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 alfie + like i've been there before

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Message(#)alfie + like i've been there before EmptyMer 13 Mar 2019 - 13:08

LIKE I'VE BEEN THERE BEFORE
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Les réveils très matinaux n'avaient rien de très plaisant. Il faisait encore nuit, tout le reste du quartier dormait encore, rien ne stimulait véritablement l'organisme après que le portable ait annoncé, par une musique relativement douce, qu'il était temps de se lever et d'aller travailler. Mais ce n'était sans sursauté que Norah s'éveilla. Ses paupières s'étaient doucement. Elle fut prise d'un pincement au coeur lorsqu'elle constatait qu'aucune tête ne se reposait sur l'oreiller voisin. Pendant une demi-seconde, elle espérait qu'il soit encore en vie, et il ne lui fallait pas plus longtemps pour se rappeler que cela faisait plus de deux ans qu'il n'y avait eu personne à côté d'elle contre qui elle pouvait se blottir avant de se motiver pour se lever et commencer sa journée. Non, les draps étaient froids, sentant encore la lessive fraîche. Il n'y avait là ni l'odeur de Frank, ni sa chaleur. Il y avait des matins qui étaient plus difficiles que d'autres et celui-ci n'avait rien de très plaisant. A pas feutré afin de ne pas réveiller ses enfants, Norah se dirigeait vers la salle de bain. De nombreuses mèches rebelles s'étaient extirpées de sa tresse bien en bataille. Elle passait un peu d'eau fraîche sur son visage, histoire de se réveiller. S'en suivit les habitudes matinales. Prendre le petit déjeuner, réveiller les petits pour les ramener chez la nounou ensuite et aller au travail. Pas de réanimation aujourd'hui, on avait besoin de Norah aux urgences. Bien qu'elle aimait se rendre à différents services, ce jour-là, elle n'aurait pas été contre être dans son secteur à elle, le domaine dans lequel elle excellait le plus. Elle n'avait pas envie d'être embêtée, ni de se montrer trop sociale. Juste faire son travail, et rentrer à la maison. Malgré tout, elle fit un rapide crocher par la pédiatrie pour voir si Yasmine était également du matin. Pas de chance, elle n'était pas là. La blonde se rendit donc ensuite aux urgences. Comme d'habitude, il y avait les vraies urgences, et celles qui étaient un peu moins vraies. Une bonne partie était surtout de la bobologie pour les hypochondriaques du dimanche. Norah ne s'était pas gênée pour lever les yeux au ciel quand l'un d'eux avait osé demandé un arrêt de travail alors qu'il s'était coupé le bras avec un couteau. Ce n'était même pas une entaille profonde, il n'y avait pas eu besoin de points de suture. "Tous les prétextes sont bons pour ne pas aller travailler, c'est ça ?" avait dit Norah en arquant un sourcil alors qu'elle terminait de faire son pansement. Le patient s'en est vu offusqué et Norah ne s'était pas gênée pour lui répondre que le jour où il se cassera une jambe ou fera un infarctus, là, oui, il pourrait songer à être en arrêt pendant une certaine durée. Au moins, il ne manquait pas d'audace, s'était-elle dit après en avoir fini avec lui, en consultant les dossiers de patient qui venaient d'arriver. La chute d'une personne âgée qui risquait fortement d'avoir une fracture du bassin, des douleurs thoraciques, des prises en charge psychiatriques... Il y avait de quoi faire. "Eh, Leckie !" dit une de ses collègues des urgences, afin d'avoir son attention. "Celui-là, c'est pour toi!" Norah était doté d'encore de bons réflexes, vu la manière dont elle avait réussi à rattraper le dossier qu'elle lui avait envoyé depuis sa place assise. La blonde regarda à qui appartenait ce dossier médical particulièrement bien fourni, pendant que sa collègue lui fit un coup d'épaule amical. "A croire qu'il le fait exprès." dit-elle d'un ton las. "Si ça se trouve, c'est juste un prétexte pour venir te voir." Norah arqua un sourcil. "Mais bien sûr." soupira-t-elle, agacée, mais amusée par cette supposition. "Eh, on sait jamais, hein ! T'as peut-être une touche!" dit-elle en levant les mains, pour prouver son innocence. Norah secoua négativement la tête et se dirigea dans le box dans lequel Alfie se trouvait alors qu'elle entendait encore sa collègue en rire derrière elle. Il fallait avouer que voir son ami, même en de telles circonstances, avait de quoi redonner un peu le sourire à Norah. Elle fermait la porte derrière elle. "Je trouve que mon fils est un sacré casse-cou, mais toi, quand même, c'est un level au-dessus." dit-elle avec un léger sourire, sur le ton de la plaisanterie. C'était comme si elle retrouvait un ami. Une personne qui fut un jour son patient, qui avait été là pour elle pendant son deuil, et Norah le lui avait bien rendu quand il avait perdu un proche. Une complicité d'abord professionnelle, pour connaître ensuite un léger débordement. On l'avait déjà reprise à ce sujet, mais il semblerait que ce soit tombé dans l'oreille d'un sourd vu que tout collègue confondu avait le chic pour refiler le dossier à Norah dès qu'il arrivait aux urgences. "Mon fils est un sacré casse-cou lui aussi. Ou plutôt, disons, qu'il fait pas vraiment attention à ce qu'il fait. Heureusement, il a la tête bien dure. Mais tu le surpasses, et de loin."  dit-elle, bien amusée. Elle ne serait pas franchement surprise qu'il finisse comme Alfie, cela dit. Aidan, son fils, ne s'était encore rien cassé, c'est qu'il était plutôt solide. Beaucoup d'hématomes et de bobos qui peuvent être guéris à l'aide d'un baiser magique. On pouvait dire que Norah n'était même plus surprise de le voir tomber par terre sans raison de façon de quotidienne. "Qu'est-ce qui t'amène ?" finit-elle par lui demander après avoir posé son dossier médical sur le plan de travail qui longeait l'un des murs de la petite pièce. Il serait peut-être plus juste de lui demander ce qu'il pouvait encore avoir bien fait. C'était d'ailleurs ce que se demandait les soignants du service, vu les yeux qui roulaient au ciel rien qu'en le voyant débarquer. Certains avaient un abonnement aux urgences justifiées et lui en faisaient partie, vraisemblablement. Norah, quant à elle, était plutôt heureuse de le voir débarquer ici, bien qu'elle préférerait le voir en d'autres circonstances. Ce début de journée avait été particulièrement difficile pour elle, et croiser le chemin d'une personne qui avait été d'un soutien sans faille ne pouvait que lui mettre du baume au coeur.
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Message(#)alfie + like i've been there before EmptyLun 1 Avr 2019 - 15:40


NORAH & ALFIE ⊹⊹⊹ No one could ever know me, No one could ever see me. Seems you're the only one who knows What it's like to be me. Someone to face the day with, Make it through all the rest with.

Sagement (oui, c’est possible) assis sur le lit du box où on l’a placé en attendant que quelqu’un soit disponible pour le prendre en charge – ce qui allait probablement mettre du temps compte tenu des véritables urgences autour de lui et à condition que le personnel médical du jour ne se découvre pas un plaisir sadique à le faire patienter simplement pour lui donner une bonne leçon quant à son manque de responsabilité à trente ans passé – Alfie envisage, afin de s’occuper l’esprit, divers scénarios qui pourraient justifier sa présence ici, tous bien plus valorisants pour lui que ne l’est la réalité.

Scénario numéro 1 : Parce qu’il semble d’époque de jouer les héros, sa blessure au bras pourrait être le résultat d’un combat acharné avec, imaginons, un braqueur de banques – ou de station-service s’il faut revoir les ambitions à la baisse. Quitte à faire dans le cliché, autant pousser la chose jusqu’à prétendre qu’au même titre que toutes les petites filles rêvent d’être des princesses, les petits garçons rêvent d’être de preux chevaliers, Alfie a donc saisit l’opportunité en s’interposant – ou plutôt, son bras gauche a saisi la possibilité de se distinguer du droit à qui Alfie donne bien trop de responsabilité, étant droitier. Une simple bataille d’égo qui a amené à un acte héroïque, mais pour la version officielle on se contentera de garder qu’il a agi sans réfléchir, pour le bien commun, évidemment. Ce scénario ne fonctionne que si l’on prend en compte le fait qu’un criminel ait privilégié une arme blanche (car c’est ce qui est le plus crédible en vue de l’allure de l’entaille du trentenaire) pour commettre son méfait et très clairement ; on ne peut que douter de la crédibilité de cette situation (pas qu’elle le serait en temps normal, hm), braquer une banque au couteau revient à vider l’océan avec une paille.
Scénario numéro 2 : Tant qu’à prétendre jouer les gros durs, une inversion des rôles permet d’imaginer un tout autre scénario : en prétextant être le bad guy de l’histoire plutôt que le good guy qui sauve la veuve et l’orphelin. Vieux rappel d’une période qu’il préfère oublier, où faire parler ses poings étaient plus faciles et efficaces que maîtriser les mots. L’expérience lui permettra d’être d’autant plus convaincant lorsqu’il expliquera cette situation où un type, dans un bar quelconque, l’a regardé de travers et a fait un commentaire qui lui a déplu, justifiant ainsi de débuter une bagarre à laquelle d’autres se sont joint, pour finir avec un tesson de bouteille planté dans le bras. Crédibilité foireuse quand on pense à sa personnalité à l’heure d’aujourd’hui, alors qu’il est bien incapable de faire du mal à une mouche – non, lui serait plutôt le genre à lui créer un lit miniature avec une boîte d’allumettes.
Scénario numéro 3 : Il implique un Alfie ayant touché le fond, supposément dépressif – et dès cet instant on peut juger de la plausibilité de cette troisième option. Quoi qu’il en soit, de la même manière que certains sont dépendants à diverses substances, Alfie l’est du terrain (entre autres). Et après une trop longue période de sevrage forcé, il est retombé dans ses vieux travers à la première occasion. Il en sait quelque chose, et encore une fois, son discours n’en sera que plus convaincant. Ajoutons à son état anxieux une crise psychotique et le voilà qui s’ouvre le bras avec une pierre taillée aux vertus inexplicables pour soigner un problème quelconque – il ne sait pas spécifiquement lequel, alors même que la liste est particulièrement longue. Conscient qu’aux yeux du commun des mortels cette explication lui vaudra un internement en bonne et due forme, Alfie oublie très rapidement l’idée.

Le jeune homme poursuit ainsi, s’occupant du mieux qu’il peut alors que l’attente commence à se faire longue, jusqu’à ce que ce soit la silhouette de Norah qui vienne à sa rencontre. À la vue de celle qu’il considère désormais comme une amie, Alfie esquisse un sourire sincère – il faut dire qu’il a toujours l’espoir de tomber sur elle quand il vient par ici, et il se peut aussi qu’il ait presque retenu la configuration type de ses gardes pour en avoir l’assurance. Pas qu’il se blesse volontairement – si en fait, enfin, jamais volontairement mais ça lui est arrivé une ou deux fois de courir aux urgences lorsqu’il pensait pouvoir la croiser lorsqu’ils n’étaient que de simples connaissances, prétextant un abominaaaaaable mal de cheveux ou une grosse foulure de la gencive, ce genre de tracas du quotidien qui justifient évidemment une venue entre ces lieux. Quoi qu’il en soit, c’est avec un rire qu’il accueille les propos de Norah et la comparaison entre son fils et lui. « Tu devrais me remercier de t’offrir un aperçu de ce qu’il risque de devenir. » Dit-il en esquissant faisant flotter ses mains dans l’air pour se désigner. « Casse-cou, certes, abonné aux os cassés et aux points de suture, aussi, mais plutôt sympa, living his best life, et, admettons-le, plutôt beau gosse. » Il conclut avec un léger rire qui traduit du crédit à accorder à ses paroles. « Le pudding de la cafétéria, quoi d’autre ? » Il répond par la suite, avec un léger sourire, avant de reprendre. « Vu que vous êtes toujours pas décidés à transmettre la recette, bah voilà, aux grands maux les grands remèdes, comme on dit, j’espère que cet hôpital est fier de ce qu’il inflige à ses patients. » Il soupire, avant de reprendre son sérieux et d’ôter le chiffon qu’il appuyait sagement sur son bras gauche jusqu’ici. « Tu veux quelle version ? La bonne pour mon égo ou la vérité ? Il marque un bref silence avant de reprendre. Dans la première, j’ai voulu empêcher un enfant de se faire agresser par un arbre sauvage, ou plutôt une branche, qui allait s’abattre sur lui et qui s’est finalement abattue sur mon bras. » C’est un bon scénario, aussi. Suffisamment crédible et cohérent, ça aurait réellement pu tenir la route. Dommage qu’il s’apparente plutôt à un Earl Hickey qu’à un Mowgli. « Dans la seconde, c’est une sortie en VTT avec quelques amis qui a mal tourné au moment où j’ai voulu me la jouer plus malin et prendre un raccourci. Une piste étroite et une branche d’arbre très légèrement agressive et carrément taillée plus tard, et me voilà ici. » Il avoue, les lèvres pincées, l’identité du responsable de l’entaille qu’il a sur le bras désormais dévoilée. Un malheureux concours de circonstances, passé un peu trop vite et trop près d’où il ne fallait pas. « Un combat un peu inégal, si tu veux mon avis, mais quand même, je me suis bien défendu, tu devrais voir la gueule de l’arbre. » Qui se porte très bien, contrairement à son bras, merci pour lui. « Bref, mes connaissances médicales durement acquises au fil des visites tendent à me laisser penser que quelques points de suture seraient appropriés. » Il se permet, s’arrêtant enfin sur sa blessure. Il ne s’est pas loupé en vue de la quantité de sang qui a taché sa peau et un peu de sa chemise, pour autant ce n’est rien de très alarmant – ou peut-être qu’il en a l’habitude, à force. Dans tous les cas, ce n’est rien qui aurait justifié un passage en priorité sur les autres urgences, et quelque chose de suffisamment important pour qu’il lui soit légitime – cette fois-ci – de venir ici. « Enfin, c’est toi l’experte. » Qu’il termine, avec un fin sourire, tandis qu’il se tait enfin pour laisser Norah fait son travail – après quoi il fera preuve de bien plus de politesse en détournant l’attention sur elle, parce qu’au-delà d’un léger bobo à soigner, il compte bien profiter de sa présence ici pour prendre de ses nouvelles.
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Message(#)alfie + like i've been there before EmptyJeu 4 Avr 2019 - 8:49

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S'il y avait bien une personne qui faisait exception à la règle, c'était bien Alfie. Quelques années plus tôt, Norah aurait été presque révulsée à l'idée de sympathiser autant avec un patient, de franchir cette barrière invisible qui s'établissait dans la relation entre un patient et un soignant. Et pourtant, par la force des choses, Alfie était devenu l'une de ses personnes qui l'avait énormément soutenu durant son deuil. Avec propres moyens, ses propres armes. Son humour, sa gentillesse, sa légèreté de vivre. Se voir en dehors de ces murs blancs avait été des plus perturbants au premier abord, mais ils s'y étaient vite habitués. "Je garde quand même l'espoir qu'il fera un peu plus attention à lui par le futur." répondit l'infirmière en riant, alors qu'elle se procurait une paire de gants à usage. "Et lui, ne s'est encore rien cassé, pour le moment. Je suis certaine que tu avais déjà ton petit palmarès à son âge." Aiden avait la tête bien dure, c'était certain. Il n'avait pas la maladie des os de verre, encore heureux. Elle arqua un sourcil amusé lorsqu'il plaisantait. "Plutôt, oui." Elle s'appuyait contre la paillasse qui se trouvait juste derrière elle. "Et puis, bien sûr qu'Aiden est beau gosse, qu'est-ce que tu crois." La belle brune pouvait manquer cruellement de modestie lorsqu'il s'agissait de complimenter ses enfants. Surtout que le cadet était le portrait craché de son père : une tignasse rousse et des yeux bleus particulièrement claires. Julie, l'aînée, ressemblait par contre bien plus à sa mère. Dans tous les cas, aucun des deux ne pouvait nier leur parent. "Si tu venais vraiment pour les repas de l'hôpital, tu aurais du venir hier. Il y avait du Lamington en dessert, et même que ce n'était pas si mauvais que ça." Certes, ça ne valait pas ce que l'on pouvait trouver dans un restaurant et lorsque Norah pâtissait, mais c'était de qualité supérieure de ce que l'on pouvait voir dans un hôpital habituellement. "Mais ce n'est pas aussi bon que lorsque je le fais moi, faut pas abuser non plus." dit-elle avec un léger rire. Bien sûr qu'elle plaisantait (quoi que). Elle adorait la pâtisserie et c'était une activité pour laquelle elle était particulièrement douée. "Ca dépend, c'est quel scénario que tu préfères ?" demanda-t-elle lorsqu'il comptait lui révéler deux versions de la raison de sa blessure au bras. Cela n'empêchait pas le bel homme de plaisanter un petit peu. C'était pour cela que Norah l'appréciait énormément. Que même durant les pires moments, il parvenait à alléger l'atmosphère. Il avait beau avoir été dans une chambre très strictement isolée pendant des semaines, cela ne l'empêchait pas de garder un certain optimisme. A moins que ce ne soit la présence constante de Norah qui lui permettait de voir le verre à moitié plein ? Toujours est-il qu'Alfie était une véritable bouffée d'air frais à chaque et cela faisait le plus grand bien à l'infirmière. Entendre ses péripéties l'amusait beaucoup. "Et comment va l'arbre, dans tout ça ?" demanda-t-elle alors avec un fin sourire. "Oh, je suis certaine que tu t'es défendu tel un véritable chevalier." Cette anecdote lui plaisait, et lui rappelait beaucoup le fait que son fils, Aiden, était dans une période où il se passionnait d'histoire de preux chevaliers, mais aussi de récits de terribles pirates. Norah adorait les lui racontait. "Tu devrais quand même venir un jour raconter tes péripéties à Aiden, je pense qu'il serait le premier fan de toutes tes aventures si tu les racontes toujours aussi bien." Il aurait un succès fou auprès du bambin de quatre ans, c'était certain. "Donc si un jour tu as besoin d'une oreille, tu peux compter sur lui." Elle rit discrètement, bouche fermée. Norah récupérait dans un tiroir un paquet de compresses stériles qu'elle ouvrait avec délicatesse et qu'elle humidifiait un peu avec du sérum physiologique afin de  nettoyer un petit peu la plaie et d'estimer l'ampleur des dégâts. Elle s'était installée sur un tabouret qui disposait de roulettes (moyen de transport plutôt prisé au sein des hôpitaux). "Ah oui, quand même. Tu t'es pas loupé." s'exclama-t-elle une fois qu'elle voyait d'un peu plus clair sa plaie. "Je ne suis pas encore au point de connaître ton dossier par coeur. Mais on n'est pas loin." commença-t-elle, songeuse. "Mais tu es à jour pour ton vaccin contre le tétanos ou pas ?" C'était un point essentiel, une donnée qu'elle avait besoin de savoir. Si ce n'était pas le cas, Alfie allait avoir droit à un énième examen (rien de bien méchant), pour être qu'il ne se soit pas chopé un autre germe qui pourrait lui faire bien des misères. "Tu vas avoir droit à quelques points de suture, effectivement. Tu as plutôt de la chance que l'arbre t'ait taillé le bras de manière plutôt régulière, cela dit."S'il avait été charcuté de manière moins délicate, la guérison aurait d'autant plus complexe qu'il aurait été quasiment impossible de pouvoir suturer correctement à moins de laisser des cicatrices visibles et peu plaisantes à voir. "Je te désinfecte tout ça, et je vais prévenir l'interne. Histoire qu'on te rafistole en bonne et due forme." Elle sortait des tiroirs le nécessaire pour nettoyer la plaie. D'abord avec un savon antiseptique, puis elle rinçait délicatement avec du sérum physiologique, puis sécher, puis désinfecter le tout une dernière foit avec un antiseptique. Norah était concentrée, silencieuse, pour finir par lui esquisser un énième sourire reconnaissant. Il avait été là quand elle en avait besoin (mais sans reconnaître qu'elle en ressentait la nécessité), et pour cela, elle se sentirait toujours redevable. Il faisait partie de ces personnes qui savaient combien son défunt mari pouvait lui manquer. "J'ai officialisé la fin de mon déménagement il n'y a pas si longtemps que ça." finit-elle par dire. "Les derniers cartons ont été déballés, les affaires sont plus ou moins rangées. Tu devrais venir, un de ces quatre." Le déménagement était loin d'être une étape anodine et sans importance pour la jeune femme. Elle eut un moment de réflexion, un tant soit peu songeur, à se demander une énième si c'était véritablement la meilleure décision. Pour elle, oui. Autant elle aimait toujours autant Frank, autant sa présence au sein de la maison qu'ils avaient décidé d'habiter ensemble à l'époque lui pesait de plus en plus. L'air devenait irrespirable, et elle avait l'impression de voir son ombre, son esprit, dans chaque coin de chacune des pièces. "Mais il y a quand même pas mal d'arbres près de l'entrée et dans le jardin, faudra que tu fasses attention." plaisanta-t-elle, faisant un signe de tête en faisant référence à sa blessure au bras.
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Message(#)alfie + like i've been there before EmptyMar 9 Avr 2019 - 9:23

C’est sans surprise qu’Alfie est l’initiateur d’un nouveau concept particulièrement farfelu : celui de la carte de fidélité hospitalière. À la différence de ceux qui collectionnent celles de la pizzeria ou du concept store du coin, Alfie peut se targuer de compléter la sienne au fur et à mesure, sans jamais l’avoir perdue entre temps, parce que chacun des incidents qui permettent la pose d’un stample « éligible pour les Darwin Awards » sont enregistrés dans le disque dur qui lui sert de mémoire. De la commotion cérébrale en heurtant une paroi (ayant bien évidemment poussé subitement à cet endroit, « oui je vous l’assure elle était pas là y’a deux minutes ») en courant avec un peu trop d’entrain dans un laser-game, à la côte cassée en rencontrant la piste d’atterrissage d’un parcours d’accrobranches parce que « la descente est plus fun si on prend un peu plus d’élan au départ », en passant par l’oreille presque sectionnée par une hache dont le manche rebondit sur le mur sur lequel elle est censée s’ancrer, sans oublier la main cassée parce que s’il a effectivement mis beaucoup d’énergie pour frapper le sac de boxe d’arcade il a jugé encore plus drôle de tourner sur lui-même une bonne dizaine de fois au préalable pour tester ses capacités et finalement ne rencontrer que le mur dans un fracas douloureux. Les maladresses s’enchaînent sans que jamais Alfie ne remette en question ce trait de caractère qui pourrait facilement l’être et lui éviter ainsi bien des blessures. Mais parce qu’elles ne sont jamais bien graves, le jeune homme fait fi de toutes ces personnes qui lui parlent de « grandir un peu » et d’acquérir « le sens des responsabilités » ; l’anthropologue s’éclate et tant pis si ça nécessite un os cassé ou quelques points de suture de temps à autre, comme c’est le cas aujourd’hui. Norah vise juste, il est rodé, et son palmarès a débuté il y a bien longtemps déjà. S’il a connu une accalmie autour de dix ans, avant cela Alfie était le même qu’aujourd’hui, à l’exception près qu’on pouvait encore excuser son imprudence qu’on ne peut que lui reprocher maintenant qu’il est (supposé être) un adulte. « Il a quel âge, déjà ? Quatre ou cinq ans, non ? C’est à cet âge-là que j’ai commencé, alors… prépare-toi, c’est tout ce que je peux te conseiller. Parce qu’une fois qu’on emprunte cette voie-là… on en revient jamais vraiment. » Tête baissée, ton grave, Alfie pose même une main sur son cœur pour accentuer le côté dramatique d’une telle addiction. Parce que c’est le cas, Aiden est déjà un toxico du bobo, que sa mère se prépare à la vie de malheur qui l’attend, à base de séjours aux urgences, d’inquiétudes quand il enfourche son vélo et autres chantages à base « encore un point de suture et je coupe la télé ! ». Au manque d’objectivité de Norah quant à Aiden, Alfie affiche un fin sourire avant de lever les paumes en l’air, moue innocente plaquée sur le visage, l’air de dire « j’ai fait un commentaire, moi ? ». Et lorsque son amie l’interroge sur la raison de sa présence ici, c’est toujours sous couvert d’humour qu’Alfie répond. « Oh. Qu’il souffle dans un premier temps lorsqu’elle évoque le lamington, puis ses talents de pâtissière. Je vois. Je venais pour un petit bobo, et je me retrouve avec un couteau planté en plein cœur, décidément, de mieux en mieux cet endroit. » DU. LAMINGTON. Qui résiste à ça ? Certainement pas lui, et voilà qu’elle lui annonce, sans aucune empathie, qu’il est arrivé trop tard. Norah, qu’est-ce que tu peux être cruelle. « Je te propose un truc, la prochaine fois que je dois venir ici, je te demande avant les menus de la semaine, que je sache quel jour ça vaut le coup de vraiment me déplacer. » Et il pourrait presque ajouter que ce ne sera pas un problème pour lui de supporter la douleur, puisque là-aussi il est rodé. Mais il s’abstient, n’y pense pas, ne veut pas y penser, parce que la dernière fois qu’il a dû supporter pareille souffrance par le début de nécrose qui avait touché la chaire de son dos, il n’avait pas vraiment eu son mot à dire quant à son besoin de soins. C’est ceux d’aujourd’hui qui redeviennent le centre de la conversation alors que Norah lui demande quel scénario il préfère, tandis qu’il présente les deux qu’il a en tête. Un haussement d’épaules plus tard, il précise : « celle bonne pour mon égo, évidemment. Du coup, maintenant que tu connais la vérité, je te demanderai de jouer le jeu, et de… je sais pas moi, m’applaudir quand je sors de cette pièce, et si tu veux, tu peux même crier un truc du genre « qu’on donne une médaille à cet homme ! », je t’en serai éternellement reconnaissant. » Un rire plus tard, c’est finalement une mine totalement offusquée qui s’affiche sur son visage quand elle demande des nouvelles de l’arbre alors qu’il pose une main sur son torse. « Ne me dis pas que tu es de son côté ? » De plus en plus décevante, cette Norah, pfff. « Il a eu ce qu’il méritait, mais oui, il va très bien. En tout cas, quand je suis parti, il tenait toujours sur ses racines. » À défaut d’avoir le soutien de son amie, il peut au moins espérer compter sur le fils de cette dernière. « Avec plaisir, et pour la peine, je viendrai même déguiser s’il le faut. » Il précise avec un fin sourire. Si Jules est une excellente compteuse de par son bénévolat en pédiatrie, Alfie n’a pas non plus à rougir, d’autant plus qu’il peut compter sur Anabel pour être son cobaye. En réalité, elle est plus une tortionnaire qu’autre chose en vue des encouragements, mais surtout des médisances que sa filleule se permet, tout cela pour le plaisir de faire sortir son parrain de ses gonds pour s’en amuser. La digne fille de sa mère, en soi. « Je peux même travailler des histoires inédites pour lui. » Oui, parce qu’il va sans dire que l’esprit d’Alfie a beaucoup de peine à imaginer divers scénarios tous plus farfelus les uns des autres et qu’en convenir à présenter au petit garçon relève d’un profond travail, évidemment, et non pas d’une improvisation à la dernière seconde parce qu’il n’a jamais vraiment beaucoup besoin de réfléchir. Reprenant son sérieux alors que la jeune femme s’attèle désormais à désinfecter son bras, Alfie se veut muet et docile pour lui faciliter le travail – et voilà un exploit dont elle peut se vanter ; peu nombreux sont les gens pouvant se targuer d’avoir réussi à fermer le clapet de l’anthropologue. « Ça, ça veut dire que je dois venir encore plus souvent pour que tu finisses par réellement le connaître. Je t’avoue que je suis un peu déçu de toi quand même, sur ce coup-là. » Il soupire en haussant les épaules d’un air las. « À jour, oui. » Qu’il finit par acquiescer après avoir repris son sérieux. Il faut dire qu’il aurait été particulièrement irresponsable – et cette fois-ci on aurait pu effectivement le lui reprocher – s’il ne bénéficiait pas des vaccins de base compte tenu son travail. « Je ne manquerai pas d’aller le remercier, alors. » Il glisse avec un fin sourire tandis qu’elle l’estime plutôt chanceux dans son malheur. « Vous n’oublierez pas la sucette en fin de consultation pour féliciter mon courage. » Il ajoute, amusé, parce que s’il y a un bien quelque chose qui ne fait jamais défaut à Alfie, c’est bien son estomac et sa gourmandise. C’est de nouveau dans le silence qu’il se mure pour la laisser vaquer aux soins, non sans grimacer très légèrement par la sensation de brûlure provoquée par l’antiseptique, plus par réflexe que véritable douleur, il est vrai. Il ne relève la tête que lorsqu’elle le sort de ses pensées – le faisant même légèrement sursauter – alors qu’elle évoque son déménagement mené à termes. « Ce serait avec grand plaisir. » Qu’il souffle à sa proposition, sérieux, le sourire reconnaissant sur les lèvres. « Mais… seulement si tu fais un lamington en dessert. » Qu’il s’amuse finalement. Il est touché par cette invitation plus qu’il ne le veut l’admettre, parce que s’il considère Norah comme une amie, il lui arrive toujours de ne pas se sentir légitime dans ce rôle, de par leurs statuts, de par la manière dont les choses se sont faites, quand bien même son attachement pour elle est sincère. « Ah… Je crois que je vais décliner, finalement, Je sens déjà que le PTSD me guette, alors vaut mieux, tu sais… éviter. » Il s’en amuse, Alfie, sans savoir qu’il n’est pas si éloigné de la vérité, mais pour cela il faudrait cesser de vivre dans le déni. « Non, allez pour toi, je veux bien concéder à cet effort. » Il ajoute, avant d’afficher une mine plus soucieuse. « Ça n’a pas été trop dur ? Pour les enfants, j’entends. » Et pour toi aussi, surtout, sauf qu’on ne dit jamais vraiment les choses entre nous, mais c’est pas grave, c’est ainsi qu’on fonctionne.  

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Message(#)alfie + like i've been there before EmptyMer 10 Avr 2019 - 16:36

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Ce que l'on pouvait dire, c'était qu'Alfie ne faisait pas partie de ces hommes qui se gémissaient, limite à l'agonie, au moindre petit bobo. Il lui fallait un peu plus qu'une coupure avec un morceau de papier pour se rouler par terre et être en larmes, persuadé qu'ils allaient en mourir (et la réponse est oui, Norah avait déjà vu ça aux urgences.). A dire vrai, Norah n'avait pas de franc souvenir de voir le beau brun pleurer pour l'une de ses blessures. Elle l'avait vu en larmes pour une autre raison, mais qui n'avait rien à voir avec la blessure qu'il avait au bras. Il s'agissait d'une peine bien plus profonde, impossible d'en oublier la douleur, extrêmement difficile à cicatriser. Cette souffrance là, Norah ne la connaissait que trop bien. Et ils la partageaient. Ils ne se connaissaient pas tant que ça, au final, mais il y avait ce point convergent qui faisait qu'ils étaient capables de se mettre à la place de l'autre, de se faire ne serait-ce qu'une idée de ce qu'ils pouvaient ressentir, même encore à l'heure actuelle. Malgré tout, Alfie restait dans l'humour et la légèreté, une véritable bouffée d'air frais au milieu de patients plaintifs ou en souffrance. Il relativisation d'une manière déconcertante et rafraîchissante. Norah se doutait bien qu'il ne prenait pas tout à la légère, il était capable de mesurer la gravité de ses plaies ou non. Mais disons qu'il faisait tout simplement avec, il s'adaptait, parce qu'il savait qu'il allait en finir par guérir. Et s'il y avait des séquelles, il ferait tout simplement avec. Pas la peine pour lui de s'embourber dans des pensées qui le freineraient plus qu'autre chose. "Il a quatre ans oui, c'est ça." approuva-t-elle, agréablement surprise qu'il se souvienne d'un tel détail. "Remarque, il est déjà bien habitué à tomber. Il n'est pas douillet non plus." Ca leur faisait déjà de sacrés points communs. "Laisse-moi être optimiste à ce sujet." dit-elle, avec sourire amusé. "Ce n'est pas parce qu'il a une maman infirmière que la maison devenir une clinique qui lui soit attitré." Le côté plaisantin d'Alfie la faisait souvent sourire. Elle était impressionnée qu'il ait tant de facilité à adopter différentes émotions, d'autres timbres de voix. Norah, elle, avait la capacité de rester incroyablement calme dans n'importe quelle situation au travail, quitte à en dérouter plus d'un. Mais sa constance dans sa sérénité faisait ramener le calme chez d'autres personnes qui avaient tendance à paniquer. Ou les patients colériques, comprenant que monter dans les tours ne servait absolument à rien avec elle, finissaient par se calmer par d'eux-mêmes. Certains de ses collègues (ceux qui la connaissaient mal), la trouvaient même particulièrement froides. Du style, "Il faut pas l'énerver elle." ou "Elle a pas l'air très sympa, j'aimerais pas bosser avec elle.". Ce genre de remarques, Norah s'en fichait bien. Et dans la majorité des cas, une fois que ces médisants avaient justement eu l'occasion de travailler avec elle, les premières impressions se dissipaient assez rapidement. La mort de Frank avait fait le tour de l'hôpital plus d'une fois, on en parlait encore de temps en temps. Le fait de ne pas avoir trouver son bourreau faisait beaucoup parler encore. Mais ce n'était pas un sujet dont elle aimait parler au travail, hormis avec les personnes avec qui elle était le plus proche, notamment Yasmine. Et Alfie, quand il se pointait aux urgences. "Marché conclu." s'amusa-t-elle à lui réopndre quand il lui demandait de transmettre les menus de la semaine lorsqu'il envisageait plus ou moins de sortir de chez lui. "Quoique, avoue-le, tu tomberais bien plus rapidement si je te dis que j'ai ramené des petites douceurs faits maison, au boulot." ajouta-t-elle. "Et quand même, le temps où tu arriverais, il ne resterait vraiment plus grand chose, peut-être quelques miettes." Les soignants étaient de véritables gloutons, quand de bons petits plats franchissaient les portes du Saint Vincent. Toutes ces douceurs s'assortissaient étrangement bien avec un café ou un thé. A toute heure de la journée, qu'importe le temps à l'extérieur. "Jamais je n'aurais un jour pensé entendre un patient planifier ses visites ici, surtout si ça dépend de ce qui sera servi au repas." C'était bien connu, la nourriture dans les établissements de santé n'était pas la plus goutue qui soit. Certains savaient s'en contenter, d'autres ne se gênaient pour écrire à la direction pour faire entendre leur insatisfaction à ce sujet. L’hospitalisation d'Alfie lorsqu'il était en isolement lui avait laissé tout le temps nécessaire pour faire le tour des menus et plats servis à l'hôpital. Lui aussi, s'en était contenté. Norah mentirait si elle disait qu'elle ne lui apportait pas parfois quelques douceurs de l'extérieur, pour le bien de son moral et de ses papilles. L'infirmière haussa les sourcils lorsqu'Alfie demandait un semblant de reconnaissance pour secourir ce qui pouvait lui rester d'égo suite à son énième mésaventure. "Beaucoup de personnes s'imaginent qu'on cache beaucoup de choses sous nos si belles blouses, mais je n'y cache malheureusement pas un trophée." lui dit-elle, ne faisant que suivre ton jeu. "Mais je tenais à ce que tu saches que je suis impressionnée par la bravoure de tes actes, et ton sens du sacrifice en affrontant cet arbre si féroce, qui aurait pu ôter maintes autres vies si tu n'étais pas intervenu." dit-elle de son ton habituellement neutre, quoi que ses yeux étaient un tantinet écarquillé d'étonnement (suffisamment pour que ça se remarque.). Elle ne faisait que le taquiner davantage en prenant le partie de l'arbre, ce pourquoi il en fut faussement offusqué. "Si tu viens déguisé, je peux t'assurer qu'on te demandera à ce que tu viennes comme ça à chaque fois." dit-elle en arquant un sourcil, qui voulait lui dire implicitement "je t'aurais prévenu". Aiden adorait les histoires plus que tout. Julie aussi, cela dit. Ils aimaient beaucoup quand leur mère leur racontait, mais depuis qu'elle apprenait à lire, l'aînée appréciait lire ses petites histoires toute seules de temps en temps. "Aiden est très bon public en plus. Je dis ça, je dis rien." Il était encore dans un âge où il était particulièrement impressionnable. A vrai dire, la seule chose qui ne le surprenait plus était lorsqu'il tombait. Une habitude comme une autre. Après ces mots, Norah continuait de nettoyer méticuleusement la plaie. En plus du sang coagulé, il y avait quelques saletés. De la terre, des petits bouts de bois, quelques cailloux, entre autres. Tout ce qui pouvait justifier sa question concernant la mise à jour de ses vaccins.  "Peut-être que j'ai fait exprès de dire que je ne me souvenais pas de tout, justement pour que tu reviennes plus souvent." dit-elle d'un ton un peu plus mystérieux, de quoi mettre le doute. L'hôpital restait leur lieu de rencontre favori, il fallait le dire. "Le remercier ? Ca ne risque pas trop d'heurter ton égo ?" dit-elle en réparti, un brin moqueuse. "Et je verrai pour la sucette. Seulement si tu es sage." A dire vrai, la prochaine véritable qu'Alfie avait à traverser pour cette consultation là, c'était l'injection de l'anesthésiant local afin de pouvoir ensuite faire les points de suture dont il avait besoin. Et le connaissant, elle savait qu'il n'allait pas hurler de douleurs pour cela. Il grimaçait, retenait parfois un peu sa respiration, mais c'était rarement plus. Il n'était vraiment pas du genre plaintif. L'air de rien, Norah commençait à parler un petit peu d'elle, ou du moins, du dernier événement marquant de son quotidien bien chargé. Quelque part, Norah appréhendait qu'il décline son invitation. Même s'ils s'étaient vus bien plus d'une fois en dehors de ces murs, il y avait une impression d'étrangeté. Il n'y avait pas de malaise. Seulement, de ne plus avoir ces murs qui s'érigeaient entre un soignant et un patient. C'était agréable, mais étrange. "Juste du Lamington ?" dit-elle, l'air faussement surprise. "C'est dommage, j'avais prévu de faire des mignardises de différents desserts. Juste de petites parts, pour la gourmandises. Mais de plein de desserts différents." Elle lâcha un long soupir résigné (de manière toute aussi fausse) pendant qu'elle préparait le nécessaire pour fermer le pansement une fois les points de suture faits. Bien sûr qu'elle le narguait, bien sûr qu'elle savait qu'elle touchait une corde sensible. Il y avait de fortes chances qu'il cède. Elle ne le montrait pas forcément très bien, mais Norah était à la fois ravie et soulagée qu'il ait accepté son invitation. Elle aussi, se sentait reconnaissante. Il était temps qu'elle s'ouvre un petit peu plus. "Oh, tu sais, pour eux, c'est comme... Un nouveau terrain de jeu." répondit-elle d'un air plus calme, forçant un sourire avec un haussement d'épaules. "Les enfants ont cette incroyable capacité de s'adapter à toute nouvelle situation. Ils ont bien moins d'expérience que leurs parents, et pourtant, ils encaissent bien mieux les changements." Tout comme il parvenait à bien mieux apprendre une nouvelle langue, ou à encaisser les maladies. Ils étaient petits, mais particulièrement costauds. Le déménagement était autant une rédemption qu'une épreuve pour Norah. Elle avait besoin de passer à autre chose, de laisser certaines choses derrière elle, et c'était ces mêmes choses qui la faisaient encore parfois culpabiliser de ces choix. L'acclimatation était loin d'être facile, mais elle s'en sortait, et parvenait peu à peu à en faire son nid. Alfie ne lui tirera pas les vers du nez aisément. "Il n'y a même pas eu de dispute pour le choix des chambres. Je m'attendais à de longue négociations." finit-elle par dire après un long silence, dans l'espoir d'alléger une atmosphère qui commençait à être pesante suite à son mutisme. "Mais... ça va." dit-elle, avec un sourire plus convaincant. Songeuse, Norah imposait malgré elle un long silence. "Je..." Au moment même où Norah avait peut-être l'intention d'en dire un peu plus sur son état d'esprit, l'interne entrait dans la pièce, prêt à faire son devoir. Il auscultait rapidement la plaie bien nettoyée d'Alfie avant de donner des consignes à l'infirmière qui l'aidait. En soi, elle avait surtout besoin de savoir de quel type de fil et quelle taille il voulait, car le reste du matériel n'attendait plus que lui sur la paillasse. Norah lui préparait l'injection sous-cutanée de lidocaïne, pour l'anesthésie locale. Mais étant donné que ce n'était pas ce qu'il y avait de plus urgent à faire, comparé aux certaines admissions, il mettait à rude épreuve la patience d'Alfie. Le téléphone qu'avait l'étudiant n'arrêtait pas de biper. "C'était pourtant relativement calme, quand je suis arrivée." dit Norah une fois que l'interne avait quitté la pièce. "Tu veux pas faire du footing avec moi ?" demanda-t-elle alors, sorti de nulle part. "Ca fait une éternité que je n'en ai plus fait. Et je voudrais vraiment m'y remettre." Depuis des années, cela remontait à bien avant que Frank ne décède. Depuis cela, elle n'avait pas le temps de s'occuper d'elle. "Tu es quelqu'un de sportif et je sais que tu arriverais à me motiver. Et toi, tu aurais une infirmière à disposition s'il y a le moindre bobo durant la course. C'est tout benef'." dit-elle en haussant les épaules. Esquivait-elle sensiblement le sujet de son ressenti vis-à-vis du déménagement ? Très certainement. Parce qu'avec Alfie, tout était un peu différent. Comme s'ils avaient leur propre petit monde et qu'ils refusaient d'atterrir dans la réalité, l'un comme l'autre. Les expériences vécus par chacun des partis faisaient qu'ils étaient ainsi. Un bien drôle de cocktails, pour de bien drôles échanges. Elle ne voudrait jamais admettre que cela a été particulièrement dur pour elle, de peur que la culpabilité la frappe de plein fouet, et que, finalement, cette décision qui fut véritablement salvatrice pour elle, ne soit perçu que comme une très grosse erreur.
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Message(#)alfie + like i've been there before EmptySam 13 Avr 2019 - 20:53

S’il n’a encore jamais eu l’occasion de rencontrer les deux enfants de Norah, celle-ci (comme toutes les fières mamans) ne manque jamais une occasion de parler d’eux. Et si pendant longtemps Alfie avait cette tendance à s’agacer contre des parents qui comptaient les exploits de leurs enfants comme si ceux-ci étaient éligibles pour un prix Nobel (on dit merci les réunions dominicales à l’église où il fallait se réjouir que le fils Weston ait réussi à aligner trois pas droit – alors qu’on sait tous que c’est lorsqu’un alcoolique réussit cette performance qu’il y a réellement matière à célébrer – ou prétendre être émerveillé par la capacité de la petite Betty Sutherland à enfin comprendre que 1 + 1 font 2 après des mois d’apprentissage pour qu’elle enregistre ce fait mais qu’on interprète comme une grande déduction de sa part) c’est avec intérêt et tendresse qu’il écoute à chaque occasion les récits de son amie sur ses progénitures. Si Alfie a toujours eu un bon feeling avec les mini humains, il ne comprenait pas ce besoin de les ériger sur un piédestal à chaque apprentissage qui, en soit, n’est que la suite logique de leur développement – et on ne s’émerveille pas autant quand un adulte parvient à résoudre une équation alors qu’il est fâché avec les mathématiques depuis l’adolescence ou lorsqu’il arrive enfin à jouer Creep à la guitare comme tout bon mouton qui se respecte. Son opinion a changé depuis la naissance d’Anabel, et en fier parrain qu’il est, Alfie se retrouve à s’extasier devant chaque parole et chaque action de la gamine. À la Alfie, cependant, et on ne l’entendra jamais vanter les capacités motrices de la petite, mais plutôt à la féliciter lorsqu’elle prépare un coup foireux qui fait tourner son parrain en bourrique, ou lorsqu’elle danse sur du Queen plutôt que sur du Ariana Grande. Alors même s’il n’a pas encore d’enfants à lui, Alfie comprend mieux ce sentiment qui anime les adultes quand ils évoquent leurs versions miniatures, d’autant plus que Norah ne l’a jamais assommé avec des anecdotes inintéressantes, au contraire, elles se veulent mignonnes, elles prêtes à sourire et lui permettent de dresser l’esquisse de la personnalité des deux enfants. C’est pour cette raison qu’il l’écoute toujours avec intérêt, qu’il se souvient des informations distillées par Norah au gré de leurs rencontres, et qu’il apprécie déjà le petit Aiden avant même d’avoir eu l’opportunité de le rencontrer, parce qu’il lui fait penser à lui, plus jeune, comme le souligne aussi sa mère. L’avantage, c’est que celle-ci peut déjà avoir une idée de ce que deviendra son fils dans un futur lointain ; un abonné des passages aux urgences. « J’ai envie de te dire, c’est exactement parce qu’il a une maman infirmière que la maison doit devenir sa clinique attitrée. » Il s’en amuse, Alfie, avec un sourire qui se dessine sur ses lèvres. C’est une chance qu’Aiden a de pouvoir bénéficier d’une maman autant aux petits soins pour lui ; de son côté lorsque ses parents avaient fini par s’agacer de son incapacité à s’inquiéter du danger l’entourant, il s’était retrouvé dans une bulle aseptisée de laquelle il ne parvenait pas à s’échapper. Les séjours à l’hôpital avaient certes diminué pour la plus grande joie de ses parents, mais Alfie avait très mal vécu ces années à lutter contre son trait de caractère dominant et ce besoin de grimper aux arbres, d’escalader la façade de leur maison, d’aller se perdre au milieu des champs de maïs, ou de simplement jouer à la bagarre avec ses camarades. Des activités anodines et communes pour les enfants, que ses parents avaient restreint au maximum – une restriction qui avait donné lieu à la suite que l’on connaît. Alors forcément, qu’Aiden ait une maman qui puisse parer à la moindre éventualité et lui permettre ainsi de profiter de son enfance comme n’importe quel gamin lui semble être une perspective dont il faut profiter – quand bien même cela se fasse au grand dam de Norah. « Mais, j’ai compris le message et je vais espérer avec toi qu’il finisse pas comme ça. » Faux. À la première occasion qu’il aura, il n’oubliera pas de dire au principal concerné de s’en donner à cœur joie (déso pas déso Norah, solidarité entre casse-cou oblige). « Toute façon, il fait partie de la génération jeux vidéo, même si je te le souhaite pas, je pense que d’ici quelques années c’est les cheminées de Mario qui auront son intérêt plus que les vrais parce qu’il se prendra pour le père Noël. » Est-ce le genre de trucs qu’il a déjà fait ? Oui. Est-ce que ça s’est mal fini ? Son bras gauche peut en témoigner. Mais encore une fois, il s’était éclaté, et même si l’atterrissage avait été douloureux, les courtes secondes de descente dans le vide lui avaient donné l’envie de recommencer – chose qu’il avait fait quatre mois plus tard et qui avait résulté à la condamnation de la cheminée.

Si aucune cheminée n’est à tenir responsable de son état du jour, la raison derrière sa blessure n’en est pas moins ridicule pour autant – et comme toutes celles qui finissent par l’amener ici. Presque, à deux exceptions près. Deux raisons qui avaient justifié pour une fois qu’on s’inquiète pour lui, qu’on craigne même pour sa vie. Mais Alfie passe ces deux événements sous silence, alors même que Norah est l’une des seules à ne pas être tenue dans l’ignorance de ces pans de sa vie, ce dont sa propre petite amie ne peut pas se vanter. Son regard passe du visage de Norah, et de toutes ces choses qu'il lui rappelle, de ce sourire réconfortant qu’il attendait souvent avec impatience de voir à travers la bulle de plastique dans laquelle il avait été forcé de vivre, à la couleur de ces murs d’hôpitaux, qu’on identifie à tort comme étant blanc, alors qu’ils sont albâtre (la nuance est très légèrement plus foncée afin d’éviter que la clarté agresse les pupilles) c’est l’une des choses qu’il a eu le temps d’apprendre durant ces longues semaines coincé entre ces lieux, incapable de quitter son lit tant la douleur se réveillait toujours plus brulante à chaque geste qu’il esquissait. Tout comme il aurait pu avoir l’occasion de mémoriser l’organisation type des repas, mais c’était là un détail sur lequel il ne s’était pas beaucoup arrêté puisque, pour la première fois de sa vie, son appétit lui avait fait cruellement défaut. Ainsi, il compte sur Norah pour l’aiguiller sur cet aspect afin de prévoir au mieux ses prochaines visites – et à cet instant, il lui faut quelques secondes pour revenir dans la conversation, et c’est en premier lieu un sourire reconnaissant qui s’affiche sur ses lèvres pour lui permettre de sortir de ses pensées, tandis que ses doigts finissent par relâcher le drap d’examen en papier auquel ils s’étaient machinalement accrochés. « Je savais que je pouvais compter sur toi. » Qu’il dit dans un premier temps, encore un peu absent, sans que son regard ne soit encore parvenu à s’ancrer dans celui de Norah, papillonnant sur cet endroit qu’il ne connaît très bien. Quand, finalement, il croise son regard, c’est un franc sourire, celui qu’il affiche en toutes circonstances, qui apparaît sur ses lèvres. « Tu me veux vraiment du mal, en fait ! Qu’il s’insurge, yeux plissés qui accuse la jeune femme. Mais crois pas que je suis sans ressources, nope, ça va juste me convaincre de tomber pile poil devant l’entrée des urgences, tu sais, un accident sur une plaque d’égout mouillée est si vite arrivé. J’en suis capable, alors ne me provoque pas. » Qu’il souffle avant de laisser échapper un bref rire. Ceci dit, le plan est parfait, et il serait assurément aux premières loges pour goûter aux douceurs préparées par Norah. Il visualise la scène sans difficulté ; lui, sur un brancard, le coccyx cassé – parce qu’évidemment la chute l’aurait fait finir sur les fesses et qu’un bras dans le plâtre c’est bien trop mainstream –  une équipe de secouristes autour de lui qui s’inquiète d’une potentielle commotion cérébrale, tête coincée dans une minerve, lampe de poche qui tente de vérifier ses pupilles et lui qui se débat, hurlant à qui veut l’entendre « qu’on m’apporte les gâteaux de Norah ! ». « En même temps, si tu voyais ce que je mange quand c’est ma copine qui est en charge du repas, tu comprendrais… » Il est désolé pour les oreilles de Jules, d’autant plus qu’elle n’est pas mauvaise cuisinière, mais la tentation de retourner la situation à son avantage est trop tentante. « Mais je dois dire que tu me vexes un peu, je suis pas juste un patient, je suis une vraie mascotte, alors j’ai envie de te dire que je mérite que le meilleur, hein. C’est un minimum. Tiens, d’ailleurs, c’est quand que je vais avoir le droit à la suite présidentielle ? » Ou toute autre chambre privée réservée aux figures importantes.

Quand vient enfin le moment de révéler ce qui l’a amené ici, on pourrait croire qu’Alfie ferait moins le malin – il n’en est rien. D’aussi loin qu’il se souvienne, il n’y a pas un jour où il n’est pas passé pour un imbécile, que ce soit à cause de ses actes, de sa maladresse, ou de son caractère qui laisse présager quelques cases en moins. Si dans le cadre de son travail il a appris à faire de son mieux pour démontrer qu’il n’est pas arrivé là par hasard et qu’il prend celui-ci au sérieux, dans le domaine privé c’est une autre histoire, et il n’a aucun problème à admettre que c’est un accident stupide qui l’a amené ici ; même s’il s’amuse de la possibilité de flatter son égo. De toute façon, il ne serait pas crédible s’il racontait avoir réellement voulu venir en aide à quelqu’un, et si la situation se présentait nul doute qu’on n’accorderait aucun crédit à ses propos. « Merci beaucoup, c’est exactement ce que j’avais besoin d’entendre. Du coup, je te pardonne l’absence de trophée, mais que ça ne se reproduise pas. » Il poursuit, toujours sous couvert d’humour, ravi d’être parvenu à aiguiller Norah sur ce chemin, elle qui se veut bien plus calme, neutre que lui – et le ton qu’elle a utilisé traduit de cela. Il ne le dira pas, mais son sourire sincère traduit du plaisir qu’il a à l’entendre entrer ainsi dans son jeu. Dès leur rencontre, il est apparu évident qu’elle était plus réservée que lui, et qu’elle aurait pu s’agacer de son caractère qui peut sérieusement devenir lourd si on refuse d’appréhender les choses de la manière dont il le fait.  Rien ne laissait présager qu’ils s’entendraient comme c’est désormais le cas, et surtout, rien ne laissait présager qu’elle parviendrait à être à nouveau d’une humeur aussi légère après le drame qu’elle a vécu il y a un peu plus de deux ans et qui, inévitablement, l’a transformée. Pas suffisamment pour que ses plaisanteries se heurtent à un mur, et à ce constat Alfie ne peut qu’esquisser un sourire. Norah fait partie de ces personnes qui ne méritent pas tout ce qui leur est arrivé, de ces personnes dont on a à cœur de soulager la douleur tout en sachant qu’il n’y a pas de remède miracle et qu’il n’y en aura jamais. Il avait essayé, à sa façon, de lui changer les idées. Par une blague, par une sortie, par une histoire de fantôme, par toutes ces choses qu’il savait d’elle sans pour autant se permettre d’être trop intrusif. C’est la nature de leur relation, cette amitié sincère qui pourtant ne se traduit pas comme on l’aurait pu l’attendre. Il n’y a pas de déclaration, pas de geste, seulement des sourires entendus et des remerciements sous couvert de plaisanteries. Juste deux individus qui ne le disaient pas clairement, mais qui n’en pensaient pas moins : ils sont là l’un pour l’autre. Et Alfie est également là pour ses enfants, s’il faut se déguiser pour ne pas seulement leur raconter des histoires fantaisistes dont il a le secret, mais également les vivre. « Tu sais à qui tu t’adresses ? » Qu’il demande en penchant légèrement la tête. Au type qui a dix ans d’âge mental, et qui va se faire un plaisir de se déguiser si nécessaire. Il le fait assez pour Anabel, bien qu’il s’agisse plutôt de revêtir le costume de Sacha pour qu’elle puisse être Pikachu ou celui de Mr. Indestructibles pour qu’elle soit Violet, que de celui d’un preux chevalier. « Mais bon sang, quand est-ce que tu nous présentes ? » Il s’exclame, alors qu’elle poursuit sur Aiden et que définitivement, il ne peut que lui rappeler une mini version de lui-même. Un brave gamin, assurément.

Alfie reprend toutefois son sérieux quand vient le moment d’enfin dévoiler sa plaie à Norah, non sans se surprendre du commentaire de celle-ci. « Comment ? Tu oserais ? Je ne te savais pas aussi fourbe, je crois que je suis de mauvaise influence sur toi. » Et de toute évidence, elle n’a pas besoin de cela pour qu’il revienne régulièrement entre ces murs. « Si, certainement, mais faut rendre à César, tout ça. Ça va demander une grande préparation psychologique, quand même, alors je crois qu’en fait je vais me contenter de lui envoyer… je sais pas, un corbeau voyageur pour le remercier. » C’est le meilleur plan qui se dessine. « Au pire, je ferai les yeux doux à l’interne, ils me connaissent pas encore tous alors ça doit pouvoir fonctionner. » Qu’il ajoute par la suite, avec un haussement d’épaules provocateur, l’air de dire « va pas croire que je peux pas trouver un plan b ». Quoi qu’il ne devrait pas faire autant le malin s’il ne veut pas qu’elle retire l’invitation qu’elle vient de formuler et qui, il est vrai, le laisse interdit quelques instants. Pas qu’il cherche un moyen cordial de la refuser, bien au contraire, c’est justement parce qu’il est touché qu’il ne trouve pas ses mots pendant quelques secondes. Et, comme d’ordinaire, c’est son humour qui le sauve de toute once de sentimentalisme qu’il ne maîtrise pas. À l’entente du dessert prévu par Norah, Alfie exagère le trait en ouvrant légèrement la bouche, et heureusement qu’il a des manières, parce qu’il aurait presque pu être tenté de laisser échapper un filet de bave pour parfaire le tout. Il se contente seulement de laisser échapper un soupir avant de reprendre la parole. « Du lamington ? Qui a parlé de lamington ? Certainement pas moi, tu te trompes. » Il secoue même la tête pour paraître plus convaincant. « Ça me fout la pression pour trouver un bouquet à la hauteur, tout ça. » Qu’il finit par dire, amusé. Il est vrai qu’il faudra prévoir un cadeau de remerciement à la hauteur du menu qui semble se dessiner. Mais dans l’immédiat, Alfie reprend son sérieux pour l’interroger sur le déménagement, car si de son côté il a toujours eu besoin de s’éloigner de ses repères, il sait que la majorité des gens ne voient pas les choses de cette façon. « On dit souvent que c’est aux enfants de prendre exemple sur leurs parents, mais parfois ils auraient beaucoup à nous apprendre. » Il se contente de souffler, avant de se vouloir muet dans la continuité du silence instauré pour Norah, afin de permettre à celle-ci de s’exprimer sans prendre le risque d’interrompre le court de ses pensées. Il esquisse un fin sourire lorsqu’elle parle de la non-bataille pour l’attribution des chambres, et ne manque pas de fusiller du regard l’interne qui vient les interrompre. Pas qu’Alfie est curieux au point de s’agacer d’ainsi rester dans l’ignorance des pensées de Norah, mais parce qu’il songe au fait qu’elle allait parler, elle allait lui parler. Et il ne peut s’empêcher de penser que, peut-être, est-ce là une forme de soulagement qui a été rompu par l’arrivée de l’interne. Parce que contrairement à son entourage, il n’a pas connu son mari, et il est parfois plus facile de parler à des gens extérieurs à la situation. C’est ce raisonnement qui lui avait permis de parler de son séjour au Mali, dans cette bulle d’isolement, alors qu’il avait juré à qui voulait l’entendre que le vrai problème était de rester enfermé et de ne pas savoir que faire de sa carcasse, et non pas qu’il s’inquiétait d’avoir été contaminé, qu’il lui était arrivé de se dire qu’il était stupide d’être parti, que les risques étaient trop grands et qu’une première remise en question de son travail s’était alors enclenchée. Alfie reste silencieux tandis que l’interne ausculte son bras, sans-cesse interrompu par les bips de son téléphone, et ce qui aurait pu être réglé en quelques minutes semblent prendre une éternité – alors qu’il n’est pas réputé pour sa patience. Heureusement qu’il peut compter sur la présence de Norah pour l’apaiser, sans quoi il se serait sérieusement agacé – même s’il sait pertinemment que son cas n’est pas une urgence. « T’en fais pas, je suis du genre patient à force de venir ici, ça me gêne pas. » Faux. À moitié vrai, plutôt ; si la patience lui fait défaut, la présence de Norah lui fait plaisir. Un instant, il est tenté de poursuivre la conversation débutée avant que l’interne ne les interrompe, mais Alfie hésite, se tâte, pèse le pour et le contre de revenir sur un sujet qui n’est évidemment pas anodin, au point où Norah est celle qui reprend la parole en premier, par une proposition qui ne manque pas de le surprendre – ce qui se lit certainement sur son visage. Ce n’est que lorsqu’elle termine de justifier cette proposition qu’Alfie reprend la parole, en esquissant un sourire aux derniers mots de la jeune femme. « Tu m’as eu à infirmière à ta disposition. Parce qu’il est évident que son acceptation ne dépend que de cela. Ce serait avec plaisir. Qu’il dit, d’une voix calme, et un sourire sincère sur les lèvres. Mais, j’espère que tu sais dans quoi tu t’engages. Parce que m’avoir en coach sportif, je peux t’assurer que beaucoup ont éliminé l’idée avant qu’elle soit complètement formulée. Il reprend, sur un ton plus léger. Je peux pas garantir que tu vas réussir à me suivre, mais je peux te promettre que j’essayerai de pas te perdre en chemin. » Il conclut, avec un bref rire. La vérité, c’est que même lui n’arrive pas toujours à se suivre, et que là où beaucoup font du footing seulement pour avoir une activité sportive, de son côté le but est d’épuiser suffisamment son corps pour que celui-ci gagne contre des pensées qui l'empêchent de trouver le sommeil. « Normalement, mes autres clients doivent s’adapter au coach et non l’inverse, alors les rendez-vous ont plutôt lieu tôt le matin, mais pour toi je veux bien m’adapter à tes horaires. » Il ajoute, amusé. Très tôt le matin, qu’il aurait pu préciser. Parfois au milieu de la nuit, parfois en milieu de soirée ; en réalité Alfie n’a aucun rythme car il ne prévoit jamais quand ses pensées seront tellement envahissantes qu’il n’aura d’autres choix que de s’éclipser. Il ne dira pas non plus que son footing qui est censé durer une bonne demi-heure peut parfois s’étendre, des heures durant, le temps qu’il parvienne à faire le vide, qu’il essaie du moins. Il ne précisera pas non plus que lorsqu’il revient à lui, il lui faut parfois un bref moment pour savoir où il se trouve, parce qu’il est en mode pilote automatique dans ces moments-là. Il ne dira pas toutes ces choses, parce qu’avec Norah il se forcera à avoir l’air normal, et peut-être que ce n’est pas qu’à elle que ces rendez-vous feront du bien.
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Message(#)alfie + like i've been there before EmptyMer 1 Mai 2019 - 8:26

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Aiden ne le faisais même pas exprès. Comme sa soeur, il était juste un peu trop rêveur, sauf que son besoin de dépenser finissait par le dépasser et que ça finissait en catastrophe. Il s'y habituait et il était loin d'être douillet, encore heureux. Norah avait toujours le réflexe de lui dire des phrases comme "fais attention où tu mets les pieds" ou "regarde ce que tu fais" et Aiden répondait toujours de manière adorable un "oui, Maman", mais le résultat était finalement le même. Tant qu'il n'y avait pas d'accident grave, elle faisait avec. Il était évident que si Alfie passait du temps avec le petit, il se reconnaîtrait immédiatement. Sauf que Norah espérait très sincèrement que son petit ne finisse pas par être une figure connue aux urgences. "Eh bien, justement, non. J'ai beau aimé mon métier, je ne voudrais pas jouer les prolongations dès que je suis rentrée à la maison." se permit de rétorquer la jeune femme avec amusement. Elle lui lançait un regard complice, avec une pointe de tendresse. "Mais tu sais, c'est un peu  monnaie courante dans le corps médical." commença-t-elle à expliquer. "Que leurs enfants ont besoin d'être soignés, ou qu'il y ait des complications que l'o ne voit pas ailleurs. Pour Aiden, ce sont plutôt des anecdotes amusantes, pour d'autres, un peu moins." Elle haussait les épaules. Elle en connaissait, des collègues médecins, infirmiers, aide-soignants, kinésithérapeutes, qui avait des petits bouts de choux avec des complications improbables. A côté, Norah se trouvait particulièrement chanceuse d'avoir un fils avec deux pieds gauche. "Toi ? Espérer qu'il ne finisse pas comme toi ? Mr. Maslow, vous êtes un très mauvais menteur." Norah arqua un sourcil. Elle n'était pas dupe. Elle commençait à connaître Alfie. Peut-être pas aussi bien, elle l'admettait, mais suffisamment pour savoir que ce genre de phrases ne pouvait pas sortir de sa bouche avec sincérité. "Je touche du bois, j'ai de la chance d'avoir des enfants qui ne restent pas scotchés à la télé H24. Ils ont droit de regarder un film ou une série, mais de passer une journée devant un écran, pour le moment, c'est non. Et ils ne s'en plaignent pas. Julie préfère largement ses poupées et ses livres et Aiden de passer son temps dehors ou avec ses petites voitures. Ca me va très bien comme ça." Elle ne les empêchera pas un jour d'avoir une console de jeux, loin de là (il faut juste qu'elle mette de l'argent de côté pour leur faire un jour ce beau cadeau). Les jeux vidéo faisaient aussi partie de la culture actuelle et elle ne voulait pas les en priver. "Et concernant la cheminée, ça tombe plutôt bien, je n'en ai pas à la maison." dit-elle d'un air largement satisfait. "Mais j'avoue qu'une partie de Mario Kart avec les petits un jour ne me déplairait pas. Ils adoreraient aussi." Avec modération, bien évidemment. Après quoi, Norah était entré dans le jeu de son ami lorsqu'il disait avoir besoin de reconnaissance suite à son soit-disant exploit. Comme à chaque discussion avec lui, elle se sentait un peu plus légère. Même si ce n'était qu'une fraction de secondes, une goutte dans les abysses de son quotidien. Ca lui faisait du bien. Qu'Alfie soit partant pour venir un jour chez elle était ce qu'il y avait de plus surprenant. Ils étaient bons amis, cela devrait être parfaitement naturel. Mais il y avait toujours des vestiges de cette relation entre patient et soignant qui persistait qui faisait parfois appréhender chaque nouveau pas en avant. Ils ne savaient pas toujours comment s'y prendre, comment se comporter lorsqu'ils se voyaient habillés en civil en dehors de ces murs. Une sorte de petit malaise difficilement descriptible, qui s'évaporait facilement, mais qui refaisait surface quand ils se revoyaient. "Donc tu serais prêt à te casser un bras pour pouvoir manger un de mes gâteaux ? Je ne sais pas si je dois en être honorée ou exaspérée." dit-elle de son ton naturellement calme, non sans amusement. "Mais je préfère te rassurer, tu n'as pas à en faire autant pour y avoir droit." Là, son ton était plus sincère. "Ta compagne cuisine si mal que ça ?" demanda-t-elle en arquant un sourcil. "Un suite présidentielle, vraiment ?" Quoi que Norah se doutait bien que certaines figures avaient droit à plus de faveurs que d'autres patients lambda (chose qui la mettait hors d'elle, soit dit-en passant). "Tu sais que tu te trouves déjà dans un établissement privé et qu'il y a déjà un meilleur standing que d'autres établissements." dit-elle afin de le taquiner. "Qui plus est, il me semble que tu es déjà en train de te faire soigner pour une infirmière particulièrement compétente et qui connait ton dossier quasiment par coeur, et qui t'a promis des viennoiseries. Je trouve qu'en terme de privilèges, tu es déjà plutôt pas mal." Norah ne se sentait pas supérieure à ses collègues infirmières, loin de là. La voir sortir ce genre de phrases relevait uniquement de la plaisanterie. On la trouvait même plutôt froide au premier abord.  Il n'était pas peu fréquent que les étudiants infirmiers soit en premier lieu intimidé par la belle brune, qui, étant extrêmement rigoureuse dans sa pratique, semblait un peu trop directe parfois (alors que ce n'est que sa franchise qui ressortait de trop). Toujours est-il qu'elle était pédagogue, mais, en revanche, si l'étudiant n'avait pas un minimum de bonne volonté ou qu'i'l était trop imbu de sa personne, elle ne se gênerait pour le remettre à sa place bien comme il faut. Alfie ressentait un certain enthousiasme à rencontre le fils de son ami. "Tu es toujours le bienvenu." lui dit-elle avec une voix douce et un sourire timide. Elle n'avait pas était des plus douées dernièrement pour convier des proches dans son nouveau chez-elle, qu'elle peinait d'ailleurs à s'approprier. Mais elle savait comment prendre Alfie par les sentiments, et les pâtisseries étaient un très bon appât pour le rendre tout de suite partant, et peut-être enfin céder ces quelques murs qui lui séparaient encore. L'un des principaux était peut-être aussi l'humour d'Alfie. Il était plaisant, mais Norah se doutait bien qu'il cachait beaucoup de choses derrières ses plaisanteries et son attitude volontairement enfantine. Elle côtoyait suffisamment de personnes au quotidien à l'hôpital pour apprendre à décrypter ce genre de comportement. Elle ignorait si c'était à son passif, lorsqu'il était en isolement très strict après avoir été exposé au virus d'Ebola, ou s'il y avait d'autres plaies plus intimes qu'il ne parvenait pas à guérir. Tout comme son côté casse-cou. Ils s'en amusaient, mais Norah se demandait parfois si ça ne cachait pas autre chose. Elle ignorait juste ce que cela pouvait être et c'était une porte que son ami ne semblait pas vouloir lui ouvrir. Elle ne l'en blâmait pas, loin de là. Elle se questionnait juste, et s'inquiétait pour lui. C'était tout. "Tu n'as pas à te sentir obligé de ramener quoi que ce soit. Ca me fait plaisir de t'inviter, c'est tout ce qui compte." dit Norah avec sincérité. Elle ne demandait rien en retour, ce n'était pas son genre. Elle était plus sur la confidence quand ils commençaient à parler de son déménagement. Une étape nécessaire mais pas très évidente pour elle. Alors qu'elle était sur le point de partager son ressenti, l'interne fit irruption dans la salle. Car Norah se confiait difficilement, si ce n'est à Anwar ou Caelan, et Alfie depuis qu'ils se connaissaient. Et encore, il fallait parfois lui tirer les vers du nez. Elle avait remarqué le regard furax qu'il envoyait au futur médecin, sa mâchoire un peu plus serré. Difficile pour elle de savoir pourquoi il était soudainement si contrarié. Et le temps que l'interne était là, il ne rigolait plus, ne faisait plus de plaisanteries. Il restait silencieux, jusqu'à ce qu'il soit à nouveau seul avec Norah. Celle-ci reprit alors la parole après un moment de réflexion, une pensée sortie de nulle part qui ne manquait pas de le surprendre tant c'était inattendu. Norah ressentait un véritable soulagement lorsqu'elle l'entendit accepter sa proposition. Elle craignait qu'il ne refuse, pour une raison ou pour une autre, ce qu'elle aurait tout à fait respecté. "J'étais plutôt sportive, avant." se permit-elle de dire. "Mais essaie donc de t'y remettre avec deux bambins à charge." plaisanta-t-elle. Norah n'avait tout simplement pas eu le temps depuis la naissance de Julie, mais maintenant qu'Aiden était un peu plus grand et un peu plus autonome et qu'il allait à l'école maternelle, il était grand temps qu'elle s'y remette. "Mais je me suis entretenue au boulot. Tu n'as pas idée du nombre de kilomètres qu'on peut faire tous les jours." La longueur des couloirs, les allers-retours incessants, les urgences. Finalement, Norah avait peut-être plus entretenu sa cardio qu'elle ne pouvait réellement le penser. Il était probable qu'elle parvienne à le surprendre et même, à se surprendre elle-même. "Mes horaires sont très variables, mais nous arriverons bien à trouver un rythme régulier." Car la cardio ne se travaillait pas en une seule séance. Mais ce n'était pas juste pour une remise en forme et pour le bien-être de son coeur qu'elle voulait courir. A nouveau, Norah se retrouvait dans ses pensées, assises sur son tabouret, la neutralité envahissant chaque trait de son visage et de se regard vide. "J'ai juste besoin de... décompresser." Le mot n'était pas tout à fait juste, mais c'était le premier qui lui venait à l'esprit. "C'est une accumulation de charge mentale, tu sais. Ce qui est arrivé..." Elle secoua la tête, haussa les épaules. "Et malgré ça, la vie continue. Les petits doivent continuer à l'école, je devais continuer d'aller au boulot, la maison devait toujours être entretenue..." Et Norah se sentait à côté de ses pompes. Elle n'avait pas eu d'autres choix que de suivre le mouvement, faire en sorte que les petits se portent bien. Et finalement, elle n'avait que très peu de temps à se consacrer. "Et j'ai beau adoré ce métier, du plus profond de mon coeur, il y aura toujours des situations qui nous toucheront plus que d'autres. Des drames, des problèmes de santé dont les patients doivent se confronter et nous sommes sur la première ligne pour les aider à encaisser. Aider les familles aussi. Ils sont riches de ce qu'ils sont, j'apprends beaucoup d'eux. Mais toute cette peine, ce désespoir. Au bout d'un moment, tu sens que bientôt, la goutte qui fera déborder le vase finira par tomber. Et Dieu sait ce qu'il se passera à ce moment là." Ses lèvres tremblaient légèrement, mais, ses sourcils se fronçaient. Norah n'aimait pas vraiment montrer ses faiblesses, si ce n'est auprès de l'ancien coéquipier de son mari ou de son frère jumeau. Elle prit une profonde inspiration. "Et je me dis, quoi de mieux que de se défouler un peu pour évacuer ce trop plein ?" Ses yeux brillaient légèrement, alors qu'ils se plongeaient dans ceux de son ami. "J'ai bon espoir que ça aide un petit peu. Et j'avoue que je ne m'en sentirai pas capable toute seule." admit-elle. Un peu de temps pour elle, avec quelqu'un qu'elle appréciait beaucoup. Elle le savait très sportif et très actif et sur le coup, elle ne voyait personne d'autre que lui pour se lancer dans cette activité. Elle ne voulait pas ennuyer Anwar encore une fois avec ses états d'âmes, pareil pour Caelan d'ailleurs. "J'en ai juste...vraiment besoin." Norah savait déjà qu'elle allait certainement culpabiliser de s'accorder ce temps là, d'une manière ou d'une autre. Mais elle avait l'avantage de connaître ses limites et ses besoins, et il était grand temps qu'elle prenne un peu soin d'elle.
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Message(#)alfie + like i've been there before EmptyVen 10 Mai 2019 - 18:01

Si tous les enfants passent par cette période durant laquelle ils se sentent invincibles et ont besoin de tester leurs limites, certains n’arrivent pas réellement à établir celles-ci ; ce fut le cas pour Alfie durant sa jeunesse et, c’est ce qu’il comprend au fil des discussions, c’est le chemin que semble emprunter Aidan. Ainsi, s’il ne lui est pas difficile de se trouver des points communs – même à l’heure actuelle, à son âge avancé – avec le jeune garçon, celui-ci part avec un avantage considérable dont Alfie n’a pas eu la chance de bénéficier : un parent travaillant dans le milieu des soins et étant à même de gérer des incidents toujours plus nombreux. Inutile de préciser qu’Alfie jalouse un bref instant Aidan ; parce que bon sang, qu’est-ce que ça l’aurait arrangé que l’un de ses parents puisse être à son entière disposition pour qu’il s’adonne à sa véritable passion, celle de cumuler les blessures plutôt que de réfréner son énergie et sa créativité débordante pour limiter celles-ci. Ses parents ont préféré des métiers certes tout aussi conventionnels, mais surtout bien plus tranquilles – et chiant comme la pluie, de son humble avis. Une mère assistante pastorale et un père pharmacien, on ne peut pas dire qu’Alfie en ait tiré des avantages. Du moins, c’est la version officielle, officieusement avoir un père en charge de son propre commerce rempli de médicaments l’avait grandement arrangé à l’adolescence – même si cela avait sérieusement mis en péril sa relation avec son géniteur en même temps que la carrière de celui-ci. Même si la situation est très différente, il peut malgré tout comprendre que Norah souhaite éviter que son travail n’empiète trop sur la sphère privée, et il acquiesce silencieusement à sa réflexion, avant de tendre l’oreille de manière plus attentive lorsqu’elle apporte quelques précisions supplémentaires. « Et pour Julie ? » Qu’il demande avec intérêt, car s’ils discutent effectivement de l’aspect ETT (enfant tout terrain)* d’Aidan depuis quelques minutes, il n’empêche qu’Alfie n’oublie pas la fille aînée de Norah et que si celle-ci n’a pas été mentionnée, c’est probablement parce qu’elle n’est pas aussi casse-cou que son petit frère ; pour autant il a envie de s’assurer que tout va bien pour elle aussi. À force d’entendre leur mère parler d’eux en des termes toujours élogieux, il s’est attaché aux deux enfants, même s'ils ne sont jamais le sujet principal de leurs conversations et il n’est pas au courant de tout ce qui les entoure, raison pour laquelle il se permet de poser la question. Par la suite, Alfie lève les mains en l’air en guise de bonne foi tandis que Norah met en doute ses capacités de menteur. « Ça partait d’une bonne intention, pourtant, je t’assure ! En plus, dis ainsi, on dirait que je me réjouis qu’il accumule les séjours aux urgences, t’imagines quelle genre de personne ça fait de moi ? Dans tous les meilleurs épisodes d’Esprits Criminels, quand ça commence ainsi, ça se termine très mal pour les pauvres gosses ; et jusqu’à preuve du contraire Alfie n’a pas hérité du gêne « psychopathe à tendances préférentielles pour les enfants casse-cou ». Hm, disons seulement que je lui souhaite d’être plus… malin, c’est le mot, que moi, et donc d’avoir moins de souvenirs de ses exploits. » Disons les choses ainsi, ça lui évitera de partir d’ici avec des menottes aux poignets plutôt qu’un pansement au bras. Dans un sens, Norah peut malgré tout se réjouir ; là où Alfie n’avait pas grand-chose d’autre à faire que de trouver le plan parfait pour descendre la ruelle en bas de chez lui le plus vite possible en caddie de supermarché, Aidan aura bientôt de nouvelles occupations, puisque les enfants de son âge abandonnent de plus en plus vite les jeux en plein air pour ceux sur console. À moins que Norah s’y oppose, ou qu’il n’en soit tout simplement pas particulièrement demandeur – comme cela semble aussi être le cas de sa sœur. « Mais, quels genre de gènes ils ont ? Ils échappent à la malédiction des parents qui bossent dans le médical, pas que je te souhaite le contraire hein, et en plus ils ne sont pas demandeurs d’écran, t’as décroché le jackpot. Il pense à voix haute, avant de très rapidement reprendre. J’avoue que Mario c’était pas le meilleur exemple parce que je pense que n’importe quel parent sensé achète une console pour y jouer avec ses gosses, en tout cas, lui, c’est ce qu’il ferait, parce que Mario c’est Bae, mais imagine un peu quand il te demandera le dernier GTA. Oui, c’est tout de suite pas la même ambiance. Il reprend son sérieux, réfléchit quelques instants avant de reprendre la parole. Je sais pas si je t’en ai déjà parlé, mais ma copine est bibliothécaire, alors si Julie s’intéresse autant que ça aux livres, je suis sûre que Juliana se fera un plaisir de lui faire une petite sélection, surtout qu’elle s’émerveille toujours dès qu’un enfant a le goût de la lecture. Il propose avec un sourire, tandis qu’il ajoute, avec amusement. Ça peut compenser le fait que je souhaite l’hôpital à un de tes enfants. » Du coup, dans ledit épisode envisagé plus haut d’Esprits Criminels, il ne devient plus qu’un suspect et non le coupable, le karma est (presque) sauf.

Lorsqu’il est question d’entrer dans le vif du sujet est d’expliquer les raisons qui l’ont amenées ici, Alfie préfère d’abord s’assurer de la coopération de Norah quant à vanter des exploits qui n’ont pas été les siens, mais qui feront assurément du bien à son égo. En réalité, celui-ci n’est jamais blessé autant que son corps, étant donné qu’Alfie n’a jamais eu peur du ridicule – et tant mieux, sinon il serait mort de honte depuis très longtemps et son espérance de vie n’aurait probablement pas dépassé les dix ans. Il fait le con, il assume jusqu’au bout, c’est un peu sa devise et, surtout, il n’a pas vraiment d’autres choix ; sa vie serait bien plus ennuyante s’il se formalisait de ce qu’on peut penser de ses exploits, et il passerait assurément à côté des meilleurs moments de son quotidien – qui vont souvent de pairs avec ses blessures. Il reprend toutefois son sérieux lorsque Norah formule une invitation à laquelle il ne s’attendait pas, mais qu’il apprécie bien plus qu’il ne le laisse penser alors que son naturel reprend le dessus et qu’il plaisante pour masquer sa gêne. « Honorée, évidemment ! Il ne manquerait plus que je me casse en deux, littéralement, pour rien ! » Il reprend avec amusement, tandis qu’il grimace légèrement lorsqu’elle se veut rassurante. « C’est presque dommage, en général j’aime relever les défis qu’on me lance. » Et oui, même si Norah ne voit certainement pas les choses ainsi, lui, c’est ainsi qu’il les a interprétées – principalement parce que sa vie s’est toujours résumée à un ensemble de défis qu’il prenait à cœur de relever, les bons comme les mauvais, et que même si aujourd’hui il croit avoir définitivement enterré les seconds, ça ne change en rien sa manière de fonctionner, parce qu’il a toujours été comme ça. Tout comme il a toujours été taquin avec Jules, depuis le début de leur relation, et qu’il n’est pas étonnant qu’il critique ses talents culinaires quand, en réalité, elle n’a pas à en rougir. « Seulement quand elle confond le sel et le sucre. » Ce qui 1) arrive rarement 2) est toujours sa faute parce que c’est le genre de gaminerie qui le fait rire. En réalité, ce serait plutôt à la jeune femme de se plaindre, tant Alfie aime se lancer dans des expériences culinaires qui ne semblent réussies qu’à ses yeux (et il persiste et signe, les vers de mer sont franchement bons quand ils sont grillés aux noisettes, m’enfin, il paraît que son avis ne vaut rien puisque son « palais a été flingué par toutes les larves, racines d’arbre et autres fourmis à miel » qu’il a pris l’habitude de consommer au cours de sa vie. Les risques du métier pour certains, les avantages de celui-ci pour lui). Acquiesçant silencieusement pour confirmer son envie d’une suite présidentielle, Alfie esquisse une petite moue par la suite alors que Norah pointe du doigt – avec justesse – son traitement qui fait déjà de lui un privilégié. « Hm. C’est pas faux, mais il pourrait encore y avoir des améliorations, par exemple je trouve que niveau confort, c’est pas terrible. Il râle (faussement) en tapotant le coussin du lit d’examen. Et puis, l’infirmière pourrait être encore plus compétente, elle est pas tellement à jour concernant mes vaccins. » Il affiche une petite moue, n’en voulant pas le moins du monde à Norah, tout d’abord parce qu’il est effectivement privilégié qu’elle connaisse aussi bien son dossier médical, et parce que si l’envie lui venait de l’apprendre par cœur elle ne s’en sortirait de toute manière pas très bien puisque la liste des vaccins qu’Alfie a dû faire au cours des années est bien plus longue que pour le commun des mortels ; il a d’ailleurs découvert l’existence d’une bonne partie d’entre eux par le biais des différents bilans de santé auxquels il devait se soumettre avant de partir à l’étranger. « Et pour les viennoiseries, c’en est qu’au stade de promesse justement ! » Il s’offusque (faussement, encore une fois), parce que le meilleur moyen pour se mettre l’anthropologue à dos est de toucher à son estomac.

Le sujet revient sur Aidan et Alfie ne s’en agace pas, bien au contraire ; la perspective d’avoir à se déguiser pour être accepté par l’enfant est loin d’être un problème pour lui. Principalement parce qu’on ne sait pas qui entre Aidan et lui apprécierait le plus l’effort, hm. À la réflexion de son amie, Alfie esquisse un sourire timide. Il s’en doutait, à vrai dire, pour autant la confirmation est agréable à entendre bien que persiste cette gêne entre eux – pas parce qu’il est mal à l’aise avec Norah, bien au contraire, l’aisance qu’il ressent en sa compagnie en est presque perturbante. Quoi qu’il en soit, la proposition est désormais acceptée, ne reste plus qu’à acter une date et trouver un présent à la hauteur de l’invitation, même s’il aucune obligation. « Oh je m’y sens pas obligé, mais quand même, en dehors de l’invitation à manger, c’est surtout l’occasion d’une crémaillère. Et, comment dire… j’ai une longue liste de cadeaux inutiles que je rêve d’offrir à cette occasion, mais pas suffisamment d’amis qui déménagent, alors… considère que t’es prévenue. » Et qu’il ne faudra donc pas qu’elle s’étonne de se retrouver avec une louche Nessie, un bazooka à maki ou encore une guillotine à pizza. Ses pensées se noircissent dès l’instant où l’interne entre dans la pièce et interrompt une Norah qui allait s’épancher sur le déménagement en question, une étape pas si anodine pour elle compte tenue de sa situation actuelle. Mais il ne saura pas ce qu’elle semblait être prête à confier, et il ne le saura probablement pas tant que le sujet ne sera pas à nouveau abordé naturellement par la jeune femme ; parce que s’il est prêt à accueillir ses confessions, il n’a aucune intention de forcer celles-ci. C’est le principe qui a toujours dicté leur amitié, c’est probablement la raison pour laquelle il s’est toujours surpris et se surprend encore à avoir tant de facilité à partager certains aspects de sa vie qu’il cache au reste du monde. Parce que Norah ne force jamais les choses, ne les attend pas même, et c’est donc naturellement qu’Alfie s’exprime s’il vient à en ressentir le besoin – et c’est là toute la différence avec tant d’autres personnes de son entourage. Il affiche un sourire compréhensif, de ceux qui lui confirment – si elle en doute – que son oreille sera toujours tendue pour elle, quoi qu’il advienne, peu importe le moment. La frustration de ne pas avoir su épauler correctement Norah alors qu’elle semble en avoir besoin est rapidement effacée lorsqu’elle formule une demande là encore d’apparence anodine, mais qui ne l’est pas compte tenu la situation de la jeune femme. Et si d’ordinaire courir est quelque chose qu’il tient à faire seul, il est prêt à faire abstraction de ce principe si cela permet d’apporter quelque chose à Norah. Probablement parce qu’ils appréhendent cette activité de la même manière ; et qu’il s’agit d’une véritable nécessité derrière ce lâcher prise qui va au-delà d’une condition physique à maintenir dans le cadre d’une vie équilibrée. Un léger rire compréhensif s’échappe de ses lèvres tandis qu’elle explique ne pas avoir eu la possibilité de s’y remettre avec deux enfants à charge. Il ne doute pas que cela modifie le sens des priorités d’un individu, et c’est une des raisons pour laquelle Alfie ne se sent pas encore prêt à franchir ce cap avec Jules. « Oh, j’imagine sans difficulté, à vrai dire. » Nulle ne doute qu’elle fait probablement le double du nombre de pas qu’il peut faire à l’université, et ça ne le surprend même pas ; il suffit de jeter un coup d’œil autour d’eux pour voir le nombre d’allers-retours que fait le personnel de cet hôpital. Il acquiesce silencieusement pour confirmer qu’ils sauront trouver un rythme qui leur convient ; et ce ne sera pas un mal pour Alfie que de se calquer sur celui de Norah qui, sans aucun doute, l’obligera à cesser de se lever à l’heure où certains rentrent de soirée pour aller courir, simplement parce qu’il ne supporte plus d’être immobile dans son lit, incapable de se rendormir – encore faut-il qu’il trouve réellement le sommeil pour cela. « Ouais, le fonctionnaire que je suis peut s’adapter plus facilement à toi que l’inverse. » Il confirme avec un sourire qui vise à masquer son agacement qui n’est pas dirigé contre Norah mais contre ce travail avec lequel il entretient des rapports très conflictuels. Alfie reprend son sérieux alors que le regard de Norah se fane, et que cette fois-ci, personne ne vient interrompre le récit de ses pensées. L’anthropologue se veut silencieux, écoutant chacun des mots que Norah veut bien lui confier. Et au-delà d’être simplement attentif à ses paroles, celles-ci le frappent plus qu’il ne veut bien l’admettre et ne font que confirmer que s’ils arrivent si facilement à s’exprimer l’un en compagnie de l’autre, c’est parce qu’ils se comprennent. Ils ne l’admettront jamais, et leurs situations demeurent très différentes ; pour autant Alfie se retrouve dans chacune des phrases de Norah. Ce qui est arrivé. La vie continue. Il n’a pas la prétention de comprendre ce que vit Norah, et jamais il ne prétendra le pouvoir, parce qu’il n’a pas perdu l’être qui lui est le plus cher, mais il a perdu des morceaux de lui-même au cours des années – même s’il refuse de l’admettre. Son accident, la mort d’Amelia, son sevrage difficile, son retour d’Afrique, la maladie puis le décès de Rachel, son agression qu’il persiste à présenter comme un « petit souci », la brèche a été ouverte et petit à petit, sans même qu’il en ait conscience, ce sont des millions de bactéries invisibles à l’œil nu qui s’infiltrent dans son système et mettent à mal l’entier de celui-ci. Alors il comprend, mieux que quiconque, et peut-être est-ce la raison pour laquelle Norah lui a faite cette demande à lui et pas à un autre. Il écoute, il capte son regard brillant, et il finit par poser délicatement sa main sur la sienne pour attirer son attention à l’issue de son récit, avant de très vite faire marche arrière et s’interdire ce geste encore trop familier. « T’en fais pas, tu as pas besoin de te justifier, pas avec moi. » Qu’il la rassure dans un premier temps, avec un fin sourire, parce que c’est la stricte vérité. Elle pourrait débarquer un jour et lui demander de l’accompagner à une exposition sur les vaches sacrées d’Inde ou exiger qu’il s’empare de son sac à dos pour effectuer une randonnée à dos de chameau avec elle qu’il n’en demanderait pas plus pour autant. Alfie n’a jamais apprécié qu’on lui demande de se justifier pour ses actes, ses mots ou ses pensées ; ainsi il lui est impensable d’en demander autant vis-à-vis d’autrui. « Je comprends… je comprends vraiment. Alors, on ira à ton rythme, quoi qu’il advienne. Pour cette histoire de course, autant que pour tout le reste. Ça t’aidera, je t’assure. Qu’il ajoute, convaincu, avec un sourire. Et si c’est pas le cas, on trouvera autre chose. Crois-moi, je suis plein de ressources et d’idées. » Et cette fois, c’est un léger rire qui s’échappe d’entre ses lèvres. Alfie se veut ensuite silencieux pendant quelques instants, baissant la tête et ne sachant pas exactement ce qu’il peut dire, et ce dont il doit s’abstenir. La manière de lui montrer son soutien sans être trop insistant ou intrusif. La manière de rebondir sur ses mots qu’il comprend beaucoup trop bien sans pour autant l’obliger à ressasser ceux-ci. Finalement, il relève la tête et capte le regard de Norah, et il lui faut encore quelques secondes pour que les mots s’échappent d’entre ses lèvres. « Mais Norah… Si cette goutte arrive et fait déborder le vase, tu le diras à quelqu’un, pas vrai ? Il se pince les lèvres, cette peur d’être trop curieux bien présente. Pas nécessairement à moi, je veux dire, mais… juste à quelqu’un, pour éviter que tu découvres ce qu’il se passera à ce moment-là. Parce qu’il a une idée sur la question, parce qu’il l’a en partie expérimenté et qu’il peut l’assurer : ce n’est jamais bon, c’est même tout l’inverse. C’est une bonne chose que tu prennes du temps pour toi. Tu y as le droit, et c’est même essentiel. » Il ajoute par la suite, parce que c’est aussi ce qu’il a retenu, Norah parle de son travail, de ses enfants, de sa maison, mais pas d’elle. Elle s’est mise de côté pendant trop longtemps, et le fait qu’elle prenne enfin le temps de s’occuper d’elle le rassure, il y voit un signe qu’elle est prête à se relever de cette tragédie – et pas seulement à faire semblant de le faire pour les autres, mais bien pour elle. Sans s’en rendre compte, le regard d’Alfie s’est à nouveau ancré sur le sol, et s’il y a toujours cette gêne qui persiste, il n’est pas pour autant mal à l’aise, quand bien même la conversation se veut plus sérieuse que ce qu’il imaginait en venant ici, et qu’il tend à fuir ce genre de discussions. Mais pas avec Norah, pas lorsqu’elle se confie, pour autant c’est bien un « j’espère que vous avez des pansements Adventure Time » qui s’échappe d’entre ses lèvres, parce que c’est la seule manière dont il gère les choses ; et que peut-être c’est aussi bénéfique à elle qu’à lui d’entrecouper tous ces aveux d’une touche de légèreté qui ne se veut jamais déplacée, mais presque nécessaire.

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Message(#)alfie + like i've been there before EmptyLun 13 Mai 2019 - 16:02

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what it's like to be me
"Elle est courageuse, mais pas aussi casse-cou que son frère." répondit Norah par rapport à sa fille aînée. En effet, Julie avait dégoté bien plus de traits de caractère de sa mère que de son père. "Frank me disait toujours que c'était mon portrait craché. Qu'il ne lui fallait pas grand chose pour faire comprendre quand est-ce qu'il fallait la laisser tranquille ou non." Un air désobligeant, un long soupir, ou simplement le fait de s'isoler tranquillement dans un chambre ou dans un coin du jardin. "Disons qu'elle est bien plus prudente. Elle adore jouer avec Aidan et elle-même est habitué à le voir tomber tout le temps, mais elle apprécie tout autant les moments calmes, à dessiner ou à lire un livre. Mais quand elle tient à s'affirmer, je t'assure qu'elle le fait très bien." Point de vue caractère, Aidan et Julie avaient peu de points communs, mais cela n'empêchait pas une bonne entente la plupart du temps. Ils étaient plutôt faciles à vivre, malgré la maladresse du plus jeune. "Elle est la seule des deux à avoir des souvenirs de Frank, elle ressent aussi un manque." Bien moindre que celui de sa mère, cela allait sans dire. Mais il arrivait à la petite de dire qu'elle voulait revoir son père, qu'elle était prise d'un chagrin parce qu'elle savait qu'elle n'allait plus jamais pouvoir lui faire de câlins. Des scènes d'autant plus douloureuses pour sa mère, qui devait à la fois soulager l'esprit de sa fille tout en empêchant que la sienne ne se noie dans les abysses. Mais les enfants Lindley étaient à eux-mêmes une très bonne raison de vivre et Norah se devait d'admettre que si elle tenait le coup, c'était grâce et pour eux. Alfie, lui, semblait bien déterminé à devenir un modèle à suivre pour le cadet, espérant juste qu'il soit un peu plus futé pour éviter les gros ennuis. "Il n'a avoir que quatre ans, il a déjà quand même quelques chutes qui l'ont marqué. Maman, j'ai failli tomber comme la dernière fois, là, tu te rappelles ?" Norah esquissait un fin sourire amusé. "C'est le genre de môme à réussir à trébucher sur un sol parfaitement plats. Mais il a tellement la tête dans les nuages." Pas besoin d'un caillou ou d'un béton mal uniformisé. Norah n'était même pas certaine qu'il se casse plus la binette sur un chemin semé d'embûches que  sur le trottoir de Logan City. C'était plutôt équivalent; c'est dire l'exploit qu'accomplissait le petit. "On ne les a jamais vraiment scotché devant la télé. Ils ont droit de regarder des films ou des dessins animés, mais dans un temps imparti ils ne s'en plaignent pas plus que ça. Enfin, disons que je m'attendais à pire." A partir du moment qu'ils n'étaient pas habitués à rester collé devant un écran, ils s'en accoutumaient vraiment bien. Norah se doutait qu'il viendrait un temps où les négociations se feront plus difficiles. "Par contre j'ai prévu toute une liste de films à leur faire regarder le moment venu. Hors de questions qu'ils passent à côté de Jurassic Park ou d'Harry Potter." Ce n'était que deux exemples au milieu de films que Norah jugeait classique. "Et pour ce qui est de GTA, Aidan pourra toujours aller se brosser le jour où il me demandera de l'acheter du haut de ses douze ans." Alfie savait très bien que son amie ne se laissait pas faire, et Aidan pourra tenter de faire les yeux doux en désespoir de cause, il savait pertinemment que sa mère  pouvait être dure en affaires lorsqu'il s'agissait de négocier. Norah préférait trouver des compromis, mais parfois, ce n'était pas possible. Surtout qu'elle n'avait pas forcément les moyens de gâter ses enfants autant qu'elle ne le voudrait, ce qui était particulièrement frustrant pour elle. Qu'Alfie aille dans son sens en lui rappelant que sa petite amie était bibliothécaire et en lui exposant une suggestion plus qu'alléchant la touchait énormément. Le regard qu'elle avait levé vers lui était bien plus que reconnaissant. "Julie adorerait..." dit-elle dans un soupir. "Tu ne pourrais pas la rendre plus heureuse, elle serait aux anges." Norah n'avait jamais vraiment songé à l'emmener dans une bibliothèque. Elle aimait bien lui acheter un livre de temps en temps, surtout que Julie aimait beaucoup les relire, les posséder. La petite avait exprimer plus d'une fois son envie d'avoir une immeeeeeee[...]eeense bibliothèque dans sa chambre. "Si ta copine est d'accord, ce serait vraiment merveilleux pour elle." Norah lâcha un tout petit rire quand le brun se relançait sur une note d'humour. Il ne manquait jamais une opportunité pour cela. Il poursuivait ensuite les taquineries concernant les privilèges qu'il avait en se pointant fréquemment aux urgences. On ne pouvait décidément pas l'arrêter, quand il était dans sa lancée. Le truc, c'est qu'avec l'infirmière ci-présente, on lui donnait un peu plus de fil à retordre, car Madame avait du répondant. "Tu sais ce qu'elle te fera  l'infirmière incompétente si tu continues à être aussi pointilleux ?" lui demanda-t-elle d'un air faussement sérieux. Norah connaissait moultes moyens de rendre la pareille. Une petite injection dans son fessier, ou verser malencontreusement un flacon d'antiseptique  sur sa plaie non protégée par un pansement. "Petit conseil : ne jamais trop chercher une infirmière. Parce que sinon, tu la trouves, et bien en plus." lui chuchota-t-elle comme s'il s'agissait du plus grand des secrets, toujours sur le ton de la plaisanterie. Alfie ne semblait pas non plus épargner sa petite amie, qui devait avoir les oreilles sifflant sacrément à ce moment là en se moquant de ses talents culinaires. Talents qu'il avait apparemment très envie d'apprécier auprès de Norah, à raison de mets sucrés. "Mais je n'ai qu'une parole, alors tu peux être certain que tu en auras." Seulement elle n'avait pas dit où, quand, et comment, et elle se gardait bien de le dire car elle savait pertinemment que si elle se lançait dans ce jeu là, Alfie s'y prêtera certainement jusqu'à ce que mort s'en suive. Il ne ratait jamais une occasion pour faire ressortir son côté enfantin. Et s'il ne s'agissait pas de sa gourmandise, il s'agissait d'idées farfelues, comme son intention d'offrir à Norah des cadeaux afin de célébrer son déménagement. Et bien sûr qu'elle se doutait qu'il n'allait pas se la ramener avec une cafetière, un beau chandelier ou quoi que ce soit qui puisse avoir un semblant d'utilité suite à un emménagement. "Je devrais avoir peur ?" demanda-t-elle en arquant un sourcil. "Dis toi que, selon ce que tu as l'intention de m'offrir, ça puisse jouer sur mon envie à pâtisser ou te permettre de goûter mes gâteaux quand tu seras là. Just saying." rétorqua-t-elle avec un haussement d'épaules, le tout sur le ton de la plaisanterie. Elle le taquinera avec ça, parce qu'elle savait que c'était un argument de taille. Ils se cherchaient et se trouvaient mutuellement. La chose qui était plus compliquée pour Norah à admettre, était qu'elle se sentait épuisée. Elle n'avait jamais eu à dire combien ces deux années était dures pour elle, en tout point. On le supposait, on le voyait de par son état, son comportement ayant radicalement changé. Alors demander à Alfie d'aller courir ensemble était une véritable nouvelle étape, elle qui admettait implicitement qu'elle se sentait faillir. "Merci." souffla-t-elle tout bas, soudain bien songeuse. Un long soupir s'échappa difficilement de ses lèvres tremblantes. Elle ne s'attendait absolument pas à ce qu'Alfie fasse une approche physique, quelle qu'elle soit. Entre eux, leur amitié était des plus sincères, mais il y avait là une certaine pudeur, qui, jusqu'ici, avait extrêmement limité tout geste affectueux. Ils n'étaient pas impossibles, loin de là. D'ailleurs Norah ne s'était pas gênée pour le prendre dans ses bras aussi longtemps que possible le jour où Rachel s'était éteinte. Elle avait même déposé un baiser sur ses mèches brunes et était restée avec lui de nombreuses heures. Et pourtant, cette main posée sur la sienne semblait unique, exclusive, singulière. Si bien qu'il préférait la retirer très rapidement. Alors seulement Norah réalisait combien cette sensation était agréable. Mais jamais, Ô grand jamais, ne se permettrait-elle d'en redemander. On disait souvent d'elle qu'elle paraissait inaccessible. Ca ne semblait pas être le sentiment d'Alfie à son égard. Lui avait sa propre façon d'exprimer le fait qu'il était bel et bien présent pour elle. Il fallait le suivre avec sa vivacité d'esprit, il fallait s'attendre à ce qu'il bouleverse l'atmosphère la plus sérieuse par une petite plaisanterie. Elle était touchée qu'il reste tant fidèle à lui-même, mais elle était peinée de n'avoir la force que de lui rendre un bien faible sourire. Elle savait très bien que lorsqu'il disait qu'il comptait aller à son rythme, il ne parlait pas uniquement de la vitesse de leurs prochaines courses. Il y avait tout le reste derrière et il était prêt à s'adapter à cela pour que Norah ressente du bénéfice à cette activité en devenir. Ce n'était pas juste du footing. Elle savait que lui, comprendrait. Elle le fixa longuement après une question qu'elle ne penserait jamais entendre de lui. C'est dire combien il se faisait du souci pour elle. La brune le fixait longuement, sachant pertinemment que ça ne servait rien de mentir  (ce n'était pas son genre de toute façon), ou de prétendre que tout allait bien. Oui, avec Norah, on supposait beaucoup. Ceux qui la connaissaient bien, savaient qu'elle n'allait pas bien. Anwar, Caelan, ou encore ses deux frères aînés.  Et Alfie. Sinon, il ne le lui aurait pas demandé. Le silence qu'elle imposait en disait long. "... Je sais pas." finit-elle par lui répondre, son hésitation montrant là toute la sincérité de sa réponse. "J'ignore quand ça arrivera, comment ça sera. Et j'ose espérer que ce jour ne viendra jamais." Mais, au fond d'elle, elle savait que ça arriverait. La plus grande interrogation était de savoir comment ça allait se manifester. "Ces derniers temps, je me demande comment j'ai pu réussir à continuer comme ça depuis qu'il n'est plus là." Elle sentait sa gorge se serrer. Elle baissa ses yeux quelques secondes. Norah était une femme indépendante.  Elle était la dernière à se plaindre de ses journées chargées et on ne la voyait jamais véritablement de mauvaise ou contrariée. Certes, plus triste et plus silencieuse qu'avant, mais elle ne ferait jamais d'états d'âme à l'hôpital. Et dans l'autre sens, elle n'avait jamais ramené le travail à la maison. Ce n'était que les horaires qui faisait parfois grincer les dents de Frank, à l'époque. Mais sinon, elle gérait tout toute seule, ne sollicitant que très peu l'aide de son entourage. Pourtant, ce derneir avait tenté plus d'une fois de lui forcer la main au risque de la contrarier et de se faire envoyer paître. Mais les seuls à réussir à la faire céder pour qu'elle lâche un peu prise ne serait-ce qu'une heure ou deux, étaient Caelan et Anwar. Ils savaient comment faire plier cette tête de mule pour qu'elle accepte une aide extérieure. C'était encore particulièrement rare. Et c'était certainement l'une des conséquences de ce rapprochement de point de rupture. "L'ancienne maison me rappelait lui, son ancien coéquipier aussi. Julie et Aidan aussi. Il ne me faut pas grand chose à vrai dire." Rien que l'alliance et la bague de fiançailles qu'elle enfilait dans une chaîne en argent autour de son cou quand elle était au travail. Les règles d'hygiène demandait à ce que les infirmiers ne portent pas de bijoux au niveau de la main. Mais pour Norah, il était impossible de totalement s'en séparer.  Elle ne le pouvait pas. "Et j'aimais bien courir, avant. J'en ressortais toujours avec courbatures, mais ça me libérait l'esprit et je me dis que ça marcherait peut-être aussi pour ça." Sa voix tremblait. Elle haussait les épaules. "Ca  vaut le coup d'essayer, au moins." Et puis, dans tous les cas, elle savait qu'elle passerait un bon moment en compagnie de son ami. Histoire de retrouver un peu de contenance, Norah prit une profonde inspiration. Il était grand temps qu'elle referme ce pansement et Alfie n'hésitait pas pour radoucir l'ambiance. "Malheureusement non, on  n'est pas sponsorisé." répondit-elle doucement alors qu'elle déposait avec grand soin les compresses et l'adhésif sur les plaies propres. Elle dégaina son fluo, qui traînait dans sa poche à côté de son stylo quatre couleurs, son marqueur et une paire de ciseaux. Elle dessina rapidement une étoile et une fleur. "Mais tu as droit à un pansement unique et fraîchement customisé. Du grand art." Bien qu'il semblerait qu'elle retrouve un brin d'humour, on sentait que Norah n'était pas tout à fait remise de ses précédentes confessions. Elle savait qu'Alfie avait compris la détresse, que ses messages n'étaient pas arrivés dans l'oreille d'un sourd. Cela était tout aussi effrayant qu'apaisant, à dire vrai. Norah semblait éteinte, presque lessivée par ses aveux. Ce n'était pas tout, loin de là, elle ressentait encore un poids bien trop lourd sur ses épaules et l'idée d'avoir montré l'une de ses brèches ne la réjouissait pas vraiment. Mais c'était un mal nécessaire. "Merci, Alfie." finit-elle par dire, sorti de nulle part. Bien malgré elle, une larme s'échappa de l'une de ses paupières. Ses lèvres pincées empêchaient un soupir blasé et exaspéré sortir de sa bouche, tant elle détestait montrer sa fragilité sur son lieu de travail.  Et même devant Alfie, cela dit. La pudeur de leur relation allait même jusque là, sauf durant des instants particulièrement extrêmes. Mais là, ce n'était pas le cas. Elle déglutit difficilement sa salive, espérant gober avec son si soudain chagrin. "Avec ça, tu es fin prêt pour ta prochaine gamelle." dit-elle finalement d'un signe de tête, indiquant le pansement. Tentative désespérée de faire comme si de rien n'était, à prétendre que tout allait bien.
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Message(#)alfie + like i've been there before EmptySam 8 Juin 2019 - 22:29

Si la personnalité du petit Aidan se dessine au fil des conversations avec Norah, principalement parce que le jeune garçon a l’honneur de recevoir le stample du club des « casse-cou de nature » présidé par Alfie en personne, on ne peut pas en dire de même de celle de sa sœur. Si Norah a déjà évoqué la jeune fille lors de leurs échanges, elle ne s’est jamais épanchée plus que cela sur cette dernière – et finalement, pas beaucoup plus concernant Aidan, car même si Alfie a cerné les tendances intrépides de l’enfant il n’en connaît pas beaucoup sur lui. C’est un chemin sur lequel Alfie se sent toujours illégitime de basculer s’il n’est pas amorcé par Norah, lui donnant ainsi l’autorisation de dériver sur l’ordre du privé. Ce paradoxe est propre à leur amitié ; ils se sont soutenus lors de moments particulièrement difficiles pour l’un et l’autre, se sont vus dans une détresse évidente, mais la loi du silence règne entre eux ; et malgré ces instants qui ont scellé la sincérité de leur amitié, ils persistent à n’en considérer que la surface. C’est la raison pour laquelle il a l’impression de connaître les enfants de Norah sans pour autant que c’en soit le cas, et c’est aussi pour cette raison qu’il semble autant craindre de les évoquer autant que cela lui semble pertinent au détour de cette conversation. Alfie esquisse un mince sourire désolé lorsque Norah évoque Frank, avant d’acquiescer silencieusement à la suite de ses propos. Le portrait qu’elle dresse de sa fille confirme les dires de Frank ; présentée ainsi, Julie semble effectivement être le portrait craché de Norah. Il n’a pas la prétention de croire qu’il connaît celle-ci plus que la fille, en réalité, parce qu’ils se côtoient sans se côtoyer et qu’il ne saurait dire si Norah est avec lui comme elle l’est au quotidien, mais de son point de vue les caractéristiques imputées à Julie pourraient également l’être à sa mère. « Effectivement, ça me fait penser à quelqu’un. » Qu’il glisse finalement, avec un fin sourire. La discrétion de Norah est égale à son mordant, et il serait faux de considérer que sa bienveillance l’empêche de s’affirmer. Pour avoir déjà bénéficié de ce regard soutenu et de ce soupir traduisant de son agacement, il sait pertinemment que ses méthodes sont simples, mais efficaces. Combien de fois s’est-elle empressée de le remettre (gentiment, mais efficacement) à sa place à chaque fois qu’il était prêt à se taper la tête contre les murs ou qu’il maudissait cet hôpital et tout son personnel soignant pour l’empêcher de retrouver sa liberté durant sa période d’isolement ? C’est une des raisons pour laquelle il n’avait pas fini par devenir fou, parce qu’il pouvait compter sur elle pour lui remettre les idées en place quand il était incapable de raisonner correctement. Certes, c’est une capacité qui lui fait cruellement défaut en temps normal, mais qui s’était vue accentuée, à ne plus en être supportable, lorsqu’il avait été confiné dans quelques mètres carrés, lui qui vit pour explorer le monde et son contenu. C’est une mine plus sérieuse qui prend possession de ses traits lorsque son amie évoque à nouveau son défunt mari, et Alfie reste interdit quelques instants. Il voudrait trouver les mots, ceux qui réconfortent, ou du moins qui en sont une tentative, mais il n’y parvient pas, parce qu’il sait pertinemment que le poids des mots est trop souvent dévastateur, jamais véritablement réparateur. « Je sais que j’en sais rien, parce que j’ai pas vécu cette situation, mais je sais qu’on s’habitue à l’absence des gens. Beaucoup disent que c’en est triste comme constat, moi je dirais que c’est ce qui nous permet d’avancer. » Il se permet toutefois, le regard qui se détourne de Norah. Ce n’est pas tant qu’il se sent mal à l’aise qu’il a l’impression d’être illégitime. Il sait que ces mots ne changeront rien à la situation de Norah, ni à celle de Julie, et que jamais rien qu’il puisse dire soit susceptible d’avoir un effet sur elles, de celui qui permet d’envisager les choses sous un jour qui autorise cette sensation d’être à nouveau en mesure de respirer après des semaines d’asphyxie. Mais ça lui tient à cœur d’essayer, quand bien même c’en est maladroit, inefficace, absurde, ne serait-ce que pour lui montrer qu’il est là. Parce qu’il n’a pas menti, Alfie, s’il n’a pas vécu cette situation puisque ses deux parents et sa conjointe sont toujours bien vivants, il en a vu des gens proches disparaître, brutalement parfois. Son premier amour, sa cousine, des collègues lors de son dernier terrain, des événements marquants, et une absence qui, finalement en devient bénéfique lorsqu’elle est acceptée.  

C’est un sourire qui reprend sa place sur son visage lorsqu’ils évoquent à nouveau Aidan et sa maladresse, et de Julie, Norah dresse maintenant le portrait de son cadet. Un rire s’échappe des lèvres d’Alfie alors qu’elle évoque la capacité du jeune garçon à trébucher même sur un sol plat. « Au moins, c’est un garçon plein de surprises, tu t’ennuieras jamais avec lui. À chaque fois que tu te diras que ça ne peut pas être pire, il arrivera à te prouver du contraire. En un sens, c’est presque un talent. » Et pour joindre le geste à la parole, Alfie applaudit brièvement avec un sourire. Tout comme c’en est un d’avoir des enfants encore relativement désintéressés par tout ce qui est télévision et jeux vidéo, beaucoup de parents donneraient cher pour avoir des enfants comme ceux de Norah à notre époque dominé par les appareils électroniques. « Et tu ne cites même pas les Star Wars ni les Disney ?! Mais quelle mère indigne tu es ! Qu’il s’amuse par la suite, avant de rapidement reprendre. Comme Aidan est mon disciple, je me permets d’avoir un droit de regard. À la liste, tu peux ajouter tous les Edgar Wright, je suis sûr qu’ils plairont à Aidan quand il sera en âge de les comprendre. Julie, je la vois plus être cliente de film d’animation un peu plus profond, comme Mary and Max. Un film d’animation australien bien trop sous-estimé, malheureusement. C’est tout pour moi, à la semaine prochaine pour d’autres conseils du cinéphile avisé que je suis. » Il conclut avec un léger sourire. « Tu n’oublieras pas de filmer sa réaction, ce jour-là ? J’imagine déjà la scène, « mais maman je te jure que c’est pas si violent et tous mes copains y jouent ! », tu vois le truc. D’ailleurs, si t’as besoin de répéter la scène avant, tu peux m’appeler, je crois que je tiens le rôle. » Il poursuit, laissant échapper un léger rire, tandis qu’ils en reviennent à Julie et sa passion pour les bouquins. Une passion à laquelle il a échappé plus pour des raisons de concentration que de désintérêt, mais qui n’a pas manqué de frapper Jules – la bibliothèque dans leur salon à deux doigts de s’effondrer sous le poids des livres peut en témoigner. Ainsi, il lui apparaît naturel de proposer à Norah d’emmener sa fille sur le lieu de travail de sa petite amie, car nul doute que les deux trouveront sans difficultés de quoi occuper les prochaines soirées de la plus jeune. « Je vais lui en parler, mais je doute pas qu’elle en sera ravie, à condition que Julie fasse attention aux livres, parce que sinon… oulà, je t’assure que personne ne veut voir ça. » Il rétorque avec un sourire, songeant aux nombreuses fois où Jules est rentrée à la maison, les veines saillantes, les mains frappant l’air d’énervement et la voix se brisant en racontant le peu d’attention que les gens accordent aux livres et l’état dans lequel ils reviennent parfois. Et il ne s’en amuse pas, à vrai dire, car il sait pertinemment que sa réaction serait la même si l’un des objets du musée d’anthropologie venait à être traité avec le même manque de respect. Au contraire, c’est une réaction qui tend à lui plaire, parce que cela prouve que là où beaucoup ne voient que de simples objets, Jules y voit toute l’histoire qui entoure ceux-ci. Quoi qu’il en soit, Norah peut s’estimer heureuse qu’Alfie concède à lui faire ce plaisir, compte tenu du manque de privilège avec lequel le traite cet hôpital. Depuis le temps, il mériterait quand même quelques efforts supplémentaires, un box présidentiel, des points de suture en fil plaqué or, un bon repas dans un repas gastronomique au lieu de la sucette pour le féliciter d’avoir été courageux – et oui, il insiste toujours pour avoir le droit à celle-ci. Mais Norah a un argument simple et efficace pour le dissuader d’en vouloir plus qu’il n’en a déjà. « Serait-ce une menace, miss Lindley ? Parce que vous vous adressez à la mauvaise personne, et ce genre de réflexions me donne surtout envie de savoir ce qu’elle me fera. » Il précise, un air de défi sur le visage. Parce qu’il a toujours été ainsi, Alfie, et quand on le menace de représailles, généralement il fait de son mieux pour un aperçu de celles-ci, là où beaucoup tenteraient d’y échapper. Que ce soit pour des actes anodins comme cette légère provocation à l’encontre de Norah, ou d’autres aux conséquences bien plus importantes. Norah marque toutefois un point lorsqu’elle met en évidence l’infirmière aux petits soins qu’elle est, notamment par la promesse de viennoiseries, qui n’est justement qu’une promesse à l’état actuel, même s’il ne doute pas de la parole de Norah, comme en atteste son sourire convaincu lorsqu’elle confirme qu’il aura effectivement le droit aux fameuses douceurs, parce qu’il serait très dangereux pour elle de promettre une telle chose sans intention d’effectivement flatter son estomac.

L’invitation formulée par Norah le laisse interdit quelques instants, plus parce qu’il ne s’y attendait que parce qu’elle lui déplaît. Ils se sont déjà côtoyés en dehors des murs de cet hôpital, mais jamais de manière aussi « officielle », bien qu’il lui apparaisse comme hors de question de refuser l’invitation de la jeune femme, qui concrétise cette amitié silencieuse qui les unit depuis quelques années maintenant. Touché, Alfie ne le précise pas, préférant réagir comme il le fait toujours : par l’humour, dès lors qu’il s’agit de dissimuler ce qu’il ressent réellement. « Wow, je suis outré que tu puisses penser que je suis prêt à tirer un trait sur tes gâteaux juste pour avoir le plaisir de faire une mauvaise vanne. » Car qu’on se le dise, son estomac > le reste, y compris toutes les vannes qu’il rêve de faire un jour ou l’autre, dont il fait volontiers abstraction si ça peut lui permettre de satisfaire sa faim avec laquelle il est hors de question de plaisanter. « Mais non, tu n’as pas à avoir peur, je ne vais pas te ramener un poney pour Julie, un kart pour Aidan ou un vase hanté pour satisfaire ton besoin d’histoires de fantômes. » Quoi que… chacune des idées est franchement tentante, et il est persuadé que Norah ne verrait pas d’objection à la dernière option. Mais cette invitation a bien plus de sens qu’une simple valeur de crémaillère, puisqu’il n’est pas sans savoir qu’il s’agit probablement d’une étape importante de la vie de Norah. Une impression sur laquelle elle était prête à s’épancher si seulement l’interne n’avait pas fait son apparition pour s’occuper de la plaie d’Alfie, provoquant inévitablement un changement d’attitude de ce dernier qui, pour la première fois depuis le début de leur discussion, aurait eu l’impression d’être véritablement utile en lui offrant cette oreille qu’elle semblait rechercher. Ainsi interrompus, il n’ose revenir sur le sujet par peur de retourner le couteau dans une plaie toujours aussi douloureuse plusieurs années après les faits, parce que la mort de Frank et toutes les conséquences ainsi que les changements qu’elle implique n’est pas un sujet sur lequel il se sent – une nouvelle fois – légitime de glisser, si Norah ne lui donne pas d’elle-même l’opportunité de le faire. C’est pour cette raison qu’il ne lui demande pas d’autres précisions malgré sa curiosité, et préfère lui laisser le choix de mener la suite de la conversation comme elle l’entend, sur le sujet qu’elle a décidé, et qui se transforme en proposition qui ne manque pas de le surprendre – mais là-aussi, qui lui fait plaisir. Courir a toujours été une des activités favorites d’Alfie depuis sa plus tendre enfance, parce qu’elle parvient à lui occuper l’esprit tout en permettant à son corps s’agiter, un besoin qu’il a constamment, même lorsqu’il exerce une activité qui lui plaît (et quiconque ayant assisté à un cours donné par ses soins a probablement eu mal à la tête à force de le voir faire des allers-retours dans la salle car étant incapable de rester immobile plus de quelques minutes). Et si c’est une activité qu’il a le plus souvent exercé seul, et qu’il exercera toujours seul la majeure partie du temps, le fait que Norah se joigne quelques fois à lui ne l’embête pas, car il sait à quel point c’en sera bénéfique pour elle, et il sait pertinemment qu’ils partagent le même besoin : faire le vide. Alors il ne craint pas qu’elle l’interrompe à tout bout de champ pour raconter les futilités de sa journée, ou qu’elle se plaigne de l’effort, il sait que la compagnie de Norah ne lui impose pas de sortir de ce silence qu’il s’offre que très rarement. Et si Norah justifie sa demande, Alfie ne peut s’empêcher de lui préciser qu’elle n’a pas besoin de le faire avec lui, et c’est en posant délicatement sa main sur la sienne qu’il capte son attention. Un geste qu’il ne regrette pas, mais qu’il ne prolonge pas, cette familiarité lui étant encore nouvelle et quelque peu perturbante. Encore une fois, cela démontre la complexité de leur lien, de cette façon qu’elle a eue de le prendre dans ses bras avec un naturel déconcertant à la mort de Rachel, alors qu’il lui apparaît soudainement comme délicat d’avoir glissé sa main sur la sienne pendant un quart de seconde.

Pour masquer sa gêne, l’anthropologue reprend rapidement la parole, mais cette fois-ci il n’est pas question d’une quelconque tentative d’humour, mais d’une inquiétude sincère de sa part. Il craint le jour où Norah explosera, parce qu’elle a raison sur un point – cela va arriver. Il le sait, il l’a vécu, plusieurs fois, et malgré toutes les précautions, malgré tout le soutien de son entourage, malgré tous ces mensonges qu’on se dit à soi-même, elle réagira, tôt ou tard, et à la suite de tels événements traumatisants, il n’y a jamais d’entre-deux. Et il a besoin de s’assurer que ce jour-là, Norah saura s’entourer. Qu’à défaut de pouvoir retarder l’explosion, elle saura en minimiser les conséquences. C’est un sujet qu’il n’aurait jamais pensé évoquer avec autant de franchise, et aussi directement, mais au détour de cette conversation avec Norah, ça lui semble presque une évidence de l’interroger de la sorte, de s’inquiéter avec autant de sincérité, là où dans d’autres circonstances il n’aurait pas été en mesure de formuler les choses aussi clairement. « Parce que tu as une force incroyable, Norah, c’est ce qui t’a maintenu debout alors que d’autres se seraient effondrés. Et parce que tu étais en pilote automatique, et que ce n’est pas une solution durable. Même les plus forts ont besoin d’être épaulés, ou juste de craquer, parfois, et il n’y a pas de honte à cela. » Qu’il lui assure avec un fin sourire, alors que son regard traduit de son impuissance. Il voudrait tellement faire plus, car c’est un des traits qui caractérise le jeune home depuis qu’il a trouvé sa voie ; il a ce besoin presque vital d’aider les autres, du moins d’y essayer, et il n’y a rien qu’il déteste plus que d’en être incapable, d’autant plus alors que cela touche une amie. Il s’en retrouve encore plus démuni lorsque Norah semble reprendre le cours de la conversation là où elle l’avait laissée avant l’irruption de l’interne, lorsqu’elle évoque ce qu’il interprète comme la raison principale de son déménagement. « Je… ça me paraît pas être « pas grand-chose ». » Qu’il rétorque avec un fin sourire, dans une tentative de la rassurer. N’importe qui aurait réagi de la même manière, et ce serait éloigné des lieux emplis de souvenir qui ne font que raviver la douleur. Ce n’est pas une fuite ; mais une volonté de se préserver. Parce que ce sont ces « pas grand-chose » qui ont le plus de conséquence. Ce n’est pas la mort en elle-même, c’est tout ce qu’elle implique. Le vide laissé par le défunt, et toutes ces petites choses anodines du quotidien, qui finissent par en devenir insupportables et terriblement douloureuses. Un regard en direction de la place préférée de Frank autour de la table, l’envie de l’appeler pour lui demander de venir goûter une recette, une lettre qui lui est adressée et qu’on a envie de lui tendre, un programme télé qu’on met en fond sonore pour ne pas qu’il le rate. Et si Norah a toujours adoré les histoires de fantômes, cohabiter avec l’un d’entre eux n’est probablement pas une volonté de sa part. « Pour ce que ça vaut, je pense que tu as pris la bonne décision. » Et quand bien même il sait qu’elle se fiche certainement de son avis – et qu’il n’a d’ailleurs pas à en avoir – il essaie de la rassurer, elle qui semble dédramatiser une situation qui ne peut pas l’être. Acquiesçant dans un premier temps aux propos de Norah, sa voix tremblante le convainc de prendre, une nouvelle fois, le chemin de l’humour. « Et je peux t’assurer que je ferai de mon mieux pour que tu aies toujours des courbatures, histoire que ce soit comme au bon vieux temps. » Il lui assure, avec un fin sourire, tandis que l’attention se porte à nouveau sur sa plaie, et qu’Alfie en vient à regretter de ne pas avoir le droit à un pansement à en faire pâlir de jalousie Anabel. C’est une moue boudeuse qui s’affiche sur son visage quand Norah l’informe qu’ils n’ont pas ce genre de choses, bien vite remplacé par un sourire alors qu’elle s’affaire à customiser la compresse. « C’est magnifique, tous les artistes contemporains peuvent aller se rhabiller. Il affirme, avant d’ajouter : ça va faire un carton sur Ebay si je dis que c’est une œuvre de Basquiat. Il ajoute, relevant rapidement la tête vers Norah. Je plaisante, bien-sûr. Tu imagines bien que je vais afficher cette œuvre au milieu de mon salon quand je devrais, à grands regrets, m’en séparer. » Il en plaisante, Alfie, il en demeure pas moins que son regard se porte sur le pansement en question et qu’il apprécie l’effort, ce qui lui provoque inévitablement un franc sourire sur les lèvres. Autant que le remerciement discret de Norah, auquel il répond par un sourire pincé et un regard entendu, de ceux qui en disent bien plus que les mots. « Quand tu veux. » Qu’il rétorque simplement, tandis que son regard se veut fuyant, comme souvent lorsqu’il est question d’une honnêteté maladroite. Ou lorsqu’il est question de laisser son intimité à Norah alors qu’une larme roule sur sa joue, qu’il prétend ne pas avoir vue. « En effet. On se dit à la semaine prochaine, du coup ? » Qu’il s’en amuse, mais ce n’est pas aussi léger que cela semble. Un rendez-vous rapproché, parce qu’il sent que Norah en a besoin, c’est ce qu’il a réalisé au cours de leur conversation, cette manière de tirer la corde l’a épuisée, et elle s’apprête à tomber dans le vide. Et s’il ne pense pas être la personne en mesure de la rattraper, il peut au moins tenter d’atténuer la brutalité de sa chute.
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