Il avait prévu d'emmener sa soeur dîner après son service. Il n'y avait pas de raison particulière pour cela, il s'était dit que ça lui ferait probablement plaisir et puis à lui aussi. C'était donc gagnant-gagnant. Il n'avait pas décidé d'un lieu en particulier, il laisserait Yasmine choisir ce qui lui fait le plus envie. Si elle avait été débordée au travail, il y avait des chances qu'elle préfère un restaurant tranquille, voire même un restaurant où ne s'attarde pas trop entre chaque plat. Ou alors, elle avait peut-être envie de se mélanger à la foule et de se rendre dans un lieu un peu plus familial, où il y a beaucoup de monde avec comme fond sonore un brouhaha constant. Peut importait pour Sohan. Tant qu'il passait un bon moment avec sa soeur, le lieu et ce qu'ils allaient bien pouvoir y manger n'avait que peu d'importance. Il avait donc convenu avec elle qu'il viendrait l'attendre à la sortie de l'hôpital après son service. Il était arrivé un peu en avance et s'était trouvé une place sur l'immense parking du St Vincent qui malgré l'heure déjà bien avancée ne semblait pas désemplir. Plutôt que d'attendre dans sa voiture et d'avoir à donner des directives à sa soeur quant à son emplacement sur le parking, il avait décidé qu'il était bien plus simple de la retrouver devant l'hôpital et avait donc pris place sur l'un des bancs se trouvant devant l'entrée du bâtiment principal. Il faisait bon à cette période, il y avait un léger vent qui permettait de bien respirer, on pouvait facilement sentir que l'hiver approchait à petits pas. Les jours se faisant un peu moins chauds qu'il y a un mois. Cependant, le climat restait tout de même très clément et il n'y avait pas besoin de trop se couvrir ou de chercher à tout prix la chaleur à l'intérieur. Il avait envoyé un sms à Yasmine pour lui dire qu'il l'attendait devant l'hôpital. Précisant qu'elle n'avait pas à se presser. Après tout, lui, il avait tout son temps, il était sorti du bureau depuis un bon moment déjà, il avait eu le temps de rentrer chez lui, d'enfiler ses affaires de sport pour aller courir un peu, de retourner chez lui prendre une douche et se changer, avant de venir à l'hôpital.
Il était en train de lire les dernières actualités sportives sur son téléphone. Avec le décalage horaire, c'était compliqué de suivre les matchs de NBA en direct et il devait donc se contenter la plupart du temps des résultats publiés sur les différents sites internet. Certains diraient que ce n'était pas ce qu'il y avait de plus passionnant et ils auraient probablement raison. Après tout dans le sport, ce n'est pas le résultat qui compte le plus -à part dans certains cas- mais bien le jeu en lui-même. Regarder un match et regarder les résultats, ce n'était vraiment pas la même chose. Cependant, ça avait le mérite de l'occuper en attendant sa soeur et c'était amplement suffisant pour lui. Il lève la tête de temps en temps, en particulier quand il entend les portes automatiques du St Vincent s'ouvrir. Comme s'il avait peur de louper sa soeur, mais surtout par pure curiosité. Il observe les visages qui défilent, des visiteurs, des patients, du personnel, il y a un peu de tout et il ne saurait pas vraiment dire qui est qui. A par peut-être quand il en voit un avec un bras dans le plâtre ou des radios à la main. Dans ces cas-là, il n'y a vraiment pas de doute quant à la raison qui a conduit ces personnes à l'hôpital aujourd'hui. Il a le nez sur l'écran de son téléphone portable quand il entend les portes automatiques du St Vincent s'ouvrir pour la énième fois. Pour le coup, il hésite même à ne pas relever la tête, Yasmine ne lui ayant pas envoyé de message lui indiquant qu'elle avait fini et qu'elle ne devrait plus trop tarder. Cependant, il ne sait pas trop si c'est l'instinct ou la curiosité, mais il ne peut s'empêcher de relever la tête une fois de plus. Quand il voit la personne qui vient de sortir, il est comme renvoyé une bonne vingtaine d'années en arrière. "Lukà ?" l'interpelle t-il à l'homme qui vient de sortir, un bandage entourant sa main. "Je savais pas que t'étais encore à Brisbane." Lukà, cet ami d'enfance qu'il a perdu de vue au lycée puisque ce dernier s'était trouvé des centres d'intérêts bien différents de ceux de Sohan. L'homme n'a pas changé visiblement malgré les années. Il semble simplement avoir mûri. "C'est Sohan, j'sais pas si tu te souviens." oué car, ce n'est pas parce que Sohan le reconnait que l'inverse est vrai. Même si Sohan ne pensait pas avoir changé des masses en vingt ans.
Les jours se suivent et se ressemblent. Depuis six ans, ta vie n'avait pas beaucoup évolués. Comme le disait si bien ta mère, tu te forces à ne pas vouloir avancer dans la vie. Tu préfères rester dans le passé d'il y a six ans, le jour où Anna a pris ses affaires et est partie du jour au lendemain, te privant ainsi du droit de voir naitre et grandir ton enfant. Fonder une famille a toujours été l'un de tes rêves. Toi qui n'a jamaid eu de réels famille, tu as toujours cette envie de créer la tienne. Ça aurait pu être le cas avec Anna mais il a fallut qu'une rumeur circule sur une certaine jeune femme et toi. Apparemment, t'aurais forcé la dite demoiselle à coucher avec toi alors que tu avais un peu trop bu. Jamais de la vie. Ce n'est pas ton genre. Anna le sait bien et, pourtant, ton ancienne petite amie n'a pas hésité à la croire. Il n'y a pas qu'elle d'ailleurs. Freya, ta cousine. Elle aussi a cru que la jeune femme disait vraie. Par deux fois, tu t'es sentie trahi. Si ta cousine s'est finalement faite à l'idée que c'était faux, il n'en est pas de même pour Anna. Sinon, pourquoi ne serait-elle pas revenu ? Anna et toi, c'est une histoire qui dure depuis tes seize ans. Tu ne peux pas concevoir de tourner la page ausis rapidement. Au fond de toi, tu gardes l'espoir que la jeune femme revienne et te laisse voir ton fils. Tu ne demandes pas à ce qu'elle te revienne entièrement. D'ailleurs, tu ne sais pas comment tu vas réagir le jour où elle va revenir à Brisbane. Il n'y a qu'une seule personne qui pourrait l'aider à la convaincre de revenir, c'est Freya. Il n'y a qu'elle qui pourrait la convaincre mais tu refuses de lui demander cela. Vous vous êtes déjà embrouillés une fois lorsque tu as découvert qu'elle savait où se trouvait Anna et ton fils. Tu lui en a voulu durant des semaines. Finalement, tu es venu t'excuser auprès de la demoiselle. La famille reste la famille. Tu ne peux pas lui en vouloir de rester en contact avec son amie et ça, même s'il s'agit de ton ex petite amie qui t'as littéralement brisé le coeur. C'est pour elle que t'as arrêté de boire. Un certain nombre de fois t'as voulu arrêté tes bonnes actions et te replonger dans l'alcool. Ce n'est pas une solution, loin de là. Énimène visite à l'hôpital. Just eune visite de contrôle afin de vérifier si tes points de suture cicatrisent bien. Quelques jours auparavant, tu t'es bêtement ouvert le doigt en coupant tes légumes avec la mandoline. Pour une fois que tu voulais cuisiner, ça t'apprendra. C'est une jeune infirmière qui se charge de vérifier que tout allait bien. "la cicatrisation est bonne. Dans quelques jours, ça ne sera plus qu'un mauvais souvenir !" T'es pas prêt de cuisiner à nouveau. D'ailleurs, t'as jeté immédiatement la mandoline, jurant ne plus jamais te servir de cet instrument de torture. Tu passes les portes du St Vincent Hospital afin de regagner la sortie et rentrer enfin chez toi. Tu ne fais pas attention aux gens autour de toi. Tête baissée, mains dans les poches, tu te diriges vers la sortie. Mais une voix t'interpelle, elle semble te connaitre. Le regard se pose sur un homme à la peau métissé. "Sohan ?!" Eh ben ça alors ! Tu ne pensais pas le revoir un jour. Sohan et toi, êtes des amis d'enfance. Comme beaucoup d'amis de ce genre, vous vous êtes perdus de vus. Chacun a mené sa vie de son côté sans jamais se soucier de l'autre. Sa phrase t'interpelle. "Je ne suis jamais partis tu sais .. J'adore cette ville !" C'est vrai, tu ne te vois pas vivre ailleurs. Brisbane t'as vu naitre et elle te verras mourir aussi, c'est certain. "Bien sûr que je me souviens de toi. Je ne pensais pas te revoir un jour." Vrai, encore. Il n'y a pas de vrais raisons quant à votre éloignement. Vous avez simplement pris deux directions opposés. Toutefois, t'es heureux de voir le jeune homme. C'est comme si vous redeveniez des enfants le temps d'un instant. "Comment tu vas ? T'as un rendez-vous ?" L'hôpital n'est pas un lieu idéal pour retrouver un ami perdu, tu te demandes bien ce qu'il fait ici.
Il ne s'attendait pas à ce que Lukà le reconnaisse. Où tout du moins, il ne s'attendait pas à ce que Lukà se rappelle de son prénom. Ce qui en soi est assez idiot. Ils s'étaient côtoyés pendant des années avant de se perdre de vue au lycée. Certes, ça remontait à presque une vingtaine d'années, mais ils n'avaient pas alzheimer, ils étaient encore capables de se souvenir du visage et du prénom de leur ami d'enfance. Ils avaient fréquenté les mêmes écoles, s'étaient vus tous les jours pendant des années, ce n'était donc pas comme s'ils ne se connaissaient pas. Ils avaient beau avoir presque vingt ans de plus que la dernière fois qu'ils se sont croisés, ils n'ont pas changé tant que ça. Physiquement, ils sont restés les mêmes, avec seulement un peu plus de maturité et quelques rides, il fallait être honnête sur ce point. La quarantaine allait bientôt pointer le bout de son nez et ils ne ressemblaient plus à des adolescents à peine pubères. Une fois passée la surprise de croiser son ancien ami complètement par hasard, presque vingt ans plus tard, Sohan se lève pour aller à sa rencontre. Apparemment Lukà n'a jamais quitté Brisbane, c'est ce qu'il lui apprend quand Sohan lui dit qu'il n'était pas au courant qu'il vivait encore ici. Comme quoi, on peut vivre toute sa vie dans la même ville que quelqu'un, on peut tout autant passer presque vingt ans sans jamais le croiser. Il fallait dire que lorsqu'ils se sont perdus de vue au lycée, ils n'avaient pas les mêmes fréquentations, pas les mêmes centres d'intérêt non plus. C'était d'ailleurs pour cette raison qu'ils avaient finis par s'éloigner. Lukà étant plutôt du genre à boire et sortir, Sohan plutôt du genre bien rangé à rester chez lui en face à face avec son écran d'ordinateur. Ca ne semble pas quelque chose de très important maintenant, mais pour le Sohan de l'époque, trainer dans les bars était plus qu'impensable. "Ah j'aurai cru que tu partirais. Si ce n'était pas après le lycée, après la fac." Lui répond-il en haussant les épaules. Il s'était toujours imaginé que Lukà avait quitté la ville pour une raison ou une autre alors que finalement, il était comme lui. Il n'était jamais parti. Ne semblait pas en avoir ressenti le besoin.
Lukà lui dit ensuite qu'il ne pensait pas le revoir et finalement, Sohan ne peut que hocher la tête de haut en bas pour acquiescer. Lui non plus n'imaginait pas revoir Lukà un jour. Quand au bout de quelques années on n'entend plus parler d'une personne, on finit par se faire une raison. "Moi aussi pour être honnête." Lui répond-il avant d'ajouter "En tout cas c'est une bonne surprise." Même s'il ne savait pas s'il avait encore quoi que ce soit en commun avec son ancien ami, ça lui faisait plaisir de voir qu'il se portait bien de prime abord. "Oh non non, j'attends juste que ma soeur finisse son service pour l'emmener dîner. Du coup ça va très bien et toi ?" lui demande t-il avant de pointer en direction de la main bandée de Lukà. "Je vois que t'es toujours aussi maladroit. Tu t'es fait ça comment cette fois-ci ?" lui demande t-il en riant. Il se rappelle de Lukà enfant qui était du genre à se blesser à chaque fois qu'il entreprenait quelque chose d'un peu périlleux. Comme s'il avait un mauvais karma constant. Si quelque chose devait mal tourner, c'était toujours pour la pomme de son ami et à en juger le bandage sur sa main, Sohan ne pensait pas se tromper en disant que ça n'avait pas changé depuis tout ce temps. L'avantage c'est qu'il avait toujours des histoires à raconter.
Un large sourire se dessina sur ton visage. À l'époque du lycée, t'avais une bande de potes qui ne cessaient de te faire faire ce qu'ils souhaitaient de toi. Parmi eux, il y avait Matt mais lui, il n'était pas comme les autres. Il te soutenait qu'importe la situation. Matt est devenu ton meilleur ami. Parmi tes amis, il y a eu aussi Sohan. Malheureusement, la vie vous a séparés. Vous avez suivis un chemin différents l'un et l'autre et, aujourd'hui, la vie semble vouloir vous rapprochez. Tu ne vas pas refuser ce cadeau, on a toujours besoin d'avoir des amis dans notre vie pour avancer, évoluer. Ta mémoire n'est pas encore défaillante, t'as toujours plus de facilité à te rappeler des choses que tu vois plutôt de ce que tu peux lire, apprendre. Bien sûr que tu te souviens de Sohan. Tous vos souvenirs communs te reviennent en mémoire. Ça fait certes des années que vous ne vous avez pas vus, néanmoins tu te souviens d'après peu près tout ce que vous avez vécus ensemble. L'étonnement de le voir assis dans la salle d'attente de l'hôpital est immense. Cela dit, tu ne poses pas de question et te contente de le saluer en le gratifiant d'un sourire. Vingt ans ont passés, Sohan n'a donc pas connus Anna, ni votre relation aussi tumultueuse soit-elle. Ce n'est pas plus mal. Physiquement, l'un comme l'autre, vous n'avez pas changés. Quelques muscles en plus, quelques rides aussi. Un peu de barbe de ton côté. Sohan sera sans doute étonné de te voir porter des lunettes, à l'époque où vous étiez amis, tu n'en portais pas. Comme certains aiment le dire, c'est plus pour le style les lunettes mais non, t'en as réellement besoin surtout lorsque tu travailles sur ordinateur, tablettes ou en fin de journée. Le jeune homme est plus âgé que toi, cela dit ça ne vous a jamais empêché de bien vous entendre. "Ah j'aurai cru que tu partirais. Si ce n'était pas après le lycée, après la fac." Pour être honnête, tu n'as jamais souhaité partir de Brisbane. Mis à part pour tes périodes de vacances et encore, tu restes en ville la plupart du temps. Quelques jours par-ci, quelques jours par-là. Seul ou en compagnie de ta mère. "Jpourrais jamais vivre ailleurs qu'à Brisbane. C'con à dire sûrement mais j'adore vivre ici !" Et ça, même si cette ville te rappelle de mauvais souvenir. Tous vis à vis d'Anna, bien évidemment. Ça pour une surprise, c'est une surprise. Une sacrée bonne surprise qui plus est. Mais bien sûr, Yasmine travaille ici. Maintenant que t'y penses, tu fais le rapprochement entre la couleur de peau de la jeune femme et celle de ton ami. T'as simplement croisé la demoiselle une ou deux fois lors de tes visites chez les parents de Sohan. En revanche, tu n'as jamais pris le temps de lui parler à Yasmine. "Oh mais oui ! Comment elle va Yasmine ?" Demandes-tu au jeune homme lorsque ta curiosité pointe le bout de son nez. Ton regard se pose sur ta plaie qui cicatrise bien, lentement mais bien. Ta maladresse légendaire et toi êtes connus des services hospitaliers. D'ailleurs, ton ami l'a remarqué. Ce qui a le don de te faire sourire. "Oh bah tu sais, on ne se refait pas. Une coupure toute bête lorsque j'épluchais mes légumes .. tu sais qu'avec moi le simple petit bobo prend d'énormes proportions." Tu dois avoir un dossier énorme à l'hôpital. D'ailleurs, la soeur de Sohan ne cesse de te taquiner avec ça. Mais c'est de bonne guère, tu ne le prends pas mal du tout.
Il sourit en hochant vigoureusement la tête de haut en bas. Il comprend ce que Lukà veut dire. Lui aussi il aime Brisbane et lui aussi il ne se verrait pas vivre ailleurs. Il avait des envies d'évasion, de voir du pays, ou le monde, mais il sait pertinemment que c'est à Brisbane qu'il est chez lui. Il ne serait pas prêt à quitter la ville pour de bon. Il a tous ses repères ici, toute sa vie. Certains naissent quelque part et n'ont qu'une seule obsession, quitter leur cocon pour aller voir si l'herbe est plus verte ailleurs. Pas Sohan. Lui, il est parfaitement épanoui où il est et même s'il est né ici et n'a jamais quitté la ville si ce n'est pour quelques semaines de vacances, il arrive toujours à découvrir de nouvelles choses ici. De nouvelles animations. Il n'est pas blasé comme certains pourraient l'être après si longtemps au même endroit. Il ne se lasse pas de sa vie ici et de ses petites habitudes. Ce qui est sûrement un peu casanier de sa part, mais ça, il s'en fiche. "C'est pas moi qui te contredirai." Qu'il répond à son ciel ami en souriant. "Je sais pas si je me lasserai de vivre ici un jour. Honnêtement je pense pas." Il ne voyait pas comment il pourrait se lasser de la ville qui contient tous ses souvenirs, tous ses amis, toute sa famille et toute sa vie. Pour l'en dégouter, il faudrait probablement un évènement dramatique. Mis à part ça, il ne voyait pas de scénario dans lequel il se réveillerait un matin avec une lassitude qu'il ne pourrait pas expliquer. Ce n'était pas possible. Il en était certain. Ca le fait sourire de plus belle quand Lukà s'intéresse à sa soeur. Il ne l'avait pas beaucoup côtoyée à l'époque, seulement en coup de vent quand Lukà venait jouer dans la maison Khadji, mais ça s'arrêtait là. Du moins, de ce que lui en savait. Sa soeur ne lui parlait pas de manière extensive de chacune de ses relations sociales. "Elle va bien !" Ou du moins c'est ce qu'elle lui dit depuis qu'elle est rentrée du Niger il y a maintenant plus d'un an. "Elle est partie huit mois au Niger en 2017 et du coup elle bosse ici depuis qu'elle est rentrée." Lui explique t-il ensuite. Gardant pour lui le fait qu'il n'avait pas du tout aimé ces huit mois pendant lesquels les contacts avec sa soeur étaient limités. La faute au décollage horaire et à la montagne de travail que Yasmine avait à faire là-bas, principalement. Huit mois pendant lesquels il n'avait fait que s'inquiéter et qui s'étaient soldés par un soulagement énorme quand elle avait enfin posé les pieds sur le sol australien. C'était égoïste comme sentiment, il en était parfaitement conscient, ça ne l'empêchait pas d'avoir être très content pour elle quand elle avait concrétisé son projet. De son point de vue de grand frère ça avait simplement été compliqué à gérer. Lui qui s'inquiète toujours pour un oui ou pour un non quand il s'agit de sa soeur. D'ailleurs en voyant la main bandée de Lukà, il ne peut s'empêcher de penser qu'il aurait bien du soucis à se faire si sa soeur était aussi maladroite que son amie. En vingt ans, l'australien ne s'était visiblement pas refait à ce sujet. "Attend attend, tu épluches tes légumes avec quoi toi ?" lui demande t-il en riant ayant bien du mal à comprendre comment cette action pourtant simple avait pu le conduire directement à l'hôpital. "Je croyais que t'étais seulement autorisé à utiliser des couteaux à beurre toi ? T'es maladroit, mais chanceux, car j'vois que t'as toujours tes dix doigts malgré tout." ajoute t-il en plaisantant, faisant référence une fois de plus à la maladresse légendaire de Lukà. Il n'était pas rare quand ils étaient enfants pour Lukà d'avoir à faire un tour dans le bureau de l'infirmière de l'école parce qu'il s'était blessé en jouant dans la cour. Une vraie catastrophe ambulante. "T'as pas quelqu'un qui peut te faire à manger pour éviter de te blesser ?" demande t-il en souriant. Une manière détournée de lui demander s'il n'avait pas quelqu'un dans sa vie. En vingt ans, il avait largement le temps d'avoir été marié au moins deux fois et d'avoir quatre enfants. Au moins ça.
À une époque, Sohan et toi étiez amis. Comme très souvent, la vie vous éloigne des gens qui vous sont proches depuis le secondaire. La vie ne vous a pas fait de cadeaux, elle est parvenue à vous éloigner Sohan et toi. Elle vous a fait prendre deux chemins complètement différents. Mais, heureusement, elle vous réunis à nouveau ajourd'hui. Tu l'as beaucoup estimé le jeune homme. Lorsque vous étiez amis, tu passais pas mal de temps chez lui en sa compagnie et aussi avec la soeur de ton ami. Yasmine, tu l'as toujours vu comme étant la petite soeur de Sohan, elle travaille ici- même, à l'hôpital. Vous vous êtes déjà parlés, juste pour vous échangez des banalités comme ça va ? ou le fameux quoi de neuf ?. Tu n'as même jamais pris le temps de lui demander des nouvelles de son frère. Honte à toi ! "C'est pas moi qui te contredirai. Je sais pas si je me lasserai de vivre ici un jour. Honnêtement je pense pas." Comme toi, Sohan est un enfant du pays, un enfant de Brisbane. Partir en vacances ailleurs est envisageable, en revanche, quitter Brisbane et t'installer dans une autre ville, voire un nouveau pays, tu ne pourras jamais t'y résoudre. Ici, t'as tout tes repères. T'as tes amis, ta famille. Tu ne pourras jamais te résoudre à les abandonner. Vivre sans eux, sans pouvoir les voir lorsque ton coeur t'en dit, tu ne peux pas. Tous tes souvenirs sont ici. Revoir Sohan est comme une bouffée d'oxygène. Comme si on te rendait ton adolescence le temps de quelques heures. Tu demandes des nouvelles de sa soeur qui semble aller bien. "Ah ouais ? Au Niger ? C'est trop cool ça !" Il y a tellement d'endroits dans le monde que tu as envie de visiter. Les pyramides d'Egypte, la tour Eiffel, Big Ben, manger des sushis au Japon, visiter New-York, faire un road trip sur la côte Ouest des USA .. Il y a tellement d'endroits que tu as inscrit sur ta bucket list et que tu as envie de visiter, de voir. Une seule vie ne suffira probablement pas à tout faire. Surtout que ça doit faire environ trois ans que tu n'as pris aucune vacances. Ton travail c'est tout ce qui arrive à te faire tenir debout encore. Alors être en vacances est inconcevable pour toi. Les retrouvailles sont faites à présent, l'update de vos vies respectives sont à présent faites. En partis du moins. Tu ne lui a pas parlé encore d'Anna, de son départ, ni de ton alcoolisme passé. Gardons ce genre d'information pour plus tard, voire jamais en fait. Sohan semble étonné de ta présence à l'hôpital. "Attend attend, tu épluches tes légumes avec quoi toi ?" Un rire s'échappe de tes lèvres, il a dû oublier à quel point tu as toujours été maladroit depuis toutes ces années. "ça se voit qu'on s'est pas vus pendant longtemps. T'as oublié le nombre de fois où je me suis coupé avec une feuille ? Et t'as oublié la fois où j'ai débarqué un mardi matin à l'école avec un plâtre au bras après une luxation de l'épaule ?" Franchement, t'as foutu une peur bleue à ta mère plus d'une fois. Pauvre maman Petterson ! Tu ne l'as pas épargné. Un jour, tu lui as offert un weekend dans un centre de thalasso. Elle en avait bien besoin vu tout ce qu'elle a fait pour toi depuis ta naissance. Élever un enfant seule, c'est un travail à temps complet. T'imagine ce qu'Anna doit vivre à élever votre fils seule, mai là, c'est elle qui l'a choisie. "Je croyais que t'étais seulement autorisé à utiliser des couteaux à beurre toi ? T'es maladroit, mais chanceux, car j'vois que t'as toujours tes dix doigts malgré tout." En effet, t'as encore tes dix doigts. C'est un miracle venant de toi. "Jvais m'y remettre aux couteaux à beurre, voire même bannir tous les couteaux de chez moi." C'est une solution mais ça risque de ne pas être très pratique pour manger. "T'as pas quelqu'un qui peut te faire à manger pour éviter de te blesser ?" La question que tu redoute le plus quand tu tombe sur une vieille connaissance ou sur l'une des amies de ta mère. Ça te rappelle à quel point tu es seul depuis le départ d'Anna, tu t'es enfermé dans une bulle empêchant quiconque de la franchir. "Non... Je n'ai personne... Mais t'inquiète pas, je suis un grand garçon." Même si ça ne t'empêche pas de te blesser malgré tout. À force, tu as adopté certaines habitudes pour éviter le moment de panique intense qui t'envahit. Les pansements, compresses et désinfectants se trouvent dans la cuisine. Le lieu le plus dangereux de chez toi. "Et vous alors, monsieur Khadji avez-vous une compagne ? Une femme qui partage votre vie ?" T'essaie de détourner l'attention sur lui plutôt que sur toi. Au moins, ça t'empêchera de lui raconter toute l'histoire avec Anna qui te fait encore beaucoup de mal à l'heure actuelle.
Il hoche la tête vigoureusement pour acquiescer. Pour lui confirmer dans un premier temps que oui, Yasmine a bien passé plusieurs mois au Niger, à des milliers de kilomètres de Brisbane, à faire ce qu'elle fait de mieux : prendre soin des autres. Il hoche aussi la tête pour acquiescer, parce que oui, effectivement c'est plutôt cool comme expérience, même si ça n'a pas été de tout repos pour elle et même si Sohan a passé ces longs mois à s'inquiéter pour elle et pour ses conditions de vie là-bas, il fallait bien reconnaitre que ce n'était pas une expérience que tout le monde avait la chance de vivre. C'était pour ça que malgré tout, malgré son égoïsme quand il s'agissait de la voir partir alors que lui restait ici, il était content pour elle. Il sera toujours content de la voir faire ce qu'elle aime, content de la voir épanouie, même si c'est à des milliers de kilomètres de lui et même s'il se fait un sang d'encre pour elle.
Cependant, le sujet n'était pas celui-là et il était plutôt question de renouer avec un vieil ami. Il pourrait probablement parler de sa soeur pendant des heures et vanter ses mérites en long, en large et en travers, mais ça n'intéressait probablement pas Lukà. D'ailleurs Sohan était tout autant intéressé de savoir ce qui avait bien pu conduire son ancien ami à l'hôpital aujourd'hui. Il se souvenait d'un gamin maladroit qui finissait toujours par se blesser dans la cour de récréation, d'une manière ou d'une autre. La plupart du temps il était bien compliqué de comprendre comme il avait pu se faire mal, mais la réalité était bien là, il se blessait avec tout et n'importe quoi, à croire qu'il le faisait exprès. Sohan ne peut donc s'empêcher de rire quand Lukà dit qu'effectivement il ne l'a pas vu depuis longtemps, lui rappelant quelques-unes de ses péripéties. "C'est vrai que j'avais oublié ces petits détails ! Je pense que l'infirmière de l'école devait paniquer à chaque fois qu'elle te voyait débouler dans son bureau elle devait en avoir marre que tu lui vides tout son stock de pansements à chaque fois !" Lui répond-il en riant. En y repensant et du point de vue d'un gamin d'une dizaine d'années, ça ne devait pas être si drôle que ça sur le coup. Même aujourd'hui à trente-six ans, Sohan serre encore les dents quand il se coupe ou se fait mal, il peut donc imaginer que, aussi drôle que ça pouvait paraitre comme situations, ça ne devait pas être bien marrant pour le Lukà haut comme trois pommes qui voulait juste s'amuser avec ses copains. Avec la maturité il arrive même à se mettre à la place de ses parents qui devaient se faire des peurs bleues assez régulièrement par la même occasion. Non franchement, ce n'était drôle qu'avec le recul. "C'est une sage décision. Je peux aussi te proposer de mettre des caches sur les coins des meubles pour pas te faire mal en te cognant. Après pour les blessures qui sortent de nulle part, je te laisse gérer, t'as l'air entier donc tu dois avoir tes propres astuces." Finit il en plaisantant.
Il ne sait pas si Lukà a quelqu'un dans sa vie, cela fait des années qu'il ne l'a pas vu et qu'il n'a pas de nouvelle de lui. Cependant, il est surpris quand l'australien lui apprend être seul. Lukà a toujours été beau garçon, même quand il était jeune et il aurait parié qu'il aurait trouvé chaussure à son pied depuis longtemps. "J'ai du mal à y croire. Aucune femme n'a succombé à tes charmes ou c'est toi qui n'as pas encore trouvé celle qui fera battre ton coeur ?" Lui demande t-il sourire aux lèvres. Après tout, peut-être qu'il plaisait aux femmes, peut-être qu'il avait le succès que Sohan imaginait, mais qu'il n'avait tout simplement pas trouvé la bonne. C'était une solution qui se tenait. Sohan ne peut s'empêcher de pouffer légèrement quand Lukà lui retourne la question, le questionnant sur une potentielle Madame Khadji. Il n'aurait pas pu tomber plus à côté de la plaque sur ce coup, mais ce n'était pas de sa faute. C'était la faute au temps qui passe et aux années sans se voir. Ils avaient tous deux loupés des étapes importantes de la vie de l'autre. "Hmm non, j'ai pas de femme." Commence t-il, pas forcément sûr de comment aborder le sujet. Il pourrait esquiver, en rester là et passer à autre chose, mais il voulait faire des efforts quant à l'acceptation de sa propre sexualité. "Disons que c'est pas trop mon truc ... Les femmes ... Enfin, pas du tout même pour être complètement honnête avec toi." Le dire cash n'était pas encore chose aisée pour lui et il estimait qu'il en avait assez dit pour que ce soit plus qu'explicite pour Lukà.
Sohan et toi, c'est une longue histoire. Il fut une époque où vous étiez amis. Tu passais beaucoup de temps chez lui, à discuter ou bien à jouer à deux jeux vidéos. De temps en temps, sa petite soeur vous rejoignait. Tu l'as toujours considéré comme la soeur de Sohan, malgré tout tu l'aimais bien. Le temps a eu raison de vous trois. Il vous a éloignés durant plusieurs années. Yasmine, tu l'as revue lors de tes nombreux passages à l'hôpital et pourtant, tu n'as jamais pensé à lui demander des nouvelles de son frère. Tu pensais qu'il avait quitté la ville. Brisbane compte un peu plus de deux millions d'habitants, c'est facile de ne pas croiser une personne durant plusieurs années. Même si vous avez été très proches il fut une époque. C'est d'autant plus drôle de croiser ton ami ici, à la sortie de l'hôpital. Lui, il est venu attendre sa soeur et toi, t'es venu consulter afin de voir s'il te faudrait des points de sutures ou non. Tu n'en as pas besoin, c'est la bonne nouvelle de la journée. Ça mérite bien un petit verre, non ?! Un verre de soda, bien évidement. Sohan et toi, vous vous donnez des nouvelles de vos vies respectives. Il te parle de sa soeur et de son action au Niger. T'aimerais beaucoup en faire des actions humanitaires mais avec ta maison d'édition, ça ne va pas être possible. Tu ne peux pas laisser tes clients sans nouvelles de toi et de l'avancée de leurs bouquins durant des mois entiers. Pour compenser, tu donnes de ton temps à diverses associations caritatives autour de toi. Principalement pour les enfants, tu leur offre des jouets, des livres. Tu as tellement de livres chez toi que tu peux bien leur en donner. Il faut d'ailleurs que tu recontacte Noa, tu as réellement envie de participer à l'association dont elle s'occupe. T'as toujours un peu jalousé le lien fraternel entre Sohan et sa soeur, tu n'as jamais eu ni de soeur, ni de frère. Fils unique, tu as vécu seul avec ta mère jusqu'à tes dix-sept ans, lorsque tu as jugé bon de partir de chez elle pour la laisser vivre son amour tranquillement avec ton beau-père. Tu les vois régulièrement et tu t'entend très bien avec eux. Chaque dimanche midi, tu vas manger avec eux et tu repars, en général, avec une montagne de plats préparés par ta mère. Les choses sont en train d'évoluer dans ta vie, tu as fais un tes ADN et, apparemment, tu aurais une soeur. Ou plutôt, une demie soeur. T'es euphorique de cette nouvelle, reste simplement à savoir comment elle, elle va le prendre. "C'est vrai que j'avais oublié ces petits détails ! Je pense que l'infirmière de l'école devait paniquer à chaque fois qu'elle te voyait débouler dans son bureau elle devait en avoir marre que tu lui vides tout son stock de pansements à chaque fois !" Cette petite anecdote te fait sourire, tu te rappelle à quel point l'infirmière était désespéré de te voir débarqué dans son bureau. Tu ne peux t'empêcher de rire fortement, les gens rouspètent mais tu t'en fiches n'en faisant pas cas. Tu préfère continuer avec ton ami fraichement retrouvé. La vie a un drôle de sens de l'humour. Elle te retire des amis à un moment de ta vie et te les rends quelques années plus tard. "Ah nan mais trop ! La pauvre. À la fin, elle a dû partir en dépression par ma faute je suis sûr !" Cette infirmière n'est pas la seule à t'avoir vu fréquemment suite à différentes blessures. À l'hôpital, les dames de l'accueil te connaissent par coeur. Il vous arrive même de vous raconter vos vies parfois. T'en as marre d'être aussi maladroit, te blessant pour un oui ou pour un non. T'as fichu une peur bleue à ta mère plus d'une fois, tu t'es récemment excusé en lui offrant un soin dans une cure thermale en compagnie de ton beau père. C'est la moindre des choses. "C'est une sage décision. Je peux aussi te proposer de mettre des caches sur les coins des meubles pour pas te faire mal en te cognant. Après pour les blessures qui sortent de nulle part, je te laisse gérer, t'as l'air entier donc tu dois avoir tes propres astuces." Ce qui est génial dans cette amitié entre Sohan et toi, c'est que vous avez beau ne pas vous être fréquentés depuis plusieurs longues années, vous êtes toujours aussi proche. Plaisantant comme si vous vous étiez quittés il y a deux ou trois jours. "C'est pas bête. Je vais y penser." Effectivement, t'es encore en un seul morceau mais pour combien de temps encore ? "Il faut croire que j'ai ma bonne étoile !" Sourire aux lèvres, tu t'assois à côté de ton ami. T'es complètement à ton aise malgré que tu sois encore dans l'enceinte de l'hôpital. Lieu que tu n'affectionne pas particulièrement. Viens le sujet le plus sensible pour toi, le sujet des amours. T'ignore pourquoi mais les gens, lorsque tu les croises, te posent toujours la même question "Et les amours ?". Tu fais toujours très attention d'éviter le sujet au maximum n'était pas à l'aise quand il s'agit de parler de tes sentiments. "J'ai du mal à y croire. Aucune femme n'a succombé à tes charmes ou c'est toi qui n'as pas encore trouvé celle qui fera battre ton coeur ?" Tu es resté très évasif face à ton ami mais ce dernier ne semble pas vouloir lâcher le morceau. "Y'a eu quelqu'un en fait ..ça date du lycée .. mais .. c'est compliqué .." Te contentes-tu d'expliquer à ton ami. Pas sûr que cette explication lui suffise. Six ans après, tu n'arrive toujours pas à parler de tout ça. Sohan a raté tellement de choses dans ta vie que tu ne saurais pas par où commencer. Il te faudrait lui dire que t'as été en cure contre l'alcool. Bref, tout autant de mauvais souvenirs que tu préférerais oublier. "Hmm non, j'ai pas de femme. Disons que c'est pas trop mon truc ... Les femmes ... Enfin, pas du tout même pour être complètement honnête avec toi." Yeux grands ouverts, bouche bée, tu ne sais pas quoi dire. Tu ne t'attendais à une révélation comme celle-ci de la part de Sohan. Tu ne pensais pas qu'il puisse être homosexuel mais pourquoi pas, ça ne change pas la personne qu'il est. Sohan a beau être attiré par les hommes, il n'en reste pas moins Sohan. Ton ami d'enfance. Tu souris en posant une main réconfortante sur la sienne. "Qu'importe. Que t'aime les hommes ou les femmes, tu reste Sohan." Tu ne sais pas quoi dire d'autres. Tu ne le juge et tu ne prendra pas le risque de le perdre une nouvelle fois à cause d'une réaction qui n'est pas la tienne. T'es pas homophobe, toi aussi t'as eu une expérience avec un homme même si tu ne l'assume pas trop. "Tu le sais depuis longtemps ?" Curiosité mal placée, tout simplement.
Sohan a eu une enfance heureuse, sa mémoire est remplie de moment de joie, d'anecdotes plus ou moins drôles le concernant lui ou son entourage. Comme les souvenirs de Lukà qui se blessait régulièrement. Il était rare qu'il y ait une récréation sans que le gamin haut comme trois pommes qu'il était ne finisse avec un genou éraflé ou une bosse. Sohan l'avait d'ailleurs accompagné à maintes reprises dans le bureau de l'infirmière qui devait probablement s'étonner les jours où elle ne les voyait pas débarquer devant elle en courant. Infirmière qui avait dû souffler un bon coup le jour où Lukà a quitté l'école et qu'elle n'avait donc plus à se soucier de lui et de la manière dont il allait bien pouvoir se faire mal la prochaine fois. "Il y a des chances ! Ou alors, elle a patiemment attendu que tu t'en ailles pour pouvoir apprécier pleinement son métier. Même ta mère devait se faire un sang d'encre à chaque fois non ? Elle se demandait pas dans quel état t'allais revenir chez toi le soir ?" Lui demande t-il en souriant. Il savait pertinemment que si Sohan s'était retrouvé à la place de Lukà à l'époque, Fatima, sa mère l'aurait probablement surprotégé et se serait inquiétée plus que de raison, même s'il n'y avait rien qu'elle aurait pu faire pour changer la situation. Sohan imaginait que ça devait être la même chose avec la mère de son ami, même si à l'époque il n'avait jamais réellement fait attention à ça etn'en n'avait jamais parlé. "Dans ton malheur t'as de la chance, c'est quand même paradoxal. Comme si ton karma ne savait pas trop ce qu'il voulait." Rebondit il. Effectivement, même s'il se blessait souvent, Sohan n'avait pas le souvenir d'avoir vu son ami dans une situation critique. Les blessures étaient bien souvent superficielles quand ils étaient enfants et se limitait à quelques éraflures et de beaux bleus pour la majorité. A croire que le destin voulait lui faire passer un message, mais pas trop non plus. Ce n'était pas plus mal cela dit. Personne ne voulait voir ses amis gravement blessé. "Mais bon j'imagine que tu t'en plains pas ! Mieux vaut avoir une petite coupure au doigt que se couper le doigt entier." Relativise t-il. Il fallait voir le bon côté des choses, il pouvait toujours y avoir pire que la situation actuelle.
Ca faisait des années qu'il n'avait pas vu son ami et se permettait donc quelques petites curiosités concernant sa vie privée. Ca l'intéressait réellement. Il espérait que son ami soit heureux dans sa vie après toutes ces années. Il n'en revient pas quand Lukà lui dit qu'il n'a personne. Lukà avait toujours attiré le regard des filles, il n'était pas du genre à les laisser indifférentes et Sohan refusait de croire qu'il n'avait pas réussi à trouver une seule fille faisant battre son coeur. Il devait y avoir plus que ça. Il y avait effectivement plus que ça comme lui expliquait brièvement Lukà. Il y avait quelqu'un, une histoire compliquée qui datait du lycée. Il se rendait compte à quel point il avait manqué des choses dans la vie de Lukà quand ils s'étaient perdus de vue à cette époque. Différentes fréquentations et différents intérêts avaient eu raison de leur amitié à l'époque. Il en avait ratées des choses depuis. "Compliqué à quel point ? Vous n'êtes plus ensemble ? Si mes questions sont pas les bienvenues, t'as pas à répondre. On s'est pas vus depuis presque vingt ans, tu me dois pas d'explication." Précise t-il, parce que c'est vrai. Il se permet d'être curieux, comme il aurait été curieux il y a vingt ans. Cependant, en vingt ans sans aucune nouvelle l'un de l'autre, il n'a peut-être pas le droit d'être si curieux. Il ne veut pas que Lukà se sente obligé de lui répondre seulement pour lui faire plaisir. Il réalise ensuite que Lukà n'est pas au courant pour son homosexualité. Comment aurait il pu après tout, il ne l'avait jamais crié sur tous les toits, encore moins quand il était au lycée. Le lycée, époque qui représentait un peu un tournant pour Sohan concernant sa sexualité puisque c'était l'époque à laquelle il avait compris qu'il ne ressentait rien et ne ressentirait jamais rien pour la gentes féminine. S'en était suivi une longue phase d'acceptation, toujours en cours aujourd'hui, il ne fallait pas se voiler la face. Il sourit cependant face à la réaction de son vieil ami. Il aurait bien aimé que ses parents réagissent de la sorte. "Si seulement mes parents pouvaient penser comme toi !" ne peut il s'empêcher de lancer, un peu amer. La pilule avait toujours du mal à passer. Ne pas être accepté par ses propres parents étaient sans aucun doute le pire sentiment au monde. Il n'était cependant pas là pour se morfondre, le temps ferait les choses, c'était ce qu'il se disait et pour l'heure, il répondait volontiers aux questions de Lukà. "Depuis le lycée. C'est à cette époque que j'ai commencé à me poser de sérieuses questions, puis finalement c'est vite devenu clair comme de l'eau de roche." Répond-il en haussant les épaules. Il le savait probablement depuis bien plus longtemps, mais avait tout fait pour le refouler au plus profond de lui pour se plier aux traditions et croyances familiales. Jusqu'à ce que ce ne soit plus possible. "J'avoue que je suis pas encore complètement à l'aise avec ça malgré tout, même vingt ans plus tard." Le fait que ses parents avaient si mal réagi quand il leur avait annoncé la nouvelle n'aidait en rien. "Mais bon, c'est moi et donc petit à petit j'apprends à l'accepter." C'est un work in progress comme on dit.
Même si tu n'as pas connu ton père, tu es loin d'avoir eu une enfance malheureuse. Ta mère a toujours tout fait pour que tu ne manque jamais de rien. Ta mère et toi avaient passés de nombreux moments ensemble, tous très agréable. Très vite, tu fais indépendant. Tu as également passé ton enfance et ton adolescence avec les Doherty, tes cousins. La famille, c'est sacré pour toi. Tu n'es pas prêt à les abandonner du jour au lendemain, ni même à quitter Brisbane. Tu es né ici et tu mouras dans cette ville. Depuis que t'es gosse, tu as eu tout un tas d'amis. Certains sont partis après avoir un passage express dans ta vie, d'autres sont restés. Et d'autres encore, comme Sohan, sont en train de faire leur grand retour dans ta vie. La vie a un incroyable sens de l'humour tout de même. À un moment, elle te retire des amis, et quelques années plus tard, elle te les rend. C'est assez drôle d'un certain point de vue. Sohan te connait bien, il se souvient que tu es un mec très maladroit et que, chaque jour, tu te cassais toujours quelque chose de plus ou moins grave. "Nan mais ma pauvre mère .. Jsuis responsable de ses cheveux blancs je pense .. Tant que je restais envie, je pense que ça lui importait peu. Un jour, elle a même fait une blague comme quoi elle allait m'envelopper dans du papier bulle !" Tu éclate de rire. À l'époque déjà, vous en aviez beaucoup ris ta mère et toi. Mieux valait en rire qu'en pleurer de toute façon. "Je me suis rattrapé je pense. Je lui ai offert un weekend en thalasso avec mon beau-père. Elle l'a amplement mérité !" Elever un enfant seul n'a rien de facile, ça l'est encore moins quand son fils se blesse continuellement et sans faire exprès qui plus est. Mais Sohan a raison dans un sens, quasiment tous les soirs, ta mère se faisait un sang d'encre de te voir revenir blessé ou avec des égratignures partout. Vous vous êtes même pris la tête un paquet de fois tous les deux, mais c'est ta mère, tu lui as toujours pardonné rapidement. À la fin, ça en devenait presque une habitude. Le karma, ce n'est pas quelque chose à laquelle tu crois mais il faut bien admettre que t'aurais pu mourir un million de fois déjà. "Faut croire que le destin veut me garder en vie !" Mais pour quoi faire ? Me torturer ? Me faire du mal ? Supporter l'absence de Anna ? Tu ne sais pas pourquoi la vie veut te garder vivant, elle a certainement une bonne raison. Tout comme te ramener Sohan près de toi. "Disons que ça serait gênant d'avoir un doigt en moins. À moins que ça ne soit de la main gauche." Verre à moitié plein, comme toujours. "Mais pour écrire sur l'ordinateur, ça proposerait quelques problèmes. Je m'en sers tous les jours de l'ordi .." t'as déjà eu un doigt immobile durant plusieurs semaines, c'était franchement galère pour écrire sur le clavier ou rédiger un message texte. Le temps a passé depuis que vous vous éloignés Sohan et toi. Il est normal que le jeune homme te pose quelques questions sur toi et ta vie, tout comme tu le fais avec lui. Ce n'est pas la première fois que tu raconte ce qu'il s'est passé avec Anna. À la longue, les mots sortent tout seuls. Tu n'as même plus besoin de réfléchir à quoi dire, à quels mots utilisés. "Compliqué dans le sens où elle est partie y'a six ans, enceinte de six mois et demi .. Je n'ai plus eu de nouvelles depuis sauf une fois, y'a trois ans, par ma cousine qui est la seule dans cette ville à savoir où Anna et mon fils se trouve !" Parler de tout cela à Sohan ne te dérange pas, vous avez toujours été proche et voir que votre lien n'a rien perdu de son intensité, te rend ton sourire. "Mais t'en fais pas, je vais bien. Avec le temps, on apprend à vivre avec !" Tu hausses les épaules. C'est au tour de Sohan de parler de lui et tu as la grande surprise de découvrir que le jeune homme est homosexuel. Tu ne t'y attendais pas le moins du monde mais ça ne te choque pas plus que cela non plus. Sohan est ton ami, s'il est heureux ainsi alors toi aussi. "ah les parents .. on ne choisis pas sa famille.." Tu n'as pas trop à te plaindre, ta mère est assez cool. Si tu lui apprenais que tu aimais les garçons plutôt que les filles, t'es certain qu'elle aurait accepté ton choix. Depuis le lycée ? Donc depuis que vous vous êtes éloignés, tu te sois un peu coupable de l'avoir laissé livré à lui-même et à ses interrogations à ce moment-là. "Pile quand on a commencé à s'éloigner donc .. Jm'en veux un peu tu sais .. J'aurais dû être là pour t'aider, pour t'écouter .." Tu sais que ce n'est pas ta faute, cela dit tu ne peux pas t'empêcher de t'en vouloir. "C'est normal, c'est pas une chose anodine et puis, il y a toujours des gens qui t'emmerderont sous prétexte que t'es différent .." On vit dans une drôle de société quand même. Si certains se disent tolérant face aux différences de leurs pairs, certains vivent encore au moyen âge. "en tout cas, t'es le bienvenu à la maison si tu veux discuter ou juste te changer les idées !" Tu offres, à ton ami, un sourire réconfortant.
Sohan voulait bien croire Lukà quand celui-ci lui dit qu'il était responsable des cheveux blancs de sa mère. Il y avait de quoi et il était certain que n'importe quel parent avec des enfants un peu maladroits et malchanceux devait s'inquiéter bien plus que de raison, à juste titre dans pas mal de cas. Heureusement que la mère de Lukà arrivait aussi à prendre la maladresse de son fils avec une pincée d'humour comme le démontrait l'anecdote que son ami venait de lui raconter et qui ne manqua pas de le faire sourire. "Peut-être qu'elle aurait dû t'enrouler de papier bulles, puis ne jamais te laisser sortir sans casque et sans toute une tonne de protections en tout genre." Rétorque t-il en plaisantant. Ce n'est pas réellement le genre de choses qui auraient été très jouables sur le long terme et en plus de ça, Sohan était persuadé que Lukà aurait quand même réussi à se blesser d'une manière ou d'une autre, malgré tout. Il n'y avait pas de mode d'éviter cette malédiction. Car oui, à ce stade, ça relevait presque de la malédiction et pas simplement de la maladresse ou de la malchance. Il fallait voir les choses en face. "J'crois qu'il y a pas meilleur cadeau pour t'excuser de l'avoir fait stresser toute ta vie que de lui payer un week-end en thalasso pour se détendre. C'était bien pensé, ça m'étonne pas qu'elle ait apprécié." C'était très réfléchi comme cadeau. "Le destin t'as choisi pour te faire tester tous les mauvais plans possible, c'est pour ça qu'il t'épargne faut croire." Qu'il lui répond en plaisantant. Car effectivement, jamais il n'avait semblé avoir été en danger de mort. Du moins, pas à l'époque où Sohan le fréquentait. Il ne savait pas ce qu'il s'était passé pour Lukà pendant la vingtaine d'années durant lesquelles ils ne se sont pas vus. Peut-être l'australien avait il passé plusieurs années dans le coma, entre la vie et la mort. Sohan n'aurait aucun moyen de le savoir. Cependant, Lukà était là, devant lui et bien vivant et avait donc déjoué une nouvelle fois l'embûche que le destin avait mise sur son chemin. Avec un peu de sang versé, certes, mais rien de bien grave, ce qui était le plus important. "Oh tu sais, tu écrirais comme les vieux tu sais, ils utilisent qu'un seul indexe. Les deux pour ceux qui s'en sortent le plus. C'est plus long, mais ça t'empêcherait pas d'écrire pour autant." Lui répond-il en plaisantant avant d'ajouter "Tu bosses dans quoi du coup pour te servir d'un ordinateur quotidiennement ?" il y avait tellement de métiers qui nécessitaient l'utilisation d'un PC qu'il était compliqué de deviner.
Ils abordent un peu plus la vie privée. En un vingt ans, il s'en est passé des choses pour l'un comme pour l'autre. Sohan est plus que surpris de ce que lui raconte Lukà. Cette histoire avec sa copine qui l'a quitté alors qu'elle était enceinte, avec qui il n'a plus aucun contact. Ca paraît tellement surréaliste, mais en même temps, il n'a pas de doute quant à la véracité des propos de son ami et il est désolé pour lui. Désolé qu'il ait dû traverser cette épreuve et d'un côté désolé de ne pas avoir été là, même s'ils s'étaient déjà perdus de vue depuis un bon moment à cette époque. "J'suis sur le cul là, tu m'excuseras l'expression. C'est dingue comme histoire. Ta cousine a jamais voulu t'en dire plus ?" Peut-être avait elle fait une promesse à l'ex de Lukà qu'elle ne pouvait se résoudre à trahir. Ou peut-être était-ce bien plus compliqué que ça, il ne pouvait que supposer. Lukà le rassure tout de même, semble relativiser, avec le temps il dit s'être habitué et pour Sohan c'est assez triste à imaginer. Il n'a pas d'enfant, mais si c'était le contraire il n'était pas certain de pouvoir s'habituer à l'absence de sa progéniture. "Ca a pas dû être simple quand même." offre t-il comme réponse. Il ne voulait pas que Lukà minimise la situation. Ce n'était pas rien non plus. Comme la situation avec ses parents. Situation en rupture totale depuis des années suite à l'annonce de son homosexualité. Plus que ses parents, pour Sohan c'est le milieu dans lequel on né qu'on ne choisit pas. Le problème dans le fond, ce n'est pas ses parents, mais toutes les croyances qui sont ancrées au plus profond d'eux et dont ils sont incapables de se défaire. Il y a un chemin à suivre. Quiconque s'en éloigne ne serait-ce qu'un peu est forcément en tord. Le problème était bien plus profond que ses parents malheureusement. "Oué à peu près à cette époque. C'est vraiment au lycée que j'ai commencé à questionner un peu tout ça, le début d'acceptation ça a été bien plus tard quand même." Rare était les personnes qui savaient au lycée et il a réellement commencé à accepter la situation en entrant à l'université, acceptation, toujours en phase d'acheminement. "Oh tu sais je suis pas sûr que j'aurais osé t'en parler à cette époque. J'aurai plutôt tout nié en bloc." Il avait eu énormément de mal à en parler à Hassan à l'époque, avait repoussé l'échéance pendant des semaines avant d'oser lui avouer, à demi-mots. "Le plus gros problème c'est moi-même étrangement. J'ai pas vraiment eu à faire face à une quelconque haine ou à un quelconque jugement de la part des autres, à part mes parents j'entend." Peut-être était-ce parce qu'il passait relativement inaperçu quand il était au lycée et qu'à l'université, il était plutôt vu comme un geek avant tout, mais il n'avait pas réellement eu à affronter l'homophobie personnellement. Il ne s'en plaignait pas et savait qu'il était d'ailleurs plutôt chanceux. "Avec plaisir pour l'invitation ! Je manquerai pas de passer, je pense qu'on a de quoi se raconter des choses pendant des heures. D'ailleurs, tu joues toujours aux jeux vidéos ? On pourrait probablement se faire une partie, comme au bon vieux temps, voir si tu t'es amélioré ou si je te mets toujours la pâtée." Propose t-il pour le taquiner.
Ta mère, tu l'adore. Tu l'as toujours énormément respecté et tu as tout fait afin que cette dernière soit fière de toi. Lorsqu'elle a découvert ton alcoolisme, elle fut certainement un peu déçue de te savoir dans cet enfer. Elle ne t'as pas lâchée, elle t'as tenue la main et t'as aidé à t'en sortir. Tout comme ta cousine ou ton meilleur ami et même Anna. Tu as été pas mal entouré. T'aurais bien aimé que Sohan soit présent lui aussi mais apparemment, la vie a voulu vous séparer. Elle vous a éloigné pendant une bonne dizaine d'années l'un de l'autre. Tu n'as aucune connaissance de savoir par où il est passé durant cette période, il s'est battu contre lui-même et ces démons d'après ce qu'il vient de te dire. "Je suis certain qu'elle en aurait été capable !" Affirmes-tu en imaginant bien ta mère te mettre une trentaine d'épaisseur afin que tu ne te casses rien. Jusqu'à tes dix ou douze ans, elle ne disait rien, tous les enfants se sont tous déjà fait mal au moins une fois. Mais toi, c'était récurrent. Quasiment tous les jours tu revenais avec une blessure de guerre, comme tu aimais les appeler. Ça ne faisait rire que toi. Ta mère était désespérée en te voyant revenir avec différentes égratignures, écorchures ou autres. "Elle a pris conscience de mon cas désespéré le jour où je suis rentré à la maison, le bras dans le plâtre. Crois-moi que je n'ai jamais plus essayer de faire le poirier sur un banc après ça !" Tu éclate de rire. Sur le moment, cela n'avait rien de drôle. En y repensant aujourd'hui, plusieurs années plus tard, tu ne peux t'empêcher d'en rire. Tu t'es quand même bien rattrapé en lui offrant ce séjour de relaxation et de détente "Elle l'a bien méritée. Elle m'a élevée et je sais que j'étais pas un gosse facile." Ne serait-ce qu'avec toutes tes maladresses mais aussi à cause de ses sois-disant amis qui te faisaient faire ce qu'ils voulaient de toi. La plupart de tes maladresses étaient dû à ces mecs, prêts à tout pour t'humilier. À l'époque, tu ne disais rien. Tu pensais que tout cela était normal, aujourd'hui tu regrette tellement d'avoir agit de la sorte avec eux. La manière dont Sohan décrit ta maladresse et le fait que sois encore en vie aujourd'hui te fait bien rire. Il n'a pas tort, tu as quasiment tout vécus, tu connais désormais tout les pièges à éviter. Un bien pour un mal, le jour où tu aura enfin ton fils avec toi, tu pourras le mettre en garde et lui dire de ne pas surtout pas faire tout ce que ses amis lui demandent de faire. "ça a au moins un avantage, je pourrais toujours dire à mon fils de faire attention où il met les pieds plus tard." D'un coup, tu te stoppes net. Tu n'as pas encore parlé du fait que tu es un fils à ton ami. Tu viens de l'aborder à moins qu'il n'est rien entendu, cela va susciter la curiosité de Sohan. Il va donc falloir que tu lui parles d'Anna, du fait qu'elle soit partie enceinte de six mois et demi et qu'elle t'aie privée de ton fils depuis sa naissance, il y a six ans. Ton coeur s'emballe et ta respiration se fait plus courte. Tu n'ajoute rien, attendant que le jeune homme te pose ces questions que tu redoute déjà tant. "J'ai créé ma propre maison d'édition. Jbosse beaucoup par mail avec les différents auteurs que je publie ou avec l'imprimerie, pour passer les commandes." Ton ordinateur contient toute ta vie, aussi bien la vie privée que la vie professionnelle. Le jour où il viendrait à rendre l'âme, tu serais bien triste et totalement perdu. Heureusement que tu sauvegarde régulièrement l'entièreté de tes données sur des disques durs externes. Finalement, tu viens aborder l'histoire d'Anna et de Lukà. Tu lui raconte et à mesure que les mots sortent de ta bouche, tu sens ton coeur se serrer dans ta poitrine. Ça a beau remonter à six ans, tu as toujours aussi mal qu'à l'époque. La douleur semble s'estomper petit à petit. Tu confies même à ton ami que ta cousine savait mais qu'elle a toujours refusé de dévoiler l'endroit où Anna et votre fils se trouvaient. "Non .." Tu hausses les épaules. "Je lui en veux pas .. Elle était proche d'Anna, jsuis contente que mon ex ait quand même pu être soutenu durant cette période.." Tu lui en a voulu à ta cousine, au début, durant les premières semaines qui ont suivis cette révélation mais c'est ta cousine. Tu n'as déjà pas une grande famille, tu ne vas pas prendre le risque de perdre l'un d'eux pour un mensonge. "Pas facile c'est sûr. On début, t'as l'impression de crever mais à force, on s'habitue.." Six ans après, l'absence devient légèrement plus supportable même si voir des hommes avec leur fille ou fils dans la rue c'est difficile encore aujourd'hui. C'est à ton tour de découvrir le plus gros secret de ton ami. Jamais tu n'aurais pu imaginer que Sohan puisse être attiré par les hommes mais après tout, est-ce que cela est-ce réellement important ? Tant qu'il est heureux, c'est tout ce qui compte. Personne ne devrait être étonné de découvrir qu'un de ses proches préfèrent les perosnnes du même sexe que lui. "Ouais je me doute bien." Te contentes-tu de te répondre. Ça date de l'époque du lycée, à peu près à l'époque où vous avez cessez de vous fréquentez. "Oh je comprends mieux. Mais t'es heureux aujourd'hui ? Jveux dire même si tes parents ont dû mal à l'accepter, le plus important c'est toi. Ils finiront bien par accepter que tu es ainsi .. différent.." T'aime pas trop employé ce terme. Différent ça ne veut rien dire. Malheureusement, la société dans laquelle nous vivons nous dit que pour être heureux et normal, il faut avoir une famille (un homme et une femme de préférence), des enfants, un chien et une grande maison. Ce n'est que des mensonges. Être heureux, c'est dans la tête tout simplement. "ça fait un moment que j'ai pas joué, jsuis sûrement un peu rouillé mais pourquoi pas ouais. Tu passes quand tu veux. Préviens quand même, que je sois pas en train de travailler au bureau ou en train d'embêter ma pauvre cousine !" Jouer aux jeux vidéos seul n'a aucun intérêt. De temps en temps, tu fais quelques parties avec ta cousine ou Matt mais il est difficile de concilier vos emplois du temps de vos vies d'adultes responsables.
Bon d'accord, il fallait bien avouer que si les péripéties de Lukà enfant étaient principalement liées à sa malchance, certaines étaient fortement liées à sa bêtise, comme cette fameuse fois où il avait tenté de faire le poirier sur un banc. Sans grande surprise, ça ne s'était pas bien fini du tout et une fois de plus le garçon avait eu le droit de faire un tour par l'hôpital. "T'aurai même pas dû le faire pour commencer." Lui répond-il en riant. Après tout, même quelqu'un qui n'était pas maladroit aurait pu se casser les dents en tenant une telle figure, alors il était compliqué d'imaginer comment Lukà avait pu penser, ne serait-ce qu'une seule seconde que c'était une bonne idée et qu'il réussirait son coup sans se blesser. S'il ne s'était rien cassé, il aurait probablement utilisé toute sa chance de l'année en une seule fois. Sa mère avait bien mérité sa thalasso, même si ça ne compensait pas forcément pour des années de soucis, c'était un très beau clin d'oeil de la part de Lukà. Comme un moyen de lui montrer qu'il savait tout le soucis qu'elle avait pu se faire pour lui quand il était plus jeune. Ca le fait sourire quand il dit ensuite qu'il pourra conseiller son fils. C'était une bonne chose. Il avait toutes les cartes en main pour le mettre en garde, pour lui éviter de se casser tous les os de son corps un par un. Pour lui éviter de faire toutes les bêtises qu'il avait pu faire lui-même. Quoi que, Sohan avait été enfant lui aussi et même s'il avait toujours été du genre discret et à se tenir à carreaux, il avait eu ses moments où il n'en faisait qu'à sa tête. Ou quand on lui disait non, il n'avait pas envie de l'entendre parce qu'il avait une idée derrière la tête et n'en démordait pas. Ce qui ne voulait donc pas dire que parce que Lukà avait eu l'occasion d'apprendre de ses erreurs que son fils l'écouterait forcément et ne reproduirait pas le même schéma. "T'as espoir d'arriver à le retrouver ?" lui demande t-il, même si c'était sans doute une question un peu délicate. Sohan hoche la tête quand Lukà lui parle de son travail. Un travail qui ne l'étonne pas plus que ça finalement, le gamin que le Khadji connaissait avait toujours aimé les livres. Autant que lui aimait les ordinateurs. Comme quoi, malgré les années, ils n'avaient pas tant changé que ça. "Effectivement, t'as besoin de tes mains, à moins d'engager quelqu'un à qui tu dis quoi faire pendant que toi t'es assis dans ton canapé." C'était une solution, cependant, c'était plus coûteux et probablement moins efficace que de tout gérer soi-même. D'où l'importance de garder ses mains en bon état. Ou à minima, dans un état lui permettant d'utiliser son ordinateur.
Finalement, il lui parle un peu plus d'Anna, son ex, celle qui l'a laissé en plan alors qu'elle était enceinte. Lukà lui explique que sa cousine n'a jamais voulu lui dévoiler où se trouvait la jeune femme. C'était tout à son honneur, elle tenait sa parole envers son amie, cependant, Sohan pouvait comprendre à quel point cela pouvait être compliqué pour Lukà, de savoir qu'il avait un fils dans la nature, peut-être même à seulement quelques kilomètres de lui et ne rien pouvoir faire. Ce n'était pas simple. Il y avait visiblement des ruptures plus compliquées que d'autres. Comme dit Lukà, on s'habitue à l'absence. Sohan hoche la tête, il comprend. Après tout lui aussi à eu une rupture douloureuse. Les circonstances étaient bien différentes et sur le papier ils se sont quittés d'un commun accord, mais ça ne voulait pas dire que s'en était moins douloureux. Cependant, maintenant oui, il est heureux et c'est un sourire qui se dessine sur les lèvres, comme pour appuyer ce qu'il s'apprête à dire. "Oui oui bien sûr. J'aurai pas pu continuer toutes ces années à vivre dans le mensonge de toute façon. A un moment, tu satures et tu ne peux plus faire semblant." Répond-il à Lukà. Malgré le fait que ses parents n'acceptent pas ce détail faisant partie intégrante de lui. "Je te cache pas qu'il y a eu des moments où j'ai presque regretté et où je me disais que j'aurai peut-être mieux fait de rien dire, au début surtout, mais maintenant je sais que c'était ce qu'il fallait faire." Car de toute façon, il n'aurait pas pu le cacher éternellement, il était même persuadé que sa mère avait toujours su, mais n'avait jamais voulu voir la vérité en face. "Je sais pas s'ils accepteront un jour en revanche." Répond-il, surtout si on prenait en compte la réaction plutôt virulente de sa mère lors de leur dernière rencontre. Le chemin était encore extrêmement long. Lukà lui dit qu'il n'a pas joué aux jeux vidéos depuis un moment et ça, c'est presque un sacrilège pour Sohan qui ne mettrait ses consoles de côté pour rien au monde. "Faut remédier à ça alors ! J'suis sûr qu'on trouvera un moment pour faire ça." Ils étaient probablement aussi occupés l'un que l'autre, mais il y avait bien un moment où ils seraient libres tous les deux.
Peu de gens peuvent se vanter de te connaitre dans cette ville. Sans compter les membres de ta famille, les personnes te connaissant un tant soit peu peuvent se compter sur les doigts d'une main très largement. Il t'es difficile d'accorder ta confiance à qui que ce soit, surtout depuis le jour où ton ancienne petite amie t'as abandonné du jour au lendemain. Sohan te connait, il sait comme tu étais lorsque vous n'étiez que deux adolescents. Il t'as déjà vu te faire manipuler par ces garçons se disant être tes amis. Honteusement, tu baisses la tête fixant tes pieds le temps d'un instant. Te rappeler l'adolescent que tu as été ne t'enchante pas, ça t'effraie et te prodigue des frissons dans la colonne vertébrale. "Tu sais bien comment j'étais .. Ils auraient pu m'dire de sauter du haut d'un pont, je l'aurais fait .." Avoues-tu très honteusement à ton ancien camarade. Tu as honte de toi, honte d'avoir été si influençable. Tu pensais que ces amis étaient tes amis, en réalité il n'en était rien. Jeune et con, voici ce que tu étais. Offrir cette cure en thalasso à ton mère était un très beau cadeau, c'était également un moyen de lui dire merci. Merci de toujours avoir été là pour toi, de t'avoir eu et élevé toute seule. Elle a amplement méritée ce cadeau de ta mère et ces années de bonheur avec ton beau-père depuis dix-sept ans. C'est un homme bien, tu le considère presque comme ton père, c'est dommage qu'il n'ai jamais eu d'enfants t'es certain qu'il aurait fait un excellente papa. Toi, t'en as un enfant. Malheureusement, ton ex petite amie t'empêche de le voir. C'est tellement frustrant de savoir ton fils quelque part dans ce pays et toi, t'es là, impuissant. Tu pourrais aller le chercher et le ramener avec toi. Sydney est une ville aussi peuplée que Brisbane, ça sera comme chercher une aiguille dans une meule de foin. "Je ne sais pas .." Dis-tu à ton ami, le ton de la voix plus calme et plus doux. "J'essaie de garder espoir .. Certains jours sont plus difficiles que d'autres.." Avoues-tu à ton ami. Des fois, t'en parle à ta mère ou à ta cousine. Ou bien à Matt, l'un de tes meilleurs amis. T'es bien conscient que ça a été difficile ces dernières années de te redonner le sourire, personne ne peut savoir à quel point tu as souffert. Aujourd'hui encore, la douleur est toujours présente. Moins forte, moins prenante mais elle est toujours là. "Ah non ! Je déteste faire faire mon travail par quelqu'un. J'aurais sûrement besoin d'aide un jour ou l'autre, ne serait-ce pour m'aider à gérer mes plannings de rendez-vous mais je déteste ça. Je ne sais pas absolument pas déléguer les tâches à faire !" Tu as horreur de rester sans rien faire. Tu ne critique aucunement les gens qui délèguent ce qu'ils ont à faire à leur entourage mais toi, ce n'est pas ton truc. Déranger les autres, même si on te demande de le faire, ça ne te ressemble pas. Tu préfère être débordé plutôt que de faire faire à tes proches ce que tu as à faire. Comme si vous ne vous étiez jamais éloignés l'un de l'autre, tu viens te confier à Sohan. La conversation parle principalement d'Anna, de ce qu'il s'est passé pour que tu en vienne à te retrouver dans une telle situation. Aussi bizarre que cela puisse paraitre, ça te fait du bien de parler de tout ça. Surtout à lui, à un vieil ami du passé. C'est à son tour de se confier et ce que tu viens d'apprendre à son sujet, tu ne t'y attendais pas le moins du monde. "T'as pas à regretter, loin de là. T'es comme tu es, c'est pas comme si c'est toi qui avait choisi. Ça faisait partis de toi depuis toujours, ça a juste mis du temps à être dévoiler." Tu tentes tant bien que mal de rassurer ton ami. Tu n'as jamais su trouver les bons mots pour réconforte tes proches, t'as toujours cette peur immense d'être à côté de la plaque, de les vexer. Un comble pour quelqu'un qui bosse dans le monde des livres et des mots quand même. Après ce petit débriefe de vos vies respectives, la conversation prend une tournure plus légère. "Tant pis pour eux. Le plus important c'est que toi, tu te sentes bien !" On dirait un peu le genre de phrases que tu as pu lire dans un bouquin. Tu les as sans doute lu quelques part à un moment donné mais là, ces phrases sortent tout droit de ton coeur. Personne, même pas les parents, a le droit de dire ce qui est bien pour vous. "Tu passes quand tu veux à la maison. J'habite à Bayside, ça devait être dans cette maison qu'Anna et moi aurions dû élever notre fils .." Tu te demandes encore pourquoi tu as gardé cette maison. Elle ne fait que rappeler ton passé, peut-être serait-il temps de tourner enfin la page et se débarrasser de cette bride de ton passé une bonne fois pour toutes. "D'ailleurs, si Yasmine veut venir aussi, elle est la bienvenue !" Cette dernière a été la soeur de Sohan à tes yeux depuis le début, néanmoins, tu l'as toujours beaucoup apprécié la demoiselle. Dommage que vous n'ayez jamais vraiment pris le temps de discuter tous les deux.
Sohan hoche la tête. Oui il savait comment était Lukà quand ils étaient adolescents. Il avait vu le jeune garçon influençable se laisser entrainer petit à petit par des jeunes peu recommandables. C'était une des principales raisons de leur éloignement à cette époque. Sohan ne se retrouvait pas dans ce milieu-là. Il était un adolescent rangé. Presque dans son monde, il ne cherchait pas à se montrer, il ne cherchait pas à être populaire non plus. Pour lui à cette époque, il y avait que les ordinateurs et ils pouvaient passer des heures à jouer. Il avait vu Lukà changer ou tout du moins, se modeler pour plaire à ses nouveaux amis. Il n'en avait pas fallu plus pour qu'ils perdent de vue petit à petit. Sohan restait devant ses écrans et Lukà dérivait. C'était comme ça qu'il avait vu les choses à l'époque et ça l'avait peiné au début de voir qu'il ne partageait finalement plus grand-chose avec son ami, puis il avait fini par se faire une raison. Il s'était fait de nouveaux amis lui aussi et il avait continué son chemin. C'était la vie. Des rencontres, des gens qui se séparent et qui suivent leur propre voie. Parfois les chemins se recroisent, comme aujourd'hui et c'est l'occasion pour eux de se remémorer le passé avec une pointe de nostalgie. C'est aussi l'occasion de rattraper le temps perdu et de se renseigner sur ce qu'ils ont manqué dans la vie de l'autre. En vingt ans, il s'en passe des choses. Des couples se font et se défont, des enfants naissent. Ca pourrait être joyeux, mais ça ne l'est pas forcément. Comme pour Lukà, père d'un fils qu'il n'a jamais vu. Un fils dont il ignore tout, même le lieu de résidence. "Je sais me débrouiller avec un ordinateur entre les mains, donc si t'as besoin d'aide, je peux peut-être retrouver sa trace." Lui dit il et il ne sait pas réellement pourquoi il propose ça. Il avait aidé Nino à retrouver son frère, mais ce n'était pas pour autant qu'il était certain d'avoir fait le bon choix. Surtout quand il s'était servi des logiciels du commissariat. Il s'était juré que ce n'était l'affaire que d'une seule fois et qu'il ne le referait plus. Nino avait su le convaincre, avait su le toucher et c'était pour ça qu'il avait accepté. Il proposait à Lukà, parce que c'était son ami et parce qu'il était question de retrouver son enfant. Parce que s'il avait bien pu faire une entorse à ses propres règles pour un inconnu, il pouvait faire une entorse pour un vieil ami.
Sohan ne peut s'empêcher de rire quand Lukà lui dit qu'il ne peut pas déléguer son travail. Il se reconnait bien là-dedans parce qu'il est comme ça lui aussi. Il ne considère pas son travail comme un poids et prend plaisir à le faire. Il aime savoir qu'il va être utile et ne rien faire au travail serait un réel supplice pour lui qui ne pourrait s'empêcher de questionner l'utilité de sa présence. "Je te comprends ! Après si tu te retrouves débordé de travail, tu seras peut-être content de déléguer. Ne serait-ce que pour pouvoir tenir tes délais." Parce que oui, tout faire seul c'était bien beau, mais à un moment donné il fallait savoir être raisonnable et demander de l'aide. Il n'y avait pas de mal à ça et ça ne reflétait pas une quelconque feignantise. "Oh t'en fais pas je regrette pas. De toute façon c'est pas un choix donc il n'y a rien à regretter, il faut juste l'accepter à 100% et ça c'est en cours." Qu'il répond à Lukà. Il ne regrettait pas d'avoir dévoilé son homosexualité. Il était bien plus heureux de ne pas avoir à se cacher, ou de ne pas avoir à mentir. Il avait fait la paix avec ça depuis longtemps maintenant, les seuls qui campaient encore sur leur position étaient ses parents. "C'est sûr que si j'avais le choix je reviendrai pas en arrière, mais je peux pas nier que ce soit une déception que mes parents ne se fassent pas à l'idée." Parce que la famille avait toujours été extrêmement importante pour Sohan et que ne pas avoir ses parents de son côté était pesant pour lui malgré tout. "Bayside, je note ! File moi ton numéro comme ça je t'enverrai un sms avant de passer, histoire de pas débarquer alors que t'es ailleurs." Lance t-il avant de tendre son téléphone à Lukà pour qu'il s'enregistre. "Je sais pas trop si c'est vraiment son truc à Yasmine et puis il est assez prise en ce moment ... Tiens, quand on parle du loup." Dit il en récupérant son téléphone pour y voir un message de sa soeur. "Ah bon on s'est mal compris, elle m'attend à une autre sortie." Dit il à Lukà "J'vais devoir te laisser du coup, mais ça m'a fait plaisir de te voir." Ajoute t-il.