★ Carlisle Bishop & Mina Farrell (#3) Était-il possible de foutre en l’air une vie en quelque secondes ? La réponse est bien entendu oui et Mina venait d’en faire les frais. Elle ne se rappelait plus du moment exact où elle avait appuyé sur la gâchette. Ce moment où elle avait pensé que la vérité qui caresserait ses lèvres viendrait tout raser sur son passage. Déjà un mois qu’elle jouait un double jeu avec sa famille, ses proches et son petit-ami. Des semaines qu’elle avait dû se forcer à faire semblant. Dans son cas, ce n’était pas difficile, elle avait l’habitude de ne pas être tout à fait elle-même. Au point qu’elle ne savait meme plus qui elle était réellement. Les choses étaient pourtant différentes cette fois-ci, il ne s’agissait plus d’elle seulement. Ils étaient au minimum trois dans cette histoire. Au mieux, elle n’allais gâcher que la vie d’un homme, un type qui finirait par s’en remettre. Un homme pour qui elle aurait été capable de tout et qui lui imposait désormais de faire un choix. Le choix était rude, c’était lui ou elle. Mina ne voulait pas de ce bébé, elle n’était pas prête à élever un enfant et encore moins à son âge. Ce qu’elle aimait par-dessus tout, c’était profité de sa vie et mère lui imposait de nouvelles responsabilités qu’elle n’était pas totalement capable d’assumer. Si sa raison lui hurlait d’aller retirer cette créature qui grandissait en elle, son cœur repoussait l’échéance chaque jour. Elle s’était rendue plus d’une fois chez son gynécologue, et plus d’une fois elle avait pris place sur le fauteuil d’examen, sa fleur offerte au médecin dans l’espoir de se débarrasser enfin de la source de ses soucis. Mais c’était trop, elle n’avait pas pu. Elle n’était pas capable de lui faire ça. Theo se tenait face à elle, l’air figé comme si le temps s’était tout d’un coup arrêté autour d’eux. Il espérait surement qu’il ne s’agisse d’une mauvaise blague de sa petite amie. Il attendait désespérément la chute, un sourire, un rire, ou de quoi le faire sortir de ce cauchemar. Malheureusement les larmes de la jeune femme venait solidifier ses aveux. Mina était enceinte. Si sa silhouette ne trahissait pas encore sa grossesse, la chose qui se développait en elle était bien réelle. Elle savait qu’en avouant ses tromperies Theo, cela ne passerait plus. La colère avait pris le dessus, les non-dits avaient éclatés sans qu’aucun ne réussisse à faire marche arrière. Il la détestait et elle le détestait encore plus pour tout ce qu’il avait osé lui dire. Elle n’avait eu le temps que d’emporter un malheureux sac avant d’être chassé de son appartement comme une moins que rien. Le retour au source n’était pas envisageable et à moins de passer la nuit à l’extérieur, Mina ne voulait pas prendre le risque d’être vu dans cet état par quiconque. C’était clairement le genre d’histoire dont les paparazzis s’empareraient et elle n’était pas sure de vouloir supporter un autre scandale. Vêtu d’un simple pull à capuche, elle arpenta les rues très prisées de Sandgate. Elle avait marché des heures et des heures, le regard vidé en essayant d’imposer le silence dans son esprit. Ses jambes l’avaient emmené à une adresse précise. Un endroit qu’elle ne connaissait que trop bien pour avoir jadis menacé l’ex-femme de Carlisle de tout lui révéler. Elle observa pendant de longues minutes l’une des fenêtre de sa maison éclairée. Il devait être chez lui. Pensait-il réellement ce qu’il avait dit la dernière fois qu’il l’avait croisé. Jusqu’où était-il prêt à aller pour elle. Il lui demandait un grand sacrifice mais la vraie question était de savoir s’il en aurait fait de même pour elle. Et puis il lui manquait ! Depuis qu’il avait quitté la compagnie, elle se surprenait à continuer à le chercher du regard. Malgré tout ce qu’il pensait en mal d’elle, son cœur l’avait choisi lui. Trempée jusqu’aux os, elle décida finalement de toquer espérant trouver l’hospitalité pour la nuit chez lui et beaucoup de réconfort. Elle eut un moment d’hésitation avant d’appuyer finalement sur la sonnette plusieurs fois. « Hey… » souffla t-elle lorsqu’il apparut dans le cadran de sa porte. Elle se sentait pathétique, perdant toute son assurance face au pilote. Il avait une Mina dans toute sa vulnérabilité, grelotant de froid à cause de la flotte qu’elle avait reçu sur le chemin…
Depuis que Carlisle Bishop avait renoncé à son poste de pilote chez Cathay Pacific, ses journées ne manquaient pas d’animation. Comme il en avait convenu avec son père, il s’était impliqué dans l’entreprise familiale. Il s’était plié aux exigences que cela impliquait : des horaires de bureau, des réunions de direction, des déjeuners d’affaire interminables, des relations fausses et à dessein. Il détestait ça, Carlisle. Mais il s’y pliait, bon gré mal gré, afin de faire plaisir à son géniteur. Et le pire dans tout cela ? Il n’était pas mauvais à cet exercice. Il déposa l’épais dossier qu’il avait ramené du bureau sur la table basse du salon, et s’installa sur son canapé. Bon sang, ce qu’il aurait aimé pouvoir se détendre devant un film, ou aller boire un verre dans un bar de Brisbane ! Mais non il était bloqué chez lui, et devait réfléchir à une stratégie de développement pour un futur produit qui sera commercialisé au moment de Noël. Il retira sa cravate, les deux premiers boutons de sa chemise, et se pencha sur un dossier dont, en réalité, il se fichait éperdument.
Il avait passé deux bonnes heures sur son dossier, et considéra qu’il était grand temps de prendre une pause. Il récupéra son paquet de cigarettes, qui gisait sur la table du salon, et se dirigea vers sa terrasse pour s’en griller une. Il fut sorti de sa torpeur lorsqu’il crut entendre quelques coups, frappés à sa porte d’entrée. « Carmina ? » L’ancien pilote ne chercha pas à masquer sa surprise. Il y a quelques semaines de cela, l’héritière était venue à sa rencontre, et elle avait bouleversé le cours de son existence. Il y a quelques semaines, elle l’avait obligé à se projeter là où ses espérances n’avaient jamais osé le mener. « Ne reste pas dehors, entre. » Souffla-t-il. Il s’effaça de devant sa porte, l’invitant indirectement à entrer. Elle ne se fit pas prier – le temps n’était pas propice à des discussions sur le palier. La pluie tombait depuis des heures, et un vent glacial soufflait. Ils se regardèrent pendant de longues secondes, sans qu’aucun des deux n’ose briser le silence. Carlisle, quand il était en compagnie de l’héritière Farrell, marchait sur des œufs. Seul un frisson, clairement visible, le fit sortir de sa torpeur. « Suis-moi. » Ordonna-t-il d’une voix claire et dénuée de toute intention. Il comptait bien avoir une explication avec elle, à savoir la raison pour laquelle elle s’était présentée chez lui – tardivement, en pleine semaine, et alors qu’elle n’avait pas daigné donner le moindre signe de vie depuis qu’elle lui avait avoué être enceinte. Mille questions brûlaient les lèvres de l’héritier Bishop, mais il n’en formula aucune. Il ouvrit machinalement la porte de sa chambre, et alla directement dans la salle de bain attenante. « Tiens. » Dit-il en lui tendant une serviette éponge qu’il venait de sortir d’un placard. Il fit demi-tour, et se dirigea vers le dressing à moitié vide, qu’il partageait autrefois avec Amal. Il soupira de frustration en constatant que son ancienne fiancée avait fait place nette, comme pour effacer dix ans de vie commune. Il secoua la tête, et choisit finalement de prendre l’un de ses propres pulls. Noir, pour la sobriété. Il frappa quelques petits coups à la porte de la salle de bain, et interpella l’Australienne. « Carmina ? » Il laissa s’écouler une poignée de secondes, et lui tendit le vêtement en prenant soin de ne pas jeter un coup d’œil. « Navré, mais je n’ai pas mieux en stock. » Mais à la réflexion, c’était peut-être mieux comme ça. L’héritière aurait probablement refusé d’enfiler les vêtements d’Amal, même s’ils étaient signés par de grands créateurs. « Je t’attends au salon. » Commenta-t-il, après qu’elle se soit emparée de son pull. Il s’éclipsa sans attendre, s’offrant quelques ultimes secondes de répit. Dans quelques instants, son avenir pourrait basculer. Dans quelques instants, ils devraient se confronter l’un à l’autre.
Il retourna au salon, et jeta un coup d’œil sur les papiers qu’il avait éparpillé sur la table basse. Vraisemblablement, sa soirée travail tombait à l’eau – mais il ne s’en plaignait pas. Il avait une bonne excuse pour tout remettre au lendemain. Il ressembla ledit dossier, et releva les yeux lorsqu’il constata qu’une silhouette s’avançait vers lui. Il déglutit en la voyant, simplement vêtue de son pull. Cela lui fit une étrange impression, mais il préféra ne pas s’attarder dessus. « Tu… Tu veux boire quelque chose, peut-être ? » Demanda-t-il, conscient qu’il ne cherchait qu’à gagner du temps.
★ Carlisle Bishop & Mina Farrell (#3) « Carmina ? » elle avait honte. Un moment, elle pensa rebrousser chemin mais pour aller où. Mina perdait peu à peu le contrôle de sa vie et elle était pleine d’incertitude de ce qu’il allait lui arriver par la suite. Elle n’avait plus revu Carlisle depuis qu’il avait quitté l’entreprise. Elle n’avait pas chercher à le contacter. Elle ne se sentait pas prête à lui re-parler de sa grossesse. Elle ne voulait pas faire de mauvais choix, ni de déçus. Carmina avait longtemps hésité à ce qu’elle allait faire. Elle avait même consulter sa sœur qu’elle n’avait plus revu depuis des années pour lui demander de l’aide. C’était la première fois qu’elle se retrouvait dans cette situation. Elle se sentait désemparée, pire elle s’était rendue compte qu’elle n’avait personne pour la soutenir. Elle venait de perdre son petit-ami. Une relation sans queue ni tête mais à laquelle elle avait tenue pour les strass et les paillettes. Elle n’avait pas non plus d’amis, personne à qui elle pouvait se confier sur son échec. Elle était toute seule. « Ne reste pas dehors, entre. » elle obéit sans un mot. Elle balaya rapidement l’endroit des yeux. C’était donc là où il vivait. Une jolie maison, décorée avec goût. Elle pouvait clairement deviner la signature d’Amal. Néanmoins, elle n’était pas là pour juger l’habitat de l’ex-pilote. Aussitôt son regard se posa sur lui, sans qu’elle ne réussisse à sortir aucun son de sa bouche. Elle ignorait par où commencer. Elle n’avait pas préparé son discours, elle n’avait aucune idée de ce qu’elle pouvait bien lui dire. Après tout, peut-être qu’elle n’avait rien à dire. [color:74d3=##33ccff]« Suis-moi. » fut-il le premier à dire. Elle n’eut d’autre choix que d’obéir une nouvelle fois, se murant dans un silence qu’on ne lui connaissait pas. L’occasion de nouveau de découvrir de nouvelles pièces de sa demeure. Ce n’était pas aussi luxueux que chez elle, mais il y avait du niveau. Elle attrapa la serviette qu’il lui tendait, comme s’il avait senti qu’elle était à deux doigt de l’hypothermie. Lorsqu’il l’abandonna dans sa somptueuse salle de bain, elle retira ses vêtements froids au sol pour se glisser dans une eau brulante. Elle ne chercha pas à baisser la température et, l’eau chaude qui venait fouettait sa peau lui faisait grand bien. « Navré, mais je n’ai pas mieux en stock. » la voix de Carlisle lui sembla lointaine et elle n’aperçut que brièvement sa silhouette à cause de la buée dispersée dans toute la pièce. Elle ignorait combien de temps elle était restée là sous l’eau. Longtemps, surement, pour ne pas se confronter au futur-père. Elle avait observé un instant le vêtement qu’il avait déposé au préalable. Sérieusement ? Le proverbe ‘la fin justifie les moyens’ prenait soudain tout son sens dans la tête de l’héritière. Dans une autre vie, elle aurait probablement cherché une paire de ciseau dans l’espoir de donner un nouveau sens à cet habit. La jeune femme accordait beaucoup d’importance au style, mais pas ce soir… ce soir, elle avait d’autres choses à régler et sans brancher, elle finit par enfiler le pull qu’il avait gentiment accepté de lui prêter. Sur la pointe des pieds, elle avait traversé les lieux, observant curieusement chaque recoin de la maison. Amal semblait avoir disparu du décor. Il n’y avait plus grand chose qui témoignait de présence féminine dans les lieux. Elle s’arrêta un instant devant un grand miroir où elle pouvait mieux s’observer. Sa mine était toujours fatigué, malgré les injections de botox qu’elle avait pu faire pour corriger ses imperfections. Ses cernes étaient assorti au pull de Carlisle. Finalement, il n’était pas aussi laid que ça, en retroussant les manches, on aurait dit une robe pull. Et puis, ça sentait Carlisle mélangé à de la lessive à la lavande. Doucement, elle s’approcha de lui. Il avait l’air d’être occupé et elle se contenta d’attendre qu’il finisse de ranger ses documents. Elle se demandait bien ce qu’il faisait depuis qu’il n’était plus chez Pacific Cathay. Elle leva sa main timidement pour le saluer : « Salut… » dit-elle lorsqu’il remarqua enfin sa présence. « Tu… Tu veux boire quelque chose, peut-être ? » à vrai dire, elle préférait manger. N’importe quoi tant qu’elle se mettait quelque chose sous la dent. Elle ne se rappelait plus de son dernier repas et depuis que ce foutu bébé grandissait en elle, elle avait l’impression de manger deux fois plus. Poliment, elle préféra décliner l’offre : « Non ça va aller… ». Dit-elle, s’installant sur l’un des sofas face à lui. « J’ai quelque chose pour toi. » dit-elle, après avoir saisi son sac qu’elle avait tantôt abandonner sur le coin de la table basse. Elle en sorti une feuille plier en quatre qu’elle lui tendit. Sa première échographie à laquelle, elle s’était rendue seule alors même que la salle d’attente goupillait de couple heureux. « Je n’ai pas eu le courage d’avorter. » avoua-t-elle simplement, évitant scrupuleusement le regard de l’homme. Au fond, elle avait peur qu’il la trahisse, qu’il faillissent à ses promesses. Il ne serait pas le premier. Ils avaient été plusieurs à abuser de sa crédulité. Malheureusement, il s’agissait de sa vie à elle. Ce n’était plus un jeu et elle ne s’attachait qu’à l’espoir qu’il soit aussi honnête qu’elle le pensait.
Il avait passé de longues minutes à mettre de l’ordre dans ses papiers, mais son esprit était clairement occupé par la présence de l’héritière Farrell sous son toit. Cette dernière n’avait toujours pas fait sa réapparition, mais Carlisle s’attendait à la voir débouler d’un instant à l’autre. « Tu as besoin de quelque chose ? » Demanda-t-il, alors qu’elle refusait poliment le verre qu’il lui proposait. L’Australien marchait sur des œufs avec son interlocutrice, incapable de savoir sur quel pied danser. Il faut dire, la dernière fois qu’ils s’étaient vus remontait à quelques semaines maintenant. Le temps avait passé, et Carmina Farrell n’avait pas daigné lui donner de ses nouvelles. Il était dans l’attente, pourtant. Il crevait d’envie de savoir quelle décision elle avait prise, quel bouleversement ou non allait intervenir dans sa vie. Il espérait de tout cœur que le choix de l’héritière se porterait sur l’acceptation de sa situation, mais il avait des doutes. Elle ne lui avait pas caché ses craintes, ses peurs, ses angoisses. Il avait tenté de la rassurer, au mieux – tout en sachant qu’il s’agissait d’un grand inconnu pour lui aussi. La différence entre eux ne résidait que dans un seul et unique point : la maturité. Lui était prêt à faire ce grand saut, à s’engager pleinement dans cette nouvelle aventure, à devenir père. Pas elle. « Pour moi ? » Répéta-t-il, surpris. Il tendit le bras vers Carmina, et s’empara du morceau de papier qu’elle lui donna. L’héritière avait toujours été bavarde et loquace, mais ce soir, elle se montrait étrangement silencieuse. Cela n’était d’ailleurs pas pour rassurer le fils Bishop, qui n’était pas habitué à ce comportement étrange. Il déplia patiemment le papier, qui était plié en quatre, et l’ouvrit sur un dessin – ou, plus exactement, une photographie. Il écarquilla les yeux sous le coup de la surprise, et observa silencieusement le fœtus qui s’affichait sous ses yeux.
Son index dessina patiemment le contour de ce petit être, qui grandissait paisiblement dans le ventre de sa mère. Carlisle, dont l’émotion se lisait sur chacun des traits de son visage, ne pouvait détacher son regard de ce bout de papier qui lui avait été donné. Carmina Farrell n’en avait peut-être pas pleinement conscience, mais elle venait de lui faire le plus beau des cadeaux. Dans quelques mois, sa vie serait définitivement chamboulée. Dans quelques mois, il pourrait serrer son enfant contre son torse, et l’entourer de tout l’amour dont il aurait besoin pour s’épanouir. « Tu l’as gardé. » Souffla l’ancien pilote à voix basse, alors qu’il reprenait doucement contact avec la réalité. Leurs regards se croisèrent pendant de longues secondes, sans qu’aucun des deux ne formule le moindre mot. « Merci. » Murmura l’héritier Bishop, la voix quelque peu nouée par l’émotion. Il ne savait pas comment réagir autrement. Exulter ? Elle ne l’aurait pas compris. Lui sauter au cou n’était pas de circonstance non plus. Il avait donc opté pour la sobriété, et espérant que cela ne passe pas pour un manque d’intérêt de sa part. « Je peux la garder ? » Demanda-t-il, un peu naïvement, avant de reposer les yeux sur le cliché. Au cas où l’héritière refuserait, il cherchait à mémoriser les moindres détails de l’échographie qu’elle avait accepté de partager avec lui. « Je suis désolé que tu aies eu à vivre cette première expérience seule. » Déclara-t-il, sincèrement peiné pour elle. Choisir de garder l’enfant n’avait pas dû être facile. Se rendre seule chez la gynécologue pour un premier rendez-vous pour une échographie avait dû être une véritable épreuve – Carlisle imaginait aisément que les salles d’attente pullulaient de couples heureux et ravis d’être là. « Tu aurais dû m’appeler. Je serais venu avec toi. » Confia-t-il, sans la quitter des yeux. Parce que contrairement à elle, lui était prêt à entendre tout ce qui devait être entendu. Lui était prêt à prendre ses dispositions. Lui était prêt à élever et aimer cet enfant. « Tu… Tu n’as pas été trop malade ? » Il savait que les premiers mois de grossesse n’étaient pas de tout repos. « Et… Qu’est-ce que tu fais ici, exactement ? » Il n’était pas dupe : Carmina aurait pu l’appeler, lui fixer un rendez-vous dans un endroit neutre pour lui annoncer la nouvelle. Mais elle avait fait tout ce chemin, sous la pluie qui plus est, et elle était arrivée frigorifiée. Cela ne pouvait pas être un hasard.
★ Carlisle Bishop & Mina Farrell (#3) L’état psychologique de la future jeune mère était loin d’être bien. Elle avait passé les jours les plus difficile de son existence. Elle qui avait pour habitude que tout lui soit offert sur un plateau d’argent. Elle avait été seule. Toute seule à devoir choisir entre le fait de garder l’enfant ou de l’avorter tant qu’il était encore temps. Cette seconde option était probablement la meilleure mais également la plus simple lorsqu’on connaissait bien l’héritière. Elle n’avait ni l’âge ni la maturité pour élever un enfant. Il lui arrivait encore de taper du pied lorsque les choses n’allaient pas dans son sens, alors comment pouvait elle gérer quelqu’un d’autre. Pour le bien de tout le monde, elle savait que le mieux à faire était de le retirer. Seulement, elle ne pouvait pas faire ça à Carlisle. Pas après le mal qu’elle lui avait déjà fait. Elle avait longtemps hésité, jusqu’à que ce soit finalement trop tard. Elle ne pouvait plus cacher la nouvelle. Elle s’était soudain découvert une conscience. Mina voulait changer, elle voulait devenir une meilleure personne. Elle était persuadée que Carlisle était ce qui pourrait lui arriver de mieux. Elle qui avait pourtant l’habitude d’avoir tout ce qu’elle voulait, manquait malheureusement d’affection. « Non merci. » répondit-elle finalement. Son ton était hésitant, elle ne savait pas réellement comment annoncer la nouvelle. Elle avait gardé leur enfant parce qu’elle n’arrivait pas à se sortir de la tête le visage du pilote lorsqu’elle lui avait annoncé la nouvelle. Elle lui avait finalement tendu l’échographie. Elle observa longtemps la réaction du futur père. Rien n’allait dans sa vie et pourtant le voir dans cet état lui avait mis du baume au cœur. Elle se réjouissait presque d’avoir gardé l’enfant. Elle voulait partager son bonheur, ressentir la même chose que lui à cet instant. Elle aurait aimé pouvoir s’émouvoir face à la photographie de la crevette accrochée à son utérus. Mais rien ! Rien du tout, c’était ce qu’elle éprouvait pour ce bébé. Ou plutôt, rien à cet instant et du dégoût le reste du temps. Elle avait la sensation de s’être tirée une balle dans le pied. Son obsession pour le pilote l’avait mené à sa propre fin. Elle n’avait plus de petit-ami et ses parents risquaient de mal prendre l’arrivée précoce d’un nouveau membre de la famille. Chez les Farrells, il était coutume de faire les choses dans l’ordre. Du moins en apparence, puisqu’il n’y avait qu’à voir son père et sa mère pour savoir qu’ils cachaient eux aussi d’horrible secret. « Elle est à toi. » dit-elle lorsqu’il lui demanda s’il pouvait garder l’échographie. Elle s’en fichait. Elle avait pratiquement tourné la tête toute sa consultation. « Ça va aller, ne t’en fais pas. » souffla-t-elle lorsqu’il s’excusa de ne pas l’avoir accompagnée à cette séance médical. Elle aurait préféré qu’il s’excuse de lui avoir demandé de garder leur bébé. Il ne lui avait pas réellement laisser le choix faisant ressortir ce qu’il pouvait y avoir de plus bon en elle. « Si… » elle restait quelques peu évasive dans ses réponses, incapable de s’impliquer d’avantage de son bonheur. Ce bébé l’avait rendu malade tant physiquement que moralement. Un virus en somme avec qui elle était désormais obligé de cohabiter dans son propre corps. « Mon mec m’a quitté et je… j’ai pas envie que ma famille apprenne que je suis enceinte. » en réalité, elle était morte de trouille. Malgré qu’elle essayait de se donner un genre, elle avançait aveuglement vers un avenir incertain. « Écoute… je… » elle se leva assez brusquement, alors qu’on pouvait voir toute l’anxiété qui l’habitait à cet instant. « J’ai nulle part où aller ce soir et puis j’ai pas envie de me retrouver toute seule. » elle s’approche de lui. « Sinon, je sens que je vais faire une connerie. » elle ignore comment, mais elle se laisse finalement craquer, avant de se jeter dans les bras du jeune homme.
« Merci. » Murmura-t-il, tout en cherchant à masquer son émotion. Et pourtant, elle était aussi grande qu’elle était réelle. Il n’arrivait pas à quitter cette petite photo en noir et blanc, ridicule au demeurant, qui laissait entrevoir un être amené à grandir au creux de Mina. Il mourait d’envie de laisser son index effleurer le papier glacé, mais craignait que cela soit mal interprété, voire même mal accepté, par la future mère. Cette dernière semblait sincèrement chamboulée, et il était évident qu’elle avait besoin d’attention. « Je suis désolé. » Souffla-t-il, alors qu’elle lui confiait avoir été malade. Il n’était pas surpris ; de nombreuses mères témoignaient de la pénibilité du premier trimestre de grossesse. Nausées, fatigue… Ce déferlement d’émotions ne devait pas être simple à gérer. La fille Farrell ne s’étendit pas sur la question, et Carlisle se demanda si cela était de la pudeur, ou simplement du dégoût. Il savait qu’elle avait des réactions extrêmes, et ces deux hypothèses opposées ne le surprendraient pas. Lui, à l’inverse, était prêt à entendre ces différents désagréments. Prêt à être à ses côtés lorsqu’ils se produiraient. Prêt à l’aider, si elle le lui demandait. Pourtant, elle n’en fit rien. Elle s’installa sur le canapé face à lui, en prenant soin de rabattre son pull sur ses genoux.
Il baissa les yeux lorsque l’héritière lui avoua être célibataire, mais ne manifesta aucune surprise – et pour cause, il ne l’était pas. Carmina ne lui avait pas raconté grand-chose de ses déboires avec Théo, et il se trouvait particulièrement mal placé pour lui poser des questions. N’était-il pas celui avec lequel elle avait fauté – au point de se retrouver enceinte ? Il n’était pas à l’aise, et se replaça dans son fauteuil pour tenter de masquer sa gêne. Cependant, il fut coupé dans son élan lorsque l’héritière admit qu’elle n’avait pas envie que ses parents soient au courant de sa situation. « Mais, Mina… » Commença Carlisle, après s’être légèrement penché vers elle. « Tu sais bien que, tôt ou tard, ça se verra… » Souffla-t-il, en jetant un rapide coup d’œil à son ventre. Pour le moment, il restait plat et ne laissait pas présager des bouleversements à venir. Comme électrisé par ce simple constat, elle se redressa brusquement. A ce moment précis, Carlisle comprit que son interlocutrice était complètement perdue. Elle ne savait ni quoi faire, ni quoi dire, ni comment appréhender la situation. Il ne lui en voulait pas – lui-même n’en menait pas large, alors qu’il avait tout de même quinze ans de plus qu’elle. Sa voix tremblait lorsqu’elle lui déclara qu’elle n’avait pas envie de se retrouver seul et, une fraction de seconde plus tard, elle se laissait tomber dans ses bras. Une fois l’effet de surprise passé, il referma son étreinte autour de son corps frêle, et posa sa joue sur le sommet de sa tête. Lentement, sa main droite caressa son dos, dans l’espoir de calmer les anxiétés légitimes de Carmina. « Chut… » Murmura-t-il à plusieurs reprises. « Ça va aller. » Ajouta-t-il, lorsqu’il sentit qu’elle s’était un peu calmée. Il se décala légèrement, et l’invita à se positionner en face de lui. Il resta quelques secondes silencieux, cherchant ses mots. « Je ne vais pas te dire que tout sera parfait, parce que rien ne l’est jamais. » Il attrapa sa main, et fit s’entremêler leurs doigts. « Mais je sais qu’on fera de notre mieux. » Confia l’ancien pilote. « Tu peux rester ici ce soir, si tu veux. » Proposa l’Australien sur un coup de tête. après tout, ce n’était pas les pièces qui manquaient, ici. Et puis il vivait seul, depuis le départ d’Amal, quelques semaines plus tôt. « Et les autres soirs. » Une cohabitation. Voilà ce qu’il lui proposait, ni plus, ni moins. Cette solution lui paraissait tout à fait acceptable. Cela leur permettrait d’apprendre à se connaître, tout en partageant les moments forts de cette première grossesse. Carlisle serait aussi attentif que possible. « Je pense qu’on ne devrait rien dire pour le moment. Qu’on devrait se montrer un peu égoïstes, et profiter ensemble des temps encore paisibles. Vu ton nom et ta vie sociale, nul doute que les vautours te tourneront autour assez vite… » Souffla le fils Bishop, conscient des difficultés à venir. Lui qui était plutôt partisan du « pour vivre heureux vivons cachés », il n’allait pas être déçu. « Essayons de nous en préserver, pour le moment. T’en penses quoi ? » Demanda-t-il. A nouveau, le silence s’installa dans la pièce. Pourtant, il ne la quitta pas des yeux un seul instant. Il avait envie de profiter de cette accalmie, profiter de ce moment si particulier, mais n’osait pas. Il se pencha, et colla son front contre celui de son interlocutrice. « Mina… » Vu son regard interrogateur, elle devait s’attendre à tout de sa part. « Je suis heureux. » Reconnut-il avec un léger sourire. Il était le premier surpris, mais l’évidence était frappante.
★ Carlisle Bishop & Mina Farrell (#3) L’héritière avait l’habitude de tout avoir sans jamais donner en retour. Elle avait eu l’avantage de naître dans la bonne famille, celle qui lui assurait un bon avenir sans avoir à lever le petit doigt. Pourtant, la jeune femme n’était pas ce genre de personne. Elle espérait pouvoir marquer toute une génération. Elle avait l’espoir d’un jour reprendre les rênes de l’entreprise familiale. Elle profitait de sa petite notoriété pour bien se faire voir sur les réseaux sociaux. Jusque là, elle avait toujours réussi à lisser son image, bien loin de ce qu’elle pouvait être en réalité. Elle avait convaincu des milliers de jeune que son couple avec Théo était un but à atteindre. Elle avait peint sa vie comme un conte de fée de façon à ce que son nom ne tombe jamais aux oubliettes. Mina avait tenté du mieux qu’elle pouvait de parfaire son image quitte à déployer les mauvais moyens. Elle s’en était pris à plus gros qu’elle parce qu’elle était persuadée d’être intouchable. L’argent, le pouvoir et probablement la jeunesse d’esprit la laissait souvent croire que personne ne pourrait l’atteindre. Une chose qui avait été longtemps vrai jusqu’à que son regard se pose sur le pilote. Le coup de foudre, l’envie de le posséder malgré leur quinzaine d’années d’écart. Mina avait fait des pieds et des mains pour qu’il succombe à son charme jusqu’à mettre à mal son mariage. Elle n’avait jamais eu la moindre peine pour cette fiancée qu’elle avait évincé en un rien de temps. Mina avait l’habitude d’obtenir ce qu’elle voulait, lorsqu’elle le voulait. Carlisle aurait dû être un passe-temps. Un jouet qu’elle avait souhaité du plus profond de son âme possédé et dont elle aurait fini par se lasser. C’était souvent ce qui se passait dans l’esprit égoîste de la jeune femme. Il n’était souvent question que d’elle et de sa petite personne. Seulement la donne avait changé. Elle ne pouvait le nier, son cœur de glace battait pour le pilote. Il n’était pas facile d’expliquer tout ce qu’elle ressentait à son égard. Elle n’avait eu le cœur brisé que deux fois dans sa vie. La première datait de l’époque où John l’avait abandonné. La seconde, elle ne l’avait pas vu venir, elle n’avait pas pensé que le regard du beau blond l’emmènerait à sa perte. Elle n’avait qu’à penser à l’instant où elle lui avait annoncé sa grossesse pour ne plus être capable de réfléchir. Il l’ignorait probablement mais il la possédait sans qu’elle le veuille. Il comptait plus que de raison. Elle avait gardé le bébé pour lui et seulement pour lui malgré tout ce que cela engendrait. Elle était à bout depuis quelques jours, en partie à cause de sa grossesse mais également à cause du stress qu’elle avait subit ces dernières heures. Elle se sentait désespérément seule dans son esprit et elle n’arrivait pas à chasser de sa tête toutes ses mauvaises idées. Rapidement, elle laisse les larmes noyer ses joues alors que les bras réconfortant de son ex-amant s’entourent autour d’elle. Elle ne sera pas seule, c’est la promesse qu’il lui fait et elle est persuadée qu’elle peut lui faire confiance. Ses sanglots diminuent alors qu’il l’invite à prendre place à ses côtés. « Je ne veux pas abuser. » dit-elle lorsqu’il lui propose de venir s’installer chez lui. Elle avait pourtant espérer entendre ces mots de sa bouche. « Ta femme pourrait revenir… ça ne fera qu’empirer les choses entre vous. » et à vrai dire elle s’en moquait. Elle avait fait en sorte d’éradiquer cette pauvre bonne femme pour récupérer son homme et sa maison. Elle regrettait d’avoir manipuler le futur-père, seulement ils devaient aujourd’hui assumer ensemble le fruit de leur erreur. « Je ne dirais rien, si c’est ce qui t’inquiète… » promit-elle à son tour. Elle avait plus l’habitude des médias que lui et elle savait que tout n’était qu’une question de temps avant que tous ne lui tombe dessus comme des sauvages. Front contre front, il essaye de la rassurer. Elle aimerait croire à ses mots mais elle n’a jamais été le genre de fille dupe. Elle masque ses angoisses par un faible sourire puis souffle finalement. « Je meurs de sommeil… »