Je savais qu’on était plusieurs à scrutter les disponibilités de Nicolas. Chacun de ses retours étaient si précieux et tout le monde sautait sur l’occasion pour tenter de l’avoir ne serait que dix minutes près de lui. Cette fois, j’avais abusé de la situation. Un repas tout entier rien que pour moi. Je lui avais proposé que l’on se retrouve au restaurant. Un rendez-vous prévu depuis presque quinze jours, il fallait bien ça. Ce que je n’avais pas anticipé c’est qu’il allait faire si chaud que j’en avais des difficultés à sortir de chez moi quand je n’étais pas obligée d’aller travailler. Mais, pour mon Nicolas, je pouvais surmonter toutes ces difficultés. J’avais pris un peu d’avance pour être sûre de pouvoir choisir la meilleure place sous la climatisation avant que les spots stratégiques ne soient squattés. Le serveur m’avait d’ailleurs mis la pression en m’obligeant presque à commander à boire pour ne pas leur faire perdre du temps et surtout de l’argent en attendant que mon ami n’arrive. J’avais alors commandé un thé glacé avec beaucoup de glaçons. Je savais bien que je ne devais pas compter sur la ponctualité de Nicolas, ces jours de relâches lui permettaient de souffler et de laisser tomber la pression de son travail prenant. Et je savais Ô combien, de nature il n’était pas forcément ponctuel, mais si en plus il ne se forçait pas à regarder sa montre toutes les cinq minutes pour limiter les dégâts, j’en avais pour quelques temps à l’attendre. J’avais d’ailleurs même pu terminer mon premier verre lorsque je le vois débarquer. Je levais le bras pour qu’il me capte rapidement et son regard croisa le mien aussitôt. « Je suis désolé, je me suis laissé prendre par le temps sous la douche ! » un petit signe de la tête lui indiquant que j’avais prévu le coup. « je suis patiente et je te connais assez bien sur ça ! » je le laisse prendre place en face de moi, sourire aux lèvres, je suis ravie de partager ce moment-là avec lui. La dernière fois que nous étions en tête à tête, c’est lorsqu’il est venu me voir au parloir et l’ambiance était bien différentes. Bien sûr, nous nous étions revus depuis mais nos autres amis étaient aussi présents. Je me trouvais toujours aussi chanceuse de les avoir auprès de moi. « Comment tu vas depuis ? » Depuis que j’étais sortie de ce tourbillon infernal ? « Bien mieux ! Tout ça, c’est derrière moi, pour de bon… » et ce n’était pas juste des mots comme ça. Ca ne faisait que cinq mois que j’étais sortie de prison et les trois, quatre semaines qui avaient suivi avaient été très difficiles émotionnellement et psychologiquement, une fois le procès bel et bien passé, j’avais pu réellement relâcher la pression et depuis, peu à peu, je reprenais du poil de la bête, j’étais mieux dans mes baskets, bien plus qu’avant même. « J’ai jamais autant eu la niak et cette soif de vivre ! » suivant le regard de Nicolas, je posais mes yeux sur le serveur qui réapparu assez rapidement. « Une bière pour moi aussi. » fini le sucre, place à l’alcool. Après avoir commandé également nos plats, je regardais à nouveau Nicolas. « Alors, dis-moi tout, quoi de neuf ?» j’étais assez excitée et surprise par les propositions que j’avais reçu récemment. « J’arrive pas trop à y croire encore… » je pris le verre vide de mon thé glacé juste devant moi et le serrai entre mes doigts. « J’ai une opportunité de malade au travail ! Le directeur de l’association m’a proposé une formation… pour ensuite prendre sa place ! » je n’en dis pas plus pour apprécier la réaction de Nicolas.
On peut clairement dire que les réseaux sociaux (et dieu sait comme j’y suis accro) nous permettent aujourd’hui de nous rapprocher. Ils nous permettent de continuer à tout savoir les uns sur les autres alors même qu’on ne se voit plus forcément. Dans certains cas, ca reste triste, ca donne des excuses pour ne pas aller voir certaines personnes qui nous sont chères, mais dans d’autres cas, par exemple pour Nico, c’est du pain béni. Même en étant en déplacement à l’autre bout du monde, on peut toujours se voir en facetime ou s’envoyer quelques snap pour se donner des nouvelles. Et ca, c’est bon aussi. On avait une conversation de groupe sur whatsapp qui permettait de se donner tenir informer les uns et les autres des petits scoops qui faisaient nos bonheurs au quotidien ou encore de se balancer des potins sur des personnes qu’on a pu croisé dans notre jeunesse et qui pour la plupart ne sont plus que des souvenirs. C’est ainsi qu’Isaac et Loan connaissent les exs d’Arthur et les noms de nos professeurs du lycée sans même y avoir mis les pieds un jour. Ils semblent dire que ça ne les dérangent pas, que c’est assez marrant de nous entendre parler du bon vieux temps, mais quand même, parfois j’imagine qu’on peut être particulièrement lourds. Enfin, tout pour dire que je suis bien contente de n’avoir jamais perdu de vue mes amis et qu’importe les moyens pour rester présents les uns pour les autres, je prends tout et je remercie ceux qui les ont inventés pour nous permettre ça. « Quand j’aurai pris ma retraite, promis ça changera ! » a d’autres ! La retraite c’était tout sauf être à l’heure pour moi. La contrainte des horaires ne devait plus existé une fois qu’on s’arrêtait de travailler. Depuis notre plus jeune âge on courrait après le temps. Même quand on est un bébé on est calé sur le rythme effréné de nos parents. Se lever tôt pour aller chez la nourrice, se lever tôt pour aller à l’école, se lever tôt pour prendre un bus, un train, se lever tôt pour aller au travail… alors quand on est plus obligé de se lever pour quoi que ce soit, non, faut en profiter. Et fini les alarmes quelle quelles soient. « Quand on aura pris notre retraite, si on sera à la retraite un jour… j’espère bien qu’on aura plus besoin de courir les uns après les autres ! J’propose qu’on prenne une grande colocation, un immeuble entier où on aura qu’à aller squatter les uns avec les autres. Pour vivre vieux, faut vivre heureux ! » et la définition même du bonheur c’est d’être entouré des gens qu’on aime. Enfin bon, je crois que j’étais un peu sur mon nuage en ce moment notamment à grâce à cette promotion tellement inattendue qui m’était tombée dessus. Depuis quelques semaines je pouvais dire que j’allais bien mieux. J’avais un suivi psychologique deux fois par mois qui m’aidait aussi à mieux appréhender la vie extérieure et pouvoir me positionner comme avant. Je pouvais pas dire que je ne gardais pas quelques traumatismes de mon passage en prison, mais en tout cas, je n’étais plus au fond du gouffre. Si ma sortie de prison a été une réelle délivrance et que j’avais l’impression d’avoir le monde à portée de main, les quelques longues semaines qui avaient finalement suivi m’avaient bien ramené à la réalité. Ça avait été très difficile et si je refusais une aide psychologique, je m’étais finalement rapidement avisé et pris contact avec une psychologue spécialisée des traumatismes post détention. Sans doute la meilleure décision que j’ai pu prendre ces derniers mois. Sans compter la dernière en date… « C’est une très bonne nouvelle ! C’est une place qui t’ira très bien, tu le mérites. » J’avoue qu’à la fois je m’y voyais déjà et en même temps, j’avais a peu prêt aucune idée concrête de toutes les responsabilité d’un directeur d’un établissement de ce genre… « A ta future réussite ! » Je levais mon verre tout sourire avant de boire également « Rassure-moi, tu as dit oui ? » ma réaction m’avait semblé en dire assez long sur mes intentions ! « bien sûr que oui ! Je démarre la formation dans deux semaines ! C’est juste dingue ! En fait, James a aussi eu une proposition. Une autre antenne ouvre dans le Queensland, il va être directeur régional. A la fois ici et sur l’autre établissement. Et il avait besoin d’un directeur indépendant sur chaque site pour assurer le bon déroulement des activités… On va dire que mon poste sera plutôt technique, lui sera sur le pilotage des actions… les financements, les relations partenaires pour les subventions. De mon côté, je vais gérer le personnel, être présente pour les patients quoi qu’il en soit… une sorte de supervision. Les tâches sont repartagées. » et en même temps, ca m’inquiétait moins que de devoir reprendre absoluments toutes les activités d’un directeur, les relations partenaire, débloquer des fonds… je suis sûre que James savait très bien faire ça. Quand à moi, peut être que je pourrais faire mes preuves mais bien plus tard, c’était déjà un bon début. « Tu es officiellement le premier informé! »
« Ça pourrait être une bonne idée, une très bonne idée même, on en reparlera dans trente ans ! » Dans trente ans, c’était réconfortant comme réponse. J’avais une vision de l’amitié qu’on m’avait déjà qualifié de bisounours. Tout le monde est gentil, tout le monde est beau, pas de secret, pas de mensonges, de trahison entre amis. C’était ma vision et parfois, je l’expliquais par le fait d’avoir créé mon identité autour de personnes qui allaient et venaient dans ma vie. Pas de famille au sens strict du terme. Pas de parent biologiques, pas de famille éclaté. J’avais connu les familles d’accueil, les Coopers mais aussi les Martins puis les Jacobs, qui avaient fini par m’adopter à l’âge de 10 ans. La meilleure famille dans laquelle j’aurai pu tomber, ils n’avaient jamais fais un seul faux pas, tentant de m’offrir le meilleur. L’arrivée d’Astou dans la famille avait aussi tout changé, pour nous, pour moi. Mais les amis, que je comptais réellement sur les doigts d’une main, c’était aussi eux ma famille. Alors vieillir sans m’imaginer à leurs côtés, ca m’était compliqué. J’avais ce besoin de savoir qu’ils seraient là jusqu’au bout, pour toujours. J’avoue, on dirait une gamine de quinze ans, qui a besoin de voir ses copains après le lycée, les weekends, tout l’temps, qui remplace un peu la famille tradi par les potes et les nouvelles expériences, mais peut être que j’étais pas totalement sortie de cette adolescence, même si mes 35 ans approchaient à grand pas. Encore pas foutu d’être casée et d’avoir une famille alors que les nanas de dix ans de moins que moi rêvent quasiment toutes de robes de mariées et de bébés. Pas les mêmes vies, pas les mêmes aspirations. Un jour peut-être. « Tu vas assurer, c’est certain ! Et je suis très ravi d’être le premier informé, c’est un véritable honneur mademoiselle Jacobs ! » Il en faisait des tonnes mais j’étais moi-même flattée. « J’suis quand même assez surprise que James, le directeur, m’a proposé cette offre… après tout ce qu’il s’est passé. » après tout, arrivée depuis moins d’un mois dans l’association, j’y avais passé la moitié du temps soit en prison, soit en arrêt ensuite. Il fallait être bien courageux pour me proposer cette promotion. « Mais on a bien discuté. Ca fait plaisir de voir quelqu’un qui vous fait confiance à ce point ! » Je n’avais d’ailleurs pas eu une telle reconnaissance depuis le début de ma carrière professionnelle, que ce soit avant, dans le tourisme ou depuis peu, dans le social. « On en a fait du chemin depuis le lycée ! » a qui le dit-il… « tu m’étonnes… » était-ce repartie pour une séance nostalgie comme on savait si bien le faire ? On se rappelait toujours les mêmes souvenirs mais c’était toujours aussi bon d’en parler. Comme si on ne se lasserait jamais de se rappeler pour la cent trente cinquième fois du jour où notre professeur de philo était sorti des toilettes avec un préservatif collé à la chaussure et que si tout le monde s’en était amusées, personne ne lui avait dit. « Il te manque plus que le parfait petit ami ! Et dans quelques années, nos gosses joueront ensemble, deviendront de bons amis et nous rendrons fou ! » « Eh bien écoute, je suis pas contre ces projets, mais ma vie sentimentales assez catastrophique en ce moment, enfin… pas catastrophique mais c’est juste le néant. Néant total ! Pas une mec, pas une nana à l’horizon. En même temps, j’avais pas la tête à ça… il serait peut être temps que je réinstalle Tinder sur mon téléphone. Et on se gardera de dire à nos gosses que j’ai rencontré leur père sur ce genre d’appli ! A l’occasion, on aura le temps de trouver une histoire romantique qui les fera rêver ! » c’est sûre que c’est beaucoup moins glamour de dire : à la base, c’était juste pour baiser, puis voilà où on en est… deux gosses et un chien ! « Quand j'y pense, tout aurait pu être diffèrent si ça avait fonctionné avec Amélia, je serai sûrement père de deux enfants aujourd’hui, je serai marié et probablement gros aussi ! » je crois que j’avais pas pu m’empêcher de lever les yeux au ciel en entendant parler d’Amélia, non Nicolas, t’es bien mieux sans elle ! « Mais en attendant, je me bats pour convaincre Clara de vouloir fonder une famille. » « Ca, j’préfère ! Clara, faut la travailler au corps, elle finira par accepter. Peut être qu’elle devrait changer de taf, à force de voir des mômes ingrats tous les jours, ca doit pas lui donner envie non plus ! Et j’espère que j’serai la marraine ! »
« Tu as été blanchie et tu es compétente, il aurait été con de ne pas te proposer le poste » Je sais pas si je l’aurais qualifié de con, mais j’aurai tout à fait compris qu’on ne me le propose pas, ce poste. Ca aurait même été évident qu’un mec sortie de nulle part mais avec des diplomes en poches prenne la place. Mais je pense connaitre suffisament James à présent pour savoir qu’il préfère être entouré de personnes qu’il connait et envers qui il a confiance. Et pour ça, je lui en serai eternellement reconnaissante. Je ne pouvais pas avoir mieux pour repartir sur une bonne base en cette année 2019. Tourner la page sur 2018 qui a été plus que catastrophique pour moi, un véritable enfer. Maintenant, j’étais prêtre pour faire table rase du passé et aller de l’avant, chose que j’avais souvent du faire lors de mon enfance. Comme quoi, le passé est grand constituant de notre présent. « À toi de lui montrer que tu gères maintenant, mais je ne m’inquiète pas à ce sujet. » Je savais bien que mes amis avaient les mots surtout pour me faire plaisir et qu’au-delà de ça, ils pensaient ce qu’ils disaient même s’ils n’avaient aucune idée de ce que je valais réellement sur le terrain professionnel mais, je leur en étais totalement reconnaissante également. Ces encouragements me font beaucoup de bien et heureusement qu’ils étaient là. « merci. » concluais-je cette discussion avec modestie.
Rapidement, on en vient à parler de nos vies sentimentales, des sujets qu’en réalité j’adore aborder avec mes amis. Parfois on peut avoir dix fois la même conversation, mais c’est pas grave, il y a toujours un petit détail en plus qui vient s’inviter, le petit scoop croustillant. « Tu pourrais avoir une surprise et tomber sur quelqu’un qui te fera fondre ! » me répond-il en référence à Tinder. « C’est pas impossible… moi et mon cœur d’artichaud on tombe amoureux de tous les beaux gosses et les nanas qui passent par là… suffit d’un peu d’humour, un sourire ravageur et j’suis presque mariée ! » et il m’acheva avec son idée de soirée de célibataire. « Là, hors de question. Tu vois Tinder, c’est du semi assumé… on se voit que entre célibataire… mais les soirées avec une grosse pancarte écrit « soirée des Losers » devant l’entrée du bar… Never. » pourtant j’avais déjà testé mais sincèrement, rien de bien concluant… « Je crois que mon plus grand regret aura été de te larguer devant ce lycée… qui sait ce qu’on serait devenu toi et moi. » je lâchais souvent ces petites phrases, j’insistais pour dire que je plaisantais à chaque fois et Nicolas en faisait autant, il ne le prenait jamais sérieusement mais il m’arrivait de me poser réellement la question. Mais bordel, tout le monde sait que les histoires de cœurs d’ado, ca dure jamais pour la vie. « Mais… tu sais, quand je dis que c’est des soirées pour Loser… euh, j’parle de celles que j’ai fais ! » voulant me rattraper en ayant un flash sur les circonstances de sa rencontre avec Clara. « t’as eu plus de chance que moi ! » ai-je sauvé les meubles ? « Et puis… Clara, c’est un sacré bout de femme ! » je l’aimais bien Clara et malgré les difficultés et les craintes de Nicolas au sujet de leurs relations, je suis sûre que ca finira par se débloquer. « Il va de soi que tu seras la marraine ! De mon côté, du moins » je sautai déjà sur mon siège. « a défaut d’avoir un gosse un jour, j’aurai de quoi exercer par procuration ! Etre marraine, c’est un peu tous les bon côtés d’avoir un gosse… tu le vois de temps en temps, en général c’est assez cool, tu passes un bon moment… par contre, c’est pas toi qui te lève la nuit pour nourrir le môme ou pour aller le changer. » Alors oui, j’accepte avec grand plaisir le rôle de marraine ! « Mais bon, nous n’y sommes pas encore, pas du tout d’ailleurs. Tu as peut-être raison, le fait qu’elle bosse avec des gosses lui donne peut-être pas envie, mais j’ai quand même beaucoup de mal à comprendre, j’ai envie d’aller de l’avant, de parler enfant, mariage, enfin, tu vois, je ne m’imagine pas continuer ainsi durant des années et pourtant, je l’aime énormément ! » Aie, ca devient un peu trop serieux tout ça… et moi qui continue de plaisanter … « oui, j’comprends… » je pose ma main sur celle de Nico, par compassion. « est ce que t’en as vraiment déjà parlé avec elle ? Genre « maintenant on arrête les conneries, on se pose et on discute ! » et tu lui dis … si vous avez absolument pas les même aspirations, c’est peut être du temps perdu… » et ça me fait pas plaisir de lui dire ça.
« Ne me dis pas que ce genre de personne se font rare, si ? » au contraire, elles courent les rues, j’en croise tous les jours, au taf même, quand je passe au DBD, quand j’vais faire mes courses… « à chaque coin de rue oui ! » je réponds en riant. « Mais c’est pas parce que j’me projette mariée et avec trois enfants que c’est forcément bien ! » puis, ce sont des gens de passage, que je reverrai pas forcément. « Tu pourrais vraiment être surprise, je devrais t’y trainer de force un de ces jours ! » et oui, quelle cruche. J’ai soudainement un flash qui me rappelle la manière dont il avait connu Clara. Ca a marché pour lui et tant mieux, j’en suis ravie… « Arrete ! » ca m’fait rire à l’idée qu’il puisse m’y trainer alors qu’il est en couple. « C’est toi qui va finir avec quatre nanas célibataires qui vont te tourner autour, tu sauras pas comment t’en défaire. » même si je j’vois mal Nicolas tromper Clara. « A trop vouloir jouer avec le feu, parfois, on peut se brûler. » malgré lui. « tu supporterai pas la pression. » je m’en amuse toujours. « Promis, j’vais me la jouer grande fille et finir par trouver quelqu’un. J’viens d’avoir 36 piges quand même… » mon dieu que la temps passe. 36, j’étais confortable avec ça, mais ca voulait aussi dire que j’approchais dangereusement de la quarantaine et là, j’étais moins à l’aise. « faut que je m’active si j’veux pas finir vieille célibataire, sans gosse, sans personne. » même si je ressentais pas le besoin d’enfanter maintenant, c’est une option que j’envisageais pas de zapper non plus. Ouais, la belle image d’Epinal avec la famille et le chien, ca m’donne bien envie. Et j’le taquine sur ce couple qu’on a formé quand on était encore des gamins, adolescents mais gamins quand même. « Tu avais brisé mon petit cœur ce jour-là ! Je t’en voulais tellement ! » Ouais, je sais et j’crois que j’m’en suis suffisamment voulu aussi. « j’ai flippé… » que je lâche comme si j’avais encore besoin de me justifier après tant d’années. « Mais bon, on s’en est plutôt bien sorti finalement, on est de bons amis et j’espère que ça sera toujours comme ça. Mais je suis sûr qu’on aurait formé une belle petite famille ! » je m’y prenais à rêver à imaginer la tête de nos gosse tien. « j’crois qu’il existe une application qui fusionne nos têtes pour voir à quoi pourraient ressembler nos gamins ! » ca m’fait rire et me voilà ni une ni deux sur mon téléphone entrain de chercher dans le play store. « tiens ! » j’ai trouvé. Je télécharge. « regarde moi, fais ton plus beau sourire… » et je dégaine le téléphone, objectif droit vers Nicolas pour le prendre en photo. Un cliché et je fais un selfie ensuite pour voir le résultat. « fille ou garçon ? Les deux ! » je tentes les deux sexes, l’un après l’autre. La fille d’abord… « wow… » pas terrible le résultat. D’une, la pauvre à mes yeux… c’est pas ce qu’on peut retenir de meilleur chez moi. Mais elle a le beau sourire de Nicolas, ca c’est un bon point. Je lui montre quand même. « j’espère que le résultat sera meilleur pour notre fils ! » c’était quand même bien foutu ces applications. Je retente aussitôt avec les mêmes photos pour le sexe masculin. « ah ! » c’est mieux, il est beau gosse, j’adore ! « Nicolas, fais moi un garçons !On peut pas laisser passer ça ! » je lui dis toujours en riant, lui glissant le téléphone sous les yeux. Bon, trève de plaisanterie, Nicolas à l’air sérieux et pas mal touché par ce qui lui arrive… « J’ai voulu lui en parler, mais elle n’est pas prête. On est allé chez mes parents l’autre jour et ma mère n’a pas hésité à faire quelques remarques à ce sujet, je pense que ça n’a pas aidé. Peut-être que c’est moi qui suis trop rapide, je sais pas.» je grimace au sujet de sa mère. « c’est toujours tendu les relations belle mère/bru, j’imagine que ça a pas du plaire à Clara… » moi j’suis du genre totalement hermétique à toute remarque venant de la belle famille en général, de quoi j’me mêle ? « Y a pas de trop rapide ou quoi… je suppose. Chacun son rythme plus tôt. Mais c’est sûr, c’est mieux quand on faire la course au même niveau… » j’veux pas être pessimiste et en réalité, ca me rendrait triste que Clara et Nico soient plus ensemble. « Déjà, met ta mère hors de course… » même si c’est pas évident. « c’est une histoire de couple, pas besoin d’en rajouter une couche je pense. »
« Je ne m’inquiète pas trop à ce sujet, des opportunités il y en a toujours, mais c’est pas mon genre. » Je sais bien que Nicolas est sérieux, qu’il n’a d’yeux que pour Clara et qu’il a toujours mis toute son âme et son cœur dans chacune de ses relations. Et avec Clara plus que jamais. Sans doute parce qu’on arrivait à un point de nos vie où il était temps de mettre aux choses serieuses, qu’on avait cette impression que le temps filait si vite qu’il nous passait sous le nez aussi. Que l’époque où on pouvait dire avec nonchalance « c’est bon, j’ai l’temps. » était bien loin derrière nous et que non, on avait plus tant le temps que ça… On était pourtant pas si vieux, mais on sait bien que la jeunesse est pas éternelle. « Puis je n’ai jamais été très à l’aise avec les relations d’un soir. » Qu’il se justifie pas, j’le connais par cœur, plus qu’il ne le pense sans doute et moi j’le taquine depuis le début, en sachant très bien qu’il se laisserait pas si faire, même s’il avait toutes les nanas du speed dating autour de lui à cette soirée des célibataires. « Des fois, ca fait pas d’mal ! » mais j’parle pas pour lui, j’prends ça pour moi. J’suis pas du genre à avoir un partenaire différent chaque soir, ca arrive même pas chaque semaine, mais j’suis pas contre juste une soirée sans prise de tête. Et puis, j’pouvais toujours compter sur Max si besoin, y a pas de mal à se faire plaisir quand le temps est long justement. « Ça viendra en temps voulu, le destin fait bien les choses, crois-moi. » je hoche la tête, je laisse faire les choses, je force pas le destin. Si j’ai essayé quelques applications de rencontres, j’ai rapidement mis tout ça de côté, ne tombant que sur des tocards qui n’avaient qu’un pénis à la place du cerveau et peu de choses intéressantes à raconter en dehors de ça. « Qui sait, j’finirai peut être par me marier avant toi-même. » je le taquine encore, j’espère pas, le pauvre. Lui qui rêve de ce mariage avec Clara, manquerait plus que j’ai le temps de me trouver un gars, prendre le temps de bien le connaitre et se marier ensuite. Pour couronner le temps, Isaac et Nicolas seraient mes premiers témoins, histoire de remuer le couteau. « J’suis certaine que ca finira par arriver. » c’était peut être tôt pour Clara, mais à force, elle accepterait. Je m’amuse avec cette application et il est du même avis que moi concernant ce qui serait censé être notre fille. Pas terrible, je sais pas comment j’dois le prendre, s’il trouve aussi qu’elle a les mêmes yeux que moi. Mais ce garçon, je m’en remets pas. « Il en ferait tourner des têtes ce petit ! » et il était jamais trop tard, je me laissais penser et j’allais vite me rassoir et éteindre cette application en tentant de chasser cette idée de la tête. N’importe quoi, vraiment. Et après être de nouveau passé sur le sujet Clara, Nicolas me fait part de l’invitation de ses parents. « Avec plaisir ! J’ai hâte de présenter leur petit fils à tes parents. » que je dis en riant. Le serveur nous apporta enfin nos plats et la soirée pouvait suivre son cours…