Parmi les lieux maudits et détestés de la jeune brune qui s'active dans le couloir, l’hôpital de Toowong remporte la mise, et haut la main, surtout pour cette année 2019, et fin d'année 2018 en bonus. Sybbie a presque l'habitude d'arpenter cet hôpital depuis ces derniers mois, toujours à reculons, cependant. Après l'hospitalisation d'Ambroise, qui s'était faite avec force, et l'annonce qui avait suivi, tout ça l'avait frappé de plein fouet. Mais elle s'était fait cette promesse, tout comme elle l'avait faite à son frère ; elle l'accompagnait pour ses check-ups, les quelques rendez-vous qui s'espaçaient avec le temps. Elle ne ratait pas non plus ses vérifications sanguines, et s'improvisait presque infirmière lorsqu'elle recevait les résultats à l'appartement, avant même d'aller voir le médecin traitant qui s'occupait des prises de sang. Cette période était la plus compliquée, car elle voyait bien les jours avancer, et qu'en réalité, ça ne s'arrêterait jamais. Elle avait donc pris sur elle, lui laissant l'espace et le temps qu'il lui fallait de son côté. Ces six derniers mois étaient passés à une vitesse folle, mais ses inquiétudes ne partaient pas vraiment. Mais le départ d'Ambroise précipité avait tout bousculé une nouvelle fois, mais cette fois-ci elle ne pouvait plus gérer la situation comme elle en avait l'habitude pour ne pas craquer. Il avait réussi à la rassurer. C'était ces promesses qu'elle se ressassait en boucle dans la tête pour tenir le coup ; celle de venir le voir pendant les fêtes de fin d'année, premièrement, et ensuite celle de se faire cette semaine en Europe qu'ils s'étaient promis il y a bien des années. Mais pourtant l'idée de le rejoindre définitivement lui trottait dans la tête, à peu près trois fois par jour, et ça, quand elle arrivait à s'occuper l'esprit. Elle essayait de ne pas pleurer quand ils faisaient cette session skype avec Clément, et elle le remerciait trente fois d'être là. Cette petite responsabilité lui avait donc été enlevée, ça faisait des semaines qu'elle n'avait pas mis les pieds ici ; ce qui ne lui manquait vraiment pas.
Elle n'est pas allée en cours ce matin. Elle déteste ces cours de géométrie, et encore plus le professeur qui l'enseigne. Un vieux avec une moustache qui ne peut s'empêcher de faire des blagues misogynes lorsque Sybille ou l'une des filles du cours lève la main pour poser une question. C'était au dessus d'elle cette fois-ci. Une excuse pour ne pas y mettre un pied ce matin. D'habitude, elle aurait rentabilisé ce temps pour se trouver autre part, ne se laissant pas une seule seconde de calme. Elle a perdu ses bonnes habitudes, les remplaçant par des mauvaises. Elle s'était reprise il y a peu, retournant au refuge animalier, venant aider bénévolement comme elle le pouvait. L'état de son frère jumeau se stabilisait, elle se permettait de reprendre en main ses projets, de reprendre ses habitudes qu'elle aimait tant. Mais le départ d'Ambroise lui avait remis un coup au moral, et à nouveau elle se laissait aller. Elle le pouvait bien, pour une fois, non ? C'est ce qu'elle se répétait. Mais elle s'en veut. Un peu. Elle n'avait rien fait de bien glorieux ce matin. Elle avait sorti Moana au parc, profité du pain rassis de la veille pour les donner aux canards. Elle était fatiguée déjà à son retour. Elle s'était donc posé avec la chienne la plus mignonne au monde devant la télé, finissant la saison d'une série qui n'avait ni queue ni tête et qui ne lui plaisait même pas, la tête ailleurs. Et ça ne lui ressemblait pas du tout, c'était bien à des années lumières de sa personnalité.
Sybille s'était enfin décidé de se bouger, ou du moins de prendre la salle de bain pendant des heures, lorsqu'elle reçu ce texto de Clément. Les sourcils froncés, elle n'avait pas pu s’empêcher de s'inquiéter, malgré ses phrases rassurantes. Elle ne retenait que : "après son spectacle", "hier", "hospitalisé". Immédiatement, elle s'était imaginé qu'il avait pu se blesser. Elle avait toujours cette peur pour lui, une peur irrationnelle mais bien réelle. Mais apparemment, ce n'était pas le cas. Encore plus intriguée par ses réponses, elle lui avait évidemment assuré qu'elle viendrait lui apporter ce sac dont il avait besoin. Évidemment devant l’hôpital, elle avait soufflé longuement, presque à essayer de se donner du courage à rentrer dans ce bâtiment morose. Sybbie avait opté pour ce sac à dos noir qu'elle avait déniché près du lit de Clément. Pas sûr qu'il aurait voulu repartir chez lui avec l'un des sacs de Sybbie, plein de pin's. Elle avait réuni ce qu'elle pensait être raisonnable, ne sachant pas vraiment combien de jours il allait y rester.
L'hiver est doux en cette période, à Brisbane, elle ne s'en plaint pas. Elle en a profité pour sortir avec ce bonnet fin ; c'était en fait un stratagème pour ne pas avoir à se coiffer, mais elle sera la seule à le savoir après tout. Elle avait donc embarqué le sac de Clément, et un énorme bouquin d'architecture sous le bras en sortant de chez elle. C'était le dernier jour pour ramener ce manuel à la bibliothèque universitaire, ne voulant pas avoir de soucis avec des retards. Elle ne l'a même pas ouvert en deux semaines, elle n'avait pas la tête à ça, il avait prit la poussière sur son bureau. La jeune australienne était donc passé sur le campus pour le ramener, avant de rejoindre Clément. Dans le couloir, elle se presse, ses yeux se baladent sur les numéros de chambre pour y trouver le 223 qu'il lui avait indiqué, essayant de paraitre la moins perdue possible. Finalement, elle la trouve au bout du couloir. Elle toque musicalement sur cette porte, à son habitude, comme elle le fait pour sa chambre. Elle tend l'oreille pour essayer d'entendre une quelconque réponse, et y entre d'un pas décidé. Non sans un sourire, elle tourne la tête vers Clément, visiblement seul. « Toc-toc. C'est moi ! », lui lance-t-elle gaiement, mais sans hausser la voix, pour ne déranger personne. Elle n'attend pas une réponse pour le rejoindre et lui poser son sac près de son lit, sur l'une des chaises libres. « T'as tout là dedans, normalement. En espérant n'avoir rien oublié ... » Elle checkait dans sa tête ce qu'il lui fallait. Jeans, check. Trousse de toilette, check aussi ... Elle en profite pour le prendre dans ses bras pour lui dire un bonjour qui lui est naturel. «Maintenant dis-moi ce que tu fais ici ?! Comment tu te sens, Clem ? », trop pressée et inquiète pour attendre plus longtemps. Elle était prête à lui rappeler que ses SMS sont ultra inquiétants, même quand il dit de ne pas l'être. D'ailleurs, elle check aussi s'il ne lui a pas menti. Il n'a pas l'air blessé, à première vue.
Même pas 5 secondes ont passées depuis que j'ai envoyé le sms à Sybille pour la prévenir de mon hospitalisation, que déjà je le regrette presqu'amèrement. Personne n'aime les hôpitaux, mais je sais que elle les déteste par dessus tout. Après y avoir emmené Ambroise de force et avoir assister à l'annonce de sa maladie, elle a été obligé de me voir, moi, allongé dans un lit sans pouvoir faire le moindre mouvement. Bien qu'elle ait toujours été souriante et qu'elle n'a jamais perdue de sa motivation, j'ai bien rapidement remarqué que son soutient commençait à s'effacer. Et je ne lui en ai jamais voulut étant donné qu'elle avait déjà son frère à gérer et qu'elle n'avait sans doute pas assez de force mentale pour nous soutenir tous les deux de la même manière.
C'est pour cela que je m'en veux sincèrement de l'inquiéter de la sorte mais je n'ai pas vraiment le choix que de la prévenir, non ? Dans tous les cas, si je n'étais pas rentré ce soir, je pense qu'elle aurait essayé de me joindre. Et si par hasard je sortais cet après midi, que je rentrais et que je lui dirais où j'ai passé la nuit, elle m'aurait sans doute passé un savon car je ne l'ai pas prévenu. Autant prendre les devants et je faire tout de suite !
La réponse de ma colocataire ne tarde pas à tomber et elle m'indique qu'elle passera cet après midi. La petite précision concernant Moana me fait doucement sourire et je décide de ne lui répondre que par un simple 'ok' avant de poser mon portable sur la table de chevet. Dans un soupire, je me couche à nouveau, reposant ma tête sur l’oreiller et me masse la nuque de ma main gauche.
La crise d'angoisse était violente, autant mentalement que physiquement, me laissant avec les pires courbatures que je n'ai jamais eu et dieu sait que j'ai l'habitude des entraînement physiques intensifs. Au moindre mouvement que j'effectue, mes abdo et mes dorsaux se contractent brusquement et douloureusement, me faisant régulièrement grimacer. Même les muscles de mes jambes et mes bras me font comprendre que la crise est passé par là et j'avoue n'avoir pas encore eu le courage de m'aventurer seul et à pied dans les couloirs. Fermant les yeux, je prends une profonde inspiration et abaisse ma main, la posant sur mon ventre, essayant de me détendre un peu plus.
* * *
Je me réveil soudainement et brusquement lorsqu'on toque à la porte et ais à peine le temps de prendre totalement conscience de la pièce dans laquelle je me trouve, que la porte ne s'ouvre, laissant apparaître Sybille. C'est un regard un peu troublé, dans un premier temps, je pose sur elle, alors que je l'observe s'avancer pour poser mon sac à dos sur la chaise. « Comment tu … ?» commençais avant que ma mémoire ne me revienne : je l'ai prévenu par sms peu avant de sombrer à nouveau dans un sommeil profond (alors que j'ai dormi au moins 12h déjà cette nuit). Prenant une profonde inspiration, je soupire doucement et me redresse dans mon lit, combattant la douleur de mon corps meurtrit alors que Sybille m'explique qu'elle a sans doute pensé à tout. « Ce ...c'est génial. Merci beaucoup. » je m'installe au bord du lit non sans quelques difficultés, puis me penche en avant pour attraper le sac à dos et le fouillé.
Pendant que Sybbie me demande d'avantages d'explications, je sors un pantalon de jogging et un t-shirt du sac «Crise d'angoisse » dis-je, simplement, en retirant la blouse de l'hôpital pour enfiler un vêtement plus décent. «Après la représentation de hier je me suis retrouvé dans une ruelle a côté du théâtre et j'avoue que jusqu'à présent je n'ai absolument aucune idée comment je me suis retrouver là-bas » indiquais-je en posant mon regard sur ma colocataire «Toujours est-ce que j'étais là, allongé sur le sol et que j'arrivais pas à bouger. Me demande pas pourquoi, je saurais pas te le dire. Peut-être la pression qui est retombée tout à coup ? » j'hausse les épaules et me lève pour enfiler le pantalon « J'ai prévenu Cian, tu sais celui avec qui j'avais échangé la valise à l'aéroport en revenant de Bali ? Je t'en avais parlé de lui» je me réinstalle sur le lit «Il est arrivé vingt minutes plus tard et quand il était avec moi ma crise s'est déclenchée » je grimace et me passe une main sur les côtes « J'en ai déjà eu plusieurs, tu le sais aussi bien que moi, mais celle ci elle ...je sais pas, elle dépassait tout ce que j'ai pu vivre » je déglutis « Genre à un moment j'ai sincèrement cru que j'allais mourir. Je pensais littéralement que je faisais une crise cardiaque» je lance un coup d'oeil furtif à la jeune Australienne « Au final la crise s'est calmée mais mon corps m'a lâché et je me suis réveillé ici, dans cette chambre. Je me suis rendu compte de rien du tout, mais Cian a tout parfaitement gérer » je soupire doucement et pince les lèvres
«Bon mais du coup c'est rien de grave. J'ai juste l'impression que je me suis prit un train dans la gueule tant j'ai mal partout. J'ai l'impression de me découvrir des muscles dont je n'avais absolument aucune idées qu'ils existaient » dis-je, me mettant à rire. Rire qui se transforme toutefois très rapidement en discret gémissement de douleur lorsque mes abdo se contractent. « Désolé en tout cas» reprenais-je avec sérieux «Je ne voulais vraiment pas t'inquiéter ... »
Quelques coups d’œil furtifs vers Clément lui avait fait comprendre qu'elle était arrivée en pleine sieste de récupération, ce qu'elle regrettait un peu. Mais malgré son réveil difficile qui l'avait complètement déphasé, il avait l'air en forme. D'ailleurs, elle trouvait même qu'il avait une assez bonne mine, ce qui la rassurait, l'ayant réveillé en sursaut. Elle en profite pour s'assoir sur cette chaise près de son lit, alors que Clément plongeait hâtivement dans son sac afin d'y récupérer ses affaires. Il s'active, n'a rien à redire sur les choix de la jeune australienne, ce dont il aurait pu en plaisanter si elle s'était planté. Il ne tourne pas autour du pot et lui donne les explications qu'elle lui avait demandé, ce qu'elle apprécie au plus haut point parce qu'il est direct. Elle n'en avait pas douté une seule seconde, Clément s'était toujours montré sincère avec elle. Elle se pince les lèvres lorsqu'il lui annonce que c'est malheureusement une nouvelle crise d'angoisse qui l'a amené ici à nouveau. « Oh, non ... Pas ça. », laisse-t-elle lui échapper, l'air dépitée, alors qu'elle passe une main sur sa nuque, désolée. Son explication qui suit n'est pas des plus rassurantes non plus, et plutôt assez flou. Captivée par toutes ses explications, elle le fixe dans les yeux, se demandant elle aussi comment il avait bien pu se retrouver dans cette fameuse ruelle. Mais parfois, il n'y a même pas de réponse à avoir. Sybille est à deux doigts de l’interrompre, tant son discours l'inquiète et l'interroge. Mais elle en reste bouche bée, écoutant ses dernières explications, toujours plus inquiétantes à fur et à mesure qu'il lui explique la situation. Imaginer Clément dans la scène qu'il lui décrit ne la met pas à l'aise.
Elle affirme ses propos d'un hochement de tête lorsqu'il lui parle de Cian. Elle se souvient bien de ce qu'il lui avait raconté, tant la scène était atypique et presque comique. Sybille a parfois du mal à retenir tous les prénoms, mais celui-ci lui était bien resté encré dans sa tête. « Il a assuré, il gère ce gars. Bordel, heureusement qu'il était là ... » Elle ne pouvait pas penser plus sincèrement ce qu'elle venait de lui dire. Surtout quand elle apprend que sa crise s'est déclenchée lorsqu'il était présent. Les crises d'angoisses ne sont pas faciles à cerner ni à contrôler, ce Cian pouvait être remercié cent fois pour son courage. Ses explications se précisent, mais il termine en essayant de la rassurer comme il le pouvait. Ou alors, il voulait se rassurer lui-même. « J'avais pas du tout pensé ou imaginé ça, j'étais complètement à l'ouest, moi ... » Elle repense à ce texto. Heureusement qu'il n'a pas précisé directement que c'était pour une crise d'angoisse qu'il était hospitalisé, elle aurait très certainement paniqué. « Mais Clément, c'est pas du tout rassurant, vraiment ... », insistant bien son "du tout" pour bien lui faire comprendre qu'elle trouvait tout ça vraiment flippant. Surtout qu'il venait de préciser que ça lui avait fait plus de peur que toutes les autres, à la comparer à une crise cardiaque. « Je peux être honnête avec toi, sans que tu le prennes mal ? » C'était une question rhétorique pour amorcer ce qu'elle n'osait pas dire, sachant qu'elle pouvait lui poser toutes les questions qu'elle désirait. Ils n'avaient jamais eu de tabous, et c'est ce qu'elle adorait dans leur relation. « Ça m'inquiète ces crises d'angoisses à répétition ... » Elle ne voulait pas lui mentir. Certes, elle était peut-être du genre à monter assez vite en panique, mais elle trouvait cette situation réellement inquiétante. « Et par pitié, arrête de tout minimiser ... Ne prend pas ces signes à la légère ... » Ils étaient bien placés pour savoir qu'il ne fallait pas prendre à la légère ne serait-ce que 1% de tout ça. Les derniers mois l'avaient bien prouvé. C'était aussi à cause de ça que Sybbie se faisait du soucis actuellement. Elle n'avait d'ailleurs pas été aussi présente qu'elle aurait du pour son meilleur ami, alors qu'il avait traversé l'une des périodes les plus difficiles. Le revoir à nouveau ici lui cassait tout espoir. « La représentation. Ça s'est mal passé ? Tu t'es trop mis la pression ? » Elle essayait d'obtenir des réponses à ses questions, de les comprendre avec lui. Elle se redresse sur sa chaine, jusqu'alors affalée sur celle-ci. « Et elle est quand déjà, ta prochaine représentation ? Et ta prochaine répétition ? », continue-t-elle, sur un ton plus joyeux. Insinuant presque qu'il devrait penser à lui et à sa santé avant tout. Toute cette pression, et tout ce stress ne pouvait mener qu'à des crises, incontrôlées et imprévisibles. Et pourtant, elle savait qu'il y mettait vraiment du sien depuis plusieurs mois. Elle le savait tellement passionné et déterminé. Ce genre de crise était tellement compliquées à gérer, mais aussi à s'y remettre. Elle le savait vraiment déterminé et passionné, mais ne voulait pas le voir aller trop vite au détriment, à nouveau, de sa santé. Le voyant grimacer à cause de ses muscles douloureux n'arrangeait rien non plus.
Je vois bien que mes paroles sont tout sauf rassurantes. Rien que la réaction primaire de Sybille me fait comprendre qu'elle s'inquiète réellement. J'ai a peine eu le temps d'évoquer la crise d'angoisse, que la jeune femme lâche un 'oh non pas ça' qui m'enserre le cœur. Je m'en veux. Oh dieu que je m'en veux de lui infliger ça. Elle n'a pas à vivre ces crises à répétitions, elle n'a pas à devoir me supporter dans ces moments. Baissant le regard, je commence tout doucement à me sentir mal, non pas physiquement mais mentalement. Je devrais pourtant réussir à les contrôler ces crises. Mon psychologue m'a donné plusieurs techniques et j'en ai appris bien d'autre lors de mes différentes cessions de Yoga. Et pourtant, j'ai été dans l'impossibilité de contrôler celle de hier qui était d'une violence jamais vécue auparavant.
J'essaie d'ignorer la voix qui me dit à quel point je suis con d'ainsi inquiéter mes amis et continue mes explications. Je ne prend pas des pincettes et je suis 100% sincère dans mes paroles. Bien que celles-ci soient un peu confuses -je le remarque au regard de ma colocataire- je continue et fini par avouer à voix haute que j'avais l'impression que hier sonnait ma dernière heure et que j'étais entrain de faire une crise cardiaque. Je n'aurais peut-être pas dû le dire, j'aurais dû le garder pour moi ça. Mais il est trop tard maintenant.
Après avoir dit que Cian a parfaitement bien géré et dit qu'heureusement il était là -ce à quoi je répond par un long hochement de tête- Sybille me demande si elle peut être honnête avec moi, sans que je ne le prenne mal. N'ayant pas forcément le choix, j'hoche doucement la tête pour toute réponse et garde le regard baissé tout au long de la prise de parole de mon amie. «Crois-moi, tu n'es pas la seule que ça inquiète » soufflais-je, me sentant tout à coup fébrile.
Et si ces crises à répétitions étaient en vrai un signe avant coureur d'une autre maladie ? Le genre qu'on ne peut diagnostiquer et qui se déclenchera plus tard ? Je ferme un instant les yeux et secoue la tête comme pour chasser ces pensée, essayant de me concentrer à nouveau sur les paroles de Sybbie. Me suppliant de ne pas prendre ces signes à la légère, elle n'arrange en rien la tempête émotionnelle qui commence à prendre place en moi. «Je sais. Je ….je veux pas minimiser la chose. C'est juste que ... » je baisse mon regard sur mes mains, jouant nerveusement avec mes doigts « Je sais pas quoi faire » avouais-je finalement « J'ai déjà tout essayer. Le suivi psychologique, le yoga, la méditation, le sport ...tout. Et j'ai l'impression que rien n'aide» je déglutis « Je pensais sincèrement que mes 10 jours à Bali me seraient bénéfiques, mais je me rend compte que je n'ai fait que fuir mes problèmes et que ceux-ci me sautent à nouveau à la gueule comme des chiens enragés» je me passe une main dans les cheveux, relève le regard et me lève finalement, commençant à marcher.
Le mouvement m'a toujours aidé pour me calmer et c'est ce dont j'ai besoin maintenant : me calmer, reprendre le contrôle sur mes émotions et éviter à tout prix une nouvelle crise. Sybille fini par évoquer ma représentation de hier, me demandant comme elle s'est déroulé. « C'était génial» soufflais-je en m'immobilisant « J'étais nerveux, comme pas plus que d'habitude. Genre le traque normal quoi. Et une fois sur scène j'ai tout donné, j'ai parfaitement déclamer mon texte et ...» je secoue la tête « Je sais pas ce qui s'est passé. J'ai pas l'impression de m'avoir mit tant de pression » je me gratte l'oreille puis croise les bras «Les prochaines répétitions sont la semaine prochaines » avouais-je finalement à mi voix, déviant le regard vers la porte puis vers la fenêtre «On peut faire un tour dehors ? Je me sens pas très bien ici ... » proposais-je, pensant sincèrement que l'air frais pourra me faire le plus grand bien.
A l'écouter, Sybbie comprenait bien qu'il devait se trouver dans un cul-de-sac. Rien ne fonctionnait, et quand ça commençait à aller mieux, les problèmes revenaient au galop ensuite, ce qui devait être plus que démotivant. Le suivi psychologique qu'il mentionne était, pour elle, indéniablement le plus important, mais il ne fallait pas s'attendre à ce que tout rentre dans l'ordre facilement et rapidement. Le temps ne pouvait être que la clé. Le yoga, la méditation, ça aidait bien aussi, ça, elle en était persuadée. Et si ça ne fonctionnait pas pour ses crises, ça l'aiderait pour son bien être en général. Même si Clément s'était bien foutu d'elle, en s'en moquant ouvertement quand elle lui avait soufflé l'idée. La méditation est un avant tout un travail de respiration ; rien de mieux pour essayer de gérer des crises d'angoisses. «Donne toi du temps. Je suis certaine qu'elles vont s'arrêter, ces crises de ... Mais ça va prendre du temps. C'est totalement normal. Désolée j'te mets la pression à t'en parler comme ça. J'veux pas te mettre la pression, désolée ...» Difficile d'attendre de quelqu'un qui est au bord de la rupture un peu de patience. Mais elle en restait persuadée, avec le temps tout irait pour le mieux.
Clément reparle de ces dix jours à Bali. Il reconnait finalement que c'était juste pour fuir les problèmes et éviter de voir la réalité en face. La jeune australienne hausse les épaules, et lâche un petit soupir. Un soupir presque triste. « Tu sais que tu nous a fait peur, d'ailleurs ? Partir à l'improviste comme ça. » lui répond-elle, la tête étonnée, celle qu'elle avait quand elle avait lu ton texto, imaginant que c'était une plaisanterie à la Winchester. «Puis j'me suis dis que tu vivais ta meilleure des vies et donc j'me suis pas inquiétée. J'étais même contente pour toi. » Elle lui répond avec le sourire. Ils en avaient discuté en plaisantant avec Ambroise, lui imaginant une vie excitante à Bali. Ils le savaient imprévisible, mais pas à ce point. « Même si en revenant, tout est redevenu comme avant ... Au moins ça t'a permis de décrocher pendant dix jours, et ça, c'est pas rien Clem. C'était pas inutile, non. » C'est ce à quoi servent des vacances, après tout. Un break de la routine. « Mais au fond j'suis triste. T'aurais au moins pu nous envoyer quelques photos. Ou une carte postale, comme font les ... vieux ? » Elle s'autorise quelques plaisanteries, même si son humeur n'est pas au beau fixe, pour essayer de décrocher un sourire à son colocataire. C'était peut-être son inquiétude qui disparaissait enfin. Et passer du temps avec Clément lui avait toujours fait un bien fou. Mais reparler d'Ambroise et d'elle en utilisant "on" n'arrangeait rien et lui faisait repenser à son départ à nouveau. Heureusement, Clément lui explique combien la représentation était géniale. Elle l'écoute, subjuguée par ses paroles, comme à son habitude lorsqu'il parle de scène. Sa détermination sans limite l'avait toujours captivé. Sybille fait la moue, elle n'est pas optimiste quand elle entend que les répétitions reprennent aussi tôt. Son rythme avait toujours été tellement soutenu.
« Ouais, carrément, c'est ce que j'allais te proposer justement. » Elle se relève énergiquement, bien décidée à se dégourdir les jambes. « Ça te fera du bien de prendre un peu l'air. D'ailleurs, tu sais quand est-ce que tu sors d'ici ? » Peut-être qu'entre le moment où elle avait reçu son sms et maintenant, il avait eu des nouvelles de sa sortie. Voyant bien ses gestes nerveux, elle essayait tant bien que mal de changer de sujet, presque désolée de renchérir à chaque fois sur sa situation. Mais poser ces question lui était presque obligatoire. « J'vais mourir, seule à l'appart. » Et cette fois-ci, c'était bien seule qu'elle se retrouvait. Pas "seule" parce que tout le monde est sorti, mais bien "seule" tout court. Elle se raccrochait à l'idée d'avoir Clément avec elle. Elle se demande encore comment elle aurait fait si la colocation n'avait inclus qu'Ambroise et elle. La situation aurait été tellement plus difficile. Une balade était une bonne idée. La dernière fois qu'elle était partie se balader dans ce parc, elle avait sauté au plafond (ou plutôt : au ciel ?) devant l'immense araignée qui lui était montée dessus. Immense, selon Sybille, c'est à dire de quelques millimètres. Finalement, ils avaient explosé de rire quelques secondes après. Quelques minutes après pour Sybbie qui n'avait pas encore la pression de redescendue. Mais cette fois-ci, s'en souvenir ne lui faisait qu'esquisser un minuscule sourire en coin, mais sans plus.
La jeune brune se dépêche d'aller ouvrir la porte. Elle laisse Clément y sortir en premier. Le couloir glacial est comme à son habitude très calme. Quelques toux se font entendre au loin. Les aide-soignantes se hâtent entre plusieurs chambres. Quelques patients se promènent seuls, et d'autres se disputent avec leurs invités. Mais finalement, l’hôpital reste assez calme. Et morose. Sybille fouille difficilement dans la poche arrière de son jean pour y retrouver quelques pièces. « Tu veux quelque chose ? » lui montrant les quelques pièces qu'elle a réussi à réunir. Un exploit pour quelqu'un comme elle qui n'a absolument jamais de monnaie sur elle. « J'vais prendre un café à la machine, en descendant. »
Sybille essaie de me rassurer. Comme d'habitude. Même si son soutient envers moi n'était pas aussi fort que celui envers son frère, elle a toujours réussi à avoir quelques mots rassurant, ceux qui font du bien malgré tout ce que l'ont peut imaginer, ceux qui peuvent sembler un peu maladroit ou ceux dont on a l'impression qu'ils ne sortent pas au bon moment. Peu importe la nature de ces mots, ils ont toujours été présent et on toujours eu un effet salvateur sur moi. Car je sais que Sybille est sincère, que jamais elle n'enjoliverait la vérité par un doux mensonge. Lorsqu'elle dit quelque chose, elle le pense vraiment. Et alors je la crois. Si elle est persuadée que ces crises s'arrêteront un jour, alors elle a raison et je ne la contredirais pas. Même si, en ce moment même, mon cerveau et tout mon être me hurle que ce ne sont que des conneries et des paroles en l'air, mon cœur, lui, se persuade facilement des paroles de mon amie. «T'inquiète, la pression je me la met tout seul comme un grand » rayais-je avec un trait d'humour noir qui reste totalement vrai.
Décidant que nous ayons assez parler de ce qui m'a emmené ici, à l'hôpital, Sybbie évoque à nouveau mon voyage à Bali, avouant que je leur ais fait peur de disparaître de la sorte et sans prévenir. Baissant le regard, honteux, j'hoche doucement la tête «Je comprend et je suis désolé mais ...j'ai prit la décision sur un coup de tête et … bref, moi même je savais pas, la veille, que j'allais finir à Bali » j'offre un léger sourire contrit alors que Sybbie reprend, sur un ton plus léger, qu'au final elle était même contente pour moi et que malgré tout ça m'a permis de décroché pendant 10 jours ce qui n'est pas à exclure. «t'as raison » hochais-je la tête avant de lâcher un petit rire lorsque ma colocataire me parle de carte postale que j'aurais dû envoyée «La prochaine fois j'y penserais, ouais. Mais t'as pas vraiment de post là-bas, dans la jungle » dis-je en haussant les épaules « Peut-être que la prochaine fois je resterais assez longtemps pour dresser un perroquet afin qu'il t'apporte un message ? Comme les corbeaux dans Game of thrones, tu sais ?» je me redresse «ça pourrait être tellement classe en vrai, un perroquet pleins de couleurs qui toque à ta fenêtre et qui t'apporte un message ...» je secoue la tête et attrape mon sweat shirt « Bref, peut importe»
Nous décidons de sortir de la chambre afin d'aller marcher dans le parc. «Aucune idée » répondais-je lorsque Sybbie me demande si je sais quand je sors d'ici « Je pense que d'ici cet après midi j'en saurais un peu plus … j'ai vu personne. Ou alors je ne l'ai pas prit en compte tant j'étais exténué hier» j'hausse les épaules avant de grimacer, le cœur serrer lorsque Sybille me dit qu'elle se sent vraiment, littéralement, seule à l'appartement. « désolé» soufflais-je en déviant le regard, enfonçant mes mains dans mes poches.
Je n'en dis pas plus, profitant du fait que la jeune brune ait sortie quelques pièces de la poche de son jeans pour changer de sujet « Je prendrais bien un twix ou une connerie de ce genre» indiquais-je alors que nous descendons les escaliers.
Arriver devant la machine, nous prenons ce que pouvons nous payer avec la monnaie que Sybille a trouvé dans sa poche avant de sortir de l'hôpital prenant la direction du parc. Silencieusement dans un premier temps, tout deux perdu dans nos pensées, je déballe mon kinder bueno et mord distraitement un bout. «Bonnie m'aurait déjà casser les couilles pour que je lui file le deuxième du paquet » commentais-je finalement en posant mon regard sur la barre de chocolat que je tiens en main « Et si je répondais 'non' il aurait trouvé des arguments choc et de merdes qui m'auraient donnés mauvaise conscience comme 'mais si tu manges les deux tu grossis et t’arrivera plus à danser correctement !' et j'aurais fini par le lui donner et il aurais eu son sourire de vainqueur à la con » mon doux sourire se transforme en soupire « Il me manque vraiment» lâchais-je finalement, mordant à nouveau dans la barre chocolaté, sans grand appétit.
Se mettre la pression tout seul n'était pas une nouveauté. Elle ne pouvait pas non plus lui en vouloir, ce dernier avait choisi une carrière qui demandait de la détermination et de la persévérance. Mais faire impasse sur le stress, la pression, et le traque était impossible. C'était aussi ce qu'elle admirait chez Clément, en plus de sa passion et son talent pour tout ce qu'il pouvait entreprendre. Il avait toujours fait preuve de ténacité. De tout ce qu'il lui avait déjà raconté, sur ses répétitions et tout ce qui en découlait, elle ne pouvait contredire ses paroles sur sa propre pression qu'il se mettait. Forcément, avec un rythme si monstrueux, c'était difficile de se ressaisir sur le reste. Au final, c'était une pression intenable sur ses épaules, ça n'arrangeait rien. Le voir à nouveau ici était vraiment difficile pour Sybbie. Tout peut être sur la bonne voie, puis une nouvelle catastrophe se produit. Comme un château de cartes. Et un cercle sans fin. Mais rien n'empêchait la jeune australienne de positiver. Et puis elle ne pouvait pas être négative, surtout pas. Elle essayait plus que tout de lui transmettre ses inquiétudes, pour ne pas l'affoler ni l'alarmer inutilement. Il fallait l'épauler plus que jamais, c'était la clé. Il devait se savoir soutenu, plus que jamais.
Son départ à Bali leur avait fait rire et étonné en même temps, aux jumeaux MacLeod. Puis finalement, ils s'étaient dit que ce n'était pas si choquant venant du jeune comédien. Ils étaient contents pour lui mais étonnés par la destination exotique et assez atypique. Ça leur avait mis en tête des idées de voyages toutes plus excitantes les unes comme les autres. Sybbie ne pouvait que le comprendre, un voyage comme break, c'était tentant. Elle n'aurait pas refusé non plus à sa place ; aurait fait exactement comme Clément à sa place. Sa plaisanterie sur le perroquet au courrier réussissait enfin à lui donner ce déclic afin de la débloquer, et même à la faire rire. Elle dû même mettre sa main devant sa bouche, trop gênée d'en rire autant. «Franchement, ce serait super classe. J'pourrai t’appeler Mestre Clément. » lui répondait-elle finalement, le sourire aux lèvres, séduite par l'idée du corbeau qui lui faisait encore doucement rire.
Clément lui appris sur le chemin qu'il n'avait malheureusement aucune idée de la date de son départ de l’hôpital. Restant sur son idée fixe de "plus on reste de jours, plus on est mal en point", elle espérait tout de même qu'il ne resterait pas une éternité. Le vrai repos méthode "a la maison" était une méthode tout aussi bonne qu'un repos à l’hôpital long et fastidieux. Surtout que la dernière fois qu'elle pensait que quelques jours suffiraient, Ambroise était resté des semaines ici. Quoi que les situations étaient totalement différents, on est jamais trop inquiets. Les deux jeunes colocataires continuaient leur chemin, descendant rapidement l'étage qui les séparait du parc. Au passage, Clément choisi un kinder bueno au distributeur automatique, alors que Sybille restait sur son idée première et reparti avec un café noisette très chaud.
Enfin à l’extérieur, elle prit une grande inspiration d'air frais, et continuait son chemin près de Clément, l'une de ses mains dans la poche, l'autre se réchauffant avec la boisson chaude, et la tête basse. Les quelques premiers pas furent silencieux, les deux colocataires trop perdu dans leurs pensées. C'est Clément qui relançait à nouveau la conversation, alors qu'il commençait à déguster sa friandise. Alors qu'elle avait alors les yeux rivés sur ses pas, lorsque Clément lui parlait soudainement de Bonnie, ses yeux fixèrent à nouveau Clément. Il avait l'air bien amusé mais aussi nostalgique. Quand à elle, sa boule au ventre commençait doucement à revenir. Elle n'en souri pas en retour, elle se contente de boire quelques gorgées pour ne pas avoir à y répondre tout de suite, de peur d'avoir la gorge serrée trop rapidement. « Ouais ... », un rire nerveux aux lèvres. « Ce serait bien son genre ... » Ambroise avait ce don de convaincre ou de persuader n'importe qui. Lorsqu'il s'agissait de ses proches, c'était une tâche encore plus facile. Malgré le fait qu'elle trouvait drôle Clément, aucune expression ne se dessinait sur son visage. Elle devient moins bavarde aussi, et recommence à avoir le regard perdu. Mais lorsqu'il terminait en avouant que Bonnie lui manquait, elle le fixa à nouveau, et dégluti, avant de rabaisser le regard sur son café aromatisé. Elle mis tout de même un certain moment avant d'y répondre. « Et moi ... t'imagines même pas. » Elle était tiraillée entre deux sensations contraires. Elle ne voulait pas aborder le sujet de son frère, ne voulant pas remuer le couteau dans la plaie, mais d'un côté, ça lui faisait du bien de dire ce qu'elle avait sur le cœur. « Tu te rends compte que c'est la première fois qu'on va être ... qu'on est ... séparés ? » Sybille s'arrête quelques secondes pour essayer de ne pas se faire trahir par une voix tremblante, puis reprend la parole. « J'en reviens pas qu'il m'ait fait ça. » Même si d'un côté, elle arrivait à le comprendre, et arrivait parfois à en être heureuse pour lui. Le lendemain, elle ne le comprenait plus, lui en voulait, et prenait ça directement pour elle. Elle ne s'était jamais montrée lunatique, c'était la première fois qu'elle arrivait pas à se mettre d'accord sur ses ressentiments et ses pensées. « Je sais même pas quoi faire. Un jour j'ai envie d'le rejoindre, un jour j'me dis que ça ira. Jsuis perdue. » Espérant également qu'il fasse bien attention à son traitement, là bas, ne pouvant plus être derrière lui afin de se rassurer. Sa cadence de pas se ralenti, elle termine son gobelet d'une seule traite. Le parc est calme et l'air rafraichissant. Son regard se perd sur ces arbres épais, où quelques nichoirs colorées attendent leurs habitants. Ils étaient surement décorés par des enfants de l’hôpital pour être aussi étincelants et expressifs. Elle se tourne à nouveau vers Clément. « Je sais que c'est difficile pour toi aussi. »
Mon humour concernant les perroquet de Bali que j'aurais entraîné comme oiseau voyageur ainsi que ma référence à Game of thrones -série que nous adorons tous les deux- aura l'avantage de dérider mon amie qui surenchéri qu'elle pourra m'appeler Mestre Clément. « Winchester» précisais-je « Mestre Winchester sera plus classe quand même » continuais-je, toujours sur le même ton de l'humour.
C'est donc, dans une ambiance bien plus légère et moins morose que les couloirs que nous traversons, que nous descendons au rez-de-chaussée où nous nous arrêtons au distributeur de conneries et de café. Sybbie reste sur sa décision de prendre un café aromatisé à la noisette tandis que moi je me décide finalement pour un Kinder bueno. En silence, nous finissons par sortir de l'enceinte de l'hôpital et nous nous dirigeons vers le parc.
Et, alors que je mord dans ma barre de chocolat, j'évoque Ambroise qui se faisait toujours un malin plaisir à me donner mauvaise conscience pour arriver à ses fins. Mais j'aurais peut-être dû me taire. Je vois bien, du coin de l'oeil, les réactions de Sybbie et le fait qu'évoquer le sujet de son frère est aussi douloureux qu'obligatoire à ses yeux. J'allais dire qu'on n'est pas obligé d'en parler et changer de sujet, mais elle se lance finalement. Et ses paroles sont comme un poignard en plein cœur.
Evidemment que cette situation est horrible plus elle. Sans doute bien plus que pour moi. Ambroise c'est son frère, son jumeau, pendant toute leur vie ils étaient ensemble et ont toujours été fusionnel, jamais ils n'ont été séparé, jamais ils n'étaient venus sur l'idée d'abandonner l'autre. Et pourtant c'est ce qu'Ambroise à fait. J'entends bien la déchirure dans les paroles de Sybille, qu'elle même se sente abandonné. Même si dans le fond elle est totalement heureuse pour son frère, elle ne peut s'empêcher de se poser la question du pourquoi du comment.
Mais le pire dans toutes ces paroles c'est celle où elle me dit qu'il y a des jours où elle pense sincèrement à quitter Brisbane à son tour et à le rejoindre en Ecosse. A ce moment là je m'immobilise et baisse le regard sur le sol, sentant mes entrailles se tordres douloureusement. Jamais je n'ai imaginé qu'une seule seconde que Sybbie aurait pu suivre Bonnie. Et pourtant ce serait logique, non ? Qu'elle suive son frère. Au final, qu'est-ce qui la retient ici ? Un colocataire à la con qui n'a même plus le temps pour quoique ce soit et de qui ont doit s'occuper comme on s'occuperait d'un gamin ? Je déglutis lorsqu'elle me dit savoir que c'est aussi difficile pour moi. « Moins que pour toi » soufflais-je doucement, ma main se refermant sur ma barre chocolaté que je n'ai même plus envie de manger maintenant.
«T'es sérieuse ? » demandais-je finalement, d'une petites voix peu assuré « Quand tu dis que tu aurais envie de rejoindre Bonnie ?» je relève furtivement mon regard sur Sybbie avant de soupirer doucement «Je pourrais te comprendre en vrai, y a plus rien que tu retiens ici mais je ... » je secoue la tête «J'ai pas envie de te perdre toi aussi » je pince les lèvres «je veux dire, j'ai pas non plus perdu Ambroise, c'est juste que … je fais quoi moi si tu pars toi aussi? » je me mordille la lèvre inférieure.
« Désolé, ce … c'est égoïste, encore une fois» je dévie le regard et le pose sur le parking qui commence tout doucement à se remplir. Que puis-je ajouter d'autre ? Je prend une profonde inspiration je fini par me tourner à nouveau vers Sybbie qui semble sincèrement démunie et c'est, le cœur lourd, que je m'approche d'elle, refermant mes bras autours de ses épaules et la serrant contre moi. «Je n'ose même pas imaginer comme tu dois te sentir toi » soufflais-je en lui caressant le dos. Décidant de ne plus rien dire, je reste silencieux, gardant ma meilleure amie dans mes bras, ignorant les passants qui râlent car nous barrons le chemin.
Sybille regrette à l'instant même de continuer, mais trop partie sur sa lancée, elle continue et se confie. Ses paroles sortent toutes seules. Dès lors qu'elle se dit intérieurement de se taire, elle continue sans se retenir. Ses paroles sont parfois coupées, mais le silence n'arrive pas à se mettre en place. Elle dégluti, soupire parfois, mais continue sur sa lancée, comme si elle devait sortir tout ce qu'elle avait à dire. Et ça lui faisait du bien, même si ça lui faisait du mal. Elle était certaine qu'il la comprendrait, il avait toujours été une oreille attentive pour Sybbie, et elle savait à quelle porte frapper quand son cœur était trop lourd. Lorsque se changer les idées ne fonctionnait pas, sortir absolument toutes ses pensées pouvaient fonctionner. C'était Clément qui avait lancé le sujet, pourtant. Elle ne voulait même pas en discuter. Elle s'était encore perdue sur ce genre de pensées en arrivant à l’hôpital, pourtant. Mais une fois démarrée, elle ne savait plus s'arrêter. Elle jetait quelques regards vers Clément parfois, d'autres fois elle évitait son regard et se perdait au loin, ou encore, elle observait ses pas presque gênée d'être aussi faible. D'un autre côté, elle même se trouvait ridicule, trouvant qu'elle abusait presque. Quand elle se disait que c'était bon, qu'il fallait avancer et qu'il fallait commencer à aller mieux, elle replongeait dans ses idées de départ immédiatement. Tout le reste n'avait que très peu d'importance. Le départ d'Ambroise devenait de plus en plus lourd au fil des jours qui passaient, et cette fois-ci, le temps n'arrangeait rien. Son absence était plus difficile pour elle qu'elle n'aurait jamais imaginé.
Clément s'arrête net, à ses côtés. Encore perdue dans ses pensées et ce qu'elle voulait tellement lui dire, elle continue encore avec quelques pas puis se retourne vers ce dernier, se rendant compte seulement maintenant qu'il s'était stoppé. Le fixant droit dans les yeux, le visage pâle, elle se ressasse intérieurement tout ce qu'elle avait bien pu dire, craintive d'avoir dit encore une de ses bêtises sans y avoir réfléchi avant, lorsque ses paroles dépassent ses pensées. Elle se trouve même agaçante dans ce genre de situation. Et parfois ses paroles peuvent être maladroites. Lorsqu'il lui demande si elle est sérieuse, son regard s’endurcit. Ce n'était pas qu'elle était énervée, c'était parce qu'elle anticipait ce qu'allait lui dire Clément. Déconcertée, elle n'arrive pas à lui répondre immédiatement. L'écouter en soit est même encore plus difficile. Sa main rejoint sa nuque, haussant les épaules comme seule réponse. Elle soupire, ayant presque du mal à le regarder droit dans les yeux. Lui enchaine sans aucun problème, presque préoccupé par ce qu'elle lui avait annoncé. Et pourtant, elle aurait voulu lui dire beaucoup plus, mais sa gorge nouée l'en empêchait pour le moment. Elle déteste passer pour une pleurnicharde, encore plus comme une fille fragile. Les autres, aucun soucis, elle leur dit même de ne jamais rien garder pour soit, que c'est "mauvais". Mais ses propres sentiments, c'était plus difficile ; voir assez rare pour elle de les montrer. Elle aurait voulu lui dire que non, il se trompait, il y a bien des choses qui la retiennent ici, auxquels elle tient, qu'elle est bien ici, que ça lui déchirerait le cœur si elle le faisait, et tout le reste, et plein d'autres choses. Énormément de choses auraient pu sortir de sa bouche cette fois-ci. Mais la bavarde qu'elle était restait pourtant clouée, presque désemparée devant la réaction de Clément. Sa main glisse sur son visage, elle se cache les yeux pendant quelques secondes. Elle n'arrivait déjà pas à rester impassible, mais cette fois-ci c'était encore plus difficile. D'un côté, il disait la comprendre, mais pas totalement. Elle baisse les yeux à nouveau, dans le plus long soupir jamais lâché. Il lui embrouille à nouveau les pensées. Elle ne retient que cette parole, celle qu'il n'avait pas envie de la perdre non plus. Des paroles, qui, sans s'en rendre compte, lui avait remonté le moral, à se sentir peut-être plus importante qu'elle le pensait. Parce que dans ses pensées à cette période, c'était plus : si je m'en vais, personne ne me retiendra, et personne ne me regrettera de toute manière. Alors qu'elle pensait lui avoir avoué ça sans grande importance, lui, s'était plutôt enflammé dessus ; elle en était presque étonnée de le voir dans un tel état.
Finalement, il termine par s'excuser d'être égoïste et la prendre dans ses bras. Elle ne le trouvait pas égoïste, elle ne l'avait jamais pensé. Elle pensait que c'était de la maladresse parfois, mais ce n'était jamais dans un fond méchant. Sybbie pardonnait à beaucoup de personnes leurs excès de colère, de méchanceté, d'égocentrisme parfois, mais elle n'en voulait jamais à Clément. La dernière fois qu'elle s'était énervée sur lui, ça s'était passé à l’hôpital lors de l'annonce d'Ambroise. Elle s'en était voulu à l'instant même, et pendant longtemps. Pour elle, il n'avait pas toujours les bonnes réactions au bon moment, mais il savait toujours se reprendre, même si ça devait prendre des jours d'introspection. Peut-être qu'elle pardonnait trop facilement, mais elle en était persuadée. Sybille ne le repousse pas, même si elle est étonnée de ce changement soudain de situation, profitant plutôt que de se poser d'autres questions. Ses mains se referment, s'accrochant à son sweat, ne s'empêchant pas de fermer les yeux. Mauvaise idée, les larmes lui montent plus vite que prévu, malgré tout le contrôle qu'elle essayait de prendre jusque là. Sa tête se niche parfaitement jusqu'à ne plus voir son visage, restant silencieuse pendant le temps qu'il lui fallait. Restant la plus discrète possible, toute sa pression redescendait enfin, et ça lui faisait un bien fou. Pour trois raisons : la première, elle lui avait enfin dit ce qu'elle en pensait, ensuite elle arrivait enfin à relâcher tout ce qu'elle avait en elle, et dernièrement et non pas des moindres, grâce à Clément. Sybille relève la tête après quelques secondes, peut-être même après quelques minutes, prenant le temps dont elle avait cruellement besoin. « Oh non, j'ai vraiment l'air minable, j'suis désolée ... » Elle se passe les mains sur le visage, essuyant des larmes qu'elle ne voulait pas montrer. « T'as vraiment pas besoin de ça, en plus. » Pendant immédiatement qu'il n'avait pas besoin d'un autre fardeau en plus, les problèmes de Clément étaient réels contrairement aux siens qu'il devait trouver risibles. La jeune australienne arrivait enfin à reprendre la parole, sa gorge n'était d'ailleurs plus nouée ; elle respire même un grand coup. Il fallait bien que tout ça sorte, et ça lui faisait même un bien fou. « J'suis désolée ... Je suis venue pour toi, pas pour venir me lamenter sur mon propre sort ... », levant les yeux au ciel. Elle ne voulait même pas prendre de décision, entre celle de rester ou celle de partir en Écosse. Si elle était perdue, c'était parce que c'était un dilemme. Le dilemme de devoir quitter Brisbane, ce qu'elle ne voulait absolument pas. Sa décision de rester était pourtant prise, mais difficile à digérer. C'était plus difficile de devoir dire adieu définitivement à une vie h24 avec Bonnie. C'était ça, la difficulté. Les passants se font plus nombreux, ils n'étaient pas les seuls à aimer les balades dans le parc, apparemment. Sybille en profite pour sortir un mouchoir de la poche de sa veste, de s'essuyer le visage puis de se moucher, pour paraitre un peu moins lamentable.
La visite de Sybbie aurait put être tellement plus agréable si je n'avais pas eu la merveilleuse idée d'évoquer son frère. Il est bien trop tôt que parler de lui ne nous arrache pas des soupirs de tristesse, ne nous enserre pas le cœur ou, comme ici en l’occurrence, ne nous arrache pas quelques larmes. Je m'en veux directement de me montrer égoïste, mais en même temps c'est la totale vérité : si Sybbie s'en va, elle aussi, qu'est-ce que je fais ici ? Qu'est-ce qui me retient en Australie ? La Northlight, peut-être, Yoko, Charlie et Léo, sûrement, mais ce n'est pas comme s'il n'y avait qu'une seule compagnie de théâtre et comédie musicale dans le monde entier.
Dans un but de rassurer ma meilleure amie, je m'avance vers elle et la prend dans mes bras. Je resserre mon étreinte lorsque je la sens s'agripper à mon sweat shirt et lui caresse le dos et les cheveux alors qu'elle niche son visage contre moi. Baissant la tête, je ferme les yeux et m'efforce de respirer tranquillement, espérant qu'avec une respiration calme et régulière je parviendrais à la rassurer d'avantage et décide de lui laisser le temps dont elle à besoin.
Je ne relâche mon étreinte que lorsque Sybbie se redresse et, s'essuyant le visage, dit d'elle-même qu'elle est minable et que je n'avais pas besoin de ça, qu'elle est venu ici pour moi et non pour s'apitoyer sur son sort. « Non, non, dis pas ça» dis-je en secouant la tête « C'est normal que tu craques » dis-je en la reprenant dans mes bras pendant quelques secondes « T'excuse surtout pas pour ça, ok ?» assurais-je, finissant par lui offrir un doux sourire avant de me reculer «On continue un peu ? » demandais-je en désignant le chemin du parc.
« J'espère vraiment que je vais sortir rapidement» dis-je finalement après avoir marché quelques instants en silence « Et que ce soit la toute dernière crise » je soupire doucement «C'est tellement horrible d'être à la merci de tout ça et de ne pas savoir quoi faire et surtout quand ça va arriver » je me passe une main dans les cheveux puis enfonce à nouveau mes mains dans les poches de mon pantalon « Bon bref. T'as pas un sujet de conversation plus joyeux ?» demandais-je brusquement, bien décidé de mettre de côté toutes nos pensées noires.
Cette journée n'avait pas si mal commencé, en vérité. Elle avait juste eu ce pincement au cœur quand elle s'était fait beaucoup trop de mueslis, en général la main lourde parce qu'elle sait que derrière elle Bonnie en aurait aussi profité. Ensuite elle avait pensé que ça en faisait pour Clément, après tout. Il l'aurait charrié d'avoir mis plus de fruits que de yaourt mais l'aurait dévoré tout comme elle. Mais finalement elle s'était contentée d'un post it, agrémenté d'une petite blague et d'un smiley, pas vraiment inquiétée sur le coup de voir Clément hors de l'appartement, depuis la veille. C'était son sms qui l'avait inquiétée quelques heures plus tard. Mais il avait usé de son flou légendaire, et toutes les idées lui étaient passées par la tête. Elle l'imaginait déjà une jambe dans le plâtre, qu'elle aurait allégrement tagué de blagues de mauvais goût. Finalement, elle ne savait pas sur quel pied danser. Si le plâtre n'était pas plus rassurant qu'une crise d'angoisse. Sybille montait toujours sur ses grands chevaux, et s'ils ne donnaient pas d'explications directement, elle se laisser imaginer le pire immédiatement et irrationnellement. Mais d'un autre côté, elle s’efforçait de lui remonter le moral le plus possible. L'aide qu'elle pouvait lui apporter pouvait être la plus superficielle au monde, elle se donnerait du mal comme elle le pouvait. Malgré tout, c'était un peu plus compliqué cette fois-ci, et ne pas se submerger par toutes les émotions qu'elle passait était mission impossible. Elle s'en voulait déjà de ne pas avoir assuré comme elle l'aurait voulu. Quoi qu'il en soit, voir Clément sur pieds et surtout avec la motivation d'aller de l'avant l’enthousiasmait. Même sans l'exprimer, elle en était vraiment fière. Les derniers mois étaient tellement difficiles qu'il aurait pu replonger à nouveau, et un cercle sans fin.
L'étreinte de Clément lui avait fait un bien fou, plus qu'il n'aurait pu le penser. Elle inspire calmement, bien décidée elle aussi à garder la tête haute, ou du moins de ne pas s’apitoyer sur son sort. Elle était bien décidée à ne pas penser à toutes ces choses négatives, et se concentrer sur quelque chose de plus positif. Clément était très certainement une des seules personnes qui lui transmettait assez de bonnes ondes pour repartir du bon pied, les rares et seules fois où ça arrive. Peut-être qu'elle ne lui disait pas assez, mais il le savait surement, au fond de lui. Pas besoin de mots, parfois. Ils continuent leur chemin, élancés et bien décidés. Prendre l'air frais ne lui avait jamais fait autant du bien. Brisbane commençait déjà à se cacher sous son enveloppe fraiche, mais Sybille aimait bien cette période, bien qu'elle adorait ses périodes de chaleur également. L'idée de retourner à Sydney le temps d'un week-end n'était finalement pas une si mauvaise idée. Ils ne sont pas les seuls à avoir eu l'idée d'une balade. Ses yeux se baladent sur certains promeneurs, de ces quelques personnes adossés au bancs qui ne s'adressent plus la parole, de cette jeune femme qui se balade avec une personne âgée à son bras, ou ce couple qui préfère tapoter sur leur smartphone. Sybille passe ses mains dans les poches de son gilets. L'endroit aurait pu être incroyable si on supprimait l'immense bâtiment qui surplombait le parc un peu plus loin. Bien que cet hôpital était agréable à l’œil, et qu'il n'avait rien à prouver quand à son efficacité, c'était loin d'être son lieu favoris.
Clément lui confie Tu crois qu'il espère sortir bientôt, elle l'approuve d'un hochement de tête. Elle lui a avoué il y a seulement quelques minutes qu'elle attendait son retour avec impatience, même si ce n'était que pour glander à deux devant Netflix, c'était le genre de chose qu'il lui fallait, en ce moment. Mais il ne fallait pas précipiter les choses. Tout ce qu'elle voulait, c'était sa santé. S'il fallait qu'il reste plus longtemps ici, elle savait que c'était pour la bonne cause. Ce genre de crise n'était pas à prendre à la légère, et elle pouvait se déclencher même dans des moments qui n'étaient pas forcément propices, c'est ce qui l'inquiétait aussi. Elle restait quand même positive pour Clément, et ne voulait pas ajouter de l'huile sur le feu. « Tu crois que j'pourrais venir à la prochaine ? » L'idée de retourner le voir l'une de ses représentations vient de lui sauter dans les pensées. Sybbie tourne sa tête vers Clément, un sourire en coin, plus enthousiaste qu'elle ne l'avait été précédemment. « Tu m'acceptes comme ta fan numéro un dans la salle ? » Elle continue le chemin, regardant parfois ses pieds trainer, parfois observant les immenses arbres qui semblent danser au dessus d'eux. Finalement, elle l'apprécie, cet endroit. Un petit sourire commence à se dessiner sur son visage, réussissant presque à mettre toutes ses pensées dans un petit coin de sa tête et ne plus y prêter attention. « Maintenant que j'y pense ... » Elle continue un peu son chemin silencieuse, puis reprend de plus belle bien décidée, sautant à pieds joints sur l'occasion qui se pointe devant elle. « Ok, devinette. » Elle ne voulait pas tourner autour du pot, mais ne savait pas vraiment poser les mots non plus. Pourquoi tourner autour du pot, après tout ? Clément était bien la dernière personne avec qui Sybille prendrait des pincettes. Il réagissait toujours de la manière la plus naturelle au monde, quitte à ne pas toujours plaire, certes, mais toujours le plus sincère possible. « Imaginons ... Imaginons qu'on te propose un poste super cool. Mais que ça t'oblige à quitter ce que tu fais depuis déjà trop d'années. Chose que tu supportes absolument plus, mais que la pression t'oblige à continuer ? » Sybille laisse échapper un petit rire discret, sachant que Clément a très certainement déjà tout compris. Elle se pince les lèvres, essayant de garder un minimum de sérieux pour pouvoir continuer. « Bref, on t'propose ça, mais tu dois quitter le reste. Qu'est ce que tu ferais ? » Elle termine en se passant une main dans la nuque, presque à y réfléchir une nouvelle fois elle aussi. « Sachant que c'est vraiment – vraiment cool. », en y rajoutant une couche, essayant presque de faire tomber la balance. « Et que je ne suis pas la seule à suivre mon instinct. Parce qu'apparemment, chacun en fait qu'a sa tete ici ... » Elle regrette immédiatement ce sarcasme directement destiné à Ambroise. Cette dernière phrase un peu amère lui fait lever les yeux au ciel, dans un certain soupire. Ça ne lui ressemblait pas et elle s'était agacée elle-même.
Des larmes. Voilà la dernière chose que j'ai envie de voir sur le doux visage de Sybbie. J'aimerais n'y voir que ces sourires magnifiques, joyeux et pleins d'espoirs dont elle seule détient le secret, entendre des éclats de rire provenant sur cœur, rigoler aux blagues et au cynisme qui sortent de sa bouche et ressentir l'amour qu'un frère peut avoir pour sa soeur à chaque fois qu'elle parle de ses projets. Mais jamais, oh non jamais, je ne veux être celui qui fera couler ses larmes, brisera ses espoirs et la rende malheureuse. Je l'ai déjà fait bien trop souvent et je ne souhaite aucunement recommencer. Alors, lorsque je sens que les larmes sont sur le point de venir, j'ai pour espoirs de les étouffer en la serrant fermement dans mes bras. Avec mon étreinte, j'essaie de lui insuffler le calme et la sérénité nécessaire pour calmer ses émotions qu'elle ne semble pas réussir à gérer et lui laisse tout le temps qu'il lui faut.
Ce n'est que lorsque Sybille se redresse d'elle-même que je la relâche lentement. Et, après lui avoir expliqué qu'elle ne doit en aucun cas s'excuser pour si peu, je lui demande si on peut continuer à marcher, me confiant à elle sur mes crises, espérant à voix haute que j'espère qu'elles cesseront de m'emmerder. Choisissant de me suivre dans mon envie de changement de sujet, ma colocataire me demande si je l'accepte dans la salle à ma prochaine répétition en tant que fan numéro un. Je l'observe d'un regard ennuyé en mode 't'es sérieuse ?' avant de secouer la tête «Seulement si tu m'apporte des fleurs dans les loges après la représentation » plaisantais-je, souriant, amusé « Mais cette question ne se pose même pas en vrai ! » reprenais-je avec sérieux « Tu es la présidente de mon fan club que tu as créé toi-même, t'as déjà oublié ?» demandais-je, taquin, en lui adressant un clin d'oeil avant de rigoler doucement.
Et au final, c'est un nouveau changement de sujet qui arrive alors que je demande à Sybbie si elle a quelque chose de fun à raconter, engendrant un début de devinette. Je pose mon regard attentif sur la jeune femme alors qu'elle me demande ce que je ferais si on me proposait un post genre super cool qui t'obligerait à quitter ce que seule la pression t'oblige à continuer. Je grimace légèrement, ma réponse étant déjà toute trouvée, mais laisse Sybbie continuer que de toute manière chacun n'en fait qu'à sa tête ici. Référence direct à Ambroise qui me fait simplement hocher la tête et sur laquelle je décide de ne pas réagir d'avantage.
«Je quitterais ce que je continue seulement sous la pression et j'accepte le nouveau post super cool » expliquais-je «Je l'ai fais moi-même en quittant officiellement l'université il y a quelques mois pour me concentrer totalement sur la Northlight et ma carrière et … » je secoue la tête «Bref ouais, a ta place le prendrait ce post qu'on te propose » assurais-je, enfonçant mes mains dans les poches de mon jogging « c'est aussi ce que j'ai conseillé à ma pote Yoko, tu la connais aussi. Elle... » je fronce légèrement les sourcils «Je ...enfin je lui ai dit qu'elle devais arrêter les cours car de toute manière c'est ce qui lui apportait le moins de 'joie' afin qu'elle puisse se concentrer sur ce qu'elle aime et dans quoi elle excelle : la danse. Et son boulot au DBD pour lui permettre de vivre décemment » j'hausse les épaules « Mais vas-y, dis m'en plus.» pressais-je légèrement ma meilleure amie «C'est quoi comme post duquel tu me parles ? »
Ils continuent leur petit chemin tranquillement, chanceux d’avoir pour eux le parc assez peu fréquenté. Ils sont même très certainement les plus bruyants ici, surtout avec Sybille qui traine un peu des pieds, jouant parfois à les traîner exagérément par terre, pour jeter quelques caillasses devant elle ; lui donnant l’apparence d’une gamine capricieuse qu’elle n’était pourtant pas. La plaisanterie de Clément a le don de la faire rire discrètement, à oublier à chaque pas un peu plus la discussion moins plaisante par laquelle ils ont commencé. « Ah, parce qu’en plus t’exiges des fleurs ? », lui répond-elle immédiatement, l’un de ses sourcils froncés. Finalement, son moral remonte presque immédiatement, même si elle repense et se ressasse intérieurement ce que Clément lui a dit, étonné de l’entendre dire qu’elle pensait rejoindre Ambroise. Elle a cette sensation que Clément prend aussi du plaisir à perdre ses quelques pensées négatives, et ça la rassure. Elle n’était pas venue juste pour son sac après tout, même si elle était partie plus que paniquée suite à son sms alarmant. « Sans plaisanterie, la prochaine fois j’viendrai. » Sybille ne manquait pas souvent à ses promesses, pour ne pas dire jamais. Et il était rare d’arriver à lui enlever une idée de la tête. « Ça fait bien longtemps. Et puis … Bientôt tous tes fans vont se battre pour venir te voir et j’aurai plus l’exclusivité ... » ça ressemblait à une résolution mais ça n’en était pas vraiment une. Elle s’était fait la réflexion récemment, et s’en voulait un peu de ne pas venir le plus voir autant qu’elle le pouvait.
Le choix de Sybille n’était pas anodin, bien au contraire. Premièrement, tout simplement parce que Clément avait toujours été celui avec qui la discussion était fluide et facile, et elle sait qu’il ne la jugera jamais (ou alors sur le ton de la plaisanterie). Mais le plus important, presque à en oublier tout le reste, c’était qu’il serait forcément sincère dans sa réponse. Mis à part Ambroise, il avait toujours été le premier vers qui elle se tournait si elle avait besoin de conseils ou d’un avis quelconque. Parfois même pour des choses insignifiantes et qui pourrait agacer à force. Et cette fois-ci, il était le mieux placé au monde pour répondre à ce genre de questionnement. C’était même lui qui lui avait laissé cette idée en tête. Elle était du genre à suivre son instinct, elle se savait indépendante, parfois à en faire qu’à sa tête aussi. Mais finalement, pour ce genre d’inquiétude, elle savait qu’il ne fallait pas foncer tête baissée, et demander de l’aide, ou du moins un avis, était son meilleur choix. Plus ravisée qu’elle ne pensait, finalement. Clément était l’ami idéal pour aborder le sujet. Elle savait son parcours, et ce choix de lui en parler était au final bien calculé. Peut-être parce qu’elle savait qu’il serait de son avis, à cause de ses propres choix dans le passé. Elle en avait parlé vaguement à Bonnie il y a quelques semaines, voir même quelques mois, mais c’était assez superficiel, et elle s’était rapidement ravisée. La tête dans les cours à préparer et le début d’année scolaire chaotique, c’était finalement passé sur une idée secondaire. Ce dernier avait toujours été un véritable soutien, mais la situation avait bien changé depuis, malheureusement. Elle se retrouvait démunie, se sentant presque délaissée, alors qu’auparavant elle n’avait qu’à tourner la tête pour y trouver un soutien indéfectible. Sybbie lui avait balancé ça comme ça, sans grande espérance, et y avait ensuite à nouveau réfléchi un peu plus tard, lorsque l’idée venait l’obséder à nouveau. C’est à dire à peu près tous les matins lorsqu’elle arrive à rejoindre l’université, lorsqu’elle prend ce bus bondé d’étudiants les plus fatigants les uns comme les autres, lorsqu’elle se retrouve sur le campus étrangement vide, et même lors des pauses, ce qu’elle préfère par dessus tout. Tout devenait presque anxiogène, même pour elle qui prenait absolument tout positivement et avec un plaisir sans fin. Ce qui devait être un moment plaisant devenait un moment redouté, dans une boucle sans fin. Mais ce qui la poussait finalement à prendre une vraie décision, c’était le fait que tout commençait à devenir véritablement concret. La décision devait être prise dans les semaines à venir, et elle ne voulait pas lâcher cette chance qui se présentait devant elle, au risque de le regretter à vie. Aucune demi mesure pour Sybille MacLeod. Jamais.
Sybille observe attentivement ses réactions, par quelques coup d’œil de côté. Finalement, pour changer de sujet, c’était raté. Car finalement, ça lui remettait la compagnie en tête, alors qu’il voulait éviter d’y penser pendant leur petite balade. Sybille y laisse un sourire en coin, elle n’a pas besoin de le supplier pour qu’il lui lâche immédiatement ce qu’il pense de tout ça, avec pourtant le peu d’information qu’il détient. Ce n’était pas une coïncidence, elle savait bien qu’il serait sur la même longueur qu’elle. Peut être que c’était aussi de savoir quelqu’un qui la soutiendrait dont elle avait besoin, plutôt que quelqu’un qui lui dise qu’elle va droit dans le mur. Elle le fixe d’un regard de côté lorsqu’il lui annonce qu’il accepterait ce poste. Elle reste sérieuse et concentrée sur chaque parole qu’il lui donne, le regard un peu plus dur, le même que celui qu’elle a lorsqu’elle écoute des explications compliquées, ou lorsque Clément lui explique des mouvements complexes qu’il doit effectuer sur scène. Elle sourit pourtant lorsqu’il lui dit qu’il a fait exactement pareil : quitter l’université pour la compagnie, parce que c’est exactement ce qu’elle avait en tête, et ce pourquoi elle lui pose la question à lui. S’il avait réussi à prendre cette décision, pourquoi elle n’y arriverait pas après tout ?
Sybbie approuve de plusieurs signes de tête. Il lui parle aussi de Yoko Lee, qui serait dans la même situation qu’elle, ce qui l’étonne un peu sur le moment. « Non ? Sans rire ? » Si c’était le cas, c’était une drôle de coïncidence. Non seulement pour ça, mais aussi pour tout le reste. Tout ce qui les rassemblait, à chaque fois que Sybbie la connaissait un peu plus et la découvrait. D’un côté, savoir Yoko dans la même situation qu’elle la rassurait un peu. Elle y laisse un sourire en coin, perdant à nouveau son regard au loin. Ce n’était pas tombé dans l’oreille d’une sourde, et elle n'hésiterait pas à aborder le sujet, presque naïvement, avec cette dernière. Mais d’un coté, ça voulait dire qu’elle était aussi perdue - voir paumée - qu’elle, et ça, ce n’était pas le plus drôle dans cette situation. « Oh, mais vraiment ? J’aurai jamais imaginé. » Après tout jamais elles n’auraient pu avoir ce genre de discussion, du moins pas encore. « On se croise assez souvent, tu sais ? Et on se loupe souvent à l’appart aussi, malheureusement. », terminant par un rire, exagérant sur un air dramatique. Elles se croisaient dans des endroits improbables, parfois. « Cette coïncidence. » Quelle plaisanterie. Imaginer Clément devoir conseiller beaucoup trop de personnes autour de lui la fait rire. Le pauvre avait mal choisi son entourage. « Tu vas en avoir ras le bol de nous. » Sybille rigole à nouveau, se passant une main dans la nuque. Il lui avait déjà parlé de Yoko tellement de fois, mais jamais dans ce sens là. « Clément Winchester, conseiller personnel. Conseiller personnel des filles paumées. Non ! De celles qui ont trop d’idées et pas assez de temps ? » Elle lui sourit une nouvelle fois, le pousse de côté amicalement.
Peu importe si la devinette est amusante ou non, il ne râle pas pour jouer le jeu et y répondre. Clément était toujours authentique, et elle appréciait toujours ça, plus que tout. C’est pour ça que leurs discussions étaient toujours faciles et fluides. « Bah. » Aucun bon présage lorsqu’elle commençait comme ça. En général, elle en avait pour des heures. Des heures d’explications et de bavardages. « Je t’explique. » Sybille termine d’une seule gorgée son gobelet, trop froid désormais pour l’apprécier, afin de s’en débarrasser dans une poubelle non loin d’eux. « Bon, écoute, on m’a proposé de bosser pour le centre. Mais on est en plein milieu de l’année scolaire. » Elle lève les yeux au ciel, même pour elle, ce dernier argument n’a aucun sens. Quand bien même la décision pour le H.E.R.O Center était presque prise, son opinion comptait. « J'te laisse imaginer combien j’en ai envie. Et combien je suis chanceuse, aussi. Et de l’autre côté … Ben, pour l’université, tu connais déjà mon avis et combien j’adore ça. » Elle avait appris l’art de l'ironie par son frère. Inutile même de s’étendre sur le sujet. Elle soupire à plein poumons.
Avec Sybbie, les discussions ont toujours ce naturel qui fait un bien fou. Avec elle je sais que je peux dire et faire ce que je veux quand je veux et ce sans avoir peur des conséquences. Nous avons tous les deux un caractère bien trempé mais nous savons surtout un très grand respect l’un pour l’autre. Ainsi donc, nous pouvons facilement passé des rires aux larmes puis à nouveaux aux rires pour finalement reprendre un peu plus de sérieux et parfois y mélanger aussi de l’ironie. Tout cela se fait sans que je n’aie besoin de peser mes mots, car avec Sybbie et sa sincérité je sais exactement sur quel pied danser. Ainsi, après savoir tenter de la rassurer concernant le départ déchirant de son frère, je rebondis rapidement et avec une certaine ironie sur son changement de sujet.
Les larmes de ma meilleure amie se sèchent et font place à ce sourire que je chéri tant, alors qu’elle me dit que je deviens un peu trop exigent avant de dire qu’elle pense sincèrement à venir la prochaine fois car bientôt je serais trop connu et elle n’aura plus l’exclusivité. « Tu rigole ou quoi ?» m’exclamais-je « Tu auras toujours l’exclusivité ! si ce n’est pas dans mes loges, ce sera au moins dans mes bras» dis-je en passant un bras autour des épaules de mon amie, la serrant un instant contre moi «Non mais sans rire» reprenais-je mon sérieux « T’as toujours été là pour moi, dans les bons comme les mauvais moments, tu m’as toujours soutenue envers et contre tout, crois moi que tout ça, ça reste gravé en moi pour toujours et jamais je ne l’oublierais. Je te le revaudrais x3000 et toute ma vie» assurais-je, déposant un baiser sur la tempe de la jeune fille.
Car oui, Sybbie était là. Quand Ambroise s’éloignait peu à peu, que mon monde semblait s’écrouler suite à mon burn out, que ma rééducation était si compliquée que mon retour sur scène fut compromis à plus d’une reprise et pour encore pleins d’autre raison, Sybille, elle, était là. Toujours présente, toujours là à dire le bon mot, celui qui fait plaisir et qui rassure. Elle était et sera ma constante à travers le temps et au fil des années qui vont passer. Je le sais, je le sens. Si au début elle n’était ‘que la sœur du meilleur ami’ elle s’est très rapidement révélée comme étant une des plus précieuses amies de ma vie et jamais je n’aimerais que ça change.
Elle fini toutefois par m’avouer avoir besoin de mes conseils et, ni une ni deux, expose les faits. Elle se sent tiraillé entre le ‘socialement correct’ et le ‘ce que le cœur veut’. C’est sans difficulté que je fais le rapprochement entre Sybbie et ma discussion avec Yoko à qui j’ai conseillé exactement ce que je conseil aussi à Sybbie : suit ton cœur et tes envies, ignore la société et ce que la société veut te faire croire qui est bon. D’autant plus que la jeune femme m’explique que le centre pour lequel elle est bénévole lui a proposé de bosser pour eux. Elle se sent extrêmement chanceuse et adorerait clairement faire ce genre de travail qui lui correspond tellement plus que les études qu’elle est entrain de faire.
« meuuuuf …» soufflais-je « Ignore un peu l’école, les cours, les études … fait ce qui te plait ! Ce post dans ce centre il est pour toi, faut que tu saisisse l’occasion» assurais-je en relâchant Sybbie pour lui faire face «Je sais à quel point tu tiens à ce centre et combien tu adore ce que tu y fais alors franchement, si ça ne tenait qu’à moi je te dirais de vraiment tout lâcher et de te concentrer sur ce que tu aimes » j’hausse les épaules et enfonce mes mains dans les poches de mon jogging «C’est ce que tu voulais entendre ou pas ? » demandais-je, demi sourire amusé et presque moqueur sur les lèvres.
Quand bien même la jeune MacLeod lui parlait de ses fans sur le ton de la rigolade, Clément avait mordu à l’hameçon, et le coté taquin de Sybille ne pouvait que s’en régaler. Même s’il lui arrivait parfois de montrer une once de jalousie, - et c’était très rare -, elle ne l’admettait jamais ouvertement. Pourtant, cette blague sur son fan club l’avait pourtant fait réagir, et c’était un sourire jusqu’aux oreilles qui lui décorait le visage désormais, effaçant les quelques larmes qui s’étaient dispersées quelques minutes auparavant sur celui-ci. « Ouais, t’as pas tort ; j’suis la number one. », avant d’entendre un petit rire lui échapper, et de jeter quelques mèches de cheveux en arrière, imitant une Sybille qui voudrait se la péter. Peu probable. Finalement c’est avec un sourire de coté qu’elle écoutait attentivement son meilleur ami, d’une oreille attentive. Elle n’aurait pas osé l’interrompre dans un tel élan déclaratif, voulant presque se pincer pour voir si tout ça était réel. « Ok, ça, c’est vraiment trop gentil, presque mignon. J’vais essayer de pas re-pleurer, promis, mais ça va pas être facile. » A croire que Clément avait anticipé sa réponse, vu la suite. Son baiser sur la tempe lui fait fermer les yeux un instant, et lui fait échapper un soupire rassuré. C’était vraiment le genre de paroles qui lui allaient droit au cœur, et qui lui remontaient le moral instantanément. Après tout, elle le savait déjà, tout ça. Mais l’entendre dire, avec ces quelques mots bien choisis, ça lui avait permis d’oublier tout le reste.
Suite à ça, quand ils parlaient enfin de ce qu’elle n’avait pas osé lui dire depuis des semaines, c’était le rire qui avait pris le dessus sur les sourires. A nouveau, un immense soulagement. C’était comme si ce dernier trouvaient les mots les plus exacts possibles, comme si celui ci répondait mot par mot ce qu’elle aurait espéré entendre, dans l’idéal. « Pire influence au monde. », un sourire qui se dessine en coin. Elle n’en pense pas un traître mot, mais c’est surement ce que sa famille entière penserait à ce genre de réponse. Cette idée lui traverse l’esprit et elle sait déjà que son père sera moins empathique que le jeune danseur. A nouveau, le taquiner était sa première envie, elle ne pouvait s’en empêcher. « Ouais ... ça me va. Ça me va comme réponse. », son regard jonglant entre le regard de Clément et ses pieds trainant contre le chemin de cailloux, elle reste plus silencieuse que d’habitude, mais ses yeux, son regard, veulent tout dire. «J’crois que c’est vraiment ce que j’avais besoin d’entendre. » Le regard au loin, elle n’avait pas besoin de plus pour se sentir rassurée. « Merci, Clem'. Vraiment. », d'une voix posée, la plus sincère qu'elle avait pu avoir jusqu'à maintenant. Elle n’avait pas besoin de lui dire beaucoup plus, elle savait qu’il comprendrait qu’elle était tellement reconnaissante. Un dernier regard échangé et ils finissaient leur balade pleine de confidence.