Elle en a souvent entendu des blagues sur l'apocalypse zombie, sur les morts revenant à la vie à la recherche de cerveaux, de chair fraîche. Soi-disant, toutes les personnes habituées à jouer aux jeux-vidéo sont préparés à cette éventualité... Foutaises. Pire cauchemar ou non, ce scénario catastrophe s'est malheureusement réalisé et en six mois, feu-Brisbane s'est transformée en Flash Mob Zombie Party. Suspicion, trahison, les vivants se sont souvent montrés de moins en moins civilisés, prêts à sacrifier leurs prochains, ami ou voisin, pour espérer survivre dans cet enfer une journée de plus... Une simple journée supplémentaire à se battre pour sa survie, espérant ne pas se faire coincer par une horde de zombies enragées ou tout simplement dépouillée puis sacrifiée sous le joug d'un autre survivant. L'entraide ? Certains s'y risquent encore. Elle ? Elle a tendance à éviter. Après tout, dans ces conditions, n'importe quel allié pouvait rapidement se transformer en celui qui sonnera votre perte... Déambulant dans les allées de cette boutique déjà vandalisée, Nea est à la recherche de tout ce qui serait capable de l'aider à assurer sa survie. Elle erre là en solitaire, après avoir perdu contact avec son neveu et Elwyn séparés par un coup du sort. Au fond, elle continue d'espérer qu'ils s'en sortent, qu'ils survivent et qu'à un moment, ils se recroiseront. Mais là, il faut, pour l'instant, qu'elle se sorte de là avant de se faire submerger. Râles gutturaux se font entendre dans cette petite échoppe. Elle qui a pensé être ici tranquille, la preuve est qu'il ne faut jamais baisser sa garde. Pas dans de telles conditions. À pas de velours, la demoiselle, batte renforcée serrée contre elle s'aventure en direction de la sortie. Hors de question de se faire piéger tel un rat et de finir en garde manger pour les quelques mort-vivants du coin. S'extirpant par la grande baie vitrée brisée, la rue n'est néanmoins pas déserte. Au loin quelques masses semblent s'animer en sa direction mais là, devant elle, quelqu'un. Difficile de savoir s'il s'agit d'une de ces créatures vu que la personne lui fait dos mais... Nope, nope, nope. Abort. Abort the mission. It's ducking zombie ! Alors, d'un home run dans le crane de ce cadavre dégarni, elle finit par s'écarter sans demander son reste, d'abord à reculons... Et puis, impact. Son sac à dos butte sur quelque chose, un mur ? Quelqu'un peut-être. Rapidement, Burkhardt fait volt-face, sourcils froncés, la batte nerveusement serrée entre ses doigts. Un visage ne présentant pas la trace de décomposition avancée. Un jeune homme qui, comme elle. a les traits tirés par la fatigue. Politesse ? Les règles de bonne manière se sont probablement envolées au même moment que la phrase "aide ton prochain" se soit transformée en sa sœur "mange ton prochain". « J'irai pas par là si j'étais toi. Ils arrivent. » Ses premiers mots à l'égard d'un humain depuis un moment.
Un monde apocalyptique, de quoi se réjouir quand on portait le nom Doherty. Effectivement, Wren se retrouvait à son aise dans cet espèce de nouvel univers où zombies et êtres humains devaient se côtoyer... Ou plutôt, se tuer en usant de pure violence parce que l'instinct du plus fort était la seule chose qui comptait dans un tel contexte. Heureusement, Wren n'était pas spécialement dérangé par le concept. Lorsque les zombies avaient débarqué en ville, il avait vite fait de braquer une boutique pour obtenir quelques armes et des munitions dont il faisait usage dans les cas d'urgence, uniquement. Jusque là, il s'en était bien sorti, se dissimulant dans les hauteurs, là où les zombies avaient la flemme d'aller, bien trop content de trouver de la chair fraîche à portée de main. Hors de question de leur servir de chair à pâté dans les semaines qui venaient, parole de Doherty. Alors, il était toujours en route, ne laissant jamais l'occasion à quelqu'un de se greffer à son instinct d'homme solitaire. Ne pas parler pendant des jours, cela ne changeait pas tellement ses habitudes et il s'en contentait tout à fait. Néanmoins, parfois, la survie nécessitait de quitter sa petite zone de confort pour aller quérir des vivres. Ce n'était pas le moment préféré de Wren quand il devait descendre en ville et fouiller les quelques boutiques qui n'étaient pas encore totalement saccagés. A ce moment là, il fouillait dans la cave d'un magasin lorsqu'il entendit du bruit au dessus. Bien vite et avec agilité, Wren revint vers la grande salle et aperçut une jeune femme en train de quitter les lieux. Elle avait eu la même idée que lui apparemment et des cris gutturaux se firent entendre, à l'approche, forcément. Ils avaient dû les sentir et Doherty dût lui aussi quitter la boutique pour se retrouver dans la rue, face à une horde de zombies et la jeune femme qui reculait, se télescopant à sa grande taille. Wren, arme à la main, avait la visée sur le zombie le plus proche, souriant à la remarque de la brune. "T'inquiète pas, Captain Obvious, à trois... Tu cours et tu me suis." Avec ses doigts, il amorça le décompte et tira en pleine tête sur le zombie avant de se mettre à courir, son barda sur les épaules. Cinq minutes plus tard, Wren se retrouvait en zone reculée, les zombies se faisant beaucoup moins nombreux depuis que tous les habitants n'y passaient plus jamais. "Tu vois, il y avait vraiment pas de quoi s'inquiéter." Il rechargea son arme avec un sourire satisfait aux lèvres, jetant ses affaires à travers la fenêtre d'une vieille bâtisse. Il savait qu'ils seraient en sécurité le temps que les zombies se trouvent un autre repas pour la journée.
Elle s'est attendue à heurter un mur, un zombie, un poteau, mais de là, à croiser un vivant, pas vraiment. Intérieurement, elle peste, confessant qu'elle doit vraiment faire plus attention à ses arrières. À trois elle court et elle suit un parfait inconnu dans les méandres de ces rues chaotiques ? Tout ça pour échapper à une horde de macchabées animés en recherche de chair fraîche ? Apparemment oui car, au vu du beau nombre qui se rameute, certes, lentement, Burkhardt n'a guère envie de s'éterniser ici à regarder les décors austères. Captain Obvious emboîte alors les pas du grand brun et ce, dans un rythme plus qu’effréné. Peut-être que tirer un coup de feu n'a pas été la chose des plus sensées à faire mais voilà. Ils courent à en perdre haleine jusqu'à finalement, une fois se sentant suffisamment loin de la horde, s'engager dans une bâtisse par la fenêtre. « J'avoue, juste quelques morts-vivants pas trop rapide sur nos derrières, le quotidien, hein. » lance-t-elle un sourire aux lèvres. « Mais merci. » Après tout, il aurait tout bonnement lui en coller une dans le genou et se barrer en courant, seul. Néanmoins, la méfiance est de mise, la forçant à rester alerte. Après tout, rien n'est dit que ce charmant samaritain ne l'ait pas attiré dans un piège, ou quelque chose du genre. Bénéfice du doute ou non, son regard balaie les alentours à la recherche d'une quelconque menace. Pas d'âme qui vive. Rien. Juste de la poussière, des meubles effondrés, des victuailles probablement périmés et personne. Son ? Juste leurs respirations encore malmenées par leur sprint pour échapper à la bande de cadavres ambulants. Un léger soupir de soulagement fend ses lèvres. « La compétence "Roi de la gâchette", pas mal. » lance-t-elle avant de faire un tour sur elle même, regardant autour pour finir de reporter son attention sur l'inconnu. Une multitude de questions brûle ses lèvres mais elle se contente de rester silencieuse pour l'instant. Elle ne sait pas trop si elle doit se la jouer sociale ou non mais elle finit par s'y risquer, trouvant cela presque étrange d'entendre de nouveau, le son de sa propre voix. « Nea, sauf si tu préfères que je garde "Captain Obvious". Et toi ? À moins que tu préfères "Roi de la gâchette" ? » Assez long à dire, cela dit. Peut-être même trop long en cas de situation critique. Ou alors, ils se contenteront de simple Hey pour interpeller l'autre. La brune se risque à jeter un coup d’œil par la fenêtre. Aucune animation en vue, ils semblent être tranquille, pour l'instant.
Il n'était pas le compagnon de route le plus agréable, vu son mutisme habituel et ses façons de partir au quart de tour. Voir Wren de bonne humeur? Une bien belle utopie, surtout depuis cette histoire d'invasion de zombies. Avec cette arrivée massive de morts-vivants, ce cher Doherty avait perdu de vue toutes les personnes qu'il aimait, le forçant à vivre en reclus, à se battre au quotidien pour survivre un jour de plus uniquement. Dans quel but, exactement? Le jeune homme n'aurait su le dire, certainement par habitude, parce que c'était ce qu'il avait toujours fait et que sa petite soeur aurait aimé le voir sortir de cette histoire vivant. Rien de plus. C'en était désespérant. Ce jour-là, il avait encore creusé le chemin de ces affamés mais aussi d'une autre âme humaine viable. Ils avaient couru à coeur perdu entre les rues de la ville, se terrant dans une des maisonnettes d'une rue annexe, enfin tranquilles et quelque peu usés par leur course effrénée. "De rien. Le quotidien, cette saleté de quotidien ouais." Il était fatigué de se battre, de devoir tuer des zombies de ci de là pour trouver des vivres en espérant ne pas se faire bouffer le cerveau par un sbire mal avisé. La brune devait vivre le même genre de combats, c'était peut être le seul point commun d'ailleurs, avec leur répartie à couper au couteau assurément. "Développé au niveau quarante deux. Mieux qu'une évolution de Pokémon." Il la regarda avec cet air froid caractéristique de la famille Doherty, même si celle-ci était perdue depuis longtemps déjà. Ils n'étaient plus des inconnus l'un pour l'autre, ils ne pouvaient plus l'être parce que c'était eux deux contre une horde de zombies avoisinantes. "Nea, sympa. Wren, pour moi. Après, tu peux m'appeler comme tu veux, je suis pas sûr que la notion de prénom compte encore dans cette apocalypse." Il la regarda faire un tour d'horizon pour s'assurer qu'il n'y avait pas de pièges ou de zombies cachés alors que Wren s'armait d'une cigarette en rangeant son arme, délicatement. "Comment ça se fait que t'es seule dans ce bordel?" C'était la seule question qui persistait dans ce nouvel univers, plus rien d'autre n'avait d'importance. Le passé était effacé. Les personnes aimés autrefois rayés. Il n'y avait plus rien.
Elle ne se souvient plus trop comment tout cela à commencer, à partir de quel moment le monde a commencé à battre de l'aile et que les morts se soient décidés à repasser de trépas à un semblant de vie, animés par le désir de chair fraîche. En six mois, la vie s'est considérablement réduite, les morts prenant leur place. Les premières semaines ont été les plus violentes : non-préparés, refus d'y croire, beaucoup y sont passés pour des raisons souvent stupides. Et puis, au fil de semaines, chez les survivants, une vague de désespoir ; le désespoir de voir plus de cadavres prêts à vous planter leurs quelques dents plutôt que des comparses bien animés. Le silence, les râles gutturaux ont commencé à primer sur les cris de panique, alors là, un quotidien apocalyptique. La mort partout et survivre, pour quoi ? Pour quelles raisons ? Après tout, ils ne savent même pas combien de personnes s'en sont sortis, s'il existe un quelconque remède, s'ils ne vont pas finir par mourir de faim. Vainement... Les deux, le regard fatigué s'étudient, essayant probablement de deviner quel parcours ils ont du traverser pour survivre jusqu'à ce triste jour. Alors, quand il prend parole pour parler de ce stupide quotidien, Nea ne peut s'empêcher d'opiner du chef, silencieusement. Un fin sourire vient orner ses lèvres lorsqu'il fait référence à Pokemon. Elle n'a pas pensé pouvoir entendre ce mot encore une fois. « Quarante deux ? Te reste encore 13 niveaux pour atteindre l'évolution Dracolosse. » Les deux se jaugent, se présente, pensant exactement la même chose quant à la nomination, l'utilisation des prénoms en une telle période. Après tout, il y a très peu de chance qu'ils finissent par s'interpeller autre que par des petits hey, ou signe de la main pour ne pas alerter ne meute de zombies enragés... Seule dans ce bordel ? Elle finit par s'asseoir à même le sol, se déchargeant avec une lenteur certaine, son sac. Après une profonde inspiration, un nœud dans la gorge, elle finit par répondre : « Mouvement de panique, on s'est retrouvés séparés et depuis, voilà. » Impossible de savoir s'ils ont passé l'arme à gauche et au fond, même si elle continue d'espérer les retrouver, sa petite voix lui dit que le pire est arrivé. Cela dit, elle lui poserait bien la question, après tout, peut-être qu'il les a croisé... Mais pour l'instant, elle se contente de lui renvoyer l'ascenseur. « Et toi ? » Car ils ont tous quelqu'un, ou plutôt, ont eu quelqu'un...
Il en avait vu des horreurs dans ce nouveau monde d'une cruauté sans pareille. Il n'y avait plus de place pour l'indécision ou les valeurs d'antan... Non, il fallait agir tout de suite, sans se soucier des conséquences, être toujours prêt à dégainer une arme quelconque pour détruire une horde de zombies tueuses. Parfois, il fallait trahir également, des compagnons de route pour un instant seulement, se retrouvant perdus au milieu d'une horde et puis, le clap de fin. Doherty avait fait comme tout le monde, il avait fait ce qu'il avait pu pour subsister, ce qui voulait dire faire preuve de cruauté dans bien des cas. Ce jour-là, il avait été un homme bon en se sauvant en compagnie de Nea. Wren n'avait pas envie de faire du mal autour de lui, de tuer des âmes encore humaines, lui qui n'en avaient pas croisé depuis bien des jours désormais. Il ne put d'ailleurs que sourire en entendant la référence à Pokemon que Burkhardt venait de lui faire. Pour lui, cela faisait dix siècles peut être qu'il n'avait pas eu une Game Boy entre les moins, en tout cas, c'était ce qu'il s'imaginait. Le temps était une notion relative dans cet univers: les jours duraient des semaines et les mois devenaient des décennies entières. D'ailleurs, il ne savait plus vraiment se placer sur un calendrier, tous les jours se ressemblaient. Sauf celui-là. Surprise. "Et ça fait combien de temps, tu penses? Moi, ils sont morts. Mais, c'est un concept qui a plus vraiment d'importance quand on se retrouve ici, donc..." Il ne savait pas tellement ce qu'il en était en réalité mais Wren préférait se dire cela. Ainsi, il ne culpabilisait pas d'avoir laissé sa soeur derrière lui. L'ancien pompier finit par ranger son arme dans un coin de la pièce, là où traînait son vieux lance flammes et les quelques fusils qu'il avait pu obtenir en chemin. "Comment t'as survécu tout ce temps?" C'était forcément une question légitime parce qu'ils avaient tous vécu des sales moments. Il n'y avait plus que cela qui les liait, cela et la douleur environnante. Lancinante, au fond de leur coeur même.
Elle hait ces temps sombres, cette période ténébreuse où la solitude croît lourdement. Peu d'âme qui vive, laissant souvent les protagonistes se faire la conversation, les faisant oublier parfois, le son de leur propre voix. Cette époque révolue où ils ont ri de tout, de rien, tranquillement, sans se soucier que, le lendemain serait bien différent... Si différent que l'époque des Pokémons est largement effacée et que l'humanité à laisser place à des cadavres ambulants à la recherche du peu de chair fraîche s'animant encore dans les rues grises -et parfois ensanglantées- de feu-Brisbane. Et de ceux qu'ils ont pu voir avant les coupures générales d'électricité, d'internet, le monde est globalement atteint. Les deux jeunes gens échangent un pâle sourire lorsqu'ils rebondissent sur Pokémon. Peut-être que dans une autre vie, ils se seraient certainement croiser dans d'autres circonstances avant de amuser à parcourir le globe afin de tous les attraper mais là... Là, il faut ne pas se faire attraper pour assurer son semblant de survie. Une survie bien pauvre, uniquement rythmée d'une solitude des plus mortifiantes. Combien de temps ? Elle est incapable de se rappeler combien de jours, de semaines sont passés depuis leur séparation. La mort dans l'âme, elle tente de positiver, de se dire qu'effectivement, ils ont pu survivre. Après tout, Elwyn, ses idées farfelues, a certainement trouvé un moyen pour rester à l'abri avec Theo... « Ca fait... Peut-être trois semaines ? J'en sais rien en fait... Désolée de l'apprendre... Triste concept. » Son regard suit la silhouette de Wren qui apparemment, s'est installé ici avec son équipement des plus impressionnants. Elle n'a jamais aimé tiré alors elle est surprise de voir une telle collection d'arme à feu. « T'as en a ramassé beaucoup, du matos ! Depuis que je suis plus avec eux, eh ben j'ai essentiellement couru, on va dire. Escalader aussi quelques façades... Vaut mieux éviter de s'aventurer dans les égouts aussi... L'odeur déjà, puis y'a tellement de bruits que tu les entends pas venir... Et toi ? » Alors, à son tour, cette fameuse question... Nea se doute que lui aussi, en a vu des horreur. Et elle en a vu tomber, des gens. Proche, moins proche, au final, ça ne change rien. Le monde est foutu, eux aussi.
C'était difficile de partager quelque chose avec quelqu'un dans ce monde là. L'apocalypse avait été brutale et les séparations déchirantes. Heureusement, Wren ne s'attachait que peu à autrui, cela lui avait évité de ressortir de cette épreuve avec le coeur brisé mais cela ne voulait pas dire pour autant qu'il n'était pas attristé de devoir supporter cette solitude. Le jeune Doherty était bien incapable de dire depuis combien de temps il errait seul dans les rues de sa ville natale, mais certainement trop longtemps pour être encore considéré comme une personne saine d'esprit. Il savait que, peu à peu, il sombrait dans la plus pure des folies. C'était ce que la survie provoquait, même chez les âmes les plus pures. Tout le monde était confronté à des choix cornéliens à un moment ou un autre et seuls les plus forts arrivaient à s'en sortir. Wren ne se sentait pas particulièrement légitime à se retrouver dans cette catégorie de personnes mais il savait également qu'il n'avait pas le choix: il se devait d'agir pour respirer une seconde de plus, faire tout ce qu'il fallait pour ne pas devenir un monstre comme les zombies qui devaient les encercler dans les rues alentour. "Trois semaines qui donne l'impression que c'est trois ans? On doit pas être loin de ce fameux concept, ouais." Doherty ne savait plus quand avait débarqué les morts-vivants. D'ailleurs, il préférait ne pas s'en rappeler, de peur d'avoir les souvenirs du passé qui l'assaillaient en pleine lutte. Il ne voulait pas se rappeler qu'il avait eu une vie auparavant, qu'il était pompier et presque heureux, même si là encore, c'était une notion tout à fait relative dans son petit univers Doherty. "T'as un instinct de survivantes, dis moi. Ouais, j'ai ramassé des armes ici et là, c'est le seul truc que je sais gérer... Je m'étonne d'ailleurs parce que j'ai jamais eu ce genre de matos avant... Tout ça. Mais moi, j'ai erré pas mal, changé de repères tous les jours ou presque et j'ai commencé à me parler tout seul. Je crois que je deviens dingue, en fait, et si c'est pas le cas, ça devrait pas tarder à arriver, j'en ai peur." Il sentit ses yeux briller plus intensément, lui qui n'exprimait aucune émotion normalement. Wren se reprit bien vite pourtant pour avancer vers Nea, de la nourriture dans les mains qu'il lui proposa à partager. La seule âme humaine qu'il avait croisé depuis des semaines. A moins qu'il ne la rêvait. Il en était là, oui.
Un pas, puis l'autre. Toujours. Avancer sans s'arrêter. Voilà les mots qui tournent dans sa tête depuis le début. Au départ, même si cela a été dur avec le petit, le tout lui a semblé plus facile qu'à l'heure actuelle. Là, seule à douter de tout, ces mots n'ont plus le même impact... Pourquoi continue-t-elle d'avancer dans ces conditions ? « C'est ça... À se demander si en fait, ce n'est pas trois ans... » Elle finit par se passer une main sur le visage, comme pour chasser ses pensées sur ce passé qui leur paraît si lointain. Ces rires, ces voix qu'elle n'entendra certainement plus jamais. Envolées ou plutôt remplacer par des râles zombiesques. Peut-être aurait-elle du abandonner, trouver une arme à feu et avoir le courage de s'en coller une en pleine tête mais au fond, elle avait toujours ce faible espoir, cette maigre lueur de finalement revoir le petit Theo accompagné d'Elwyn. C'est peut-être l'unique raison pour laquelle elle se force à survivre, tous les jours, dans cette solitude constante. Dans un maigre soupir, elle reporte son attention sur Wren, son histoire. Nea, instinct de survivante ? Peut-être...Alors, à l'écoute de son discours, elle finit par plisser les yeux avant de se pincer. « Je vérifiais que j'étais pas en train d'halluciner... Avec ce que tu viens de me dire, je m'y retrouve un peu... Tu commences à voir des ombres, à entendre des voix, te faire ta propre conversation... Bon rassure-toi, je suis bien réelle et ça fait qu'on a pas l'air si fou, pour l'instant. » Dans un sourire, elle incline poliment la tête avant de sortir de son sac, un paquet de Tim Tams ; cette confiserie chocolatée qui a toujours remonté le moral de son neveu. « C'est pas le must de la nutrition que j'ai à t'offrir là, la date de péremption est probablement dépassée mais je pense que l'on est plus à ça près dans ces conditions ! » Effectivement, les denrées se font de plus en plus rares et si ce n'est les nombreuses conserves, les autres aliments ont probablement du rencontrer leur date de péremption peu après le début de tout ça... « Tu crois que y'a des gens qui s'en sont mieux sortis... ? Qu'il y a des groupes de survivants, une communauté quelque part ? » À moins que tout cela ne soit qu'une douce chimère pour faire passer la douloureuse pilule. Seuls au monde.
Il se demandait souvent comment lui pouvait encore être vivant quand tant d'autres avaient péri à ses côtés. Wren devait avoir la chance de son côté, il ne se l'expliquait pas autrement. Après tout, il n'avait jamais été un spécialiste de la survie, si on excluait le fait qu'il avait été longtemps un dealer de drogues pour nourrir le reste de sa famille. Dans tous les cas, rien à voir avec le maniement d'armes à feux ou le meurtre de zombies. Il avait presque été un homme modèle si on le présentait ainsi, mais Doherty savait qu'il aurait dû faire partie des premiers décédés. Cela aurait été le cas s'ils évoluaient tous dans un monde juste mais ce n'était définitivement pas le cas. Voilà que Wren se retrouvait enfermait dans une maisonnette, loin des yeux des morts-vivants, à essayer de donner un sens à son existence aux côtés de sa toute dernière rencontre en date. Cela faisait des jours qu'il n'avait pas côtoyé une personne réellement vivante et il aurait eu toutes les raisons d'en sourire si la teneur de leur conversation n'était pas si désespérante. Il attrapa la nourriture partagée par Nea, la remerciant d'un hochement de tête, peu importait si la date de péremption était passée depuis un moment déjà. "C'est mieux que rien. C'est pas une intoxication alimentaire qui va nous tuer, hein?" Il se mit à rire parce que c'était presque un souhait qu'ils pouvaient avoir. Il valait certainement mieux mourir de la salmonelle que d'avoir la tête dévorée par un zombie assoiffé de chair fraîche. "Peut être. Enfin, j'espère. Après, je suis pas persuadé que notre société individualiste ait donné envie à des survivants de vraiment se rapprocher pour se battre. Ce serait cool, bien sûr, mais on est trop cons pour ça." C'était ce qu'il en retirait, de son côté, haussant les épaules en mangeant son biscuit, un regard tourné vers sa partenaire d'infortune. Quel magnifique tableau.
La folie. Point commun chez les survivants. D'abord latente, elle commence à s’immiscer peu à peu dans leurs pensées, détraquées. La solitude n'aide en rien, accentuant cette dernière... Après tout, l'humain est un animal social... Alors, sans la société, poussé à survivre par tous les moyens, ce n'est pas étonnant de voir que les deux survivants semblent être au point de non retour en manière de raison, bon sens. Le mental certainement affecté par la vision d'un monde apocalyptique où les vivants n'ont plus leur place, où ils sont rapidement remplacés par leurs homologues meurtriers et surtout morts. Alors, le peu d'humanité restant, ils sympathisent plutôt rapidement, la méfiance rapidement mise de côté. Ils sont presque là, les vestiges d'un temps révolu. Un temps où l'intoxication alimentaire causée par un mauvais traiteur aurait causé une vague d'indignation... Là, ils sont prêts à risquer les maux de ventre pour se souvenir de ce temps là, riant même de cette situation. Les nerfs probablement... Les nerfs. La dégustation de ces quelques mets de choix arrachent de nombreux souvenirs et si au départ cela lui étire un pâle sourire, là, la tristesse... D'autant plus que Wren a probablement raison. L'être humain est devenu égoïste, individualiste. Chacun essaie d'assurer sa survie au détriment de la vie des autres. Elle en a vu, des monstres. Pas seulement des zombies, non. Ces humains préférant sacrifier un inconnu pour pouvoir s'enfuir... Elle retient un soupir. Le désespoir à plein nez. « T'as probablement raison... Ou on doit être les seuls couillons à ne pas avoir été mis au courant. » Petite tentative d'humour probablement ratée. S'ils ne sont pas les deux seuls idiots à avoir raté l'annonce, ils sont peut-être les deux seuls survivants de cette triste ère. L’œuvre qu'ils dépeignent est triste à souhait ; un monde post-apocalyptique où l'être humain a laissé place à des cadavres ambulants, non plus accrocs aux réseaux sociaux mais à la chair fraîche. Néanmoins, pour une fois depuis un temps difficilement définissable, de la compagnie...