Joseph & Savannah

Rencontre du 3e type

Aujourd'hui était un jour un peu particulier. Pour la première fois depuis mon retour ici, j'allais avoir l'opportunité de me retrouver seule avec Mathis durant plusieurs heures. Un moment qui n'aurait probablement pas été à l'ordre du jour si vite si James n'avait pas accepté ce nouveau poste de représentant régionale pour la fondation Beauregard. Nous étions parvenus à mettre quelque peu nos différents de côté, pour le bien de Mathis. Si nous avions du mal à nous entendre parfois, il semblait indéniable que nous devions faire des efforts pour tenter de resserrer les liens, et de nous comporter comme une véritable famille. Ce n'était pas facile tous les jours, j'avais parfois du mal à savoir me comporter et trouver ma place, mais je tentais de me montrer patiente, je n'avais guère le choix finalement. Si ce moment rien que tous les deux m'omnibulait depuis bien trop longtemps, j'en gardais cependant une certaine appréhension. Allais-je être à la hauteur? Etais-je assez responsable pour que l'on me confie un enfant de trois ans? Beaucoup de question qui parvenait à me faire douter sur mes capacité sà être une bonne mère. Mais contre toute attente, James était parvenu à me rassurer lorsque j'étais venu chercher Mathis, m'assurant que tout se passerait bien. Je lui avais fais confiance, parce que malgré les années et cette douloureuse rupture, il avait toujours su se montrer bienveillant, et encore plus lorsqu'il s'agissait du bien de Mathis. L'avantage avec un enfant de trois ans, c'est que les discussions sont des plus légères et très régulières....Je n'ai pas l'impression qu'il soit mal à l'aise. Il faut dire que nous nous arrangeons pour que je le vois au moins une fois par semaine, pour s'assurer que le lien se crée réellement entre nous.

L'arrivée au parc se déroule sans encombre. Mathis reprend rapidement les habitudes qu'il a pu avoir chaque fois qu'il est venu avec James dans ce dernier, et s'empresse de retrouver l'air de jeux, sous mon regard attendri. Je m’octroie quelques secondes pour savourer ce moment, pour réaliser réellement ce qui est entrain de se passer. J'y suis arrivée.....Avec toutes les concessions et le temps que ca a demandé, je peux enfin savourer d'un moment rien qu'avec mon fils, je ne peux pas éprouver plus grande fierté là tout de suite.Après quelques glissades, je propose à Mathis une bonne glace, sachant grâce aux dires précédents de James, qu'il s'agisse de son petit péché gourmand. Le parfum est vite choisi, nous partageons ce goût pour la pistache. "Okay...Surtout tu éviteras de dire à ton père que c'est la deuxième glace que tu manges aujourd'hui" lançais-je, sachant pertinemment que je pourrais récolter quelques remarques désobligeante de la part de ce dernier. "Viens viens" me lance t-il alors qu'il souhaite avancer. Je le suis, n'ayant pas vraiment le choix que de m'accorder à cette petite boule d'énergie qui ne tient pas en place. "Attends Mathis ne va pas si vite" le rappelais-je à l'ordre alors qu'il sautille en avant, me laissant quelque peu sur la touche. Il s'arrête soudainement à hauteur d'un banc, sur lequel un jeune homme se trouve assit. Il le fixe, oubliant même de poursuivre la dégustation de sa glace. Je m'approche assez rapidement, gardant un oeil méfiant sur ce qui se passe. "Mathis, allez viens" dis-je alors que le petit bonhomme semble une fois de plus focalisé sur cet homme. Il ne parvient pas à s'en détacher, provoquant une certaine gêne. "Je suis désolée, il est de nature un peu curieuse" avouais-je pour sa défense. J'attrape la main du garçon pour tenter de lui faire reprendre la marche. "Tu veux ma glace?"Okay, là ca devenait clairement gênant...

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Rencontre du 3e type

Cette journée était particulière à mes yeux. Moi qui avait si souvent désiré que ce moment se déroule un jour, je ressentais une certaine appréhension maintenant qu'il s'offrait à moi. J'avais mis près de deux ans à travailler sur moi-même et ma capacité à être une mère à la hauteur, je ne revendiquais que récemment fièrement ce statut d'ailleurs. Mais là face à enfant qui n'avait pas idée de qui j'étais réellement et ce que j'avais fais, je parvenais presque à paniquer, guetté par ce manque de confiance en moi qui a été fortement alimenter par James, qui, bien que sous la colère et la rancune, avait remis en doute ma capacité à savoir tenir ce rôle. Ma volonté de bien faire les choses me pousse à lui céder presque tout, ce qui est tout aussi ridicule en soit, et que je réalise bien assez vite alors qu'il ne tient pas en place, me forçant à devoir tenir une cadence démesurée pour une femme de mon âge. Je découvre cependant à travers ce moment en sa compagnie , quelques expressions faciales ou des attraits physiques qui ne sont pas s'en rappeler James, ou encore ma propre personne, et ca me fait un petit quelque chose. Une chose est sûre, James est parvenu à élever cet enfant avec brio quand je vois qui il est là, et ce, malgré mon absence et les dégâts causés par cette dernière.

Ce petit bonhomme va cependant me surprendre en s'arrêtant devant cet homme et en l’observant fixement. Si je lui accorde un bref instant pour qu'il détourne l'attention de lui même, je suis forcée de constater que l'homme en question lui semble finalement bien intéressant. Je reste dans un premier temps en retrait, incapable de savoir si je dois intervenir, bien que cela relève simplement d'une curiosité enfantine, complètement innocente. Le petit garçon ne prend pas le temps de lui répondre, réalisant un instant que le liquide sa glace vient peu à peu à couler le long de de main. Il n'y accordera qu'une petite attention, préférant observer Joseph, à qui il trouve probablement un visage attachant. "- C’n’est rien. À c’t’âge, on a toute la Terre à explorer. C’est seulement plus tard qu’on s’rend compte qu’on s’ra longtemps coincé au même endroit." Je souris doucement. "Il risque malheureusement de vite le réaliser" avouais-je non sans une certaine nostalgie. Je pense pour ma part avoir vite récolté la réelle et juste perception de la vie. Mathis profite du moment pour partager sa glace, et probablement fuir les dégâts qu'il occasionne par sa lenteur de dégustation. "- Non, j’préfère chocolat. " Mathis hausse les épaules, s’accommodant après un moment de déception de cette réponse ."Moi aussi j'aime bien" avoue t-il en s'adonnant de nouveau à dévorer cette glace. "- J’imagine qu’t’es sa mère, vous avez les mêmes yeux. Y’a pas école à c’t’heure ?" James me l'avait déjà dit, mais l'entendre de la bouche d'un inconnu rend cela encore plus véridique, Mathis a effectivement hérité de mon regard. Il n'empêche que ce statut de "mère" était encore difficile à avouer, surtout devant Mathis, que nous tentions de protéger en y allant progressivement durant cette phase de rapprochement que nous avions lancé depuis plusieurs mois. Je souris, hochant négativement de la tête. "Non... Il fera sa rentrée prochainement". précisais-je avant de désigner la place vacante à ses côtés sur ce banc. "Je peux?"Je souris légèrement. "Moi c'est Savannah". ajoutais-je finalement, consciente que Mathis ne partirait pas de si tôt d'ici. "Et moi c'est Mathis!" lance t-il avec une mine des plus enjouées.

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C'était plutôt étrange comme situation. Bien que James parvenait à me laisser me faire une place auprès de Mathis, je semblais encore avoir du mal à la déterminer réellement. Le statut de "mère" n'était pas encore réellement défini, il restait pour le moment sous silence, le but étant d'y aller en douceur avec ce bambin. Il m'était cependant difficile de pouvoir contenir tout cet amour et toute cette affection que j'avais accumulé en moi depuis si longtemps, je ne devais cependant pas le brusquer ou émettre un réel changement qui le pousserait à se poser des questions. Il a beau avoir 3 ans, il observe et comprend probablement qu'un changement s'opère. Je fais cependant de mon mieux pour imposer ma présence. Je n'ai pas toujours l'impression d'être la maman idéale, d'autant que les caprices sont souvent effacés par un besoin irrépressible d'effacer mon absence , de me faire pardonner, mais je fais de mon mieux. Je ne peux cependant pas partager mes craintes avec James, qui lui semble avoir endossé le rôle du père avec une telle facilité, il m'accorde déjà avec une certaine méfiance cette confiance, lui confier mes doutes concernant ma façon de procéder pourrait remettre en doute ma capacité à vouloir me faire une place, à me montrer forte et invincible. Je n'ai pas le droit à l'erreur. Et encore moins aujourd'hui alors que j'ai enfin l'occasion de partager un moment seul à seul avec le petit bonhomme. J'ai la sensation de maîtriser à peu près la situation, -je l'espère en tout cas-, mais les enfants sont imprévisibles, et Mathis va finalement me mettre dans une situation quelque peu embarrassante en décidant d'interrompre le moment de solitude du jeune homme. Je suis incapable de savoir comment réagir, et Mathis semble s'amuser de la situation, comme si le but était d'en arriver là. Heureusement pour moi, cet homme en question se montre plutôt sociable et compréhensif. "- Ah bon. J’suis toujours aussi nul pour deviner l’âge des gosses, alors." Je souris doucement. Pour dire vrai, je n'aurais peut être pas été plus capable que lui si on m'avait posé la question il y a près d'un an, mais je n'avais eu d'autre choix que de m'y intéresser. "C'est pas toujours facile" avouais-je pour sa défense alors que mon regard scrupte Mathis qui semble faire des dégâts avec son péché mignon. Il ne semble pas pour autant prêt à lever le camp, d'où la raison pour laquelle je demande à Joseph pour pouvoir m'installer à ses côtés. "- Ouais, ouais ! Pas d’problème, vas-y. " Je m’assoies, mes coudes viennent prendre appui sur mes jambes, prête à réagir en cas d'incident imminent. J'en profite pour communiquer mon prénom à mon compagnon du moment, quitte à faire connaissance, autant le faire en bonne et due forme. "- Jo." Je l'observe, assez curieuse, et ne peux m'empêcher lui demander. "C'est un surnom?" C'était souvent le cas, et cela cachait assez souvent un prénom qu'on aimait pas, pour diverse raison. J'avais eu l'occasion de le constater avec ma soeur, qui avait passé 3 ans de sa vie à vouloir en changer. "- C’est cool, Savannah. Ça fait sauvage, exotique. Tu dois avoir une sacrée personnalité. " Je ne peux retenir un rire face à la façon dont il le ressent. "C'est ce que je dégage?" demandais-je sans me départir de mon sourire. Je m'efforce cependant d'y réfléchir pour lui apporter cette réponse. "Disons que j'ai un caractère assez affirmé." Je n'étais pas du genre à me laisser faire, j'avais cette confiance naturelle en moi, il n'empêche que je doutais régulièrement de mes choix ou de moi, et que ça ne rendait pas la vie facile. Joseph paraissait bien plus sociable que moi, plus facile à vivre. Je n'étais pas du genre à me résoudre à l'apparence, mais il dégageait un sentiment positif. Mais j'étais parfois assez nul pour percevoir réellement les gens alors...Peut être me trompais-je. Quoiqu'il en soit, je laissais toujours le bénéfice du doute. Mathis a cependant hérité de ma curiosité légendaire puisque je le vois tenter de mettre ses mains sur le sac de Jo qui ne tarde pas à réagir, le plus discrètement possible. "Mathis" le rappelais-je à l'ordre sans pour autant hausser le ton. Mon regard se perd sur ce dernier qui semble vouloir déchiffrer à travers s'il peut se risquer à tenter à nouveau par la suite." - Il a l’habitude d’être si familier avec les inconnus ?" Mon regard se plisse. "Je n'sais pas trop..." Je réalise cependant que Mathis se trouve assez près de moi pour entendre notre discussion. "Nous nous sommes retrouvés il y a pas si longtemps" avouais-je hésitante en croisant le regard de James. "C'est une longue histoire" précisais-je en grimaçant, faisant remarquer par cette moue le malaise que représente la présence du jeune garçon pour pouvoir en dire. "et...Tu fais quoi dans la vie?"

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Rencontre du 3e type

La rencontre était plutôt surprenante. Je mettais tellement d'énergie à vouloir bien faire les choses avec Mathis que j'avais tendance à en oublier ce qui se passait autour de moi, ou les gens que je venais à croiser. Mais Mathis venait de changer la donne. Je ne sais pour quelle raison, il avait trouvé agréable de passer un peu de temps à distraire le jeune homme, qui heureusement pour nous se montrait plutôt sociable et bienveillant, malgré un comportement parfois curieux et sans filtre de ce petit bonhomme. Il me ressemblait sur certains points finalement... Je me devais d'oublier ce stress permanent qui m'habitait dès lorsque nous sortions tous les deux en public. La peur de le perdre de vue, qu'il se blesse, ou encore de faire face à un éventuel caprice qui me mettrait dans une situation bien embarrassante. Mais je pouvais m'estimer heureuse, jusqu'à présent, Mathis se montrait plutôt tolérant avec moi. Peut être n'avait t-il pas encore compris que j'étais vulnérable et qu'il pourrait facilement me malmener pour me faire payer mon absence durant les deux premières années de sa vie? "- Ouais. C’est le diminutif de Joseph. J’aime pas trop me présenter comme un Saint. J’en suis pas un." Cette simple phrase aurait pu me laisser perplexe et me pousser à couper court à cette discussion, et pourtant, elle fait naître en moi une certaine curiosité. Je n'ai jamais été du genre à me fier aux premières impressions, au contraire, j'ai toujours fonctionné avec l'instinct. Ce dernier ne m'a pas toujours amené au bon endroit, mais il prime avant tout lorsqu’il s'agit de faire un choix. Je lui donne donc le bénéfice du doute. "Qui peut prétendre en être un?" Demandais-je, pour tenter peut être de nuancer ses propos. Moi même, je n'avais pas un parcours sans faute, bien au contraire, faut t-il rappeler toutes mes erreurs du passé, dont celle d'avoir encore du sang sur les mains? Il semble tenter de cerner mon personnage, alors que je m'amuse un instant de cela. Il faut dire que je fais exactement la même chose, c'est donc amusant que je sois concernée cette fois. La curiosité innocente de mon fils
va m'efforcer à aborder un sujet que je n'avais pas pensé évoquer, surtout pas avec un homme que je croise pour la première fois. "- J’imagine que c’est un sujet qu’tu préfères ne pas aborder. Encore moins avec un mec qu’tu viens à peine de rencontrer." Je plisse doucement les yeux, tentant de dissimiler au travers un sourire la légère gêne que ça occasionne. "Disons juste que c'est peut être pas le bon moment pour le faire" avouais-je en indiquant d'un simple regard la présence de Mathis qui ne nous accorde que peu d’intérêt. Il faut dire que la situation avait été assez complexe, et elle était encore actuellement quelque peu périlleuse. J'ai débarqué dans sa vie il y a maintenant un an, tentant de trouver ma place vainement auprès de lui. Il nous avait fallu pas mal de moi à James et moi pour nous mettre d'accord sur la façon d'amorcer les choses auprès de Mathis, de m'attribuer à ses yeux ce rôle de mère que j'avais manqué bien trop longtemps. Et je ne voulais pas le lui rappeler en évoquant ce sujet avec Jo. Je préfère nous lancer sur un sujet un peu moins personnel mais qui pourrait nous en dire plus sur l'autre. "- Rien d’exceptionnel. J’fais des sandwichs. J’ai honnêtement rien de plus palpitant à raconter à propos d’ça. Et toi ? Attends, laisse-moi deviner." Je souris, attendant qu'il vienne à deviner me concernant. " Tu travailles dans le marketing. Quelque chose comme ça ! J’ai raison ? " J'ai à peine le temps d'ouvrir la bouche que Mathis se charge d'y répondre. "- Ma maman elle fait des dessins !" Je ne peux retenir un large sourire. Ce simple nom parvenait à me soulever le coeur chaque fois qu'il osait le prononcer, et je constatais qu'il n'avait pas oublier les détails que j'avais pu lui apporter à mon sujet, comme mon travail. Il avait eu l'occasion de se rendre d'ailleurs dans les bureaux il y a quelques semaines afin de mieux assimiler ce que je faisais. Et tout ce qu'il avait retenu, c'est ce que je pouvais dessiner, et que j'avais aussi un distributeur à confiserie à disposition dans la salle de pause. Je souris, accordant mon attention à Joseph alors que je viens à préciser d'avantage mes fonctions. "Je suis graphiste dans une agence... Mais je suis parfois amené à travailler avec des responsables marketing,... tu n'étais pas si loin" fis-je remarquer pour l'en féliciter. Mathis semble fier de m'avoir devancé. Je l'observe un instant avec un regard admiratif avant de me tourner à nouveau vers Joseph. "Tu sembles avoir une certaine aisance avec les enfants, tu ne souhaites pas en avoir? Enfin... Peut être tu n'as pas encore rencontré la personne idéale pour ça" réalisais-je, un peu gênée. A notre âge, nous avions toujours tendance à mettre les gens dans les cases, et je me rendais compte que c'est exactement ce que je venais de faire avec cet homme, bien que je détestais qu'on le fasse pour moi, comme si nous étions forcés de suivre un plan de vie déjà tout tracé. Mariage, achat de la maison, enfant...

Joseph & Savannah

Rencontre du 3e type

C'est bien la première fois que je dois me statuer au rand de mère auprès d'un inconnu, tentant de rentrer dans ce rôle dans lequel je ne me sens pas toujours à l'aise. Non pas parce que je n'ai pas l'instinct maternelle, mais parce qu'il m'est difficile de me positionner comme tel après une telle absence auprès de Mathis. Les choses se passent pourtant bien jusqu'à présent. Mathis ne comprend peut être pas encore réellement cette erreur que j'ai pu commettre, ou peut qu'il est encore bien assez jeune pour vouloir se venger, mais je m'estime chanceuse qu'il me laisse entrer dans sa vie, moi qui est pourtant tout fait pour le sortir de la mienne dès lorsqu'il a souhaiter découvrir la vie, la vraie. Joseph n'a peut être pas idée du monstre que je suis, il n'imagine pas une seule seconde que le visage angélique que j'arbore malgré moi cache pourtant une fragilité qui m'a poussé à commettre pas mal d'erreur, et qui m'a fait faire face à ce drame qui restera à tout jamais gravé en moi. Je ne sais pas si c'est ce passé que je traîne, mais j'ai appris à être tolérante envers les autres, à ne pas les juger. Qui suis-je pour pouvoir le faire?

Mon métier vient à être évoqué, et je suis forcée de constater que Joseph détient une intuition hors paire, étant presque parvenu à deviner l'intitulé exact. « Content d’savoir qu’mon flaire n’est pas complètement hors service. » Je souris, lui adressant une légère mou pour montrer mon épatement du moment.« Responsable graphiste, alors. C’est cool.» Je bascule la tête d'un côté puis de l'autre, n'ayant malheureusement pas cette prétention. 'Hum non graphiste tout court. J'espère un jour pouvoir devenir directrice artistique, mais pour le moment je me contente de ce poste, et ça me va très bien." La boîte que j'occupais recrutait malheureusement bien trop de personne dans mon cas pour pouvoir un jour espérer atteindre ce poste, et l'attitude parfois ambigüe de mon patron pourrait vite me forcer à vouloir exprimer ma créativité ailleurs. Mais pour le moment, c'est ce qui me permettait de m'en sortir, et c'était suffisant. "C’est possible que j’aie d’jà vu ton travail ? Dans une publicité ou un truc comme ça ?" Je hoche doucement de la tête. "C'est pas impossible...Le panneau actuel à l'entrée de la ville est de moi" avouais-je fièrement avant de devoir préciser. "Une pub' pour les appareils auditifs". Ca vendait pas du rêve, mais ca avait cependant le mérite d'exister. J'observe Mathis, qui semble se battre avec cette glace qui lui donne bien du fil à retordre et lui met une certaine pression à venir ramasser avec sa langue les gouttes qui pourraient rapidement rejoindre le sol, parvenant à susciter chez lui un défi qui provoquera une sorte de rire, sincère et définitivement communicatif. La facilité que semble avoir Joseph avec mon fils me pousse à lui demander s'il en a lui même. Il semble si à l'aise, que je ne peux croire le contraire. « Non, j’ai pas trouvé la personne, et je ne pense pas partir à sa recherche. » Je fronce doucement les sourcils, interloquée par ces quelques mots. "Je peux te demander pourquoi?" C'était peut être déplacé, mais j'étais assez curieuse pour vouloir me heurter à une réponse.

« Mais, merci d’penser que j’m’y prends pas trop mal, ça veut dire que j’ai pas la gueule d’un tueur. » J'ouvre la bouche, inspirant doucement en plissant les yeux pour tenter de lui faire remarquer que ces mots n'étaient peut être pas adapter. Malgré un humour certain, Mathis était malheureusement assez grand pour vouloir en comprendre la signification.« Désolé, j’ai un humour plutôt noir, j’devrais pas dire des trucs comme ça devant un gosse. Tu lui nettoieras les oreilles ce soir. » Je grimace, retenant un rire qui ne sera pas libéré tan que je n'aurais pas la certitude que c'est passé outre l'attention de mon petit trésor. « Non j’ai pas envie de me laver ! Je suis même pas sale. Tu me laveras pas, hein, maman ? » Je ne peux retenir un rire cette fois-ci, remarquant cependant la rigidité soudaine du contact que Mathis provoque avec Joseph. "Et bien, j'imagine que papa s'en chargera...Tu t'en souviens, je te raccompagne chez lui après?" Le visage de Mathis semble se lancer dans une réflexion ultime. "Mais tu vas rester avec nous?" Je grimace, redoutant toujours ce genre de question de sa part. "Ma main vient caresser le haut de sa tête. "Une prochaine fois peut être". Ma réponse ne semble pas le satisfaire mais il hausse innocemment les épaules, tentant de passer outre. Ses mains se lèvent, indiquant la fin de la dégustation mais surtout les dégâts causés par la glace. "Viens par ici, on va te nettoyer tout ça... et Voilà!" indiquais-je après avoir jeter la lingette qui aura servi à venir à bout du désagrément. Mathis fini par s'éloigner quelques mètres plus loin, s'installant sur un jeu en bois. Mon regard se tourne vers Joseph, et se baisse naturellement sur le pantalon qui a malheureusement été touché par la maladresse de Mathis. "J'suis désolée." annonçais-je en lui tendant une lingette, léger sourire sur les lèvres pour tenter de le pardonner. "Hmm...Son père et moi ne sommes plus ensemble. Je n'assume ce rôle de mère que depuis un an...Je suis passée par une mauvaise phase durant ma grossesse" expliquais-je, profitant de l'éloignement du bambin pour qu'il y voit plus clair.

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Cette rencontre assez surprenante parvient à atténuer un instant la pression que je ressens par la présence de Mathis. J'ai toujours cette volonté de bien faire, et cette dernière m'empêche presque de savourer l'instant présent. J'ai cette peur de mal faire, de ne pas avoir le bon comportement, de le décevoir, et ces moments sont quelque peu gâché par ce besoin de tout maîtrisé. Mais pour le coup, c'est plutôt le petit garçon qui mène la danse, et je n'aurais pas imaginé une seule seconde qu'elle puisse m'amener à discuter avec un inconnu de ma vie actuelle, du moins, pas dans un moment où la garde m'est accordée. Ca me permet cependant de reprendre cette notion de réalité, et je pense même que Mathis apprécie qu'il ne soit plus forcement au centre de l'attention. « Oh, désolé. Juste graphiste, alors. J’voudrais t’dire que t’as probablement l’talent pour devenir directrice artistique mais j’mentirais parce que j’ai pas vu tes réalisations. » J'apprécie sa façon de parler, et sans plus attendre un sourire amusé prend possession de mes lèvres. "C'est pas faux. Mais merci quand même pour cette attention." Il n'avait effectivement aucun élément pour pouvoir juger, et je doutais réellement de mes capacités, à l'heure actuelle, pour prétendre à un tel statut. "J'espère pouvoir le devenir un jour, mais ce n'est pas d'actualité. "Oui, pour ca faudrait t-il déjà que je me décide à quitter cette plate forme ou une vingtaine de personne cherchent à atteindre ce même but avec une évolution quasi impossible dans cette structure. La situation amoureuse de Joseph est alors évoquée, et elle m'interpelle sans plus attendre quand à son célibat mais surtout cette volonté de le rester. . « J’sais pas. Pas l’temps, pas envie. J’ai p’t’être peur de l’échec, aussi. Y’a si peu d’couples qui fonctionnent réellement et j’pense pas que j’pourrais supporter de m’faire briser l’cœur. » Une phrase qui pourrait malheureusement correspondre à tout le monde, qui n'a jamais eu peur de souffrir en s'ouvrant finalement à l'autre. "Oui je comprends...Qui n'a pas peur de ça?" demandais-je sans en attendre la réponse. Mon regard croise le sien. "Après....Si j'avais pensé ainsi il y a quelques années, je ne serais surement pas ici, dans un parc, en compagnie de mon fils". Je hausse les épaules, soulignant que la souffrance pouvait tout de même être contrebalancé par le bonheur que d'être parent, entre autre. Les échanges que je partage avec Mathis me forcent à lever le voile sur ma personne. J'ai beau donner l'image d'une femme confiante, sourire, et apparemment sans problème, il n'en est rien. Je suis loin d'être si innocente qu'on puisse penser malheureusement. J'aimerais pouvoir prétendre à la vie parfaite, mais j'en suis encore loin, et je doute encore régulièrement sur la façon dont la mener pour l'atteindre. La maladresse de Mathis aura malheureusement laissé une trace, me laissant dans une confusion certaine. "Je...euh, je pourrais peut être le laver si tu veux." proposais-je pour tenter de me rattraper, sachant pertinemment qu'une simple lingette ne suffira pas à effacer cette vilaine tâche. L'éloignement de Mathis va me permettre de lui expliquer clairement la situation, qui est loin d'être à mon avantage. Il aura probablement un regard différent sur moi, mais j'imagine que je dois pouvoir assumer et supporter les critiques ou les avis sur le sujet. Je n'avais cependant envisager que cet homme à mes côtés puisse s'intéresser à l'histoire. « Une mauvaise phase ? Qu’est-ce qu’il s’est passé pour que t’en arrives là ? » Ma bouche s'entrouvre sans qu'aucun son ne parvienne à en sortir. Je ne pense pas avoir la force suffisante pour parler de ça sur un banc, comme si j'évoquais le dernier film passé à la tv la veille. Je baisse le visage, dégageant une mèche derrière mon oreille. "Eh bien...Une perte autour de moi qui aura suffit à changer à tout jamais ma vie" Ce n'était pas totalement vrai, mais ca parviendrait à justifier cet acte abominable de l'époque."Ca a été dur de me relever, mais je le fais....pour lui" précisais-je en observant cette petite tête brune un peu plus loin.

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Je n'aurais jamais pensé partager un moment comme celui-ci avec un inconnu dans un parc auparavant. La femme que j'avais pu être par le passé n'avait plus rien à voir avec celle qui se tenait présentement à côté du jeune homme. Ma remise en question après mon départ de l'Italie m'avait permis de m'ouvrir aux autres, de me montrer plus souple et plus sensible à ces personnes que je n'avais pas pour habitude de cottoyer. J'avais appris que les meilleures rencontres n'étaient pas les plus prévisible, et étrangement, Joseph faisait naître à nouveau ce sentiment en moi. Tout semblait nous opposer, considérablement, mais ca rendait cet échange encore plus authentique. Je ne cherchais pas à l'impressionner ou dissimuler mes erreurs, j'appréciais juste me retrouver à échanger de façon libérer sur ma vie de façon générale. Bien souvent, ces quelques aveux parviennent à susciter des questions, ou encore des conseils sur la façon dont j'ai géré ma vie jusqu'à présent. La plupart des remarques sont généralement fondées, c'est sûrement ce qui m'a poussé dans mes retranchements dernièrement, alors j'ai appris à dire, uniquement ce que les gens étaient prêt à entendre, sans que cela ne vienne entacher l'opinion qu'ils puissent avoir de moi. La trentenaire que je suis devrait pourtant être désormais posée, tant sur le plan professionnel que personnel, et je semble pourtant en perpétuel mouvement sur ces deux horizons. Joseph semble d'ailleurs fuir d'avantage ce parcours de vie qui semble nous être imposé, comme s'il cherchait à se contenter de ce qu'il avait, et ce qu'il lui semblait suffisant. J'en suis presque admirative, j'aimerais pouvoir hausser les épaules en me disant que ma vie est bien ainsi, forcée de constater que je cours pourtant après un idéal bien loin d'être le mien. Et voilà que je me retrouve presque à avoir ce genre de discours auprès de cet homme. « Non, mais tu serais peut-être à quelque part d’aussi bien. J’dis pas que ton fils ne t’apporte pas de bonheur, mais un choix implique le sacrifice d’un autre. Mais t’as probablement raison : pour plusieurs, élever un enfant c’est c’qu’il y a de plus honorable. J’imagine que c’n’est pas faux si autant d’gens rêvent d’avoir des gosses. » Je souris doucement. "On a pas forcément besoin de ça pour trouver le bonheur, j'imagine que tout ça est propre à chacun. Pour ma part, il m'aura fallu quand même plusieurs années avant de réaliser que c'était exactement ce dont j'avais besoin."

Le sujet le plus épineux vient cependant se faufiler, profitant de l'éloignement du petit garçon. Mon regard se perd un instant dans celui de Joseph, sachant pertinemment que ce que je pourrais dire parviendrait à changer l'opinion qu'il a de moi. Très peu de personne connaissent le récit de ce cauchemar que j'ai vécu plusieurs année auparavant, et voilà que je m'apprête à le livrer à un parfait inconnu, au beau milieu d'un parc. Je souhaiterai trouver une échappatoire pour m'épargner cette confession, et Mathis va s'en charger en revenant à ma hauteur. "Maman on y va?" ma bouche s’entrouvre avant de laisser apparaître un léger sourire. "Je...J'ferais mieux d'y aller, son père ne va pas tarder à la récupérer." annonçais-je en me levant du banc. J'observe de nouveau le jeune homme. "Joseph, ce fût un plaisir." Je pesais mes mots. Malgré une vie aux apparences bien différentes, ce moment passé dans le parc en sa compagnie m'avait permis de me changer les idées, plutôt que de me focaliser sur Mathis, qui avait surtout besoin d'un moment pour s'amuser librement. "Peut-être à un de ces jours" lançais-je accompagné d'un signe de la main, cette dernière venant finalement se glisser dans celle du jeune garçon. "Salut Joseph" s'exclame ce dernier avec une voix enjouée.