
Son nuage de pensée avait été totalement dissipé par l’arrivée de la belle brune dans ce qui était, jusque-là, son ascenseur. Il ne lui avait pas accordé plus d’un regard hormis celui pour lui ouvrir la porte, maintenant qu’une secousse s’était fait sentir et qu’il avait compris qu’ils étaient pris au piège au moins pour une heure selon ses estimations basés sur les retours d’autres employés de l’hôpital, autant faire connaissance et meubler ce temps agréablement plutôt qu’à risquer de devenir fou à tourner en rond dans un pièce de deux mètres carrés. « Quoi ? » Qu’elle demande, semblant enfin réagir à sa question alors qu’elle était occupée à mettre de l’ordre dans ses fiches. Il s’apprête à répéter, quand elle le coupe dans son élan pour lui donner un ordre « Tends les mains. » auquel il répond en s’exécutant dans la minute, bénissant par l’occasion le fait de bosser dans un endroit où tout le monde sauf est équipé pour minimiser au plus le contact avec les bactéries. « Oh, non. » Automatiquement, il pose les yeux sur sa boite, pourtant sûr et certain d’y avoir vu des sujets qu’il avait étudié, à l’époque de l’université, quand il était jeune. « Je travaille ici. Comme toi, apparemment. » Il acquiesce, ne trouvant rien à y redire. Ils n’ont visiblement jamais été présentés et en même temps, ça lui paraitrait chose bien difficile étant donné toutes les personnes que compte cet endroit. « C’est un bon indicateur en règle générale, Tad. La morgue, hein ? » Qu’elle demande en désignant du nez son badge avec son nom dessus. Un grand sourire se trace sur les lèvres du garçon, qui n’a visiblement plus aucun secret pour la demoiselle. Bien qu’elle soit le nez planté sur le tableau indiquant les étages, Tad ne peut s’empêcher de répondre en haussant les épaules. Oui, la morgue. Que peut-il dire de plus ? Changeant immédiatement de sujet, il lui donne l’information qui n’a peut-être pas encore été jusqu’à ses oreilles, que dernièrement l’ascenseur fait des siennes, qu’ils ne sont pas les premiers et que visiblement, l’hôpital n’a pas encore pressé le gars en charge de la réparer. N’étant toutefois pas le change à faire des remontrances sur un sujet dont ils ne peuvent rien, il lance une simple boutade sur ce fameux épisode de la Quatrième Dimension où des utilisateurs d’ascenseurs y restent coincés à jamais. « Pas encore. On sera peut-être les premiers, qui sait. J’espère que t’étais attendu nulle part. » Elle rebondit sur sa vanne, ce qui le laisse présager que les prochaines cinquante-huit minutes ne se passeront pas dans le silence. Ouf ! « Oh tu sais, mes patients portent bien leur noms. Ils ont tout le temps du monde maintenant. » Qu’il énonce en haussant les épaules avant d’ajouter « Et puis, ce serait mentir que de dire que la perspective d’être coincé dans un monde imaginaire et totalement parallèle à celui-ci me rend très curieux. » Bon, si on prend pour exemple les dénouements de la série, ça ne se finit que rarement bien pour les protagonistes mais à certain moment, l’envie de vivre une expérience hors du commun est plus forte que tout. « Je crois qu’on est vraiment coincés cela dit. Qu’est-ce qu’on fait ? » Qu’elle demande, remettant les pieds sur Terre, ce qui n’est pas forcément son cas à lui parce qu’il a bien du mal à ne pas être dans les nuages. Lui, pas du tout inquiet se résigne à attendre. « Rien, quelqu’un a dû déjà noté quelque part que l’ascenseurs est bloqué. Il faut juste que le gars qui s’en occupe arrive maintenant. » Oui, pas inquiet pour deux sous, ce qui le fait réflexionner que c’est peut-être pas son cas à elle. « Dis-moi, ça va ? Tu n’as pas peur dans ces moments ? » Non parce que là, faut qu’il sache. Il est terriblement maladroit dans ce genre de situation. « Tu sais ce que je me demande dans ce genre de situation désespérée ? C’est idiot, mais ça aide vachement à relativiser. »Elle change de sujet et lui se demande si elle va plaindre les p’tits enfants trop pauvres pour avoir des ascenseurs chez eux, ou des personnes en surpoids qui arrivent à les bloquer parce qu’ils sont trop lourd. Le fait qu’elle parle de situation désespérée le rend très créatif. « Qu’est-ce que ferait Beyoncé ? » Okay, il ne s’attendait pas à ça. Il s’attendait à un sujet plus sérieux, qui collerait avec quelque chose de vraiment très malheureux et au final, ça l’amuse beaucoup plus qu’elle tourne la chose de cette façon. L’autodérision, y’a que ça de vrai. « Bah, je sais pas si ça arriverait à Beyoncé. Déjà, elle prendrait pas la pluie parce qu’un soleil brille sur elle en permanence, et puis parce qu’elle prendrait les escaliers vu qu’une rangée d’esclave se proposerait à la monter. » Et pas un moment, il ne met en doute l’absurde de la situation qu’il décrit tant elle parait plausible. « Non, si tu veux te demander ce que ferait une femme d’action, demande-toi ce que ferait Céline Dion. »
Après s’être assurée par elle-même qu’ils passeraient bien les prochaines minutes ensemble, coincés dans cette boîte de conserve à échelle humaine, Yasmine se tourna vers Tad avec résignation. Quand il lui demanda si elle n’avait pas peur dans ces moments, elle lui répondit rapidement, jetant au préalable un regard furtif à ses fiches auxquelles elle s’accrochait comme s’il s’agissait d’un trésor trop précieux pour être vulgairement lourdé dans un coin « Je pense pouvoir gérer, merci de t’en soucier. » Plutôt ironique pour elle qui avait passé ces derniers mois à constamment repousser l’angoisse et la panique qui l’empêchait de retrouver un rythme de vie normal depuis son retour d’Afrique. Néanmoins, elle disait vrai – être coincée dans un ascenseur ne faisait pas partie des cas de figure qui la tétanisait. Puisqu’ils en étaient à échanger un rapport complet de leur état d’esprit, elle jugea bon de lui retourner la question. Penchant doucement la tête sur le côté après l’avoir relevée, un petit sourire en coin fendant l’expression curieuse qu’elle afficha à cet instant, Yasmine lui demanda de bonne grâce « Toi ? C’est le moment de cracher le morceau à propos de tes peurs profondes, surtout si les endroits clos font partie de la liste. Promis, ça restera entre nous. » Et elle mima de verrouiller ses lèvres avec une clef invisible qu’elle jeta par-dessus son épaule gauche, puis après une secousse de ses longs cheveux encore humides, elle lança « Au fait, moi c’est Yasmine. » Lui rendant l’avantage, elle estima que lui donner son prénom en échange faciliterait la conversation, et dans un nouveau sourire, elle soupira. Ce qui lui permettait de prendre les choses avec autant de philosophie, malgré le petit sentiment d’impuissance qui l’avait frustrée légèrement sur le moment, la jeune femme ne mit pas bien longtemps à le révéler à Tad.
Sa réaction fût immédiate. Il se serait mis à insulter sa mère adorée qu’elle aurait réagi de la même façon. Posant une main ferme, dissimulée derrière la manche de sa parka un peu trop large pour elle, sur le haut de sa propre poitrine, elle avait laissé échapper un hoquet de profond outrage au moment où il dépeignit son idole à grands coups de clichés qui lui fit marmonner dans un arabe parfait « Il doit sûrement plaisanter. » Comme si les murs avaient le pouvoir de la réconforter en lui assurant qu’elle ne venait pas de tomber dans un piège vilement tendu par les anti-Beyoncé ; ils n’en firent rien cependant, ils n’étaient que des murs, et sûrement pas polyglottes, qui plus est. Cette prise de conscience lui fit ajouter, toujours en arabe « Ou pas. » et murmurer un ohlalala qu’elle étouffa graduellement en cachant sa bouche derrière le col de sa parka.
S’il y avait bien un sujet qui faisait sortir Yasmine de ses gonds, c’était quand on attaquait les travers de diva de son idole. Elle comprenait que les avis divergeaient à son sujet, elle le respectait, reste qu’il y avait une part d’elle qui ne supportait pas le sarcasme qui visaient à amoindrir le talent qu’elle lui trouvait – et qui était indéniable, pas seulement à ses yeux, mais aux yeux d’une majorité de personne avec assez de bons sens pour admettre qu’elle était la réincarnation des plus grandes. Marquant une longue pause pour considérer l’homme qu’elle avait en face d’elle, la bouche toujours cachée dans son col, elle eut un rire irrattrapable lorsqu’elle entendit sa solution de remplacement « Céline Dion, sans rire ? » Baissant enfin la main qu’elle avait toujours posé sur sa poitrine, Yasmine lâcha un pffft insidieux, avant de reprendre, se calant de nouveau contre la paroi de l’ascenseur « A une époque, j’étais persuadée que c’était elle la responsable du naufrage du Titanic. Tous ceux qui fustigent cette pauvre Rose pour avoir laissé couler Jack au fond de l’eau, alors que c’est uniquement pour échapper au générique de fin qu’il a préféré se noyer. Y a tout un tas de théories à ce sujet, vérifie, c’est sur l’Internet. » Par la façon dont elle l’encouragea d’un coup de menton à se référer à son téléphone portable, toute la mauvaise foi de Yasmine à ce sujet transparut sans doute possible ; il l’avait gentiment vexée. Foncièrement, elle savait que son plaidoyer était grotesque, mais elle ne put s’empêcher de défendre son point de vue avec la dévotion d’une admiratrice des premiers instants, quitte à paraître un peu stupide. Détournant le regard un instant, elle plissa les paupières pour se concentrer sur un coin de l’ascenseur qui l’empêcherait de laisser éclater tout son mauvais jugement en s’attardant davantage sur le visage du jeune homme, elle cala plus confortablement, et avec un certain agacement, sa boîte de fiches de révision sous son bras. Puis elle laissa échapper un nouveau pffft, avant de lui dire avec le ton de ceux qui réfléchissent intensément à ce qui avait bien pu se passer dans sa vie pour qu’il trouve Céline Dion plus digne d’intérêt que Beyoncé « Mouais, ça doit être une question de génération. » finit-elle par trancher avec sagesse, non sans démontrer un certain scepticisme toutefois, le fronce entre ses sourcils bien dessinés traduisant le tout. Elle tourna de nouveau la tête vers Tad qu’elle n’imagina pas une seconde étant plus jeune qu’elle en vérité – la faute à sa (supposée) permanente sans doute « J’ai un vieil ami, » dans tous les sens du terme, mais était-ce vraiment utile de faire de l’esprit sur l’âge d’Hassan, alors qu’il n’était même pas là pour se défendre ? Ce n’était pas l’envie qui lui manquait, pourtant elle s’abstint péniblement, poursuivant sur le même ton « qui tient le même genre de discours que toi à ce sujet. Il en devient même grognon quand on mentionne Beyoncé. » Le mot était faible, Grumpy Jaafari ne faisant pas partie des facettes de la personnalité de Hassan la plus facile à canaliser et à supporter, quand bien même il la laissait éclore le plus rarement possible « C’est quoi votre problème avec elle ? » finit-elle par lui demander après une minute, son expression oscillant entre curiosité et ce qui ressemblerait à du profond désagrément si elle s’était obstinée à ne pas sourire comme elle le fit en le regardant encore une fois.
Maintenant que chacun s’était rassuré que l’autre n’allait pas péter les plombs et entrer en crise d’angoisse au bout de deux minutes suite à l’arrêt de l’ascenseur, il ne leur restait plus qu’à trouver un sujet de conversation pouvant meubler les minutes à venir à attendre que l’on vienne enfin les sortir de là. Pas de stress chez Tad, il sait qu’il peut parler de tout et tout entendre. De ne pas être contrariant est probablement la chose que seule ait réussi à lui inculquer. Les présentations enfin faites, bien que de son côtés il n’y avait nul besoin parce que le fait que Yasmine sache est allé de paire avec le name tag qu’il porte à sa chemise, la discussion s’installe et là où Tad se serait attendu à échanger des banalités sur l’hôpital, la pénibilité du travail, les enfants, la famille, tous ce que les gens se racontent en général dans l’ascenseur pour goûter au plaisir de raconter sa vie même en souffrant celle des autres, c’est d’une véritable banalité sur laquelle Yasmine le lance et c’est quelque chose qu’il apprécie. Tad, c’est un gars qui apprécie de parler de tout et de rien, mais surtout de rien et là, il faut croire qu’avec Beyonce il est servi bien qu’à en juger par la tête de la demoiselle, sa remarque – pleine de pertinence à son sens – n’a pas fait mouche. « Céline Dion, sans rire ? » Il ne peut pas dire qu’il est surpris par le regard qu’elle lui adresse. Ils font tous le même dès qu’ils découvrent le péché mignon musical de ce cher Tad. La surprise est même encore plus palpable et un peu dérangeante quand elle apparait sur le visage d’une jeune nana, venu emballer le guitariste des Street Cats et qui se retrouve avec tout sauf un pur rock ne jurant que par ACDC et autres symbole national. Mais bon, il a depuis longtemps appris à ne plus y accorder d’importance : tout le monde ne peut pas comprendre Céline, c’est tout. « A une époque, j’étais persuadée que c’était elle la responsable du naufrage du Titanic. Tous ceux qui fustigent cette pauvre Rose pour avoir laissé couler Jack au fond de l’eau, alors que c’est uniquement pour échapper au générique de fin qu’il a préféré se noyer. Y a tout un tas de théories à ce sujet, vérifie, c’est sur l’Internet. » Son regard s’appuie sur elle, l’air de lui dire « ah vraiment ? » avant que son rictus apparaisse, unique réponse à la mauvaise foi de la jeune femme face à cette remarque particulièrement pertinente qu’il a placé : Beyoncé est une diva qui n’a plus rien à faire par elle-même. C’est un fait, pas une attaque. « Le jour où Beyonce emportera un oscar, un golden globe et quatre grammies pour une chanson. Peut-être que ta théorie se vérifiera. » Qu’il pointe, ne perdant pas son calme. Ce n’est pas un combat qui en vaudrait le coup, il en est convaincu. « Mouais, ça doit être une question de génération. » Pourtant, à vue d’œil, ils n’ont pas l’air d’avoir autant d’année d’écart même si le fait qu’elle soit étudiante lui met un léger doute qu’il n’osera pas dissiper en posant directement la question. Il se contente d’hausser les épaules en ajoutant, comme pour corroborer son excuse. « C’est vrai que les jeunes d’aujourd’hui ont les oreilles bousillées à cause de leurs écouteurs et de la musique trop forte. Ça peut être difficile de reconnaitre les grandes chanteuses. » Il soupirerait presque mais la vérité, c’est que là, il en est juste à provoquer une réaction parce que la conversation l’amuse assez et puis ça a un truc d’intriguant de dialoguer avec cette fille sans ne rien savoir d’elle hormis le fait qu’elle semble obsédée par une version cheap de sa Céline. Who’s to blame ? Le marketing du 21e siècle, obvi. « J’ai un vieil ami, » qu’elle reprend, l’amenant à se demander si elle ne va pas finalement se mettre à énumérer les détails de son existence comme tout l’monde plutôt que de finir cette conversation. « qui tient le même genre de discours que toi à ce sujet. Il en devient même grognon quand on mentionne Beyoncé. » Tiens, cette définition n’est pas sans lui rappeler quelqu’un et en y pensant, il se retrouve à rire avant qu’elle ne pose la question fatidique. « C’est quoi votre problème avec elle ? » Problème ? Tad peut avoir la mémoire courte mais il tente malgré tout de se souvenir d’un moment où il a parlé d’un quelconque problème avec la star. Haussant les épaules, parce qu’il ne se rappelle de rien de la sorte, il se contente de répondre. « Moi, j’ai rien. Je dis juste que si tu veux te référer à une instance supérieure pour guider tes pas, tu ferais mieux de parier sur un meilleur cheval. » A noter : l’effort d’avoir dit cheval, et non mule.
"Peut-être bien." lança-t-elle simplement, et un haussement d'épaules accompagna sa bribe de phrase. Dans la foulée, elle tourna la tête de l'autre côté pour jeter un œil distrait aux boutons éteints de l'ascenseur, toujours à l'arrêt, et du bout de cette manche de parka trop grande pour elle, elle se gratta succinctement le bout de son nez. Elle la sentait, la susceptibilité du jeune homme derrière l'apparent calme qu'il lui servît comme la soupe musicale qu'il semblait tant apprécier. Si elle avait bien appris une chose, ayant été élevée avec des garçons, c'était que, malgré son répondant, jouer à celui qui a la plus grosse, c''était complètement hors de sa portée, et pour cause ; Dieu l'en avait préservé, la petite dernière des Khadji avait échappé au devoir suprême de se trimballer constamment avec un si gros poids entre les jambes, que l'idée de lever la tête pour voir un peu ce qui se passait au-dessus de leur ceinture était un exploit qui, quand ils s'apercevaient enfin du monde qui les entourait, donnait à ceux qui en avait hérité, le droit d'être ensevelies sous les médailles et les honneurs. De toute façon, elle n'a jamais été bonne pour le conflit, Yasmine, encore moins lorsqu'il s'agissait de défendre son point de vue futile sur un sujet lancé à l'aveuglette pour supporter l'attente. A vrai dire, avant même qu'il ne réponde à ses boutades, elle sut qu'elle battrait en retraite ; elle était comme ça, et si ça donnait parfois l'impression à ceux avec qui elle se chicanaient qu'elle était faible, c'était tout le contraire en vérité. Yasmine était assez mature, et plus encore, pour admettre sans rechigner quand cela suffisait, et à la vue de la réaction du légiste, c'était définitivement le cas, à ce moment donné.
Peut-être qu'elle était dans son tort, qu'elle aurait dû faire moins la fière en considérant si mal la passion de son interlocuteur. Cependant, tout comme l'art, l'humour est subjectif, et visiblement, Tad n'était pas sensible au sien – rideau, elle avait bien appris sa leçon. Alors, même si ça lui coûtait beaucoup de ne pas énumérer le palmarès de sa chanteuse préférée pour faire s'effondrer la défense bancale du jeune homme – entre deux sourires si innocemment charmants, elle lui aurait sûrement rappelé que Queen Bey faisait partie des trois plus grands artistes récompensés de tous les temps, et que son total de Grammys s'élevaient au nombre des nominations de Céline Dion – elle acquiesça sans broncher, se mordillant un peu la lèvre pour retenir l'observation moqueuse qui lui vint lorsqu'il utilisa l'argument des vieux schnock pour expliquer qu'elle soit si sensible au message porté par la diva "Sans aucun doute." répondit-elle, dans ses petits souliers. Néanmoins, ça ne l'empêcha pas de poursuivre, avec une pointe d'ironie dont il ferait ce qu'il voudrait, car ce serait la dernière fois qu'elle prendrait le temps de lui montrer que, sous ses allures inoffensives, elle en avait quand même un peu sous le pied "C'est pourtant indiqué sur la notice de ne pas hausser trop le volume sous peine de dommages irréversibles. Si seulement on s'était donné la peine d'apprendre à lire." Et en effet, ce fût tout pour elle. Elle ne releva même pas sa toute dernière pique, considérant que remettre de la monnaie dans le jukebox ne servirait qu'à lui donner l'impression qu'elle le provoquait pour le plaisir, alors qu'en fait, elle ne s'était pas une seule seconde imaginée que l'asticoter sur leur divergence d'opinions en grossissant le trait de la fanatique absolue lui vaudrait d'être considérée de la sorte. Elle marqua une pause mentale, le temps de rassembler les pièces de son bon caractère pour lui souffler, sans le regarder, toutefois "Navrée si je t'ai froissé. J'avoue que je ne la connais pas très bien, c'était pour plaisanter." Un jour, elle apprendrait à arrêter de se coucher aussi vite, tandis qu'elle avait l'impression d'avoir appuyé sur le nerf sensible – contrarier les autres pour le plaisir, même si c'était parfois tentant, trop peu pour ell. De ce fait, elle ajouta d'une voix incertaine "Il y a un titre d'elle que j'aime bien. Attends, ça fait…" Et recalant un peu sa boîte de fiches sous son bras, puis levant les yeux pour donner l'impression de chercher la mélodie dans le plafond étroit de la cabine, Yasmine fredonna – plutôt bien au demeurant, son discret talent pour le chant s'étant nettement affirmé depuis qu'elle l'entretenait aussi souvent que possible en compagnie de Clara, lors de leurs soirées karaoké endiablées, mais aussi lorsqu'elle était rameutée par les titulaires du St-Vincent's pour calmer les gros chagrins des enfants qui réclamaient une berceuse – les trois premières notes de Taking Chances "Je serai incapable de te donner le titre, mais t'as probablement reconnu." En grand expert que tu es, fût-elle tentée d'ajouter avec sarcasme, mais elle venait de hisser le drapeau blanc, aussi évita-t-elle de lui donner une occasion supplémentaire de prendre mal ses propos, et doucement, elle lui adressa un sourire hésitant.
Tad n’est pas réputé pour sa susceptibilité. A vrai dire, s’il était connu pour quelque chose, c’était bien pour sa tendance à ne jamais prendre pour lui la moindre remarque et à laisser les vannes le traverser comme si elles n’étaient que de banales paroles sans importance parce qu’en toute circonstance, il était une personne difficile à ébranler et ne se laissait jamais avoir par rien, ni personne. C’est un tempérament qui lui a souvent joué des tours, notamment avec Ariane, dont les reproches et les vannes à sa destination, et qui étaient censés aviver leur flamme, n’avaient jamais pris avec lui, n’avait jamais fait mouche et ne lui avait jamais donné envie de changer sa façon de faire. Curieuse chose d’ailleurs que de penser que c’est en lançant des attaques à quelqu’un qu’il se mettra à aller dans votre sens. Mais soit, à noter qu’il n’avait jamais eu plus qu’un haussement de sourcil. Ce trait de caractère, il l’a aussi développé à cause de maman et de ses remontrances quasi-quotidienne et qu’il avait entendu toute sa vie au sujet de ses décisions certes dérogeante des valeurs familiales et qui n’avait jamais convenu à l’italienne et donc à cause de ses réactions qui, s’il les avaient pris pour argent comptant, lui auraient sûrement permis de développer des mom issues tout en mettant fin à tout commerce avec sa génitrice sur la simple présomption que celle-ci regrette de ne pas avoir un fils à son image. Bref, Tad n’est pas un type qui se vexe facilement. Cependant, il est capable de changer du tout au tout dès que l’on vient à remettre en question l’intégrité et la reconnaissance que le monde doit à son idole favorite. Très souvent, cette passion pour Céline Dion lui avait joué des tours mais il n’en démordra jamais et si d’aventure, le talent de la star venait à ne pas bouleverser une personne, il impose de reconnaitre qu’elle se situe au panthéon des divas et qu’il y’a très peu de nom susceptible d’être au moins égaux à la québécoise. "Sans aucun doute." Qu’elle fait mine de consentir à son commentaire sur la jeunesse, commentaire à relativiser dans le sens où il n’a pas l’impression d’être à ce point plus vieux qu’elle mais sur lequel il enchérit vu qu’elle semble l’avoir placé dans la classe des papis. "C'est pourtant indiqué sur la notice de ne pas hausser trop le volume sous peine de dommages irréversibles. Si seulement on s'était donné la peine d'apprendre à lire." Qu’elle ajoute, pensant sûrement en finir et Tad ne sachant pas trop où il se dirige se permet néanmoins d’ajouter, d’un air léger se voulant à faire descendre l’échauffement des esprits qui pourraient bien faire de cet ascenseur un four. « Es-tu en train de blâmer les victimes ? » Et là, il ne reste qu’à prier que Yasmine soit une personne plus prompte à rire de toute qu’à s’offusquer d’une blague qui peut être facilement rendue subversive en cet an de grâce. Elle ne répond rien, Tad n’en ajoute pas plus, ne sachant si c’est de l’huile ou de l’eau qu’il a jeté sur le feu tout en se préparant mentalement à se remettre dans sa carapace de mec imperméable à tout ce qu’on pourrait lui dire.
Le silence ne le dérange pas dans son fondement. Il sent juste qu’il regrette un peu cet échange et la façon dont il les aura privés d’une conversation occupant l’heure d’attente de libération de l’ascenseur en finissant sur des œufs. Tad se connait. Il sait qu’il a ce petit défaut de mettre les pieds dans le plat, de dire ce qu’il ne faut pas au lieu de tourner sa langue sept fois dans sa bouche en se rappelant qu’il parle à une inconnue non-familière de sa tendance à dire n’importe quoi. Seulement, Yasmine semble capable de mettre de l’eau dans son vin et alors qu’il cherche une façon de reprendre elle conversation, elle le fait. "Navrée si je t'ai froissé. J'avoue que je ne la connais pas très bien, c'était pour plaisanter." Serait-il alors possible que Yasmine ait ce même défaut que lui et de ne pas toucher faire mouche en lançant une vanne ? Possible, et par confession pour une camarade qui doit sans cesse surveiller où elle place ses pieds, il reprend. « T’en fais pas pour ça, tu es libre de tes opinions et de les défendre. J’ai pas mieux agi, je te prie donc de m’excuser aussi. » Parce que Tad n’était pas genre à s’entêter ou même à profiter de la faiblesse que l’on pourrait trouver à quelqu’un qui s’excuse en premier là où tout ce qu’il y’a à voir n’est que de la maturité. Encore faut-il avoir confiance que l’autre ne soit pas du genre à en remettre une couche. "Il y a un titre d'elle que j'aime bien. Attends, ça fait…" Elle commence à chantonner doucement et appréciant le geste, Tad se contente de l’observer vers même si dès les premières notes l’envie de fredonner Taking Chances avec elle se fait, il se contient parce qu’une partie d’accepter cette piece offering, c’est de ne pas lui retirer le moment et surtout, lui montrer qu’il est capable de chanter la chanson sans yaourt. "Je serai incapable de te donner le titre, mais t'as probablement reconnu." « What do you say to taking chances. What do you say to jumping off the edge and never knowing if there's solid ground below » Qu’il poursuit, parce que ça l’aurait grandement stressé de ne pas aller au bout du refrain et surtout, de ne pas faire démonstration que lui aussi, il a une voix pas trop dégueulasse. N’allant pas non plus jusqu’au bout de la chanson pour ne pas l’ennuyer, il ajoute rapidement dans un sourire. « J’avais reconnu, bon choix. Je te recommanderais son répertoire en français à l’occasion. » Qu’il glisse en un clin d’œil, même s’il imagine bien qu’elle n’irai pas jusque-là parce que là, ce qu’elle fait, c’est être juste poli. Nota bene à lui-même de ne pas trop s’emporter quand on traite de ce sujet. « Si j’avais eu ma guitare, on aurait jamer comme jamais » Qu’il ajoute, étant sincère parce qu’ils auraient vachement pu mieux s’occuper dans le cas présent et que zut, pour une fois qu’il trouve une nana qui pourrait chanter Céline. « Si tu veux, je peux te faire démonstration de ce que Bey m’a appris, parce que j’ai très sagement étudié ses vidéoclips et je pense avoir réussi à masterisé le oh oh oh oh no no » Qu’il raconte, menant le twerk aux paroles en chantonnant ce qu’il connait du refrain de crazy in love.
"Jolie voix." lança doucement, mais avec sincérité, Yasmine. Le dos appuyé tout contre la paroi de l'ascenseur, elle hocha la tête en même temps pour que Tad puisse considérer ses propos pour ce qu'ils étaient : de vrais compliments qu'elle aurait accompagné d'un sifflement appréciateur si on ne lui avait pas appris très jeune que siffler à l'intérieur portait malheur. Etant donné leur situation actuelle, retenus dans un ascenseur à l'arrêt, il valait mieux ne pas tenter le Diable, et le laisser là où il était. D'ailleurs, combien de temps encore resteraient-ils coincés ? Les minutes commençaient drôlement à s'étirer, et bien qu'elle ne fût pas spécialement affolée par la petitesse de l'habitacle, plutôt à l'aise ainsi adossée à sa porte close, sa boîte de fiches de révision pesant agréablement sur sa hanche, elle concédait qu'elle commençait pourtant à craindre que les secours ne se soient pas aperçus que quelque chose clochait. Finalement, ils auraient peut-être dû activer une commande pour les prévenir, ou même se servir de leurs téléphones ; mais ils avaient une bonne excuse, ils s'étaient laissé déconcentrer par l'opinion de l'autre – une maigre défense qui fit discrètement remuer Yasmine. Elle voulut jeter un bref coup d'œil au cadran de sa montre, mais elle s'arrêta en cours de route. Puisque la perche qu'elle avait tendue au jeune homme avait été saisie de bonne volonté, un fait qu'elle appréciait vraiment, et dont elle lui fût très reconnaissante, elle jugea que ç'aurait été lui faire un (autre) gros affront que de lui donner l'impression qu'elle s'ennuyait ferme avec lui. Principalement parce que c'était loin d'être le cas, malgré la relative pression qui était montée d'un cran pendant un moment ; elle admettrait volontiers que cet échange avait quelque chose de singulier, voire de distrayant – ça faisait bien trop longtemps que ça ne lui était pas arrivé de faire preuve d'autant de légèreté (même s'ils prétendraient le contraire par fierté mal placée, leurs divergences n'avaient rien de dramatique dans le fond), surtout entre les murs du St-Vincent's.
Délaissant ses vérifications temporelles, l'infirmière lui accorda un long regard le temps qu'il laisse un sourire poindre dans sa direction. Pour toute réponse, elle pencha la tête sur le côté, tandis que l'atmosphère commençait à s'alléger petit à petit. Et puis, un rire expulsé par le nez secouant très brièvement la jeune femme, et elle rompit le contact visuel pour reposer ses yeux vert clair sur le plafond de l'ascenseur "Je fais pas assez confiance à mon français pour me lancer à la découverte de ce répertoire en particulier, mais comme tu m'as l'air vraiment sûr de toi, disons que si l'occasion se présente…" Elle baissa les yeux, et termina sa phrase dans un sourire en biais, le regardant à travers une rangée de cils épais et légèrement recourbés "Je sais où tu bosses, je viendrais te donner mes impressions." Bonnes ou mauvaises, pour ne pas faire de jaloux. Ses sourcils se haussèrent très légèrement lorsqu'il lui parla de guitare. Elle recala sa boite de fiches sur sa hanche, et lui demanda, visiblement intéressée ; le haut de son nez se fronça, pas par moquerie, juste parce qu'elle tenta de l'imaginer en train de gratter "Tu joues, vraiment ? Pour la frime, ou c'est sérieux ?" Pendant une fraction de secondes, elle fût prête à pousser ses questions un peu plus loin – la curiosité, une valeur familiale portée au rang d'art majeur par Fatima ; quand on avait été à son contact toute sa vie, ça finissait par déteindre, et ce de façon plus ou moins subtile. Aussi, c'était sans compter sur Tad, chez qui la volonté de lui rendre la pareille pour finir de disperser le gros malentendu qui les avaient renfrognés tout à l'heure, l'empêcha de faire autre chose que de rire franchement. Alors qu'elle s'intimait de poser son regard ailleurs que sur le derrière remuant de son interlocuteur, elle observa en riant toujours, le pointant du doigt pour faire bonne mesure "Tu vois que t'as retenu quelque chose d'elle finalement !" Et pour accompagner les saccades du twerk de Tad, elle fredonna, remuant la tête et claquant des doigts en rythme "Got me looking so crazy right now, your love's got me looking so crazy right now…"
Il n’avait pas fallu longtemps pour Tad à saisir la perche tendue par Yasmine parce que malgré tout, il préférait le statu quo et ne pas avoir à se prendre la tête sur les performances de deux nanas qui leurs étaient dans le fond inconnues et qui ne jouait pas dans la même League (et surtout, il sait que Céline est la plus grande, c’est un fait et on n’argumente pas les faits). Alors, au lieu de se prendre plus la tête, il entonne en suivant les notes de musique qu’elle peine à retrouver le refrain de la fameuse chanson qui semble les réconcilier, y mettant de son vibrato afin de rendre justice à son idole malgré tout. "Jolie voix." Le compliment de Yasmine qui ne manque d’aller droit au but et à afficher une expression de fierté sur son visage qui serait la seule réponse à lui offrir parce que dans sa trop grande humilité, il ne sait jamais comment répondre à un compliment sans passer pour un gars trop imbu de lui-même alors à la place, il joue le garçon modeste, avant de lui conseiller d’explorer les répertoires dans sa langue maternelle de la chanteuse. "Je fais pas assez confiance à mon français pour me lancer à la découverte de ce répertoire en particulier, mais comme tu m'as l'air vraiment sûr de toi, disons que si l'occasion se présente…" Qu’elle répond, sans dire oui, sans dire non et lui n’ajoute rien, sachant pertinemment que la langue joue et quand on veut étudier quelque chose sérieusement, cela peut être barrière. A vrai dire, il ne saurait même pas dire s’il connait quelqu’un en Australie apte à lui en réciter une, tant ce répertoire ne s’exporte pas. "Je sais où tu bosses, je viendrais te donner mes impressions." Précise t-elle, l’amenant à sourire même si la pensée qui lui vient directement, ce serait qu’elle n’aurait plus très longtemps pour le faire vu qu’il se prépare à changer de corps de métier. Est-ce quelque chose qu’il devrait lui annoncer ? Il hésite quelques secondes avant de se dire qu’ils se connaissent à peine et qu’elle a du le lui dire pour être gentille et non parce qu’elle aurait sincèrement envie de lui tenir compagnie à la morgue pour parler d’une chanteuse qu’elle n’apprécie pas. Finalement, il ne partage pas l’info. "Tu joues, vraiment ? Pour la frime, ou c'est sérieux ?" Elle rebondit sur ce sujet-là, ce qui le surprend parce qu’il l’avait placé là surtout pour le jeu de mot ridicule qui avait suivi l’information. Il ose un hochement de tête, avant de se dire qu’il ne devrait pas faire comme avec son changement de métier mais lui partager l’information cette fois. Le Street Cat n’a rien à voir avec Queen B mais peut-être est-elle assez curieuse pour venir le voir ? Là, ça ferait plus de sens que dans une morgue. « Je joue assez sérieusement pour avoir un groupe, mais on ambitionne pas de faire plus que des concerts dans des p’tits bars le samedi soir. » Qu’il explique parce qu’il s’agit d’un level de simplicité qui pourrait en un sens relever de la frime parce qu’il ne tient pas à en vivre mais du sérieux parce qu’il s’applique à le faire vivre son band. « Du coup, à toi de juger l’un dans l’autre si c’est sérieux ou non. Mais, ça fait quelques années déjà. Je pose des flyers en salle de pause quand on en a, ça s’appelle le Street Cat, si tu veux venir voir un jour. » Il le propose de bon cœur avant de se taire subitement en s’disant qu’il fait peut-être un peu trop sa pub et que peut-être qu’elle avait posé la question par curiosité et qu’il ne devrait pas l’embêter avec ça parce qu’après tout, ils sont dans un ascenseur, elle est coincée avec lui et il ne peut pas abuser de sa patience. N’aimant pas trop ce côté de conversation qui tourne trop autour de lui, il finit par enchainer en parlant d’un sujet qui la touche elle et à lui présenter le seul move qu’il eut appris de son idole, c’est-à-dire un twerk endiablé sur le premier hit solo de la chanteuse, une des rares chanson qu’il avait retenu. "Tu vois que t'as retenu quelque chose d'elle finalement !" Qu’elle lance, visiblement amusée par sa performance qu’il ne lâche, amusé lui-même par le fait qu’il semble la faire rire et amener de la bonne humeur dans la petite cage de métal. C’est peut-être le moment depuis qu’ils sont coincés ou il profite le plus et à elle alors qu’il continue à entamer le refrain qu’il ne saurait pas chanter en intégralité. "Got me looking so crazy right now, your love's got me looking so crazy right now…" C’est tout un mini-concert qui se joue dans l’ascenseur et les deux prisonniers semblent tellement s’y amuser qu’ils n’entendent pas le bruit sourd provenant de l’extérieur et annonçant une remise en service. Non, ils n’apprennent qu’on est venu les sauver qu’au moment où les portes s’ouvrent sur le réparateur, un chef de service et quelques infirmières qui ont tout le loisir d’observer le déhanché de Tad sur le rythme imposé par Yasmine avant que ceux-ci ne se stoppent d’un coup, réalisant enfin leur liberté retrouvée.
"Hum, je pense que c'est sérieux." Parce que compte tenu du complément d'informations donné par Tad, ça avait quand même l'air plus réfléchi et poussé qu'une soirée au bar karaoké du coin, son affaire. Après une seconde à plisser les paupières pour étudier l'expression inscrite sur le visage du jeune homme, c'est donc ce que décida Yasmine, que c'était du sérieux, enjointe par son interlocuteur de juger si l'information qu'il venait de laisser échapper valait qu'on s'y attarde ou non. Elle était tentée d'y revenir, curieuse de savoir quel genre de musique jouait son groupe, combien ils étaient à le faire vivre, s'il était le seul guitariste, ou encore s'il mettait à profit sa jolie voix pour prêter main forte à celui qui avait le rôle du soliste. Seulement, elle remarqua à quel point la nonchalance de son collègue à faire tourner la conversation ailleurs que sur lui-même semblait lui tenir à cœur. Peut-être que c'était pour cette raison finalement qu'ils ne s'étaient jamais croisés auparavant. Il lui donnait l'impression de préférer raser les murs, et comme ils étaient nombreux à l'hôpital, il n'avait sans doute aucun mal à se fondre dans le décor. Elle comprenait bien ça, Yasmine. Alors elle rongea son frein, ne tenant pas à pousser le vice de la curiosité au point de le mettre mal à l'aise, et prit tout de même la peine de noter dans un coin de sa tête le nom du groupe qu'il venait de lui donner. Son sourire s'élargit, opinant du chef pour lui démontrer qu'elle entendait bien ce qu'il lui disait "Le nom est sympa en tout cas." ponctua-t-elle, se le répétant inlassablement en elle-même pour ne pas le laisser échapper, ne serait-ce que pour vérifier, quand elle aurait une minute à elle, si quelque chose les concernant traînaient dans les tréfonds de l'outil Internet. Et puisqu'il faisait l'effort d'entonner un air de celle qu'il disait exécrer, Yasmine décida de lui faire une fleur en l'accompagnant. Elle trouvait ça agréable, ce changement brusque d'ambiance – quelques minutes plus tôt, ils avaient été à deux doigts de s'écharper pour une question de point de vue, et maintenant, ils s'encourageaient mutuellement à se la donner sur un refrain vieux de moins d'une vingtaine d'années. Elle aimait les histoires qui finissaient bien, et celle-ci, qui avait pourtant si mal commencé, aurait droit à la mention HAPPY END une fois qu'ils seraient sauvés du confinement. Ce qui ne devrait plus tarder, se dit-elle en remuant la tête pour donner du corps à sa voix qui se mariait si bien au déhanché de petit blanc de Tad.
Elle était à ça de fermer les yeux pour pousser une note un peu plus aigüe, mais à la place, elle éclata de rire. Ne réussissant pas à garder son sérieux lorsque la porte de l'ascenseur s'ouvrit enfin, leur annonçant qu'il était en marche depuis quelques secondes déjà, ce dont ils ne s'étaient pas rendu compte, trop occupés à rectifier le tir de leur premier contact raté, c'est le regard que portait ses collègues infirmières sur la petite chorégraphie de Tad qui finit de l'achever. Se décollant de la paroi de l'ascenseur, Yasmine passa devant lui en lui disant, la voix pleine de sourires "Y aurait un truc à faire avec la guitare, vraiment. Si j'étais toi, j'en parlerais aux membres de ton groupe." Elle voulut laisser filer un clin d'œil, mais comme à chaque fois qu'elle essayait, elle rata son coup, et cligna finalement des deux yeux. Elle ne se laissa pas démonter cependant, et toupillant sur ses pieds, sa boîte de fiches calés contre sa hanche, et son sac fiché à l'épaule, c'est après être sortie de l'ascenseur qu'elle ajouta "Les Street Cats, j'oublierais pas." Elle se tapota la tempe du bout de l'index pour mimer qu'elle l'avait bien enregistré, le nom de son groupe. Ayant à peine le temps de lui lancer un dernier "Merci pour les fiches, Tad.", la porte se refermait déjà sur les nouveaux occupants de l'ascenseur. Interdite, mais souriante, Yasmine prit une seconde pour se remettre de cette rencontre fortuite, puis après un dernier rire, comme un réflexe dut à ceux qu'elle avait laissés échapper en voyant Tad se lancer dans un twerk endiablé, elle prit la tangente, et se dirigea, de meilleure humeur, vers la salle des infirmières.