"Dégagez maintenant Monsieur Williams. Et ne revenez jamais dans ce bar." Voici les mots que viens de hurler ton boss à ton égard. Au loin, tu n'entends pratiquement plus les sirènes des pompiers. Ton regard se pose sur ton poing en sang. C'est le sang de Léo que tu portes sur toi. Doucement, tu reprends ta respiration. Tu ne sais absolument pas ce qui t'as pris de faire cela. Clairement, ça ne te ressemble pas. Tu n'as encore jamais frapper personne. Jamais. Ni un homme, ni une femme. Personne. Cette fois, c'est différent. Trop c'est trop. Depuis quinze jours t'encaisse les remarques de toutes les personnes qui t'entourent. T'encaisse sans rien dire. Ce soir, les mots de Léo ont été de trop. Tu n'as pas su te maitriser et tu l'as envoyé à l'hôpital. D'un côté, il l'a bien cherché mais d'un autre, tu ne cesses de regretter en te traitant de tous les noms possible et imaginable. Il est tard. Dans le vestiaire, t'embarque l'entièreté de ton vestiaire dans ton sac à dos. Adieu MacTavish. Adieu collègues. Plus de six ans réduit à néant en une soirée. Tu n'arrives pas à mettre des mots sur ce que tu ressens. Ce n'est pas la tristesse qui s'empare de toi, c'est la colère. Envers toi, envers Léo, envers Charlie. Mais surtout envers Primrose. Pas question de rentrer chez toi. Tu veux aller la voir et pas pour la baiser, juste pour t'expliquer avec elle. La conversation n'aura rien d'amicale, ça sera tout le contraire. Des cris, des hurlements vont être une nouvelle échangés. Fatigué de tout ça. T'aimerais avancer le temps jusqu'au moment où toute sera derrière toi une bonne fois pour toutes. Pour l'instant, tu te contentes de subir en silence. Cigarette à moitié consumée à la bouche. Poings serrés dans la poche. D'un pas décidé, tu t'avances vers le club de strip tease de Brisbane. Cette soirée est loin d'avoir été parfaite. Nouvelle alte'rcation avec Léo, vous en êtes carrément venus aux mains. Tu ne contrôles pas ta force, c'est ainsi que t'as pu envoyer l'étudiant de vingt-six ans à l'hôpital. Charlie t'en veux énormément. Charlie te déteste. À cet instant précis, tu n'en as que faire de ce que la rouquine pense de toi. Tu n'as qu'une seule idée en tête : aller voir Primrose et pouvoir t'expliquer avec elle. Tu n'acceptes pas ce qu'elle a fait. Elle n'avait aucun droit d'aller trouver Charlie et de lui balancer ce que tu faisais derrière son dos. Il n'y a pas un code pour le respect du secret professionnel dans son job ? Primrose ne s'en sortira pas comme ça. Ce soir, t'es remonté comme jamais tu n'as été remonté auparavant. La dernière fois que tu fus autant en colère, c'était le soir où ton père a tenté de te frapper violemment mais c'est ta mère qui a tout pris à ta place. Contrairement à ce que Léo peut penser, non tu ne frappes pas les femmes. C'est une chose que tu ne supportes absolument pas. Les hommes qui se permettent de frapper une femme ne mérite pas de vivre selon toi. Le club où travailles Primrose n'est plus très loin. Dehors, des hommes et des femmes sont en train de fumer des cigarettes ou autre chose. Alcool, sexe, drogue. Apparemment, rien ne semble les arrêter dans ce club. Une petite point d'excitation s'empare de toi. Tu reconnais certaines filles qui sont elles aussi des prostituées. "Coucou mon beau. Tu veux t'amuser avec toi ?" Une femme à la chevelure brune s'interpose devant toi interrompant ta marche. "Non merci, je cherche Primrose." D'un signe de la tête, la femme te montre un petit coin reculé du club. Parfait. Vous ne serez pas dérangés. Ça fait déjà quelques semaines que tu n'as pas mis les pieds ici. Depuis ton départ à Cape Town en fait. T'aurais préféré revenir dans de meilleures conditions, moins énervé contre cette jeune femme de vingt-quatre ans. T'es curieux de connaitre sa version de l'histoire. Pourquoi as-t-elle fait ça ? Pourquoi as-t-elle tout balancé à Charlie ? C'est elle la responsable de votre séparation. En fait, non ce n'est pas elle. C'est toi mais c'est tellement plus facile de lui en vouloir à elle plutôt qu'à ta propre personne. La musique est insupportable. Trop forte, on ne s'entend plus parler. Planté au milieu de la salle, tu cherches la jeune Primrose du coin de l'oeil. Elle ne semble pas être là. Pourtant d'après la brune que tu as croisé précédemment, elle devrait être là. Serait-elle en train de s'envoyer en l'air avec un type quelconque ? ça ne t'étonnerais pas. "Un whisky s'il te plait !" Billet de dix dollars lancé sur le comptoir, tu continues d'observer la salle. Tu ne la vois toujours pas. Bordel elle se cache ou quoi ? Elle devait bien se douter que tu viendrais la trouver pour avoir des explications. Pas des excuses, elle ne doit pas être le genre de personnes à en donner. "Tu saurais pas où jpeux trouver Primrose par hasard ?" L'homme derrière son bar fait non de la tête. C'est bien, il se soucie de ses collèges celui-là. Tu soupires et boit rapidement ton whisky. T'es pas pressé de toute façon, tu vas l'attendre. T'as toute la nuit devant toi.
Ignorant le brouhaha me provenant de la salle principale, j’essuie avec une serviette la légère sueur qui dégouline le long de ma nuque et glisse dans l’interstice entre mes seins. Maintenant que je ne danse plus, je commence à ressentir l’épuisement provoqué par cet effort physique associé aux journées peu reposantes que j’ai pu vivre ces derniers temps. Je commence tout juste à respirer un peu mieux, maintenant que de grosses échéances universitaires sont derrière moi mais rattraper mes heures au club ne me permet pas de rattraper le retard de sommeil que j’ai accumulé. Ce soir, je rentrerais seule, parce qu’aucun client intéressé ne m’a attrapé pour me tirer hors du podium, collant son corps gras contre moi en me glissant des mots dégueulasses dans l’oreille. J’en suis ravie, même si ça signifie passer une soirée un peu moins lucrative que les précédentes, je sais que ça va me permettre de passer une nuit presque complète et j’en ai bien besoin. Certaines de mes collègues n’auront pas cette chance, j’ignore si elles sont satisfaites de leur performance de ce soir, mais je ne m’y intéresse pas, en général, préférant repartir de mon côté dès que j’en ai la possibilité. Aujourd’hui, j’ai rempli la mission qui m’était confiée et lorsque Kim est venu me relayer sur scène, j’ai filé sans plus attendre. Je m’apprête à me débarrasser de la tenue tape-à-l’œil et peu seyante que j’ai dû porter pour danser, révélant un maximum de mon corps tout en préservant l’intimité que je ne dévoilerais qu’au plus offrant lorsqu’une de mes rares amies débarque dans le vestiaire. « Il y a un type qui te cherche. » Me lance-t-elle en désignant la salle. « C’est bizarre, il connait ton prénom. » Je fronce les sourcils, un peu inquiète de ce revirement de situation et peu encline à voir mes plans pour la soirée être modifiés par un imprévu. « Merci Lola, je vais aller voir. » Je chasse mon air contrarié pour un sourire amical, ne souhaitant pas inquiéter l’une des seules filles avec laquelle j’ai réussi à sympathiser dans un lieu où les coups-bas sont aussi fréquents que les échanges de salive. Je refermer la porte de mon casier, abonnant – pour l’instant – l’idée de redevenir la véritable Primrose Anderson. J’ai encore ce même rôle à jouer pendant un instant, j’espère seulement qu’il sera court et que je pourrais regarder mon lit rapidement.
Lorsque j’entre dans la salle, je peine à me frayer un passage parmi la foule pressée autour des podiums et feins d’ignorer les mains qui touchent ma peau de manière totalement volontaire. Repérer une personne qui me cherche ne va pas être chose aisée, je n’en avais pas mesuré l’ampleur au préalable. Je scrute les visages présents, sans obtenir la révélation que j’attends. Ce n’est que lorsque je suis sur le point d’abandonner – après une poignée de secondes qui m’a déjà parue trop longue – que je le repère enfin. John. Merde. J’aurais dû prophétiser sa venue, il est d’ailleurs étonnant que je n’ai pas eu de ses nouvelles avant, mais même en sachant que cette confrontation aurait lieu, je crois que j’aurais préféré réussir à passer entre les mailles du filet. Il se dirige vers la salle attenante où se trouve le bar et surtout beaucoup moins de monde puisque les hommes ne s’éloignent jamais trop de l’activité principale de la soirée, telle des abeilles autour de leur reine. Je pourrais fuir mais je n’en fais rien, si je ne me confronte pas à lui ce soir, il reviendra et peut-être que cette fois, il m’attendra dans un lieu isolé nettement plus dangereux pour moi que l’endroit où je travaille. Je l’entends interroger le barman sur le lieu où il pourrait me trouver alors que je m’approche de lui, révélant ma présence. « Rares sont ceux qui me connaissent sous ce nom, ici. » Je lui fais remarquer alors que j’arrive à sa hauteur, sourire aux lèvres, comme si je retrouvais un habitué. Je sais que je vais passer un mauvais moment quoi qu’il arrive, alors autant aller au front en gardant la tête haute. « Mais je ne suis pas étonnée que tu le connaisses, désormais. » Je me suis livrée à Charlie, lui révélant mon activité tout comme mon identité et en m’attendant forcément à ce qu’elle le répète, au moins au principal intéressé. S’il est là ce soir, c’est que la confrontation a eu lieu et qu’elle n’a probablement pas tourné en sa faveur. Il me ferait presque de la peine si je ne ressentais pas autant de dégoût en le regardant. « Je suppose que tu es venu chercher du réconfort ? » L’expression de son visage semble suggérer tout le contraire, il est fermé, sur ses gardes, certainement en colère. Je ne sais pas ce qu’il veut faire de moi ce soir, mais ce n’est probablement pas me mettre dans son lit. « T’as de la chance, j’ai rien de prévu et j’ai encore beaucoup de choses à t’apprendre. » Je ne devrais pas me montrer provoquante alors que je suis dans une désagréable position. Le barman s’éloigne du comptoir, faisant mine d’essuyer des verres déjà propres à l’opposé de l’endroit où nous nous trouvons. Le message est clair, si je suis inquiétée, il ne faudra pas que je compte sur lui pour m’aider. J’ai l’habitude et je m’en sortirais seule, enfin, j’espère.
Sur le moment, tu n'as pas réfléchis. Aussitôt la porte de sortie du MacTavish franchie pour la dernière fois, te voilà sur le chemin en direction du club de strip tease. Une semaine s'est écoulée. Il t'as fallut une semaine pour trouver le courage d'aller voir Primrose ou Poppy afin de lui demander des explications. Elle n'avait aucun droit de balancer la vérité à Charlie. C'était à toi de le lui dire. Au fond de toi, tu sais bien que jamais tu n'aurais trouvé le courage de tout révéler à la rouquine mais de là à dire merci à la prostituée, il ne faut pas pousser quand même. Ton égo de mâle te fait réagir de manière excessive. Cigarette qui se consume sur le coin de tes lèvres, poings serrés dans tes poches, t'arrive enfin au club. Dehors, des femmes et des hommes sont là. Certains se draguent mutuellement. D'autres s'autorisent une pause cigarette. Si certains hommes sont là pour passer du bon temps avec l'une des employées présentes ce soir, ce n'est pas ton cas. Ce soir, c'est pour une toute autre affaire que tu t'es rendu au club. Une affaire qui ne concerne personne d'autres mis à part cette Primrose et toi. Le nom de Primrose t'as totalement échappé. Tu n'as pas réfléchis plus de trente secondes lorsque tu lui as donné le nom de la fille que tu cherches. Peu de personne doivent la connaitre sous ce nom-là et tu n'en fais pas partis. Accoudé au bar, t'attends de voir enfin celle que tu cherches. Primrose ou Poppy, tu te fiches bien de savoir comment elle s'appelle. Ton esprit ne cesse de te repasser les mots que la rouquine t'as sortie lors de votre dernière dispute, qui fut extrêmement violente au passage. Ce soir-là, t'es passé par toutes les émotions. La joie de retrouver Charlie après avoir passée l'entièreté de l'après-midi en compagnie de ta coloc. La surprise de découvrir qu'elle fut au courant de ton aventure avec Primrose. La colère qui s'est soudainement emparée de toi. Et pour finir, la tristesse d'apprendre la morte subite de ta génitrice. Ce fameux soir t'aimerais l'effacer de ta tête, l'oublier. Tu ne pourras pas l'oublier, jamais. Elle se contentera de vivre en toi jusqu'à la fin de tes jours. La douleur que t'as éprouvée ce soir-là restera gravée en toi. Au fil du temps, la douleur s'estompera. Lentement, doucement. Les verres d'alcool s'enchainent rapidement. Du coin de l'oeil, tu continues de scruter la salle en espérant apercevoir, enfin, la fille que tu recherches. Tu ne fais même pas attention à celle se trouvant sur scène en train d'effectuer son petit numéro de danse dans l'espoir de récolter un maximum d'argent. D'après ce que la fille de tout à l'heure a pu te dire Primrose est là, quelque part dans le club. Seulement, tu ne la vois pas. Sourcils froncés, tu ne peux t'empêcher de penser qu'elle te fuit et elle a raison. T'es pas là pour rigoler ou la baiser. Elle ne verra donc pas la couleur de tes billets ce soir. Par sa faute, t'as perdue ta copine et ton job par la même occasion. Pour ton travail, c'est ta faute et celle de énergumène d'étudiant de vingt-six ans mais dans le fond, ça ne fut que la suite de la trahison de la strip teaseuse. N'abandonnant aucunement tes recherches, tu te diriges vers une salle où la foule est bien moindre. Tu ne partiras pas d'ici avant de l'avoir trouvé et d'avoir eu les réponses à ces questions qui te trottent dans la tête depuis ce fameux soir. « Rares sont ceux qui me connaissent sous ce nom, ici. » Une voix féminine se fait entendre derrière toi. Un brusque mouvement de tête vers l'arrière et t'as la surprise d'enfin voir Primrose se tenant à quelques centimètres de toi. Elle ne semble pas avoir peur à moins que cela ne soit qu'une parade pour te déstabiliser. "Figure que je ne le connaissais pas non plus jusqu'à il y a une semaine." Tu te détournes totalement du barman, abandonnant même totalement l'idée de terminer par prendre une bonne cuite. Tu souhaites avoir toutes tes capacités mentales pour choisir soigneusement chaque mots que tu lanceras à cette jeune femme. "Tu dois certainement pour quelle raison je suis là ce soir !" « Je suppose que tu es venu chercher du réconfort ? » Roulement des yeux. Soit elle le fait exprès en te prenant pour un débile profond, soit elle a réellement pas invité l'eau chaude. C'est certain que pour en venir à devenir strip teaseuse prostituée, elle ne dois pas avoir un haut niveau d'études. Tu ne peux pas te permettre de la juger étant donné que tu ne connais rien d'elle, mis à part son corps et encore, tu n'en connais que ce qui t'intéresse. Lors de vos moments de plaisirs charnelles, les paroles et les petites attentions ne comptent pas. Plus tu la fais jouir et mieux ça vaut pour tout le monde. "Hum ... Pas du réconfort. Plutôt des explications. T'as un endroit moins bruyants et plus isolé à m'conseiller ?" Hors de question de se donner en spectacle devant tout le monde. Sans doute qu'elle voudrait rester ici avec du monde autour de vous n tant que témoin au cas où la conversation dégénèrerait. Ce qu'elle souhaite, tu t'en fiches bien. Elle n'est pas en position de réclamer quoi que ce soit. « T’as de la chance, j’ai rien de prévu et j’ai encore beaucoup de choses à t’apprendre. » Soupir. Décidément, t'as beaucoup de mal à supporter ces petits jeunes qui se croient tout permis. Une bonne paire de baffes résoudraient certainement la situation. Plus en colère que jamais et exaspéré par la situation, tu lui prends la main et l'emmènes de force dans un coin isolé et reculé du club. Ici, personne ne viendra vous déranger au moins. Tu ne te reconnais plus. Tu n'as jamais été si en colère contre quelqu'un. Dans un excès de folie, ou de rage, ta main vient claquer fortement la joue de la jeune femme. Moins de deux secondes plus tard, tu recules et croises les bras sur ton torse. "M'apprendre quoi ? Que t'as tout balancé à ma copine ? De quel droit t'as pu faire ça ? Y'a pas de secrets professionnels chez les prosituées ?" Ton regard est noir, tu ne décolères pas. Qu'elle est peur de toi ou non, tu t'en fiches. Tu ne partiras pas d'ici avant de connaitre de quel droit elle a réduit ton couple à néant.
L’arrivée de John au club aurait sûrement dû me faire peur, et en un sens, c’est le cas, car je sais qu’il est capable de se donner en spectacle devant mes collègues, mon employeur et les habitués qui me connaissent. Je ne tiens pas à me donner en spectacle, en tout cas, pas de cette manière-là. Toutefois, alors que je m’attendais à ce qu’il se montre furieux, voire même violent, il a plutôt l’air d’un chaton coincé dans un arbre, attendant bien sagement les pompiers pour réussir à défendre. Je me doute fort qu’il a des reproches à me faire, ou alors, il vient simplement chercher dans mes bras ce que Charlie refuse de lui accorder désormais et à juste titre. Je ne regrette pas mon choix, j’ai agi en mon âme et conscience en allant trouver la jolie rousse pour lui révéler les agissements de celui qui estimait pouvoir la conduire fièrement à la fac sans devoir faire face à son passé et à ses agissements douteux. Pourtant, je suis que je suis seule à devoir assumer la conséquence d’un acte qui partait d’une bonne intention. Mes collègues n’interviendront pas et Charlie n’avait probablement jamais eu l’intention d’empêcher son mec de me casser la gueule, sinon elle se serait sans doute arrangée pour qu’il ne puisse pas me trouver ce soir. Peu importe, en vérité, j’ai bien l’intention de faire face. J’ai beau être faible par certains moments, la perspective de venir en aide à Charlie m’a poussée à lui venir en aide, quand bien même je mettais ma propre existence en danger. Je sais qu’il était sûrement culotté de ma part de venir critiquer le fait que John fasse appel à des prostituées alors que j’en fais partie, mais si je fais preuve d’une grande tolérance envers mes clients, j’ai toujours eu beaucoup de mal avec le fait que la plupart des hommes qui se regroupent ici aient une vie de famille. Les clubs de striptease sont un lieu de prosélytisme de l’infidélité, perçue comme une mode ou une tendance à suivre qui me donne envie de gerber. « Je suis déçue que tu aies eu à l’apprendre. » J’admets, consciente que mon identité était encore la seule chose qui demeurait privée sur mon lieu de travail et qu’il a pourtant réussi à me prendre grâce aux révélations de sa petite-amie. Mon corps, il le connait parfaitement, mais ce que je suis, il l’ignorait et j’aurais préféré que ça reste comme ça. Mais encore une fois, c’est dans la continuité de mes aveux et je ne peux pas en vouloir à Charlie de s’en être servie, ça prouve au moins qu’elle a cherché la confrontation et j’espère que cette dernière lui aura davantage ouvert les yeux que notre propre conversation.
John me suggère de trouver un endroit plus calme pour obtenir des explications de ma part et je hausse un sourcil, intriguée par une telle demande. Croit-il sincèrement que je vais accéder à cette demande ? Autant dire tout de que j’accepte, bien sûr, qu’il me passe à tabac puisque j’imagine que c’est ce qu’il compte faire dans les prochaines minutes. Il est donc absolument hors de question que ce soit moi qui me jette dans la gueule du loup. Malheureusement, il ne me laisse pas le temps de rétorquer quoi que ce soit, une vague de colère venue de nulle part semble soudainement le submerger et il m’entraine en m’attrapant par la main, indifférent aux mouvements de cette dernière qui chercher à s’extirper de cette poigne désagréable. Arrivés dans un des salons privés, je me sens déjà beaucoup moins à l’aise que précédemment, sachant pertinemment que si les chances qu’on me vienne en aide dans un endroit plutôt peuplé étaient déjà mince, elles sont inexistantes ici. Il me lâche et avant que j’aie eu le temps de dire quoi que ce soit, je reçois sa main en pleine figure. Ma joue brûle et par réflexe, je viens y plaquer ma main alors qu’il se recule, bras croisés, laissant la colère retomber aussi facilement qu’elle est venue. Ce type est vraiment étrange. Il reprend de plus belle, décidé à avoir des explications que je ne peux pas vraiment lui donner parce que, d’une part, je ne les ai pas, de l’autre, je trouve ses questions toutes aussi stupides les unes que les autres. De quel droit ai-je pu faire ça ? Et qu’est-ce qui aurait pu m’en empêcher ? Je n’éprouve aucun attachement envers lui, je ne lui dois rien, je ne suis ni son amie, ni sa copine, ni même une connaissance, je suis son jouet et rien de plus lorsqu’il me tient entre ses mains mais lorsqu’il n’est plus avec moi, j’estime que le contrat est rompu et que je n’ai aucun compte à lui rendre. « Si jamais tu déniches le code de déontologie de la prostitution, n’hésite pas à me le faire savoir. » Je rétorque, piquante, main toujours sur ma joue mais pourtant incapable de m’écraser comme je le devrais pour laisser à la tempête le temps de passer. Je vais sûrement prendre des coups ce soir, mais j’en ai l’habitude, il ne sera pas le premier ni le dernier à laisser une trace sur moi. Les blessures physiques seront éphémères mais au fond, je me souviens de chacune d’entre elles. Qu’est-ce qu’un coup de plus ? Ça ne changera rien à celle que je suis déjà devenue à cause d’eux, alors je peux au moins me permettre de garder la tête haute pendant que je le peux encore. « Je l’ai fait parce que c’était ce qu’il fallait faire et parce que j’en avais la possibilité, elle avait le droit de le savoir à quel point tu es écœurant. » Le voir me dégoûte, l’idée qu’il mette de nouveau la main sur moi me dégoûte, tout en lui me donne envie de vomir.
Les tentatives de déstabilisation de Primrose ne marche pas sur toi. Si elle pense réussir à te faire culpabiliser, elle se trompe lourdement. Certaines personnes pourraient confirmer que je ne me laisse pas avoir si facilement. Quelques uns diraient même que je n'ai pas de coeur. Dans un sens, c'est peut-être vrai. Tu te protèges, c'est tout. À défaut de ne pas très bien fonctionner comme il le devrait, ton coeur a toujours tendance à s'attacher un peu trop rapidement aux gens que tu rencontres. À une certaine époque, tu ne pouvais t'empêcher de prendre les problèmes des autres trop à coeur. Plus tu as grandis et plus tu as pris conscience que ce n'était pas la meilleure des solutions. Tu ne peux pas être empathique, ni aider les autres à se sortir de gouffres vraiment très profond. Tant pis si tu passes pour un homme ne possédant pas de coeur ou pire. Souffrir ne t'intéresse pas. Primrose ne réussira à te faire déculpabiliser. Ce soir, tu n'as plus les idées claires. Toute la colère, toute la haine que tu as accumulé durant ces derniers ne sont pas prête à s'effacer. Ta présence au club ne semble pas intrigué la demoiselle. Elle devait certainement à te voir débarquer, elle ne savait juste pas quand tu allais venir. Toi non plus tu ne le savais pas, jusqu'à ce soir. Ton renvoie du MacTavish a été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase. Tu n'es pas venu pour te taper Primrose ce soir. Elle ne mérite même pas que tu continues à être son client. Toute cette histoire t'as fait prendre conscience d'une chose : tu ressembles de plus en plus à ton paternel. Alcool, prostituées. Il ne manque plus qu'une femme sur qui tu passerais tes nerfs et là, ça serait le pompom. Finalement, la demoiselle t'as probablement rendu un immense service en tout dévoilant. Sans le savoir, elle t'as fait ouvrir les yeux et prendre conscience que ce n'est pas comme cela que tu comptes vivre. Tu refuses de ressembler à ton père, pas question de marcher dans ses traces. Tu préfères encore Ce soir, Primrose va devoir assumer ces actes. Assumer le fait qu'elle a ouverte sa bouche en balançant ce qu'il se passait entre vous à ta petite amie. Il est exclu de lui présenter le moindre remerciement. « Je suis déçue que tu aies eu à l’apprendre. » Un sourire aux lèvres, tu te penches légèrement vers l'oreille de la demoiselle. "Il ne fallait pas l'ouvrir si tu voulais préserver l'anonymat. La prochaine fois, tu tourneras ta langue sept fois dans ta bouche avant de l'ouvrir et pas dans celle de l'un de tes partenaires d'une nuit." Qu'elle s'appelle Primrose, Poppy ou Jacqueline, tu t'en contrefous. Au final, le résultat est le même. Charlie ne veut plus jamais t'adresser la parole de part ce tes tromperies mais aussi parce que ce soir, tu as envoyé son meilleur ami avec trois poils sur le torse à l'hôpital. Sur le moment, ça t'as fait du bien de te défouler sur lui. Plus le temps passe et plus tu ne cesses d'éprouver des regrets lorsque tu penses au calvaire que doit certainement vivre Charlie, Clément ainsi que la famille de Léo. T'attrape la main de la jeune femme et l'emmène dans un endroit calme, isolé du reste de la foule. Sans attendre plus longtemps, ta main se lève et vient frapper avec une légère force la jour de Primrose. Tu finis par te reculer de la jeune femme. Regard noir, bras croisés sur ton torse. C'est maintenant que tu lui demandes pourquoi elle a fait ça. Pourquoi est-ce qu'elle a tout balancée à Charlie ? Au fond de toi, t'espère que la demoiselle a peur. Peur d'être ici, toute seule avec toi et peur de toi aussi. T'as toujours eu beaucoup de mal à gérer tes émotions, surtout la colère. C'est pour cela que tu fais de la boxe, clandestinement certes mais ça te fait du bien. Au lieu de taper sur quelqu'un, c'est un sac de sable qui reçoit tes coups. Ta question est un peu stupide, il faut bien se l'avouer. Tu ne connais pas la demoiselle, tu ne sais pas ce qui a bien pu lui passer par la tête. As-t-elle été prise de remords en découvrant que Charlie sortait avec toi ? As-t-elle été prise de compassion pour la rouquine ? Prim ne te doit rien. Aucune attache, aucun sentiment. C'est la règle quand vous vous retrouvez pour vous envoyez en l'air. Sans as-t-elle cru bien faire. Cette simple idée te fait sourire. « Si jamais tu déniches le code de déontologie de la prostitution, n’hésite pas à me le faire savoir. » Ton regard reste toujours aussi noir le ton de ta voix toujours aussi sec. La gifle que tu viens de lui mettre ne semble pas l'avoir calmé. La demoiselle fait toujours autant sa maline. Une technique de déstabilisation encore une fois sans doute. "Parce qu'en plus de ne pas avoir inventé l'eau chaude, il ne faut pas avoir de coeur pour excercer ce métier ?!" Toi aussi tu sais te montrer piquant et pleins de sarcasme. Elle est loin d'en avoir terminé avec toi. « Je l’ai fait parce que c’était ce qu’il fallait faire et parce que j’en avais la possibilité, elle avait le droit de le savoir à quel point tu es écœurant. » Chaque mot qu'elle te sort rentrent par une oreille et ne ressortent pas par l'autre. Surtout pas le dernier mot "tu es écoeurant". Personne encore ne t'as dit cela. Elle est donc la première. Un seul pas à suffit à te tenir, de nouveau, à quelques pas de la demoiselle. Ta main se saisit du poignet de la prostituée et le sers de manière assez violente. Un peu comme ce qu'il s'est passé avec Charlie. Si tu as éprouvé un quelconque remords vis à vis de la rouquine, il n'en sera pas de même pour Primrose. Tu ne la connais pas. L'empathie envers elle est donc exclue. Qu'elle aille se plaindre à ses amis ou bien aux vigiles du club, peu importe. De toute façon, même s'ils viennent te tabasser ta vie ne pourra pas être pire qu'elle est actuellement. La tristesse que tu as pu éprouver lors du décès de ta mère a totalement disparu, enfouis sous cette colère que tu ressens. Tu pousses violemment la demoiselle sur un tas d'énormes coussins derrière elle. Apparemment, il est au courant que des gens viennent copuler dans le coin pour que le propriétaire se donne la peine d'installer des coussins. Une simple banquette aurait certainement suffit. Accroupis en face d'elle, tu continues de serres son avant-bras. "La meilleure chose à faire ? Pour toi peut-être. T'as voulus te donner bonne conscience sans doute ?! Tu voulais sûrement te rattraper de te taper des mecs qui pourraient être ton père et qui sont probablement mariés. T'as déjà pensés au fait que t'as sûrement dû briser des ménages ?" Parfois, les mois peuvent être plus mordants que les gestes. "T'avais aucunement le droit de détruire mon couple. T'es vraiment qu'une belle salope !" La colère est toujours présente. Tu n'arrives pas à te calmer. Baiser ne résoudrait rien. Fumer, boire un verre de whisky ou de cognac n'y changeraient rien non plus. Même aller te défouler dans la salle de boxe où t'as l'habitude d'aller avec Alec ne réussirait pas à te calmer. Ta main serres toujours le poignet de la demoiselle. Fort, très fort. À en juger par la grimace qu'elle fait, tu lui fais vraiment. Bien fait. "Supplies moi de te lâcher. supplies moi d'arrêter !!" Un rire des plus sombres s'échappent de tes lèvres.
J’aurais dû m’enfuir en courant, appeler quelqu’un pour m’aider, n’importe qui, faire en sorte de ne pas me retrouver en tête à tête avec lui, mais non, j’ai voulu être téméraire, affronter le danger seule et me mettre face aux problèmes que j’ai moi-même créés. Je ne sais pas si on peut vraiment dire que c’est du courage, je pense que ça s’apparente plus à de la folie. La colère de John est palpable, mes tentatives pour me montrer désinvolte et légèrement provocatrice attisent son énervement déjà alimenté par les révélations qu’il vient sans doute d’avoir par le biais de Charlie. Malgré tout, je suis incapable de courber l’échine et d’attendre que la tempête passe sans même réagir, ses piques ne me font ni chaud ni froid, je ne vois pas comment je pourrais accorder du crédit aux propos chargés de haine d’un homme qui est simplement blessé dans son orgueil parce qu’un peu de solidarité féminine est venue à bout de ses projets. Ce n’est pas de ma faute s’il a préféré sortir les billets pour coucher avec moi plutôt que de choisir d’aller gentiment retrouver sa copine et il peut me blâmer tant qu’il veut pour ses propres erreurs, ça ne me rendra pas davantage coupable. Pourtant, je sais que je vais payer pour ses mauvais choix, parce qu’il est plus facile de s’en prendre aux autres qu’à soi-même et qu’il sait pertinemment que la petite et fragile Poppy ne fait pas le poids face à lui. Je n’imagine pas un seul instant avoir le dessus sur ce règlement de compte qui va sûrement être visible sur mon corps le lendemain et pour les jours à venir, mais malgré tout, je ne baisserais pas les yeux, il ne le mérite aucunement. En plus, je sais que ça ne servirait à rien, que je lui tienne tête ou non, l’issue de cette conversation – si toutefois on peut qualifier notre échange comme tel – ne sera pas bonne pour moi. Peut-être que mes propos rendront ses coups plus durs ou peut-être plus rapides à me tomber dessus, mais la finalité reste la même et je l’accepte parce que je n’ai pas le choix. « Je te trouvais bien moins réfractaire à cette idée, quand c’est toi qui es venu ramper à mes pieds pour obtenir une nuit avec moi. » Je ne tourne pas ma langue dans la bouche de mes clients, je ne leur autorise pas ce geste que j’estime ne pas faire partie de la prestation qu’ils sont en droit d’exiger. Mon visage est une zone de non-droit, il devrait s’en souvenir pourtant. Apparemment pas, il est bien trop occupé à critiquer mes capacités intellectuelles ce qui me fait évidemment sourire parce qu’en termes de connerie, évidemment, il peut très largement rivaliser et ce, sans faire le moindre petit effort. « C’est bizarre je croyais que c’était plutôt mon cul qui t’intéressait, maintenant tu veux savoir si j’ai un cœur ? » Bichon, comme c’est touchant, il va falloir à un moment ou à un autre qu’il réalise que je n’ai pas d’affection pour lui, pas d’attachement, pas de respect, et que je ne suis ni son amie, ni sa femme, ni même une vague connaissance. Je ne lui dois absolument rien. « Tu as payé pour une prestation, tu l’as eu, fin de l’histoire, je ne te devais rien et toi non plus. » C’est le principe d’un service, n’est-ce-pas ? On paye, on consomme et puisque je n’ai rien signé, j’estime n’avoir aucune autre obligation contractuelle à laquelle je dois me plier. Peut-être qu’il a raison, que je n’ai effectivement pas de cœur et que lui faire du mal ne m’a pas du tout fait culpabiliser, mais que ce soit vrai ou non, compter sur la bonté d’âme d’une pute pour sauver sa peau, ça prouve simplement une débilité profonde. Il ne contrôle plus son énervement et insatisfait par la gifle qu’il vient de me donner, sa main vient saisir fermement mon poignet – un peu trop, même – pour m’envoyer valser contre les coussins de la banquette qui se trouvent derrière moi. Je serre les dents pour ne pas laisser échapper une exclamation de surprise et ne le quitte pas des yeux alors qu’il s’accroupit devant moi, m’agrippant avec une telle force que ça en devient douloureux. « Si ça peut te faire plaisir de croire que c’est moi qui attire tous ces mecs comme tu dis, grand bien te fasse. » Je lutte de toute mes forces pour tenter de dégager mon poignet mais c’est peine perdue, alors je continue, glaciale. « Tu te faisais chier avec ta meuf, c’est ça ? T’en pouvais plus du pilou-pilou et du missionnaire de vingt minutes trois fois par semaine ? Tu t’es dit que sortir un billet c’était facile et que je saurais te faire vibrer mieux qu’elle. » Je n’ai aucune idée de la véracité de mes propos, tout ce que je veux, c’est qu’il ait les nerfs pour une bonne raison, cette fois. « Tu viens pleurnicher parce que tu t’es fait choper mais tout ça, tu l’as voulu, tu es venu me chercher, tu a succombé à la tentation et tu ne peux t’en prendre qu’à toi-même. » Il me fait vraiment mal mais je ne laisse rien paraitre de ma souffrance. Je n’irais pas jusqu’à dire que j’en ai l’habitude, mais ce n’est pas la première fois que je suis mise à mal. « Alors oui, c’est exactement ce que je suis, une salope, mais c’est pour ça que tu es venu me trouver à la base, tu te souviens ? » Il se comporte comme si j’étais sa maitresse, comme si nous avions eu une relation amoureuse et que je venais de le trahir. Est-ce qu’il parle de cette manière au vendeur Ikea en se rendant compte que le colis qui lui a vendu ne contenait pas toutes les pièces qu’il avait commandé ? Je ne suis qu’un simple fournisseur de plaisir, je n’ai pas signé pour plus que ça. Il a le dessus sur moi, c’est évident, et il en profite, m’imposant des supplications que je ne veux pas prononcer. « Va te faire foutre, John. » Je préfère crever que de lui demander grâce.
À partir de l'instant où tu as lancé à l'autre demoiselle que tu cherchais Primrose, tu ne t'attendais pas à voir la jeune femme face à toi. Tu l'aurais pensé plus intelligente que ça en prenant la fuite. Peut-être qu'elle pensait que l'homme qui était à sa recherche voulait simplement la sauter comme la plupart des hommes présents au club. Cela aurait pu être une option envisageable seulement si elle avait fermé sa grande bouche devant Charlie. Mais non, il a fallut qu'elle soit prise de remords face à ton ex petite amie. Solidarité féminine ? Tu parles, elle n'en à que faire de Charlie et de son bonheur. Primrose a simplement fait cela pour se donner bonne conscience, tout simplement. Jamais tu ne pourra lui pardonner cela. Elle vient de perdre un client, dommage pour elle. Dès le départ, tu savais que ton histoire avec la rouquine ne passerait pas une année, même pas six mois. Et t'imaginais encore moins que cela se terminerais ainsi. Par des cris, des mots violent difficiles à en entendre. Le coeur brisé, le coeur qui saigne encore. Tu détestes Primrose. Tu n'éprouve que de la haine, du dégout envers elle. Non pas pour le métier qu'elle fait, ça tu t'en fiches pas mal qu'elle gagne sa vie de manière légale ou non. Il n'y a pas de sous métier. On est pas tous fait pour gagner sa vie honnêtement. Du coin de l'oeil, tu surveilles la présence des vigiles. Apparemment ça doit être l'heure de leur pause cigarette. Personne, aucun vigile dans les parages. Parfait. Sa main fortement serrée dans la tienne, t'emmène la jeune femme un peu plus loin. Dans une pièce isolé des regards, du bruit. Personne aux alentours pour vous interrompre. Peut-être est-elle morte de trouille ou peut-être pas. Ces tentatives pour te déstabiliser ne fonctionne pas. Mais chaque mot, chaque parole qu'elle te balance au visage attisent toujours un peu plus ta colère. Plus les minutes passent et plus ta colère est grande. Tu n'as jamais été si plein de rage que présentement. La gifle que tu lui as collé à peine le seuil de la pièce franchie ne semble pas avoir eu l'effet escompté. Il va donc te falloir montrer plus convaincant pour lui faire comprendre qu'elle a été trop loin en allant parlant à Charlie. « Je te trouvais bien moins réfractaire à cette idée, quand c’est toi qui es venu ramper à mes pieds pour obtenir une nuit avec moi. » Toujours une vaine tentative de déstabilisation. Mais c'est terminé, tu ne flancheras plus jamais devant elle. Plus jamais tu ne la toucherais après ce soir. Il faut qu'elle comprenne qu'elle n'a pas le droit de se mêler de la vie privée de ses clients comme ça. "On fait tous des erreurs !" Lâches-tu toujours sur le même ton froid et sec. Primrose n'aura pas le droit à un sourire ou à des mots doux de ta part. Ça aussi, c'est terminé. « C’est bizarre je croyais que c’était plutôt mon cul qui t’intéressait, maintenant tu veux savoir si j’ai un cœur ? » Un rire sarcastique s'échappe de tes lèvres. "T'as pas tort. De toute façon, jvenais pas te voir pour tes beaux yeux. C'est ton cul qui m'intéressait. J'aurais même pu te baiser en te mettant un sac en papier sur la tête." Pas de sac plastique, c'est dangereux. Tu tiens pas à baiser un cadavre, faut pas déconner. Tu n'as jamais eu la moindre affection pour elle. C'est bien pour ça que tu venais la voir. Tu venais au club, tu payais ta prestation puis, vous alliez faire ce que vous aviez à faire plus loin et basta. En moins d'une heure c'était plié. « Tu as payé pour une prestation, tu l’as eu, fin de l’histoire, je ne te devais rien et toi non plus. » A quoi bon répondre ? T'as l'impression de parler à un mur. Têtue et bornée. En théorie, elle pourrait te plaire. En apparence, elle est mignonne et elle possède un corps vraiment bien foutu mais à l'intérieur, elle semble pourrie jusqu'à la möelle. Elle se contrefous de blesser les autres. En général, tu les évites soigneusement ce genre de personnes. Ta main sur son poignet, tu le lui laisses assez violemment. Prim a beau grimacer, tu ne la lâches pas. T'es pas venu pour rigoler. « Tu te faisais chier avec ta meuf, c’est ça ? T’en pouvais plus du pilou-pilou et du missionnaire de vingt minutes trois fois par semaine ? Tu t’es dit que sortir un billet c’était facile et que je saurais te faire vibrer mieux qu’elle. Chaque mot qu'elle prononce, tu les entend et les assimiles. Du fond de ta poche, roulés en boule, tu sors un tas de billets et lui lances en plein visage. "Tu veux des billets ? Tiens ! Et t'as même pas besoin de baiser avec moi pour ça !" T'en as strictement rien à faire de lui donner des billets gratuitement. Les temps vont être difficiles maintenant que t'as perdu ton emploi au MacTavish – Merci Léo ! - mais tant pis. Heureusement que Maddie est là pour t"aider à gérer l'appartement. Tu ne sais pas ce que tu ferais sans elle. On dirait que ça l'amuse de te voir remonter comme jamais tu l'as été. On dirait qu'elle fait tout pour que tu te mettes réellement en colère jusqu'à en venir aux mains avec elle. T'as toujours été contre la violence envers les femmes. Serais-tu près à rompre tous tes principes pour elle ? « Tu viens pleurnicher parce que tu t’es fait choper mais tout ça, tu l’as voulu, tu es venu me chercher, tu a succombé à la tentation et tu ne peux t’en prendre qu’à toi-même. » Primrose a raison à cent pour cent. Toutefois, il est toujours plus facile d'accuser les autres que soi-même. Tu relâches son poignet. Debout sur tes deux pieds, tu lui tournes le dos et viens violemment cogner ton poing dans le mur devant toi. Le mur n'a rien en revanche, ton poing est en sang. Le gentil John n'existe plus. Soudainement, tu te retournes faisant face à Primrose. Étant un boxeur amateur, tu connais tout de même quelques tactiques pour blesser ton adversaire sans le défigurer. Coup de poing dans les côtes, tu viens par la suite placer tes mains sur le cou de la jeune femme et commences à le serrer doucement. Tu n'es plus maitre de toi, ni de tes actes. « Va te faire foutre, John. » Au fond de toi, t'espérais qu'elle ne te supplie pas. C'est exactement les mots que tu souhaitais qu'elle te dise. Un sourire narquois en coin des lèvres, tu serres d'avantage tes mains autour de ton cou. "Tu vas crever !" Un regard noir, elle peut y voir toute la haine et toute la colère que t'as accumulé durant ces derniers jours. T'es pas prêt de la lâcher. Qu'elle s'excuse ou qu'elle te supplie n'y changera rien.
La situation est de pire en pire et pourtant je suis toujours aussi incapable de fermer ma gueule. Je joue avec ma vie, j’en ai parfaitement conscience et tout devrait m’inciter à me taire, mais c’est plus fort que moi, il me dégoûte, toutes ses paroles faussent attisent ma colère et mon envie de lui rentrer dedans et de lui faire comprendre à quel point c’est quelqu’un de dégueulasse. C’est stupide, pourtant, cet homme a l’air de vivre dans une réalité parallèle, je ne sais pas qui il croit que je suis, mais il se trompe. Il semble envisager que j’éprouve de l’attachement pour lui, que je puisse avoir des scrupules à détruire sa vie comme je l’ai fait, que ma conscience puisse me rattraper. C’est le cas, en réalité, ma conscience m’a rattrapée, sinon je ne serais sûrement jamais allée trouver Charlie et je ne me retrouverais pas autant dans la merde à l’heure actuelle. Toutefois, je n’ai jamais eu la moindre estime ou le moindre respect pour mes clients. Ils me font peut-être vivre et sûrement bien mieux que si j’avais opté pour un emploi davantage légal, mais je n’arrive tout de même pas à comprendre l’intérêt qu’ils ont à venir ici et encore moins à dépasser le strict cadre du plaisir des yeux pour obtenir des faveurs sexuelles forcées de femmes qui donnent leur personne par simple automatisme et non pas par réflexe. « Et t’en es fier ? » Je demande, alors qu’ils m’avoue sans le moindre scrupule qu’il n’en a jamais rien à foutre de moi, ce dont je me doutais bien puisque c’est le cas des trois-quarts des clients mariés ou ayant une vie de couple qui viennent me trouver. Je dois admettre que ça m’arrange, d’ailleurs, les rares types qui ont cru qu’obtenir mon corps était synonyme d’obtenir mon cœur et qui sont tombés éperdument amoureux étaient vraiment beaucoup trop collants. Au moins, avec des mecs comme John, je n’ai pas besoin de me battre pour qu’ils me lâchent. « Félicitations, t’as officiellement rien à envier à tous les mecs qui sont là. » Dis-je en désignant la salle à quelques mètres de nous. « T’es aussi dégueulasse que tous les autres. » Je ne comprends vraiment pas ce type, pense-t-il sincèrement m’insulter de cette manière ? Être un objet sexuel, je l’ai accepté à partir du moment où j’ai commencé à travailler ici, il ne m’apprend absolument rien et me balancer des évidences en guise d’insultes ne va pas le mener très loin. Sa colère l’empêche de réfléchir – en tout cas j’espère que c’est la raison de sa stupidité – et il se laisse emporter par un énervement difficile à contrôler.
Le tas de billet qu’il me lance au visage ne me fait pas davantage réagir, encore moins le commentaire qui suit. Qu’est-ce qu’il veut ? Que je lui dise merci ? Bien sûr que je suis heureuse d’obtenir de l’argent sans avoir à coucher avec qui que ce soit et je n’ai aucun scrupule à ne pas cracher dessus. J’attrape les billets qui ont glissé de chaque côté de mon visage sur les coussins et les serre dans ma seule main libre. « Je prends ça comme un remboursement pour la garantie de qualité non respectée. » Je lance, lueur de défi dans le regard, sachant pertinemment que le terrain des performances est certainement encore un sujet sur lequel je n’aurais pas dû m’attarder. Que ce soit vrai ou non n’a pas la moindre importance. Je n’ai jamais profité d’une nuit avec un client, je fais mon devoir, c’est tout, et la perspective des billets que je récupère en fin de soirée suffit à la rendre plus supportable, tout comme la drogue et l’alcool mis à notre disposition pour que la réalité soit plus rose que celle que nous vivons réellement. John n’a pas l’air de comprendre mon monde et je ne lui demande pas de le faire, tout ce que je veux, c’est qu’il me lâche. Je suis extrêmement surprise qu’il finisse par le faire, d’ailleurs, même si c’est pour aller mettre son poing dans le mur, instant durant lequel je masse mon poignet rouge et douloureux de la main. Je me redresse lentement pour venir me mettre debout, jaugeant du regard la distance qu’il me faudra parcourir pour franchir la porte sans avoir le temps de mettre cette idée à exécution. Je n’ai pas le temps de réagir, il est déjà revenu vers moi, attrapant mon cou de sa main ensanglantée, sans pour autant serrer trop fort. La colère est parfaitement visible sur ses traits autant que la peur doit être sur les miens. Je tente de me débattre, attrapant son poignet pour tenter de le retirer de mon cou mais ça a seulement pour effet de resserrer son étreinte autour de moi. Mes mouvements sont inefficaces, ma respiration devient plus difficile. « Lâche-moi. » Je parviens tout de même à prononcer après un laborieux effort. Tu vas crever. Ses mots résonnent dans ma tête alors que mes mouvements s’affaiblissent, comme si mon corps tout entier savait que c’était peine perdue. A cet instant, je suis persuadée que cette simple phrase est probablement la seule vraie parole qu’il ait prononcé durant cette courte entrevue. Je vais vraiment mourir.
"Tu ne vaux pas mieux que ton père !" Ces mots que la rouquine a prononcé un peu plus tôt dans la soirée résonnent encore dans ta tête. Elle te connait bien. Elle sait où taper pour te faire mal et ça, ces mots tu ne supportes pas de les entendre. Depuis des années, tu as toujours voulu ne pas ressembler à ton paternel. À croire que c'est dans tes gênes. Concrètement, t'en prendre à Primrose a certainement été la pire idée que t'es jamais eu. Tu ne te reconnais plus. La rage dont tu fais preuve ce soir envers la demoiselle te fait peur. Tu n'as jamais été si plein de colère auparavant. T'es parfaitement conscient que si Primrose a agit de la sorte c'est plus dans son intérêt que dans celui de Charlie. Elle voulait juste se donner bonne conscience. Avec le temps, t'as appris à ne pas faire confiance à l'homme. Chaque être humaine est fourbe et fais preuve d'un égoïsme démesuré. La jeune femme en face de toi en est la preuve vivante. Elle ne semble pas vouloir se taire, grosse erreur. Dans l'avenir, il serait chose aisée qu'elle apprenne à se taire dès qu'il le faut. « Et t’en es fier ? » "Je ne vois pas pourquoi j'en aurais honte T'es pas fière du boulot que tu fais ? Tu détruit des couples, ça vaut bien une médaille ?!" Te contentes-tu de répondre. Tu ne souhaites pas lui montrer une quelconque faiblesse. En réalité, tu as terriblement honte d'être venu la trouver à plusieurs reprises pour simplement baiser contre un ou deux billets verts. Tu reproduis exactement les mêmes conneries que ton père a pu faire, ça t'exaspère au plus haut point. Mais faire marche arrière n'est clairement pas envisageable. « Félicitations, t’as officiellement rien à envier à tous les mecs qui sont là. » Chaque mot, chaque parole qu'elle prononce ne te font ni chaud, ni froid. « T’es aussi dégueulasse que tous les autres. » Elle ne se doute pas que la colère monte petit à petit, jusqu'à arriver par ne plus pouvoir te retenir et lui faire réellement du mal. Jusqu'à récemment, tu n'as jamais touché une femme. Le poignet de Charlie a été la première fois que tu as osé t'en prendre à une femme, ce n'est certes rien pour certains mais pour toi, c'est déjà beaucoup. Tu ne sais pas encore comment va se clore cette discussion musclée entre Primrose et toi mais tu sais déjà que la jeune femme aura des marques demain matin. Les billets roulés en boule dans ta poche viennent s'échouer à côté de Primrose. Tant pis s'ils t'auraient bien servis pour payer tes courses ou que sais-tu encore. « Je prends ça comme un remboursement pour la garantie de qualité non respectée. » Bien sûr qu'elle les prend, elle ne va certainement pas crachée sur de l'argent facilement gagné. Qui le ferais de nos jours ? "ça m'étonne pas. T'es qu'une pauvre fille sans avenir. Tu ferais mieux de crever la bouche ouverte." Tu ne contrôle plus rien. Ni les mots qui sortent de ta bouche, ni les gestes dont tu fais preuve envers elle. Ton poing vient s'éclater contre le mur devant toi. Le poing en sang, tu ne parviens plus à réfléchir. Ton regard plongé dans le sien, elle peut certainement lire très nettement la colère dans tes yeux. Toi, t'arrive très bien à lire la peur dans les siens. Parfait.c'est exactement ce que tu souhaitait. Tes mains serrent doucement le cou de la jeune femme. Un petit « Lâche-moi. » s'échappe de sa bouche alors que tu n'en as aucunement envie. Tu te contente de lui répondre qu'elle va crever. En espérant ne pas en arriver là malgré tout, jamais tu ne pourras vivre avec la mort de la jeune femme sur la conscience. Les minutes passent. Le temps s'écoule. Soudainement, tu sens deux mains sur ton épaule qui te tire en arrière. En arrière, tu trébuches et te ramasse par terre. Ta tête viens se cogner contre le bas d'un des meubles présent dans la pièce. Sonné, étourdis, tu n'as pas le temps de comprendre ce qu'il t'arrive que l'homme t'empoigne par le col dans une extrême violence. D'abord Cian, maintenant ce gars que tu ne connais ni d'Eve, ni d'Adam. Collé contre le mur, l'homme te mitraille de coup. Incapable de rétorquer le moindre coup de poing, tu es sous son emprise. Apparemment, tu n'es pas le seul à avoir du mal à gérer tes nerfs. Il devrait songer à faire de la boxe ou autre chose mais faut qu'il apprenne à contrôler ses nerfs. Est-ce un client de Poppy qui voulait se la taper ce soir ? Ou juste un employé du club ? En tout les cas, tu le laisses volontairement te frapper. Cian a déjà un court séjour en prison à cause de toi, pourquoi pas lui ? Plus de force. Affaiblie, à cet instant il n'y a qu'une seule personne qui fait son apparition dans ta tête : Maddie. Tu ne penses qu'à elle. Une larme coule le long de ta joue. Il a son compte, c’est bon, tu vas le tuer crétin ! C'est tout ce que tu réussis à entendre. Les coups cessent brusquement. Faible, tu tentes de te relever. Doucement, tu titubes jusqu'à la sortie du club. Tu n'as même pas accordé un regard à la jeune femme pour savoir si elle allait bien et, clairement, tu t'en fiches un peu. Pas question d'aller à l'hôpital. Les infirmières, les médecins, ils vont tous te poser des questions et tu n'as pas envie de devoir raconter les événements de ce soir. Jamais tu n'oublieras, tu te contenteras de les enfouir au plus profond de toi. Devant le club, tu te tiens aux murs. Tes côtes, ton coeur te font mal. Tu craches du sang. Assis par terre, téléphone portable à la main, t'hésite à appeler de l'aide. Qui serait assez fou pour te venir en aide ? Pas question d'appeler Maddie, tu refuses qu'elle te voit dans cet état et puis après tes précédentes révélations à son égard, t'es pas certain qu'elle est envie de te voir.
Le temps s’est suspendu dans le petit salon dans lequel nous nous trouvons. Je manque d’air, je suffoque, j’aimerais parler, crier, appeler au secours, mais ma gorge est incapable de faire remonter le moindre son jusqu’à ma bouche. Je vais mourir. De la pire façon possible. Il y a tellement de choses que j’aurais aimé faire, tellement d’erreurs que j’aurais voulu réparer. Je n’ai pas toujours été parfaite, loin de là, mais il y a encore toutes ces personnes que j’aime auprès desquelles je n’ai jamais pu m’excuser, ce choix horrible auquel je dois faire face et qui finalement ne se fera pas parce que je ne serais plus là. La mort n’a jamais été une option pour moi, je n’avais peut-être pas la vie que tout le monde rêverait d’avoir, mais c’était la mienne et je voulais la vivre un peu plus longtemps. J’aimerais me battre pour obtenir ce droit, mais ce n’est pas possible, parce que je ne peux plus bouger, plus parler, plus reprendre mon souffle. Il ne lâchera pas. Il va me tuer. Il ira sûrement en prison, le club sera même peut-être obligé de fermer si une enquête a lieu et révèle l’activité de prostitution cachée derrière les jolies danseuses censées être si chastes malgré leur profession. Ou alors, mon patron ne voudra pas être inquiété et chargera quelqu’un de déposer mon corps dans une poubelle loin d’ici, ou peut-être même dans celle d’un concurrent pour qu’il soit inquiété à sa place. Peut-être que mes collègues parleront de moi pendant quelques temps, et peut-être que mon exemple leur servira de leçon et qu’elles réfléchiront davantage à ce qu’elles font avant d’agir. Je resterais le fantôme planant au-dessus du club pendant quelques temps et puis tout le monde finira par oublier, parce qu’après tout, je ne suis qu’une fille parmi tant d’autres, pas spéciale, pas exceptionnelle, pas différente. Et ma famille ? Je ne sais pas s’ils pleureraient vraiment, je pense qu’ils seraient simplement désolés de m’avoir prévenue en vie, ils savaient que ça arriverait tôt ou tard, c’est sans doute pour cela qu’ils ont tenté de me protéger. Je ne pourrais même pas leur dire à quel point je regrette de leur avoir infligé tout ça, leur expliquer que je n’avais pas le choix, que j’en avais besoin pour continuer à mener cette vie qui me plaisait tant. J’aurais voulu mourir en étant réconciliée avec ceux que j’aime, mais il faut croire que même pour ça, je vais réussir à échouer.
La pression se relâche d’un seul coup, sans que je m’y attende, et, déstabilisée, je vacille et tombe, ma tête heurtant de plein fouet la petite table placée au milieu de la pièce. Ma tête bourdonne, je peine à reprendre le souffle qui me manquait, luttant contre la panique qui m’envahit, les idées embrouillées tout comme la vue. Je porte une main tremblante à ma tête, touchant le liquide chaud et poisseux qui s’échappe de la plaie que je viens de me faire. Je me force à reprendre une respiration calme, à revenir à la réalité. Je suis sauvée. Les mains m’ont lâchée. Je peux respirer à nouveau. Les secondes défilent, je commence à revenir doucement à la réalité, assez pour entrevoir le videur, ayant plaqué John contre le mur du fond. Je devrais sans doute l’aider, faire quelque chose, tout du moins, mais j’en suis incapable. Je me redresse péniblement sur mes jambes en me servant de la table comme appui pour m’aider à me lever, mettant ma main dans la trace de sang laissée par ma chute au passage, et c’est d’abord en titubant – plus sous le coup de l’émotion que de la douleur que je ne ressens pas – que je me dirige vers la porte. J’ignore les regards qui se tournent sur mon passage alors que je traverse la salle pour rejoindre les vestiaires. Tout me semble lointain, comme si j’étais en train de regarder une personne ayant pris possession de mon corps agir à ma place. Pourtant, c’est bien moi qui guide chacun de mes mouvements, moi qui ouvre la porte de mon casier, moi qui attrape un pantalon et un sweat que j’enfile à la hâte, moi qui récupère mon téléphone portable et moi encore qui laisse volontairement tout le reste de mes affaires pour faire la seule chose dont j’ai réellement envie : fuir. Sans trop savoir quel chemin j’ai pris, je me retrouve sur le trottoir, devant le club dont je m’éloigne légèrement pour éviter les regards curieux qui se posent sur moi. Les rumeurs vont vite, je le sais, et bientôt, tout le monde saura qu’un mec a essayé de me tabasser et si jamais ils en apprennent la raison, je ne donne pas cher de ma survie ici, je vais me faire virer, c’est sûr. Je m’adosse à une voiture, attrapant pour téléphone pour chercher le numéro de Raelyn. Mes mains tremblent et rendent l’opération un peu plus difficile. La sonnerie retentit. Une fois. Deux fois. Trois fois. Enfin, elle décroche.