And finally, we both came back home

Evelyn & Jessian

Vingt-sept ans, c’était la période. Tu savais que tu rentrais dans une poignée d’années où tes week-ends estivaux allaient être occupés par quelques mariages. Tu ne pouvais t’empêcher de serrer légèrement les lèvres pour retenir un sourire moqueur quand tu entendais les mariés prononcer leurs voeux. Si seulement le mariage était aussi simple que de se promettre de s’aimer … Pourtant, tu n’avais jamais conseillé à tes amies de ne pas te marier si c’était ce qu’elles désiraient. Après tout, ce n’était pas parce que tu t’étais mariée jeune et trop vite à l’autre bout du monde que tu devais te permettre de juger le choix des gens. Une chose était certainement cependant, tu étais bien décidée à ne plus repasser devant l’autel. Foutaises que toutes ces cérémonies, au final, ce n’est pas réellement ce qui compte. Et tu l’avais appris de la manière la plus cruelle du monde lors de ton mariage avec Abel. Vous étiez beaux, vous étiez jeunes, vous aviez de l’argent, vous étiez en bonne santé, bref, vous auriez dû avoir un long mariage heureux. Mais rien de tout cela ne s’est passé et apparemment vous aviez été les seuls à croire que vous finiriez par vieillir ensemble. Enfin, vous allez certainement vieillir ensemble car Morgane sera toujours ce lien entre vous qui fera que vous n’aurez d’autres choix que de vous croiser quelques fois dans l’année car quand elle quittera le nid familial, ce sera encore une autre dynamique qui pourra s’installer dans votre relation. Vous n’étiez pas à une nouvelle dynamique près donc cela ne te préoccupais pas. Pour l’instant, tu étais bien plus préoccupée par la nuit que tu avais passée dans les bras d’Abel que par tout le reste. Retomber dans les bras de ton ex-mari était la pire erreur que tu pouvais faire et pourtant, une petite partie de toi était ravie de l’avoir fait et continuait à avoir l’impression d’avoir partagé un moment unique que jamais plus tu ne revivras dans ta vie. C’état peut-être vrai mais cela n’excusait rien à tes yeux.

Une bonne amie à toi et collègue à l’agence de mannequinat vous avait annoncés qu’elle allait se marier l’été prochain. Cela faisait déjà plusieurs mois qu’elle préparait son mariage et il n’était pas rare qu’elle se confie à toi et te demande des conseils comme si le fait d’avoir été mariée faisait de toi une grande connaisseuse. Cela t’amusait plus qu’autre chose et tu avais toujours pris le temps de la rassurer. Tu avais préparé ton mariage seule, sans d’amie proche ou sans tes soeurs et tu savais à quel point c’était compliqué. Mais tu avais eu la chance d’avoir une excellente organisatrice de mariage c’est ce qui t’avait sauvée. Tu viens à peine de refermer la porte du vestiaire où tu t’étais changée après le photoshoot que ton amie se dirige vers toi complètement paniquée. « Tout va bien Haley ? » Lui demandas-tu curieuse. Elle leva les bras au ciel en faisant les cents pas devant toi. « Ma demoiselle d’honneur vient de me lâcher encore une fois ! On devait retrouver ma wedding planner pour visiter une salle de réception et elle m’a encore lâché ! » Le stress de notre boulot ajouté à celui du mariage ne l’aidait pas vraiment. Regardant ton portable, tu vis que tu avais du temps devant toi avant de récupérer ta fille qui passait la fin de l’après-midi avec ta soeur. Tu avais prévu de finir bien plus tard avec les photos à vraie dire. « Tu veux que je t’accompagne ? Si tu ne me retiens pas toute la soirée, j’ai encore un peu de temps avant de récupérer Morgane. » Haley te sauta dans les bras avant d’aller chercher ses affaires et de te retrouver dans le parking. Avant d’aller s’installer dans sa voiture, elle te remercia bien dix fois alors que tu lui promettais de la suivre jusqu’au domaine. Une fois arrivée, tu te garais et rejoignis Haley qui était excitée comme une puce. Vous prîtes le chemin qui menait à l’entrée et tu ne pouvais nier que l’endroit était magnifique. La vigne était très belle et à perte de vue de ce côté de la maison et le domaine qui l’accompagnait semblait imposant. « C’est magnifique. » Dis-tu à l’attention d’Haley mais cette dernière était déjà quelques mètres plus loin à parler à la personne qui devait être l’organisatrice de son mariage. Alors que tu te rapprochais, tu ne pus t’empêcher de froncer les sourcils. Ce visage, tu le connaissais, tu le connaissais même très bien. « Evelyn ? » Ne pus-tu t’empêcher de demander alors qu’Haley tournait son regard surpris vers toi. « Qu’est-ce que vous faites à Brisbane ? » Pour une raison que tu ignorais, tu t’étais persuadée que la jeune femme habitait toujours à Londres alors que comme toi, elle était originaire du coin.

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Evelyn avait pris de l'avance. Délaissant ses faire-part et son agence pour se rendre en Uber aux vignobles de Sirromet, elle poussa un soupir de contentement lorsque la caresse du soleil vint déposer sur sa peau un voile aussi léger que le souffle du vent qui fit doucement virevolter le jupon de sa jupe aux teintes automnales. Il ne faisait pas encore assez frais pour qu'elle délaisse sa garde-robe de mi-saison, et puis de toute façon, elle avait connu plus frisquet que les quelques 20 degrés qui faisaient frissonner ses compatriotes Brisbanien – elle avait beau adorer l'été, ses odeurs fruitées et sa chaleur réconfortante, l'hiver australien était sa saison préférée. Cette pensée la fit amorcer un sourire qui se perdit dans sa contemplation poussée du paysage qui s'étalait devant son regard chaussé d'une paire de lunettes de soleil bien opaques, et derrière lesquelles elle se cachait. Elle n'était pas tout à fait dans son assiette, et peut-être était-ce pour cette raison qu'elle s'octroya une longue balade au milieu des vignes qu'elle connaissait bien pour s'y être rendue à plusieurs reprises au cours des derniers mois. Cet endroit était le préféré des futurs mariés qui en plus de profiter des accommodations du site, ne juraient que par les différentes vues qui s'offraient à eux, donnant ainsi à leurs noces une ambiance aussi élégante que champêtre. C'était la tendance, et puisque cette dernière profitait autant à Evie qu'à la direction du site, elle n'avait pas mis bien longtemps à travailler régulièrement avec eux, leur assurant une publicité dont ils n'avaient pas vraiment besoin, mais qui asseyait la très bonne réputation de chacun. Après un tour supplémentaire tout près du lagon naturel, Evelyn alla se planter juste en-dessous d'un figuier. L'ombre de l'arbre lui fit enlever le Panama qu'elle portait par conscience stylistique et s'éventer avec, tandis qu'elle embrassa de nouveau le panorama du regard, perdue dans ses pensées. Ce n'était pas tant l'effort de sa longue marche qui l'accablait, mais l'impression désagréable, ainsi confrontée à l'immensité du paysage paisible qu'elle couvait des yeux, de s'enfermer de plus en plus dans sa solitude. Entre le départ de Matteo et sa prise de distances avec Marius sous le prétexte que les choses allaient beaucoup trop vite entre eux, sans parler de son obstination à ne pas vouloir côtoyer sa famille plus que de raisons, profondément marquée par les reproches de Celie et d'Ester à son encontre, mais aussi son conflit puéril avec Owen qui la touchait plus fort qu'elle ne l'admettrait jamais, elle se disait que depuis qu'elle était de retour en ville, elle n'avait pas su bien gérer sa vie sociale. Ce qui lui faisait amèrement regretter celle qu'elle avait lorsqu'elle était à Londres – même s'ils s'étaient récemment vus, Neal lui manquait terriblement, quand bien même Chad avait réussi à combler son besoin de s'accrocher à quelqu'un en qui elle avait toute confiance, à défaut de combler le reste. Elle avait toujours été solitaire, elle devait avouer néanmoins qu'elle se posait de plus en plus de questions sur sa fâcheuse manie à se refermer comme une huître sur sa précieuse petite perle dès que quelqu'un l'approchait de trop près ; Evie avait 34 ans et aucun bagage affectif majeur à sa portée, trop occupée à gérer sa carrière pour s'inquiéter du temps qui passe et de l'épée de Damoclès qui flottait au-dessus de sa tête.

Ses réflexions la firent considérer l'arrivée d'Haley en deux temps "Haley, je vous attendais." dit-elle en guise d'entame. Après avoir reposé son Panama sur sa tête, la main qu'elle lui tendit pour la saluer fût ferme, malgré la petite mine qu'elle avait sous ses lunettes qu'elle baissa d'un doigt pour affronter le regard de la jeune femme qui l'accompagnait, et dont le visage harmonieux la fit ouvrir de grands yeux "Jessian ?" fit-elle alors, n'en revenant pas de tomber sur elle en cette occasion – elle n'avait jamais été très expressive, réservant les contacts physiques chaleureux aux gens dont elle se sentait proches, aussi elle n'hésita pas à prendre la jeune femme dans les bras, tout en lui disant sur le ton de la surprise "J'ignorais que vous vous connaissiez, quelle coïncidence." Une coïncidence qui prenait l'allure d'un coup de maître du Destin pour la réconforter, même si ce n'était rien qu'un peu, car elle avait toujours beaucoup apprécié la jeune femme dont elle avait organisé le mariage, à l'époque. Se décalant pour la regarder quelques secondes, Evie emprunta un ton gorgé de bonne humeur qui lui laissa même filer un petit rire, tandis qu'elle récupérait ses mains pour les écarter devant elle, désignant les vignes par grands geste "J'ai repris mes activités ici depuis un moment déjà. Vous êtes en ville pour une séance photo… pour aider Haley, peut-être ?" se risqua-t-elle à demander par curiosité, tournant la tête dans la direction des jeunes femmes dans la foulée. N'oubliant pas qu'elle était avant tout ici pour faire son travail et répondre aux envies d'Haley, elle ajouta avec empressement, désignant l'une des chemins qui menaient aux différentes recoins du site "On pourrait peut-être se trouver un coin moins exposé, ou commencer tout de suite la visite… c'est comme vous le souhaitez."

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Evelyn & Jessian

Quand Haley t’avait demandé de l’accompagner pour visiter un potentiel lieu dans lequel aurait lieu son mariage, tu n’avais pas pensé une seule seconde que tu pourrais y retrouver quelqu’un que tu connaissais. Depuis ton retour à Brisbane, tu étais restée le plus loin possible de tout ce qui touchait au mariage et tu n’avais donc aucune idée des meilleurs organisateurs de mariage de la ville. Oh ta mère devait tenir un petit carnet les répertoriant dans l’espoir que l’une de ses filles passe devant l’autel mais ce n’était pas avec Sky qu’elle allait pouvoir l’exploiter, certainement plus avec Georgina. En arrivant au domaine, tu n’avais pu t’empêcher de trouver l’endroit à couper le souffle. C’était magnifique et tu voyais très bien Haley se marier dans ce décor. Sans pouvoir t’en empêcher, tu revenais des années en arrière, lors de ton propre mariage. Ce dernier avait eu lieu en plein Londres, dans une salle réservée à cet effet avec un petit jardin pour s’aérer mais se marier en ville n’avait pas le charme des grands espaces et de la nature. Perdue dans la beauté du paysage, tu revins rapidement sur terre quand ton regard se posa sur Evelyn. Quelle surprise ! Evelyn avait organisé ton mariage d’une main de maître à l’époque et tu ne doutais pas qu’elle continuait sur sa lancée aujourd’hui. Tu l’avais choisie parce que tu savais qu’elle venait comme toi de Brisbane et son nom de famille te garantissait un standing que tu cherchais à tout prix à avoir lors de ton mariage. Tu avais bien fait car ne comptant pas te remarier, au moins tu avais eu un très beau mariage la première fois que tu étais passée par là. Mais tu étais jeune, très jeune et quelque peu insouciante aussi à l’époque et tu avais eu de la chance qu’Evelyn soit aussi professionnelle et la personne qu’il te fallait. Tu n’avais pas hésité à la recommander à toutes les personnes qui te demandaient un conseil pour choisir leur organisateur. Mais tout ça c’était il y a plus de cinq ans, presque comme si c’était dans une autre vie à vraie dire. « Jessian ? » Un sourire se dessine sur ton visage alors qu’Evelyn se souvient de toi également. Quand elle s’approche pour te prendre dans ses bras, tu n’hésites pas à faire de même. « J'ignorais que vous vous connaissiez, quelle coïncidence. » Ce n’était pas vraiment une surprise. Oui tu étais une mannequin internationale mais tu ne passais pas ton temps sur les réseaux sociaux ou dans les pages people des magazines. Rien ne pouvait indiquer à Evelyn que tu connaissais Haley et tu doutais que cette dernière ait parlé de toi vu que vous étiez avant tout des collègues qui étaient devenues amies. Mais aujourd’hui, tu étais juste là pour dépanner. « Haley est une amie et collègue. Elle ne m’avait pas dit que son organisatrice n’était autre que la grande Evelyn Pearson. » Dis-tu sur un air un peu taquin alors que Haley vous regardait incrédule. Beaucoup de tes connaissances et de ton entourage à Brisbane oubliaient que tu avais été marié. Cela n’avait duré qu’un an tout au plus et tu étais revenue divorcée à Brisbane, ne te privant pas en soirée pour faire ce que bon te semblait. « Evelyn a organisé mon mariage quand j’habitais à Londres. » Dis-tu à Haley pour lui faire comprendre comment vous vous connaissiez. Tu ne pus t’empêcher de demander à la jeune femme ce qu’elle faisait là car pour toi, Evelyn avait quitté Brisbane de manière définitive et la dernière fois que tu en avais entendu parler, c’était par des amis qui te parlaient de son succès car ils étaient en liste d’attente. Mais tu n’avais aucun doute qu’elle avait autant de succès à Brisbane, sinon peut-être plus dans cette ville où son nom ne passait pas inaperçu. « J'ai repris mes activités ici depuis un moment déjà. Vous êtes en ville pour une séance photo… pour aider Haley, peut-être ? » Elle non plus ignorait que tu étais revenue à Brisbane depuis plusieurs années. Tu étais plus là pour dépanner Haley que pour l’aider mais tu feras de ton mieux pendant ces quelques heures pour lui faire comprendre ce qu’une vraie demoiselle d’honneur est censée faire car la sienne semblait peu impliquée. « Sa demoiselle d’honneur l’ayant lâchée au dernier moment, je suis là pour lui donner un coup de main. Mais je suis revenue vivre à Brisbane il y a quatre ans, peu après la naissance de ma fille. » Tu n’avais nullement envie de parler de ton divorce à Evelyn et puis peut-être qu’elle ne prendrait pas des nouvelles d’Abel ? Oh tu en avais à lui donner, simplement ces nouvelles n’avaient rien de nouvelles conjugales. « On pourrait peut-être se trouver un coin moins exposé, ou commencer tout de suite la visite… c'est comme vous le souhaitez. » Haley semblait ne pas tenir sur place et tu pouvais la comprendre. Alors que tu avais envie de prendre des nouvelles d’Evelyn, tu te souvenais du pourquoi vous étiez là. C’est Haley qui finit par répondre : « Je veux bien commencer la visite ! Ca a l’air magnifique ! » Elle était toute excitée et cela te fit sourire. Tu te souviens toi aussi de cette période là qui avait duré tout le temps des préparatifs. « Vous allez bien ? » Demandas-tu à Evelyn. « Si Haley est arrivée jusqu’à vous c’est que votre business doit être plus que florissant. » Ne pus-tu t’empêcher de remarquer. Haley n’était pas connue pour faire les choses à moitié et elle voulait toujours le meilleur, chose qu’elle pouvait s’offrir entre son salaire et les sous de ses parents.

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"La grande Evelyn Pearson." répéta l'intéressée, balayant l'air avec son panama, pas impressionnée le moins du monde par les propos un tantinet surestimés de Jessian. Ses anciens clients avaient tendance à la traiter comme la reine de Saba, ce qui était touchant finalement, mais ne reflétait pas tout à fait l'état d'esprit dans lequel elle exerçait sa profession. Elle avait beau vanter les mérites de son propre talent d'organisatrice, qui par ailleurs n'était pas exagéré tant elle savait y faire, elle avait toujours fait en sorte de ne pas tendre vers la prétention ; ça ne lui rendrait pas justice de le faire, et quand bien même elle lui trouvait tous les défauts du monde, sa mère lui avait tout de même appris à ne pas faire preuve d'autant de vulgarité pour mettre en avant ses qualités, même si elles étaient indiscutables. Néanmoins, elle prenait les compliments, et elle les chérissait tant que possible, croisant les doigts pour que les mariages qu'elle mettait en place durent plus longtemps qu'une soirée de rêve. C'était rarement le cas désormais, le business du divorce ayant de meilleurs jours devant lui depuis quelques années.
Roulant des yeux pour exprimer son amusement face à l'introduction de Jessian, elle laissa un petit sourire lui échapper, confrontée aux souvenirs du mariage de la jeune femme duquel elle avait tout organisé dans le moindre détails, et qui restait profondément ancré dans sa mémoire comme l'un des premiers mariages qui avaient eu un vrai impact sur son business. Grâce à Jessian et à sa notoriété, principalement ; elle avait su lui rendre l'entrain qu'elle avait mis à faire de ses noces un moment particulier en parlant de son agence à ses très nombreuses connaissances, un bouche à oreille qui lui avait vraiment permis de s'implanter dans le secteur "Un joli mariage, d'ailleurs. Et je ne dis pas ça parce que j'en étais l'organisatrice ; c'était touchant, et vous étiez si belle." fit-elle en opinant du chef, se rappelant de la jeunesse de Jessian lorsqu'elle avait dit oui à son cher et tendre, mais aussi de l'effet que leurs vœux échangés avaient provoqué dans l'assistance. Neal avait peut-être feinté une ou deux larmes de crocodile, histoire de la dérider un peu, si souvent concentrée lors de ses évènements qu'elle mettait toujours un peu de temps à fonctionner autrement que comme une machine prête à dégainer ses astuces et bons plans aux moindres imprévus se dressant sur son chemin "Je ne savais pas. Ça fait un bout de temps alors." ajouta-t-elle en apprenant que Jessian était de retour en ville depuis quatre ans, maintenant. Elle avait beau faire le suivi des clients dont elle s'était occupée au fil des années, les contacts se tarissaient fatalement, et c'était bien normal. Même si elle lui devait une fière chandelle, Evie n'avait pas gardé tant de contacts que ça avec la jeune femme, et son retour en ville la surprit autant que le fait qu'elles se croisent aussi inopinément "Votre fille ? Je constate que les choses vont pour le mieux, et j'en suis ravie. Félicitations." finit-elle par ajouter, enjoignant le duo à avancer pour investir les lieux, et commencer la visite qu'elle avait promis à sa future cliente "On va prendre de ce côté, on aura tout le temps de contourner les vignes pour se rendre sur les berges du lagon naturel. Après vous, Haley." Elle réenfila son panama, montrant le chemin à la future jeune mariée d'un geste décidé de la main, et elle lui adressa  un sourire – un sourire qui s'élargit lorsque Jessian vint à ses côtés pour s'enquérir de ses nouvelles "Très bien, je suis vraiment contente de vous voir." avoua-t-elle à l'adresse de la jeune femme à qui elle donna une légère pression sur le bras pour appuyer son appréciation de la voir. Elle mentait peut-être un peu lorsqu'elle prétendait bien aller, mais elles entretenaient une relation prestataire de service/cliente qui lui interdisait de rentrer dans le fond des choses, et de lui expliquer pourquoi elle préférait garder ses lunettes de soleil alors que l'automne venait de débuter et que le soleil était plus réticent à se montrer. Evelyn savait respecter ce genre de règles, elle était même très douée à ce jeu, faisant passer la vie de ses clients avant la sienne et s'y intéressant avec la bienséance qu'elle avait acquise tout au long de sa vie. Elles grimpèrent doucement pour rejoindre l'endroit indiqué par Evie qui, prenant gare de ne pas délaisser Haley, attentive à la beauté du lieu qui les entouraient, prit tout de même la peine de répondre à Jessian "Je fais de mon mieux. C'est moins simple qu'à Londres où je n'étais pas toute seule pour répondre aux attentes des nouveaux clients, mais mon carnet d'adresses s'est bien étoffé depuis que je suis rentrée." Un sourire distrait réhaussa ses pommettes et de nouveau, elle vint frôler le bras de la jeune femme à qui elle demanda avec un léger empressement qui allait de paires avec les confidences qu'elle quémanda soudain "Mais et vous, dites-moi un peu. Comment va votre époux ? Et votre fille, comment s'appelle-t-elle ?"

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Evelyn & Jessian

Etant née et ayant grandi dans une famille catholique pratiquante, tu avais toujours eu une idée assez idéaliste du mariage. Tes parents avaient toujours semblé s’entendre et tu n’avais jamais eu l’impression que cela leur demandait des efforts pour avancer à deux dans la vie. Aujourd’hui, avec le recul, tu avais compris que c’était simplement parce qu’ils ne voulaient pas vous le montrer et qu’ils devaient régler cela entre eux, quand vous dormiez le soir. Mais ils étaient heureux ensemble et tu le leur enviais toujours. Le mariage aujourd’hui ne te faisait plus du tout rêvé. Tu avais même décidé de ne plus jamais te faire passer la bague au doigt, promesse que tu t’étais fait intérieurement. Si tu n’étais pas fermée à l’idée d’avoir une relation et de retomber amoureuse, tu n’étais pas non plus en recherche. Tu laissais le temps faire les choses, profitant des rencontres que tu faisais dans ton boulot et quand tu avais le temps de sortir pour combler les manques physiques et affectifs qui pouvaient exister dans ta vie. Devant l’air surpris de Haley, tu ne tardais pas à préciser exactement comment tu connaissais Evelyn avant que cette dernière ne se fasse des idées. Ton mariage te semblait si loin … « Un joli mariage, d'ailleurs. Et je ne dis pas ça parce que j'en étais l'organisatrice ; c'était touchant, et vous étiez si belle. » Un petit sourire en coin apparut sur ton visage. Il était vrai que tu étais très belle. La robe que tu avais fini par choisir t’allait comme un gant et tu gardais précieusement les photos de ce jour inoubliable. Au moins, tu l’avais fait avec perfection une fois, tu n’avais pas besoin de venir compenser par une second mariage dont tu n’avais nullement envie que ce soit maintenant ou dans le futur si quelqu’un te le proposait. « Merci beaucoup. » Lui dis-tu sincèrement. Peu importe tout ce qui s’était passé ensuite, cette journée avait été parfaite en tout point et malgré les regards outrés de tes parents, rien n’était venu changer cela. En même temps, c’était un peu de ta faute, tu ne leur avais pas dit que tu les invitais à Londres car tu allais te marier. Oups … Tu ne tardais pas à dire à Evelyn que tu étais de retour à Brisbane depuis un bon moment, plus longtemps qu’elle certainement. Que vos chemins ne se soient pas croisés ne t’étonnait pas vraiment car tu évitais les mariages comme la peste et tu ne comptais pas en organiser un prochainement. « Je ne savais pas. Ça fait un bout de temps alors. Votre fille ? Je constate que les choses vont pour le mieux, et j'en suis ravie. Félicitations. » Les choses vont pour le mieux ? Tu fronces les sourcils quelques secondes. Est-ce qu’il se pourrait qu’Evelyn pense que tu es toujours avec Abel ? Votre divorce n’avait pas fait la une des journaux, tu n’étais pas une personnalité publique et ta vie n’intéressait personne ce qui t’arrangeait. Il était fort possible qu’Evelyn te pense toujours mariée et elle risquait de tomber de haut. « Ca n’a pas été facile au début, tout s’est enchaîné si vite mais revenir à Brisbane près de ma famille m’a été d’une aide précieuse. Sans eux, je ne sais pas quand j’aurais repris le travail. » Cela avait été ton but ultime en dehors du bien être de ton bébé. Tu avais perdu les quelques kilos superflus de ta grossesse assez rapidement et puis ensuite il avait fallu te remuscler et reprendre contact avec des anciens du milieu à Brisbane. Pour ça, Alexandre, ton agent de l’époque avait été parfait. « On va prendre de ce côté, on aura tout le temps de contourner les vignes pour se rendre sur les berges du lagon naturel. Après vous, Haley. » Cette dernière ne tarda pas à s’élancer dans la direction que lui avait indiquée Evelyn et tu lui emboitais le pas, profitant de l’attitude plus calme de l’organisatrice de mariage pour prendre de ses nouvelles. Vous aviez perdu contact quelques mois après le mariage ce qui n’était pas vraiment surprenant au final. Mais vous vous étiez toujours bien entendues et tu étais vraiment intéressée de prendre des nouvelles de ton interlocutrice. « Très bien, je suis vraiment contente de vous voir. » C’était partagé, tu étais ravie de retrouver Evelyn. Toi qui avais suivi Haley un peu à reculons il fallait l’avouer, tu ne regrettais plus les quelques heures que tu allais passer à faire le tour d’un vignoble charmant et parfait pour un mariage qui sera peut-être l’endroit que choisira ton amie qui sait ? « Je suis très contente de vous revoir aussi ! » Lui dis-tu sincèrement avec un sourire avant de laisser Evelyn te parler un peu plus de sa situation. « Je fais de mon mieux. C'est moins simple qu'à Londres où je n'étais pas toute seule pour répondre aux attentes des nouveaux clients, mais mon carnet d'adresses s'est bien étoffé depuis que je suis rentrée. » Tu te souvenais en effet d’un jeune homme à Londres qui avait secondé Evelyn et qui était plus proche de ton âge. Il avait su te calmer quand il le fallait et gérer toutes sortes de situation ce pour quoi tu lui avais toujours été reconnaissante. « Mais et vous, dites-moi un peu. Comment va votre époux ? Et votre fille, comment s'appelle-t-elle ? » Tu manquais de t’étouffer avec ta propre salive. Evelyn venait de confirmer tes doutes. Elle pensait que tu étais encore mariée à Abel. Tu savais avant de le lui dire qu’elle serait déçue d’entendre que vous aviez divorcé mais le lui cacher ne serait à rien non plus. Tu espérais juste qu’elle se contenterait de stocker cette information et te poserait des questions sur Morgane. « Je me souviens de votre assistant ! Il ne vous a pas suivi à Brisbane ? Vous n’avez trouvé personne à engager pour vous aider ? » Tu n’osais pas imaginer ce que cela devait demander comme boulot que de gérer une telle entreprise toute seule. « Ma fille s’appelle Morgane, c’est un vrai petit ange. Et Abel va bien, il a aussi déménagé à Brisbane pour être proche de Morgane. Je … Je pensais que vous l’auriez appris mais Abel et moi avons divorcé peu après la naissance de notre fille. » Dis-tu incapable de regarder Evelyn dans les yeux. Tu aurais aimé ne jamais avoir à prononcer ces mots mais la situation de l’époque était insupportable et tu avais laissé de nombreuses chances à Abel de se rattraper, sans succès …

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"Neal. Il s'appelle Neal." ponctua Evelyn, interrompant poliment Jessian dans le renvoi d'interrogations qu'elle mit en place pour poursuivre leur petite conversation. Elle avait toujours préféré l'usage du prénom du jeune homme plutôt que celui du terme assistant, c'était comme ça. De son avis, il méritait qu'on parle de lui de la meilleure des façons et qu'on ne diminue pas son influence en lui collant une étiquette qui manquait autant de panache sur le front ; il était plus qu'un assistant. D'ailleurs, elle avait beau lui accorder tout l'amour du monde, elle se serait bien passée de parler de lui à ce moment-là. Elle ressentit un petit pincement au cœur à l'idée d'expliquer à la jeune femme pourquoi elle s'était implantée seule dans sa ville natale, le laissant derrière elle avec, pour seule compagnie, leurs nombreux souvenirs communs et de tout ce qu'ils avaient bâtit ensemble, à quatre mains. Ce n'était pas qu'une question de rupture professionnelle dans le fond, et au plus il lui paraissait évident que le jeune homme ne viendrait jamais la rejoindre, au plus elle sentait qu'elle prenait la distance qui les séparait comme une preuve irréfutable qu'ils avaient toujours été plus que des associés ; des amants occasionnels, c'était une certitude, mais sans doute avait-elle aussi négligé l'effet qu'il lui faisait pour mieux supporter l'idée qu'elle l'avait toujours un peu trop aimé – un peu comme tous les hommes qui gravitaient dans son entourage et desquels elle finissait toujours par s'éloigner par crainte profonde de s'engager dans quelque chose qui échappait à tout son contrôle. Elle prit une légère inspiration "Il a préféré rester à Londres. C'est chez lui, vous savez. J'aurais été égoïste de l'embrigader dans mes projets en sachant qu'il est si proche de sa famille." Il le lui avait bien fait entendre, à ce propos ; pointant du doigt à quel point elle pouvait être insensible quant au fait que lui, il ne pouvait pas se permettre de laisser tout derrière lui sans se retourner comme elle l'avait fait en quittant Brisbane, puis en quittant Londres, quelques années plus tard. Un goût amer empli sa bouche. En même temps, elle remonta ses lunettes sur le haut de son nez, lorsqu'elle ajouta "Je me laisse encore le temps de lancer les candidatures pour le poste d'assistant. Je vais avoir du mal à imaginer quelqu'un d'autre que lui dans ce rôle en particulier, mais il est de plus en plus évident que je ne vais plus pouvoir gérer tout ça toute seule… même si j'aime beaucoup prétendre le contraire, je le reconnais." Un léger rire s'échappa de ses lèvres. En vérité, elle n'envisageait pas du tout de rechercher quelqu'un avec qui travailler. Bien que ses retrouvailles avec Maze lui avait distraitement fait caresser l'idée de lui proposer une place au sein de son agence, elle savait néanmoins que la jeune femme s'était spécialisée dans un autre domaine que les mariages, alors pour l'instant, elle estimait qu'elle se débrouillait plutôt bien toute seule, se reposant sur ses nombreux partenariats pour engranger de la main d'œuvre à moindre coût.
Un changement d'atmosphère fit craindre à Evie d'avoir osé entamer un sujet qui ne plaisait pas à Jessian. La façon dont elle avala sa salive lui fit plisser les yeux, alors qu'elle prenait des nouvelles de l'époux de la jeune femme et de sa fille, qu'elle n'avait d'ailleurs jamais eu l'occasion de rencontrer. Une intuition fit réduire la cadence du pas de l'organisatrice de mariages. D'un même mouvement, elle lâcha le bras de Jessian pour poser sur elle un regard plus intéressé plus que scrutateur. Sa bouche forma un O à la seconde où il lui parut catégorique que la jeune femme évitait son regard par crainte qu'elle ne lui pose trop de questions à propos de ce divorce qu'elle n'avait pas vu venir. Oui, elle se laissait encore surprendre par ce genre de nouvelles, elles n'étaient pas exceptionnelles pourtant "Je suis vraiment désolée de l'apprendre." commenta-t-elle sincèrement, avant de reprendre dans un tout petit sourire fugace, posant les yeux devant elle pour suivre des yeux le chemin qu'elles empruntèrent chacune à un rythme différent "Qu'est-ce qu'elle doit être jolie votre petite Morgane." Que dire de plus à propos de la séparation de Jessian et d'Abel ? Les couples dont elle s'occupait n'avaient aucun compte à lui rendre en définitive, et quelque part, c'était tout à leur honneur de s'apercevoir, un peu tard cela dit, que leur union ne répondait pas aux attentes qu'ils avaient nourris. Les aspirations de chacun évoluaient dans le temps, et les sentiments n'y échappaient pas non plus. C'est la vie, aurait lancé Ethel avec ce ton gorgé d'enthousiasme qui faisait sa singularité, et Evelyn ne pouvait que lui donner raison à ce sujet "Tout se passe bien entre vous, néanmoins ? Je sais que les divorces ne sont pas toujours évidents à gérer." osa-t-elle s'enquérir, ne pouvant s'empêcher de regretter secrètement qu'une petite fille soit impliquée dans cette séparation.

And finally, we both came back home

Evelyn & Jessian

Votre visite du domaine commence tranquillement. Evelyn et toi laissez Haley prendre les devants et s’extasier devant chaque nouvelle vue, chaque parcelle de terrain. Tu ne serais pas étonnée de voir la jeune femme choisir cet endroit pour célébrer ses noces. Mais elle aura le temps de décider plus tard. Pour l’instant, ton attention est tournée vers Evelyn et tu prends des nouvelles de son assistant. Toutefois, à peine ce mot est-il sorti de ta bouche qu’elle te reprend : « Neal. Il s'appelle Neal. » Tu te sens idiote sur le coup, tu ne voulais pas rabaisser le jeune homme ou quoi que ce soit de ce genre, tu ne te souvenais tout simplement pas de son prénom. Tu ne répondis rien, laissant le rouge te monter légèrement aux joues mais tu compris qu’il y avait une histoire derrière l’absence de Neal à Brisbane et que cette histoire n’était peut-être pas aussi simple qu’une relocalisation de l’affaire d’Evelyn qui les avait amenés à se séparer. Toutefois, cela ne te regardait pas et tu décidais de ne pas poser de questions. Si elle voulait t’en parler, elle pouvait très bien le faire. « Il a préféré rester à Londres. C'est chez lui, vous savez. J'aurais été égoïste de l'embrigader dans mes projets en sachant qu'il est si proche de sa famille » Tu hoches la tête car tu comprends parfaitement bien. Tu avais imposé à Abel ton déménagement à Brisbane avec Morgane en lui faisant comprendre qu’il n’avait pas son mot à dire. S’il voulait voir sa fille plus que quelques jours par an, il devrait te suivre. Et franchement, tu n’avais pas pensé à l’époque qu’il le ferait. Quand tu l’avais vu débarquer à Brisbane, cela avait été un choc pour toi. Abel avait toute sa vie, sa famille, ses amis à Londres et il adorait cette ville. Il te l’avait faite découvrir de fond en comble et tu l’avais aimée avec lui. « Pour avoir déraciné complètement Abel, je comprends que cela ne soit pas facile. C’est dommage, vous formiez une excellente équipe et je lui dois une fière chandelle ! Sans lui je pense que mes parents auraient tué Abel sur place. » Dis-tu amusée en te rappelant la scène. C’était de ta faute, tu n’avais pas dit à tes parents que tu les invitais à Londres pour ton mariage car tu savais très bien qu’ils auraient tout fait pour qu’il n’arrive pas. C’était Neal qui les avait remis en place quand ils avaient voulu faire un scandale à l’église. Ah que de souvenirs … « Je me laisse encore le temps de lancer les candidatures pour le poste d'assistant. Je vais avoir du mal à imaginer quelqu'un d'autre que lui dans ce rôle en particulier, mais il est de plus en plus évident que je ne vais plus pouvoir gérer tout ça toute seule… même si j'aime beaucoup prétendre le contraire, je le reconnais. » Contrairement à Evelyn, tu n’avais pas besoin d’assistants ou de personnes qui travaillaient pour toi. En intégrant l’agence, tu les laissais s’occuper de tous les côtés pénibles de la gestion de ta carrière et tu profitais des photoshoots. Bien sûr, tu avais un droit de regard et tu ne les laissais pas faire n’importe quoi mais au moins, tu n’étais responsable de personne. « Si vous arrivez encore à gérer, laissez-vous le temps qu’il faut. Choisir son binôme de travail c’est aussi important que choisir son partenaire de vie. » Surtout que des fois, on passe plus de temps avec le premier que le dernier. Si Evelyn n’était pas au bord du burnout, elle avait bien le temps de se trouver un assistant qui lui conviendrait.

Après avoir pris des nouvelles de son entreprise, Evelyn voulut prendre des nouvelles de ton mariage. Tu n’étais pas la personne la plus médiatisée de la planète, loin de là même mais tu pensais que la nouvelle serait arrivée aux oreilles de la jeune femme par le téléphone arabe. Ton divorce était loin d’être un secret même si tu n’aimais pas en parler. Voilà pourquoi tu t’étais légèrement tendue quand Evelyn avait abordé le sujet mais tu lui répondis calmement qu’avec Abel, vous étiez divorcés depuis plusieurs années déjà. Tu vis la surprise et la tristesse se dessiner sur le visage de la jeune brune. Elle croyait vraiment en l’amour ça c’était sûr et certain. « Je suis vraiment désolée de l'apprendre. » Tu n’en avais aucun doute mais toi tu étais soulagée que le divorce ait eu lieu. C’était étrange comment en quelques mois, tout avait changé pour Abel et toi. Tu l’avais aimée comme une folle, une part de toi l’aimeras toujours mais contrairement à ce qu’on veut vous faire croire quand vous êtes gamine, l’amour ne suffit pas toujours. « Qu'est-ce qu'elle doit être jolie votre petite Morgane. » Attrapant ton téléphone portable dans ton sac, tu te rends dans la galerie d’images pour en dégotter quelques uns de ta fille. Une chose était certaine, elle était magnifique. « Elle l’est mais je ne suis pas très objective. Tenez, elle est là. » Lui dis-tu en lui tendant ton téléphone portable sans hésiter. Montrer ta fille dès que tu en avais l’occasion à qui voulait bien l’admirer c’était devenu une habitude. « Tout se passe bien entre vous, néanmoins ? Je sais que les divorces ne sont pas toujours évidents à gérer. » Tu ne peux empêcher un petit soupir. Oui, les choses se passent plutôt bien entre vous mais ce n’est pas non plus si parfait que cela comme entente. Et il y avait eu cette nuit que vous aviez passée ensemble et que tu essayais de chasser de ton esprit … C’était compliqué, beaucoup plus que cela devrait l’être mais c’était certainement aussi parce que vous n’aviez jamais réellement discuté de ce divorce, jamais parlé de ce qui s’était passé. « Ça se passe plutôt bien. Abel voit Morgane un peu tous les dimanches après-midi et en a la garde un week-end par mois. Nous avons fini par trouver notre rythme en quelques sortes. » Dis-tu en haussant les épaules. « Mais ce n’est pas facile tous les jours, je le reconnais. Toutefois, c’était nécessaire, rester mariés n’était pas une option. » Il fallait être honnête. Morgane était un nouveau-né quand vous aviez divorcé, elle ne se souviendra jamais de la famille que vous aviez formée pendant quelques mois et c’était mieux ainsi, cette famille n’était pas très reluisante.

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Neal et Evelyn formaient une excellente équipe. C'était douloureux à entendre, parce que c'était la vérité. La jeune femme opina du chef au regret que prononça Jessian, choisissant encore une fois de ne pas rentrer dans les détails par peur d'outrepasser les convenances et d'en dire beaucoup trop au sujet de tout ça. Elle ne put que sourire franchement aux souvenirs qu'elles partageaient à propos du mariage de la jeune femme et de la façon si particulière qu'avait toujours eu Neal de gérer les parents des mariés. Une tâche ingrate – la pire de toutes, d'une certaine façon, beaucoup plus éprouvante que la gestion des mariés eux-mêmes – qui lui était souvent incombée puisqu'il apparaissait qu'il était plutôt doué à l'exercice, endossant le rôle de défendeur de la cause de ses clients avec une fougue qui faisait sa réputation et qu'elle lui enviait secrètement. Non, vraiment… si elle devait choisir un nouveau partenaire pour mener à bien ses affaires, il faudrait que ça se déroule sur le même modèle qu'avec Neal à l'époque où il avait postulé à l'annonce qu'elle avait faite publier ; c'est-à-dire qu'un coup de foudre la frappe sans qu'elle ne s'y attende véritablement et que leur façon d'envisager le métier se complète pour former un tout. Mais ce genre d'opportunité ne se présentait pas tous les jours, elle en était horriblement consciente et finalement, elle était plutôt d'accord avec Jessian à ce propos : trouver un partenaire, qu'importe le domaine, c'était quelque chose de trop important pour être pris à la légère. Alors oui, elle se laisserait le temps, c'était plus que capital à ses yeux.
Vissant un peu mieux ses lunettes de soleil sur le haut de son nez, Evie s'intéressa aux photos de sa fille que Jessian lui montra. Une bouille à croquer sur laquelle la malice creusait des fossettes qu'elle avait héritées de la jolie jeune femme qui était à ses côtés, le tout surmonté d'une tignasse aussi brune que celle de ses deux parents ; une miniature des deux jeunes gens qu'elle avait rencontrés il y avait une éternité de ça "Oh, elle vous ressemble beaucoup. Une future graine de modèle, j'en suis convaincue." laissa-t-elle échapper, vraiment frappée par la ressemblance de la petite-fille avec sa mère à qui elle adressa un regard en biais au travers de ses lunettes. Brièvement, elle se demanda quelles étaient les raisons de sa séparation d'avec son époux. C'était un peu malvenu comme interrogation mentale, mais elle se souvenait qu'ils avaient été assez fous pour braver l'autorité de leurs parents, alors qu'est-ce qui avait bien pu se passer pour qu'ils décident que ça n'en valait plus la peine finalement ? Certes, la jeunesse était un facteur indiscutable dans cette union, mais en même temps… Evie connaissait des couples qui avaient tenu la distance, même s'ils s'étaient mariés à peine majeurs. Malgré l'environnement dans lequel elle évoluait, elle ne croyait pas aux fins de contes de fées. Pourtant, elle n'était pas assez cynique pour affirmer que, dans certaines conjonctures, l'amour finissait toujours par triompher… pas cette fois-ci apparemment, et ça la contrariait un peu "Tant mieux si ça se passe bien, c'est ce qui compte. Il n'y rien de pire qu'un divorce qui se passe mal, c'est presque autant éprouvant qu'un mariage qui bat de l'aile." commenta-t-elle en lui donnant son assentiment par un léger signe de tête. Elle la tourna un moment pour poser son regard sur Haley qui semblait préférer se lancer dans l'exploration du domaine de son côté, ayant sans doute compris que les deux jeunes femmes avaient du temps à rattraper. L'organisatrice de mariages se sentit tout de même un peu coupable de la négliger, mais au plus Jessian lui parlait de son divorce, au plus elle se sentait irrésistiblement intriguée par les raisons de cette séparation qui lui apparaissait comme un gâchis monumental. Cédant son téléphone à Jessian, et gardant en tête l'image de la petite fille qu'elle venait de voir sur l'écran, elle hésita une poignée de secondes avant d'enfin oser lui demander "Je vais sans doute briser toutes les règles en matière de bienséance, et je suis navrée que vous soyez celle sur qui ça va tomber, mais…" Elle roula ses lèvres l'une sur l'autre comme si elle préparait sa bouche au déshonneur que ça représentait à ses yeux de lui poser la question qu'elle laissa filer pourtant, les sourcils très légèrement froncés sous le cadre de ses lunettes de soleil "Qu'est-ce qui s'est passé, c'était aussi invivable que ça ?" Et soudain, elle se reprit, secouant la tête avec énergie et balayant son interrogation d'une main qu'elle abattit devant son propre nez en faisant la moue "Ne répondez pas, Jessian. Ça ne me regarde absolument pas, excusez-moi."

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Evelyn & Jessian

Un peu moins de dix ans te séparait d’Evelyn et ce n’était pas tant que ça. Mais tu avais toujours beaucoup admiré la jeune femme, c’était sans doute cela qui t’avait poussé à l’engager comme organisatrice de mariage. Et tu ne l’avais pas une seule fois regretté. Tu avais parlé de cette expérience à toutes les personnes qui t’avaient demandées si tu avais des recommandations et tu savais que cela avait eu des répercutions sur le nombre de mariages qu’avait organisé Evelyn dans l’année qui avait suivi ton mariage. Tu avais été ravie de faire ça pour elle, rien que parce qu’elle avait été la première personne à ne pas vous juger, Abel et toi. Tu te rendais compte aujourd’hui que tous ces gens avaient eu raison de juger mais au final, cela n’avait rien changé parce que vous aviez besoin d’apprendre de la manière la plus difficile c’est à dire en vivant directement les différentes déconvenues qui vous attendaient. L’attitude compréhensive, la soutien qu’Evelyn et ses équipes vous avait apporté avait été très précieux à tes yeux car à contre courant de toutes les réactions qui vous étaient arrivées à la figure. Alors que tu es amenée à parler d’Abel et de ta relation avec ce dernier, il était presque évident que tu allais finir par parler de Morgane. Tu finis par sortir ton portable pour montrer une photo de ta fille à Evelyn, photo que la jeune femme regarda avec attention et elle te sourit en disant : « Oh, elle vous ressemble beaucoup. Une future graine de modèle, j'en suis convaincue. » Tu laissais échapper un petit rire à ces paroles. Tu ne savais pas ce que voudrait faire Morgane mais tu ne comptes pas la pousser à suivre tes pas si ce n’est pas ce qu’elle désire vraiment. Ton métier est une passion pour toi, c’est indéniable et tu voulais que cela soit la même chose pour ta fille. Elle avait de toute manière le temps de décider. « Modèle ou non, elle sera ma plus grande réussite même si elle est arrivée bien plus tôt que prévu. » Dis-tu à Evelyn. Tu t’étais rapidement mariée avec Abel, peut-être trop jeune tu n’en savais rien mais les enfants n’avaient jamais été dans l’équation. Vous en aviez parlé une seule et unique fois, discussion de laquelle il était ressorti que vous en vouliez mais un jour peut-être, pas tout de suite. La vie en avait voulu autrement et vous n’aviez pas été capable de faire face aux changements que demandait cette nouvelles inattendue. Alors qu’Haley avançait et découvrait le domaine devant vous, totalement hypnotisée, tu te retrouvais à parler de ton divorcer avec la personne qui avait organisé ton mariage. « Tant mieux si ça se passe bien, c'est ce qui compte. Il n'y rien de pire qu'un divorce qui se passe mal, c'est presque autant éprouvant qu'un mariage qui bat de l'aile. » Pour toi, divorcer avait été la partie facile finalement. C’était ta grossesse qui avait été la période la plus compliquée de ta vie jusqu’à aujourd’hui. Beaucoup de femmes aimaient raconter que c’était les plus beaux mois de leur vie et tu voulais bien le croire quand elles te racontaient des scènes de bonheur conjugal mais ce n’était pas du tout ce que tu avais vécu. Pour toi, cela avait été une solitude sans pareille et un sevrage forcé qui n’avait pas toujours été simple à gérer. « Pour nous le divorce a été la partie facile. » Dis-tu en haussant les épaules. Certainement parce qu’Abel n’avait pas fait de vagues. Avec tes parents dans l’équation, il aurait tout perdu s’il avait essayé d’obtenir plus. Pas plus d’argent, Abel en avait déjà et toi aussi, cela n’avait pas été un problème entre vous. Non, c’était Morgane votre trésor et tu n’avais eu aucune envie de la partager plus que quelques heures de temps en temps. De plus, vu le comportement d’Abel pendant ta grossesse, tu ne lui faisais nullement confiance à l’époque. Alors il n’avait pas fait d’histoires et tout s’était passé tranquillement finalement. Alors que vous marchiez côte à côté, Evelyn te surprit en te demandant : « Je vais sans doute briser toutes les règles en matière de bienséance, et je suis navrée que vous soyez celle sur qui ça va tomber, mais… Qu'est-ce qui s'est passé, c'était aussi invivable que ça ? » Tu ne pus t’empêcher de la regarder avec de grands yeux surpris. Ce n’était pas du tout le genre de la jeune femme de te poser ce type de question. Tu avais bien compris à l’époque qu’elle avait certaines règles car comme tout le monde, elle devait être curieuse. Mais elle ne l’avait jamais fait. Et elle tombait plutôt mal, tu détestais parler de ton divorce … « Ne répondez pas, Jessian. Ça ne me regarde absolument pas, excusez-moi. » Tu vis qu’Evelyn s’en voulait et cela fit apparaître un petit sourire sur ton visage. Tu ne lui en voulais pas, après tout c’était normal de se poser des questions. « Je … Vous avez le droit de vous interroger c’est juste que … » Tu ne savais pas par où commencer, comment lui faire comprendre que non, invivable n’était pas le mot que tu aurais utilisé. C’est plutôt que la confiance que tu avais en Abel, en votre relation s’était évaporer. Oh tu l’aimais, comme une folle mais tu savais que tu te condamnais en restant auprès de lui pour la forme et tu refusais de te condamner à vingt-trois ans. « Abel et moi on s’est marié jeunes, on se pensait assez mature pour ça mais on était conscient de ne pas être prêts pour des enfants. Morgane a été une surprise. Une bonne surprise aujourd’hui mais pas tant que ça à l’époque. Disons que ma grossesse et les premiers mois de Morgane ont changé notre relation. Ce fut une période difficile et même si Abel est aujourd’hui un bon père, il ne l’a pas toujours été. » Il n’avait surtout pas été un bon mari et un bon partenaire, c’est certain. « Vous êtes mariée ? Vous avez des enfants » Lui demandas-tu curieuse à ton tour. Cela ne te regardait pas vraiment mais tu tentais de demander quand même.

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Confuse au sujet de sa propre curiosité, Evelyn faillit fausser compagnie à son ancienne cliente pour rejoindre son amie qui n'hésitait pas à se répandre en commentaires sur le domaine ; à l'entendre, elle le trouvait fantastique, elle avait même déjà des idées pour la célébration. L'organisatrice de mariage lui renvoya un sourire enthousiaste, même si elle avouait que son esprit était occupé par autre chose à ce moment-là, entre sa confusion de s'être montrée trop curieuse et les soucis qu'elle ruminait dans l'intimité de ses pensées. Aussi, interdite à propos de ce qu'elle venait d'apprendre sur la mariage d'Abel et Jessian, elle finit par retourner son visage vers cette dernière.
Ce qui faisait la force et la réputation d'Evie Pearson, c'était cette façon qu'elle avait de doser minutieusement son intrusion dans la vie de ses clients. Ils passaient des mois à se côtoyer, pourtant elle n'était qu'un ombre bienveillante qui veillait à ce que tout se passe bien selon leurs critères, même les plus exigeants. Elle n'en demandait jamais trop ni trop peu, sachant parfaitement où se situait la limite et faisant en sorte de ne jamais les dépasser, beaucoup trop perspicace pour ignorer que s'immiscer dans l'intimité des autres n'était jamais rien de bon. C'était pour cette raison qu'elle avait tant de succès dans le milieu en vérité. Elle savait tout à fait s'éclipser au bon moment, peu à l'aise avec l'attention en générale, et ne dérogeait pas au contrat qu'elle signait avec les jeunes mariés dont elle s'occupait. Elle restait une passerelle dans la vie de ces couples qui venaient la trouver dans l'espoir de vivre le plus beau jour de leur vie, leur attribuant assez d'attention pour qu'ils gardent un bon souvenir d'elle et vantent ses mérites encore des années après. Elle ne se liait pas d'amitié avec eux, même si elle prenait parfois des nouvelles de ceux avec qui elle s'était particulièrement bien entendue – en d'autres termes, elle était d'un professionnalisme à rudes épreuves, et qui collait bien aux services de son agence. Après tout, c'était tout ce qu'on attendait d'elle.
Alors oui, elle fût surprise par elle-même quand elle demanda à Jessian les raisons de ce divorce auquel elle ne s'attendait absolument pas. Ça lui avait échappé, si bien qu'elle s'excusa immédiatement après, déjà parée à tourner la page et à faire comme si elle n'avait jamais rien demandé. Seulement, la jeune femme lui répondit, de quoi apaiser la gêne relative qui l'avait rendue blême sous les bords de son Panama qu'elle refixa discrètement sur sa tête après avoir remonté ses lunettes sur le haut de son nez. Elle n'aimait pas donner son avis sur l'âge auquel ses clients se mariaient, convaincus que l'amour n'avait pas vraiment d'âge. Compte tenu de sa position, il était souvent tentant de glisser dans le jugement, mais Evelyn essayait la plupart du temps de ne pas se montrer regardante sur ce qu'elle avait sous les yeux – ça ne la concernait pas finalement, elle n'était là que pour préparer la fête, qui était-elle pour trouver qu'untel n'allait pas avec untel, ou qu'unetelle méritait mieux que untel ? Sévèrement, elle se réprimandait lorsqu'elle se surprenait à émettre une conclusion négative à ses observations poussées ; c'était ce qu'elle avait fait lorsqu'elle avait pressenti un drame en s'occupant du mariage d'Amal et de Carlisle, convaincue en son for intérieur que quelque chose n'allait pas avec ses deux-là. Elle avait démissionné, incapable de faire preuve de neutralité lorsqu'elle avait été persuadée que ça ne fonctionnerait jamais entre eux. Avec Jessian et Abel, malgré leur jeune âge, elle n'avait pas eu besoin de se forcer à ne pas les juger. Elle les avait trouvés attendrissants, sans doute était-ce pour cette raison que la nouvelle de leur divorce la secouait un peu.

"On dit souvent que le mariage est un sérum de vérité. Tout change après la cérémonie, pour le meilleur et pour le pire… c'est comme ça qu'on dit." fit-elle avec subtilité, ne réussissant pas vraiment à cacher la tristesse provoquée par les propos de la jeune femme "Si vous êtes plus heureux chacun de votre côté, c'est sûrement parce que vous aviez besoin de plus de temps pour vous apprivoiser. Ou alors que vous n'étiez pas fait pour ça, ça arrive plus souvent qu'on ne le croit." Beaucoup plus souvent, faillit-elle ajouter, adressant un léger sourire à Jessian lorsqu'elle lui demanda si elle était mariée et si elle avait des enfants. Elle hésita, mais c'était de bonne guerre – elle s'était montrée indiscrète, aussi serait-elle hypocrite de s'offusquer en refusant de rentrer dans les détails de la vie qu'elle menait "Je fais partie de ces gens pour qui le mariage n'est pas une option envisageable, justement. C'est ironique compte tenu de mon métier, mais ça me permet aussi d'avoir un peu de recul sur tout ce qui m'entoure. Ne soyez pas désolée pour moi, c'est un choix que j'assume parfaitement depuis des années." Elle anticipa la réaction de la brunette, tout simplement parce qu'elle avait été habituée à devoir supporter la déception de ceux qui ne comprenaient pourquoi elle n'était pas mariée ; entre les compliments et les suppositions visant à savoir ce qui n'allait pas chez elle exactement, elle s'y était accoutumée, validant ses décisions sans jamais se justifier à ce sujet, libre et fière de l'être "Et non, je n'ai pas d'enfants. Mais j'ai des neveux et nièces, c'est bien suffisant pour le moment." Un petit rire ponctua sa révélation tandis qu'elle hésita de nouveau à faire savoir à la jeune femme qu'elle avait justement une nièce de l'âge de sa fille. C'était une limite qu'elle ne dépasserait pas, cette fois. Au lieu de quoi, elle pointa Haley du doigt "Je devrais peut-être cesser de vous importuner avec mes questions et me charger de votre amie. Elle va finir par se sentir délaissée."

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Le plus étrange avec ton divorce c’est que souvent les gens ne demandent pas vraiment de détails. Cela t’arrange car tu n’as pas vraiment envie de leur en donner mais c’est surprenant. Tu restes en général dans les grandes lignes, ne donnant vraiment aucune information utile et pour une raison qui t’échappe, cela semble suffire à tes interlocuteurs. Tu as vite compris qu’ils dressaient dans leur esprit le scénario qui leur paraissait le plus probable en considérant que c’était ce qui s’était produit. Ils imaginaient toutes sortes de fantasmes qui allaient de la tromperie, à l’enfant illégitime, à des relations complètement folles. Mais ils étaient tous très loin de la vérité, une vérité qui semblait aujourd’hui intéresser Evelyn. Cela t’étonnait qu’elle se montre ainsi curieuse car elle ne l’avait jamais été quand tu t’étais mariée mais peut-être que c’était important pour elle de repenser à votre mariage et d’essayer de voir ce qui aurait pu lui donner des indices ? Tu doutais qu’il y ait pu en avoir à ce moment-là car tu étais persuadée que ta vie avec Abel allait être remplie de bonheur la plupart du temps et que jamais il ne cesserait de t’aimer. Et peut-être avais-tu eu raison ce jour là car le manque d’amour n’a pas été la cause de votre divorce, bien au contraire, c’est le besoin que l’autre puisse être heureux, puisse arrêter de se sentir mal dans sa peau, mal dans cette relation qui vous avait poussé tous les deux à signer les papiers. Morgane était venue tout chambouler et vous avait changé à tous les deux, pour le meilleur individuellement mais pour le pire quand vous étiez tous les deux. « On dit souvent que le mariage est un sérum de vérité. Tout change après la cérémonie, pour le meilleur et pour le pire… c'est comme ça qu'on dit. Si vous êtes plus heureux chacun de votre côté, c'est sûrement parce que vous aviez besoin de plus de temps pour vous apprivoiser. Ou alors que vous n'étiez pas fait pour ça, ça arrive plus souvent qu'on ne le croit. » Les paroles de la jeune femme te laissèrent pensives. N’étiez-vous pas fait pour le mariage ? Tu n’étais pas certaine que le problème ait été celui-là. Parce que vous aimer, vous respecter, vous compléter, vous l’aviez très bien fait quand vous étiez deux. Le problème c’est que tu avais grandi plus vite qu’Abel, tu n’avais pas eu le choix et soudain, le faussé avait commencé à se creuser et la distance à s’installer et tu avais eu la grossesse la plus solitaire du monde. Tu exagérais certainement parce qu’il y avait eu Lizzie et tes amis londoniens mais ce n’était pas le soutien que tu avais attendu. « Pour nous le changement a été l’arrivée de Morgane. Nous étions insouciants mais cela n’avait pas d’importance quand nous étions tous les deux. Mais un enfant, c’est tout de suite une autre dynamique. » Tu ne te souviens même pas aujourd’hui si vous aviez réellement abordé ce sujet plus d’une fois ou deux pour vous assurer que vous voudriez une famille un jour. Quand tu avais annoncé à Abel la venue de votre fille, il avait d’abord cru que c’était une blague avant que tu ne puisses plus retenir tes larmes. Tu ne pus t’empêcher de demander à Evelyn si elle était mariée et si elle avait des enfants. Tu n’avais jamais pris le temps de le faire quand tu étais à Londres en train de préparer ton mariage. Mais la jeune femme t’avait toujours semblé bien mystérieuse alors tu ne sais pas si elle t’aurait répondu. Cette fois elle le fit : « Je fais partie de ces gens pour qui le mariage n'est pas une option envisageable, justement. C'est ironique compte tenu de mon métier, mais ça me permet aussi d'avoir un peu de recul sur tout ce qui m'entoure. Ne soyez pas désolée pour moi, c'est un choix que j'assume parfaitement depuis des années. » Tu fronçais les sourcils à ses paroles. Une option pas envisageable ? Cela voulait dire quoi exactement ? Tu n’avais pas de pitié pour elle, loin de là, tu trouvais ce choix très courageux. Toi tu avais toujours rêvé de te marier, de fonder une famille de la même manière que tes parents. Sauf qu’avec le temps, de l’autre côté de l’autel, tu avais envisagé des hommes comme des femmes mais c’était un autre sujet. Avec Abel tu avais eu tout cela, le seul problème était que le mariage s’était arrêté plus tôt que prévu. Tu respectais les gens qui ne voulaient pas se marier, cela ne voulait pas dire qu’elle ne pouvait pas vivre une très belle histoire. « Je ne vois pas pourquoi je vous plaindrais. Si c’est votre choix, libre à vous. Mais qu’entendez-vous par ‘option non envisageable’ ? » Ne pus-tu t’empêcher de lui demander presque malgré toi. Tu avais envie d’apprendre à connaître cette femme qui faisait encore aujourd’hui parti de tes modèles quand on parlait de classe et d’élégance. Tu ne venais pas de milieux comme le sien, des fois, tu voyais très bien qu’il te manquait les codes. « Et non, je n'ai pas d'enfants. Mais j'ai des neveux et nièces, c'est bien suffisant pour le moment. » Cela pouvait l’être sans nul doute ! « Ils doivent être ravis d’avoir retrouver leur tante Evelyn ! » Tu ne savais pas l’âge qu’ils avaient mais ils n’avaient pas dû beaucoup voir leur tante dans les premières années de leur vie si elle habitait à Londres. « Je devrais peut-être cesser de vous importuner avec mes questions et me charger de votre amie. Elle va finir par se sentir délaissée. » Haley était encore devant vous sur le sentier, déjà à des années lumière de votre journée s’imaginant se marier ici. Tu ne doutais pas que la cérémonie allait se dérouler dans ce vignoble à part vraiment un autre coup de coeur. « Vous avez raison, de nous trois, c’est bien elle qui va se marier. » Dis-tu pour plaisanter alors que vous remonter le sentier jusqu’à Haley qui était en train de dévorer la vue maintenant que vous étiez un petit peu plus en hauteur.

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Il semblait évident que la conversation arrivait à sa fin. Jessian ne se rendrait sûrement pas compte que, comme chaque fois que l'on se dirigeait dangereusement vers le terrain de sa vie privée, Evelyn préférait écourter le débat et détourner l'attention. C'est ce qu'elle fit à ce moment-là, reprenant les choses en mains en laissant tout de même échapper un sourire en catimini lorsque la brunette lui déclara son assentiment à propos de son célibat. Ce n'était pas un choix qu'elle envisageait parce que ça ne l'intéressait pas, c'était aussi simple que ça. Elle avait toujours vécu sa vie en solitaire, se vautrant dans l'indépendance comme dans un canapé bien moelleux, et soucieuse de garder sa liberté, elle ne s'était jamais imaginée vivre une vie à deux. C'était trop de contraintes à ses yeux. Pour en avoir observé beaucoup, elle savait que s'engager dans une vie de couple, c'était signer un contrat tacite pour faire quelques efforts, mais surtout, beaucoup de concessions ; targuez-là de faire preuve d'égoïsme, mais au moins elle avait le courage d'admettre qu'elle ne voulait pas se sentir obligée de quoi que ce soit pour les beaux yeux de quelqu'un d'autre, ayant trop bataillée pour mener la vie dont elle avait envie, débarrassée du courroux de sa propre famille, et habituée désormais à n'attendre rien de personne, si ce n'était d'elle-même. Bien sûr, il n'y avait pas que cet aspect qui comptait dans ce genre d'histoire, et loin d'être inhumaine, la jeune femme ressentait plus qu'elle ne l'aurait voulu. Mais même si elle se sentait éprise parfois, charmée par l'aura de certaines hommes qui gravitaient dans son univers, personne ne lui avait pourtant jamais donné l'envie de passer outre son grand besoin d'indépendance pour s'enfoncer dans la routine d'une romance, et à son âge, on ne se berçait plus d'illusions. Grand bien lui faisait, elle finirait célibataire, et ça lui convenait.

"Oh, c'est juste une façon de parler." éluda-t-elle face à la question de Jessian à propos du caractère non-envisageable qu'elle accolait à ses choix de vie, à celui-ci, en particulier. Elle n'avait pas envie de s'appesantir sur le sujet, encore moins de se lancer dans une thérapie improvisée. De ce fait, couper subtilement court à ce sujet lui apparut soudain comme la meilleure technique à adopter ; sa préférée, celle dans laquelle elle excellait depuis bien des années, et qui ne faisait naître même pas une once de culpabilité lorsque doucement, elle se repliait sur elle-même, toute mystérieuse qu'elle était. Cependant, elle consentit à donner une dernière bribe d'information sur sa vie à la jeune femme, de quoi contenter la curiosité qu'elle avait vu naître au travers de ses lunettes de soleil classieuses qu'elle remonta de nouveau sur son nez, un sourire flottant sur son visage illuminé par le soleil d'automne "On apprend tout juste à se connaître, eux et moi. Je n'en ai pas vu grandir certains, mais j'essaye de passer le plus de temps possible avec eux. Ils sont mignons, surtout les plus petits." Ça ferait bientôt trois ans qu'elle était de retour en ville, et avant tout ce qui avait jalonné sa réinstallation, c'était la rencontre des enfants de ses sœurs qu'elle choisirait comme évènement marquant. Elle était tombée amoureuse de la bouille des tout-petits, de leurs rires, de leurs mots d'enfants, et de leur enthousiasme à la réinsérer dans le cadre de la famille qu'elle avait quittée pour mieux se construire, même si ça restait difficile, la plupart du temps ; chez les plus grands, elle était déjà capable de déceler la force de caractère des Pearson, et même si elle partageait moins de moments privilégiés avec eux,  eux qui étaient déjà soucieux de vivre leur vie, elle savait qu'il était inutile de s'inquiéter pour eux – c'était ses neveux et nièces qui la rendaient un tantinet moins égoïste en définitive "Et je vais faire tout mon possible qu'elle se souvienne aussi bien que vous de la cérémonie, parole d'honneur." fit-elle solennellement, et ce sans laisser échapper à voix-haute la pensée qui lui traversa furtivement l'esprit, et qui pointait du doigt l'espoir que les noces d'Haley ne se terminent pas comme celle de Jessian "C'est partie. Haley, dites-moi un peu comment vous voyez les choses de votre côté." s'élança-t-elle après avoir pressé une dernière fois le bras de Jessian et l'avoir silencieusement invitée à la suivre pour enfin s'intéresser à la vision des choses de la future mariée. La parlotte, c'était une bonne chose, mais elle n'était pas ici pour se tourner les pouces après tout. Bien décidée à faire du mariage de la jeune femme un évènement dont elle parlerait encore dans une dizaine d'années, elle revêtit son costume de femme de terrain, prête à en découdre avec l'organisation de ce mariage qu'elle voyait déjà grandiose.

rp terminé.