New beginning.

Auden & Itziar

AVENGEDINCHAINS

Itziar n'avait pas réellement dans l'idée de quitter la colocation. Ca faisait maintenant un peu plus de deux ans qu'elle vivait là et elle s'y sentait bien. C'était chez elle. Elle avait aussi eu l'occasion de faire de nombreuses rencontres. Les gens venaient, restaient plus ou moins longtemps puis ils continuaient leur chemin. Il n'y avait donc pas vraiment de quoi s'ennuyer. Toowong était proche de l'université et quand elle avait cours, c'était bien pratique pour elle qui n'est pas forcément du genre à être très ponctuelle. Le moins de distance il y avait entre son point A et son point B, le mieux s'était. Surtout le matin. Le seul bémol qu'elle aurait pu trouver à cette localisation 'était que c'était un peu loin de Fortitude Valley, un peu loin du bar et donc un peu loin de l'endroit où elle passait la plupart de ses soirées à bosser. Ca ne posait pas trop de problèmes quand il s'agissait de se pointer au début de son service, il était encore relativement tôt, elle était toute pimpante, pas fatiguée. Ce n'était donc pas très embêtant de faire un peu plus de trente minutes à vélo pour arriver là-bas. Cependant, quand il s'agissait de rentrer chez elle à quatre heures du matin une fois qu'elle avait fait la fermeture et compté la caisse, c'était une autre histoire. A cette heure-là elle n'avait qu'une seule envie : retrouver son lit pour dormir. Sauf qu'avant de faire ça, elle devait une nouvelle fois pédaler pendant plus de trente minutes avant d'arriver à la maison et ça, c'était sans doute le plus fatigant. Cependant, elle s'y était fait malgré tout. En deux ans elle en avait fait des allers retours à vélo entre Toowong et Fortitude Valley, c'était devenu sa routine, une habitude qu'elle avait prise et dont elle s'accommodait totalement même si ce n'était pas forcément le plus agréable. Elle s'entendait à merveille avec ses colocataires, il n'y avait pas eu une seule personne dans cette colocation avec qui ça n'avait pas collé et donc déménagé ne lui avait jamais traversé l'esprit jusqu'à aujourd'hui.

Elle était tombée sur cette annonce par hasard en faisant défiler son fil d'actualité sur Facebook. Un type sur un groupe d'expatriés en Australie avait partagé le lien, pensant que ça pourrait forcément intéressé quelqu'un. Elle avait regardé par pure curiosité, parce que même si elle n'avait pas en tête de quitter sa colocation, elle aimait bien regarder ce qu'il y avait sur le marché, se disant qu'elle n'était pas fermée à de bonnes opportunités. Elle avait du relire l'annonce à deux fois quand elle avait vu le prix. Le prix était presque trois fois inférieur à ce qu'elle payait pour son loyer à Toowong. Le loft avait l'air magnifique sur les photos, en plein centre de Brisbane. Soit il y avait anguille sous roche, soit le mec qui habitait là en avait juste marre d'être seul et voulait simplement un peu de compagnie pour une poignée de dollars. Etonnement, elle n'a pas hésité bien longtemps avant d'envoyer un message afin de pouvoir visiter l'appartement et puis aussi voir si le typé n'était pas un tueur en série qui essayait juste d'attraper sa prochaine victime. Peut-être qu'elle se jetait directement dans la gueule du loup, elle n'en savait rien. Tout ce qu'elle savait c'était que le loyer était à des kilomètres des prix habituels de Brisbane, que c'était bien plus proche du bar que Toowong et que si c'était une vraie annonce, elle ne voulait pas passer à côté. C'était sans doute impulsif et pas du tout réfléchi, mais il y avait des moments dans la vie où il fallait foncer. Si ce n'était pas elle qui répondait à cette annonce, pas de doute que quelqu'un d'autre allait le faire avant la fin de la journée.

C'était comme ça qu'elle s'était retrouvée devant la porte du loft en début d'après-midi. Elle avait vu sur l'annonce que le type cherchait quelqu'un ayant la trentaine pour vivre ici, mais elle avait consciemment décidé d'ignorer ce détail. Elle se disait que ça ne changerait pas grand-chose et qu'avec un peu -beaucoup- de chance, il n'y verrait que du feu. Dans le pire des cas elle avait tout un tas d'arguments pour lui faire comprendre que même si elle avait bien moins que trente ans, elle pouvait vivre ici. Après un instant de réflexion, elle se décide à sonner à la porte attendant qu'on vienne lui ouvrir. "Hey ! Je viens pour l'annonce, je t'ai envoyé un message ce matin." Lance t-elle à l'homme qui lui ouvre la porte, un large sourire dessiné sur les lèvres.

Elle attend à la porte qu'on vienne lui ouvrir. Elle a l'impressionne d'entendre quelqu'un gueuler quelque chose, mais dans le doute, elle attend. Elle n'est pas chez elle. Pas encore du moins, mais elle espère que ça va coller. C'est un peu l'opportunité qu'elle aurait aimé trouver quand elle est arrivée à Brisbane. Du moins, sur le papier. Pour le reste, tout va se passer dans les prochaines minutes. Un mec vient finalement lui ouvrir la porte. Il a l'air nonchalant au possible, mais ce n'est pas ça qui lui fera faire machine arrière. L'annonce disait qu'il fallait avoir le coeur bien accrochait en plus de mentionner un âge minimum. Elle avait délibérément décidé d'ignorer l'âge et n'avait pas vraiment réfléchi à ce détail de coeur bien accroché. Se disant qu'il ne pouvait pas être si difficile à vivre que ça. Après tout, vu l'enfer qu'elle avait pu faire vivre à ses colocataires à son arrivée à Brisbane avec ses habitudes de princesse, elle en tenait une couche dans le domaine. Ca ne lui faisait pas particulièrement peur. Restait il encore à voir ce qu'il voulait vraiment dire par là. Elle le salue donc, précisant qu'elle est là pour l'annonce et vu sa tête, elle n'est pas la première à venir pour ça. Soit il est difficile, soit il y a quelque chose de pas net chez lui. Il n'y a pas des milliers de possibilités avec un prix comme celui qu'il demande pour le loyer. Quand il l'invite à entrer, elle ne se fait pas prier et le suit jusque dans le salon. Il s'assoit sur le canapé et elle ne sait pas forcément si elle doit en faire de même ou s'il va se relever pour lui faire faire la visite. Elle se contente donc de rester debout et de parcourir la pièce des yeux. Quand il lui fait une remarque sur l'âge et sur le fait qu'elle soit bien conservée, elle ne peut s'empêcher de rire. "Je te passerai les coordonnées de mon chirurgien si tu veux." Se contente t-elle de lui répondre. Elle qui pensait que son âge allait passer inaperçu. C'était loupé. Elle aurait aussi pu lui dire qu'elle n'avait pas trente ans, mais c'était bien plus drôle de jouer le jeu. Même si la chirurgie ce n'était pas pour elle. Aussi ironique que cela puisse paraitre, elle n'avait jamais trouvé ça très esthétique. Ca faisait toujours surfait et abusif. Elle n'avait pas envie d'avoir l'air vieille, mais elle n'avait pas envie d'avoir l'air moche non plus.

Visiblement, il ne compte pas lui faire la visite puisqu'il se contente de lui indiquer différentes pièces avec sa main. Cuisine, chambres, salles de bain et deux pièces interdites d'accès. Elle lève un sourcil interrogateur dans sa direction, prenant son air le plus sérieux possible. "C'est là que tu caches les cadavres de tes anciens colocs' ?" lui demande t-elle comme si c'était une réelle question. Comme s'il y avait vraiment une possibilité qu'il ait enfermé des cadavres là-dedans. Après tout, des tarés il y en a partout, même en Australie. Elle ne connait pas ce type, peut-être que derrière sa belle gueule se cache un psychopathe. Le Ted Bundy australien. Elle espère tout de même que ce n'est pas le cas, car elle est en train de se jeter dans la gueule du loup sans aucune hésitation. Comme il reste sur son canapé elle prend le droit d'aller faire le tour du propriétaire, jetant un coup d'oeil aux pièces qui ne sont pas interdites d'accès. Elle ne va pas enfreindre les règles alors qu'elle n'habite même pas ici. C'est quand même plus petit que sa maison à Toowong, mais ça à l'air sympa, puis de toute façon, le loyer est un argument suffisant surpassant tous le reste. "Il se passe quoi si je vais dans les pièces où on ne va surtout pas ?" Lui demande t-elle quand elle revient dans le salon. Il ne lui propose pas de s'asseoir, mais elle fait comme chez elle, tout bonnement parce qu'elle se dit qu'elle aurait l'air con debout à faire le piquet. Elle le regarde manger ses céréales et elle se dit que finalement l'âge minimum c'était parce qu'il avait besoin d'une mère plus que d'une colocataire. Finalement, ce n'était peut-être pas un tueur en série, mais seulement un gamin qui en avait marre d'être tout seul. Il lui explique (très) brièvement ce qu'il en est. Pas les restaurants du coeur, le lit qui grince. Ok rien qu'elle n'ait pas vu ailleurs. "Ca me va, j'espère que t'as rien contre le lit et tape le mur l'autre nuit sur deux." Lui répond-elle reprenant ses mots. S'il croyait avoir affaires à une fillette bien rangée, il se mettait le doigt dans l'oeil. "Il y a rien d'autre à savoir ?" demande t-elle. Elle s'attendait à une liste de règles longue comme le bras avec tout un tas d'interdit qui aurait fait qu'il n'aurait pas encore trouvé preneur, mais jusqu'à présent il n'a pas été très loquace à ce sujet. "Et le loyer, si peu élevé, ça cache quoi ?" Sous-entendu, est-ce qu'il attendait qu'elle paye en nature pour compenser ou quelque chose dans le genre. "J'vais pas finir découpée dans ton congélateur j'espère ?" comme si un tueur en série répondrait oui à cette question. Ca paraissait idiot, mais elle n'arrivait pas à comprendre. Elle avait l'impression que c'était une blague, que l'annonce alléchante était seulement là pour se foutre de la gueule des gens et que finalement il n'y avait pas de chambre à louer.

Il n'a pas l'air de vouloir se faire passer pour le colocataire idéal. Quand elle demande si c'est les cadavres des anciens colocataires qui sont enfermés dans les pièces interdites d'accès, il ne cherche pas à la rassurer, il préfère au contraire en rajouter une couche visiblement en expliquant qu'il n'y a pas seulement les anciens colocataires, mais des cadavres en tout genre. "Ah c'est ça l'odeur !" lui dit-elle nonchalamment. Elle n'avait rien senti du tout, mais si elle avait senti quelque chose, à première vue elle aurait plutôt pensé que c'était parce qu'il n'avait pas pris de douche depuis quelques jours ou qu'il avait oublié de mettre ses chaussettes sales au lave linge. Aucune personne saine d'esprit ne penserait en premier lieu qu'une mauvaise odeur provient d'un quelconque cadavre. A moins de travailler dans la police peut-être. Quand il lui dit que si elle va dans l'une des pièces interdites, elle va finir découpée sur le tas des anciens colocataires elle hoche la tête de haut en bas. Elle se doute bien qu'il ne va pas la découper si elle brave l'interdit, quoi que. Elle ne le connait pas encore et il cache peut-être bien son jeu qui sait. Ce n'est peut-être pas que du sarcasme qu'elle entend dans ses paroles. Cependant, elle n'a pas l'air de sentir une quelconque menace à aller voir ce qu'il y a derrière ces portes. Pas maintenant bien sûr. Ce serait probablement le meilleur moyen pour qu'il la congédie immédiatement et elle verrait cette opportunité sous le nez en quelques secondes. En revanche, lui dire qu'il y a des pièces à ne pas aller voir, pour la curieuse qu'elle est c'est un peu comme lui donner un aperçu de ce qu'elle pourrait avoir, la laisser savourer et puis lui retirer aussi vite. Elle est un peu comme les gamins sur ce point. Quand on lui dit 'ne fait pas ça', la seule chose qu'elle a envie de faire, c'est justement 'ça' et s'il l'accepte chez elle, elle le travaillera au corps afin de voir quels secrets il cache si soigneusement.

Quand il parle un peu plus des détails de la colocation en elle-même, elle a un peu de mal à discerner le vrai du faux. Tout bonnement parce qu'elle a en face d'elle un mec qui a l'air d'avoir la trentaine bien entamée en train de manger des céréales devant un dessin animé pour les enfants en bas âge. Il semble donc être le genre de type un peu étrange, difficile de dire ce dont il serait capable, mais finalement tant qu'il ne lui fait pas de mal, elle s'en fout un peu. "A ce train-là tu devrais plutôt casser la cloison, ça sera pas moins voyeur, mais ça sera moins pervers de ta part." Lui répond-elle. Elle doute fort qu'il ait installé un miroir sans teint. Elle a rapidement fait le tout du propriétaire et elle n'a pas eu l'impression de voir de miroir dans l'une des chambres. Si tel était le cas en revanche, peut-être qu'elle devrait prendre ses jambes à son cou et partir sans se retourner. Quand il lui expose ses autres règles, elle ne peut s'empêcher de lever les yeux au ciel. Ce mec est un personnage à lui tout seul, mais aussi étonnant soit il, elle n'a pas du tout envie de s'en aller. "Plus ça va plus je pense que t'es puceau en fait." Lui balance t-elle ayant de plus en plus de mal à imaginer comment un mec comme lui peut enchainer les conquêtes une nuit sur deux. Non pas qu'il ne soit pas beau gosse, il est juste awkward et ne semble pas avoir dépassé l'âge de l'adolescence sur le plan mental. A part le physique et l'argent, il a tout d'un loser et c'est assez étonnant à observer. "Pour le reste t'as pas à t'en faire j'suis pas souvent là." Entre l'université, le bar et le fait qu'elle ne tient pas en place, elle est plus souvent à l'extérieur que chez elle en général, une raison de plus de changer de logement. Après tout, pourquoi payer cher pour vivre quelque part si elle passe le plus clair de son temps à droite ou à gauche ?

Elle mentionne le loyer parce que c'est une des plus grosses questions qu'elle a à propos de cette annonce depuis le début. Elle ne veut pas passer pour la fille seulement intéressée par ce détail, mais c'est vraiment la chose qui l'a poussé à contacter ce type et à venir ici aujourd'hui. Elle est surprise par la réponse, même si elle a l'impression qu'elle ne devrait pas. Pour le coup, quelque chose lui dit qu'il est sérieux et qu'il n'y a absolument rien de sarcastique dans sa réponse. "Ca ressemble plus à une colonie de vacances pour moi." Lui répond-elle. Non pas qu'elle ait déjà été en colonie de vacances, mais c'est probablement un peu comme ça que ça s'y passe. Il lui en fallait bien plus pour lui faire peur, si c'était le but de la manœuvre. Il ne savait pas à quel point elle pouvait être têtue. Elle ne lâchait pas l'affaire facilement. "Je pense que je peux gérer donc t'en fais pas pour moi, bébé." Il l'avait appelée chérie, pas de raison qu'elle ne l'appelle pas bébé, surtout avec son lait collé aux lèvres et sa tête d'imbécile heureux. "T'es un pote d'Hannibal Lecter ?" lui demande t-elle, pas certaine que ce soit réellement ce à quoi il faisait référence, mais c'était le seul cannibale qui lui venait à l'esprit sur le moment. Au final, elle ne sait pas trop ce qu'il attend d'elle. Il n'a pas vraiment intéressé par qui elle est réellement, il cherche plutôt quelqu'un capable de respecter les quelques règles énoncées et le capable aussi de le supporter. Rien de très compliqué visiblement. "Et donc à part quelqu'un qui te supporte t'as pas d'autres conditions ? Qui te dit que je te ferai pas vivre un enfer ? Peut-être que je ferai pas le ménage et que j'écouterai la musique à fond à trois heures du matin." Lui demande t-elle en haussant les épaules. Il avait l'air de penser qu'il était le mec le plus difficile à vivre, mais il ne savait absolument rien d'elle. "Enfin bon du coup si tu t'en fous de tout ça, je peux emménager quand ?" Autant y aller cash. Elle veut la chambre, elle n'attend pas qu'on la lui propose.

Alexa Hampton, c'est vite dit. Si elle était Alexa Hampton, non seulement elle aurait des super idées pour pimper son loft, mais en plus de ça, elle se ferait payer pour et ne serait pas chez lui aujourd'hui parce qu'il a posté une annonce demandant un loyer plus que dérisoire pour avoir l'occasion d'occuper l'une des chambres vides. Elle n'avait pas grand-chose d'Alexa Hampton, même si elle aurait bien aimé avoir un peu de son argent ou à la limite un peu de son talent pour se lancer dans son propre business. Elle n'avait rien de tout ça et elle était donc là en train de tenter de se faire bien voir auprès d'un mec qui était probablement plus proche de la quarantaine que de la trentaine et qui pourtant était avachi dans son canapé à manger des céréales devant un dessin animé pour bébé. On était donc bien loin de la vie d'Alexa Hampton, cependant, elle comptait bien tirer profit de cette situation. Elle était là pour obtenir la chambre, le reste, elle verrait plus tard. "Pour un mois de loyer gratuit, pourquoi pas ... quoi que ce serait probablement considéré comme de la prostitution et je fais pas là dedans moi. Du coup bah pour la bonne action, puis aussi parce que ça sera une raison pour me foutre de ta gueule quand tu tiendras pas cinq minutes." Lui répond-elle sur un ton des plus sérieux. S'il fallait lui rendre service de la sorte, elle serait prête à donner de sa personne au sens littéral du terme. Après tout, il n'était pas moche. Ca ne voulait pas dire qu'il serait bon, mais au moins il avait déjà quelque chose pour lui. Elle espérait cependant qu'il ne soit pas réellement puceau. A son âge, ce serait plutôt triste pour lui. Enfin, est-ce qu'elle devait réellement le plaindre ? Il avait plutôt l'air de vouloir lui en faire voir de toutes les couleurs, pas forcément à elle en particulier, mais plutôt à la personne qui allait louer la chambre. Comme elle comptait louer cette chambre, c'était elle qu'il allait faire tourner en bourrique. Voilà comment elle voyait les choses.

Visiblement elle avait vu juste pour la référence à Hannibal Lecter puisqu'il semble renchérir dessus. Avoir un peu de culture ça aide, comme quoi il fallait ouvrir son esprit au monde qui l'entoure. Pour l'orphelinat soviétique, elle n'a pas trop la suite de la référence, elle se dit que ça fait sûrement partie du background d'Hannibal Lecter, faudrait qu'elle aille voir ça de plus près, à part lui faire faire des cauchemars, ça ne lui ferait pas de mal d'en apprendre un peu plus sur ce personnage culte. "Il vous est jamais venu à l'esprit de vous entre tuer pour vous bouffer mutuellement ? J'suis déçue. Si j'avais été cannibale ça aurait été mon but ultime de bouffer un compatriote cannibale." La boucle serait bouclée comme ça ? Elle se ferait presque vomir à raconter des choses comme ça. En particulier quand elle peut presque avoir un visu dans sa tête. Se dégouter soi-même, c'est un talent dont peu de personnes peuvent se vanter. La jeune espagnole, elle, peut le mettre directement à côté de son aptitude à se faire peur toute seule en regardant des films d'horreur. Sans doute une forme de masochisme un peu particulière, ce qui expliquerait qu'elle n'ait toujours pas pris ses jambes à son cou et qu'elle soit toujours aussi déterminée à partager le loft de ce type qui risque à coup sûr de lui en faire voir des vertes et des pas mûres. Il la jettera par la fenêtre si elle le soule. C'est tout ? Tant qu'il ne la vire pas de l'appartement honnêtement elle s'en fou un peu. Elle ne sait pas trop s'il est sérieux pour le coup, elle se dit qu'il y a sans doute une part de vrai. Qu'il peut être relativement cool, mais qu'il y a des limites à ne pas dépasser. Elle n'est peut-être pas la fille la plus facile à vivre de Brisbane, mais ce n'est pas (plus) une gamine pourrie gâtée elle sait donc se tenir convenablement et respecter les autres. Ce n'est pas énorme, mais c'est déjà ça. "Pour me jeter faudra déjà que tu m'attrapes ! J'ai été championne de sprint en Espagne pendant plus de dix ans." Lui répond-elle. Un mensonge fabriqué de toutes pièces. Elle n'a jamais fait de sprint de sa vie, du moins pas en compétition et elle était plutôt branchée endurance, mais ça, il n'avait pas besoin de le savoir, ni même de le prendre au sérieux. "Ok donc j'accepte de te dépuceler et toi tu m'aides même pas à monter mes affaires ? Super. Ca va que j'ai des potes musclés qui peuvent m'aider. Si j'emménage à quatre heures du mat' ça te pose problème ? Parce que je bosse avant." Bon elle pouvait trouver un autre moment, mais il avait dit qu'elle pouvait emménager quand elle voulait.

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Elle le provoque. Ce n'est peut-être pas la meilleure technique à adopter quand on veut se faire bien voir par quelqu'un. Parce que techniquement quand on cherche à habiter chez quelqu'un, on se montre sous son meilleur jour, on met en avant ses qualités. C'est un peu comme un entretien d'embauche, sauf qu'à la clé, il n'y a pas un travail, mais un toit au-dessus de notre tête. Pour le coup, on était donc un peu loin du compte. Quand elle avait rencontré ses colocataires, il y a deux ans, elle avait adopté l'approche adéquate et heureusement d'ailleurs. Si elle leur avait sorti le numéro de la fille pleine aux as qui ne compte pas lever le petit doigt pour s'occuper des tâches ménagères, il y a de grandes chances qu'ils ne l'auraient probablement pas choisie pour vivre avec eux. Elle ne saurait pas trop dire pourquoi elle s'en fiche un peu avec ce type. Sûrement parce qu'il a l'air extrêmement nonchalant et qu'il a pas l'air d'être le genre de mec à faire dans la dentelle. Il est sarcastique au possible depuis qu'il est là et Itziar n'est pas du genre à laisser passer sa chance quand on lui tend une perche. S'il s'attendait à quelqu'un qui s'écrase et qui ne dit rien, il n'était malheureusement pas tombé sur la bonne personne. Cependant, quelque chose lui faisait dire qu'il appréciait sûrement plus une attitude comme la sienne que celle d'une petite fille sage. Ca l'arrangeait. C'était bien plus pratique d'être soi-même et puis surtout, comme ça, il savait à quoi s'attendre. Il n'y aurait pas de surprise quand elle emménagerait. Car oui, elle comptait toujours emménager et le plus tôt serait le mieux, il n'y a pas de petites économies comme on dit. Si elle pouvait économiser quelques dollars sur son loyer, elle le faisait sans hésiter. Ce serait toujours ça de plus à dépenser la prochaine fois qu'elle déciderait de sortir se bourrer la gueule avec ses amis. Quand il se lève enfin de son canapé, elle s'attend à tout sauf à ce qu'il décide de faire. Elle a voulu faire sa maligne en proposant de le dépuceler, visiblement il décide de la prendre à son propre jeu. Elle ne bouge pas quand il s'approche de lui, ni même quand une de ses mains vient se poser contre son cou. Elle ne bouge pas non plus quand il lui fait pencher la tête en arrière, ni même lorsque sa langue vient lui laisser le visage, du menton aux lèvres. En réalité, elle trouve ça un peu dégueulasse, se faire lécher ce n'est pas son kiffe. Surtout par un mec qui était en train de manger des céréales avec du lait il n'y a même pas deux minutes. Ca ne la gêne pas d'aller fourrer sa langue dans la bouche du premier inconnu qu'elle peut croiser en soirée. En soi c'est la même chose, mais le mood est quand même différent. Cependant, juste avant qu'il la relâche, elle lui met la main au paquet, fermement, sans aucune gêne. S'il peut, envahir son espace personnel, elle peut en faire de même. Elle le regarde droit dans les yeux quand elle fait ça et elle ne le relâche pas avant qu'il ne la lâche pour retourner s'affaler dans son canapé. Son verdict à lui ? Trop de seins et trop de cheveux. "T'as un trop petit paquet, visiblement on est tous les deux déçus par la marchandise." Lui répond-elle du tac au tac.

Il se moque de son accent et clairement, elle s'en fiche. Elle sait qu'elle a un accent, elle sait qu'elle ne s'en débarrassera probablement jamais, mais elle s'en moque totalement. Son accent, elle pourrait limite s'en servir comme une arme, c'est un moyen de faire passer un peu tout, les gens sont moins enclins à vous chercher des emmerdes si vous avez un accent, même si vous êtes en tort. La carte de l'étranger est quelque chose qui marche très bien aussi pour se sortir de situations un peu complexes et puis surtout, surtout, elle mentirait si elle disait que son accent ne l'avait jamais aidé à choper. "Soit pas jaloux de la paella. Tu pourras pas me citer un seul plat meilleur que la paella. Après pour ce que ça me réussit ou pas ... J'suis à plus de 12000 kilomètres de là-bas, ça veut tout dire." Ca lui avait réussi ... pendant une vingtaine d'année, ça s'était mal terminé, elle était passée à autre chose. Fin de l'histoire, même si c'est un peu plus compliqué que ça au fond. Il n'a pas besoin de le savoir. Ce n'est pas une nana torturée, elle n'a pas de cadavre dans son placard, c'est l'essentiel. Pour ce qui est de ses potes musclés en revanche, il faudra peut-être repasser, elle n'a pas un seul ami avec la carrure d'un bodybuilder, elle a un peu embelli le truc, mais ce n'est pas bien grave. "J'suis désolée, mais t'es pas leur style. Rien ne t'empêcheras d'observer à travers le miroir sans tain en revanche." Oué elle n'avait pas oublié cette histoire de miroir sans tain qu'elle ne croyait pas une seule seconde.

Un large sourire se dessine sur ses lèvres quand il lui souhaite la bienvenue. Elle ignore le fait qu'il lui souhaite de réussir à tenir deux jours ici, se disant qu'il ne faut pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tuer et que pour l'instant il n'a rien fait qui pourrait la dissuader. Bon ok, la lécher c'était sans doute borderline, mais elle n'avait qu'a pas le traiter de puceau. "Génial. J'promets pas de pas te réveiller en ramenant en mes affaires par contre." En vrai elle ferait probablement attention, ne voulant pas tester sa patience dès le premier jour. Elle n'avait pas idée de la piste sur laquelle elle se lançait les yeux fermés.

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Si ses parents la voyaient, ils lui diraient sans doute que ce n'est pas comme ça qu'on doit se comporter et que ce n'est pas comme ça non plus qu'elle a été éduquée. Effectivement. Tâter le paquet d'un mec qu'on ne connait ni d'Eve ni d'Adam ça ne fait pas forcément partie du bouquin qui regroupe toutes les règles de bonne conduite. Ce n'était pas très classe, ni très glamour non plus. Ca pour le coup, il fallait bien le reconnaitre. Elle sent qu'il se crispe, cependant, il ne dit rien, avant que son sourire narquois ne réapparaisse sur son visage. La colocation promet. Elle avait eu une relation bien particulière avec Mason quand il faisait partie de la colocation, les mauvaises blagues allaient bon train entre eux deux, mais ils trouvaient toujours un terrain d'entente pour s'allier et en faire voir de toutes les couleurs aux autres. Là, ce serait sans aucun doute du coup pour coup, mais il en fallait bien plus pour l'effrayer. Bien plus pour lui faire perdre son sang froid. Même critiquer la paella ne la touche pas plus que ça. Elle défend son pays corps et âme si besoin, mais c'est seulement par principe. Pas parce qu'elle est fondamentalement convaincue que telle ou telle chose est mieux en Espagne qu'ailleurs. Un peu comme quand elle tente de vendre le football à Isaac. Elle s'en fiche comme de sa première chemise du football. Elle ne regarde qu'une fois tous les quatre ans quand c'est la coupe du monde et encore, c'est surtout une excuse pour retrouver ses amis dans un bar et se bourrer la gueule à coups de tinto de verano. Ni plus, ni moins. Il n'y avait pas d'intérêt particulier pour ce sport, mais si elle devait jurer sur son honneur que le football à l'européenne était mieux que le football australien, elle le ferait. Cependant, elle sentait qu'avec lui, se défendre ne servait à rien. Comme on dit, la bave du crapaud n'atteint pas la blanche colombe. Si seulement elle avait quitté l'Espagne à cause d'un plat, ce serait probablement une histoire qu'elle raconterait à tout le monde, ça la ferait même marrer. Surtout que ce serait le genre de truc que 90% des gens ne croiraient pas. Elle passerait pour la fille qui raconte une histoire invraisemblable, alors que ce serait vrai. La réalité était un peu plus compliquée. Cependant, il n'avait pas à le savoir, ce n'était ni le lieu, ni le moment. Peut-être même qu'elle ne lui parlerait jamais de sa vie d'avant. Que savoir qu'elle venait d'ailleurs c'était amplement suffisant. Elle allait habiter avec lui, pas l'épouser. "Tu t'es cassé toi aussi pour venir ici donc t'es guère mieux j'crois." Elle avait bien repéré son accent. Elle ne saurait pas le replacer, mais elle était certaine qu'il n'était pas un australien pure souche.

Elle n'imaginait pas qu'en répondant à l'annonce elle allait repartir de là avec un nouvel endroit pour vivre. Ca semblait trop simple et pourtant, il lui avait souhaité la bienvenue. Il y avait anguille sous roche, mais elle s'en fichait bien, elle aurait le temps de voir ça plus tard. Pour l'heure, elle avait des cartons à préparer. Elle ne sait pas trop s'il compte la faire revenir en arrière et changer d'avis en la mettant en garde, mais il va vite se rendre compte qu'il lui en faudra bien plus que ça. Qu'elle n'est pas du genre à se gêner et qu'elle ne se gênera donc pas pour riposter si besoin. "Même pas peur !" lui lance t-elle en se levant du canapé pour se diriger vers la porte. Il ne veut pas son nom, elle ne lui demandera pas le sien, elle a déjà un surnom tout trouvé de toute façon. "Allé, salut mon petit puceau, je te dis pas quand je débarque, tu t'en rendras compte." ajoute t-elle avant d'ouvrir la porte et de sortir.

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