| I left you on a tray and pretended that you never existed at all | terrence |
| | (#)Lun 8 Juil 2019 - 15:16 | |
| I left you on a tray and pretended that you never existed at all @Terrence Oliver
Huit ans, ça passe vite quand même. C’est long, sans être long. Ca fait déjà huit ans que Charlie se dit qu’elle devrait aller voir comment va Terrence et huit ans qu’elle se contente d’apprendre qu’il est encore en vie par médias interposés. En fait, le seul média interposé qu’elle utilise répond au nom de Léo, et c’est aussi la seule chose à peu près sérieuse dont elles parlent. Les deux blondes ont bien compris qu’elles ont trop de détresse au fond d’elles pour commencer à en parler sérieusement. Faire la fête, seulement faire la fête, c’est déjà bien assez. Elles se retrouvent avec Ariel et Freya tient la chandelle un soir de plus encore, c’est comme ça qu’elles fonctionnent et c’est comme ça qu’elles s’entendent très bien. Il n’y a jamais de jugements, pas même alors que Freya sortait avec le meilleur ami de Charlie et que maintenant tout est flou. La rousse a laissé son meilleur ami tomber, elle l’a regardé s’effondrer et au lieu de lui tendre la main et lui faire relever la tête elle s’est contentée de tourner les talons. Elle a fuit, littéralement. La queue entre les jambes, les larmes au yeux, le palpitant en pleine détresse. Elle a une nouvelle fois trouvé le moyen de se faire plaindre alors que c’est bien son meilleur ami qui a frôlé la mort avec une overdose. Mais il a survécu. Il a survécu et elle elle a tracé sa route. Elle ne se sentait pas la force d’être son pilier à son tour, elle ne se sentait pas assez forte pour gérer les problèmes d’autrui quand bien même à ce moment là tout allait bien pour elle. Quelques mois plus tard elle a commencé à boire à son tour, à se drogue aussi. Quelques mois plus tard elle a commencé sa descente aux enfers, longue et douloureuse, qui n’est toujours pas terminée aujourd’hui. Elle a vu d’autres overdoses, elle a fui d’autres scènes de crimes, mais elle a aussi aidé beaucoup d’oisillons blessés sur le bord de la route sans jamais oublier Terrence. Sans doute même aidait-elle tout ce monde en voulant se racheter pour son meilleur ami. Léo a pris sa place et désormais elle sait que si lui tombe elle le rattrapera, elle le rattrapera et elle soignera chacune de ses plaies. Comme elle l’a fait pour Alois, pour Tim, pour Amélia, pour Asher, pour Rehane, pour Clément (même si elle a un peu foiré avec lui). La jeune femme pensait naïvement qu’en aidant toutes ces âmes cela pourrait aider Terrence à son tour, bien qu’il ne soit lié à tout ceci en rien. Il n’a jamais quitté son coeur et nombreuses sont les nuits où elle s’est réveillée en sueur en pensant à sa chère tête brune. A croire qu’elle ne choisit que des meilleurs amis avec de jolies bouclettes. Aujourd’hui elle décide d’arrêter de tout remettre à demain. Les hématomes de sa dernière entrevue avec John sont partis, Tim a commencé à réparer son âme, Léo recommence à vivre lui aussi. Il semblerait que sa vie connaisse enfin une accalmie, c’est sûrement le bon moment pour essayer d’enfin poser des mots sur tout ce qu’elle garde pour elle depuis toujours. Un message envoyé d’un index tremblant et voilà sa vie entre les mains des réseaux téléphoniques. Son cort bat la chamade comme si elle venait de déclarer sa flamme à l’Homme de sa vie. Elle essaye en réalité de racheter son âme auprès d’un des hommes de sa vie. Les années les ont séparé mais Terrence n’a jamais quitté son coeur. Jamais. Elle aurait aimé partager avec lui tout ce qu’elle a partagé avec Léo, lui raconter ses instants de bonheur et les parts de malheur. Elle aurait aussi aimé écouter tout ça de la bouche de Terrence, savoir qui il est devenu depuis tout ce temps. Ils étaient jeunes et cons, maintenant ils sont des adultes cons. La rousse pendait lui donner rendez vous dans un bar bondé de monde où ils passeraient inaperçu, mais elle n’a pas la force de négocier le lieu de rendez vous. Fortitude Valley, ce n’est pas si loin de l’appartement de Léo chez qui elle passe ses nuits depuis deux mois déjà. Kangaroo point, comme au bon vieux temps, seuls face à la ville. Seuls face au reste du monde.
Les jours suivants s'enchaînent et se ressemble, Charlie ne tient pas en place et n'arrête pas de se la jouer Yoko au bar en renversant beaucoup trop de bières sur beaucoup trop de clients. Elle ne sait pas ce qu’elle va dire à Terrence, elle ne sait pas comment elle va s’excuser pour huit années d’absence et ce n’est pas le genre de choses qu’elle peut taper dans la barre de recherche Google. Finalement c’est Léo qui lui change les idées sans même le savoir en lui parlant de sa relation avec Clément et son sugar daddy par sms. Chacun de ses messages lui brise le coeur mais elle est heureuse s’il est heureux, et ça semble être le cas. C’est encore la tête vissée sur son cellulaire qu’elle se rend sur les hauteurs de la ville et tente d’escalader la falaise non sans manquer sa prises quelques fois. Elle n’a rien pris avec elle et heureusement que Terrence lui avait déjà promis de tout amener. Stupide fille tête en l’air.
Un garçon aux cheveux bouclés sagement assis sur une serviette avec tout un tas de nourriture autour de lui, cela ressemble beaucoup à son Terrence. Son Terrence de dix neuf ans qui ne semble pas avoir changé depuis tout ce temps. Alors elle range son téléphone dans la poche arrière de son téléphone et continue son chemin silencieusement, priant pour qu’il ne la remarque pas avant qu’elle ne soit assise. Elle est à un regard de prendre la fuite. Ce ne serait pas la première fois après tout. Et il est trop tard pour reculer. Parce que là elle est assise, les jambes en tailleur, à se ronger les ongles alors qu’elle ne le fait jamais. Elle ne sait pas quoi dire, la grande perche rousse. Elle dit souvent beaucoup de choses alors que cela n’en vaut pas la peine, mais dès qu’on attend quelque chose d’elle elle se terre dans son silence. « Léo m’a dit que t’étais pas mort. Et … je crois que je voulais vérifier par moi même. T’es vraiment pas mort, du coup ? » Sa voix est celle d’une enfant de quatorze ans, l’enfant qu’elle était quand ils se sont vus pour la dernière fois. Elle raconte déjà n’importe quoi.
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| | | | (#)Sam 13 Juil 2019 - 4:15 | |
| Il l'avait vite compris, Terrence : les douleurs du passé que l'on néglige, que l'on choisi de mettre de côté au lieu de les soigner, ces souffrances qu'on préfèrent enfermer dans des boites plutôt que de les panser finissaient toujours par resurgir un jour ou l'autre, par se répandre, s'insinuer et tout gangrener. Il le savait et c'est pourtant ce qu'il avait fait au début, quand, au plus mal, il avait vu Charlie partir, lui dire que c'était trop dur pour elle, qu'elle ne tiendrait pas le choc. Ca avait été si difficile de tout perdre qu'il avait fait l'autruche, avait envoyé ses émotions au placard pour ne plus qu'elles lui lacèrent les chair et lui corrodent les os, il avait tenté d'oublier mais au final avait passé les huit dernières années à laisser macérer son âme dans un volcan de douleur et d'actes manqués. Il ne lui en avait jamais voulu, à Charlie, d'être partie. D'avoir voulu sauver sa peau, petite Charlie, jolie Charlie, plutôt que de se cramer avec lui. Parce que c'est ce qui se serait inévitablement passé, il le savait et si elle se s'était pas sauvée, il l'aurait laissé de lui-même comme il avait fait avec Freya et Romy, il l'aurait laissé parce qu'à cette époque il aurait tout fait, tout, pour les protéger. Et le danger à ce moment-là, c'était lui. Lui et ses sautes d'humeur, lui et ses frasques, lui et la drogue, lui, les fêtes et la baise facile, lui et son entêtement, lui et sa fureur, sa colère, lui et son insolence, lui et la police, lui tout pété qui ne savait vivre que dans l'urgence, les deux pieds au bord du précipice, lui, l'ouragan incontrôlable. Ils avaient flambé, Freya et lui et il s'était probablement enflammé un peu trop fort, Terry, au point de faire brûler leur amitié à tous les quatre dans un gigantesque brasier.
Huit ans. C'est au moins deux fois l'infini quand on aime. Huit ans sans elles, huit ans à se demander ce qu'ils seraient devenus tous ensemble s'il n'avait pas autant déconné, huit ans, neuf ans même, à se culpabiliser, à s'en vouloir, à imaginer qu'il aurait pu, qu'il aurait dû faire quelque chose pour la retenir. Mais il l'avait laissé partir parce qu'il en était persuadé: elle méritait mieux que ça. Il avait passé neuf ans à regarder chaque tête rousse dans les rues, au bar, partout, à la chercher, à entendre sa voix dans d'autres voix. Charlie, sa meilleure amie malgré leurs cinq ans de différence, petite fille vulnérable qu'il s'était efforcé de préserver en l'empêchant de venir aux fêtes parce qu'elle était encore trop jeune, en faisant toujours bouclier pour la protéger. Elle était sa petite soeur de coeur, sa complice, sa meilleure alliée ex aequo avec Freya et Romy mais sur un tout autre registre. Charlie, c'était celle chez qui il se rendait en pleine nuit si elle faisait un cauchemar, pédalant à tout blinde sur son vélo dans les rues pour grimper par sa fenêtre et aller la prendre dans ses bras. Charlie, c'était son rayon de soleil, sa petite protégée, celle avec qui il n'avait pas peur d'être vraiment lui-même sans avoir à faire le fort ou le dur comme il faisait avec les autres, sans à avoir à retenir les larmes. Charlie c'était sa confidente, sa petite étoile et s'il n'avait pas été aussi néfaste il savait qu'elle aurait pu le réparer un peu avec sa douceur et ses sourires. Avec Charlie ils n'avaient pas fait les quatre cent coup parce qu'il refusait qu'elle parte sur un mauvais chemin, mais ils avaient vécu intensément, proches comme avec personne, avaient pris des bains ensemble sans que ça ne leur paraisse étrange ou que ça devienne sexuel, avaient pleuré ensemble devant des films d'amour en bouffant trois kilos de glace, la tête de Charlie contre son ventre, ils avaient ri, ri et ri encore lors de batailles interminables de chatouilles. Charlie c'était son tout, un pilier à son équilibre, et quand elle avait disparue, il avait sombré. Parce que perdre Charlie, sa Charlie, c'était perdre une partie de lui.
Quand il avait reçu ce sms, son coeur avait fait un bond. Elle était là, derrière son téléphone et elle lui demandait s'ils pouvaient se revoir alors sans hésiter il avait dit oui. Oui, mille fois oui. Il lui avait donné rendez-vous dans un lieu où ils allaient toujours tous les deux quand la vie était trop lourde, Kangaroo point, et il savait qu'ils n'auraient pu se retrouver nul part ailleurs.. Il lui a donné rendez-vous et il s'active, les poumons qui griffent, le souffle court. Il a hâte. Hâte de la voir, de se perdre dans ses yeux azur et d'y lire que tout va bien, de déchiffrer neuf années d'éloignement et d'y comprendre qu'il ne l'a pas bousillé. Il avait revu Romy et elle lui avait dit qu'elle s'en sortait mais il voulait tout savoir, Terry, parce qu'ils avaient trop d'années à rattraper. Pas très bon en cuisine il avait été au plus simple pour le repas : des sandwichs, des cannettes de soda, des chips, des bonbons et des gâteaux. Un picnic d'ados, en somme. Il grimpe à leur lieu de rendez-vous et la cherche d'abord du regard, se demande si elle est venue plus tôt, comme lui, impatiente peut être, mais elle n'est pas encore là. Il soupire, stressé au possible, l'estomac au fond des talons et il s'installe sur l'herbe après y avoir déposé une drap, sort de son sac à dos le repas et s'applique à tout déposer méticuleusement à côté de lui puis observe nerveusement son téléphone. C'était bientôt l'heure. Il aurait pu, Terry, lancer des oeillades frénétiques dans tous les sens à espérer voir apparaitre sa chevelure de feu. Il aurait pu mais il ne le fait pas parce qu'il a la peur vissée au fond du bide qu'elle ne vienne pas finalement, qu'elle change d'avis au dernier moment en réalisant que c'était peut être encore trop compliqué, encore trop tôt, comme pour lui lorsqu'il avait revu Romy. Alors il ferme juste les yeux et tente de se détendre, de calmer les battements de son coeur qui lui défoncent le thorax et c'est là qu'il l'entend, le bruissement d'un corps qui s'installe à ses côtés, qui prend place sans un mot. Il ouvre les yeux, tourne la tête et le choc est frontal. Son coeur éclate. Charlie. Charlie. Elle a grandit, elle a changé mais reste toujours aussi belle avec ses cheveux roux et son teint de porcelaine, diaphane. Son regard se transforme , à Terry, se remplit jusqu'à ras bord de tendresse et de mélancolie. Il l'observe se ronger les ongles, l'écoute parler et redécouvre sa voix, l'entend dire qu'elle connait Leo, que c'est grace à lui qu'elle sait qu'il est toujours vivant et il esquisse un sourire triste. Ouais, toujours vivant. Avec une pointe de douleur dans la voix. Il aurait bien ajouté "malheureusement" mais il ne veut pas gâcher la lumière de leurs retrouvailles et tout fouetter à la noirceur de ses pensées. Il lui répond, Terry, et il se dit qu'elle ne va pas la reconnaitre, sa voix. Parce qu'elle a changé, moins dure que quand il était jeune, moins grossière, moins foudroyante, un brin plus triste et aérienne. Il la regarde et il sourit, laisse ses yeux verts la redécouvrir et a soudain l'envie terrible de se jeter contre elle et de la serrer, d'affronter ses appréhension et de ne pas laisser la gêne les envahir parce qu'il n'y avait jamais eu de ça entre eux. Mais après neuf ans, avait-il le droit de le faire? De la serrer dans ses bras comme quand il avait dix neuf ans? Il se pose la question une fraction de seconde seulement Terry parce qu'il n'hésite pas plus, poussé par ses instincts il se rapproche et sans réfléchir la serre contre son corps, la main tendrement posée sur l'arrière de sa tête, les larmes au bord des yeux. Ils savaient tous les deux, les souffrances. Ils les partageaient, avaient les mêmes. Et il se mord la lèvre pour ne pas craquer, Terry, les paupières qui se ferment fort fort fort et la voix qui flanche. Si tu savais comme tu m'as manqué, Charlie. Si tu savais comme tu m'as manqué. Et c'est prononcé dans un souffle, saccadé, intense et sincère. Elle lui a manqué, affreusement. Douloureusement. Et il ne comptait plus la laisser partir. Jamais.
@Charlie Villanelle
Dernière édition par Terrence Oliver le Mer 7 Aoû 2019 - 16:27, édité 1 fois |
| | | | (#)Jeu 18 Juil 2019 - 18:52 | |
| C’était stupide de penser qu’il n’avait pas changé en presque une décennie. Il était un grand gamin quand elle l’a quitté et désormais il est devenu un homme. Ses traits se sont affirmés sans pour autant devenir durs, il ne ressemble plus à un enfant désormais. Il n’est plus celui avec qui elle se lavait après s'être roulée dans l’herbe fraîchement coupée - pas sûr de toute façon qu’ils soient capable de rentrer avec autant de facilité dans une baignoire maintenant. Il était celui à qui elle s’amusait à faire des couettes sur toute sa chevelure pour qu’à chaque fois sa mère vienne les lui enlever avec hâte, outrée. Elle se souvient encore qu’ils montaient à cheval ensemble dans le ranch familial, qu’elle devait se contenter des Shetlands alors que lui avait déjà le droit aux poneys et qu’elle ne cessait de souffler d'exaspération. Tous les souvenirs auprès de Terrence lui reviennent soudainement, de lui et Freya, de lui et Romy. Désormais elle ne voit plus que Freya mais cela reste à titre anecdotique. Elles ne parlent jamais de leur passé ni même de leur présent, elles ne parlent jamais de rien d’important à vrai dire. Elles se contentent de boire et de se droguer, de jouer un rôle dans la société parce qu’elles font ça si bien. Romy n’est qu’un vague souvenir alors qu’elle l’aimait pourtant beaucoup. Elle était l’amie d’un ami et pourtant elle n’a pas hésité à se renseigner sur le sort de Joseph Keegan quand Villanelle le lui a demandé. Elle n’a pas posé de question, elle s’est contentée de répondre à la requête de sa vieille amie et la rousse lui en est reconnaissante. Elle est la meilleure amie d’un ami qu’elle connaisse, la petite Ashby. La rousse aimerait tant remonter dans le temps, remonter à cette époque pendant laquelle tout allait encore bien pour leur quatuor un peu bancal. Elle aurait aimé dire à Terrence qu’elle serait toujours là pour lui, à Freya qu’elle n'a pas à faire tout ça pour se sentir exister et enfin à Romy de continuer à vivre et de devenir la femme forte qu’elle est aujourd’hui. Elle aurait aimé dire tant de choses aux filles mais ce n’est rien face au flot d’émotions qui la submerge maintenant qu’elle est face à Terrence. En neuf ans, ils n’ont jamais été aussi proches. Ils ne se sont jamais faits d’adieu non plus puisque la rousse n’est tout simplement jamais venue le voir à l'hôpital ni nulle part ailleurs. Leur chemin se sont séparés, elle lui a volontiers laissé Freya et Romy et puis finalement elles aussi se sont détachées du cortège. Ils étaient vraiment bancal comme quatuor. « Ouais, toujours vivant. » Et elle se rend compte que c’était nul, comme question, que la vie n’est pas un film hollywoodien avec des zombies à tout va. Ils ne sont pas dans Warm Bodies non plus, ni dans quoi que ce soit d’autre. Ils sont juste Terrence et Charlie, et elle, elle n’arrive plus à le cerner. Elle n’arrive pas à savoir ce que signifie l’intonation de sa voix, s’il est seulement surpris de la voir ou s’il cache un couteau aiguisé derrière son dos. Les deux peut être ? Elle ne lui en voudrait pas, elle l’aiderait même sûrement à viser le coeur ou la carotide pour s’assurer qu’elle meurt. Et s’il veut la voir souffrir elle s’étendrait sur le sol et relèverait son t shirt pour qu’il puisse transpercer la peau de son ventre autant de fois que les heures passées loin d’elles. Il n’y aurait définitivement pas assez de place dans ce cas de figure là. Or elle voit bien dans ses yeux qu’il n’y a plus aucune flamme ardente, aucune flamme du tout. Ses pupilles ne brillent plus, tout son visage semble éteint. C’est ainsi donc ce que l’on devient après une overdose ? Oh, elle aurait dû être là, elle aurait dû le soutenir comme lui la soutenait à chaque fois qu’elle marchait malencontreusement sur ses lacets et s’écrasait sur le sol la tête la première. Finalement il est le plus courageux, ou alors cherche-t-il seulement à se rapprocher d’elle pour la planter au niveau du ventre comme ils le font dans les films. Non, pas de sang. De la douleur, oui, énormément, mais pas de sang, seulement des blessures que le temps n’a jamais su guérir. Elle qui aime pourtant tant les étreintes elle se laisse faire quelques secondes, se contentant seulement d’éloigner ses ongles de sa bouche. Mais lui, son Terrence, son premier meilleur ami, vient passer une main aimante derrière ses cheveux. Le geste semble si simple, si anodin, et pourtant il signifie beaucoup pour la jeune femme. Elle ne pensait pas qu’elle allait le retrouver un jour, ni qu’il serait le premier à la prendre dans ses bras. Elle ne pensait pas qu’il la prendrait dans ses bras tout court de toute façon. Finalement elle se reprend en main, largement émue de la main de Terrence entre ses omoplates, de son souffle saccadé se perdant dans sa nuque et par dessus tout de sa simple proximité nouvelle. Elle avait oublié son odeur ; comment avait-elle pu ? Eux qui dormaient ensemble, mangeaient ensemble, construisaient des cabanes avec des draps blancs dans l’herbe verte … comment avait-elle pu oublier son odeur alors qu’il avait fait parti intégrante de sa vie pendant tant d’années. Charlie se souvient de tout maintenant. Elle se souvient qu’elle l’a rangé dans un coin de son cerveau, dans une boîte à chaussures en taille 36, avec son nom écrit au stylo rouge pailleté. Il était simplement rangé depuis des années, et un coup de pied vient de le délivrer. « Si tu savais comme tu m'as manqué, Charlie. Si tu savais comme tu m'as manqué. » La goutte d’eau qui fait déborder l’océan. Les mains de Charlie viennent hâtivement se rejoindre dans le dos de Terrence, ses doigts se croisent pour être certain qu’il ne partira plus jamais. C’est toi qui est partie, Charlie. fuck off. Elle le sert fort, bien trop fort, et sa tête vient se blottir dans son cou. Il lui a tant manqué lui aussi, tant manqué qu’elle avait perdu tout espoir, elle, l’utopiste de la bande, la rêveuse invétérée. Son coeur bat bien plus vite que de raison, son corps tout entier est parcouru tantôt de frissons tantôt de vagues de chaleur. Elle ne savait pas ce que ça faisait de revoir un être proche que l’on pensait mort. Maintenant elle sait. Elle sait et les larmes lui viennent aussitôt, parce que le contraire aurait été étonnant. Lui est plus fort qu’elle, il tient encore bon malgré sa voix brisée. Charlie n’essaye même pas de parler puisqu’aucun son ne sort de sa bouche si ce n’est des sanglots. Les yeux fermés, les sourcils froncés, elle laisse les larmes couler sur son visage sans chercher à les effacer. Elles veulent dire tellement de choses, et elle n’a pas honte de tout montrer à Terrence. Elle n’en a jamais eu honte, cela ne commencera pas aujourd’hui. « Je t’aime. Tu le sais ça, Terrence ? Depuis toujours et à jamais. » La gamine qui avouait son amour à chaque coquelicot qu’elle croisait n’est pas très loin, surtout quand il s’agit de réitérer toutes les marques d’affection envers Terrence. Tout les marques d’affection qu’elle aurait dû distiller au fil des ans passés et au lieu de quoi elle les a toutes donné à Léo, de manière encore plus entière. Ils ressemblent à un couple qui se séparent, les deux éternels enfants. Chacun s’excuse pour tous les maux de la Terre alors que c’est pourtant lui qui a été abandonné dans l’histoire. Cependant Charlie reprend peu à peu son souffle et son incompréhension reste complète. Il devait lui en vouloir, il devait lui reprocher quelque chose, il devait lui dire d’horribles mots. Parce qu’elle les mérite, elle mérite ses mots à lui et ceux de bien d’autres encore. Pourquoi est ce qu’il ne fait rien, pourquoi est ce qu’il ne bouge pas ? Non, non. Ca ne devait pas se passer comme ça. « Pourquoi est ce que tu ne m’en veux pas ? Tu devrais m’en vouloir. T’étais pas supposé réagir comme ça Terrence ... » Elle pensait naïvement que, pour une fois dans sa vie, quelqu’un allait la mettre face à ses erreurs. Elle pensait que quelqu’un allait lui démontrer tout le mal qu’elle répand autour d’elle. Il n’en est rien. |
| | | | (#)Mar 6 Aoû 2019 - 11:55 | |
| Il aurait pu la repousser dès le premier sms, Terrence. Il aurait pu ne jamais lui répondre ou feindre un mauvais numéro. Il aurait pu lui demander pourquoi elle voulait le revoir après tant d'années de vide, lui dire qu'il avait mal et qu'il lui en voulait furieusement, qu'il ne voulait pas la revoir... mais ça n'aurait pas été vrai. La vérité, c'était qu'il ne lui en avait jamais voulu -pas même une seule seconde- d'avoir essayé de sauver sa peau. La vérité, c'était que l'overdose ne lui avait pas fait aussi mal que son absence, qu'il avait versé plus de larmes que tous les océans du monde réunis et que tout avait changé suite à ça. Mais il ne lui en voulait pas. Ils étaient jeunes, avaient la vie devant eux, des souvenirs plein les poches et probablement quelques rêves sous l'oreiller. Et s'il était jeune elle l'était d'autant plus alors il avait tenté de faire tout son possible pour l'éloigner des dangers, la préserver, la laisser rêver encore. Il avait fait en sorte qu'elle se tienne loin des fêtes trop arrosées, des drogues et de lui, souvent. Malheureusement malgré ses efforts acharnés il avait merdé sur toute la ligne. Il avait merdé et il se tenait responsable de tout, de l'échec de sa relation avec Freya, de la haine que nourrissait Wren envers lui, de Romy qui avait préféré suivre son amie plutôt que de rester avec Terry (et elle avait eu raison), de Sid aussi, qui s'était éloigné parce qu'il avait pris peur et enfin Charlie, sa précieuse Charlie, celle pour qui il aurait sans réfléchir donné sa vie, avait pris la décision de ne plus jamais le voir. C'est Romy qui le lui avait dit avant de quitter cette chambre pour toujours. "Elle ne reviendra pas, Terry". Et il avait voulu hurler, arracher les perfusions et courir partout pour la chercher, aller la voir, prendre son petit visage entre ses mains et entendre de sa bouche que c'était la vérité, qu'elle le laissait sans se retourner. Mais il n'avait jamais osé, trop effrayé à l'idée que ce soit vrai et que ça fasse trop mal. Pas le droit. Pas le droit, il n'avait aucun droit de la retenir, parce qu'il avait tout bousillé mais avait décidé d'assumer. On ne peut pas forcer quelqu'un à rester de toute façon. Alors il avait laissé faire, le coeur buté, l'amour en sang, les espoirs brisés.
Et il ne l'avait jamais montré, mais l'explosion de leur quatuor avait laissé des marques indélébiles contre son âme, des souffrances gravées au fer jusqu'à l'os, des larmes acides qui n'avaient toujours pas séché même dix ans après. Il se tenait responsable de tout et c'est la raison pour laquelle il pouvait affirmer sans ciller qu'il y avait un avant overdose et un après. Toute la force qu'il avait, cette outrecuidance, cette désinvolture royalement assumée s'était transformée d'un coup en peur. Peur de tout, peur d'un rien, peur d'être abandonné encore et encore, peur de ne pas être assez bien, peur de déranger, de faire de la merde, de prendre les mauvaises décisions, de faire les mauvais choix. Il y avait d'abord eu le choc frontal de la solitude soudainement omniprésente, envahissante, de l'absence des filles, elles qui constituaient son tout, son pilier, son rocher au coeur de la tempête et il y a eu le silence qui avait fini par remplacer leurs éclats de rires et leurs voix. Jamais il n'avait envisagé cette configuration, Terry, trop impétueux, à vivre au jour le jour sans s'inquiéter de demain à accorder trop de confiance surement en ce destin impitoyable qui l'avait mis à terre.
Quand Charlie était partie, dernière pièce du puzzle de sa vie à foutre le camps, il avait dû se rendre à l'évidence : il n'avait jamais senti un si grand vide en lui. Il avait passé des mois à se morfondre, Terrence, à composer son numéro encore et encore pour avoir des réponses, à demander à sa mère de demander à la sienne si elle allait bien, avait passé des heures à aller jusqu'à chez elle en vélo pour l'apercevoir l'espace d'un instant. Et puis il lui avait écrit une lettre, ne l'avait jamais envoyé, s'était contenté de la broyer entre ses paumes, les larmes rageusement essuyées de ses joues, et de la lancer dans le fond d'un tiroir de son bureau. Il avait passé des nuits à pleurer parce que ces trois amies lui manquaient, mais il avait surtout compris, Terrence, qu'il ne les reverrait jamais. C'est de ta faute, Terrence, c'est toi qui les a fait fuir. C'est toi qui a fait le con, mais regarde putain !! regarde le chaos que t'as semé. Il il avait grandit avec cette idée que tout était de sa faute, point central du cataclysme, détonateur d'une explosion nucléaire dévastatrice.
Quand il la voit arriver à leur lieu de rendez-vous c'est vertigineux, c'est un tsunami d'emotions qui le submerge et quand il la serre, il disparait un peu, efface les dix années écoulées à perdre pied, envoie valser la douleur et à la place respire son odeur. Elle lui a terriblement manqué et il n'avait pas réalisé à quel point jusqu'à ce qu'il la prenne dans ses bras, qu'elle redevienne concrète et pas seulement un souvenir gardé au fond du crâne. Elle est là, contre lui comme quand ils étaient petits et il ne peut pas se résoudre à s'éloigner d'elle. Elle pleure, il la sent trembler contre son épaule et dans son cou et il ressert l'étreinte, des larmes qui s'échappent lui aussi de ses paupières. Il a envie de lui dire que tout va bien, qu'il ne la laissera plus jamais partir trop loin, qu'il compte bien rattraper le temps perdu et qu'elle pouvait pleurer. Autant qu'elle le voulait. Il sent ses mains sur lui et ça lui arrache un sanglot, comme une réminiscence du passé, émotion qu'il n'avait jamais voulu oublier mais que le temps avait corrodé. Elle lui dit qu'elle l'aime, depuis le début et qu'elle l'aimera jusqu'à la fin et il inspire par saccades, les épaules qui tremblent, les yeux qui se ferment et la bouche qui se pince parce qu'ils sont à deux doigts de péter, les barrages. Et il ne veut pas. Il veut rester fort et accueillir ses larmes à elle sans qu'elle ne doive lui rendre la pareille. Il l'écoute ensuite lui demander pourquoi et il relâche leur étreinte pour se placer devant son visage, paumes sur ses joues, les pouces qui viennent essuyer ses larmes avec douceur. Il pose un regard tendre sur elle, tête légèrement penchée sur le côté. Et pourquoi je t'en voudrais d'avoir essayé de survivre? C'est plutôt moi qui devrais te demander pourquoi tu es revenue. Il lui prend une main parce qu'il refuse de perdre le contact de peur qu'elle disparaisse, l'autre main qu'il laisse passer rapidement sur son visage pour essuyer ses propres larmes et remettre ses boucles en arrière. Ses yeux dérivent, se posent sur la ville qu'on aperçoit en contre bas. C'est de ma faute si tu es partie, et n'essaye pas de me dire le contraire je pourrais pas te croire. C'est de ma faute et j'en suis désolé. J'étais jeune, je suis parti en vrille et jamais, jamais je ne t'en ai voulu. Jamais. La voix tremble un peu, le souffle est court. Il la regarde à nouveau, plisse les lèvres dans un sourire navré et fronce le nez avant de prendre un air grave. Je t'aime aussi. Je t'aime Charlie. Et ça changera jamais. C'est indiscutable, immuable et éternel. Il sera toujours là pour elle il le sait, quoi qu'elle décide, quoi qu'il arrive, et même s'ils ne devaient se croiser que tous les dix ans. Il hausse une épaule et sort une cigarette de sa poche, l'allume et recrache la fumée en soupirant, un peu fragilisé par tout ce qu'il ressent. J'ai envie de savoir ce que tu deviens, si tout va bien. T'as un copain? une copine? Tu travailles? Et tes parents? T'es heureuse Charlie? Dis-moi que ça va, qu'on s'est pas vu pendant dix ans mais que ça a servi à quelque chose... Il la bombarde de questions pour ne pas avoir à parler, ne pas avoir à lui dire que lui ça ne va pas, que ces dix années ont été clairement gâchées, qu'il les a saccagées, brûlées des deux côtés, subies. Il taira sa vie à lui trop décousue, trop incertaine. Mais il veut tout savoir d'elle alors il l'observe, la dévore des yeux parce qu'il la redécouvre et spontanément ressert sa main pour l'encourager à se livrer si elle en a envie. Ils ne se sont peut être pas vu depuis dix ans, mais il le sentait dans son coeur, rien n'avait changé. Rien. Petite soeur..
@Charlie Villanelle
Dernière édition par Terrence Oliver le Ven 6 Sep 2019 - 6:51, édité 1 fois |
| | | | (#)Jeu 15 Aoû 2019 - 16:07 | |
| I left you on a tray and pretended that you never existed at all
Elle n’aurait jamais cru tenir Terrence dans ses bras un jour à nouveau alors profite de chaque seconde de cette étreinte, refuse de le laisser s’éloigner d’elle alors qu’il chercher seulement à sécher ses larmes. Peu importe qu’il y ait des larmes, peu importe que tout ne soit pas parfait. Ils n’ont jamais été parfaits mais ils ont toujours été eux et ça lui a toujours suffit. Ca lui avait toujours suffit jusqu’au jour où elle a décrété qu'il avait franchi la limite et qu’elle l’a laissé avancer seul dans ce monde obscur. Telle était la véritable définition de l’abandon, pas Terrence qui se recule de quelques centimètres dans le seul but de sécher ses larmes. D’autres viendront les remplacer sur ses joues rosies, d’autres sortiront encore et encore de ses yeux rouges donnant encore plus d’intensité à ses yeux verts. Trop émue, à bout de force, elle ferme ses yeux et laisse échapper des hoquets de faiblesse. Elle ne contrôle plus rien et n’ose pas poser ses yeux dans les siens, pas encore en tout cas. Ses mains sur ses joues sont déjà bien assez, la blonde laisse ses mains quitter sa nuque pour attraper les siennes. Cette fois ci elle ne veut pas qu’il la lâche ou qu’il se recule de quelques centimètres à peine. Ses mains sur ses joues, c’est tout ce dont elle avait besoin. Après de longues secondes qui semblent interminables, elle arrive enfin à ouvrir les yeux et calmer les spasmes qui secouent son corps. Ce n’est qu’enfin, après de trop longues années de séparation, qu’elle peut plonger ses yeux dans les siens. Du bleu dans du vert, enfin. Charlie balaye les dernières larmes via la paume de sa main et sa vision devient claire à nouveau. Assez claire pour qu’elle distingue le brillant dans les yeux de Terrence signe qu’il est lui aussi prêt à pleurer à tout moment. S’il flanche, elle flanche. Son corps contient des quantités insoupçonnées de larmes. « Et pourquoi je t'en voudrais d'avoir essayé de survivre? C'est plutôt moi qui devrais te demander pourquoi tu es revenue. » Ses mots semblent tout droit sortis d’un rêve auquel elle n’osait plus penser. Ils se font peu à peu leur place dans l’esprit de la blonde et elle commence à les comprendre un à un. Il ne lui en veut vraiment pas, lui demande même pourquoi elle a fait marche arrière. La raison semble évidente pour la jeune femme - parce qu’il lui manque, qu’elle l’aime, qu’un meilleur ami ça ne s’oublie pas ; mais pas pour lui apparemment. Et elle ne le prend pas mal, elle essaye seulement de comprendre comment est ce qu’il peut avoir aussi peu de ressenti contre elle après tout ce qu’elle lui a fait subir. Leurs mains se lient à nouveau et c’est à son tour de détourner le regard alors que les yeux de la jeune femme restent fixes. « C'est de ma faute si tu es partie, et n'essaye pas de me dire le contraire je pourrais pas te croire. C'est de ma faute et j'en suis désolé. J'étais jeune, je suis parti en vrille et jamais, jamais je ne t'en ai voulu. Jamais. » Elle souffle à son tour, n’essaye même pas de nier la vérité qu’il vient de lui poser face à elle. Ce qu’il ne sait pas, c’est qu’elle a beau avoir fui à cause de ses actes, cela ne l’a pas empêché de commettre les mêmes à peine quelques mois plus tard et de s’éloigner de Romy et Freya. Tout a explosé à cause d’elle. Elle a été la première à quitter le navire, à faire chavirer le tout et les autres ont dû vivre avec. Elle a débranché son téléphone, s’est enroulée dans ses draps et a posé un coussin sous sa tête pour rester ainsi et pleurer pendant une éternité ou deux. « Je t'aime aussi. Je t'aime Charlie. Et ça changera jamais. » Elle n’arrive toujours pas à prononcer aucun mot pourtant elle voudrait lui dire qu’elle aussi. Elle voudrait lui dire tant de choses mais sa bouche reste une putain de barrière infranchissable. Quoi qu’il se passe encore et quoi qu’il se soit déjà passé, elle l’aime aussi et ça ne changera jamais. Jamais, jamais. Incapable d’empêche un sourcil réprobateur de se lever, elle le regarde allumer sa cigarette, détourne le regard pour ne pas en inhaler la fumée. Il ne faisait pas ça avant. Mais c’était il y a tant d’années … Ils ont grandi entre temps, tous les deux. « J'ai envie de savoir ce que tu deviens, si tout va bien. T'as un copain? une copine? Tu travailles? Et tes parents? T'es heureuse Charlie? Dis-moi que ça va, qu'on s'est pas vu pendant dix ans mais que ça a servi à quelque chose... » Elle n’est certainement pas douée pour comprend toute la complexité de l’être humain mais cette fois ci elle voit bien où il veut en venir. Elle fait pareil. Ils sont les mêmes. Parler de choses futiles, poser beaucoup de questions pour ne pas avoir à y répondre. Elle a la même technique. Tout le monde l’a, au fond. Alors elle a peur de lui exposer son bonheur à la figure si lui va mal et elle a peur de ne pas le faire et qu’il se morfonde dans ses problèmes. La blonde opte pour le juste milieu, pour le laisse rattraper les dix ans qui se sont écoulés sans pour autant rentrer dans les détails. « Ca va, ça va. J’ai quelqu’un dans ma vie et je l’aime et … enfin on est pas un couple mais ça va. Il me rend heureuse, vraiment heureuse. » Et un jour elle dira tous ces mots à Tim, elle osera ajuster les lettres les unes à la suite des autres pour que cela forme un tout cohérent. Elle se lèvera sur la pointe des pieds et elle l’embrassera pour la première fois, chose dont elle rêve depuis leur première rencontre. Elle ferra tout ça parce que Terrence vient de lui rappeler que tout peut basculer en un claquement de doigts et qu’elle n’a pas le droit de laisser Tim filer entre ses mains. Elle n’a pas le droit de l’abandonner lui comme elle a abandonné Terrence. « Mais tu sais, ça n’a pas toujours été le cas et y’a eu de sacrés bas et … ça n’a rien arrangé que je te laisse comme ça. Ca n’a servi à rien du tout. T’aurais pu être là pour moi et t’aurais pu m’empêcher de faire toutes ces conneries, et j’aurais été là à mon tour aussi ... » A son tour elle sert sa main dans la sienne, l’autre étant trop occupée à fumer une cigarette. Elle sort fort, trop fort. « J’arrête de dire que je suis désolée, c’est promis. Mais dis moi comment tu vas maintenant. Ca va mieux depuis le temps ? Tu fais quoi aujourd’hui, tu bosses ? T’es avec quelqu’un ? T’habites où ? T’as … un animal de compagnie ? » Parler d’elle ne la dérange pas, ce n’est pas une tactique pour éviter d’avoir à parler. Elle cherche seulement à entendre le son de sa voix pour quelques minutes supplémentaires avant que ce rêve ne s’arrête.
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| | | | (#)Ven 6 Sep 2019 - 22:48 | |
| Depuis qu'il l'avait découverte enroulée dans un lange de coton beige en train de téter un sucette en latex alors qu'il n'avait pas cinq ans, il n'avait eu de cesse de la trouver fascinante. Ses cheveux de feu, ses yeux de glace, son teint diaphane et ses sourires tendres.. tout en Charlie l'éblouissait. Il l'avait connu le caca collé aux fesses, de la purée sur le menton, avait probablement entendu ses premiers mots, assisté à ses premiers pas, l'avait serré contre lui quand elle faisait des cauchemars et avait aidé sa mère à soigner ses genoux écorchés. Il l'avait encouragé à s'élancer sur son vélo sans les petites roulettes, l'avait défendu des autres, du monde, avait partagé ses goûters, avait écouté ses confidences, dansé sur des musiques de dessins animés, avait rit aux éclats, avait dormi contre elle, s'était douché avec elle, sans jamais rien voir d'autre que cette petite soeur merveilleuse qu'il aurait toujours rêvé d'avoir. C'était ce qu'elle était pour lui même encore aujourd'hui, une petite soeur. Une meilleure amie. Une partie de son histoire, de son âme aussi. Et l'amer constat de son échec restait suintant et dégueulait des plaies de son coeur : malgré tous ses efforts, il n'avait pas réussi à la protéger de lui.
Depuis qu'elle l'avait laissé neuf ans plus tôt, il n'avait eu de cesse de penser à elle, à eux, au groupe, à leurs délires, à l'ataraxie insolente et naïve qui les unissait tous les quatre. Neuf ans, ça en laissait des traces. Face à lui, là, le visage si proche du sien, elle doit les voir les années, elle soit les remarquer, ses sourcils tristes qui autrefois n'étaient emplis que de rage et de force, elle doit les voir ses épaules assurément plus basses, la culpabilité qui les avait affaiblies jour après jour, année après année. Elle devait les sentir, Charlie, ses gestes tremblant et sa voix plus douce, son souffle fatigué et ses yeux verts délavés. Pourtant, il ne s'embarrasse pas de ça, Terry, préfère se concentrer sur elle et sur ce qu'elle ne dit pas, tente de déchiffrer sur son visage les marques du temps et peut etre qu'il espère y voir drapé un peu de bonheur. Mais il n'en voit pas. Elle est triste Charlie. Elle a l'air triste, et pas seulement émue de le revoir. Il a besoin de lui répondre, Terry, de lui dire qu'il l'aime, lui qui ne prononce pourtant jamais ces mots. Il ne les dit jamais parce qu'il a peur qu'ils soient de mauvais présage, qu'ils sonnent banals aussi, et communs. Il n'aime pas dire "je t'aime" parce que c'est toujours en deçà de la réalité, mots tous simples utilisés par tout le monde pour exprimer un milliard de sentiments différents. Mais il avait besoin de le lui dire, là, parce qu'il fallait qu'il matérialise cet amour et qu'il le verbalise; s'il ne la revoyait jamais, si elle décidait de disparaitre à nouveau, au moins il le lui aurait exprimé.
« Ca va, ça va. J’ai quelqu’un dans ma vie et je l’aime et … enfin on est pas un couple mais ça va. Il me rend heureuse, vraiment heureuse. » Il tire à nouveau sur sa cigarette et l'observe, fronce les sourcils mais ne dit rien. Pourtant il se demande si tout est si rose qu'elle semble le dire. "Ca va ca va" Charlie? Ca veut dire quoi cette distance? Pourquoi tu ne me dis pas tout? Parce que c'est trop sombre? Parce que finalement la vie rattrape tout le monde et que personne n'aurait été en mesure de te sauver ? T'es vraiment heureuse, Charlie? Parce que l'amour normalement, c'est bien plus qu'un "ça va" lâché rapidement entre deux souffles. non? Il plisse la bouche et lui sourit, Terry, décide de na pas répondre mais il hoche la tête et se retourne pour ouvrir une canette de coca qu'il lui tend. Il ne sait foutrement pas pourquoi il fait ça, geste réflexe du mec qui ne sait plus du tout quoi faire mais qui a au moins le mérite de tenter quelque chose, les yeux fixés sur elle et la clope qu'il fume comme si ça vie en dépendant. « Mais tu sais, ça n’a pas toujours été le cas et y’a eu de sacrés bas et … ça n’a rien arrangé que je te laisse comme ça. Ca n’a servi à rien du tout. T’aurais pu être là pour moi et t’aurais pu m’empêcher de faire toutes ces conneries, et j’aurais été là à mon tour aussi ... » on y est. Terry se redresse, les sourcils qui se froncent encore plus si c'est possible, pose une main sur la sienne et voudrait répondre mais il marque un temps, soupire et remonte sa main contre sa joue. Charlie, ça sert à rien de penser à ce qui aurait pu arriver tu sais. Il s'éloigne en souriant un peu tristement et s'ouvre une canette lui aussi, qu'il boit rapidement avant de la poser dans l'herbe. Il dit que ça ne sert à rien de penser à un hypothétique présent si le passé avait été différent mais en vérité lui même se tourne en boucle les évènements, se demande inlassablement ce que serait aujourd'hui si hier ils avaient tous fait d'autres choix. Est ce que les "bas" dont parle Charlie seraient moins bas? Est-ce qu'ils ne seraient pas tous un peu cramés au contact des autres, à faire de la merde, à partir en vrille? Est-ce que finalement ce n'est pas mieux comme ça, une Charlie et un Terry indiscutablement pétés mais qui respirent encore un peu? Oui, mais ça sert à quoi de ne vivre qu'à moitié..? Ca a peut être rien changé que tu me laisses, ou au contraire ça a peut être tout changé. On saura jamais. Ca t'a surement empêché de plonger comme j'ai plongé en tout cas, empêché de faire une overdose toi aussi. Ca m'a peut être donné la rage de pas laisser tomber pour, un jour, te retrouver? Si c'est ça, tu vois, ça a marché. Il esquisse un sourire sincère, les yeux qui tentent de trouver les siens pour lui faire comprendre que ça y est, c'est terminé, y a plus à lutter, à chercher les pourquoi des comment et à s'empoisonner pour des "et si". Il tente, Terrence, de la rassurer. De rationaliser. De donner raison à son départ parce qu'en vérité il était intimement persuadé que ça l'avait sauvé elle. « J’arrête de dire que je suis désolée, c’est promis. Mais dis moi comment tu vas maintenant. Ca va mieux depuis le temps ? Tu fais quoi aujourd’hui, tu bosses ? T’es avec quelqu’un ? T’habites où ? T’as … un animal de compagnie ? » Il n'est pas bête, il comprend la diversion. Il comprend qu'elle a déjà beaucoup parlé d'elle est qu'elle a besoin d'une pause, de savoir ce qu'il en est de lui, peut être que c'est primordial pour poursuivre les confidences alors il répond, le regard qui se perd sur son visage. Maintenant? Bah.. je vais pas te mentir, parce que tu sais que j'ai jamais su faire ça mais.. c'est pas la joie. y a cette moue qui s'esquisse, mélange de honte et de tristesse et il se mord la lèvre en fuyant son regard. Ca va pas mieux, non, c'est peut être même pire. J'vogue un peu, je sais pas trop ce que je fais encore là ni pourquoi mais je me suis fais une raison. J'ai pas réussi à décrocher, toujours junkie et pas fier. J'ai fait des études de droit parce que c'est ce que mes parents voulaient -tu les connais, ils étaient vraiment cons- mais ça m'a pas plu, alors j'ai tout arrêté et je me suis fait embaucher dans un bar pas super clean. C'est dur d'étaler le passé et de le faire tenir comme ça en cinq secondes, de le déposer sur la table comme on déroulerait le menu. C'est compliqué de lui montrer à quel point il est tout pourri, à quel point le ver avait grignoté les chairs jusqu'à atteindre le coeur, à tenter de gangrener les parties encore vivantes. C'est difficile mais il continue, les yeux vides. Je suis avec personne, non. Depuis freya y a pas eu.. j'ai pas eu.. Et puis je crois que j'aime surtout les garçons mais que je ne les intéresse pas beaucoup. Il tait volontairement la partie "je me fais du mal par le sexe" parce qu'elle n'a pas à savoir, parce que ça fait trop mal de le dire et qu'il suppose que l'entendre ne lui fera pas du bien.J'habite à fortitude, dans un petit studio que j'adore et j'ai pas d'animaux. Fin... sauf si tu considères que mon meilleur ami a un chat qui m'adore et un autre qui me snobe. Ce sont un peu les miens, puisque je les aime tout comme malgré ma phobie. Il esquisse un sourire en pensant à Léo et à ses deux matous, les deux seuls chats au monde que Terrence supporte. Et puis sans prévenir ça l'accable, ces masques qu'ils mettent, comme s'ils n'étaient que des inconnus qui avaient besoin de faire semblant, de couvrir les vérités sous des sourires et des "ca va ca va". Il soupire, les épaules qui s'affaissent et lui qui plante ses yeux dans les siens. Charlie écoute, on est pas obligés de faire ça, d'accord? Se parler, se raconter ce qui s'est passé, faire semblant que ça va alors que je sais que ça va pas. Ni toi, ni moi. Je sais qu'on s'est pas parlé pendant 9 ans tous les deux mais je suis toujours le même tu sais, celui qui riait quand tu pétais devant la télé, celui qui te faisait des couettes, celui qui a aidé ta mère à changer tes couches. Je suis le même que quand t'étais petite, quand tu me racontais que Marco DiMascio t'avais emmerdé à la récré ou que cette connasse de Stacy Jenkins te volait ton goûter. J'ai juste.. la peau moins lisse et la fureur un peu éteinte. Mais j'suis toujours là, le même, Charlie. Il s'approche, la serre furtivement et il lui relève le menton en souriant. S'il t'arrive quoi que ce soit, tu m'appelles. On s'est perdus une fois, je laisserai pas ça arriver encore. Et il espère qu'elle dira oui, qu'elle répondre "ok" et qu'elle laissera la petite fille qu'elle a été reconnaitre Terrence, et accepter que si certaines choses s'étaient altérées, une chose resterait toujours : l'amour. |
| | | | (#)Dim 15 Sep 2019 - 10:42 | |
| Terrence qui hoche la tête, qui esquisse quelque chose qui ressemble à un sourire et qui tend une canette de coca à Charlie. Il ne sait pas qu’elle n’aime pas ça et elle ne lui en veut pas parce qu’elle sourit faiblement à son tour. Dieu que cette situation est bizarre, que la tension est palpable alors qu’ils s’aiment tellement que les mots leur manquent. Elle pourrait lui avouer ses plus noirs secrets mais hors de question pour elle que de déjà gâcher leurs retrouvailles. Pas déjà. La fumée de cigarette lui monte aux narines et lui pique la gorge, elle se promet de jamais fumer. Pas de ça, en tout cas, parce que l’odeur est répugnante. (Si jamais Charlie tenait ses promesses, ça se saurait, parce que deux mois plus tard la voilà qui fumera tel un pompier) Elle se contente de se laisser faire, de regarder chacune des réactions de son ami sans les juger, de sa main sur sa joue jusqu’à son souffle léger et ses yeux qui se ferment en passant par l’autre main qu’il pose sur celle de Charlie. Il se passe tant de choses alors qu’ils sont encore au même endroit et qu’ils ne bougent pas réellement. Ils se disent tellement de choses en quelques mots et leur coeur respectif bat si fort qu’il pourrait s’évader de leur poitrine à tout instant. Et, oui, bien sûr que de penser à toutes les réalités alternatives ne changera rien à celle dans laquelle ils vivent pourtant Charlie se repose sur ces espoirs là, sur ces vies qu’elle aurait pu mener et dans lesquelles tout se passe merveilleusement bien. A defaut de pouvoir rêver dans le monde réel, elle rêve dans ceux là et elle le fait à merveille ; par habitude. Par besoin, par nécessité. Cela n’aura aucun impact sur leur quotidien, cela leur fera sûrement mal que de baser leur vie sur des “et si ... “ mais pourtant elle en a besoin et ce n’est pas lui et ses sourcils froncés qu’il l’en empêcheront. “Ca t'a surement empêché de plonger comme j'ai plongé en tout cas, empêché de faire une overdose toi aussi.” Elle ne peut pas s’empêcher d’avoir un rire bref mais réel, le genre de rire qui n’en a que le nom. L’overdose n’a pas été actée mais bon sang qu’est ce qu’elle s’en est rapprochée à de trop maintes reprises. Cette fois où Léo est venu la chercher alors qu’elle s’était mise en tête de faire un bain de minuit au beau milieu de l’hiver … au beau milieu de l’océan. Et Wren qui attendait sur la plage, Wren qui avait ce sourire et elle qui ne lui en veut toujours pas parce qu’elle le trouve trop cool. En tant que personnalité trop cool il est exempté de tous reproches, même celui de l’avoir vu s’enfiler trois joints de cocaïne et d’avoir continué à agir comme si de rien n’était. La discussion dérive vers Terrence lui même et un mince espoir consistait en ce qu’il lui dise que tout va bien pour lui, qu’il est heureux maintenant et qu’il mène une putain de vie de rêve. Mais Terrence ne dit rien de tout ça, Terrence est trop franc et trop brisé pour Charlie et cela ne fait que lui faire mal encore et toujours. Elle l’écoute démonter sa vie (en pleurant presque, oui) et se sent inutile. Elle ne peut rien faire pour lui, elle n’a jamais rien pu faire pour lui et la vie est un cercle ; tout se répète encore et encore. Il va être au plus mal et elle s’en ira ce jour là parce qu’elle n’a pas les épaules pour supporter ses maux qui sont bien trop puissants. Elle a peut être aidé beaucoup de personnes depuis, mais aucun d’eux n’étaient Terrence. Aucun d’eux n’étaient son Terrence. La blonde se contente de l’écouter pour le moment, de l’entendre parler de sa vie qui n’a rien d’idyllique. Elle y croyait dur comme fer pourtant, qu’il allait lui raconter un merveilleux conte de fée. La drogue, les études, le bar, les amours (l’absence d’amour) … Toutes ces révélations font mal à Charlie et il les enchaine. Personne n’a su l’aimer à sa juste valeur et ça lui fend le coeur parce qu’elle n’a jamais oublié la bonté de Terrence. Elle n’a jamais oublié Terrence tout court et elle a beaucoup de mal à concevoir que personne n’ait encore vu ses jolis yeux brillants et son sourire angélique. Il est si parfait aux yeux de Charlie, pourquoi personne d’autre ne le voit ? Contre toutes attentes, elle rigole alors qu’il lui avoue habiter à Fortitude Valley et partager sa vie avec deux chats au caractère opposé - tout comme le fait Charlie. Il a ce don de lui faire oublier tous les malheurs et de la faire sourire à nouveau à la simple évocation de petites bêtes poilues et d’un meilleur ami. Il a ce don là, Terrence, cette bonne humeur communicative même quand tout va mal. Elle pensait qu’il avait ce don, en tout cas, et le voilà qui joue la carte de la sincérité et ce n’est pas du tout ce qui plait à Charlie. Elle préfère quand ils vivent dans leur bulle de mensonges et de faux en tout genre, ça c’est ce qui lui plait réellement. Parler de vrais problèmes, de choses réelles, de personnes qui le sont tout autant … Non, ça n’a rien de beau tout ça, Ca n’a rien de joli, de brillant, de rassurant … La vraie vie est nulle, elle ne veut pas vivre dedans. Elle le déteste parce qu’il s’est senti obligé de tout faire éclater alors que rien ne l’y obligeait. Elle le déteste mais pourtant elle ne répond rien, se contente de déposer la canette de Coca-Cola toujours pleine sur le sol et de venir enlasser Terrence. C’est nul, que de reposer à nouveau les pieds sur la Terre ferme … mais s’il est à ses côtés alors tout est de suite beaucoup plus rassurant. Et là, assurément, il sera toujours à ses côtés. Ils n’ont pas à parler de tous ces souvenirs qui les font pleurer autant que rire. Rien ne les oblige à quoi que ce soit mais maintenant au moins ils seront là l’un pour l’autre et ils vivront leur merde ensemble, quelles qu’elles soient. ”Et s’il t’arrive quoi que ce soit, tu m’appelles. Moi aussi je peux te protéger maintenant.” Elle affirme, sûre d’elle, son nez blotti dans son cou et ses mains refusant de désserrer leur étreinte sur sa cage thoracique. Ils ne se quittent plus, maintenant.
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