J’arrive à l’atelier de bon matin, les gobelets de café distribués, la brioche entre les dents. Les étudiants ne sont pas là pour encore une bonne heure, la galerie est complètement silencieuse, la boutique fermée. Les routines matinales que j’apprends de plus en plus à apprivoiser, malgré mes courtes nuits, l’insomnie qui est toujours pas mal présente et les étoiles que je compte par dizaine sans arriver à m'endormir. Entre la chorégraphie du réveil et celle de Noah que je raccompagne à pieds à l’entendre me raconter ses derniers rêves, ses dernières histoires de super-héros préférés. Noah qui file toujours à l’école un trottoir plus tôt avant la cour de récré, que je vois à travers les arbres et autres bosquets rejoindre à la course ses potes, gamins hilares et chasses à l’homme au fil des jeux et des différentes structures de toutes les couleurs. La balade vers la maison sur le retour, la musique que me soufflent aux oreilles mes écouteurs et les restes de petit-déjeuner que je gobe tranquillement avant de filer au boulot. C’était drôle ça, dire que j’avais un boulot. Dire que j’allais bosser, alors qu’habituellement, mes journées étaient ponctuées d’heures à dessiner, de minutes à rêvasser. Je concevais pas encore totalement le fait d’être payée à donner des classes de dessin, j’étais relativement perdue dans l’univers de la vente de toiles et de croquis quand bien même Dannie passait un temps incroyable à me guider au fil des négociations de prix et des séances d’organisation de vernissages. Mais, je travaillais. Je travaillais à rapatrier mes pinceaux égarés un peu partout dans la pièce, à dégager des tas de papiers pour en couvrir les chevalets, à lancer le tourne-disque le temps qu’il craque un vinyle ou deux. Tout autour, c’est la consécration de mon rêve de gamine, de la peinture sous les ongles, sur le jeans, dans le coeur.
« C’est violent comment tu l’as tuée celle-là. » la poésie du matin est clairement démolie, broyée dans son élan au moment où la silhouette bourrée de condescendance et empestant la cigarette d’Auden s’installe dans l’embrasure de la porte, le sourire malicieux aux lèvres maintenant qu’il pointe du menton la preuve de mon pseudo-crime. Au centre de la pièce, sur la grande table qui me sert de ramasse-tout la plupart du temps plutôt que de surface où peindre, y’a un pauvre petit pot de terre cuite supportant une plante qui, je me jure, n’est pas en si mauvais état que ça. « Même pas, regarde, la feuille, elle tient super bi… oh. » joignant le geste à la parole, je m’élance vers la principale intéressée, confiante, trop, arrachant dans mon empressement la seule feuille verte restante, seule lueur d’espoir qui s’échoue dans une froissement trop sec pour être sain à mes pieds. « T’as d’la rage en toi ma petite, autrement, tu lui aurais pas fait vivre l’enfer à ce point. » je soupire, vrille un regard presque noir dans la direction de l’artiste, presque parce que j’arrive pas correctement à plisser des yeux avec les éclats de lumière qui passent entre les rideaux. « Pourtant, j’ai arrosé et j’ai mis au soleil, et j’ai ajouté de l’engrais, et... » fronçant les sourcils, tentant de comprendre, j’énumère, il me coupe dans ma phrase. « … psycho killer. »
Le plant de betteraves à l’article du décès bien installé dans le panier de mon vélo, je file une fois mon dernier atelier de poterie de la journée terminé, bouclé. J’avais acheté les semis y’avait un peu plus d’un mois au marché fermier, Isy s’était assuré lui-même que j’avais pris ce qu’il y avait de plus facile à faire pousser, le genre de truc que même un gamin aurait pu entretenir sans se forcer. La honte, quand je pense au fait que Noah a lui aussi son petit pot à la maison, et la verdure luxuriante s’en échappant me confirme qu’il a tout gagné côté pouce vert, et que le mien, il est bel et bien meurtrier. Arrivée une poignée de minutes plus tard chez l’infirmier, je toque à sa porte, certaine qu’il ne bosse pas aujourd'hui. Ou alors, c’est demain, qu'il est en congé? « On m’a dit que les gens qui bossaient en santé étaient toujours dispo n’importe quand pour une question de vie ou de mort. » quand il ouvre la porte, je lui mets l’étendue de mes dégâts sous les yeux, expliquant mon méfait en retenant un rire de franchir mes lèvres, gardant le personnage paniqué au mieux le temps que ça dure. Ce n’est que lorsque mon regard dévie au-delà son épaule que j’interroge, curieuse de voir la pièce derrière lui beaucoup plus épurée que la dernière fois où j’étais passée - maintenant des boîtes, et énièmes ramassis d'objets éclectiques qui s'étendent à perte de vue. « Tu faisais du ménage? »
Isaac Jensen
le coeur au bout des doigts
ÂGE : 34 ans (13.05.90) SURNOM : Isy STATUT : Penny est le soleil et l'amour de sa vie, l'évidence avec laquelle il écrit sa plus belle histoire et s'autorise à réaliser des rêves de bonheur (06.07.2021) MÉTIER : Infirmier au service des urgences, président de l'association Run for Judy, infirmier bénévole à la Croix Rouge et aux Flying Doctors, sapeur-pompier volontaire et surtout : papa comblé de Jude (13.09.2018), Maia (14.06.2022), Jack et Mila (01.08.2023) LOGEMENT : Penny et lui ont quitté Toowong en 2024 pour s'installer avec leurs enfants à Bayside et y créer leur cocon à l'image entière de leur amour POSTS : 28708 POINTS : 0
TW IN RP : dépression, anxiété, automutilation, idées suicidaires, tentative de suicide, mentions d'abandon d'enfant PETIT PLUS : Emménage à Brisbane en 2003 ∆ il exerce en qualité d'infirmier au st vincent's depuis 2006 puis est affecté aux urgences en 2013 ∆ une suite de blessures anéantit sa carrière de joueur de football australien en 2010 ∆ il attente à ses jours en mars 2018 et reprend le travail en septembre 2018 ∆ finaliste de ROA en 2020 ∆ il se soigne contre son anxio-dépression, après avoir longtemps refusé son diagnosticCODE COULEUR : Isy s'exprime en #9966ff ou slateblue RPs EN COURS :
And so, I thought I’d let you know that these things take forever. I especially am slow but I realize that I need you. This is the first day of my life. I’m glad I didn’t die before I met you. But now, I don’t care; I could go anywhere with you and I’d probably be happy.
Planté au milieu de ma cuisine, faisant face à mon calendrier, mes songes se stoppent derechef, perdent lamentablement la course poursuite les opposant aux houleux souvenirs. Je m'oriente vers mon placard à balai sans émettre le moindre pas pour réduire la distance entre la poubelle y résidant et les pages composant 2018 que je tiens entre mes mains. Ma respiration est inaudible, le mécanisme de l'humain se perpétue au même rythme que les aiguilles de la pendule surplombant la scène. Se faire du mal ou abandonner. Fuir ou Affronter. Se protéger ou se heurter. Les sémantiques se mêlent, les émotions les teintent habilement. Finalement, dilemme tranché par le couperet d'une pulsion vitale, je m'installe dans le canapé. L'équilibre émotionnel précaire, je fais défiler les mois.
Les images d'animaux, les recettes de cuisine, les rendez-vous importants, les dates de vacances qui n'ont jamais goûté au concret. Les moments forts qui définissent, altèrent, brutalisent, embellissent. Les instants éphémères, ceux qu'on oublie très facilement, peut-être même trop mais qui allège le cœur ultimement. Je me mords la lèvre inférieure nerveusement, les prunelles étincelantes rembobinant pieusement la bande de 2018. Cette année qui, au seuil de son quatrième mois, aurait pu ne jamais être complétée de ma présence. Mon index se stoppe sur un 22 immaculé sur papier glacé mais persistant en mémoire. Celui qui me hante, celui que j'abhorre, celui que je méprise et aussi celui que je convoite, celui que j'adule. Il y a ces soirs où la horde des démons qui m'accompagnent continuellement virevoltent au rythme des violons crissant du regret et du désespoir, m'émeut à regretter avoir été sauvé, me dénigre à avoir failli à accomplir mon but ultime de cette soirée de mars. Il y a ces fins de journée où l'ambiance parfume mon cœur qui fracasse, virulent, ma poitrine à m'injurier de dégénéré et m'estimer chanceux de disposer encore de pages d'histoire à rédiger, d'impacts à semer, d'expériences à goûter. Mes doigts retracent les lignes alors que mon esprit se projette vers leur descendance et appréhende incessamment leur inconnu.
Every breath you take. Je cille, ferme les yeux devant la page dédiée à décembre, sursaute lorsqu'un jeune chat roux prend place sans ménagement sur mes genoux, banalise de sa tête poilue le calendrier considéré tel un objet indésirable à son sens. J'inspire profondément et gratte d'une main l'animal entre les oreilles, ses ronronnements ne tardant pas. Les réflexions ralentissent, mon ciel de préoccupations et d'appréhensions s'éclaircit tant que je libère mes jambes du félin et saisis un stylo dans l'un des tiroirs du mobilier. Je cherche le jour fatidique pour l'entourer et y dessiner deux oreilles pointues, avant de jeter le calendrier dans son intégralité dans ma poubelle.
Je referme le placard à balais, constate une énième fois l'étendue de mes travaux. Le tri est important, le changement imminent, de nouvelles couleurs devenues vitales. Étrangement, ce fut mon voisin qui me souffla cette idée sans réellement la formuler. Son rappel que les propriétaires recouvrent leurs murs de blanc afin que les potentiels clients puissent mieux s'y imaginer m'a guidé. Ainsi, muni de cette peine à continuer mon quotidien dans cette maison qui m'appartient et je ne souhaite vendre, je me suis plongé dans cette mission de procurer une nouvelle face à mon intérieur. Changer les couleurs, les meubles, les dispositions. Depuis le premier jour de janvier, je bombarde un site de ventes d'articles dont je veux me dégager et apprivoise les différents points de vente en quête de mon futur matériel. Plusieurs meubles qui m'avaient tapé dans l’œil reposent désormais dans le garage, patientant pour la suite de leur réparation, et bien que mon domicile s'apparente à un vulgaire chantier dans son entièreté, offrant mille et uns parcours de jeu pour le jeune chat qu'il abrite, il devient de plus en plus mien. Il prodigue au fil des modifications les notes d'une nouvelle chanson où les accords sonnant Chloe se taisent exponentiellement.
Machinalement, je vérifie que je n'ai pas reçu d'appel sur mon téléphone portable avant de lever les yeux vers ma porte d'entrée en percevant une ombre s'en approcher. Quelques frappements contre la surface boisée, le compagnon qui s'érige sur mon canapé de manière à découvrir aux premières loges l'identité de ce visiteur. « On m’a dit que les gens qui bossaient en santé étaient toujours dispo n’importe quand pour une question de vie ou de mort. » Mon regard passe de la McGrath que je reconnais péniblement, ébloui par le soleil, aux restes de végétal qu'elle détient entre ses mains. Bientôt, j'aligne les éléments, réalise la nature du plant de betteraves et constate les dégâts promptement. Un « Oh » mêlé de surprise et de désolation se risque naturellement entre mes lèvres. « Tu faisais du ménage? » Je constate l'artiste s'attardant sur mon perron faute de bienséance de ma part et ouvre davantage la porte pour l'inviter à y entrer, chassant les souvenirs de la scène de son altercation avec Greta qui avait, selon moi, soutenu l'absence de McGrath dans les environs de Toowong pendant plusieurs semaines.
« Hum, si on veut. Tu peux entrer, si tu l'oses. » La brave s'aventure, l'animal roux en profite pour se pavaner devant elle, en quête de douces affections. « Tu permets que je l'ausculte ? » Je plaisante, la conviant à me tendre le pot de terre pour que je l'examine avec attention. « T'as mis quelque chose dans ta terre ? » Je questionne, sourcils froncés, intrigué. Je jette un coup d’œil sous le pot et tâte la terre aride d'un index. « En tout cas, déjà, elle manque d'eau. » J'offre un sourire à Ginny et abreuve la plante derechef. Je dépose la plante sur la réflexion d'un rayon de soleil sectionnant la surface d'une table et suis rattrapé par mon nouveau manque de politesse. « Tu veux boire quelque chose aussi ? » Je fais référence à la plante qui s'hydrate et assure en désignant le chat qui fixe Ginny telle une proie extrêmement appétissante. « Il n'est pas méchant. » Je m'oriente vers la cafetière, passe devant mon frigidaire agrémenté de plusieurs dessins d'enfants dont certains de Noah, soutenus par des aimants de destination que je n'ai jamais connues mais que des amis m'ont rapportés en souvenirs. « Je relooke ma maison, en fait. » J'apporte la boisson souhaitée à Ginny et tandis que nos doigts s'effleurent dans l'échange du récipient, je m'assure, le regard sincèrement intéressé et attentionné : « Ça va ? »
À peine j’ai toqué que déjà il ouvre la porte, plisse des yeux, constate le résultat d’un énième essai à la botanique bien pitoyable au creux de mes paumes tachées de la peinture du jour. Pouffant de rire de voir le ridicule de la mission survie que je lui propose pour ponctuer sa journée, c’est beaucoup plus curieuse qu’effrayée que j’allonge la nuque, plonge mon regard par-dessus son épaule, constate la créature poilue qu’il abrite désormais sous son toit. « Je devrais me méfier? » que je demande, le sourire aux lèvres, suivant innocemment le chaton des iris alors qu’il explore les lieux non sans s’assurer d’en faire état comme son territoire à lui et à lui seul pour l’instant. La cargaison desséchée et dérisoire quitte mes mains pour passer entre celles du Jensen qui demande l'autorisation par politesse au vol. « Il est tout à toi. Et probablement qu’il se réjouit que tu m’éloignes de lui, tu sais. Work your magic. » ma mine frôle la déception, l’oeil brillant quand je constate en parallèle qu’en effet Auden avait absolument raison lorsqu’il statuait que j’étais une violente meurtrière. Autant river mon attention au félin qui rôde de plus en plus près de moi, me penchant à sa hauteur, tentant de l'apprivoiser en tendant doucement une main à son intention le temps qu’il renifle, esquisse un soubresaut derrière, revienne, finisse par se frotter le nez sur mes doigts dans l’espoir d’être gratté au passage. Pas le moins du monde outrée par la question d’Isy qui tente de rassembler toutes les preuves incriminantes que j’ai bien pu multiplier pour en arriver là, je réponds tout de même à la blague, sur le même ton que lui. « Du chocolat noir trop amer, un reste de jus d’orange périmé et des retailles du cours de poterie qui traînaient dans mon atelier plein à rabord. » attendant qu’il fasse volte-face dans ma direction, j’éclate de rire, cassant de suite l’air sérieux et forcé que j’avais tenté de garder durant mon énumération erronée.
Suffit Ginny, un peu de sérieux, on a une créature vivante à sauver, là. Je me redresse, non sans une dernière caresse entre les oreilles, tout juste au raz les moustaches. Rejoignant Isy, passant à ses côtés pour m’installer dans son angle le temps de scruter à mon tour ce que lui-même regarde, mémorisant ses gestes pour m’assurer de les répéter le jour où je tuerai une plante à nouveau - parce que oui, ça risque d’arriver, personne n’en est surpris. « Le même engrais que celui qu’a utilisé Noah. » la vérité remonte, et à travers une pointe d’agacement qu’encore une fois mon gamin d’à peine 8 ans soit beaucoup plus apte à tout et n’importe quoi que sa dissipée et futile mère. L’infirmier me propose de boire aussi, un énième sourire naît sur mes lèvres de constater au même moment encore quelques perles d’eau couler le long du pot d’argile de mon pauvre plant sous respirateur artificiel. « Je peux faire du café? On risque d’en avoir pour longtemps, il est mal en point le pauvre. » mon rire perce le calme de la maison, maintenant qu’il me laisse doucement la place pour activer la machine, dégainer les tasses, lancer l’infusion d’un index dédié.
Évidemment, mes yeux se perdent sur les alentours, les meubles éparses qui attirent mon attention de par leur arrangement saugrenu et, je dois l’avouer, pas le moins du monde pratique. Je me suis bien cogné trois fois le petit orteil entre le hall et la cuisine, le danger guette. Il parle de décoration, je remarque avec attendrissement les dessins de Noah qui brillent dans sa diagonale. « Tu passes d'organisé et épuré à bordélique et éclectique? C’est la nouvelle tendance à la mode en Europe, c’est ça? » je caractérise, joueuse, avant de m’affairer à lui servir une tasse de café comme il l'aime, puis de prendre celle qu'il me sert à mon tour. « Ça va ? » comme toujours, le check up nécessaire, implicite, sur lequel on ne s’éternisait jamais très longtemps, mais qui nous confirmait à tous les deux à chaque fois si justement, l’autre allait. Circonstances atténuantes, déformations professionnelles, dommages collatéraux, choisissez la justification qui vous convient le mieux. « Ça va. Et toi? » j’attends patiemment sa réponse, prête à intervenir si nécessaire. Puis, c'est distraite que je note ce qui se trame un peu plus loin, à savoir l’attirail de peinture qui siège, intouché. Si son pouvoir de super-héros était de ramener les plantes à la vie, le mien, c’était clairement celui de barbouiller tout ce qui pouvait exister sur mon chemin d’une couleur et d’une autre. « Besoin d’aide? » une gorgée de café bouillant plus tard, c’est le retour du félin à mes pieds, lui qui se frotte avec insistance sur mes mollets. J’en viens à vouloir le saluer d’office ; réalise que je ne connais pas encore son nom. « Je crois qu’on n’a pas été officiellement présentés, tous les deux. » mon regard rieur se vrille à celui d’Isy, dans l’attente qu’il officialise les introductions.
Isaac Jensen
le coeur au bout des doigts
ÂGE : 34 ans (13.05.90) SURNOM : Isy STATUT : Penny est le soleil et l'amour de sa vie, l'évidence avec laquelle il écrit sa plus belle histoire et s'autorise à réaliser des rêves de bonheur (06.07.2021) MÉTIER : Infirmier au service des urgences, président de l'association Run for Judy, infirmier bénévole à la Croix Rouge et aux Flying Doctors, sapeur-pompier volontaire et surtout : papa comblé de Jude (13.09.2018), Maia (14.06.2022), Jack et Mila (01.08.2023) LOGEMENT : Penny et lui ont quitté Toowong en 2024 pour s'installer avec leurs enfants à Bayside et y créer leur cocon à l'image entière de leur amour POSTS : 28708 POINTS : 0
TW IN RP : dépression, anxiété, automutilation, idées suicidaires, tentative de suicide, mentions d'abandon d'enfant PETIT PLUS : Emménage à Brisbane en 2003 ∆ il exerce en qualité d'infirmier au st vincent's depuis 2006 puis est affecté aux urgences en 2013 ∆ une suite de blessures anéantit sa carrière de joueur de football australien en 2010 ∆ il attente à ses jours en mars 2018 et reprend le travail en septembre 2018 ∆ finaliste de ROA en 2020 ∆ il se soigne contre son anxio-dépression, après avoir longtemps refusé son diagnosticCODE COULEUR : Isy s'exprime en #9966ff ou slateblue RPs EN COURS :
And so, I thought I’d let you know that these things take forever. I especially am slow but I realize that I need you. This is the first day of my life. I’m glad I didn’t die before I met you. But now, I don’t care; I could go anywhere with you and I’d probably be happy.
Ginny se tient sur le seuil de ma porte, le soleil éclatant s'improvisant son halo. Mes pupilles passent de ses traits fins et ses cheveux remontés en une coiffure approximative autorisant la moindre mèche à se rebeller contre l'élastique à cheveux au pot recueillant un plant de betterave agonisant. Ses joyaux bruns filent de ma personne à l'animal agissant en véritable colon au sein de ma demeure. J'ignore les palpitations enthousiastes de mon cœur et contrecarre la méfiance de ma visite en réduisant l'attitude royaliste de mon animal de compagnie à un simple ego démesuré inoffensif. Je sollicite par la suite le relaie du végétal qui représente en termes de survie un défi attirant et de taille. « Il est tout à toi. Et probablement qu’il se réjouit que tu m’éloignes de lui, tu sais. Work your magic. » Un fin rire étire mes lèvres, mon regard détaille la racine, mes doigts constatent l'aridité de la terre dans laquelle il tente de prospérer. Intrigué, je questionne la jeune femme sur la nature des éléments qu'elle a pu additionner aux fragments de sol pour provoquer une descente vitale si fulgurante. Elle énumère avec sérieux du chocolat amer, du jus d'orange périmé, de la poterie et une fois mon air interloqué tout adressé à son égard, son rire cristallin emplit la pièce pour métamorphoser ce premier en fin sourire contre mes lippes. Je la laisse abandonner le félin qu'elle apprivoise à coups de caresses pour me rejoindre sur le comptoir où elle m'informe avoir suivi la même démarche que son fils visant à la prospérité du plant. J'ose un regard vers la jeune mère et devine que cette technique a été suivie à l'identique à quelques détails près et que les résultats des McGrath ne sont pas similaires. « On ne peut pas tous avoir la main verte, » je statue tendrement, hésitant tout de même à changer totalement la terre du pot au cas où quelques substances intruses s'y sont faufilées - éventuellement à l'insu - de l'artiste. Mon regard scintille dès son offre de lancer la cafetière, ma réponse instantanée annonçant sans merci que l'un de ses nombreux talents à mon sens est de réaliser un succulent café. « Oh oui, je veux bien, s'il-te-plaît. » J'étais convaincu que même avec les pires grains de café, mon interlocutrice était capable de produire une boisson exquise. Pour ma part, ma cafetière coulait des liquides plutôt aléatoires, mes attentes frisant le plancher en ce qui concernait mes compétences à produire ce besoin d'ébène qui m'était devenu si intense que seule la dose de caféine m'importait. J'accusais ma profession de soignant pour justifier cette facette, où tout ce qui ressemblait à du café s'absorbait sous n'importe quelle température, l'unique but recherché étant un gain d'énergie. Néanmoins, il n'en demeurait que le café de Ginny était incontournable comme salutaire et ne serait jamais refusé de ma personne.
Mon domicile redéfini est abordé, je déclare m'élancer dans un relooking intensif de mon lieu de résidence. En effet, le passage d'« organisé et épuré » à « bordélique et éclectique » décrit par ma compagnie ne pourrait pas être mieux présenté. Je ressentais ce besoin concret que tous les composants de ma maisonnée disposent de leur place attirée et s'y trouvent plus ou moins, tout en jouissant du caractère d'utile ou d'important émotionnellement, ce qui m'offrait en conséquence un lieu de vie rangé et peu fourni. Je pourrais à nouveau accuser mon métier qui impliquait l'aptitude à mettre la main sur un objet promptement ou savoir assez précisément où le dénicher, mais il serait peut-être judicieux d'apprendre à ne pas rejeter la faute de toutes mes manies sur l'exécution de mon gagne-pain. « J'avais envie de changement, » j'explique sobrement, balayant du regard le salon en chantier.
La désirable odeur du café vertueux procure à l'environnement une dose supplémentaire de bonheur, mêlée timidement au parfum envoûtant de Ginny dont je me lasse jamais. Les raisons du remue-ménage dans mon logement attendront. « Merci chef, » j'adresse, poli et taquin, en prenant la tasse bouillante ornée des coordonnées du magasin général de Laidley. Les teintes bleu ciel révèlent que mon interlocutrice a opté pour le contenant à l'effigie d'Anna, un des personnages Disney préférés de ma nièce. Je la questionne ensuite, attentif et attentionné, sur son état. Ce simple mais tonitruant « Ça va ? » qui fonde une sémantique singulière, dotée de nuances exclusives à Ginny. Les secondes emplies de sens défilent ; elle m'affirme aller avant de me retourner la question. La boisson réchauffe ma gorge, l'arôme réconforte mon âme dépendante. Les items s'allient pour mener à la conclusion que « Ça va aussi. »
« Besoin d’aide? » Mon regard curieux décrivent l'attitude artistique et enchantée de dévoiler la passion de la McGrath dans mon quotidien. « T'as décidé de me sauver du pétrin une nouvelle fois aujourd'hui ? » J'interroge, rhétorique, acceptant non verbalement et avec euphorie l'aide de la femme que j'appréciais et estimais tant. « Le café, la réno... » J'énumère, sourire aux lèvres, songeant fortement aux autres anecdotes que je chérirai sans fin dans ma mémoire. Je m'adosse au mur et observe le chaton se frotter avec insistance contre les mollets de Ginny, la bête ignorant encore tout de la maladresse de l'humaine ainsi que de la forte probabilité qu'il ait une patte ou sa queue écrasée malencontreusement et involontairement dans quelques minutes. La photographe me rappelle un nouveau manque à ma bienséance et armé de surprise et d'excuse, je réplique : « Ha ouais, hum, en fait... » Un rictus étire mes lèvres, qui se transforme brièvement en sourire maladroit. « Il a pas vraiment de nom, encore. » Mes lèvres se pincent et mes épaules se haussent, assumant totalement et tentant de banaliser ce fait. Au moins, je suis honnête ? « Je l'appelle pas vraiment... » Je continue. En effet, la créature est toujours à l'affût et m'espionne continuellement, la rechercher ou lui indiquer que le repas est servi est dérisoire dans son cas. « Il est super espiègle, toujours dans les parages et sait se faire comprendre. » Ces traits de caractère sont-ils réellement suffisants pour ne pas procurer un nom à cet être vivant ? Non. « Et hum... » Je continue, toujours plus d'argumentaire pour obtenir un verdict des plus tolérants de mon invitée. « Je sais pas s'il en a déjà un. Il est entré chez moi un soir et il revient tout le temps. Et il a pas de puce ni tatouage. Parce que j'ai quand même été au vétérinaire avec. » Je suis quelqu'un de responsable, ça devrait compter, non ? Ce qui pointe vers le chaton errant ou abandonné promptement. « J'avais pensé à Azraël, sinon... » Je soumets à approbation, incertain, l'influence des Schtroumpfs puissante chez les Jensen. « Joy voulait Pattenrond ou François. » La tasse est abandonnée sur le comptoir, mes mains se plongent dans mes poches comme pour m'aider à organiser mes propos. Mes yeux passent du chat à Ginny et je précise, sans doute inutilement : « Pour François Lepic, poil de carotte. » Les aléas d'avoir une nièce toujours le nez dans les bouquins.
Je reprends possession de ma boisson et poursuis sur les raisons qui m'ont motivé à modifier l'intérieur de ma maison : « En fait, j'me suis rendu compte que quand j'disais rentrer « chez moi », c'était pas tant le cas parce que je me reconnaissais plus trop dans ces murs, ou ils m'inspiraient plus vraiment le confort. » Les fantômes à chaque angle, les démons persistant dans les moindres détails du passé. Il m'était devenu indispensable d'offrir une renaissance à ma demeure, en adéquation avec celle à laquelle je me soumettais. « Mais si tu veux bien m'aider et si t'as des conseils niveau couleur ou agencement ou autre, je prends toute ton expertise à disposition avec grand plaisir et reconnaissance. Je me suis investi dans les meubles pour l'instant parce que je pense que c'est le domaine dans lequel je crains le moins et celui qui m'inspirait le plus mais je voulais aussi changer la toile de fond. »
Un regard et un autre, et de suite je me sens un brin trop curieuse. Lui poser la question me surprend moi-même dans l’élan de naturel qui comble le fait qu’il n’a pas de compte à me rendre, encore moins de justifications à me donner. Prête à rabattre la seconde suivante mes interrogations au profit d’une discussion axée sur son pensionnaire félin et que sur ça, Isy avance toutefois, beaucoup plus détendu que moi, me faisant réaliser qu’il n’y avait pas de mal, absolument rien d’intrusif, à être intriguée par l’état des lieux en pleine transformation. « J'avais envie de changement, » et j’hoche doucement la tête, plongeant mon regard une seconde et une autre au creux de ma tasse de café, comprenant parfaitement ce qu’il amène, ce qu’il veut dire. Les semaines passées à travailler sur notre maison, à la rendre comme on la voulait et rien que comme ça, prendre nos aises dans un environnement qu’on mettait enfin à notre goût, Noah et moi. Si les derniers mois pour Isy avaient été cumulatifs de changements en général, celui-là par contre semblait être parmi les bons, parmi ceux qui permettent de faire table rase, un canevas blanc et épuré où il fera bon tapisser ce qu’il veut vraiment, ce dont il a besoin, mettre tous les outils de son côté pour reprendre son quotidien un peu plus en main, ou du moins, s’en offrir les moyens pour. Il le mérite.
Sa tasse sur laquelle je lorgne parce qu’elle est un peu plus grande que la mienne, gamine jusqu’au bout des ongles, et les échanges sacrés censés nous assurer l’un l’autre que notre moral allait. C’est une ambiance tout en habituel qui se place, qui se trame, quand je finis par prendre appui sur le comptoir face à lui, laisser mes prunelles dériver vers la pièce de résistance et les quelques items trahissant son envie de ne pas que retaper quelques meubles, mais bien de jouer dans la couleur et la peinture, le relooking complet en somme. Je laisse un instant passer, un suivant, avant de demander s’il a besoin d’aide, avant de m’immiscer un peu plus non sans sentir son regard soutenu sur moi et ce sourire qui m’en provoque un autre d’emblée. « T'as décidé de me sauver du pétrin une nouvelle fois aujourd'hui ? Le café, la réno... » il énumère, j’éclate de rire, faussement humble et un « C’est mon jour de bonnes actions en fait. Demain, je prévois voler le dessert de Noah et couper le chemin de quelques voitures avec mon vélo. Question d’équilibrer mon karma un peu. » doublé d’un haussement d’épaule amusé plus tard. J’hoche tout de même de la tête de la positive, bien sûr que je suis là pour aider, que je sais faire que ça. Le félin à ma suite et son intérêt qui se manifeste à coups de moustaches chatouillant mes chevilles dévoilées, la question du nom qui remonte pour faire les choses bien et s’assurer qu’il ne s’offusque pas de me voir rester silencieuse devant ses grands yeux brillants qui grimpent jusqu’à mes iris. Il supplie probablement que je le laisse goûter à ce que contient la carafe de lait sortie mais pas touchée, connaissant ce coup d’œil gourmand qu’il échange, une fraction de minute trop longtemps pour ne pas m’arracher un sourire attendri.
« Je sais pas s'il en a déjà un. Il est entré chez moi un soir et il revient tout le temps. Et il a pas de puce ni tatouage. Parce que j'ai quand même été au vétérinaire avec. » Isy relate, avant de s’attaquer à la ribambelle de noms que Joy et lui ont apparemment décidé de lister dans l’optique de finaliser le chapitre baptême comme il faut. Je l’écoute avec attention, la tasse tournant distraitement entre mes paumes sans que je ne le réalise vraiment, non sans laisser aller un rire et un autre aux suggestions de sa nièce, à celles qu’il semble assumer de son côté. Un temps de réflexion additionné d’un froncement de sourcils voulu sérieux mais qui ne rend probablement pas l’effet escompté, je finis par ajouter, amusée. « J’aurais envie de te dire de mélanger tout ça pour en faire un énorme nom composé, mais je ne sais pas l’effet que ça donnera au final, ou même si vous arriverez à le nommer toujours dans l’ordre. » ce qui ajouterait probablement au fun, ce qui rendrait l’aventure bien plus marrante si on me demande. Mais mon sens de l’humour a toujours été douteux, et par chance Noah était assez souvent dans les parages pour me ramener à l’ordre si je nommais innocemment un chat ou un chien croisé sur notre route entre la maison et l’école avec des titres et des lords et des miladies à foison. « En fait, j'me suis rendu compte que quand j'disais rentrer « chez moi », c'était pas tant le cas parce que je me reconnaissais plus trop dans ces murs, ou ils m'inspiraient plus vraiment le confort. » le Jensen me ramène à l’ordre quand doucement les discours légers reviennent pointer de sa vérité. C’était bien ce que je pensais au final, et ce serait mentir que de dire que je ne suis pas rassurée d’avoir su lire derrière les motifs qui ont motivé les actions, les siennes. Et j’hoche doucement de la tête plus il s’ouvre, son regard qui précise tout ce qu’il ne dis pas, et les mots qu’il garde pour lui que je comprends sans qu’il ait vraiment besoin d’ajouter. « Mais si tu veux bien m'aider et si t'as des conseils niveau couleur ou agencement ou autre, je prends toute ton expertise à disposition avec grand plaisir et reconnaissance. Je me suis investi dans les meubles pour l'instant parce que je pense que c'est le domaine dans lequel je crains le moins et celui qui m'inspirait le plus mais je voulais aussi changer la toile de fond. » mon silence lui provoque une invitation à me plonger les mains dans ce qui se dessine ici, et je tente de lui confirmer dans mon mutisme que s’il a besoin à un moment ou un autre de se vider le cœur et la tête au même titre que les différents espaces qui comblent sa maison, je serais là, je bougerai pas. « Voyons voir ce que tu as déjà. » et je ne m’éternise que là où il m’autorise, avançant vers l’étalage de peinture, vers ce qu’il a accumulé, me penchant à la hauteur des pots et autres équipements pour voir un peu avec quoi il travaille.
C’est Ginny la rénovatrice coachée par Hassan qui parle, maintenant, pas l’artiste qui s’amuse à tracer ombrages et aquarelles jour après jour, dans le plus petit des détails. Mes doigts parcourent les outils, mes iris détaillent les couleurs. Je rapatrie certaines teintes ensembles, m’assure d’un bref coup d’œil par-dessus mon épaule que j’ai le droit de bouger les items, que je ne m’emballe pas trop, trop vite non plus. « Y’a moyen de rendre la pièce beaucoup plus lumineuse si tu y vas avec ce ton-là. » mon dévolu jeté sur un gris clair, un truc hyper passe-partout qui semble aller dans le sens des meubles qu’il travaille, le bois vernis à décaper, à vernir à nouveau. Un calcul mental et une image finale un peu plus claire plus tard et je réalise que je suis postée au sol depuis assez longtemps pour que Azraël-Pattenrond-François-poil-de-carotte-premier-du-nom se love dans le creux de mes jambes pliées à l’indienne. « J’ai des restes de blanc à l’atelier, du jaune aussi. On peut aller les chercher si tu veux, ça te permettrait de voir ça donne quoi, avec le soleil de fin d'après-midi et tout. » la boule de poil bien recroquevillée ronronne quand je lève les yeux vers Isy qui n’a pas bougé, toujours à mes côtés dans l’angle, lui tendant la main dans l’espoir qu’il rompe le calvaire de ma tasse de café laissée entre ses soins un peu plus tôt avant que je me métamorphose en designer d’intérieur approximative. « C’est la chambre de Joy quand elle vient? Tu as des plans d'envergure pour elle aussi? » que je remarque, alors qu’il se penche à mon intention, la porte entrouverte qui laisse voir une pièce aménagée assez confortablement pour accueillir la fillette lors de ses quelques visites annuelles dans le coin.
Isaac Jensen
le coeur au bout des doigts
ÂGE : 34 ans (13.05.90) SURNOM : Isy STATUT : Penny est le soleil et l'amour de sa vie, l'évidence avec laquelle il écrit sa plus belle histoire et s'autorise à réaliser des rêves de bonheur (06.07.2021) MÉTIER : Infirmier au service des urgences, président de l'association Run for Judy, infirmier bénévole à la Croix Rouge et aux Flying Doctors, sapeur-pompier volontaire et surtout : papa comblé de Jude (13.09.2018), Maia (14.06.2022), Jack et Mila (01.08.2023) LOGEMENT : Penny et lui ont quitté Toowong en 2024 pour s'installer avec leurs enfants à Bayside et y créer leur cocon à l'image entière de leur amour POSTS : 28708 POINTS : 0
TW IN RP : dépression, anxiété, automutilation, idées suicidaires, tentative de suicide, mentions d'abandon d'enfant PETIT PLUS : Emménage à Brisbane en 2003 ∆ il exerce en qualité d'infirmier au st vincent's depuis 2006 puis est affecté aux urgences en 2013 ∆ une suite de blessures anéantit sa carrière de joueur de football australien en 2010 ∆ il attente à ses jours en mars 2018 et reprend le travail en septembre 2018 ∆ finaliste de ROA en 2020 ∆ il se soigne contre son anxio-dépression, après avoir longtemps refusé son diagnosticCODE COULEUR : Isy s'exprime en #9966ff ou slateblue RPs EN COURS :
And so, I thought I’d let you know that these things take forever. I especially am slow but I realize that I need you. This is the first day of my life. I’m glad I didn’t die before I met you. But now, I don’t care; I could go anywhere with you and I’d probably be happy.
Ginny invoque imperturbablement cet aura salutaire. Sa présence s'apparente à un lever de soleil sur mon existence, elle parvient à amoindrir le volume des démons qui ruminent constamment dans ma tête, perpétuels acouphènes. Elle souligne l'importance des projets que j'établis silencieusement, inspirant espoir et validant un moyen-terme auquel je ne crois qu'à demi-mot. Elle aide et soutient, inlassablement, rien qu'en accompagnant les airs de mes journées, en parsemant mon quotidien des joyaux de son rire, des pétales de son doux regard.
Je l'indique sur un ton plaisantin, sa faculté à m'extirper du pétrin, sommer les pages de mon récit existentiel. Elle a toujours su dénicher les mots justes, elle possède un insatiable talent pour poser les actes pansant mes maux. La McGrath minimise sa rescousse en planifiant nuire à son karma et je menace gentiment : « Fais attention, si tu finis heurtée par une voiture, tu risques de tomber sur moi comme infirmier pour te soigner aux urgences. » En effet, je suis de garde demain, un service qui s'annonce à prolongation vu les congés et arrêts emmagasinés dans le service.
La conversation s'oriente vers le félin réfugié. Celui qui a su s'introduire dans ma maisonnée sans demander son reste, celui qui y fait ses marques jour après jour. Personne ne le réclame, ce qui me fend le cœur tout comme me réjouit, des liens se tissant déjà avec le compagnon rouquin. Néanmoins, le baptiser relève de la plus difficile des missions et je ris devant la proposition futée de mon interlocutrice. « En effet, il y a un risque de se planter dans l'ordre. Et puis, déjà que j'ai tendance à mélanger les prénoms de mes sœurs, imagine si ce chat en a plusieurs dans un ordre précis... » Je pose ma tasse sur le comptoir, songeur. « Cependant, on pourrait peut-être faire un mix de tout ça ? » Une sorte de medley à prénoms pour satisfaire tout le monde. C'est ce stratagème que nous avions déployé, Joy et moi, pour l'intitulé de notre compte géocaching. « D'ailleurs, ça me fait penser. C'est quoi ton pseudo geocaching ? Asking for a friend. » La malice animant mon regard annihile tout soupçon de mystère.
J'extrapole davantage mes projets d'envergure. Ceux que je n'ose vraiment confier qu'à Ginny, aussi flagrants puissent-ils paraître à toute approche de mon domicile. En effet, quelconque âme s'aventurant au #17 Toowong se douterait que je me lance dans des rénovations. Toutefois, je n'ai pas eu le courage de l'annoncer parce que cela implique beaucoup trop de promesses à mon sens et au leur. Déclarer à mes proches que je change l'allure de mon lieu de résidence implique que je vais de l'avant et surtout, que je vais mieux. Cela implique que j'essaie d'évoluer, que je suis sur la bonne voie pour, que je crois au futur, que j'en façonne un. Cela sous-entend que je n'ai pas le choix de réussir et que sombrer de nouveau m'est proscrit, puisque j'use de moyens drastiques pour me loger une suite. Annoncer un tel projet concret impliquerait beaucoup trop d'interprétations de certitudes aux yeux de mes amis quand je vis dans le conditionnel en permanence, quand je suis soumis à cette épée de Damoclès au-dessus de ma tête qui fait tinter mes idées noires sans relâche. Je ne suis pas prêt à supporter une telle pression ou à saisir un tel risque générateur d'un sentiment de culpabilité tranchant si je venais à faillir.
L'artiste s'anime, s'installe auprès des échantillons de peinture et divers nuanciers. Elle manie déjà de délicates associations, en forme certaines où je m'imagine déjà vivre, autant que cela me surprenne. « Y’a moyen de rendre la pièce beaucoup plus lumineuse si tu y vas avec ce ton-là. » L'expert tranche et je m'installe à ses côtés pour observer son jugement coloré. Le chat, quant à lui, ronronne déjà sur les cuisses de ma compagnie. « Pour le salon ou la cuisine ? » Je questionne, la jeune femme étant positionnée à la jointure des deux pièces. Je l'entends suggérer de premières expériences et bien que férocement intéressé, je confie sur un ton désolé : « Je te suis si tu en as l'envie et le temps mais je t'avoue que je suis pas fan d'avoir du blanc où je vis quand je vois que ça à l'hôpital. Lorsque j'ai acheté cette maison, tous les murs étaient blancs et comme tu vois, y'en a plus aucun de cette couleur. » J'avais été en effet déterminé à faire coupure entre ma vie privée et professionnelle, bien que j'adorais mon métier. Aujourd'hui, ironiquement, j'étais au stade où je devais faire une nouvelle section entre mon présent et mon passé au sein de ma vie personnelle.
Je suis le regard de Ginny qui s'attarde sur une pièce entrouverte, qu'elle soupçonne - avec raison - être attribuée à ma nièce. « Mh, ouais. Au début elle en avait une en haut, puis elle a déménagé en bas quand on a accueilli un premier enfant ici dans le cadre du métier de... » Je pose mon attention sur le minois de mon interlocutrice, précautionneux de ne pas commettre d'impair tant pour elle que pour moi. « De mon ex... Notre chambre était en haut et on avait plus confiance en l'indépendance de Joy que dans celle des enfants qu'on hébergeait. Puis Joy était pas constamment ici non plus, à l'époque. » Je m'installe de manière plus confortable sur le sol et reprends possession de ma tasse pour en vider le contenu d'une traite. « Ça va peut-être évoluer maintenant, je sais qu'elle était pas fan d'être en bas. Elle s'imaginait que s'il y avait des voleurs, ils passeraient dans sa chambre en premier vu sa localisation... » Je souris doucement et conclus : « Dans tous les cas, selon son choix, y'a des chances que sa chambre soit retapée. Celles en haut sont pas trop adaptées pour elle. » Je visualise l'étage et pense tout haut : « J'ai pas vraiment de quoi m'ennuyer. » Mais m'attaquer au niveau supérieur de la maison sera forcément plus douloureux que modifier celui où je me trouvais avec Ginny, ainsi, je préfère chasser les pensées de ces arrangements-là pour me concentrer sur ce dont je m'estime capable d'affronter. Une chose à la fois, un jour à la fois. Je lève les yeux vers la pendule puis constatant l'heure, je suggère : « Tu veux manger ici ? Y'a pas mal de take-out aux alentours. Et ça pourra être une manière pour moi de te remercier pour tes services. »
Et je m’amuse, mon regard qui maintenant survole ce qu’il a déjà, se surprend à prendre en considération certaines teintes, se rappelle de ce que les murs ont déjà l’air. J’additionne les tons, je fais des mélanges, je me retrouve à lui aménager mentalement sa demeure entière alors qu’il m’a seulement proposé de jeter un coup d’œil à ce qu’il avait en stock et même si je tente de retenir mon engouement face à des rénovations comme à tant d’autres activités artistiques, j’y arrive pas, pas du tout. Ma voix chante lorsque je propose, j’écoute attentivement lorsqu’il interroge. « Pour le salon ou la cuisine ? » « La cuisine, je pense. Le salon j’irais avec quelque chose d’un peu plus costaud. » et je joins la parole au geste en m’étirant de mon siège improvisé au sol pour lui ramener un sceau qu’il avait déjà lui-même choisi et ouvert, mais qui ne semblait pas avoir été utilisé sur aucun mur à proximité. La cuisine aurait tout à gagner à baigner dans du jaune, dans de l’ensoleillé, c’était même totalement logique à mes yeux – un peu de blanc rehaussant les portes et les cadrages. « Je te suis si tu en as l'envie et le temps mais je t'avoue que je suis pas fan d'avoir du blanc où je vis quand je vois que ça à l'hôpital. Lorsque j'ai acheté cette maison, tous les murs étaient blancs et comme tu vois, y'en a plus aucun de cette couleur. » la conversation qui s’emballe maintenant qu’il me fait part de ses choix, et docilement j’hoche de la tête, un sourire pas le moins du monde froissé qui orne mon visage l’instant qui suit. « Pas besoin de forcer trop de blanc non plus. Juste des détails, parfois, ça suffit. » mon épaule se hausse, j’insiste pas plus, c’est sa maison, c’est son univers, je préfère et de loin qu’il s’y sente bien et à l’aise, qu’il refasse un travail d’adaptation qui lui offrira un cocon de confort à son image plus que mérité.
Ma curiosité se laisse avoir par la facilité que j’ai d’évoluer aux côtés d’Isy. Si par habitude je retenais toujours mes mots et mes expressions, mes réactions et mes questionnements en présence de qui que ce soit d’autre, avec lui, j’avais appris doucement au fil des années que ça ne servait à rien de garder des silences forcés, d’entretenir des tabous de malaise. D’où ma question, d’où mon regard qui dérive vers ce que j’anticipe être la chambre de Joy lorsqu’elle le visite, de plus en plus souvent ces temps-ci d’ailleurs. « Mh, ouais. Au début elle en avait une en haut, puis elle a déménagé en bas quand on a accueilli un premier enfant ici dans le cadre du métier de... » il confirme, non sans s’interrompre dans ses mots. Je fais de suite le lien, me souviens de la brune qu’on a croisée au théâtre il y a une vie de ça on dirait, me replace sur mes mollets maintenant qu’il est posté à mes côtés au sol, lui faisant signe d’un regard qu’il peut continuer, que tout va, que tout est ok. « De mon ex... Notre chambre était en haut et on avait plus confiance en l'indépendance de Joy que dans celle des enfants qu'on hébergeait. Puis Joy était pas constamment ici non plus, à l'époque. » d’office, le projet pique mon intérêt. J’ignore s’il s’agit là volontairement d’une façon d’éviter de parler de ce qui fait passer un voile sur son regard autant que l’initiative en somme. Et je reprends, ma voix n’ayant pas changé d’un ton, mais mes iris toujours accrochés aux siens. « Je savais pas que vous hébergiez des enfants. Ça devait être tellement intense comme expérience. Tu… tu as gardé contact avec certains d’entre eux ? » là par contre Gin, t’aurais pu être un peu moins invasive, t’aurais pu te retenir un peu. Mon aisance avec Isy me rattrape, je secoue de la tête avec vigueur, me pince les lèvres entre-deux. « Pardon, je devrais pas demander ça. C’est délicat. » entre le secret des familles brisées et la déception que j’imagine difficile à passer lorsque l’un ou l’une d’entre eux finit par quitter le nid, être un foster care reste probablement le genre d’aventure que seuls les initiés peuvent comprendre. Et même si l’idée me plaît, et même si le concept me réchauffe le cœur, je n’ai pas le droit d’abuser de ses instants à lui sous prétexte que ça m’intéresse. « Ça va peut-être évoluer maintenant, je sais qu'elle était pas fan d'être en bas. Elle s'imaginait que s'il y avait des voleurs, ils passeraient dans sa chambre en premier vu sa localisation... » qu’il ramène Joy sur le sujet est parfait, et d’emblée, je rebondis sur ses mots, y additionnent les miens. « On peut lui aménager un système de cadenas – j’en avais un quand j’étais gamine, pour garder Matt et Jill de venir faire des mauvais coups dans ma chambre quand j’étais pas là. » et j’éclate de rire, le souvenir d’un grand frère et d’une grande sœur particulièrement terrifiants – et pleins de ressources pour m’embêter – remontant au fil des manigances. Si Joy souhaite avoir un minimum de calme et de tranquillité par contre, I’m her girl. « Je la laisserai même peindre le truc si elle veut, le mettre à son goût en plus. She’s gonna love it. » j’ai l’air d’une gamine prête à faire un méfait comme un autre – et je m’en réjouis déjà faut dire.
« J'ai pas vraiment de quoi m'ennuyer. » « Une étape à la fois, pas besoin de rien presser non plus. » il ne me faut pas longtemps pour attraper sa main, insister là-dessus, sur le « une étape à la fois ». Parce que je sens que ce n’est pas facile, parce qu’on ne fait pas exprès de tourner le couteau dans la plaie, parce qu’il n’y a que du beau qui s’en vient là, avec ses projets et son renouveau et son nouveau départ qui a le potentiel de n’être que du positif, rien d’autre que ça. : « Tu veux manger ici ? Y'a pas mal de take-out aux alentours. Et ça pourra être une manière pour moi de te remercier pour tes services. » le félin entend là un appel à la bouffe partagé je pense, alors qu’il s’extirpe de son sommeil précaire sur mes cuisses pour bondir à un mètre à peine de nous, ses prunelles perçantes qui scintillent de malice. « Deal. » mais je ne le vois pas le chaton, ou à peine, trop occupée à faire état de la panoplie de restaurants qui se trouvent dans son quartier, de la palette des menus dont il m’a déjà vantés les qualités, et de la liste mentale que je m’en suis faite, pitoyablement incapable de choisir. « Par contre, on va chercher le dîner à pied. J’ai tellement faim que je risque de tout commander sur le menu – faut ajouter un peu d’exercice à tout ça à travers. » un éclat de rire plus tard et je me redresse, lui tendant la main pour l’encourager à faire de même. Mon sac que je passe étonnamment sur mon épaule sans l’oublier ici comme tant d’autres fois avant, bénie d’un élan de lucidité qui nous permettra, une bonne heure plus tard, d’aboutir à l’atelier désert. Je pose les sacs de nourriture dûment achetée sur l’une des grandes tables à dessin, allume les lumières d’un geste automatique, l’invite à me suivre alors que je m’engouffre dans l’arrière-boutique. C’est là où on accumule avec les autres la plus grande partie des matériaux et des couleurs. Les fameux pots de peinture dont je lui parlais tout à l’heure qui prennent la poussière maintenant que les étudiants sont beaucoup plus fixés sur la poterie ces temps-ci.
« Tu ramènes des gars à l’atelier toi aussi ? » la voix d’Auden dans l’embrasure de la porte remonte jusqu’à nous. Évidemment qu’il est là, évidemment qu’il squatte, qu’il traîne dans le coin, qu’il nous détaille l’un après l’autre en laissant son regard sous forme de serres acérées résonner sur la silhouette d’un Isy qui est posté à ma gauche. « Le placard du fond est parfait si tu veux savoir. » je roule des yeux, pouffe un peu, habituée au personnage maintenant, et à ses ébats qu’il multiplie avec qui le veut bien, faisant tout de même très attention de ne pas toucher ni les murs ni les portes du fameux placard qu’il pointe avec moquerie du menton la seconde d’après. « Je pensais pouvoir continuer de te sauver de rencontrer Auden, but oh well. » à l’intention d’Isy, je chuchote à son oreille, avant de l’inviter à me suivre dans mes recherches, à ignorer l’autre qui lui, n’a pas du tout l’intention de quitter nos côtés.
Isaac Jensen
le coeur au bout des doigts
ÂGE : 34 ans (13.05.90) SURNOM : Isy STATUT : Penny est le soleil et l'amour de sa vie, l'évidence avec laquelle il écrit sa plus belle histoire et s'autorise à réaliser des rêves de bonheur (06.07.2021) MÉTIER : Infirmier au service des urgences, président de l'association Run for Judy, infirmier bénévole à la Croix Rouge et aux Flying Doctors, sapeur-pompier volontaire et surtout : papa comblé de Jude (13.09.2018), Maia (14.06.2022), Jack et Mila (01.08.2023) LOGEMENT : Penny et lui ont quitté Toowong en 2024 pour s'installer avec leurs enfants à Bayside et y créer leur cocon à l'image entière de leur amour POSTS : 28708 POINTS : 0
TW IN RP : dépression, anxiété, automutilation, idées suicidaires, tentative de suicide, mentions d'abandon d'enfant PETIT PLUS : Emménage à Brisbane en 2003 ∆ il exerce en qualité d'infirmier au st vincent's depuis 2006 puis est affecté aux urgences en 2013 ∆ une suite de blessures anéantit sa carrière de joueur de football australien en 2010 ∆ il attente à ses jours en mars 2018 et reprend le travail en septembre 2018 ∆ finaliste de ROA en 2020 ∆ il se soigne contre son anxio-dépression, après avoir longtemps refusé son diagnosticCODE COULEUR : Isy s'exprime en #9966ff ou slateblue RPs EN COURS :
And so, I thought I’d let you know that these things take forever. I especially am slow but I realize that I need you. This is the first day of my life. I’m glad I didn’t die before I met you. But now, I don’t care; I could go anywhere with you and I’d probably be happy.
Mes prunelles s’attardent à parcourir les fines lignes composant son délicat profil. Mes pupilles glissent le long de son nez droit, rebondissent sur les courbes de ses lippes rosées, roulent sur son menton subtil. Ses paupières masquent péniblement son regard passionné et imperturbable, faisant voleter de longs cils bruns ne trahissant en aucun cas sa concentration et se contentant de faire écho à quelques mèches rebelles qu’elle a machinalement glissées derrière une de ses oreilles. Je décroche difficilement mon regard de son portrait pour attirer mon attention sur les diverses coloris qu’elle suggère, les agencements et accompagnements qu’elle élabore avec indéniable goût. L’ignorant que je constitue l’interroge sur la pièce qu’elle perçoit gris clair et je l’écoute attentivement affubler la cuisine de ce chef d’accusation, le salon obtenant un verdict plus “costaud” pour sa part. Un sourire étire mes lippes, attendri et envoûté par cet engouement engageant.
Elle offre de premiers tests, je reste réticent à accabler de blanc mon domicile, couleur qui ferait insatiablement écho à mon lieu de travail à mon sens. Mesurée, Ginny m’explique que l’on peut faire dans le détail et je ne peux m’empêcher de rire doucement, me rendant compte que l’artiste m’accorde beaucoup trop de crédit à la décoration d’intérieur. « Mais tu sais, je suis ignare dans le domaine. J’ai même pas dépassé le niveau de savoir trouver des couleurs qui vont bien ensemble. Je frise la cause perdue, si je l’incarne pas. » Le sourire qui perdure sur mes lèvres rejette toute notion de fatalité sur cet impitoyable - mais basé sur le véridique - constat.
Puis, les perles noisettes de la belle s’interrompent sur une pièce dévoilée par sa porte entrouverte. S’en issue ma confirmation de la chambre de Joy, ornée de bribes de mon passé partagé grandement avec mon ex fiancée. Je lis promptement l’éclat d’intérêt dans les yeux de la McGrath, celui qui ne saisit pas entièrement la dimension d’endosser le rôle de famille d’accueil mais devine les contours de la balance pesant tantôt les difficultés, tantôt la notion de sens à une vie. « Je savais pas que vous hébergiez des enfants. Ça devait être tellement intense comme expérience. Tu… tu as gardé contact avec certains d’entre eux ? » Je baisse le regard et réfléchis silencieusement à la question, temps qui parut sans doute trop long pour la jeune mère qui se ravise avec quelques excuses. Indécis entre assouvir la curiosité de mon interlocutrice et terminer sur le sujet de la chambre de Joy, j’opte finalement pour conclure un thème à la fois et lui confie le caractère méfiant de ma nièce. Ce n’est que lorsqu’elle m’explique son stratagème enfantin que je réalise que la fillette et moi partagions cette tendance à imaginer les pires scénarios, car lorsque Ginny voit un bouclier à vie privée en installant un cadenas artisanal, je ne peux que m’empêcher galérer à avoir accès à l’enfant si jamais la maison prenait feu ou si elle faisait un malaise. Je soupire intérieurement et réalise le ridicule de mon instinct pour inviter à contrecoeur : « Oui, elle appréciera sûrement. » Sauf si son esprit flirte avec la visualisation du danger comme celui de son oncle, pense-je malgré tout. « T’étais dans une fratrie facétieuse ? » Je demande ensuite, curieux d’en savoir plus sur le milieu dans lequel l’australienne a grandit. Elle m’avait déjà évoqué Matt, Jill et même à de très rares reprises ses parents. J’avais aussi entendu parler de Bailey et Ezra. Mais ces individus que j’imaginais très importants dans la vie de la jeune mère étaient pâles face à l’adversité contre laquelle son fils militait. Ils apparaissaient à la volée dans les conversations, n’y prospérant jamais véritablement, soldats à diversion servant à apaiser les nerfs quelques minutes. Je n’avais jamais osé creuser sur la vie privée de Ginny, m’en donnant certainement pas le droit autant je pouvais en être curieux. Mais désormais que notre relation évoluait, je m’autorisais cette indiscrétion. Puis, j’avais toujours estimé intéressant de découvrir d’où venait quelqu’un et quel milieu l’avait vu croître.
Je me risque à songer à l’après. Aux rénovations qui pourraient suivre, celles qui annonceraient une métamorphose plus ou moins radicale de mon domicile. L’étage inférieur est le plus aisé à altérer : les pièces sont davantage impersonnelles bien que minées de souvenirs. Le haut est plus délicat, avec ces chambres et cette salle de bain inspirant une sphère personnelle brisée et des cauchemars persistants. « Une étape à la fois, pas besoin de rien presser non plus. » La jeune femme interprète mon silence, décrypte sans doute ce que mon regard égaré dévoile à défaut de mes mots. Un fin sourire poli étire mes lèvres en guise d’approbation. En effet, progresser une étape à la fois sans se perdre dans de nombreux objectifs me semble le plus prudent et judicieux. Ne rien presser est sage. C’est avec ce rythme lent et concentré que j’ai su évoluer durant cette année, que j’ai réappris à vivre avec mes choix, accepter leurs conséquences, tolérer les jeux de de la destinée. Une de mes pensées vogue à mon retour de l’hôpital dans ces murs qui m’étaient tant insupportables que je n’y restais pas seul. Et lorsqu’il m’avait fallu passer le cap de la solitude dans cette demeure à fantômes tyranniques et démons récalcitrants, je n’avais trouvé mieux que de m’épuiser assez à l’extérieur pour entrer totalement exténué et m’écrouler sur le canapé du salon. Progressivement, j’avais su me réapproprier les lieux et les supporter. A endurer les angles voilant les scènes du passé, les détails innocents rappelant sans merci des crèves-cœurs, les pièces abritant sournoisement des théâtres tranchants. J’avais petit à petit refait mes marques dans chaque salle de la maison, certaines demeurant toujours difficiles à pénétrer, d’autres invitant presque les contours d’une zone qui aspirait à être de confort et non d’hostilités générées par un schéma de paradis brisé.
J’inspire profondément courage et bifurque vers une invitation à manger. Laborieusement, je chasse la pénombre qui m’interpelle pour revenir au présent, me rattache aux iris d’une Ginny gourmande qui accepte sans problème de partager un repas en ma compagnie. Je ris devant sa négociation de faire un peu d’exercice pour compenser le repas qu’elle se prépare à engloutir et lui tends mon téléphone portable sur lequel s’ouvre une application des différents take-out disponibles à proximité. « Ça marche. » Puis nous quittons le recueil de nuances improvisé pour appréhender la brise automnale, les différents menus de restaurants défilant sur l’écran de mon smartphone agissant comme phare entre nos deux corps.
C’est à l’atelier que nous nous rendons, provisions en main. Je plisse légèrement les yeux quand Ginny allume toutes les lumières du lieu promptement, beaucoup trop d’informations me parvenant simultanément. A chaque fois que je mettais les pieds ici, j’avais le sentiment d’entrer dans un berceau à créations totalement différent. Tout changeait constamment, l’art évoluait incessamment et rapidement. C’était passionnant et captivant, mais je n’avais pas l’opportunité de m’adapter à nouveau aux oeuvres dispersées dans la grande salle que l’artiste m’encourageait à la rejoindre dans l’arrière-boutique. Je lui emboîtais le pas puis l’observais graviter autour de seaux de peinture, quand une voix masculine s’immisça dans notre duo. Je portais mon attention derechef à la silhouette inconnue qui n’avait manifestement aucunement désamorcé Ginny. J’en déduisais qu’il devait être un co-artiste, muni d’une personnalité jurant avec celle de la peintre qui n’avait jamais tenu de propos graveleux devant moi du plus loin que je m’en rappelais. Un délicat sourire amusé s’invita sur mon visage en observant les deux jeunes gens interagir. « Je pensais pouvoir continuer de te sauver de rencontrer Auden, but oh well. » « Yo. » Je lui adresse, détaché, suivant du regard une Ginny qui fuit la présence de son hypothétique partenaire. Auden disparaît soudainement de mon champs de vision et n’étant pas davantage intrigué par les errements du brun, je réponds tardivement : « Pour répondre à ta question, sur cinq ans, on a eu quatre enfants dont deux étaient des bébés. Pas en même temps, je te rassure. Je vois parfois les deux plus vieux, mais c’est pas super fréquent. » Je ne les oubliais pas, cependant, ces petits aux histoires déjà bien trop compliquées. « C’est sûr que c’était intense, mais ils valaient toutes les peines. Et aux dernières nouvelles, ça a bien tourné pour chacun d’entre eux. » Notre patience et nos nerfs avaient été mis à rudes épreuves à de multiples reprises mais pour rien au monde je ne dénigrais ces enfants ou cette expérience. Leur offrir ce tremplin ou cette pause avec Chloe avait été inestimable. Puis, de par sa profession, mon ex suivait leur progression dans la vie, ce qui permettait de garder un œil sur ces mineurs si jamais un nuage sombre venait s’approcher un peu trop de leur quotidien. Je n’avais certes plus de lien avec Chloe et donc peu d’information sur l’évolution de ces enfants, mais j’étais persuadé que mon ex fiancée maintenait sa mission de veiller sur eux - d’assez loin pour leur permettre de bâtir leur vie, mais d’assez proche pour intervenir en cas de danger. « Tu as trouvé ton bonheur ? » Je demande ensuite, étudiant ma compagnie dévisager quelques seaux de peinture et autres matériels, remarquant qu’Auden agit en réalité en véritable guet vis-à-vis de notre duo.
Mes ruses le font froncer des sourcils, mon idée de cadenas semble le laisser pantois un peu. Et je pouffe de le voir s’inquiéter, tenter de rendre le tout un peu plus doux à mon oreille, sachant très bien qu’il joue à l’adulte de nous deux, et qu’en bout de ligne ça n’a rien de mal du tout. « T’étais dans une fratrie facétieuse ? » qu’il reprend brièvement après, alors que je réalise que de mon côté, il n’a entendu que quelques parts de ma vie, d’eux, de ma famille. Matt qui était persona non grata pendant un long moment à l’hôpital, Jill qui n’était qu’un coup de vent depuis ma naissance, Levi qui venait à peine de mettre le pied à Brisbane – je m’installe donc un peu plus confortablement, prête à lui relater les frasques de ma famille non sans sentir un sourire amusé couronner mes lèvres. « Pas nécessairement… mais Matt a toujours eu un humour douteux. Et Jill beaucoup de temps libre. Levi agissait parfois comme bouclier, mais à d’autres moments par contre il se rangeait dans l’équipe la plus fun. » et ça, c’était bien souvent mes aînés, sans surprise. Je n’étais pas la gamine accessible par excellence, encore moins celle qui avait des amis à la tonne jadis. Même encore aujourd’hui, je garde mes distances, prends mon temps, apprivoise les gens qui se greffent à mon quotidien pendant un long moment avant de leur accorder ma confiance. Pas le moindrement du monde sauvage ; juste parfaitement capable de vivre seule, sans personne, d’où mon besoin d’approuver pleinement qui que ce soit devient plus proche qu’une simple connaissance. « J’ai appris à développer mes ressources, à force. » ces mêmes ressources qui avaient validé sa présence à mes côtés il y avait très longtemps déjà. Qui expliquaient pourquoi je me sentais si à l’aise avec lui, pourquoi les silences n’existaient pas, pourquoi il savait tout, et que je ne m’en inquiétais même pas. Et un sourire un autre, il a l’excellente (la terrible) idée de me proposer d’aller chercher quelque chose à manger aux alentours.
Un détour à l’atelier pour les besoins de la cause, je l’entraîne vers le débarras, Auden qui traîne ici après les heures de travail pour une sombre raison que je ne lui ferai jamais plaisir à l’égo de le questionner à propos de. Isy qui allonge la nuque d’intérêt quand l’artiste vient se poster dans notre périphérie, son Yo qui me fait hausser le sourcil, attendrie, amusée un peu aussi. Il tâte, il prend le pouls, il a déjà entendu parler du spécimen, il gère la réaction d’avance. « Yo. C’est qui lui ? » Auden rétorque sur les mêmes mots que le Jensen, d’abord son regard vissé vers lui, puis sa tête qui se tourne vers moi. Le plaisir du jour restera de l’ignorer complètement quand je lui fais dos, et poursuis, attentive, l’écoute de l’exposé d’un Isy qui reprend sur le sujet que j’aurais cru bon pour les oubliettes. Il relance et je ne le lâche pas des yeux, soulagée sans même le réaliser qu’on reste encore et toujours sur cette même longueur d’ondes, celle où les questions trouvent toujours leurs réponses, celles où on ne se sent pas mal de dire quelque chose de peur que l’autre juge. « Pour répondre à ta question, sur cinq ans, on a eu quatre enfants dont deux étaient des bébés. Pas en même temps, je te rassure. Je vois parfois les deux plus vieux, mais c’est pas super fréquent. C’est sûr que c’était intense, mais ils valaient toutes les peines. Et aux dernières nouvelles, ça a bien tourné pour chacun d’entre eux. » « Ils ont eu de la chance de vous avoir aux moments où ils en avaient besoin. C’est fou comme c’est juste une question de timing, parfois tout est bien aligné, et à d’autres moments… » et j’allais poursuivre, j’allais profiter des quelques détails qu’il amenait pour peaufiner ce que je savais déjà, ce qui m’intéressait tellement. La famille à bâtir, leur confiance à reconstruire, tout un univers à mettre en place pour eux, de la sécurité, du beau, du doux. Mais Auden a décidé de ficher ses grosses pattes bien graisseuses dans nos provisions, et il se régale presque à distance maintenant que j’entends les emballages grincer sous ses attaques, que j’ignore la question d’Isy au passage. Un coup d’œil désolé à l’intention de l’infirmier, et je presse le pas vers mon collègue. « Non ?! Des samosas épicés ? Vous auriez pas dû. » mes doigts agiles 13,68464% du temps arrivent par miracle à subtiliser le sac qu’il a entre les paumes, mon « Dégage. » pas du tout poli, mais pas plus menaçant, qui rebondit sur la bouffe qu’il a réussi à voler et dont il se rempli les joues en esquivant vers l’arrière. « C’était un plaisir de passer un moment de qualité avec vous deux. » il est sorti de l’atelier quand je grogne, il éclate de rire quand je tourne dos à la porte, m’affaire à valider qu’il n’a pas trop piller nos plats préférés. « Tu couvres pour moi demain matin, j’ai pas prévu rentrer tôt. » mon soupir résonne, il rigole de plus belle. « Isy, tes collègues sont définitivement plus cools que les miens. » « J’ai entendu ! » « C’était voulu ! » ses clés tintent, la grande porte grince, il a enfin quitté l’immeuble pour de bon.
J’inspire longuement avant de retourner au plan initial, laissant maintenant les victuailles entre les mains d’Isy en qui j’ai totalement confiance. « Mon bonheur est juste là. » du menton, je pointe le premier sceau vers lequel je me dirige, le dégageant de l’établi d’un geste. « Et ici aussi. » prise deux, je porte mon dévolu sur un doublé de couleurs, tout en bas du mur que j’agrippe avec entrain pour le rapatrier à ses pieds. « Et sur cette étagère-là, hyper facile à atteindre, attends un peu que je… » j’énumère, regardant devant, fronçant les sourcils la seconde d’après en calculant d’où et de comment j’arriverai à aller chercher le tout si haut sans vraiment me risquer une cheville, un bras, une jambe, ma dignité… « … oh. » l’instant d’après, c’est le vacarme qui suit, tout tombe, mes rires à travers qui font office de cacophonie un brin plus rassurante que l’état des lieux.
Isaac Jensen
le coeur au bout des doigts
ÂGE : 34 ans (13.05.90) SURNOM : Isy STATUT : Penny est le soleil et l'amour de sa vie, l'évidence avec laquelle il écrit sa plus belle histoire et s'autorise à réaliser des rêves de bonheur (06.07.2021) MÉTIER : Infirmier au service des urgences, président de l'association Run for Judy, infirmier bénévole à la Croix Rouge et aux Flying Doctors, sapeur-pompier volontaire et surtout : papa comblé de Jude (13.09.2018), Maia (14.06.2022), Jack et Mila (01.08.2023) LOGEMENT : Penny et lui ont quitté Toowong en 2024 pour s'installer avec leurs enfants à Bayside et y créer leur cocon à l'image entière de leur amour POSTS : 28708 POINTS : 0
TW IN RP : dépression, anxiété, automutilation, idées suicidaires, tentative de suicide, mentions d'abandon d'enfant PETIT PLUS : Emménage à Brisbane en 2003 ∆ il exerce en qualité d'infirmier au st vincent's depuis 2006 puis est affecté aux urgences en 2013 ∆ une suite de blessures anéantit sa carrière de joueur de football australien en 2010 ∆ il attente à ses jours en mars 2018 et reprend le travail en septembre 2018 ∆ finaliste de ROA en 2020 ∆ il se soigne contre son anxio-dépression, après avoir longtemps refusé son diagnosticCODE COULEUR : Isy s'exprime en #9966ff ou slateblue RPs EN COURS :
And so, I thought I’d let you know that these things take forever. I especially am slow but I realize that I need you. This is the first day of my life. I’m glad I didn’t die before I met you. But now, I don’t care; I could go anywhere with you and I’d probably be happy.
Je l’écoute avec attention relater des péripéties familiales, me dessiner davantage les couleurs de son passé, celles auxquelles je n’aurais jamais l’honneur de contribuer, celui-ci étant scellé à tout jamais. Alors, faute de chemins croisés antérieurs, je m’imagine les différents scénarii, les teintes qui ont érigé la femme que j’aime désormais. J’élabore secrètement, silencieusement, quelques images et tirades, me risquant à imaginer un Matt et une Ginny plus jeunes et accorder des visages aux deux autres protagonistes inconnus : Levi et Jill. « T’aurais aimé que ce soit différent ? » je m’enquis, l’homme qui se noie toujours un peu trop dans le conditionnel, qui dispose du vice à percevoir la vie comme un effet papillon magistral : un simple battement d’aile pour décoller une âme vers des circonstances diamétralement opposées. « J’ai appris à développer mes ressources, à force. » Ginny expose. Je hoche la tête à l’affirmative, éprouvant nulle problématique à la croire sur parole. En effet, la jeune mère qui se tient devant moi est une personne forte et indépendante qui sait appréhender l’avenir et maîtriser les fantômes de son passé. Elle s’est, à mon sens, déployée un véritable attirail dotés d’outils pour contrer, apaiser, accepter, apprivoiser toutes les embûches que la Providence se distraira à semer sur sa route.
Nous nous rendons à l’atelier munis de vivres alléchantes. Les sachets en papier brun déposés sur une paillasse, mes pupilles ricochent sur les multiples démonstrations d’âmes, de sentiments, de vérités, d’unicités. L’un des créatures de la place apparaît sournoisement, je note à peine sa prière de présentation. Sans se concerter, c’est une ignorance impeccable qui est offerte à Auden tandis que je réponds en décalé à l’une des interrogations de la McGrath ; celle qui portait sur des fibres de mon antan. La peintre décrit l’hébergement de ces jeunes dans mon foyer comme une fortune, mesure le pouvoir du temps qui précipite les destins. Puis, tel un chat de goutière, son collègue artiste est chassé de notre souper, le ton catégorique et interdit de Ginny atteignant des tons que je ne lui connaissais pas, pour ultimement quitter les lieux dans un remarquable théâtre d’insolence. Je ris discrètement à leurs dernières répliques, précautionneux de m’attirer les foudres d’aucun parti. « Ça fait combien de temps que vous vous connaissez ? » J’interroge, curieux de déterminer à quel niveau relève cette joviale complicité.
Je récupère notre commande, réoriente les projets vers la peinture avant que nous ne soyons condamnés à manger froid - ou de l’air si Auden revenait aussi affamé que stratège. Un sceau est rapatrié, suivi d’un autre ; à peine ai-je le temps d’esquisser un geste pour venir en aide à une Ginny aux ambitions d’atteinte téméraire, c’est le contenu d’une étagère qui rebondit à nos pieds. J’attire la jeune femme vers moi pour lui éviter des maux et m’entends m’inquiéter spontanément : « Ça va ? » Je constate l’étendue des dégâts, décris : « On dirait un peu une scène de crime. » Je contourne une flaque de peinture et convie au début d’un jeu créatif : « Tu vois quoi, dans cette forme-là ? » Je me penche et altère la flaque avec mes doigts. « Avec ça en plus, ça me fait penser à un flamand rose. Enfin, plus jaune que rose. Mais tu saisis l’idée. » Je penche ma tête pour changer d’angle de vue et arpente la toile improvisée. « Et ici, le schtroumpf coquet. Tu vois sa fleur, là. » Je hausse les épaules après avoir formé un halo au-dessus d’une zone recouverte par de la peinture, me rendant compte que mon imaginaire est franchement axé sur l’enfantin. « Tu veux manger ici ou chez moi ? » J’anticipe à savoir sous quel rythme le nettoyage devra être apporté à ce sol huileux. Je me rapproche de la silhouette féminine, profitant d’un moment d’inattention de sa part pour dessiner deux traits perpendiculaires sur sa joue. « Et ici, une aborigène guerrière. »
« Ca fait combien de temps que vous vous connaissez ? » Isy attrape mon regard qui suit les restes de la silhouette d’Auden quittant l’atelier. « Trop longtemps. » que je soupire, d’emblée. Auden était le genre de créature qui était imbuvable 95% du temps, et qui avait, parfois, un 5% capable de justifier tout le reste. C’étaient souvent ses œuvres, ses toiles, son talent ridiculement décuplé qui le rendait si imposant à mes yeux. Puis il disait une connerie, puis il redevenait le mec imbu de lui-même aux remarques cruelles et méchantes et déplacées et misanthropes, et on repartait sur du neutre. Me remettant au travail à poursuivre la recherche de ce qui pourrait convenir aux travaux du Jensen, j’explique à travers mes mouvements aussi maladroits que déterminés les bases de notre relation. « Il était chargé de cours du temps où j’étudiais à l’Académie. Impitoyable. Il m’a laissée tranquille pendant quelques années, avant qu’on s’associe tous les trois avec Dannie pour avoir l’atelier et la galerie. Depuis, on se tolère. » sur papier c’était une amitié, j’imagine, qui s’était développée depuis tout ce temps. Mais comme avec Auden l'ensemble était relatif selon son taux de beauferie de jour en jour, le tout restait bien chambralant.
N’ayant pas particulièrement envie de poursuivre la conversation en parlant du peintre que j’ai déjà à côtoyer tous les jours depuis des mois, c’est en mission kamikaze que je me propulse volontairement, n’attendant l’aide de personne – alors que j’aurais visiblement dû – lorsque je tente de grimper vers l’étagère où l’objet de mon désir se trouve. La cacophonie qui accompagne la grande dégringolade ressemble à un boucan ingérable, et si Isy ne m’avait pas dégagée de la zone de turbulences j’aurais probablement eu quelques ecchymoses au petit matin. Des nouvelles, on s’entend. J’ai toujours les marques du chevalet que je me suis pris en pleine cuisse la veille, et de l’embrasure de la porte qui m’a heurté – aheum – le front de plein fouet lundi dernier. D’où la frange particulièrement centrée ces derniers jours. « Ca va ? » il plonge son regard dans le mien et ç’aurait presque pu être romantique à souhait comme sauvetage, si on n’entendait pas en bruit de fond l’un des galons de peinture qui se déverse sur le pauvre plancher de béton qui n’a clairement rien demandé et mérité de tel. « J’ai étonnamment survécu. » ce que je finis toujours par me dire à chaque nouvelle frasque que je provoque, à chaque nouvelle gaffe à mon palmarès. Bon joueur, Isy décide de se moquer du résultat de mon mess, le sourire qui creuse une fossette dans ses joues. « On dirait un peu une scène de crime. » en effet – ou juste un endroit où vraisemblablement, Ginny McGrath est passée. « Tu vois quoi, dans cette forme-là ? » sérieux, il se retrouve au niveau du sol, jouant avec les couleurs, fronçant les sourcils pour accentuer la réflexion forcée. « Avec ça en plus, ça me fait penser à un flamand rose. Enfin, plus jaune que rose. Mais tu saisis l’idée. » « Un canard alors? Avec de très, très longues jambes. » que je propose, venant à mon tour à sa hauteur, penchant mon visage vers la tache au sol qui risque de déteindre si on ne la nettoie pas dans les prochaines minutes. « Et ici, le schtroumpf coquet. Tu vois sa fleur, là. » un long, un très long moment que je passe à arquer la nuque, à plisser du nez, essayant de voir dans quel angle il imagine le tout, avant de repérer direct la forme plus haute, celle qui donne tous les angles au dessin aléatoire. « Ah ça je vois! You’re good at this! »
S’il se lève finalement pour constater l’étendue du massacre, je finis par faire de même, prête à évoquer mon plan de match aka trouver sur Ebay une nouvelle carpette qui saura recouvrir le crime sans que personne ne s’en rende compte au petit matin. Ou juste passer la serpillère pendant une heure ou deux. C’est selon. « Tu veux manger ici ou chez moi ? » il me distrait en parlant de nourriture, mon coup d’œil s’illumine direct, mon appétit s’enflamme aussi. « Entre ici et chez toi? Je sens que le chemin sera fatal pour les réserves qu’il nous reste. » soyons honnêtes pendant un instant. Affamée, je contemple de plus en plus l’idée du tapis de sauvetage, trop intensément apparemment, puisque je ne vois pas Isy qui s’approche. Je ne le remarque qu’à la dernière minute, quand il s’assure, malicieux, de m’improviser un maquillage de guerre avec les restes de mon carnage. « Et ici, une aborigène guerrière. » mes joues colorées s’ajoutent au sourire qu’arbore mon visage, avant que je me poste sur la pointe des pieds pour déposer mes lèvres sur les siennes une seconde, et frotter mon visage contre le sien quatre de plus. Juste le temps de barbouiller à son tour ses pommettes et son nez au passage. « Deux aborigènes. »