Une première, à presque trente trois ans. Comme quoi, il y avait un début à tout. Tim s'avouait facilement angoissé par l'idée de se retrouver perdu au milieu d'une foule de jeunes gens qui dansaient sur des rythmes dont il n'avait jamais entendu parler jusque là. Le pauvre Decastel ne s'attardait pas vraiment sur les dernières nouveautés, il n'était pas très en vogue, il fallait le dire. Il voulait changer cela, faire en sorte de vivre en son temps, de prendre les choses par étape et de devenir un homme plus affirmé. Alors, il avait demandé à Lukà de l'accompagner en boîte de nuit. Pire idée du siècle? Oui, certainement en vue des réactions de Tim lorsqu'il se retrouvait dans un bain de foule. Cela dit, il était fatigué de se priver des petits bonheurs de la vie parce qu'il effrayé par quelque chose. Il était donc temps de prendre le taureau par les cornes et de faire des petits efforts pour passer une soirée sereine au comptoir, ou sur le dancefloor, accompagné de quelqu'un qui n'était pas le plus fêtard non plus. Au moins, pas de risques de se retrouver dans un état ingérable à demander à son frère de venir le chercher au poste... Car, non, tout cela n'était jamais arrivé une seule fois. Timothy n'avait pas connu l'adolescence dans ces pires états. Il n'était jamais vraiment sorti et le seul chemin qu'il avait fait était celui du lycée à l'appartement qu'il partageait avec son aîné. Parfois, il faisait un petit détour du côté du cimetière pour arroser quelques fleurs devant des tombes peu entretenues par leur famille et il repartait dans son petit monde. Oui, il était minuscule même puisqu'on pouvait le réduire à cela, à son frère, ses quelques connaissances, son ami Ivan et un cimetière. Finalement, vingt ans plus tard, rien n'avait franchement changé et maintenant que Tim s'en rendait compte, il espérait faire un pas supplémentaire vers l'évolution. A une heure du matin tapante, il était donc devant la porte du club, maladroit et nerveux au possible en attendant Lukà. Il avait fait des efforts vestimentaires puisqu'on lui avait dit qu'on pouvait se faire refuser à cause de quelques choix de style douteux. En conséquence, le gardien de cimetière avait fait attention en sortant ses plus beaux atours. Quelques minutes plus tard, la silhouette de Lukà apparut dans son champ de vision et le visage de Timothy se mit à briller d'un sourire. "Pfiou, t'es là! Je commençais à me dire que t'avais déserté la mission "sauver Tim de son incapacité à faire la fête",une grosse perte!" Il se mit à rire, pas franchement persuadé de cela. A l'idée de se retrouver dans un endroit si bruyant, Decastel avait des palpitations mais il se présenta tout de même face au videur aux côtés de son camarade, le regard angoissé mais déterminé à en découdre. A vivre cette première à fond, sans regret, sans dérapage. Sans honte.
L'Electric Playground, ça fait des années que tu n'as pas mis les pieds là-bas. Lorsque tu termines de te préparer à sortir avec ton ami, Timothy, tu ne peux t'empêcher de te demander si c'est une bonne idée ou non. T'avoues bien volontier que ce n'est peut-être pas une bonne idée d'aller dans un endroit où l'alcool, le sexe et probablement la drogue sont les maitres du jeux. Mais Timothy te l'as demandé, il y a quelques jours de cela ton ami t'as envoyé un message pour t'inviter à cette soirée. Tu le connais bien Tim, tu sais que de se rendre dans ce genre d'endroit ne fait pas partis de ces habitudes. Pas question pour toi de le laisser tomber. À travers son message, t'as cru déceler une sorte d'appel à l'aide de sa part. À l'époque, tu laissais tes potes se moquer de lui. Tu les regardais ne bougeant pas le petit doigt, ne disant pas un mot. Avec le temps, tu te rends compte que t'aurais dû prendre sa défense. Surtout en observant ta vie actuelle, tu ne parles plus avec aucun de ces types qui avaient pris Tim en bouc émissaire alors que ce denrier fait toujours partis de tes amis. Comme quoi, vos proches ne cesseront jamais de vous surprendre. Tu termines de boutonner ta chemise, t'attrape tes clés, ton cellulaire ainsi que ton portefeuille. Dehors, l'air est frais. Pas question de prendre les transports en commun, tu optes donc pour ta voiture et, en moins de temps qu'il en faut pour le dire, tu arrive devant la boite de nuit. Depuis l'extérieur, la musique résonne déjà. Devant l'entrée du club, certains s'embrassent, d'autres fument et d'autres encore sont dans un semi coma éthylique. Te freyant un chemin à travers les différentes personnes, tu passe le vigil. Te voici à l'intérieur. La musique est forte, trop forte pour toi. Il ne te fallut que quelques minutes avant de retrouver ton ami accoudé, près du bar. Un sourire aux lèvres, tu tentes de passer parmi la foule collée les uns aux autres. "Pfiou, t'es là! Je commençais à me dire que t'avais déserté la mission "sauver Tim de son incapacité à faire la fête",une grosse perte!" Enfin, tu rejoins ton ami après t'être presque avec un type qui refusait de te laisser passer. Les gens sont fous, voilà donc pourquoi tu ne sors quasiment jamais de chez toi. Les soirées chill devant netflix sont les meilleures selon toi, la prochaine fois tu prévois plutôt ce genre de soirée avec ton ami. Mais s'il a tenu à venir ici ce soir, il a forcément une bonne raison. "Jamais, je déserterais voyons. On est amis depuis un bail Tim." Certes, tu n'as pas un bon ami autrefois mais Tim sait qu'il pourra toujours compter sur ta présence à ses côtés. La preuve, t'es là ce soir. Tu fais signe au barman de vous amener deux cocktails sans alcool. Il te dévisage et tend les deux cocktails en échange d'un billet de dix dollars. "Tiens, t'as l'air d'en avoir besoin !" Forcé de parler fort, tu te colles à ton ami afin de bien l'entendre. Tout autour de vous, c'est la débauche. Alcool, drogue, sexe. C'est un monde que tu as côtoyé il fut une époque mais depuis huit ans, ce monde n'est plus le tien. Tu ne t'y sens plus à ton aise. "l'electric playground ? Ça ne te ressemble pas Tim, dis moi ce qu'il se passe ?" Une histoire de nana derrière tout ça certainement. À moins que ça ne soit sa mère qui a encore fait des siennes, tu connais les rapports conflictuelles entre Tim et sa mère. Tu poses ta main sur celle de ton ami, un sourire rassurant sur les lèvres. Tu lui montre que tu es là pour lui, quoi qu'il arrive et qu'il peut tout te dire. Tu restes tout de même inquiet pour ton ami. Se mélanger à une marée humaine ne lui ressemble pas, il a dû se passer quelque chose pour que cette idée qui a traversée son esprit se réalise.
Lui, au beau milieu d'un club à des heures tardives? Clairement, il allait neiger dès le lendemain, un bel hiver à Brisbane en perspective. Timothy savait que c'était une très mauvaise idée pour lui de se retrouver dans ce genre d'endroits mais il avait promis à Alex de sortir un peu de ses schémas habituels, de profiter un peu plus de la vie. Alors, il devait au moins tenter l'expérience, au moins, il serait sûr et certain si le concept ne lui plaisait pas. Déjà, il angoissait à peine passé les portes du club mais Decastel tenait le coup parce qu'il repensait à tout ce qu'il avait vécu. Ce n'était quand même pas une petite foule qui allait l'effrayer, si? Lui qui avait subi les sévices d'une mère folle, l'abandon d'un père qui s'était cru aimant, tout cela semblait bien pire qu'une courte soirée dans une boîte de nuit. Tim n'avait pas les mêmes appréhensions qu'autrui, c'était une évidence puisqu'il bossait dans un cimetière quand la plupart des gens évitaient soigneusement ce genre d'endroits. Les autres, justement, s'amusaient dans les bars et les clubs à l'heure où Timothy dormait puisqu'il se levait bien trop souvent à l'aube pour profiter pleinement des journées ensuite. Il avait un rythme bien calculé, la machine était bien rodée mais il était clairement temps de faire dérailler le système. Lorsqu'il aperçut Lukà à ses côtés, les signes de nervosité se calmèrent quelque peu et il put respirer plus sereinement par la suite. Son ami commanda des cocktails sans alcool et ils purent trinquer. Le temps avait créé une relation particulière entre eux. Timothy avait été l'ami de sa petite amie avant d'être le sien, mais le destin avait décidé qu'ils se retrouveraient une fois que la bêtise de la jeunesse serait passée. A cette époque, Petterson ne traînait pas avec des personnes très sympathiques mais Tim lui avait pardonné ses pitreries assez rapidement, il était comme cela après tout. Il le regarda avec un sourire, sentant son trouble de se retrouver dans ce genre d'endroits alors qu'il était sobre depuis plusieurs années désormais. "C'est vrai, qui l'eut crû? Merci pour la boisson, t'as raison, c'est toujours nécessaire pour survivre à la foule... Dieu sait que je déteste ça mais bon, parfois, il faut prendre le mal par le mal comme on dit." Il était souriant, toujours, prêt à en découdre avec le monde extérieur. C'était devenu sa force au fil du temps alors qu'il regardait autour de lui, observant les gens et leur comportement si singulier. Tim ne se sentait pas proche du tout de leurs considérations mais il avait envie de comprendre cela dit. D'être un peu plus comme tout le monde, pour une fois. "Une envie de faire quelque chose que je fais jamais... J'ai promis à une amie de profiter un peu plus de la vie, pour ça, il faudrait déjà que je la découvre pour de vrai! J'ai trente trois ans après tout et regarde moi, j'ai rien vécu... Si on exclue la violence. Bien sûr." Son regard se voila un instant, c'était toujours le cas lorsqu'il mentionnait sa mère mais il se reprit bien vite pour s'intéresser à Lukà. "Et toi, alors, comment ça va? J'étais pas sûr que tu accepterais de venir après tout ce que t'as vécu toi aussi..." Ils étaient tous les deux des rescapés de la vie. Des personnes qui étaient en train de passer un cap invisible. Tim espérait qu'ils en sortiraient vainqueurs, ou tout du moins meilleurs. Au moins cela, oui.
Nouvelle soirée à l'Electric Playground. Elles se ressemblaient toutes, en ce moment. Des pas de danse un peu trop endiablés, de l'alcool, des gens en tous genre et des chansons dans la rue - pieds nus, sinon ce n'était pas drôle - jusqu'à environ six heures du matin. Ce soir, j'accompagnais des amis d'une promo de Droit. J'accompagnais souvent cette petite bande. Un de leur membre était une fille que je fréquentais depuis un moment. Une femme un moins moins âgée que moi, au caractère jovial et très enthousiaste. Ses épais cheveux blonds s'agitaient souvent dans tous les sens et elle s'attirait les commentaires parfois désagréables de ses camarades tant elle dégageait une énergie débordante, parfois envahissante - selon eux, pas selon moi. J'aimais cette énergie, chez elle. Elle était dense, bavarde, lumineuse. J'avais plaisir à discuter de tout et de rien avec elle. Pourtant, nos échanges s'étaient toujours résumé à des chansons alcoolisées et à des rires, rien de plus. Je ne voulais rien de plus, de toute façon. Je ne pouvais pas non plus la compter parmi mes amis. Elle était ce que les autres n'étaient pas, comme une pièce de puzzle que l'on ne pouvait ajouter à aucune autre, libérée et volage. Fragile, aussi. Je sentais que son humeur joyeuse, même si elle paraissait forte et continue, pouvait se briser si on ne l'alimentait pas un peu. Je me contentais de répondre à ses blagues et de lui sourire quand nos regards se croisaient. Nous nous comprenions bien, elle et moi. Je m'entendais moins avec son mec, avec qui j'avais déjà failli me battre en soirée. Enfin, la baston et moi, ce n'était pas ça, de toute façon. Mon poignet encore parfois douloureux me le rappelait bien assez.
La joyeuse bande s’égosillait à propos d'une affaire qu'ils avaient eu à traiter en cours. J'avais fait du Droit. Je comprenais pourtant à peine ce dont ils parlaient. Leur vocabulaire n'était pas celui des humains. Quatre d'entre eux se déchiraient pour savoir qui était le père putatif d'un petit garçon dont il avaient certainement étudié le cas en cours. Moi, je me contentais de lever les yeux au ciel, mains dans les poches. Mon amie vint passer son bras dans le creux de mon coude. Sa respiration faisait de petites volutes de fumée. « Ils vont me flinguer ma soirée, ces cons. », marmonnait-elle, la mine boudeuse. J'avais un petit rire. « T'as qu'à pas les écouter. Concentre toi sur la musique sur laquelle on dansera d'ici... quinze minutes. » Elle opina du chef et nous continuâmes de marcher un petit moment encore, jusqu'à la boîte de nuit. Là, la musique me prit tout de suite aux tripes. Mes camarades allèrent se chercher à boire au bar et je faisais de même. Nous dansions un moment et enchaînions les verres. Le corps débridé, chemise entre-ouverte, je me déhanchais sur une musique électro dont je ne connaissais pas le nom. Mon énième Cuba Libre en main, je me dirigeais vers un endroit plus tranquille de la boîte, où j'étais certain d'avoir aperçu un visage connu. « Alors on fête quoi ce soir ? » Mais il s’avérait qu'au final, ces visages ne m'étaient pas si connus que ça. Je fronçais les sourcils et observais tour à tour les deux jeunes hommes qui se trouvaient devant moi. « Ah merde, sorry les boys, j'ai mélangé. Bonne soirée, kiddo. », lançais-je à celui qui me paraissait le plus jeune des deux. Et je retournais sur la piste, le cocktail à la main et habité de la fièvre de la nuit.
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COUCOU Faites comme si j'étais pas là, je passe je passe et je file.
Du plus loin que tu te souviennes, tu ne te rappelles pas avoir déjà vu Tim dans une boite de nuit ou un bar. Timothy, c'est l'homme qu'on a envie de protéger quoi qu'il arrive. Tous les deux, vous vous êtes connus au lycée. Tes potes l'avaient pris comme bouc émissaire et toi, t'as rien fait, rien dit pour le défendre. Aujourd'hui, tu sais que c'était une erreur. Mais cela ne vous a pas empêché de rester amis malgré tout. Tim est resté alors que d'autres sont sortis de ta vie. Un bien pour un mal, Tim est cent fois plus intéressant que tout ces pseudos amis. Et au moins, lui ne t'as jamais forcé à faire quoi que ce soit de déplacer. Dès que tu as reçu le message texte de ton ami, tu n'as pas hésité un seul instant. Ça fait des années que tu ne t'ai pas retrouvé en boite, pire lieu au monde pour un ancien alcoolique, t'as peur de te retrouver là-bas mais pas question d'abandonner ton ami. Si Tim souhaite aller en boite de nuit, tu l'accompagneras. Tu as bien connu ce monde de la nuit, t'es donc l'homme de la situation pour protéger ton ami et le mettre en garde sur les dangers qui se trouvent là-bas. Tim est différent, tous les goûts sont dans la nature et personne n'a le droit de le juger ou le critiquer. Celui qui ose le faire devant toi est complètement fou, il prendra le risque de se retrouver avec ton poing sur le visage. Tu n'es pas violent mais lorsque l'on touche à tes proches, tu ne réponds plus de rien. Tim était un ami d'Anna à l'époque, de fil en aiguille, vous aviez réussis à tisser un début d'amitié tous les deux. T'es heureux de le compter parmi tes rares vrais amis aujourd'hui. Contrairement à toi, Tim avait toujours inspiré la sympathie envers les autres. Parfois, certaines personnes te rappellent l'homme que tu as été. Tu n'es plus ainsi, tu n'es pas un mauvais garçon. Juste un mec au coeur brisé par un ex petite amie qui a foutu le camp à la première occasion et t'empêchant de voir ton fils depuis six années déjà. Alors oui, cette soirée en compagnie de Tim est la bienvenue. "C'est vrai, qui l'eut crû? Merci pour la boisson, t'as raison, c'est toujours nécessaire pour survivre à la foule... Dieu sait que je déteste ça mais bon, parfois, il faut prendre le mal par le mal comme on dit." Toujours souriant, Tim fait preuve de sérieux et de bonne volonté. Finalement, vous vous comprenez plus que tu ne l'aurais espéré autrefois. Ton cokctail sans alcool à la main, tu en déguste quelques gorgées. "T'as bien raison. Je suis content que tu m'es appelé, jconnais bien ce monde et te savoir ici seul m'aurait certainement déplu." Lukà ou l'homme qui parle comme s'il était au dix-huitième siècle. Tu as toujours été un littéraire, te passionnant très jeune pour la littérature australienne et étrangère aussi. Tim et toi êtes des battants. Quotidiennement, vous vous battez contre vos démons intérieurs. Toi, c'est l'alcool et ton incapacité à fréquenter des femmes depuis six ans. Lui, sa phobie à se sentir à l'aise avec le monde extérieur. "Une envie de faire quelque chose que je fais jamais... J'ai promis à une amie de profiter un peu plus de la vie, pour ça, il faudrait déjà que je la découvre pour de vrai! J'ai trente trois ans après tout et regarde moi, j'ai rien vécu... Si on exclue la violence. Bien sûr." Une amie ? Decastel te cacherais-t-il des choses ? Un sourire sur ton visage, tu fixes ton ami avant de reprendre une gorgée de ton cocktail. "Une amie ? Tu me caches des choses toi maintenant ?" Bien sûr, tu plaisantes. Tout comme tu peux l'être, Tim n'est pas l'homme le plus sociable de la Terre. Et tu le respecte totalement. Tu ne peux pas le lui reprocher, tu es comme lui. Tu as beaucoup de mal à te confier, surtout si cela touche ta vie privée. Mais soyons clair, ta vie présent est un désert brûlant depuis bien trop longtemps. "Tu n'as rien à te reprocher Tim. C'est pas ta faute si t'as été le souffre douleur de ta mère depuis toutes ces années. Oui t'as trente trois ans mais tu as encore de nombreuses années devant toi pour en profiter, il n'est jamais trop tard." Tu tentes de rassurer ton ami, ça a l'air de le rendre triste et tu ne supportes pas le voir ainsi. "Ce n'est pas parce que tu n'as jamais embrassé une fille, jamais bu un verre d'alcool ou quoi d'autres, que ta vie est nulle. Je suis on ne peut plus fier de l'homme que tu es, je suis sûr que cette amie est tout aussi fière de toi." Tu poses ta main sur la sienne pour lui montrer que tu es là pour lui, le soutenir. "Et toi, alors, comment ça va? J'étais pas sûr que tu accepterais de venir après tout ce que t'as vécu toi aussi..." Tu n'étais pas certain de vouloir venir, tu t'es décidé il y a une heure environ, et tu ne le regrette pas. Partout autour de vous, l'alcool coule à flots. Des couples s'embrassent sur les banquettes, près des toilettes. Les hommes dévorent littéralement du regard les jeunes femmes qui dansent au milieu du dancefloor. Il fut une époque où tu faisais partis de ces mecs. Aujourd'hui, ça a le don de t'énerver cette façon d'agir. "ça va, ne t'en fais pas. J'ai l'habitude de me trouver dans un tel endroit lorsque Matt m'entraine avec lui dans ses soirées nocturnes. "S'il n'était pas né, il faudrait l'inventer ce dernier. Ta vie serait bien morne sans lui. "Je ne refuserais jamais une soirée en compagnie de mon pote voyons. Qu'as-tu envie de faire maintenant ? Exit le dancefloor, à moins que tu ne souhaite que je t'écrase les pieds." Tu un piètre danseur et tu ne t'en cache pas. Tu l'assume même plutôt bien.
Une sacrée soirée en perspective, surtout pour quelqu'un comme Timothy qui ne sortait, pour ainsi dire, jamais. Déjà, lorsqu'il se retrouvait dans un bar, cela relevait du miracle. Il n'avait jamais vu l'attrait de ce genre d'endroits, certainement parce qu'il n'avait jamais goûté à un seul verre d'alcool de sa jeune vie. C'était un rite d'initiation pour les plus jeunes, du moins c'était ce que les rumeurs disaient mais Tim n'avait jamais essayé. Au lycée, il avait bien d'autres problèmes à gérer et les soirées arrosées ne faisaient pas partie de ses prérogatives. De toute manière, il avait bien trop peur de la foule à cette époque pour l'envisager. Il n'était jamais allé à un seul bal de promo, n'avait jamais appris un seul mouvement de danse, la musique lui vrillant les oreilles pour qu'il puisse essayer ce genre de distractions. Avec qui danser, de toute façon? Personne ne s'était jamais intéressé à sa petite personne, le garçon de l'ombre, celui qu'on caractérisait comme l'adolescent bizarre parce qu'il s'était accoutré en fille durant de nombreuses années. Les gens ne connaissaient pas la véritable histoire et Decastel n'était pas de ceux qui avaient envie de parler de leurs tragédies personnelles. Il préférait garder bien terrées toutes ces histoires, lui qui en avait tant souffert. Tim était si seul à cette époque, à subir les moqueries des amis de Lukà mais heureusement, il était devenu adulte et aujourd'hui, tout était plus facile, en apparence en tout cas. Se retrouver dans un club relevait de l'épreuve pour lui, encore une fois, mais cette fois, il n'était plus une âme esseulée puisque Petterson était un garçon plutôt expérimenté en la matière. Il avait quitté ce monde maintenant qu'il était sobre et Tim s'en voulait un peu de lui avoir forcé la main pour ne pas se retrouver tout seul en plein milieu de toutes ces personnes loin d'être sobres. "Je m'en serais sorti quand même, non? Peut être pas, en fait..." Decastel sortit sa moue réflexive, il était loin de dire que cela aurait été une réussite. Il aurait probablement tenu deux minutes à l'intérieur avant de s'enfuir en courant pour aller se cacher au fond de son cimetière. Échec critique. Cela n'arriverait pas puisque son vieil ami était là, pour le rassurer, lui parler et gérer ses crises de panique. Enfin, cela dura un laps de temps infime puisqu'un jeune brun s'incrusta au milieu de la conversation, Tim se retrouvant les yeux grands ouverts à essayer de suivre. "La vie?" Il n'eut pas le temps de réfléchir plus avant qu'il était déjà parti, prétextant une confusion. Decastel regarda Lukà avec un air amusé avant de se concentrer sur ses dires avant cette étrange interruption. "Non. C'est Alex. Tu sais, Alex, je t'en ai parlé, non? Elle est revenue en ville et on a discuté. Elle m'a dit qu'il était temps que j'arrête de me laisser aller à me cacher dans mon cimetière tout ça... J'essaye, du coup. La parole d'Alex a toujours été importante." C'était le moins que l'on pouvait dire puisqu'il avait été amoureux d'elle pendant bien longtemps. Trop longtemps, pour que ce fut sain au final. "Je sais pas... Je trouve ça un peu triste quand même à mon âge, d'avoir qu'un cimetière et pas grand chose d'autre à raconter que ça. Les gens ont pas envie de savoir ça et j'ai pas tellement envie de lancer la conversation en parlant de ma mère non plus alors... Je me retrouve bloqué mais c'est gentil de me dire ça. T'es un super pote." C'était quelque chose qu'il n'aurait pas dit quinze ans auparavant, Lukà suivant sa bande sans forcément défendre Timothy face à leurs remarques idiotes. Le temps avait fait son oeuvre et Tim était loin d'être quelqu'un de rancunier ou susceptible, le bonheur des autres avant le sien, c'était le deal. "Ouf, tu me rassures, je commençais à culpabiliser... J'ai jamais dansé de ma vie alors, je sais pas si c'est une super idée mais après tout s'apprend. Je sais pas, dis moi ce que je dois savoir pour paraître moins ridicule. Ce que tu veux." Le pauvre Decastel avait besoin d'un coach de vie, se retrouvant à siroter son cocktail sans alcool avec une paille... Ridicule, vous avez dit?
La musique résonne dans toute la boite de nuit, on s'entend à peine parler. Timothy et toi êtes amis depuis le lycée, il faisait partis de ta bande d'amis mais ce dernier a toujours été discret. C'est d'ailleurs ce qui t'as tout de suite plu chez lui. Le garçon est différent. Il ne boit pas, ne fume et n'a pas une liste de conquêtes féminines interminables. Tim est ton exact opposé, ou du moins, le contraire de ce que tu as été à l'époque du secondaire. Depuis ta sortie du centre de désintoxication, tu tentes tant bien que mal de tenir face aux diverses tentations. Face à l'alcool surtout, c'est ton point faible, ton talon d'Achille. Du plus loin que tu peux te souvenir, tu n'as jamais vu Tim se rendre en boite de nuit, ni même dans un bar et ce, malgré les nombreuses incitations de vos compagnons de l'époque. Tu l'as toujours trouvé très courageux de refuser ce pour quoi les jeunes d'aujourd'hui vendraient leurs parents. L'alcool, le sexe, la drogue. Voilà ce avec quoi rime la jeunesse d'aujourd'hui. Avec le recul, tu te rends compte que tu as eu tort de sombrer dans l'alcool. À vingt ans, on se prend pour le roi du monde alors que non, tu ne l'étais pas. Ça a juste permis à ce que tu t'attire des ennuis. Finalement, le plus con entre Tim et toi, c'est toi. Tu t'es laissé influencer par cette bande d'amis que tu pensais sincère et fidèle alors qu'en fait, ils souhaitaient juste te faire du mal et faire de toi leur pantin. Tim, lui, il est resté fidèle à lui-même, à ses principes et à ses valeurs. À l'époque, tu devais te battre avec tes propres démons. Tim et toi n'avaient jamais été aussi proche que ces dernières années. Depuis, il est le puppy de notre petite bande de potes. Plus de moqueries le visant personnellement et celui qui osera le faire, se verra barrer la route par ta personne. Tu n'es guère imposant avec ton semblant de muscles, en revanche, il ne faut pas toucher à ses amis. Jamais. Amis ou famille, qu'importe c'est pareil. "Je m'en serais sorti quand même, non? Peut être pas, en fait..." Se rendre en boite de nuit avait dû lui demander un effort considérable, t'es fier de lui et de cet effort qu'il a fait ce soir. T'es aussi content que le jeune garçon t'es appelé pour lui venir en aide. Tu connais bien ce monde, ainsi que les gens. Ces derniers sont fourbes, prêt à tout pour faire du mal à autrui. Même si ce n'est qu'inconsciemment. "Oh je suis certain que tu t'en serais sortis. Tu te sous estimes mais moi, j'ai foi en toi !" Tu as toujours eu foi en lui. Avec tout ce qu'il a dû endurer avec sa mère, le jeune homme a un lourd passé derrière lui. Il ne doit pas le voir comme une faiblesse, au contraire. "Ne vois pas ton passé comme une faiblesse, comme ton talon d'Achille. Sers toi en comme de ta force pour montrer à tout le monde qui est le vrai Timohy Decastel." T'es très fort pour pousser les gens à se battre contre leurs démons personnels. En revanche, tu ne l'es plus lorsqu'il s'agit des tiens. "Non. C'est Alex. Tu sais, Alex, je t'en ai parlé, non? Elle est revenue en ville et on a discuté. Elle m'a dit qu'il était temps que j'arrête de me laisser aller à me cacher dans mon cimetière tout ça... J'essaye, du coup. La parole d'Alex a toujours été importante." La fameuse Alex, bien sûr que tu as entendu parler d'elle. Comme ça, elle était de retour ? Tu lances un sourire à ton ami. "Je l'aime beaucoup cette fille, elle a raison. Tu ne peux pas resté éternellement comme ça. Je te demande de te bourrer la gueule ou d'aller draguer tout ce qui bouge. Rien que ce soir, t'as fait un grand pas. Ne lâches surtout pas ces efforts. Et si t'as besoin d'être soutenu, je suis là ou Alex si tu veux." Tu ne connais pas la nature de la relation entre Alex et Tim, cela dit, le connaissant, ça ne pouvait être qu'une relation amicale voire limite fraternelle. "Je sais pas... Je trouve ça un peu triste quand même à mon âge, d'avoir qu'un cimetière et pas grand chose d'autre à raconter que ça. Les gens ont pas envie de savoir ça et j'ai pas tellement envie de lancer la conversation en parlant de ma mère non plus alors... Je me retrouve bloqué mais c'est gentil de me dire ça. T'es un super pote." C'est vrai que tu as trouvé le choix de carrière de ton ami étrange, toi ce n'est pas quelque chose qui t'attire les morts, les cadavres et tout ce qui va avec. Halloween est même la fête que tu déteste le plus. Tout comme les films d'horreurs, il t'es impossible d'en regarder un en entier. Toutefois, même si son choix de métier t'étonne, tu ne le juge pas. S'il s’épanouit là-dedans, c'est le principal après tout. "Les gens ont tellement d'à priori sur ce métier .. Même moi, je t'avoue mais je respecte ton choix. T'as envie de changer de job ? Imagine, on te demande de choisir un métier là, tout de suite, tu choisis lequel ?" Choix crucial. T'as mis plusieurs années avant de trouver ta voie et, aujourd'hui, tu te sens épanouie dans ce que tu fais. Travailler à ton compte, les horaires aménagés comme tu veux. Le plus difficile c'est de tout couper et faire la distinction entre vie privée et vie professionnelle. "Ouf, tu me rassures, je commençais à culpabiliser... J'ai jamais dansé de ma vie alors, je sais pas si c'est une super idée mais après tout s'apprend. Je sais pas, dis moi ce que je dois savoir pour paraître moins ridicule. Ce que tu veux." "T'as pas à culpabiliser, vraiment. T'es comme tu es et si les gens le comprennent pas, ce que ce sont des abrutis finis." La danse ce n'est pas trop ton truc. Anna t'avais forcée à prendre des cours mais ce fut un échec cuisant, tu as dû lui écraser les pieds une bonne centaine de fois avant qu'elle te supplie d'arrêter les cours. "Tu me fais confiance ? Tu vois cette fille toute seule au bar ? Va lui parler ! Je te demande pas de la draguer mais parles lui simplement, imagine que c'est Alex à sa place !" C'est toi qui lui demande ça ? Toi qui n'est pas fichu d'aligner trois mots face à une femme sans bégayer. Tu finis ton verre et prends la main de ton ami, vous vous dirigez vers la jeune femme. "Bonsoir mademoiselle. Avec mon ami, on a pu voir que vous étiez seule. Ça vous dérange qu'on discute un peu tous les trois ?"
Il n'était pas spécialement à son aise dans ce genre d'endroits et cela se lisait sur les traits de son visage. Timothy était crispé et encore, c'était tout à fait un euphémisme quand on le regardait. Il était incapable de tenir en place, regardant constamment autour de lui, sûrement pour vérifier que personne n'allait débarquer avec un couteau à la main pour lui planter dans le dos. Il n'était clairement pas fait pour les lieux publics d'envergure, se plaisant bien plus au beau milieu de la campagne, loin de tout et surtout des gens. Tim avait bien du mal à les comprendre en général: ils étaient tout à fait différents de lui, parce qu'il avait eu un passé si difficile qu'il s'était forgé tout seul, à des moments critiques de son existence. Jamais il n'avait pu oser, être totalement libre de ses actes et ses paroles, sans cesse sous le joug maternel, incapable de s'avouer homme dans un monde maudit. Il était très bien né, merci le destin ou bien le karma, voire les deux combiné mais on ne pouvait plus rien y faire, à part s'y faire justement. Alors, cette idée idiote avait germé dans la tête de Decastel: tester de nouvelles expériences, essayer de faire comme tout le monde au moins une fois dans sa vie, juste pour voir ce que cela faisait et si c'était bien que ce qu'on pouvait lui dire. Résultat des courses, il était totalement paumé au milieu d'une boîte de nuit à siroter un cocktail sans alcool comme un gamin de dix ans, alors que Lukà tâchait de le rassurer sur ses prises de décision. Du grand Decastel. "Un mec perdu? Je sais pas si c'est très sympa comme idée..." La vérité était ainsi pourtant: Tim ne se connaissait pas le moins du monde et surtout, il n'avait aucune idée d'où aller, quel chemin prendre. Il aurait aimé que le destin soit simple et lui instinctivement ce qu'il avait à faire mais tout cela n'était qu'une bien jolie utopie. Il n'y avait que lui pour faire des choix, comme celui d'être venu ici ce soir-là, au diable les conséquences de ses actions. "Merci, ouais, j'hésiterai pas. Puis, au pire, je verrai ce qui me plaît ou non, donc ce sera rien de perdu." Du moins, il l'espérait parce que, pour le moment, Tim n'était sûr de rien, surtout pas de sa décision de se retrouver au milieu d'une foule à parler de son choix de métier avec une musique tonitruante dans les tympans. "J'en sais fichtrement rien, justement... J'ai jamais réfléchi à tout ça. Je suis devenu gardien de cimetière parce que ce lieu était un refuge comme j'étais môme, je suis pas allé plus loin que ça." Comme si c'était simple de se choisir une voix professionnelle, il n'y avait probablement rien de plus dur quand on sortait du lycée. Il hocha la tête face aux propos de Lukà avant de se retrouver entraîné dans une sale histoire. Lui, parler à une totale inconnue en pensant que c'était Alex? Petterson avait dû fumer un bon kilo de marijuana pour envisager qu'il s'en sortirait. La preuve, il se sentit mal dès l'instant où il dût dire bonjour après les paroles de son ami. Alors qu'il levait son verre pour on ne savait quelle raison, Timothy se retrouva à fuir au milieu de la foule de danseurs. Là, il était à l'abri... En partie. Il se rendit vite compte que c'était horrible de se retrouver entouré d'autant de personnes et dès ce moment là, il sentit son coeur pomper jusqu'à ses oreilles et sa respiration se faire plus difficilement. Voilà pourquoi il n'avait pas eu l'idée du siècle.
Les traits du visage de ton ami montrent bien que ce dernier n'est pas à son aise dans ce genre d'endroit. Que cherche-t-il à prouver ? Pourquoi as-t-il tant tenu à venir en boite de nuit ce soir ? Timothy n'est pas à son aise dans le monde de la nuit. Toi non plus d'ailleurs, ça fai des années que tu n'as pas mis les pieds ici. La musique est assourdissante, t'entends à peine ton ami quand il te parle. T'as peur pour Tim. La foule ce n'est pas son truc, t'as peur qu'il se sente mal. Panique, crise d'angoisse. Qu'importe ce qu'il fera, tu seras là pour lui. Au secondaire, tu ne l'as jamais défendu face à cette fausse bande de potes. Aujourd'hui, ça a changé. Tim fait partis de tes plus proches amis et il n'est pas question que quiconque puisse lui faire du mal. Personne n'a le droit de faire du mal à Timothy, personne. Ni toi, ni aucun autre. T'es content qu'il t'es appelé ce soir, tu connais bien ce monde et tu semble être à même de l'aider à tenir bon face à toute débauche, un monde auquel Timothy n'a aucune connaissance. Sourire compatissant, main réconfortante sur la sienne, tu tentes de montrer à ton ami qu'il n'est pas seul ce soir. T'es là pour lui, quoi qu'il arrive. "Un mec perdu? Je sais pas si c'est très sympa comme idée..." Tu lèves les yeux aux plafond, le jeune homme a toujours eu la fâcheuse manie de se dénigrer. Ça t'énerve un peu, cela dit tu ne te fâches pas. "Certaines filles trouvent ça charmant les garçons perdus." Tu parles en connaissance de cause. Combien de fois as-tu vu une jeune demoiselle s'approcher de toi lorsque tu décides de sortir dans les bars, seul ou accompagné de ton meilleur ami ? C'est souvent sur toi que les femmes se jettent, au grand désespoir de ton ami. Pauvre Matt. "T'es loin d'être un cas désespéré Tim, je t'assure. Il n'est jamais trop tard pour changer, cela dit t'es pas obligé de venir en boite, de boire jusqu'à ne plus tenir debout et de draguer toutes les nanas de la soirée." Non, Tim n'est pas ce genre d'hommes. C'est quelqu'un de bon, de gentil et de serviable. Il est un ami fidèle. "Merci, ouais, j'hésiterai pas. Puis, au pire, je verrai ce qui me plaît ou non, donc ce sera rien de perdu." Effectivement, rien est perdu. Il n'est pas un cas désespéré. Il n'a juste pas grandis en même temps que tout le monde. Pour savoir ce qu'il attend de cette soirée, tu l'emmène trouver cette fille assise au bar, elle semble et perdue. Si toi, tu lui fais la conversation aisément, ce n'est pas le cas de ton ami. Lorsque tu te retourne, il n'est plus là. "Excuse moi un instant !" Tu laisse la demoiselle alors que tu repère Tim au milieu de la foule, sur le dancefloor. Il n'a pas l'air bien. Tu ne dis rien et, doucement, tu prends sa main avant de l'emmener à l'extérieur du bâtiment, loin de toute cette agitation et du bruit qui va vous rendre sourd plus tard. L'air est frais et vous fouette le visage. "Qu'attends-tu de cette soirée Tim ? Dis-moi ! Je suis prêt à t'aider si c'est que tu veux." Toujours une voix douce et calme, tu ne veux pas l'effrayer encore plus qu'il ne l'est actuellement. Tu le voix bien que ce monde-là n'est pas fait pour lui. Tu comprends mieux pourquoi il a choisis de travailler au cimetière mais il ne peux pas se cacher éternellement dans ce sinistre et morbide endroit. "Si t'avais la possibilité de changer de vie, là tout de suite maintenant, tu opterais pour quel changement ? Et si on s'engageait dans l'armée ?" Sérieux Petterson ? L'armée ? Avec ta corpulence de gringalet, tu ne tiendras pas longtemps. Tu ne sais pas d'où tu la sors cette idée aussi folle soit-elle mais pourquoi pas ? Après tout, il n'y a rien qui te rattache à cette ville mis à part ton travail. Mais étant ton propre patron, tu peux très bien mettre ton activité entre parenthèse. Surtout si c'est pour aider un ami qui en a besoin.
Il n'aurait pas dû venir, il le savait pourtant que le monde de la nuit ne faisait pas partie de son univers. Tim préférait les lieux calmes, paisibles, silencieux, pas le brouhaha ambiant qui l'empêchait de réfléchir. Il avait encore besoin de ses neurones s'il voulait survivre à cette soirée. Pouvait-on encore revenir en arrière, à l'instant où il avait eu cette terrible idée? Timothy n'avait aucune idée de ce qu'il souhaita accomplir en se rendant dans un endroit bondé, entouré de gens ivres qui ne faisaient pas attention à leurs gestes. Est-ce qu'un jour il pourrait s'y faire? Est-ce qu'un jour il serait normal? Il le désirait tellement pourtant. Être comme tout le monde, ne pas paniquer dans les endroits publics, rire et pleurer avec les autres? Tim n'était pas ainsi. Lui, il allait se cacher dans les cimetières dès le moment où on venait déranger ses petites habitudes et avec le temps, il en avait développé de nombreuses. Il en avait eu besoin pour surmonter les épreuves liées à sa chère mère qui avait bien profité de ses faiblesses pour le rendre vulnérable. Il ne voulait plus être le pantin de qui que ce fut, surtout pas d'une génitrice qui avait oublié son vrai prénom depuis bien longtemps. Alors, il tiendrait le coup et avec l'aide de Lukà, tout était encore possible. "Parle pour toi, Lukà." Aucune fille ne venait le cueillir entre les allées des tombes et de manière générale, son ami était bien plus glamour que lui. Déjà, il avait eu des expériences de la vie ce dont Timothy ne pouvait même pas être fier. "Tant mieux parce que je suis pas capable de faire tout ça à la fois. Déjà un truc, je suis pas sûr." Il n'était en mesure de rien gérer du tout, c'était un fait au moment où Petterson l'emmena face à une inconnue pour faire la conversation. Decastel avait vite fui face à l'adversité et il s'était instantanément retrouvé en proie à la panique au milieu de corps d'étrangers. Il se sentait mal, il n'arrivait plus à respirer, il devenait aveugle... Jusqu'à ce que Lukà l'extirpe de là pour l'amener dehors. A nouveau, Tim put reprendre son souffle, adossé au mur devant le club, tremblant encore. "Je sais pas, j'en sais rien, je... Je veux juste être comme tout le monde. Au moins une soirée. Merde!" Et il avait hurlé le dernier mot en sentant ses yeux s'emplir de larmes. Il était fatigué de lutter contre ses propres démons, encore plus usé encore de ne pas y arriver. Il n'était pas celui qu'il aurait aimé. "Mais qu'est-ce que tu racontes? T'as bu en secret? On va pas changer de vie de toute façon, si?" Il était perdu, il avait mal au crâne et il se laissa glisser au sol. Impuissant.
Si tu es ici ce soir, c'est pour aider ton ami, le soutenir. Ça sert un ça un ami non ? Certains pourraient croire que c'est pour te racheter une conscience que tu agis ainsi avec Timothy. Pas du tout, ils se trompent. Tim a toujours été ton ami. T'as juste été trop con à l'époque pour te rendre que Timothy vaut bien mieux que tous ces hommes qui se disaient être des potes. Foutaises ! À la prmeière occasion, ils sont partis. Te laissan ici, à Brisbane seul. Non, t'es pas seul. Autrefois, tu avais Anna près de toi. Matt aussi, Tim. En grandissant, t'as appris qu'avoir dix milles amis n'est pas une bonne chose. Deux amis fidèles valent mieux qu'un milliard de faux amis. Ce soir, tu cherches à comprendre pourquoi Tim a voulu venir en boite de nuit. Quelle mouche l'a piquée ? Ce n'est pas l'homme que tu connais, cela dit, t'es content qu'il sorte de sa coquille et s'ouvre au monde. Tu ne peux que l'encourager. Mais ce monde l'effraie, t'es là pour l'aider à avancer, à aller vers les autres en lui tenant la main. "Tout ne vient pas tout seul, ce soir t'as fait un pas vers le monde. Tu as montré aux autres que tu existe. Tu peux changer et si je dois t'aider, je le ferais sans hésiter !" Amis à la vie, à la mort. C'est ce que vous vous étiez promis à l'époque, après t'être excusé auprès du jeune homme des agissements de ses pseudos amis. Tu ne demandes pas à Tim de draguer les nanas présentes ce soir, ni de boire jusqu'à ne plus se souvenir de son prénom. Tu veux simplement qu'il s'amuse si c'est ce qu'il souhaite à son tour. Jamais tu ne le forceras à faire quoi que ce soit, c'est la meilleure façon de le braquer. "Je sais pas, j'en sais rien, je... Je veux juste être comme tout le monde. Au moins une soirée. Merde!" Être comme tout le monde. Une phrase qui veut tout dire et qui ne veut rien dire en même temps. Chaque être humain est différent. Mais tu comprend ce qu'il veut dire, il veut juste être un mec normal. Ton verre à la main, tu lance un sourire rassurant à ton ami. "Très bien, j'ai compris. Tu veux juste être un mec normal, c'est bien ça ? Viens, on rentre à l'intérieur, on s'assoit au bar, on boit des verres avec ou sans alcool, c'est comme tu veux. Et on parle, de tout, de rien. De nanas, de boulot, de ce que tu veux !" Tu laisse totalement le choix à ton ami de choisir la suite de la soirée. Il est le maître de son destin. Mais Tim se laisse glisser sur le sol, accroupis devant lui, tu poses ta main sur les siennes. Elles sont froides. "Sinon, on peut aller chez moi. Ce soir n'était qu'une tentative, on réessaiera dès que tu seras prêt." Tu comprends ce qu'il vit en ce moment, tu fus pareil jusqu'à il y a encore peu de temps. Tu ne te sentais pas prêt à sortir seul dans les bars, au début, Matt t'accompagnais et, petit à petit, tu as réussis à te rendre seul dans des endroits comme celui-ci. Ça demande du temps, le changement ne se fera pas en un jour. "Tu veux qu'on rentre ? Tu peux même dormir à la maison, si tu veux pas être seul. Ou sinon, on peut refaire une tentative à l'intérieur de la boite de nuit. C'est toi qui décide ce que tu souhaite, je ne suis ici que pour te suivre !"
Il ne réaliserait certainement jamais l'exploit d'être comme tout le monde. Timothy n'avait pas le patrimoine génétique pour cela, il en avait encore moins l'éducation. Depuis tout petit, il avait été calfeutré entre quatre murs, apprenant le rôle de chaque sexe dans la société et faisant partie de la mauvaise catégorie en la matière aux yeux de sa mère. Alors, il avait vite été perdu dans sa quête d'identité, perdu aux yeux du monde aussi parce qu'il ne souhaitait pas être vu. Non, Tim n'était pas le genre de garçons à hurler au vent qu'il existait, qu'il était vivant et qu'il fallait s'intéresser à sa petite personne. Moins de gens avaient conscience qu'il existait, mieux il se sentait. C'était pour cette raison qu'il détestait débuter une conversation avec des inconnus: Tim considérait qu'il n'avait rien d'intéressant à dire, sa vie n'ayant pas grand intérêt pour autrui. Il passait son temps au fond d'un cimetière à désherber et entretenir des pierres tombales, niveau glamour, on avait clairement fait mieux. Tim savait qu'il ne pourrait pas toujours jouer la carte de l'homme invisible et il savait également qu'il était temps qu'il prenne sa vie en main, qu'il accepte de ne pas pouvoir rester en retrait jusqu'à sa mort. Alors, cela commençait maintenant, dans ce club, à essayer de ne pas paniquer au beau milieu de la foule... Lukà l'avait rattrapé avec une angoisse certaine et Timothy avait laissé échapper sa détresse sur le trottoir au final. Il n'était pas les autres et il ne le serait jamais, pourquoi ne pouvait-il pas directement l'accepter? Il se serait évité bien des déconvenues si c'était le cas mais il tâcha d'écouter les paroles de Petterson en respirant plus sereinement. Non, il n'avait plus la force de lui répondre, de lui ruiner ses arguments par son incapacité à faire de réels efforts pour s'intégrer dans la communauté. Tim avait envie de faire plus, d'être plus aussi mais c'était impossible alors, non, il était évident qu'il ne pourrait pas retourner dans ce club pour le moment. Voire peut être jamais et la seconde proposition de Lukà semblait être la plus viable pour sa survie mentale. "Allons chez toi, t'as raison, ça sert plus à rien pour ce soir. Un jour peut être..." Il tâcha de se relever, la mine défaite, le regard nerveux mais un léger sourire au coin des lèvres. Au moins, il n'était pas tout seul et peut être que c'était là que résidait tout espoir pour lui. Dans l'amitié. Dans celle qu'il partageait avec Lukà en se dirigeant vers chez lui en racontant tout et n'importe quoi. Comme au bon vieux temps.
CODAGE PAR AMATIS
Spoiler:
Je te propose de clôturer là dessus, si ça te va :uu
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Faites comme si j'étais pas là, je passe je passe et je file. 