Leah sortait tout juste d'un restaurant où elle avait eu rendez-vous avec une vieille amie connue à l'université. Toutes les excuses étaient bonnes pour sortir de chez elle et éviter l'ambiance oppressante qui régnait désormais à l'appartement. Celui-ci était rempli de cartons, appartenant tous à Stephen. Le déménagement du brun était proche, et la jeune femme vivait très mal toute cette situation. Elle n'avait pas voulu de cette rupture et l'idée qu'elle perdait la seule personne qui l'ait jamais rendu heureuse la plongeait dans un état de détresse émotionnelle profonde. A ce stade, elle se demandait si elle serait même encore capable de rester là bas après son départ. Ca avait beau être son appartement avant qu'il ne vienne vivre avec elle, les lieux étaient maintenant imprégnés de souvenirs heureux, derniers vestiges d'une relation qui avait éclaté en mille morceaux. Par sa faute. Le kiné faisait déjà du très bon travail en l'évitant soigneusement tant que possible, mais Leah n'était pas en reste. Si elle avait commencé par se morfondre chez elle les premiers jours, elle avait décidé de se reprendre en main afin d'éviter de sombrer davantage dans la tristesse. Si la moindre possibilité qu'ils se remettent ensemble existait, ça ne serait certainement pas dans le cas où elle se conduirait comme une loque. Alors, elle avait recommencé à sortir et à s'occuper l'esprit; déambulant dans la ville seule ou avec des amis. Elle reprenait contact, et quand elle ne voyait pas quelqu'un, elle se concentrait sur les tests des pompiers. Elle avait déjà passé le psychologique, le physique, les tests cognitifs... Il lui en restait quelques-uns et elle les attendait avec impatience. C'était à peu près tout ce qu'il lui restait désormais. Dans un soupir, elle débarqua sur le trottoir en mettant les mains dans sa longue veste. Le temps était doux, mais les températures se rafraîchissaient quelque peu. Les yeux baissés en direction du sol, la brunette marchait à vive allure en direction de sa voiture. Celle-ci était garée à quelques rues, car elle n'avait pas pu trouver de places plus proches. Maugréant en elle-même, elle accéléra davantage le pas et c'est ce moment que choisi une jeune femme pour faire de même mais dans la mauvaise direction. Les deux brunes se télescopèrent, Leah perdant à moitié l'équilibre et l'autre faisant tomber son téléphone au sol. Oups. "Désolée." Lança Leah en s'abaissant pour ramasser l'objet, espérant que ce dernier n'avait rien. Elle le retourna pour l'observer sous tous les angles avant de le rendre à sa propriétaire, avec un petit sourire pour la forme. "Il n'a rien. Vous avez de la chance, c'est pas très résistant ces trucs là." En vérité, les téléphones de la brunette étaient aussi résistants que les autres, mais avec de fortes tendances suicidaires qui les poussaient à se trouver plus rapidement à terre que dans son sac ou sa poche. En tout cas c'est l'excuse qu'elle utilisait pour expliquer l'état lamentable dans lequel ils se trouvaient parfois. Dans un dernier sourire, la jeune femme voulu s'éloigner, mais une cohue d'adolescentes en délire leur tombèrent dessus en poussant des cris stridents, armées de leurs téléphones et commençant à les photographier tout en scandant un prénom qu'elle ne parvenait même pas à comprendre. Lully... Quoi? C'était qui celle là? Leah fronça les sourcils, abaissant d'un geste le bras d'une gamine de quinze ans qui tentait de se prendre en selfie avec elle. "Mais qu'est-ce qu..." Interdite, la brune observait la foule qui commençait à s'agglutiner autour d'elles, sans rien comprendre à ce qui lui arrivait.
«- Oui papa, je sais, non je vais essayer de ne pas être en retard, mais tu sais que ça ne dépend pas de moi. J’ai beaucoup de travail oui. Non, les Dixon ont décalé d’une demie heure leur rendez-vous pour goûter les plats du mariage, je n’y peux rien. Je vais faire ce que je peux mais je ne te promets rien. Oui je sais que maman va râler si je ne suis pas ponctuelle mais je n’y peux rien et si elle est bipée au dernier moment pour une urgence à l’hôpital ? C’est la même chose papa, tu peux lui dire mais…»
Lullaby lève les yeux au ciel, c’est toujours la même chose avec ses parents. Alors qu’elle a supporté pendant des années la capacité de sa maman à disparaître au dernier moment, à ne pas être présente pendant des heures quand sa fille aurait eut besoin d’elle et de ses conseils, aujourd’hui personne ne comprend qu’elle puisse avoir des imprévus et un programme qui peut changer au dernier moment. Le soupir qu’elle pousse au combiné n’échappe pas à son paternel qui la gronde un peu, pour la forme, quoi qu’il n’ait jamais été très doué pour gronder sa seule et unique fille, sa princesse.
«- Ecoute je vais faire mon maximum mais je dois te laisser maintenant j’ai encore des choses à faire. Oui. Embrasse maman pour moi oui. Je t’aime aussi. Bisous papa !»
Sa conversation tout juste terminée, Lullaby ne lève pas le nez de son téléphone, sortant son bloc note pour vérifier une adresse sur celui-ci, en même temps qu’elle se permet d’aller un peu plus vite pour rattraper le temps qu’elle a perdu avec son papa au téléphone. La jeune femme a encore prévu plein de trucs pour aujourd’hui et parfois, si elle veut pouvoir faire tout ce qu’elle a prévu dans une journée, il vaut mieux qu’elle ne traîne pas trop dans les rues, au risque de prendre plus de retard encore, si quelques followers lui tombent dessus. Parce qu’elle s’efforce toujours d’être disponible et qu’elle a du mal à leur dire qu’elle est occupée, craignant de recevoir de mauvaises critiques sur le web. Ouai, parce que les gens n’imaginent pas que tu puisses avoir autre chose à faire que sourire à la caméra.
Son téléphone tombe à terre dans un petit bruit caractéristique alors que la jeune femme vient de percuter une inconnue qui ramasse son téléphone. Celui-ci n’a rien, heureusement et Lullaby peut le reprendre rapidement, en remerciant la jeune fille qui vient de le lui ramasser.
«- Et vous, ça va ?»
A peine le temps de répondre avant de s’éclipser, qu’il est déjà trop tard. Quelques jeunes filles repèrent l’influenceuse à deux pas de leur lycée et se précipitent sur les deux filles en appelant Bee, prenant des photos de cette dernière, en prenant l’autre fille en même temps, sans faire attention. On se presse, on demande des selfies. Bee est prompte à activer le mode sourire insta pour ces objectifs qui foncent sur elle. Question d’habitude. Elle coule en même temps un regard désolé sur la brune à ses côtés, qui arrive sur plusieurs selfie sans rien avoir demandé et surtout, sans rien y comprendre.
«- Désolé…»
Bee ne sait même pas si l’inconnue va l’entendre alors que la foule agglutinée l’empêche de partir et retourner à ses occupations. La jeune wedding planner songe que ça va finir par se calmer. Elle continu de sourire pour quelques photos histoire de satisfaire tout le monde, puis elle dira qu’elle a du travail et qu’elle doit filer. En général, ça marche bien, si elle a laissé un peu de temps pour prendre des photos avant, les gens râlent moins. Parce qu’elle n’a pas envoyé bouler, ça passe toujours mieux. Faut bien faire plaisir à son public après tout. Dans ce boulot, le moindre coup de moins bien peut vous exposer aux critiques.
«- Dites ça fait quoi d’être amie avec Lullaby ? C’est vous qui la prenez en photo des fois ? Vous vous êtes rencontrés comment ?» telles sont les questions qu’assez rapidement, les adolescentes posent à Leah.
Au moment même où le corps de Leah entrain en collision avec celui de la jeune inconnue, sa première pensée fut pour Romy à qui elle avait fait subir le même traitement. il fallait qu'elle s'inquiète sérieusement de sa capacité à regarder devant elle car, à ce stade, elle n'allait pas tarder à se prendre un mur ou un poteau au lieu d'une vraie personne. Et les dégâts seront probablement un peu moins sympathiques qu'un sac ou un téléphone tombé à terre. Soupirant face à sa propre maladresse, la brunette s'abaissa afin de rendre le téléphone intact à sa propriétaire en s'excusant presque par automatisme. « Et vous, ça va ? » Leah hocha vivement la tête dans un petit sourire. "Rien à signaler de mon côté." Répondit-elle en regardant au sol si aucun de ses effets personnels n'en avait profité pour s'étaler aussi. "Encore désolée, j'avais vraiment la tête ailleurs." Et c'est sur ces belles paroles que la brunette voulu s'éloigner, mais c'était sans compter la horde de jeunes filles qui leur tomba dessus à toutes les deux. Il ne lui fallu pas plus de quelques secondes pour comprendre que la raison de cet engouement et du mouvement de foule était justement l'inconnue qu'elle avait bousculé sans le vouloir. Enfin, pas si inconnue que ça apparemment. Les adolescentes scandaient le nom de Bee tandis que la concernée se pliait volontiers au jeu des photos et des questions/réponses. C'était chouette pour elle, vraiment, mais Leah n'appréciait que moyennement de se retrouver au centre de toute cette attention. Son regard croisa celui de Lullaby alors que celle-ci lui lançait un « Désolé…» muet. Elle fronça les sourcils avant de reporter son attention sur les gamines qui l'entouraient pour la prendre en photo et l'interroger, persuadées qu'elle était amie avec cette Lullaby. Non mais vraiment, c'était un sketch. «- Dites ça fait quoi d’être amie avec Lullaby ? C’est vous qui la prenez en photo des fois ? Vous vous êtes rencontrés comment ?» La brunette leva les yeux au ciel avant de secouer ses boucles brunes, dépitée. "Ca ne me fait strictement rien, je ne la connais pas. Vous vous trompez sur mon compte je..." "T'as tellement de chance, j'aimerais être trop être à ta place." Lança une gamine qui l'observait avec des yeux immenses, faisant s'attendrir la brune qui comprenait doucement que Bee devait être quelque chose qui se rapprochait d'une idole pour ces filles là. Soit. Il n'empêchait qu'elle n'avait strictement rien à faire là. Son regard glissa à nouveau vers la jeune femme qui continuait à sourire pour les photos et à enlacer ses jeunes fans. La pauvre, ça devait être usant si elle devait supporter ça tous les jours. Finalement, et après de longues minutes où Leah ne parvint pas à s'extraire de la foule, celle-ci se dissipa d'elle-même. "Et c'est comme ça tous les jours?" Demanda-t-elle à Lullaby en haussant à nouveau sourcil étonné, le ton partagé entre l'humour et la compassion.
Je devais bien admettre au demeurant que parfois ma vie pouvait s’avérer compliquée et qu’une simple sortie de chez moi pour aller aux courses ou pour m’occuper des mariages de mes clients, pouvait tourner à mon désavantage. Aujourd’hui en était encore la preuve alors que je venais tout juste de percuter une demoiselle qui ne regardait pas d’avantage que moi. Alors que je m’assurais que tout ailles bien pour cette dernière, je fus rapidement assaillis par quelques jeunes filles piaillantes, téléphones brandis en avant pour me demander de prendre des photos avec ces dernières. Je me pliais à l’exercice, comme toujours, souriant pour chacune, essayant d’accorder mon attention à toutes ces filles en même temps que mon regard se déviait en direction de l’inconnue, prise dans ce tourbillon un peu fou contre son grès. J’étais désolé pour elle, désolé de lui infliger ça, quand il aurait suffit que ces jeunes filles arrivent une minute plus tard seulement, pour que cette dernière soit tranquille. Mais non. J’aurais dut parier que rien ne se passerait comme je l’avais prévu, parce que c’est toujours quand on est pressé que des évènements surviennent dans le but de nous ralentir encore.
Les jeunes filles piaillantes se tournaient vers l’inconnue, la questionnant à mon sujet et sur notre potentielle amitié. Il était si facile de faire des amalgames et des suppositions à partir d’une seconde aperçu que ces dernières s’imaginaient déjà toute notre histoire dans leur esprit, en supposant que naturellement, cette fille dont je ne connaissais même pas le nom, m’avait sûrement vu dans les pires situations. J’essayais de sourire, en même temps que je tentais tant bien que mal de rétablir la vérité pour ne pas donner à la jeune fille l’impression de l’abandonner, mais l’exercice n’était pas des plus faciles.
Les questions pleuvaient pour essayer d’étayer notre histoire d’amitié et aucune ne semblait se rendre compte que l’inconnue n’était réellement pas une amie. Nous ne nous connaissions même pas encore, une demie heure en arrière tout juste et nous n’étions pas destiné à nous revoir non plus, notre rencontre fortuite restant de ces évènements mineurs qui peuplent une vie à priori. Nous devions nous séparer à peine quelques secondes après, si on nous en avait laissé le temps. C’était le plan, chacune allait reprendre sa vie. Et finalement ce quiproquo nous rapprochait, d’une manière assez invisible.
Enfin autour de nous la foule se dissipait et quoique nous étions normalement amenées à reprendre nos deux vies sans plus nous préoccuper de l’autre, Leah avait décidé de s’attarder auprès de moi, m’adressant une question à mi-chemin entre l’humour et la compassion, à laquelle je répondais d’un léger sourire. J’avais pris l’habitude de cette vie.
«- Non pas tout les jours heureusement mais ça arrive effectivement.» je m’excusais, gênait. «Navrée pour tout ça… j’espère qu’elles ne vous ont pas été trop pénibles.»
Clairement, Leah ne s’était pas imaginé un jour se retrouver dans pareille situation. A entendre ce que les jeunes filles criaient autour d’elles, son interlocutrice était une espèce d’influenceuse reconnue dans le milieu. La brunette n’était pas vraiment au courant de ce qu’il se passait dans la sphère de youtube, pas vraiment intéressée par le monde de la beauté. A la limite, elle regardait encore bien quelques vidéos, mais celles-ci étaient principalement axées sur le sport. Le nom de Lullaby ne lui disait strictement rien, mais ça n’était pas le cas des filles qui s’extasiaient de part et d’autre de la brune qui prenait sur elle pour ne pas avoir l’air désagréable. A ce stade, elle espérait surtout que sa tête n’apparaisse pas dans un magazine ou une connerie du genre. Elle ne connaissait pas la jeune femme et pourtant toutes ces filles étaient persuadées du contraire. Le groupe devint de plus en plus grand avant d’enfin se disperser, laissant de l’air à une Leah encore perturbée par ce qu’il venait de se passer. La fameuse Lullaby avait prit sur elle de discuter avec tout le monde et de se laisser prendre en photo, ce que la brune saluait. Une patience pareille, ça devait être inné, parce que si ça avait été elle, elle n’aurait jamais supporté ça. Mais encore une fois, son interlocutrice avait choisi cette vocation et elle devait sans doute savoir ce qui incombait de la notoriété. Alors que les jeunes femmes s’en allaient en reprenant encore quelques photos pour la route, Leah ne put s’empêcher de faire une remarque sur la situation qu’elles venaient de vivre, se demandant si ça lui arrivait ou pas tous les jours. Car si c’était le cas, elle la plaignait sincèrement. La tranquillité n’avait pas de prix, en tout cas aux yeux de la brunette. Vivre constamment dans la crainte qu’un attroupement comme celui-ci se forme à tout instant, ça devait vraiment être lourd à vivre au jour le jour. «- Non pas tout les jours heureusement mais ça arrive effectivement.» Leah fit un moue dubitative, se demandant comment elle faisait pour supporter ça. « Et du coup vous êtes… Youtubeuse, c’est ça ? » La brune se basait sur ce qu’elle avait pu entendre entre deux cris, puisque de toute façon elle s’était retrouvée coincée dans la cohue. «Navrée pour tout ça… j’espère qu’elles ne vous ont pas été trop pénibles.» La jeune femme leva la main comme pour signifier que ça n’était pas grave, même si les mouvements de foule n’avaient jamais été son délire. « Ne vous excusez pas, ça n’est pas votre faute. Et non, ça a été… Maintenant elles pensent toutes qu’on est les meilleures amies du monde, c’est tout. » Elle éclata de rire en secouant la tête tant l’idée était absurde sachant qu’elles étaient de parfaites inconnues l’une pour l’autre.
Elle a l’habitude de tout ça Bee. L’habitude de ce genre d’hystéries. Elle a vu de jeunes filles l’être devant son père et c’est son tour aujourd’hui, maintenant qu’elle profite de sa propre célébrité. Ce n’est pas agréable tout les jours, mais elle en a l’habitude. Ce qui n’est pas le cas de la pauvre Leah, laquelle semble un peut surprise une fois que les filles ont enfin décidé de les laisser tranquille et de leur faire de l’air. Ce n’est pas trop tôt, d’ailleurs. Car si Bee se plie volontiers à cet exercice, consciente que sa notoriété et sa réputation l’exigent, Leah n’a pour sa part rien demandé et pourrait rapidement s’agacer de la situation ce qui, heureusement, ne semble pas être le cas. Car elle présente ses excuses, Bee, et Leah reconnaît que ce n’est pas la faute de l’influenceuse. La brune était seulement là au mauvais endroit au mauvais moment, comme on dit habituellement.
"- Influenceuse. Bloggeuse, à l’origine et puis… Nouveaux réseaux, nouvelles manières de faire et de se faire connaître… Influenceuse, c’est plus inclusif. J’ai commencé sur un blog avant d’en venir aux vidéos et aux publications instagram."
Bee esquisse un sourire, alors que de toute évidence, Leah ne la connaît pas du tout. Faut croire qu’elle ne s’intéresse pas vraiment à tout ce qui à trait au lifestyle et à la mode, les principaux sujets de discussion de la demoiselle sur la toile, alors qu’elle apprend aux gens comment vivre bien, comment vivre mieux, partageant ses astuces et sa motivation du quotidien avec eux. Elle laisse ses boites mails ouvertes, Bee, en essayant d’adresser des réponses à un maximum de monde, essayant d’aider au mieux ses followers quand ces derniers viennent témoigner d’évènements douloureux qu’ils traversent.
"- Oui, je suis désolé. Il n’est pas impossible que vous vous retrouviez sur les réseaux, présentée comme une copine, une amie, je ne sais quoi." s’excuse Lullaby "Je tâcherai d’y être vigilante et de signaler ces contenus. Je comprendrais que vous n’ayez pas l’intention de vous afficher sur la toile. Quand on ne le choisit pas, j’imagine que c’est assez malvenu..."
Bee avait choisit de s’exposer un peu plus encore qu’elle ne l’était déjà de par le boulot de son père. Mais Leah n’avait rien demandé. Hors, il était fort probable que d’ici peu, sa tête serait partagée sur les réseaux, reblogguée, commentée, si quelques clichés la montraient aux côtés de l’influenceuse.
Si cette Lullaby était réellement une personne renommée, elle n’avait en tout cas pas l’attitude qu’on retrouvait parfois chez ces jeunes stars propulsées dans un monde comme celui-là. Leah appréciait le fait qu’elle se soit excusée et surtout, qu’elle ne la regarde pas de haut comme d’autres auraient pu le faire. Mais la brune supposait que le métier d’influenceuse se devait d’être plus abordable que celui de chanteuse ou d’actrice, le capital sympathie faisait partie intégrante de la popularité. Encore une fois, la jeune femme s’avançait, mais le peu de vidéos qu’elle regardait étaient celles de filles qui ne lui donnaient pas l’impression d’être une merde ou de vouloir atteindre un objectif inatteignable. Elle aurait tout aussi bien pu nexter les jeunes filles qui leur étaient tombées dessus, prétexter qu’elle était occupée ou pressée… Elle n’en avait rien fait et avait prit le temps de discuter et de prendre des photos. Un bon point pour elle. Ceci étant dit, vivre ce genre de situation tous les jours devait vite devenir usant. Paraître toujours jolie et sympathique, Leah n’aurait pas su. Effectivement, son capital patience était proche de zéro, et elle n’aimait pas trop la foule. Une carrière qui n’était clairement pas fait pour elle donc, c’était certain. "- Influenceuse. Bloggeuse, à l’origine et puis… Nouveaux réseaux, nouvelles manières de faire et de se faire connaître… Influenceuse, c’est plus inclusif. J’ai commencé sur un blog avant d’en venir aux vidéos et aux publications instagram." La brunette hocha la tête, sincèrement intéressée, comme toujours. La curiosité faisait partie intégrante de son caractère, et elle supposait que l’opportunité de discuter avec cette jeune femme ne devait pas courir les rues, autant en profiter donc. « Et vous proposez quoi comme contenu ? Vous vous prenez en photo tous les jours et les gens vous aiment pour ça ? » Son propre instagram était relativement suivi en dépit du peu de fois où elle l’alimentait, pas toujours à l’aise d’exposer ainsi des parties de sa vie alors que l’autre taré rôdait toujours. « Désolée, ma question doit paraître stupide, mais je n’y connais strictement rien. Cela dit, c’est intéressant. » Ajouta-t-elle avec un petit sourire en coin, réalisant qu’elle devait avoir l’air d’une mamie à vingt-huit ans. "- Oui, je suis désolé. Il n’est pas impossible que vous vous retrouviez sur les réseaux, présentée comme une copine, une amie, je ne sais quoi. Je tâcherai d’y être vigilante et de signaler ces contenus. Je comprendrais que vous n’ayez pas l’intention de vous afficher sur la toile. Quand on ne le choisit pas, j’imagine que c’est assez malvenu..." Leah haussa les épaules en balayant ses excuses d’un geste, laissant un petit rire s’échapper de ses lèvres. « C’est rien, au moins qu’on on tapera mon nom sur Google on verra autre chose que mes vagues exploits en soirée d’il y a quelques années. » Argua-t-elle en fronçant le nez. « De toute façon, y a pas mort d’homme. A la vitesse où les informations circulent, vous aurez une nouvelle meilleure amie d’ici deux jours. Je m’en fais pas trop pour moi. » Répondit elle avec une lueur amusée dans le regard.
Se prendre en photo tout les jours et publier ? Oui, c’est un peu ce qu’elle fait. Si son feed n’est pas mis à jour quotidiennement, la jeune femme partage tout de même un peu de sa vie, de son intimité, dans des stories et des vlogs, ne serait-ce que pour souhaiter une bonne journée à ses abonnés et leur donner une bonne dose de motivation matinale. Un rituel de chaque matin, lancer une petite phrase motivante sur les réseaux pour motiver ses troupes. Oui, elle publie tout les jours. Oui, on l’aime pour ça. Un métier qui peut sembler tellement abstrait et tellement superficiel. C’est l’avis que s’en fait la propre mère de la jeune femme, sans réaliser que sa fille peut servir de modèle à d’autres. Elle ne ment pas sur le réseau, elle reste authentique. Ses abonnés l’ont déjà vu manger de la malbouffe, pleurer, avoir la flemme de faire sa séance. Comme eux. Comme monsieur et madame tout le monde. Elle a ses complexes et elle vit avec, Bee. Elle les assume. Elle en parle de temps en temps dans ses vidéos, dans ses articles, pour se prendre en exemple et dire qu’on a qu’une vie, qu’il faut laisser le négatif derrière soit. Pas toujours facile à faire, mais on essaie.
"- Je propose du contenu lifestyle la plupart du temps. Astuces organisation, récup, hygiène de vie, lifegoals, cosmétiques maisons, recommandations de restaurants… Ce genre de choses, pour faire court. Et de la mode."
En attendant, cette notoriété provoque peut-être quelques tracas à la pauvre Leah qui n’avait rien demandé et risque de voir sa tête sur tout les réseaux, à présent. Mais elle s’en amuse plutôt en songeant qu’ainsi ses frasques de jeunesse se trouveront noyées sous l’amas de publication. Bee laisse entendre un rire léger. Elle n’est pas convaincue du côté possible, réalisable, des propos de son interlocutrice.
"- Comme ils n’ont pas votre nom, je doute que cela fasse quelque chose pour votre référencement, mais ça ne coûte rien d’y croire." elle rit avant d’ajouter.
Une nouvelle meilleure amie dans quelques jours ? Peut-être, ils en seraient capable. Ils sont capables de tout, la surinterprétation des informations, sur les réseaux, est une plaie dont il est difficile de se débarrasser. Bee lâche un petit soupir mais cette vie, elle l’a choisit, elle ne peut pas s’en plaindre à présent, d’autant plus que ça a quelques avantages aussi. C’est comme pour tout. Il y a du bon et du moins bon, tout simplement.
"- La vraie va finir par pousser un vrai coup de gueule." note la demoiselle. "Ce n’est pourtant pas faute de la montrer souvent en story… Mais c’est un monde où on aime bien avoir de petits potins, de nouvelles infos-intox à raconter..."
Leah s'intéressait sincèrement à ce que Lullaby allait bien pouvoir lui raconter, elle avait déjà entendu parlé de ces nouveaux métiers qui s'inscrivaient pile dans une génération où les gens étaient scotchés à leurs téléphones portables. Aurait-elle aimé se lancer là dedans si elle avait été plus jeune? Peut-être bien. Mais qu'aurait-elle pu raconter, là était la question. Et c'est d'ailleurs celle qu'elle posa à son interlocutrice, curieuse de savoir ce qu'une jeune femme comme elle pouvait bien avoir à raconter. Cette interrogation ne sous-entendait pas qu'elle pensait que la jeunesse empêchait de créer du contenu intéressant, au contraire, mais elle était perplexe. "- Je propose du contenu lifestyle la plupart du temps. Astuces organisation, récup, hygiène de vie, lifegoals, cosmétiques maisons, recommandations de restaurants… Ce genre de choses, pour faire court. Et de la mode." D'accord. Leah réfléchit quelques secondes à ce que ça pouvait impliquer tout en se disant que ce que faisait Lulla était un peu du coaching de vie via un intermédiaire, sans réellement avoir contact avec les gens. Enfin, quand ils ne lui tombaient pas dessus à l'extérieur sans prévenir, évidemment. "Et comment vous connaissez tout ça? Vous faites des recherches?" La brune fronçait les sourcils tandis qu'elle réfléchissait à voix haute. Soudain, son regard s'éclaira tandis qu'elle réalisait qu'elle était peut-être entrain de l'ennuyer avec toutes ses questions. "Désolée si je vous importune avec toutes mes questions, il faut pas hésiter à me le dire! C'est juste que je trouve le sujet intéressant en fait." Et elle en était la première surprise, c'était dire. Amusée plus qu'embêtée par la situation - en tout cas maintenant que la foule s'était dispersée - Leah relativisa en se disant qu'au pire les images prises aujourd'hui permettraient de camoufler les quelques dossiers qui traînaient sur elle sur la toile. "- Comme ils n’ont pas votre nom, je doute que cela fasse quelque chose pour votre référencement, mais ça ne coûte rien d’y croire." La jeune femme se mit à rire et Leah secoua la tête, réalisant qu'elle avait raison. "Je peux toujours rêver oui." Admit la brunette en souriant à son tour. Au pire elle se servirait de cette expérience pour dire à ses proches qu'elle avait rencontré une célébrité, c'était quand même pas anodin cette histoire. "- La vraie va finir par pousser un vrai coup de gueule. Ce n’est pourtant pas faute de la montrer souvent en story… Mais c’est un monde où on aime bien avoir de petits potins, de nouvelles infos-intox à raconter..." Leah prit un air faussement outré. "Quoi? Alors il y a une autre meilleure amie dans cette histoire? Moi qui me pensais unique..." Elle éclata de rire, secouant ses boucles brunes face à la bêtise dont elle pouvait parfois faire preuve. "Oui enfin, je pense que c'est partout pareil! J'ai bossé dans un bar pendant des années et même là bas les rumeurs allaient bon train. Je crois que les gens ne peuvent tout simplement pas s'en empêcher." Ajoura-t-elle avec un sourire en coin, repensant avec amusement à tous ces mecs avec qui on pensait qu'elle sortait à l'époque.
Leah pose des questions, s’intéresse à ce que peux bien faire la demoiselle, l’interrogeant sur son boulot plus précisément, sur le contenu qu’elle propose à ses abonnés, sur ce qui lui a permis de connaître tout ça et pouvoir le partager. Elle fait des suppositions, Leah, s’investit dans la conversation et Bee acquiesce, comme elle touche du bout du doigt la réalité en effet. Mais pas que, fatalement, car tout n’est pas qu’une question de recherches. C’est aussi de l’imagination, pour le do it yourself qu’elle peut proposer, pour les ateliers récup, ce genre de choses. Les recettes aussi parfois. Car en cuisine, le plus important est de maîtriser les bases. Quand on a les bases, le reste vient assez facilement. Il ne reste qu’à tâtonner pour trouver les bonnes associations.
"- Des recherches oui mais pas seulement. Je dirais que c’est aussi pas mal d’imagination personnelle et puis, mon expérience tout simplement, qui me permet de savoir comment mieux m’organiser la fois d’après et ainsi de suite, pour découvrir de nouvelles manières de gérer les choses et les partager sur les réseaux."
Elle ne l’importune pas, avec ses questions non. C’est même plutôt satisfaisant de voir que l’on peut s’intéresser au fond de son travail, pas seulement à la surface. Beaucoup pourraient juger bien rapidement ce que la demoiselle fait en partant du principe qu’elle s’expose sur les réseaux et gagne sa vie parce qu’elle a une belle tête. Oui, peut-être un peu. Ça aide sûrement à avoir quelques contrats, quelques partenariats, quelques débouchés intéressants. Mais ça ne fait pas tout. C’est de l’investissement aussi, que les gens n’imaginent pas toujours. Parce qu’il ne s’agit pas de faire la greluche devant une caméra et offrir des posts vides de se,s à ses abonnés. Il y a un message, derrière ses discours, la plupart du temps.
"- Rêver ne fait jamais grand mal… Du moment que l’on ne s’installe pas dans les rêves en oubliant de vivre. "
Ces mots ne sont pas d’elle, évidemment. Plutôt d’un grand sorcier aux lunettes en demi-lune et à la longue robe violine, sorti tout droit de l’histoire d’un sorcier à lunette portant une étonnante cicatrice. Le livre de sa vie, si vrai sur tant d’aspect de son existence que, sur bien des points, il la guide encore aujourd’hui par certaines réflexions qui en sont extraites. En attendant, peut-être qu’effectivement cette histoire effacera les abus anciens de Leah, même si Bee en doute. Et même si elle aura bientôt une nouvelle meilleure amie fanpropuls, au grand damne de la vraie.
"- Navrée de vous décevoir." remarque la demoiselle amusée après la remarque de son interlocutrice. "Les rumeurs semblent essentielles aux gens pour vivre, on apprend parfois des choses sur soit, dont on était même pas au courant." remarque la jeune femme, acquiesçant.
Leah continuait de poser ses questions, réellement intéressée par ce que la jeune femme avait à lui apprendre. Elle était déjà d'un naturel curieux en temps normal, mais la profession exercée par Lullaby sortait du commun et elle voulait en savoir plus. "- Des recherches oui mais pas seulement. Je dirais que c’est aussi pas mal d’imagination personnelle et puis, mon expérience tout simplement, qui me permet de savoir comment mieux m’organiser la fois d’après et ainsi de suite, pour découvrir de nouvelles manières de gérer les choses et les partager sur les réseaux." Leah n'était pas vraiment très étonnée; il en fallait de l'imagination pour faire des vidéos tous les jours - ou presque - sur des sujets divers et variés. La brune aurait très vite l'impression de tourner en rond si elle était à sa place, et elle s'imaginait bien que son interlocutrice devait redoubler d'efforts pour conserver l'attrait de ses fans sur ses vidéos. "Ca a l'air bien plus compliqué qu'il n'y parait en tout cas." Souligna la brunette avec un petit sourire. Elle s'était toujours doutée que le travail à fournir était monumental pour filmer, monter les vidéos, et trouver de nouvelles idées, et Lullaby lui confirmait ce qu'elle pensait déjà. "En tout cas, si tu fais des astuces pour la cuisine et tout ça, je te chercherai pour regarder... Je suis une catastrophe quand il s'agit de cuisiner. Tu sais, le genre à tout brûler... C'est moi." Et dire qu'elle voulait être pompier. "- Rêver ne fait jamais grand mal… Du moment que l’on ne s’installe pas dans les rêves en oubliant de vivre. " Lui répondit ensuite son interlocutrice avec philosophie, ce qui ne manque pas de faire sourire Leah qui hausse un sourcil étonné en l'écoutant citer Dumbledore pour cela. Elle avait mis quelques secondes à percuter, mais elle était elle-même une grande fan des histoires du sorcier qui avaient baigné son enfance et son adolescence. "Une fan d'Harry Potter, hein?" Lança-t-elle avec un sourire en coin. "- Navrée de vous décevoir." nia-lui Lui répondit-elle lorsque Leah prétexta être déçue de ne pas être son unique meilleure amie, sur un ton empreint de plaisanterie. "Les rumeurs semblent essentielles aux gens pour vivre, on apprend parfois des choses sur soit, dont on était même pas au courant." La brunette hocha la tête en levant les yeux au ciel, absolument d'accord avec ce que venait d'affirmer Lullaby. Elle-même avait été la proie des rumeurs pendant ses longues - très longues - années au lycée, à subir les moqueries de filles qui se pensaient mieux qu'elle. "J'avoue. Mieux vaut le prendre à la rigolade je pense..." Lança-t-elle ensuite avec un petit sourire, avant de regarder sa montre d'un oeil effaré. Il était vraiment plus tard que ce qu'elle pensait. "Je vais devoir y aller... Merci en tout cas pour cette... Expérience." nsUn petit rire s'échappa de ses lèvres. "Au fait, moi c'est Leah. J'me dis que c'est une information utile que de connaître le prénom de sa meilleure amie." Sur ces paroles, elle tourna les talons pour vaquer aux occupations de la journée, amusée par toute cette histoire.
"- Plus que les gens ne le pensent de prime abord, oui." souligne la demoiselle en gratifiant son interlocutrice d’un léger sourire.
Ouai, ils n’imaginent pas tout le travail que ça peut être, ils sont rares ceux qui s’en rendent compte, ceux qui en ont conscience, ceux qui ne s’imaginent pas qu’il suffit de se poser devant une caméra une vingtaine de minutes et que tout sera parfait dès le premier coup. Ceux qui ne s’imaginent pas qu’un youtubeur peut enregistrer 8 vidéos par jours à la chaîne et être tranquille pour tout le mois par la suite. Dans ses meilleurs jours, Lullaby tourne trois vidéos, grand maximum et elle est loin de toutes les monter le même jour, parce que le montage c’est ce qui demande le plus de temps, évidemment.
"- Je n’en fais pas beaucoup, mais j’en fais un peu quand-même oui en effet." elle esquisse un sourire. "Oui je vois. J’espère que les pompiers vous offrent des calendriers en fin d’année, pour toute cette occupation que vous leur donnez ?" elle rit un peu, passant une main dans ses cheveux.
Fan d’Harry Potter oui, elle l’est sans nul doute. La jeune femme a grandit avec après tout. Elle esquisse un sourire avant de confirmer la supposition de son interlocutrice, affirmant par la suite qu’il ne pourrait en être autrement, car l’oeuvre de J.K Rowling est selon elle la meilleure de tout les temps. Rien que ça. Même si elle aime bien le seigneur des anneaux, Harry Potter restera toujours premier dans son coeur.
"- Vaux mieux le prendre comme ça oui."
Mais la jeune femme doit partir. Bee aussi. Elle était pressée la demoiselle à l’origine. Alors elle salut la brune qui se présente, d’ailleurs.
"- Enchanté Leah. Peut-être à une prochaine fois !"
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