FEATURING @Yoko Lee & Heïana Brook Danser, c'est vivre la vie dans ses vibrations les plus fines et les plus hautes, vivre la vie harmonisée, purifiée, contrôlée ~ Ruth Saint-Denis
"Euhm... Bien..." La voix d'Heïana était hésitante, un peu troublée. Si elle avait su que cela lui arriverait un jour! La jeune femme ne savait pas par où commencer. Face à elle se trouvait dix étudiantes de l'Université de Brisbane, qui attendaient impatiemment d'en entendre plus de sa part. Car en ce jour, la Tahitienne leur faisait cours, ou Messieurs-Dames! Oh bien sûr, pas de matière générale, quoi qu'elle aurait pu être habilitée à leur expliquer certaines notions de Sciences Naturelles, de Chimie ou encore de Mathématiques, vu qu'elle avait elle-même suivi un cursus de cinq ans en études supérieures pour devenir maïeuticienne. Mais non, aujourd'hui, elle allait donner un cours... De danse Tahitienne! Le tout s'était décidé un peu sur un coup de tête: la fac avait publié une annonce comme quoi elle recherchait des intervenants bénévoles pour des ateliers de toutes sortes, et la sage-femme s'était proposée pour leur enseigner cette danse aux multiples variantes. Mais voilà, elle n'avait jamais donné cours jusque là! Alors même face à seulement dix personnes, c'était un peu impressionnant. Inspirant un bon coup, elle reprit contenance et avec un sourire plus apaisé et sûre d'elle-même, Heïana proposa: "Asseyons-nous, d'accord?" Joignant le geste à la parole, elle posa son sac à main à terre mais aussi et surtout, de grosses poches type cabas pour hypermarché qu'elle avait amené avec elle. Mystère et boule de gomme sur leur contenu! Puis elle se laissa tomber avec volupté sur le sol en parquet de la salle de danse aménagée de la faculté, avant de reprendre: "Je m'appelle Heïana Brook, et je vais vous apprendre les bases du Tamure aujourd'hui, et peut-être même pourrons nous approfondir d'autres fois si la séance d'aujourd'hui vous aura intéressé. Soyez indulgentes, c'est la première fois que je donne un cours." ajouta-t'elle avec un petit rire gêné mais enthousiaste.
La demoiselle regarda tour à tour chacune ses élèves, assez brièvement, avant de demander: "Pourriez-vous vous présenter également? Nom, prénom, âge, vos études, vos connaissances en danse et votre pratique... Ça me donnera un peu une idée de votre niveau. Oh et si jamais vous avez des questions, n'hésitez pas bien sûr". Pour sa part, la Tahitienne n'avait pas un niveau sportif de folie, elle n'était pas du genre à courir tous les jours ou à faire de la musculation. Cependant, elle adorait le Tamure, et il avait tendance à bien faire bosser le cardio comme une bonne partie du corps; ses élèves s'en rendraient compte bientôt... Chacune déclina son identité comme Heïana l'avait demandé, certaines ajoutant des anecdotes faisant rire les autres, certaines exposant leurs interrogations ou leurs inquiétudes. Le tout commençait de bonne humeur en tout cas! Rien de mieux pour un cours de danse des îles. "Je vais commencer par vous raconter un peu l'histoire de la danse tahitienne, aussi appelée 'Ori Tahiti' dans le dialecte polynésien, ou encore 'Tamure', prononcé 'Tamoure'. Remontant à des centaines d'années, elle a longtemps été interdite par les colons européens, puis à nouveau autorisée à partir du XXe siècle. Aujourd'hui, elle fait même partie du 'Patrimoine Culturel Immatériel de la France' auprès de l'Unesco'. Pour les Polynésiens, cette danse est un vrai art, au point qu'il y en a régulièrement des compétitions, notamment pendant le Heiva, une fête culturelle et sportive qui a lieu tous les ans."
Lorsque le petit point sur les origines et l'historique de cette danse fut fait, Heïana rapprocha d'elle les grands sacs et dévoila leur contenu: il s'agissait ni plus ni moins de tenues de Tamure! Donc des pagnes faits de fibres végétales vertes ou plutôt couleur paille, mais aussi des paréos de diverses couleurs chatoyantes et les soutiens-gorges allant avec, soit de la même matière que les paréos, soit des noix de coco! "J'ai apporté ça pour rajouter du réalisme à notre séance. Bien sûr, ce n'est pas obligatoire. J'ai pris plusieurs tailles histoire que chacune trouve son aise. Vous avez des vestiaires par ici?"
That’s what I like about Polynesians. They wear their hearts on their sleeve knowing that, for adults, there are better games to play than hiding their emotions from each other.
((juin 2019))
La curiosité est un vilain défaut — peut-être mais en cet instant, Yoko juge que ce trait de caractère est sa plus belle qualité (rien que ça !) ; assise en tailleur dans l’une des salles de l’Université de Brisbane réservées pour les cours de danse, mains posées sur ses pieds et genoux touchant le sol (souplesse de danseuse oblige), la petite nippone aux cheveux coiffées en deux longues nattes basses est actuellement en admiration totale face à l’intervenante de la journée — Heïana Brook, une jolie femme aux origines tahitiennes ayant répondu positivement à l’annonce affichée quelques semaines plus tôt par la direction de l'Université (recherche d’intervenants bénévoles pour animer des ateliers variés !). Et évidemment (presque sans surprise), Yoko n’a pas hésité à s’inscrire au cours pour apprendre les bases du Tamure. Les dix étudiantes présentes dans la pièce écoutent avec respect leur professeur de l’après-midi alors qu’Heïana se présente, expliquant que cette séance pourrait être suivie d’autres cours si le contenu leur plaît. Yoko est ravie ; plus que ravie même — parce qu’elle est entourée d’élèves qu’elle tolère relativement bien (elle en veut toujours aux trois tocards l’ayant surnommé pendant un an tchin tchan tchong) mais aussi car Heïana semble avoir un don naturel pour la pédagogie. Elle ne l’a jamais vu auparavant mais ses premiers mots traduisent un désir sincère d’enseigner et de faire découvrir un nouveau type de danse ; un bonheur pour celle qui est passionnée de danse depuis sa naissance ! D’une voix douce et d’un regard rassurant, Heïana demande à chacun de se présenter rapidement ; Yoko attend sagement son passage, écoutant vaguement certaines présentations ou plus sérieusement d’autres avant de finir par les imiter lorsque son tour arrive. « Euh— alors, je m’appelle Yoko Lee et j’ai vingt-et-un ans » « Juré ? » la taquine sa voisine de droite (une certaine Cheryl) à qui elle tire la langue (répartie incroyable !) « C’est pour gratter les menus enfant » (elle reprend son sérieux et tourne de nouveau sa tête vers sa professeure) « Je suis en étude de littérature mais ma passion, c’est la danse ! J’en fais depuis que j’ai— quatre ans même pas ? Et je suis actuellement à la Northlight Theater Company depuis bientôt trois ans » — elle est toujours fière de le dire, comme si l’annoncer rendait ce rêve encore plus réel ; car Yoko est sincèrement heureuse d’en faire partie. Malgré les hauts et les bas, malgré les tensions ou la présence agaçante de Joshua, la jolie japonaise s’épanouie tous les jours au sein de la compagnie (c’est un peu sa famille pour celle qui a tout quitté de la Corée). Elle ajoute un sourire et c’est au tour de sa voisine de se présenter. Tout se déroule dans la bonne humeur et l’envie saisissante d’en apprendre plus ; mais c’est grâce à Heïana, qui rend la séance des plus captivantes. Avec passion, elle leur parle de l’histoire de la danse tahitienne, de cet art subtil créé par les polynésiens et de leur fête culturelle qui fascine Yoko, elle qui n’a jamais été là-bas. Son regard est brillant de curiosité et elle hoche à chaque fin de phrase de la tahitienne, tel un enfant dans un spectacle de magie. Elle ne peut s’empêcher de lever la main pour poser une question, incapable de se retenir. « Vous avez déjà participé à ces compétitions ? » ; la jeune femme lui répond avec plaisir avant de s’approcher des grands sacs ramenés quelques minutes plus tôt, dévoilant à l’assemblé les tenues de Tamure. Sourire des plus grands sur son visage enfantin, Yoko est ravie (bien moins sa voisine). « On va devoir mettre ça ? » demande-t-elle dans un murmure en ajoutant une grimace. « Tu t’attendais à porter quoi ? Une robe de soirée ? » réplique Yoko, espiègle et amusée de la tête royalement choquée de Cheryl — cette nana semble être d’un ennui mortel mais qu’importe ! « On a des vestiaires juste ici » (elle pointe du doigt une porte sur la gauche tout en s’approchant avec les autres étudiantes vers les sacs pour choisir les tenues — toutes sont motivées excepté Cheryl qui finit par les suivre à regret). Heïana est bien organisée ; en ayant ramené plusieurs tailles, l’ensemble des participantes trouvent le vêtement leur correspondant le plus — Yoko saisit à la volée un paréo rouge et le soutien-gorge allant avec et s’empresse de rejoindre le vestiaire pour se changer. Quelques instants suivant (elle est tellement excitée de commencer qu’elle s’empresse de tout enfiler), elle sort de la pièce en premier, apprêtée pour danser le Tamure. Elle ressemble à une enfant à qui l’on a offert sa tenue de princesse préférée. Avec amusement, elle réalise quelques pas de danse tout en rejoignant Heïana. « Vous dansez le Tamure depuis longtemps ? » ; curiosité imbattable, on vous l’a dit — le plus beau des défauts.
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Dernière édition par Yoko Lee le Dim 27 Oct 2019 - 1:37, édité 3 fois
FEATURING @Yoko Lee & Heïana Brook Danser, c'est vivre la vie dans ses vibrations les plus fines et les plus hautes, vivre la vie harmonisée, purifiée, contrôlée ~ Ruth Saint-Denis
La jeune femme écouta attentivement les présentations. Toutes celles qui lui faisaient face avaient un minimum de niveau en danse, quel que soit le type; la plus récente à être entrée dans ce milieu artistique pratiquait depuis trois ans. Bon, elles auraient donc toutes assez de bases pour comprendre l'articulation des mouvements et avoir un certain tempo dans le corps. Très bien, cela n'en serait que d'autant plus simple! Elle fut même assez impressionnée de découvrir que l'une d'elles, Yoko, dansait depuis son plus jeune âge. Cela la fit rire intérieurement, car c'était souvent le cas des petites Tahitiennes, qui apprenaient les premiers mouvements de Tamure dès qu'elles savaient marcher, copiant leurs grandes soeurs ou leurs cousines. 'Ori Tahiti était une véritable discipline, un art à part entière en Polynésie; d'ailleurs, il était si ancré dans les mentalités et dans le quotidien qu'il avait même pu être inscrit comme épreuve optionnelle au baccalauréat français! Autant dire que ce que Heïana s'apprêtait à montrer et à enseigner aux étudiantes lui faisant face était quelque chose à la fois de profondément intime et d'extraordinairement plaisant à exposer pour elle. Face aux précisions que lui apportait Yoko, la Tahitienne se fendit d'un sourire d'excuse et répondit: "Désolée je ne connais pas... la Northlight Theater Compagny, c'est cela? Mais ce serait un vrai plaisir de la découvrir par contre!". Bien, à première vue, aucun a-priori négatif sur les personnes venues pour son cours - en même temps, Heïana n'était pas du style à juger autrui dès les premières secondes - et même plutôt des impressions positives, notamment pour cette petite coréenne qui semblait ne pas pouvoir tenir en place, excitée comme une puce - ce que la professeur improvisée du jour trouvait adorable ceci dit - . Cela se ressentait dans la posture, le sourire et l'attitude de Yoko qu'elle était super contente d'être là, enthousiaste d'apprendre une nouvelle manière de danser, et rien ne pouvait faire plus plaisir à la franco-australienne. Ce fut d'ailleurs tout sauf inattendu que la demoiselle aux cheveux tressés soit la première à questionner Heïana, qui répondit sans aucun souci: "Je n'ai malheureusement pas eu assez de temps pour me consacrer à l'entraînement pour des compétitions, mais j'aurais bien aimé! J'ai par contre eu la chance de participer au Heiva dans le cadre d'un groupe entier de danseurs qui faisait une procession à travers la ville de Papeete, jusqu'à une des plages. C'était un moment vraiment très sympathique, on se sentait vraiment en symbiose les uns et les autres, et ce même si les niveaux pouvaient être différents".
Ce fut donc peu de temps après qu'Heïana proposa à chacune de porter des vêtements traditionnels pour la pratique du Tamure. Devant la tête choquée d'une des participantes, Cheryl, elle s'empressa de repréciser: "Bien sûr, vous n'êtes pas obligées de les porter. Ce sont des tenues souvent assez dénudées. Mais personne n'est ici pour juger - ce sont l'une des valeurs Tahitiennes : pas de place pour le dénigrement dans les îles, du moins c'est ce qu'on nous inculque autant que possible - alors pas de panique.". Finalement, toutes se prêtèrent au jeu et à part Cheryl, elles semblaient toutes plutôt enchantées de pouvoir ressembler aux fameuses poupées des îles dont elles avaient dû entendre des histoires plus que féériques. Heïana profita de leur absence dans le vestiaire pour revêtir elle-même sa tenue, se changeant directement dans la salle de danse. Elle sortit de son large sac de ville sa robe composée en deux parties: le haut, un bandeau pour poitrine retombant un peu sur le haut du ventre et le bas, longue jupe largement fendue le long de la cuisse droite. Habituée, elle se changea bien vite, et était prête lorsque les premières étudiantes ressortirent du vestiaire.
Heïana Tamure:
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Celle étant en tête se trouvant être Yoko, la Tahitienne aurait pu parier dessus. La demoiselle aux traits asiatiques se rapprocha en dansant, posant à nouveau une question. Quelle jolie qualité que la curiosité! D'un doux sourire, Heïana répondit: "Je suis née en Australie et ma mère n'étant pas pratiquante du Tamure, j'ai dû attendre un peu pour l'apprendre. J'ai dû commencer lors de mes premiers voyages à Tahiti, vers cinq ans. Mais je me suis perfectionnée surtout ces sept dernières années, car j'ai vécu dans les îles pendant ce laps de temps". Une fois que toutes furent arrivées et bien apprêtées, la jeune femme leur adressa un large sourire. Là, en groupe de danse, elle se sentait déjà plus à l'aise pour donner cours. "Bien. On va commencer par s'échauffer un peu; vous êtes toutes danseuses, vous savez comment faire, je vous laisse donc vous étirer à votre guise. Pendant ce temps, je vais vous faire un petit point sur le Tamure lui-même, car il est en fait composé de plusieurs danses". A partir de ce moment-là, entre quelques quelques talons-fesses et autres postures pour préparer les muscles abducteurs, les chevilles, les genoux, les poignets et le cou à s'activer, Heïana leur donna le détail du 'Ori Tahiti. À la base, la danse tahitienne s'inspire des gestes du quotidien. Mouvements de pagaie, fabrication du tapa (étoffe végétale obtenue en battant de l'écorce) sont des scènes de la vie quotidienne polynésienne racontées en dansant. Il existait à partir de là quatre grands courants de Tamure. Le Ote'a qui met en scène les hommes, appelés "tane" et les femmes dites "vahinés" dans des chorégraphies d'origine guerrière, avec pour particularité de n'utiliser que des percussions pour la musique. Le deuxième style est l'Aparima, danse lente et gracieuse exécutée par les femmes exclusivement, qui bougent de manière lascive au rythme d'une musique douce à base de guitare sèche et d'ukulélé... Le Pao'a met en scène des couples de danseurs ou un soliste. Enfin, le Hivinau est une danse joyeuse, pratiquée en cercle par les hommes et les femmes, autour d'un soliste vocal, les danseurs répondent en coeur au chanteur.
"Pour aujourd'hui, nous allons découvrir le Tamure par le courant de l'Aparima; les gestes sont bien plus lents que pour les autres danses, notamment l'Otea, ce qui vous permettra de bien les intégrer. C'est sûrement cette à danse que les explorateurs européens ont assisté en arrivant en Polynésie, ce qui explique leurs écrits où ils parlent de "femmes nues les accueillant par des cajoleries" et autres jolies citations que vous pouvez trouver notamment chez le navigateur français Bougainville. Cette danse est vraiment celle de la délicatesse, de la beauté féminine voire de la séduction, selon l'intention qu'on y met.", déclara Heïana une fois cinq minutes d'échauffement passées. La Tahitienne sortit d'un dernier sac un poste radio avec lecteur CD, qu'elle brancha à une prise annexe. Cette salle était vraiment bien agencée pour la danse, avec notamment de multiples miroirs; parfait pour voir les mouvements de chacune, les guider et que tous puissent se corriger par eux-mêmes le cas échéant; ainsi la Tahitienne demanda, prête à démarrer la musique: "Vous vous sentez prêtes? Je vous ferai une petite démonstration commentée pendant la première piste musicale, et ensuite on commencera à mettre toutes en pratique. Des questions?"
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((juin 2019))
Il y a une aura fascinante chez Heïana — comme une douce chaleur qui émane d’elle et qui donne à l’atmosphère une chatoyante ambiance. Que ce soit dans son regard attentif ou son sourire rassurant, elle a cette attitude qui inspire confiance et qui touche Yoko ; intérêt accentué lorsque la jolie professeur la questionne sur sa compagnie (ah ! sa fameuse compagnie qu’elle chérit de tout son cœur et qu’elle ne quitterait pour rien au monde — après tout, elle est venue en Australie pour y vivre son plus grand rêve et la Northlight Theater Company en est l’énergie motrice). « Vous pouvez venir aux représentations, si vous voulez voir un peu ce que ça donne ! » propose avec émerveillement Yoko, oubliant momentanément qu’elle se trouve dans un cours de danse tahitienne et non autour d’un café pour parler danse et chorégraphie tout en faisant la promotion de sa compagnie. C’est le soupir exaspéré de sa voisine de droite qui la ramène durement à la réalité ; les autres ne sont pas aussi curieux ni passionnés et c’est peut-être l’une des rares choses que Yoko ne comprend sincèrement pas (après l’amour) ; l’absence de passion chez les autres. Comment vivre sans ça ? Pas une seule seconde, pas un seul instant, la petite nippone ne s’imagine sans danser, évoque un avenir où il n’y a ni répétition ni pas de danse parfaitement maîtrisé — elle en a trop besoin pour exister. La mauvaise humeur de Cheryl n’entache cependant pas la bonne humeur rayonnante de Yoko qui écoute avec attention Heïana expliquer ne pas avoir pu participer aux compétition, faute de temps mais qu’elle a eu la chance cependant d’exercer son talent dans cette danse à travers une procession ; elle hoche vivement la tête à ses paroles, ne rebondissant en revanche pas dessus, certaine que les participants vont finir par râler de leur dialogue à deux — mais c’est tellement intéressant ! Heïana ayant précisé (suite à la moue scandalisée de Cheryl as known as la nana reloue du groupe pour la séance) que les tenues n’étaient pas obligatoires, cette dernière ne se prête évidemment pas au jeu sous le regard blasé de Yoko — franchement, elle abuse totalement. D’ailleurs, excepté elle, toutes les filles sont ravies et dans le vestiaire, il y a une véritable ébullition de propos enjoués et motivés pour apprendre cette danse ; c’est beau, c’est coloré, c’est varié — chacune trouve sa taille, son goût personnel, son motif préféré. Il y a une si belle harmonie entre toutes ces tenues et ses filles que l’on dirait (presque) un groupe professionnel et ça donne à Yoko un sourire sincère sur le visage. Première sortie du vestiaire (totalement excitée et prête à apprendre tous les pas de danse du monde, elle refuse de perdre du temps aux essayages), elle se rapproche de la jeune professeure pour la questionner, incapable de masquer sa curiosité — elle a bien tenté parfois de cacher son désir de tout savoir mais les échecs et vaines tentatives se comptent en milliers. Heïana lui répond avec un sourire, nullement gênée par ce qu’elle pourrait vivre comme un interrogatoire. « C’est grave coo— enfin, c’est trop bien si vous avez pu l’apprendre dans les îles ! Apprendre dans le pays d'origine, c'est le mieux j'pense— j'veux dire, j'ai appris la danse k-pop en Corée et c'est probablement la meilleure école, juste parce que cette danse vient littéralement d'ce pays. Vous retournez souvent à Tahiti ? » (elle grimace légèrement) « Désolée, c’est p’t-être un peu indiscret » ; quelques minutes après, les autres participantes les rejoignent enfin, à la grande impatience de Yoko qui piétine presque sur place dans l’attente (ah ! une pile électrique celle-là). A l’instant où Heïana débute l’échauffement pour expliquer ensuite le Tamure, il y a comme une jolie harmonie qui se dessinent dans le groupe — toutes écoutent avec attention ses propres, répètent et réitèrent les mouvements, entre rires et éclats ; c’est tellement différent des autres danses ! Inutile de préciser que Yoko est ravie — ça se voit sur son sourire, ça se lit sur son visage. La petite nippone est la plus attentive, la plus perfectionniste (il faut dire qu’avec Clément en partenaire, elle a l’habitude de ne jamais s’arrêter avant de savoir le mouvement les yeux fermés). Aux propos de la jeune tahitienne, Cheryl murmure ironiquement à la jolie japonaise « Beauté féminine, délicatesse et séduction, t’es out là Yoko » qui lui envoie royalement un doigt d’honneur tout en se concentrant sur ses échauffements (hors de question de se laisser distraire, bien qu’elle sache pertinemment que les propos de Cheryl sont surtout là pour la taquiner). Après cinq minutes, Heïana sort un poste de radio pour y insérer un CD et demande aux étudiantes si ces dernières ont des questions. Sourire mesquin discrètement dessiné sur ses lèvres gercées, Yoko lève la main, prenant son air de petite fille modèle des plus innocentes avant d’annoncer d’une voix pétillante « Cheryl a déjà fait du Tamure mais elle ose pas le dire ! Elle voudrait faire une démonstration pour nous montrer » (le visage de Cheryl se décompose alors que ses lèvres forment un o muet) ; et bam, vengeance — Yoko a quatre ans d'âge mental et alors ?
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MEA CULPA:
@Heïana Brook UN IMMENSE PARDON POUR LE RETARD + par rapport à Cheryl tu en fais ce que tu veux hihi c'est un perso inventé random de mon esprit donc fais comme ça t'arrange ! ♡
Dernière édition par Yoko Lee le Dim 27 Oct 2019 - 1:35, édité 1 fois
FEATURING @Yoko Lee & Heïana Brook Danser, c'est vivre la vie dans ses vibrations les plus fines et les plus hautes, vivre la vie harmonisée, purifiée, contrôlée ~ Ruth Saint-Denis
La Northlight Theater Company... Non vraiment, il faudrait que la jeune femme aille voir une de leurs représentations; au vu de l'énergie positive que dégageait Yoko, aucun doute qu'elle devait être vraiment pimpante sur scène, et devait donner des interprétations scéniques rafraîchissantes. Cette supposition était en plus complétée par celle que la demoiselle aux origines asiatiques semblait très pointilleuse, attentive, appliquée. Tout cela saupoudré d'une bonne dose d'enthousiasme, seul un véritable succès pouvait alors être attendu de son jeu ! D'ailleurs, Heïana se rappelait que sa rencontre récente, Clément, lui avait dit jouer dans une troupe de théâtre... Peut-être qu'il connaissait celle de la gentille sino-coréenne ? Ou même, qu'ils faisaient partie de la même ? Ce serait un point à creuser plus tard, si la professeur improvisée du jour avait l'opportunité de discuter avec son élève à la sortie du cours. Yoko fut d'ailleurs la première à sortir des vestiaires, créant une occasion de papoter, mais les deux jeunes femmes partirent sur un tout autre sujet. La maïeuticienne rit lorsque son interlocutrice s'excusa, persuadée d'être indiscrète, et répondit: Il en faudra beaucoup avant que je trouve une de tes questions déplacée, ne t'en fais pas. Et tu sais, je suis en posture de prof' aujourd'hui, mais je suis à peu près certaine que je ne suis pas beaucoup plus vieille que vous toutes, alors... La jeune femme laissa planer un petit silence évocateur, laissant comprendre qu'elle n'était pas du tout gênée par une quelconque proximité qui ressemblerait plus à du copinage qu'à une relation professeur - étudiant. Tant qu'elle pouvait mener à bien son cours de danse, bien évidemment; elle était là pour ça avant tout. Le reste pourrait se voir en dehors de la séance de danse.Je suis revenue à Brisbane il y a quelques mois seulement, je suis retournée à Tahiti pour régler quelques affaires entre-temps. Mais en effet, je compte bien y aller au moins une fois par an, si ce n'est deux.
Finalement, toutes les étudiantes arrivèrent dans la pièce de répétition, et Heïana les invita à s'échauffer alors qu'elle s'y mettait elle-même, tout en racontant l'histoire de l'Ori Tahiti. Cependant, la seule étudiante qui n'avait pas voulu se changer - ce qui n'était pas un problème en soi, mais qui dénotait d'une certaine indifférence voire d'une hostilité au vu du comportement de la personne en question depuis le début du cours - Cheryl, semblait vraiment d'une humeur massacrante. Si toutes les filles écoutaient sagement les instructions de leur prof', elle n'essayait que de lancer des petites piques ici et là, notamment à Yoko, mais à d'autres aussi. Pensait-elle réellement que la brune qui leur faisait face était idiote ? Ou sourde, peut-être ? Car elle l'entendait très bien malgré ses murmures, tout comme elle comprenait à quel point cette jeune fille était en train de chercher des noises à ses camarades de fac. Aussi, lorsqu'elle attaqua une énième fois la japonaise, qui ne se retint pas de lui faire un beau doigt d'honneur, Heïana se décida à intervenir. Ce n'était pas la première fois que cette fille avait une attitude déplacée envers les autres élèves, mais aussi envers elle-même, qui venait leur donner un cours bénévolement. Et l'irrespect, ça la Tahitienne ne le supportait pas. De plus, elle avait derrière elle sept ans d'expérience en tant que maman - parcours fait sur les rotules d'ailleurs, au vu des circonstances dans lesquelles c'était arrivé - donc autant dire qu'elle avait appris à se faire respecter. D'une voix totalement changée, bien plus neutre et même froide que quelques instants plus tôt, elle déclara en visant bien la personne concernée dans les yeux : Cheryl, c'est ça ? J'ai dis il n'y a même pas cinq minutes qu'à Tahiti, on n'émet aucun jugement de valeur sans avoir de bons arguments à avancer. Si vous ne connaissez pas l'histoire des trois filtres de Socrate, je vous invite à la lire, elle est très instructive; j'aurais aimé vous en parler mais ce serait trop long et ce n'est pas l'objet du cours. Bref, si vous n'avez pas l'intention de vous mettre dans l'état d'esprit correspondant au Tamure, vous pouvez sortir; la porte est ouverte.
Voilà qui avait le mérite d'être clair, ce qui sembla véritablement "mettre sur le cul" la concernée, qui ne s'attendait probablement pas à être reprise par une personne venue bénévolement, qui n'était pas bien plus vieille quelle, et qui semblait bien trop douce pour oser hausser le ton. Spoiler: Elle s'était trompée. Scotchée, elle ne trouva même pas la volonté de répliquer et, presque honteuse mais surtout boudeuse, elle ferma son clapet. Heïana soupira intérieurement; elle n'aimait pas mettre quelqu'un dans une position humiliante au sein d'un groupe, mais celle-ci l'avait cherché, et elle se devait de mettre le holà pour que tout se passe bien. Cependant, la métisse avait oublié l'existence d'un facteur: le caractère enfantin de Yoko, qu'elle ne connaissait après tout que depuis moins vingt minutes. Celle-ci prend sournoisement la mauvaise tête du groupe à revers en disant qu'elle souhaiterait faire une démonstration de danse tahitienne, mais qu'elle n'ose pas. Mais bien sûr. Pensaient-elles vraiment toutes, même la gentille brune aux jolies nattes, qu'elle était dupe de tout ce qu'elles leur disaient ? On aurait dit Moana lorsque, enfant, elle avait voulu se venger d'une de ses copines d'école qui lui avait fait un sale coup quelques jours plus tôt, pensant que sa grande soeur ne verrait rien. Spoiler 2 : Encore loupé.
La Tahitienne s'apprêtait à réprimander - gentiment - l'élève dotée d'un mental d'enfant de dix ans afin de pouvoir faire avancer le cours, mais elle fut prise de court par Cheryl. Celle-ci, qui bouillonnait intérieurement depuis qu'elle s'était fait réprimander, décida tout bonnement de partir sans un mot, en claquant la porte. Bon... Laissa traîner Heïana dans les airs, un peu déconcertée par ces événements. Finalement, elle se reprit vite, haussant les épaules en signe d'abandon. Elle n'allait pas courir après la fille non plus. On continue. La jeune femme appuya sur le bouton "ON" de son lecteur radio, et la musique à base d'ukulélé, guitare puis voix se lança. Immobile quelques secondes, attendant le bon moment pour commencer, la demoiselle se lança finalement. Les mouvements étaient plutôt lents et étaient marqués par l'amplitude, l'occupation de l'espace, notamment avec de larges mouvements de bras semblant inviter à l'accueil, à la douceur, et par un déhanché assez dingue, où il n'y avait de place que pour les mouvements du bassin, la poitrine et les épaules restant quasi-immobiles. Il n'y a pas mieux pour travailler vos abdos, mesdemoiselles, déclara la Tahitienne avec un petit rictus amusé. Puis, le rythme s'accéléra, et les mouvements d'Heïana suivirent le tempo; ils étaient assez variés par des poses changeantes, parfois elle se mettait de côté pour un déhanché, regardait vers le ciel, puis tournait sur elle-même, se penchait en avant... Une fois la chorégraphie finie, elle arrêta le CD et regarda ses élèves, demandant avec une mine faussement inquisitrice: Très bien, je vous écoute. Qu'avez-vous remarqué de particulier dans cette danse, que vous ne pratiquez pas forcément dans d'autres danses ? Que pouvez-vous me dire de cette chorégraphie ? Par cela, elle voulait constater à quel point ses élèves avaient compris l'Aparima, que ce soit sur la technique pure que sur son ambiance, sur la volonté à y mettre, et caetera.
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((juin 2019))
Yoko lui donne vingt-six ans, peut-être vingt-huit mais jamais plus — il y a dans le regard de Heïana comme une lueur enfantine qui ne la quitte pas ; la petite nippone esquisse un sourire complice et lâche un léger soupir de soulagement alors que sa professeur du moment lui assure ne jamais trouver une question déplacée et qu’il faudrait aller loin (vraiment très loin) pour qu’elle considère leur discussion comme un interrogatoire où brûle le malaise et la gêne. Le court silence qui suit ses propos est des plus évocateurs et Yoko sait, à cet instant, qu’elle vient de faire une superbe rencontre. Au-delà de leur point commun évident qu’est la passion pour la danse, elle est persuadée que la ressemblance va plus loin et intérieurement, elle espère vivement que Heïana voudra venir visiter la Northlight Theater Company un jour ; elle l’accueillerait avec grand plaisir, c’est certain ! Compréhensive et se reconnaissant totalement dans les propos de cette dernière, la jolie danseuse hoche la tête, comprenant entièrement le besoin de revenir au moins une fois par an dans son pays d’origine, comme un doux retour à la maison. Le retour des élèves interrompt leur conversation et Yoko suit scrupuleusement l’échauffement (bien conscience que le moindre faux mouvement pourrait réveiller la douleur dans sa cheville désormais fragile suite à son accident) et se passionne pour les pas à apprendre, tout en maudissant Cheryl d’être venue ruiner ce cours — mais c’est Heïana qui la remet à sa place en lui rappelant les valeurs à Tahiti et l’absence totale de jugement dans leur façon de penser. Sourire victorieux sur le visage et malice dans son regard enfantin, Yoko s’amuse de la situation, prenant un air presque supérieur et franchement moqueur alors que Cheryl se prend la morale de sa vie devant l’ensemble du groupe. Pourtant, Yoko n’est pas méchante — bien au contraire, elle a cette pureté dans l’âme qui ne la quitte pas depuis son enfance, la volonté intarissable de ne jamais laisser quelqu’un de côté et de toujours pouvoir aider ; simplement parfois (souvent peut-être) ressort son impertinence enfantine, son insolence de gamine qu’elle ne masque pas forcément bien au quotidien. Face à la remarque de la rousse et à la réprimande (sur ce ton froid mais particulièrement violent) de la professeur, elle ne peut s’empêcher d’afficher ce sourire agaçant de celle qui pense avoir gagné et alors que Cheryl, abasourdie par Heïana et incapable de prendre la porte, se mure dans un silence, la petite nippone en profite pour lever la main et accentuer l’embarras de cette dernière — petite peste jusqu’au bout. Qui l’a dit, d’ailleurs ? Peut-être Clément, au détour d’une conversation ; que Yoko est de celle qui ne voit pas les limites et qui peut s’avérer particulièrement immature dans certaines situations — c’est le cas aujourd’hui, alors qu’elle s’imagine enfoncer Cheryl. Rien ne se passe comme prévu, évidemment — Heïana n’est nullement dupe et bien plus expérimentée en matière d’enfantillage que Yoko ne le sait. Elle s’apprête à dire quelque chose (certainement pas encourager les propos de la jolie danseuse) mais se trouve coupée par le départ de Cheryl, sans un mot et en claquant la porte — inutile de préciser que le silence qui suit est lourd et pesant et que Yoko se sent presque coupable de l’avoir poussé à quitter la salle ; ce n’était pas son but, ce n’était pas son intention. Mais elle a parfois cet orgueil mal placé, ce besoin de ne pas se laisser écraser — on lui a trop de fois fait des remarques pour qu’elle reste silencieuse. La musique emplie la salle du son mélodieux du ukulélé, de la guitare puis de la voix masculine, qui baigne les élèves dans une ambiance chaleureuse, comme pour oublier l’incident de la minute précédente. Heïana est fascinante — dans sa danse, dans ses mouvements, dans sa façon gracieuse de se mouvoir et ses gestes délicats et précis des mains ; ses déhanchés sont impeccable, ses tours parfaitement maîtrisées et pas une seule de ses actions ne semblent connaître de défaut. « C'est génial » ; souffle d’admiration qui s'échappe. A la remarque sur les abdos, les éclats de rire résonnent dans la pièce. « J’pensais pas que c’était aussi intense à ce niveau-là » lâche Yoko, un large sourire sur les lèvres (ravie d’être ici) mais déterminée à donner le meilleur pour réussir la chorégraphie. Heïana, très pédagogue, interroge alors les élèves sur la danse. « Le point central est notre ventre » répond Yoko un peu du tac-au-tac, sans vraiment réaliser qu’elle est entourée — quand on parle de danse, la jolie coréenne oublie tout le reste. « Il faut— en fait, notre buste et notre tête doivent rester droits et on doit bouger que nos hanches » (tout en parlant, elle explique à l’aide de mouvement, indiquant de sa main sa posture) « Et en même temps— » elle se mord la lèvre, réfléchit à voix haute « —il faut aussi que notre regard suive nos mains » ; cette danse est si précise, si minutieuse. « Chaque mouvement est précis » ; ses iris pétillent alors de malice. « Vous pensez que— genre, on pourrait s’entraîner et faire cette danse à la fin de l’année ? En décembre, pour juste après le dernier semestre !» Yoko, toujours les bonnes idées — volontaire pour danser.
codage; birdie. icons; sial.
Dernière édition par Yoko Lee le Dim 27 Oct 2019 - 1:33, édité 1 fois
FEATURING @Yoko Lee & Heïana Brook Danser, c'est vivre la vie dans ses vibrations les plus fines et les plus hautes, vivre la vie harmonisée, purifiée, contrôlée ~ Ruth Saint-Denis
Les autres élèves ne semblent pas s'offusquer de la prise de parole de la jeune fille aux traits asiatiques; elles sont plus effacées qu'elle, et semblent plus aptes à l'écoute qu'à la prise de parole devant tous. Ceci n'étonne pas Heïana; nombre de danseurs et de danseuses trouvent justement leur moyen d'expression dans le rythme de leurs corps sur des musiques diverses et variées, et non dans le langage verbal. Qu'importe, tant que chacune ici se sent à l'aise et comprend l'objet du cours. Et tant mieux aussi pour Yoko, qui a donc à loisir d'expliquer ce qu'elle a appris de la démonstration de la Tahitienne, qui hoche la tête d'approbation à ses observations. Elle a l'oeil l'étudiante, il était évident qu'elle ne pratiquait pas la danse depuis la veille ! La maïeuticienne déclara donc avec enthousiasme: C'est tout à fait ça ! Seules les hanches bougent véritablement pour ce qui est de donner du mouvement au reste du corps. Tout le reste: jambes, bras, tête... ne sont là qu'en soutien ou en décoration, pour l'harmonie de la danse. D'où sa remarque un peu plus tôt sur les abdominaux: pour faire de tels déhanchés, il faut savoir se concentrer sur sa respiration ventrale et tenir ses abdos, histoire d'avoir une posture adéquate, rendant la danse jolie et surtout non-douloureuse pour le dos, qui est mine de rien pas mal sollicité !
C'est avec surprise que la proposition finale de Yoko est accueillit: la prof' bénévole en rosit, entre gêne, car l'élément n'était à la base pas du tout prévu au programme, et plaisir de voir quelqu'un étant déjà si impliqué qu'elle pensait à ce genre de choses. Eh bien... En soi, techniquement, à raison d'une séance par semaine, ce serait tout à fait envisageable. Mais personne ne doit se sentir obligé; qu'en pensez-vous toutes ? Elle regarda l'ensemble des étudiantes lui faisant face, attendant leur réponse. Il est vrai que ce serait l'idéal, donnant un objectif aux élèves: et rien ne fait plus plaisir qu'une représentation réussie. De plus, avec cette décision, elles ne se concentreraient que sur l'Aparima les premiers mois, et par la suite, elles pourraient passer à la version plus technique car plus rapide, l'O'tea, et en faire aussi un show ! Finalement, la plupart des élèves signèrent leur accord d'un signe de tête ou d'une exclamation enthousiaste. Certaines se montrèrent plus hésitantes, mais Heïana les rassura tout de suite: Bien sûr, je ne vous oblige à rien. Cependant, il ne faudrait pas qu'on se dise oui aujourd'hui, puis qu'il n'y ait plus que Yoko et moi en décembre, vous voyez ? Quoi qu'elles géreraient surement, cela ne faisait même aucun doute. Alors donnons-nous cet objectif, et je vous propose qu'en octobre, chacune donne sa décision finale. Ainsi serons-nous fixées.
La suite du cours passa très rapidement, car il ne restait déjà plus que vingt minutes sur l'heure entière: normal, entre les présentations de chacune, celle du cours et de la danse Tahitienne, le changement de costume, etc... Mais ces quelques minutes furent tout de même instructives, la métisse enseignant les positions de base pour cette danse à ses élèves, et quelques mouvements. A la fin de la séance, elle leur proposa de garder la tenue pour le cours suivant: ça lui ferait moins lourd à amener à chaque fois, et les élèves pourraient se changer dès leur arrivée dans la salle de danse. Toutes semblèrent réjouies de cette première séance, et partirent le sourire aux lèvres, une fois toutes changées. Sans que cela ne pose question, Yoko fut la dernière à vouloir quitter les lieux. Aussi, la Tahitienne lui dit: Merci pour tes interventions pendant ce premier cours, ça a été super sympa de voir une personne ainsi impliquées ! D'ailleurs, si tu as des amis, même des garçons, qui veulent assister voire participer à ce cours, n'hésite pas à en parler autour de toi. L'Aparima est traditionnellement réservé aux femmes, mais je n'excluerai personne qui a envie de participer. L'O'Tea, en revanche, que l'on verra en deuxième partie d'année, est dansée par les deux genres, alors...
That’s what I like about Polynesians. They wear their hearts on their sleeve knowing that, for adults, there are better games to play than hiding their emotions from each other.
((juin 2019))
Intarissable flot de paroles — definition même de la petite coréenne qui ne cesse de noyer ses interlocuteurs sous une pluie de mots ; elle a toujours ainsi, depuis ses premiers mois, comme si parler était une extension de ses mouvements dansants, comme si sa voix était un second moyen pour exprimer ses maux. Même Clément le répète à tue-tête et à qui veut bien l’entendre, qu’il en faut beaucoup (vraiment beaucoup !) pour la faire taire. La voilà alors ! qui spontanément répond à Heïana, sans laisser réellement aux autres le temps de réfléchir à la problématique. Certes, elle est aidée ; pratiquant la danse depuis de si nombreuses années, la question de la jolie professeur de danse lui apparaît presque enfantine, spontanée — si évidente qu’elle ne réalise pas vraiment que cette aptitude n’est pas partagée de tous. Sourire aux lèvres et regard passionné, elle hoche vivement la tête alors qu’Heïana approuve ses propos, appuyant précisément sur le mouvement des hanches et la droiture du reste du corps — un point qui pique d’intérêt Yoko, elle qui pratique plutôt des danses où chaque partie de son être est sollicité ; nouveau défi, nouvelle envie ! Et lorsqu’elle lance son idée, aboutissement de sa réflexion intérieure, un léger moment de flottement se pose dans la salle (ah ! toujours à s’emballer, petite Yoko). Dans n’importe quel projet, n’importe quel plan, la petite nippone est un concentré d’énergie positive, d’un enthousiasme indescriptible qui parfois peut s’avérer déroutant (pour ne pas dire étouffant) — car tout est trop avec Yoko ; trop intense, trop fort, trop brillant. C’est peut-être ce trait de personnalité qui la caractérise si bien ; solaire même la nuit et jusqu’au matin. « Ça pourrait être grave cool, vraiment ! » — son expression sur son teint porcelaine n’apporte qu’optimisme face au groupe, légèrement septique et surtout surpris par l’idée ; ce n’était censé n’être qu’un cours de démonstration et non quelque chose de plus régulier. C’est Heïana qui le précise la seconde suivante, proposant un objectif à tenir et une mise au point en octobre afin que chacune puisse pendant sa décision finale sans se sentir forcée ; au fond d’elle, Yoko espère de tout cœur que ce projet sera maintenu — il pourrait bien être sa seule raison de revenir à l’Université à la fin de l’année et ça lui arrache un rire ironique parce que décidément, tout revient toujours à la danse. La fin du cours s’écoule si rapidement que personne ne voit le temps passer ; l’apprentissage reste des plus méticuleux et les derniers instants se déroulent dans la plus grande concentration. Lorsque la jolie tahitienne annonce le final tout en ajoutant qu’elles peuvent garder leur tenue pour la prochaine fois, les élèves la remercient chaleureusement, prêtes à revenir la semaine suivante ; sans surprise, c’est Yoko qui reste encore quelques minutes. « J’sais à qui j’vais demander ! » s’exclame-t-elle immédiatement, ravie de pouvoir impliquer sa troupe de danse préférée (et en particulier son Winchester adoré — il n’aura de toute façon pas vraiment le choix puisqu’elle le compte le menacer jusqu’à acceptation forcée) « J’suis certaine que des membres de la compagnie seront ravis de pouvoir y participer ! Et puis, ça change de ce que l’on fait alors— ça peut que plaire » (elle prend une expression plus sérieuse, un regard plus déterminé) « J’espère vraiment que ça pourra se faire— notre spectacle » (sourire volontaire, iris malicieuse) « Parce que j’pense que cette danse mérite vraiment d’être appréciée et regardée » — et puis, dans un signe de la main, elle s’éclipse en lançant un « À la semaine pro ! » avant de disparaître, très certainement en retard pour son rendez-vous suivant. Mais qu’importe ! parce qu’ajourd’hui — un trait solaire dans l’avenir a été tracé.