La démo de breakdance était une réussite. Je me suis sincèrement amusé à apprendre toutes les différentes techniques et, malgré tout, je me suis rendu compte que mon corps n'avait pas tout oublié. La mémoire musculaire est assez hallucinante quand on y repense. En trois semaines d'alitement j'ai beau avoir 'oublié' comment on marchait, mes jambes ne me soutenant plus, en ce qui concerne la danse c'est une toute autre chose. Bien que musculairement parlant ce n'était pas la joie et que j'avoue souffrir pas mal maintenant, alors que je me dirige vers mon sac abandonné au bord de la piste, je suis sincèrement étonné de ma condition physique actuelle et de mon endurance musculaire. Faut croire que Nea a fait du super bon boulot.
C'est avec un soupire fatigué mais un sourire heureux que je me laisse tomber sur le banc. M'adossant contre le mur, je ferme les yeux et prend une longue gorgé d'eau. « ça va Clément ?» c'est la voix inquiète de Jenny qui me sort de ma sorte de transe et, me redressant, je pose mon regard sur elle hochant la tête sans me départir de mon sourire « oui, parfaitement» assurais-je «C'est juste que j'ai plus l'habitude de faire un tel effort » expliquais-je en haussant les épaules [color=darkgreen «Je vois »[/color] dit-elle en souriant «ça fait longtemps que tu danses ? J'ai bien remarqué que t'étais pas mal bon !» dit-elle avec entrain. «C'est vrai ? » demandais-je en me redressant « Je veux dire ...oui, je danse que j'ai 6 et j'en ai 24 » je lui souris «Mais le breakdance c'est clairement pas ma spécialité » je rigole doucement en me passant une main dans les cheveux « Je suis plus ...contemporain ou modern jazz» Les yeux de Jenny se mettent à briller « Je vois ! C'est trop cool ! » dit-elle avec un large sourire « Ouais. Mais j'ai arrêté en Décembre et ...» « Tu devrais reprendre !» me presse -t-elle « Faut pas gâcher un tel talent !» je soupire doucement « C'est ...un peu plus compliqué que ça.» dis-je, mal à l'aise. Jenny arque un sourcil puis souris doucement «Je vois. Bon en tout cas je te souhaite de reprendre bie rapidement parce que c'était génial ce que tu as montré avant ! » dit-elle avant de me saluer et partir vers le prochain groupe.
Je la suis du regard puis soupire plus lourdement et, m'adosse à nouveau contre le mur, une moue de réflexion sur le visage. Et si elle avait raison ? Et si j'étais réellement près à reprendre la danse de façon professionnelle ? Je grimace, hésitant, n'ayant pas envie de rusher les choses.
Street art festival. Nea déambule dans les rues, balayant du regard, d'un air distrait les nombreuses animations que la ville est en train de proposer. Une immense fresque colorée grandissait au fil des minutes, sous les regards curieux des passants. Il y en a du monde et si Theo ne l'aurait pas convaincu, elle n'aurait certainement pas mis les pieds hors de chez elle, trop occupée à ressasser les derniers événements et à se faire un marathon de série en se noyant dans un litre de crème glacée. Néanmoins, comme les deux grands-parents du petit, dans leur grande mansuétude, ont accepté qu'il passe la journée avec elle et il a donc fallu qu'elle trouve une activité digne de ce nom pour occuper cette belle journée.
Tout deux armés d'une glace, ils font le public de quelques activités nombreuses, variées. Si Theo trépigne d'impatience à l'idée de voir Elwyn, -qu'il n'a pas vu depuis quelques jours- sur un skateboard à faire des figures impressionnantes. Du moins, c'est ce qu'imagine avec espoir le neveu. Burkhardt espère juste qu'il ne tombe pas trop souvent au point de s'écorcher douloureusement, s'éclater quelques dents, de se déboîter un bras. Néanmoins, son attention est rapidement captée par des visages familiers durant la session de breakdance. Elle libère le petit de son joug, l'autorisant à rejoindre un ami et ses parents qui se dirigent alors vers ladite démo de skate, tandis qu'elle reste à observer le spectacle de danse. Deux de ses anciens patients sont en train de se déchaîner sur la musique hip-hop que crache alors l'enceinte. L'entrain est communicatif, certains membres du public affichent de grand sourire impressionné et Nea est l'une d'elle.
Au bout d'un certain temps -probablement trop court pour le public qui laissent alors un tonnerre d'applaudissement s'élever-, la demoiselle reste un moment. Quelques passants félicitent alors les danseurs de leur prestation, tandis que ses yeux bruns suivent du regard son patient, Clément. Il est probable que celui-ci ne l'ait pas vu mais la jeune femme est rassurée de l'avoir vu sur scène. Impressionnée par le talent qu'il possède, mais également rassurée de voir qu'il a réussi à remonter la pente. Si celui-ci s'éloigne alors, elle lui emboîte timidement le pas, décidée d'aller prendre de ses nouvelles. À quelques mètres de là et pour ne pas être trop intrusive, Nea attend qu'il soit alors seul pour s'approcher. Probablement perdu dans ses pensées, Clément ne semble pas avoir remarqué sa présence ; une grimace, une mine un peu plus renfrognée de celle qu'il a présenté plus tôt, sur la scène. Alors, plissant les yeux et n'ayant pas habitude de trop faire dans la dentelle, elle lance sur un ton clair « Eh ben, c'est une mine bien morose pour quelqu'un qui s'est démené pour cette belle démonstration. » Elle lui adresse un large sourire, contente de le revoir dans ces conditions. « Ca fait longtemps ! Mais je suis contente de voir que tu as la forme ! » Elle s'assied à son tour sur le banc, le détaillant longuement, comme elle a eu tendance à le faire durant les séances. Là, elle voit bien que quelque chose le tracasse.
Je pousse un long et lourd soupire lorsque Jenny s'en va, me laissant seul avec mes pensées. Les yeux fermés, je joue un peu avec ma bouteille d'eau entre mes mains et laissant mon esprit s'éloigner, c'est, bizarrement, mon tout premier souvenir concernant la danse qui me revient à l'esprit. Danseur classique dans un premier temps, je me suis bien souvent récolter les moqueries de mes camarades masculins, tandis que les filles trouvaient ça génial d'avoir un garçon dans leur rangs. C'est la danse classique qui m'a ouvert autant les yeux sur ce qui deviendra une de mes plus grandes passions, que les portes pour d'autre style de danse. Rigueur, équilibre, souplesse et maîtrise de son corps sont les fondations de la danse classique. J'ai passé 4 ans dans ce studio, à la barre, à gagner en mobilité, à faire des pliés et d'autre pas chassés, avant d'assouvir ma curiosité et allez tester d'autre style. Modern jazz, tango, salsa, rock'n'roll, je suis passé par beaucoup de styles différents, jusqu'à ce que je n'accroche sincèrement au contemporain. Des mouvements lents sur une musique rapide ou des mouvements rapides sur une musique lente, des gestes mesurés, une parfaite maîtrise de nos muscles, il y a tant d'aspects que j'aime particulièrement. Être passé par tous ces styles différents m'a aidé à construire les fondations solide d'une passion inébranlable. Car malgré tout ce qui m'est arrivé, je sens que la danse est et restera cette chose qui me rend heureux, peu importe quand et comment.
Arrivant sur cette conclusion, c'est une voix féminine qui me sort de mes pensées. Me redressant, je rouvre les yeux et quelle n'est pas ma surprise lorsque mon regard se pose sur Nea Burkhardt. Celle jeune femme est entrée dans ma vie en tant que kiné et s'est très vite transformé en amie. Le secret professionnel aidant, elle a très rapidement gagné ma confiance, si bien que j'ai fini par lui raconter ma vie -du moins ce qui s'est passé pour que j'en arrive au Burn out et donc que je doive suivre cette rééducation. Elle est sans doute celle qui m'a le plus aidé physiquement et sans elle je ne serais sûrement pas assit sur ce banc à me reposer après une démonstration de Break dance si peu de temps après.
Je lui adresse un petit sourire lorsqu'elle me dit que j'ai fait une belle démonstration avant de se montrer enjouée compte tenu de ma forme physique. « ça fait quoi ….1 mois, a peu près ?» dis-je en fronçant les sourcils en une moue interrogatrice avant d'hausser les épaules «Mais oui, Jenny, la prof qu'est là-bas, m'a aussi dit que j'ai géré, que ça se voit que j'ai l'habitude de danser d'autres style et ... » je grimace légèrement, hésitant « Elle m'a dit que je devrais reprendre totalement» je soupire doucement, observant ma bouteille et l'étiquette que je suis entrain d'arracher avec mes ongles « J'ai envie, vraiment. Mais je ne sais absolument pas si je suis près» j'hausse les épaules «parce que qui dit 'reprendre la danse' dit forcément 'reprendre la compétition et le théâtre' » je pince les lèvres «Enfin non, c'est pas obligé, je peux très bien reprendre simplement la danse sans tout ça, mais je me connais, je ne vais pas pouvoir 'juste danser pour le fun' » je prend une profonde inspiration et lance un furtif coup d’œil à Nea « Et je ne me sens absolument pas près de reprendre le théâtre ou danser devant un public. Ici c'est autre chose, y a aucun enjeux, juste du fun, c'est pas pareil» précisais-je en reportant mon attention sur la scène et les quelque gens qui observent les nouveaux danseurs.
Nea ne s'est jamais vraiment intéressée à ça, elle n'est pas la danseuse de la famille. Les seules fois où elle s'autorise à se déhancher sur une musique : dans sa chambre, les rideaux masquant la fenêtre et la porte close. La danseuse, l'artiste, la théâtrale, Ana. Ana la disparue. Nea, elle, elle est plutôt du genre à boxer, à boxer ses nerfs, ses frustrations mais elle a éprouvé une certaine admiration lors du spectacle de breakdance. Car oui, ce n'est pas quelque chose qu'elle est capable de faire, encore moins devant une petite foule. Elle se serait sûrement transformée en pot de fleur, paralysée par la vision de nombreux regards posés sur elle, avant de tenter de s'extirper de cette situation en se décalant, centimètres par centimètres, en direction de la sortie. Alors oui, elle peut dire qu'elle éprouve une certaine admiration pour Clément ; pas son plus jeune patient, certes, mais l'un des plus combatifs. Au delà de son burn out, le jeune homme a eu suffisamment de force de caractère -et musculaire- pour redresser sa barque prenant lentement les eaux et même si la navigation a été difficile, il a été capable de maintenir le cap, se dirigeant alors vers des jours meilleurs... Meilleurs, même si quelques gros nuages continuent malheureusement à tacheter un ciel abordant une teinte plus positive.
Burkhardt garde le sourire aux lèvres lorsqu'il se souvient approximativement la date de leur dernière séance même si, tellement occupée avec ses propres histoires et sa liste interminable de patients, elle a cru que cette dernière datait d'il y a beaucoup plus longtemps. Silencieusement, elle écoute Clément, son récit, ses doutes, ses envies, tout en regardant avec une inquiétude latente, déchiqueter la pauvre étiquette de sa bouteille. Il semble être coincé entre deux eaux. Il sait ce qu'il veut, ce qu'il ne veut pas mais le tout est finement entremêlé dans sa passion. Il ne se voit pas faire l'un, sans l'autre ; reprendre la danse, le théâtre pour le plaisir, sans prise de tête, mais son esprit de compétition l’entraînera forcément sur une pente qu'il se refuse de glisser. La tête penchée sur le côté, elle ne peut s'empêcher pincer ses lèvres dans un sourire compréhensif, regardant la tête brune reporter son attention sur les nouveaux performeurs. Si elle n'a jamais été dans cette situation, elle fait preuve de toute son empathie pour se mettre dans les baskets du jeune homme. « C'est à toi de trouver le bon rythme maintenant Clément. Tu connais la musique, tu te connais ; tu connais tes limites, tes envies, tes non-envies... » Elle appose délicatement sa main sur l'épaule du jeune homme : « Maintenant que tu connais tout ça, il va juste falloir que tu te donnes du temps, pour apprendre. Apprendre, savoir ce que tu veux vraiment, pour toi. Vraiment. Est-ce que tu veux suivre une envie passagère quitte à te frustrer ? Car, envie d'avoir une chose, c'est très bien... Mais si au final tu te fais plus de mal pour justement, obtenir cette... chose, eh bien, la question est : est-ce que ça en vaut le coup ? » Si sa tirade peut sonner un peu confuse, elle lâche un sourire gênée, exerçant une légère pression sur l'épaule de ce dernier pour dire qu'elle serait là pour lui, s'il a besoin d'en parler. Elle trouverait dommage qu'il se laisse ronger par le doute pour ne pas vivre pleinement son talent.
Nea Burkhardt, une des kinés des très nombreux cabinets de la ville. C'est, je l'avoue légèrement par hasard que je suis tombé sur elle en feuilletant les pages jaune et en épluchant les sites internet. A l'hôpital, ils m'avaient refilé le numéro d'un autre kiné avec qui je n'ai absolument pas accroché. Aussi, je recherchais quelqu'un qui avait une certaine spécialité dans le sport. Dans tous les cas, dès lors que j'ai été accueillit par Nea, j'ai su que le reste de la rééducation allait être un beau mélange entre fermeté et rigolade. C'est grâce à elle que j'ai pu atteindre mon niveau physique actuel. Et c'est donc aussi grâce à elle que je suis ici, à me poser des questions quant au fait de reprendre la danse ou non.
Mes paroles n'attendaient pas forcément de réponses, mais Nea décide tout de même de prendre la parole, me disant que seul moi sait ce qui est bon pour moi. Je connais maintenant mes limites -et pas qu'un peu!- et je sais ce que j'aime et ce que je n'aime pas. Il faut maintenant que j'apprenne à savoir ce que je veux vraiment et différencier une lubie passagère avec une réelle envie. Je ne peux que confirmer ce qu'elle dit, là, mais pas lorsqu'elle reprend que si je me fait du mal avec une chose, est-ce que ça vaut réellement le coup de continuer ?
« Oui» répondais-je sans hésiter «Oui, ça vaut le coup. J'aime le théâtre et la danse, sincèrement et depuis presque 20 ans » je soupire doucement « crois moi j'ai longtemps réfléchis à la question» je reprend en hochant doucement la tête « Je me suis souvent demander 'est-ce que j'ai envie de reprendre ?' 'est-ce ça vaut vraiment le coup ?'» je me passe une main sur le visage «J'ai aussi réfléchi à ce que je pourrais faire éventuellement pour remplacer tout ça » je secoue la tête «Mais je n'ai trouvé aucune backup solution » je fini par lâcher ma bouteille et la pose à côté de moi avant de soupirer en m'adossant contre le mur « Donc ...voilà» j'hausse les épaules «Je veux réellement continuer dans cette voie, malgré tout mon rêve de Broadway est intact. Je sais que ce n'est pas facile, que le risque de rechutes seront sans doute éternellement présent mais j'ai vraiment envie de réussir à percer dans ce milieux» je soupire et observe les danseurs « J'espère simplement trouver le courage pour remonter sur scène un jour ...» concluais-je mes paroles en un soupire, las.
Il y a des patients avec lequel Nea n'a jamais eu d'atomes crochus. Avec lesquels elle s'est simplement contentée de faire la discussion sur la pluie, le mauvais temps, le rhumatisme du grand-père par exemple. Et il y a les autres, dont Clément fait parti. La séance qui égaye la -longue- journée de la kiné par leurs discussions parfois passionnées sur sujets divers, variés. Avec le jeune homme, tout à commencer lorsque celui-ci s'est plutôt penché sur la présence de ses figurines colorées de Spiderman et de Deadpool sur son bureau plutôt que sur son cas. C'est ainsi que Nea a découvert que Spiderman est le super-héro favori du jeune homme, ça, en plus de sa franche ressemble avec l'acteur. Alors, au fil des séances, ils ont commencé à parler des comics, des derniers films Marvel en prenant toujours soin de ne pas spoiler et ce, toujours en parallèle de la rééducation. Longue rééducation parsemées d’embûche, de haut et de bas mais discuter d'autre chose leur a souvent permis de rediriger les frustrations du jeune homme lorsque les progrès n'ont pas été au rendez-vous.
Souvent, outre les barrières physiques imposées par le corps meurtri, l'aspect psychologique a tendance à jouer sur la récupération. Si Clément est -presque- pleinement remis de son burn out, il est à présent en proie à de nombreux doutes qui obscurcissent ses envies. Lorsqu'il répond alors à sa question plutôt piège, Nea ne peut s'empêcher d'afficher un franc sourire. Ses soupirs, ses hésitations traduisent les questionnements encore présent, mais pointe surtout sur une peur de remonter sur les planches. « Baby steps. » lui lance-t-elle en acquiesçant. « Tu es quelqu'un qui ne manque pas de courage et tu as déjà mûrement réfléchi à tes envies mais ça ne veut pas dire que tu dois te rusher en direction de la ligne d'arrivée sachant que c'est un marathon. » Elle inspire profondément, réalisant qu'elle est cryptique, comme toujours. « Le tout, c'est d'y aller petit à petit. lentement, sans forcer la chose, sans se faire peur. » Ses propos pourraient faire écho à de nombreuses choses dans la vie. « Le fait que tu connaisses tes limites, que tu acceptes de les avoir est une bonne chose et si tu y vas en douceur, tu verras que tes barrières, tes appréhensions tomberont toute seule au fil du temps, à condition que tu ne te jettes pas dans le bain glacé sans y être préparé... En plus, tu risquerais le choc thermique. » conclut-elle avec humour. Ses lèvres se pincent dans un sourire. Elle est toujours là à trouver des images étranges pour ses analogies. Nea regrette la présence de sa sœur ; c'est elle qui a toujours eu les mots juste pour faire reprendre du poil de la bête à quiconque. Elle essaie juste de faire de son mieux pour que Clément ne se gâche pas.
Avec Néa, la confiance était au rendez-vous dès le début. Dès que nous nous sommes découvert deux gros points communs : notre amour pour les films Marvel et notre côté geek. Ainsi, toutes nos séances se finissaient en débat sur le pourquoi du comment Tony Stark risquerait de mourir dans Endgame, comment ça me ferait mal à cœur de savoir Peter seul après la disparitions de son mentor, mais aussi si Loki est réellement mort ou s'il est toujours vivant après avoir été crushé par la main de Thanos. Ou alors nous nous remémorant les anciens films et parfois il nous arrivait même de débattre sur une seule et même scène pendant deux ou trois séances d'affilé.
Toutefois, aujourd'hui mon cœur n'est pas au débat Marvelisque. Les questions que je me pose depuis des mois reviennent à la charge : suis-je réellement assez bon pour reprendre la danse ? Et qu'en est-il du but de ma vie ? Après ce burn out, aurais-je toujours ma place à Broadway ? Retrouverais-je assez de stabilité émotionnelle pour reprendre la danse et le théâtre au niveau professionnel ? La réponse de Nea est simple : un petit pas après l'autre. Elle me connaît, elle me dis que je ne manque pas de courage -c'est que tout le monde me dit, mais est-ce réellement le cas?- et que j'ai déjà mûrement réfléchie à mes envies -ce qui est tout à fait vrai. J'hoche doucement la tête lorsqu'elle reprend que le tout maintenant c'est de ne pas se rusher, d'y aller doucement au début car il s'agit, au final, d'un marathon. Ce n'est qu'en y allant tranquillement que je reconnaîtrais mes limites et que mes barrières et appréhensions tomberont d'elles même.
Sa dernière analogie me fait doucement sourire et je me prend encore le temps de prendre une gorgé de mon eau avant de prendre la parole «t'as tout à fait raison » confirmais-je ses dires «Mais … c'est pas évident. Je veux dire ...oui, je connais mes limites maintenant, je sais ce que je risque en les repoussant. Mais n'est-ce pas en les repoussant qu'on évolue ? » je soupire «Enfin bref, je vais y réfléchir sincèrement, mais j'ai vraiment aucune envie d'abandonner mes rêves » je pince les lèvres « parce qu'au final, je n'ai absolument aucune idée de ce que je peux faire à la place. J'ai aucune autre faculté que la danse ou le théâtre» ce qui n'est pas faux étant donné que les cours ont toujours été une très grosse galère pour moi
« On s'est plus depuis début Avril» reprenais-je, décidant de changer de sujet « T'as vu Endgame depuis, j'espère ?» j'adresse un léger sourire à la jeune femme, espérant sincèrement qu'elle me suivra dans ce changement de conversation.
Laissant un moment à Clément pour le laisser digérer ce qu'elle vient de dire, le regard de la brune se perd dans les environs. De nouveaux danseurs exécutent quelques pas de danse devant un public toujours aussi présent. Certaines personnes semblent se diriger vers d'autres activités proposées comme la grande fresque, ou en direction de l'animation de skate ; celle où elle doit rejoindre Theo un peu plus tard. Son neveu, -avec son ami et les parents de celui-ci- doit certainement envie d'aller voir le colocataire étrange, exécuter quelques figures de skate. Nea se doute, ou plutôt redoute que le quarantenaire encore un peu trop en forme décide d'outrepasser ses compétences et décide de se fouler le poignet, fracturer le coccyx, ou quelque chose du genre. Elle espère bien sûre que cela ne se réalise pas, par peur de devoir porter le pauvre blessé dans leur colocation et l'assister au quotidien... Néanmoins, cela la ferait grandement rire et elle prendrait certainement un malin plaisir à le laisse galérer avant de l'aider.
Lorsque le jeune danseur reprend la parole, Burkhardt l'écoute attentivement, acquiesçant à ses dires d'un air compréhensif. Ses mimiques, expressions en disent beaucoup sur sa situation actuelle, cette envie, ce sentiment mitigé, perdu. Elle reste silencieuse cette fois. Elle voit bien qu'il veut changer de sujet, la ramenant à leur dernière entrevue au cabinet en avril. Deux longs mois déjà. Si bien qu'ils n'ont pas eu le temps de partager sur les dernières sorties au cinéma. Le sourire de la brune finit par s'élargir lorsque Clément les renvoient à leur sujet de discussion préféré : Marvel. Faussement insultée, elle rétorque avec un air taquin sur les traits : « Tu me prends pour qui ? Je suppose que tu as déjà pré-réservé ta place pour le nouveau Spiderman. » Elle l'a fait, elle. Après tout, le petit Spidey est également le favori de son neveu. Également ? Elle se souvient que le petit Peter Parker est le super héros préféré du jeune Winchester. Ca, en plus de la ressemblance troublante. « Bon, vu qu'on a l'air parti pour parler de Endgame... Une scène particulière sur laquelle tu as envie que l'on débatte ? » La scène pendant laquelle leurs yeux ont commencé à picoter ? Sur Loki, sa disparition avec le Tesseract ? La bataille finale ? Captain America, les fesses de l'Amérique ? Thor et sa sculpture ? Tony Stark ? Les sujets sont nombreux et se bousculent déjà dans la tête de Nea qui adopte alors une mine pensive... Dix ans, la fin d'une belle aventure. Héros avec lesquels beaucoup de gens ont grandi, comme si tout un univers s'est effondré après un simple claquement de doigts avant de se reconstruire lentement, différement.
En général, lorsque je parle avec Nea, j'ai toujours cette impression d'être comprit en ma totalité. Je l'aime beaucoup cette femme, pour tout ce qu'elle m'a apporté. Un soutient autant physique que moral, une épaule sur laquelle je pouvais pleurer lorsque la pression devenait trop grande -et dieu sait que j'en ai usé de cette offre lors des nombreuses séances de rééducation- un humour singulier toujours au rendez-vous et toujours près à me remonter le moral et un professionnalisme hors norme. Bref, Nea est une personne avec qui j'aime passer du temps. Comme aujourd'hui.
Sa venue est tout à fait inopinée mais je suis pas mal fier de ce qu'elle ait pu voir et surtout de lui prouver que le travail que nous avons fait tous les deux porte ses fruits. Toutefois, mes questionnements reviennent à la charge, mais je décide de couper court à ses pensées qui risquent d'être négatives, changeant de sujet.
Les super héros. Voilà notre sujet de conversation préféré. Et bien évidemment, je lui demande, de façon totalement rhétorique, si elle vu Endgame. Etant donné que je l'ai vu le jour de sa sortie, j'étais, je l'avoue, un peu étonné de ne pas avoir croisé ma kiné. Mais en même temps, vu le monde qu'il y avait à la séance de 22h c'était un peu normal de ne pas voir de têtes connues.
« Ouais, j'ai pris les billets dès qu'ils ont été mit en vente» répondais-je en rigolant doucement lorsque la jeune femme me demande si j'ai déjà pré commander mes places pour le prochain Spider-man qui va sortir en juillet «Je l'attend avec tellement d'impatience ! Deux ans depuis le dernier quoi … c'est genre beaucoup trop de temps entre deux films de cette franchise ! J'aimerais bien en avoir un tous les ans en vrai » j'hausse les épaules avant de grimacer légèrement lorsque Néa me demande si je souhaiterais parler d'une scène en particulier.
« J'ai pas envie de parler de la mort de Tony» dis-je en secouant la tête « Genre … en vrai je m'en doutais un peu qu'il allait mourir, j'étais d'ailleurs étonné que ce n'ait pas été le cas dans Infinity War, mais quand même ...ça fait trop bizarre de me dire que celui qui a marqué le commencement du MCU n'apparaîtra plus dans aucun nouveau film» je grimace «Mais en ce qui concerne le film, je me demande sincèrement comment Peter va gérer tout ça ! Qu'est-ce qu'il va faire maintenant que son mentor n'est plus là ? » j'hausse les épaules « C'est pour ça que j'ai tellement hâte de voir le prochain Spider man, pour voir comment il gère la mort de Tony» je prend une gorgé de mon eau et pose mon regard sur Nea « t'en penses quoi toi ?» demandais-je, même si je connais sûrement déjà son avis.
Si elle n'a jamais été fine psychologue, Nea semble avoir pu apporté une aide certaine pour Clément. Les séances, jonchées de difficultés, crises de nerfs, d'angoisse ou larmes ont finalement payé ; le jeune homme s'est fièrement montré sous un beau jour lors de cette démonstration de break dance. Et, peut-être un peu trop maternelle à l'égard de certains de ses patients, la brune, forcément, s'est permise d'aller prendre des nouvelles de ce dernier, pour finalement rebondir sur leur sujet de discussion préférée : MCU. « Ah je m'en suis doutée ! Après tout Spidey est ton préféré ! » Comme celui de Theo. « Je comprends parfaitement ta frustration ! » Sans Captain America et Tony Stark, les piliers, l'avenir est incertain, bourré de surprises. Surprises qui seront révélées dans trop longtemps, bien sûr, de quoi rendre impatient tous les fans. « Mon neveu également compte les jours avant le prochain Spider Man ou le prochain film... » Lui comme elle ne semble pas vouloir parler de la scène où Tony se sacrifie. « Je pensais que Cap' allait mourir de la main de Thanos aussi. Alors c'était super badass quand il a pu utiliser Mjolnir ! Oui... C'est vrai. Quand on pense au MCU on pense forcément à Stark. » opine-t-elle, laissant son regarde se perdre un moment sur la foule. Avant de reporter son attention sur Clément qui parle alors avec intérêt du film à venir. Il finit par la questionner. « Je me doute que ça ne va pas être évident... Surtout s'il voit Tony de partout et qu'il se retrouve avec un paquet de responsabilités... » Ça, en plus de sa vie d'adolescent, le premier amour, la menace...Si Nea se doute que le film sera bourré d'humour, de rebondissement, elle redoute également les moments remplis de feels. Ces moments où les larmes commenceront à monter dangereusement pour les spectateurs les plus sensible. Ils auraient pu probablement en parler pendant de longues minutes supplémentaires, mais toute bonne chose à une fin. Alors, après avoir reçu un message de son petit neveu lui annonçant que la démo de skate va commencer, Nea réalise qu'elle doit s'éclipser. Dans un sourire et se permettant d'apposer sa main sur l'épaule du jeune Winchester, la brune finit par se redresser : « Je m'excuse mais je dois filer sinon je vais vraiment finir par perdre mon neveu dans la foule. Par contre si tu veux qu'on continue notre discussion ou même si tu veux que l'on parle du nouveau Spider Man quand il sera sorti, n'hésites pas ! » Peut-être pas à passer au cabinet, mais à lui envoyer un e-mail par exemple. « Prends soin de toi ! » dit-elle avant de s'éclipser.
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