| joassan + wait for something better |
| | (#)Lun 05 Aoû 2019, 23:24 | |
| WAIT FOR SOMETHING BETTER you gotta be stronger than the story, don't let it blind you | |
Les hivers à Brisbane avaient beau être particulièrement doux, ils étaient toujours un peu trop froids pour Joanne. On ne la changerait pas, elle resterait éternellement frileuse, un gilet en laine jamais loin d'elle, juste au cas où. Que l'air soit sec ou humide, ça ne changeait pas grand chose pour elle, tant qu'elle avait les épaules couvertes. La petite blonde profitait pleinement de son congé maternité, qui n'était pas de tout repos. La petite dernière arrivée, Louise, lui donnait du fil à retordre. Bientôt âgée de deux mois, elle n'était calme que lorsqu'elle étant dans les bras de ses parents, et plus particulièrement dans ceux de Jamie. Cela ne signifiait pas non plus que Joanne n'arrivait pas à l'apprivoiser, mais l'on pouvait deviner qu'elle avait déjà un sacré tempérament. Elle avait de la voix et l'utilisait beaucoup pour manifester son mécontentement. Et il était parfois bien difficile de deviner ce qui n'allait pas une fois qu'elle avait la couche changée, que Joanne lui ait donné le sein, et qu'elle ait fait sa sieste. La petite aimait être dorlotée et son grand frère ne vivait pas très bien le fait qu'elle puisse être le centre de l'attention. D'autant qu'il l'aimait et qu'il rêvait de prendre soin d'elle, il était normal qu'une jalousie s'installe et que les recadrages se multiplient afin de ne pas avoir à supporter des colères à longueur de journée. Lui aussi, devait apprendre à vivre avec ce nouveau membre de la famille, et chacun devait trouver sa place dans cette famille. Ce n'était pas de tout repos ; d'ailleurs Joanne profitait souvent des siestes des petits pour en faire une elle aussi. Car les nuits entre-coupés par plusieurs réveils n'étaient pas ce qu'il y avait de plus reposant. Mais elle ne s'en plaignait pas, elle savait déjà comment se passaient les premiers de vie d'un enfant. Louise avait déjà eu droit à ses premières sorties, sa Maman trop prudente l’emmitouflant bien à chaque fois, ayant bien trop peur qu'elle n'attrape froid. Contrairement à ce qui avait suivi la naissance de Daniel, Joanne ne s'isolait pas chez eux à longueur de journée. Elle avait envie de sortir, de voir du monde, de rêver devant l'avancement des travaux de leur future maison. Et quand elle arrivait à avoir quelques minutes pour elle, elle prenait des nouvelles du QAGOMA et préparait ses prochains cours pour l'université. Jamais n'aurait-elle pensé que Joanne aimerait autant partager ses connaissances. Cela la motivait à faire davantage de recherches de son côté également. Le lendemain de la naissance de sa fille, la jeune femme avait envoyé un message à son ex-mari pour l'en informer, lui assurer que tout allait bien. Elle n'avait pas mentionné la césarienne, étant donné qu'à ce moment là, elle peinait encore à s'y accoutumer. La plaie opératoire était bien cicatrisée, même si ça lui tirait encore de temps en temps. Marque qu'elle n'avait montré à personne pour le moment, pas même à Jamie. C'était déjà difficile pour elle de l'accepter, alors le montrer à qui ce soit, c'était hors de question. La petite blonde avait proposé à son ex-mari de venir lui rendre visite, ce jour-là. Ce n'était peut-être pas le lieu le plus approprié pour se revoir et Jamie n'approuverait peut-être pas, mais pour une fois que Louise se lançait dans une sieste plutôt complète. Elle avait préparé un gâteau et avait à commencer à faire chauffer de l'eau pour un thé, s'il le désirait. Des petits détails qui pourraient l'aider à se sentir un peu plus à l'aise, peut-être. Attentif à ce genre détails (et confirmant la fibre paternel qu'il avait depuis toujours et qui devrait le concilier à se lancer pour de bon dans ce projet), il avait toqué très discrètement à la porte. Suffisant pour se faire entendre, pas trop fort pour réveiller la petite qui dormait. A pas feutré, elle s'approchait de l'entrée afin de pouvoir l'accueillir avec un large sourire. Elle le laissait faire quelques pas dans le séjour afin de pouvoir fermer la porte derrière lui. Peut-être était-ce trop familier, sûrement inaproprié, mais Joanne s'était permise de lui faire une courte étreinte en guise de salutations. "Miracle, les deux petits dorment. En même temps, en plus." lui dit-elle à voix basse avec un air amusé, même si ses traits fatigués en disaient long sur son manque de sommeil dernièrement. "Tu vas bien ?" lui demandait-elle en l'invitant à s'avancer et à s'approcher de la chambre dans laquelle dormait Daniel et Louise. Joanne invitait son ex-mari à les regard du seuil de la porte. "Daniel a beau être jaloux, il adore être avec elle, et même quand ça concerne les siestes." expliqua-t-elle en lançant un regard bienveillant sur son garçon profondément assoupi. Joanne refermait délicatement la porte afin de ne pas perturber leur sommeil. "Tu auras l'occasion de faire leur connaissance tout à l'heure." lui assura-t-elle. A moins qu'il ne préférait pas. Hassan avait toujours eu un très bon contact avec les enfants. Mais ces deux-là, c'était ceux de Joanne. Dans un univers alternatif, il aurait pu s'agir des leurs. "Ils me donnent du fil à retordre, j'avoue que j'ai du mal à m'imaginer comment ce sera une fois quand je reprendrai le boulot." dit-elle avec un rire nerveux en l'invitant à s'installer au salon. "Tu veux boire quelque chose ?" lui demanda-t-elle, comme tout bon hôte ne le ferait. "J'ai fait un gâteau." Certainement le meilleur argument qui soit pour accepter de prendre quelque chose à boire en guise d'accompagnement, n'est-ce pas ?
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| | | | (#)Jeu 29 Aoû 2019, 10:13 | |
| Un doute s'étant emparé de lui lorsque Joanne lui avait communiqué sa – plus si nouvelle – adresse, Hassan avait consulté Google Maps et découvert avec un brin de surprise que son ex-épouse vivait à seulement dix minutes de là où habitait Gwen. Les mois filant, l'enseignant passait de plus en plus régulièrement du temps chez celle qu'il « fréquentait » – un terme qui voulait tout et rien dire à la fois – depuis presque un an désormais, au point qu'il en vienne presque à se demander comment l'occasion de tomber sur Joanne par pur hasard ne s'était jamais produite. Un mal pour un bien, sans doute, car Hassan n'aurait pas plus été à l'aise avec l'idée de croiser la blonde, avec laquelle la réconciliation était encore neuve et fragile, au bras de sa nouvelle conquête qu'il ne l'aurait été à l'idée de croiser Jamie. L'armistice à laquelle les deux hommes s'étaient livrés au printemps dernier n'effaçait pas entièrement des années d'animosité réciproque, et pour cette même raison l'invitation lancée par Joanne pour lui proposer de lui rendre visite durant son congé maternité avait rendu Hassan nerveux ; Il était certain que le britannique n'approuverait pas de le savoir sous son toit. À force de persuasion néanmoins, la blonde était parvenue à le faire céder, et rendez-vous avait été pris le vendredi suivant pour le milieu de l'après-midi. Sa journée de cours terminée à la pause de midi, le brun avait avalé un sandwich en vitesse avant de filer vers l'hôpital pour son heure de lecture bi-hebdomadaire, puis fait un saut chez lui afin de déposer ses affaires, nourrir puis promener Spike et Bandit, et troquer sa voiture – aux pneus flambants neufs suite à sa récente mésaventure – contre sa moto au moment de se mettre en route pour Bayside. Netflix & chill at ur place tonight ? Qu'il avait envoyé à Gwen par acquis de conscience avant de prendre la route, accueillant avec un brin de sourire le Bring pizza and i'm all yours reçu durant son trajet et lu alors qu'il garait sa Yamaha dans l'allée de la coach d'athlétisme. Parcourant à pieds les quelques centaines de mètres qui le séparaient encore de la maison des Keynes, Hassan était finalement arrivé à bon port exactement deux minutes après l'heure convenue, et seulement une fois planté devant la porte avait-il senti une légère bouffée de stress s'emparer de lui. Mais il était bien trop tard pour faire demi-tour et poser un lapin à Joanne sans passer pour un mufle, aussi après s'être autorisé une grande inspiration supposée lui redonner l'air sûr de lui le brun avait frappé avec prudence au battant de la porte – Olivia avait suffisamment houspillé à ce sujet lorsqu'il était l'heure de la sieste pour qu'Hassan ait retenu la leçon. Une leçon qui s'avérait une nouvelle fois utile puisqu’aussitôt après lui avoir ouvert et l'avoir accueilli d'une étreinte amicale, la blonde avait indiqué « Miracle, les deux petits dorment. En même temps, en plus. » dans un volume sonore mesuré avant de refermer la porte derrière lui. Son sac à dos glissant sur l'une de ses épaules et le casque de moto tenu dans une main, le brun ne s'était autorisé qu'un bref coup d'œil autour de lui avant de revenir à Joanne. « Tu vas bien ? » Éludant à moitié la question en y répondant d’un sourire et d’un vague signe de tête, le brun s’était permis de faire remarquer d’un ton bienveillant « C’est plutôt à toi qu’il faudrait poser la question. » Lui faisant signe d’approcher, la blonde les avait menés l’un et l’autre jusqu’au pas de la porte où, malgré la pénombre instaurée par les rideaux, bambin et nouveau-né dormaient à poings fermés. « Daniel a beau être jaloux, il adore être avec elle, et même quand ça concerne les siestes. » Observant sa progéniture avec bienveillance, Joanne avait refermé la porte avec douceur et ajouté « Tu auras l'occasion de faire leur connaissance tout à l'heure. » La pointe d’angoisse qui en avait découlé l’avait fait déglutir sans rien oser répondre, la réalité de ce qui n’était finalement peut-être pas une bonne idée semblant le frapper de plein fouet. Il était heureux de la main tendue par Joanne, de lentement trouver un équilibre dans la nouvelle relation qu’ils tentaient de construire et qui était sans doute pour le mieux … Mais il ne se sentait pas à sa place ici, comme un chien au milieu d’un jeu de quilles. Et un autre serait sans doute du même avis s’il était là – était-il seulement au courant, d’ailleurs ? « C’est sans doute juste le temps qu’il trouve ses nouvelles marques. » avait de ce fait préféré rebondir le brun, revenant à la précédente confidence de la mère de famille. « Medhi a eu sa petite période de crise l’année dernière, quand Qasim et Olivia ont eu leur petit dernier. Mais ça avait l’air d’aller un peu mieux quand je suis descendu les voir début juillet, je suppose qu’il fallait seulement laisser le temps pour que les choses se placent. » Il en oubliait presque que la dernière fois que Joanne avait vu Medhi, ce dernier était à peine plus vieux que Daniel ne l’était aujourd’hui. Ponctuant sa phrase d’un sourire confiant, il avait docilement suivi Joanne au salon après avoir abandonné la casque de sa moto et son sac à dos dans un coin de l’entrée, et accroché son blouson au porte-manteau. « Ils me donnent du fil à retordre, j'avoue que j'ai du mal à m'imaginer comment ce sera une fois que je reprendrai le boulot. » S’installant sur le bout de canapé que la blonde lui avait désigné, Hassan avait questionné avec curiosité « Tu es supposée reprendre quand ? » Outre son emploi principal au QAGOMA, il pensait également à son arrangement avec Marius et au fait que ce dernier ne semblait pas enchanté par la situation – un détail que le brun n’avait pas jugé utile de remettre sur le tapis, sachant son ex-femme déjà minée à ce sujet la dernière fois qu’ils en avaient parlé. « Mais il n’y a pas de raison que tu ne t’en sortes pas. Tu as tout géré de front toute seule la dernière fois. » Et cette fois-ci elle ne l’était plus, seule … Ou du moins Hassan espérait-il que parmi tous les défauts dont était pourvu Jamie, le fait de reléguer la charge des enfants sur les seules épaules de sa conjointe n’en était pas un supplémentaire. « Tu veux boire quelque chose ? J'ai fait un gâteau. » avait de son côté repris Joanne, le brun acceptant d’un signe de tête avant d’ajouter « Dans ce cas, je vais faire honneur au temps que tu as passé en cuisine. » d’un ton amusé. « Je veux bien un thé du coup, s’il te plait. » Incapable de s’imaginer prendre racine dans le canapé du salon pendant que la jeune femme s’affairait en cuisine, il l’avait suivie et s’était posé dans l’encablure de la porte en croisant les bras. Depuis qu’elle lui avait ouvert la porte une autre question le taraudait, et profitant que Joanne s’affaire à préparer la bouilloire il avait fini par demander avec un brin de curiosité « Qu’est-ce que tu as fait de ta ménagerie ? » Il avait d’abord fait la connaissance du golden retriver de la famille lors de sa mésaventure chez le vétérinaire trois ans auparavant, puis rencontré les deux bergers suisses de Joanne les mois suivants, et finalement découvert l’existence du teckel lorsque Jamie et lui s’étaient croisés au parc de Logan City l’année précédente. Étaient-ils encore quatre aujourd’hui ? Hassan n’en avait rien, mais il s’étonnait néanmoins de ne pas avoir vu pointer le poindre museau ou la moindre queue frémissante dès l’instant où un intrus avait fait irruption dans la maison.
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| | | | (#)Mar 03 Sep 2019, 23:59 | |
| WAIT FOR SOMETHING BETTER you gotta be stronger than the story, don't let it blind you | |
Joanne laissait le brun entrer dans la maison avant de ferme en toute délicatesse la porte d'entrée. Elle avait amorcé la conversation comme n'importe qui l'aurait fait, et c'était sans surprise qu'Hassan ne fit que la lui retourner sans lui donner de réponses. Soit il éludait la question car il préférait prioriser le bien-être des autres avant le sien, soit parce qu'il n'allait peut-être pas si bien que ça et qu'il ne préférait pas en parler. Ou du moins, pas pour démarrer une conversation. La petite blonde l'avait guidé jusqu'à la chambre où ses deux enfants dormaient paisiblement. Malgré son très jeune âge, Louise était difficile à endormir, même si elle était très fatiguée. Le soir notamment, elle s'apaisait toujours plus vite dans les bras de Jamie que ceux de sa mère. Du moins, c'était l'impression qu'elle en avait. "Ca peut aller." lui répondit-elle dans un murmure, n'oubliant certainement pas de lui retourner la question à un moment plus opportun. Tout en laissant Louise et Daniel poursuivre leur sieste, les deux adultes se dirigèrent vers le séjour, où ils pouvaient s'installer confortablement sur les canapés. Joanne percevait bien que son ex-mari n'était pas vraiment à l'aise. A cette idée, elle eut un léger pincement au coeur. Elle comprenait que se trouver ici n'était peut-être la meilleure idée qui soit, il aurait peut-être fallu se retrouver sur un terrain plus neutre. Elle craignait que ce soit un fait qui mette le frein sur la reconstruction de leur relation. Le processus était long et le moindre dérapage risquait de tout gâcher et ce n'était pas ce que Joanne voulait. Elle faisait au mieux, du moins, elle essayait, elle en avait la volonté. Jamie aurait certainement désapprouvé qu'il vienne ici, surtout en son absence. Et bien que Louise avait déjà eu droit à ses premières sorties, il y avait des journées où sa mère préférait le confort de leur maison afin qu'elle puisse également se reposer. "Nous aussi, nous devons trouver nos marques, dans tout ça." confessa-t-elle avec un rire nerveux. Ils étaient les parents, la référence de leurs enfants en matière de comportement et d'éducation, mais cela ne les empêchait d'avoir des doutes et d'avoir besoin d'un temps d'acclimatation. "Louise s'exprime déjà beaucoup, je me demande comment sera son caractère." S'il allait dans la direction que son grand frère ou si elle allait être une filoute hyperactive. S'il s'agissait de la seconde option, il était certain que Daniel allait se faire marcher sur les pieds. Le garçon était bien trop gentil et empathique. Peut-être sans s'en rendre véritablement compte, Hassan donnait malgré lui des nouvelles de l'ex-beau-frère de Joanne. Donc, ils avaient récemment eu un nouvel enfant. "Je suis contente pour eux." dit-elle avec un sourire. "J'espère qu'ils se portent tous bien." Elle n'avait plus aucun contact avec eux depuis le divorce, cela ne l'empêchait pas de se se réjouir pour eux quand elle apprenait une bonne nouvelle. Elle ne pouvait qu'appréhender la période où Daniel tiendra à s'exprimer également sur la place qu'il avait dans la famille, tout autant que Joanne craignait de voir le jour de la reprise arriver. Elle adorait être mère, cela ne l'empêchait pas d'avoir des doutes. "Selon Marius et mon supérieur ou selon mes envies à moi ?" lui demanda-t-elle avec une pointe d'amusement. "Parce que selon l'option choisie, la réponse est foncièrement différente." Elle lâchait un rire, à la fois amusé et nerveux. "Si ça ne tenait qu'à moi, je prendrais autant de semaines possibles pour rester avec les enfants. Et Jamie ne serait pas contre non plus. Si ce n'est pas lui qui finit son boulot tard, c'est moi qui doit finir de rédiger des cours, ou autre. Ca laisserait plus de temps pour toute notre famille." Joanne haussait vaguement ses épaules, l'air gêné. "Mais je ne pense pas que Marius apprécierait que je sois absente pendant tout un semestre. Après tout, la naissance de la petite ne l'a pas vraiment dissuadé de me demander de corriger la partie des examens qui portaient sur ce que j'avais enseigné." Par chance, Joanne pouvait faire cela tranquillement chez elle, bien qu'elle aurait préféré utiliser ce temps-là pour se reposer. "Mais je pense qu'il va falloir que je revois mes projets. En fin d'année, il y a toujours pas mal de réunions au QAGOMA à faire pour les prochaines expositions et j'aurai tout un inventaire à refaire." Cela lui laissait tout de même quelques mois devant elle pour voir sa puce grandir et lui trouver une nourrice fiable ou une crèche pour les jours où elle devra retourner au travail. "J'avoue qu'en terme d'organisation, c'est encore assez flou. Je n'ai pas encore donné de réponses à Marius, ou au musée, à ce sujet." Joanne se laissait le temps de la réflexion. Et l'on ne pouvait de toute façon contester un congé maternité. Après avoir proposé de quoi boire au brun, Joanne se dirigeait dans la cuisine pour chauffer l'eau et sortir deux mugs de l'un de ses placards. Peu enclin à rester seul dans le séjour, Hassan l'y avait rejoint, adossé contre le cadre de la porte en la regardant faire. "Ils restent dehors pendant la sieste de petits." dit-elle en indiquant l'arrière du jardin d'un signe de tête. "C'est souvent l'heure où ils décident de se défouler et je peine déjà à faire dormir Louise, je n'ai pas envie qu'ils la réveillent avec leurs aboiements. Autant Daniel a un sommeil particulièrement profond, Louise est bien plus réceptive aux bruits de la maison." Malgré sa petite taille et la douceur de sa voix, la blonde ne manquait pas d'autorité sur les deux chiens qu'elle avait adopté. En revanche, Milo était encore un véritable sauvage et incitait toujours ses compagnons à jouer avec lui à des heures incongrues. Joanne finissait de préparer le thé et tendit l'une des tasses au brun afin de se libérer une main pour prendre le plat où elle avait déposé le gâteau qu'elle avait eu le temps de préparer. Ils se réinstallaient dans le salon, et pendant que Joanne coupait quelques tranches de la pâtisserie tout en disant. "Maintenant, c'est à toi de me dire comment tu vas." Quand elle avait une idée en tête, elle s'y accrochait jusqu'à obtenir satisfaction. Elle lui fit un sourire amical. "Est-ce que tu as envoyé ton dossier pour la demande d'adoption ?" Hassan hésitait toujours à l'envoyer durant leur dernière rencontre et Joanne ne s'était pas vue lui demander où ça en été par sms. A ses yeux, c'était le genre de sujets à aborder lorsque l'on était face à face. "Est-ce que tu as eu des nouvelles ?" L'optimisme qu'elle savait avoir seulement pour les autres la laissait croire qu'il avait envoyé le dossier et qu'il aurait pu déjà avoir un quelconque retour. Ne serait-ce que l'accusé de réception serait un bon début à ses yeux.
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| | | | (#)Lun 11 Nov 2019, 16:39 | |
| Bien que n’ayant, comme on le sait, pas d’expérience personnelle dans ce domaine Hassan avait eu à trois reprises l’occasion de constater les chamboulements que l’arrivée d’un nouvel enfant avait provoqué chez son frère et chez sa belle-sœur. Là où Qasim avait lutté à ses débuts en tant que père contre un intense et profond sentiment d’inaptitude et d’incapacité dont seuls le temps et l’expérience l’avaient guéri, Olivia avait au contraire vécu plus difficilement l’arrivée de son troisième enfant, dont on comprenait sans qu’ils ne l’aient jamais mentionné qu’il n’était pas prévu. D’âge rapproché, Ava et Medhi n’avaient quant à eux jamais été confrontés à l’arrivée tonitruante d’un nouveau-né dans leur quotidien avant que Reda ne vienne au monde, et pour le petit garçon particulièrement ce nouveau partage de l’attention accordée à chacun par leurs parents avait été la source de bien des larmes, bien des caprices et bien des inquiétudes. « Nous aussi, nous devons trouver nos marques, dans tout ça. » avait à ce sujet rebondi Joanne, nerveuse. « Louise s'exprime déjà beaucoup, je me demande comment sera son caractère. » Pas certain qu’il y ait de bonne réponse à apporter à ce questionnement, Hassan s’était contenté d’un sourire poli. Il prenait sur lui de ne pas laisser son amertume entacher le bonheur de son ex-épouse, mais lui demander de spéculer au sujet du devenir des enfants qu’elle avait eu avec un autre, cela ressemblait à une maladresse qu’il préférait ne pas relever. « Je suis contente pour eux. » avait alors rebondi la blonde à propos de son ancien beau-frère. « J'espère qu'ils se portent tous bien. » Acquiesçant d’un signe de la tête, Hassan avait assuré « Tout le monde va bien, oui. » avec légèreté, passant sous silence quelques ratures dans la perfection du tableau dont elle n’avait probablement que faire, et dont il savait que Qasim n’apprécierait de toute façon pas qu’il les partage avec Joanne. Tenace, la rancune de son aîné était fidèle à elle-même et alimentée par le rôle à la fois difficile et indispensable qu’il avait joué après d'Hassan dans les ravages combinés du divorce et de la maladie. Sentant l’un et l’autre qu’il valait sans doute mieux changer de sujet, ils avaient bifurqué sur la reprise prochaine du travail pour Joanne, une perspective qui ne semblait pas la réjouir autant que le brun ne l’aurait imaginé « Selon Marius et mon supérieur ou selon mes envies à moi ? Parce que selon l'option choisie, la réponse est foncièrement différente. » avait en effet questionné la blonde de façon tout à fait rhétorique « Si ça ne tenait qu'à moi, je prendrais autant de semaines possibles pour rester avec les enfants. Et Jamie ne serait pas contre non plus. Si ce n'est pas lui qui finit son boulot tard, c'est moi qui doit finir de rédiger des cours, ou autre. Ça laisserait plus de temps pour toute notre famille. » Évidemment que Jamie ne serait pas contre. Pourquoi partager équitablement les rôles et faire carrière tous les deux, quand il pouvait simplement espérer de sa femme qu’elle finisse par se contenter de rester à la cuisine. Mais gardant ses propres jugements de valeur pour lui, le brun s’était contenté de laisser Joanne continuer « Mais je ne pense pas que Marius apprécierait que je sois absente pendant tout un semestre. Après tout, la naissance de la petite ne l'a pas vraiment dissuadé de me demander de corriger la partie des examens qui portaient sur ce que j'avais enseigné. » Les mains glissant dans les poches de son jean avec habitude, Hassan avait haussé les épaules puis fait remarquer sur le ton du conseil « Tu sais, Marius est du genre à tenter en espérant que ça fonctionne sur un malentendu … Mais tu as le droit de refuser, t’es en congé maternité, légalement il n’a même pas le droit de t’y obliger – mais si on te demande, ce n’est pas moi qui te l’ai dit. » Sans compter que si elle ne lui tenait pas tête maintenant, il se permettrait d’autant plus d’en profiter par la suite. « Mais je pense qu'il va falloir que je revois mes projets. En fin d'année, il y a toujours pas mal de réunions au QAGOMA à faire pour les prochaines expositions et j'aurai tout un inventaire à refaire. » avait en tout cas repris la blonde « J'avoue qu'en terme d'organisation, c'est encore assez flou. Je n'ai pas encore donné de réponses à Marius, ou au musée, à ce sujet. » Hochant la tête pour seule réponse, Hassan ne voulait pas donner l’impression d’influencer la jeune femme en donnant son avis comme il se serait permis de le faire à une certaine époque. Au lieu de ça, il s’était contenté d’accepter poliment la proposition de la jeune femme de servir une tasse de thé – il refusait de toute façon rarement un thé. « Ils restent dehors pendant la sieste des petits. » avait-elle par ailleurs expliqué lorsque le brun s’était étonné de n’avoir pas encore vu l’ombre d’un chien depuis son arrivée, quand bien même il lui semblait bien que la maison en comptait quatre. « C'est souvent l'heure où ils décident de se défouler et je peine déjà à faire dormir Louise, je n'ai pas envie qu'ils la réveillent avec leurs aboiements. Autant Daniel a un sommeil particulièrement profond, autant Louise est bien plus réceptive aux bruits de la maison. » Terminant ensuite tranquillement de préparer leur goûter improvisé sous l’œil patient d’Hassan, Joanne avait amorcé un retour au salon avec leurs tasses respectives ainsi que la gâteau semblait-il si fièrement préparé plus tôt dans la journée. Attendant de s’être installée sur le canapé, là où le brun occupait le fauteuil juste à côté, la jeune femme avait reporté son attention sur lui. « Maintenant, c'est à toi de me dire comment tu vas. » Sans lui laisser le temps de réagir, elle avait rapidement fait suivre sa première question de deux suivantes « Est-ce que tu as envoyé ton dossier pour la demande d'adoption ? Est-ce que tu as eu des nouvelles ? » plongeant le brun dans un état d’hésitation que trahissait sa bouche s’articulant un instant sans que n’en sorte aucun son. Plus superstitieux qu’il ne l’avait jamais été, l’enseignant avait cessé de mentionner ce projet avec quiconque par peur de se porter l’œil. « Je l’ai envoyé. » avait-il alors timidement admis, haussant les épaules comme pour tenter de minimiser l’importance que cette simple étape avait pour lui. « Y’a quelques semaines. Mais l’avocate m’a dit qu’il faudrait sans doute un moment avant que j’ai une réponse. » Et puisqu’il ne pouvait de toute façon pas faire grand-chose de plus que se montrer patient, il tentait de ne pas trop y penser. « Elle m’a aussi dit de ne pas fonder trop d’espoir malgré tout. Pour m’éviter d’être déçu. » Avait-elle perçu le fil tendu à l’extrême sur lequel son client se tenait en équilibre, ou bien avait-elle simplement été de trop nombreuses fois spectatrice de la situation ? Il serait déçu, de toute façon – il espérait simplement s’empêcher de chuter de trop haut. À nouveau Hassan avait haussé les épaules, et offert à Joanne un sourire résigné « De toute façon j’aurais regretté de ne pas avoir tenté. Je verrai bien. » Peut-être même garderait-il cela uniquement pour lui, quelle qu’en soit la réponse, pour s’éviter l’indifférence et les « je t’avais prévenu » de ceux avec qui il aurait aimé partager cette étape qu’il considérait malgré tout comme étant l’une des plus importantes de sa vie. « J’essaye de ne pas trop y penser, tout est déjà suffisamment compliqué en ce moment. Et puis j’ai du boulot par-dessus la tête, ça me tient largement occupé. J’ai deux fois plus de rédactions de mémoires à diriger que l’an passé, ABC me sollicite de plus en plus souvent, Amnesty me fait me déplacer à Sydney plus régulièrement … » Bref, il avait largement de quoi s’occuper l’esprit pour ne pas penser à cela et au reste de ses contrariétés actuelles. « J’hésite à prendre un appartement là-bas d’ailleurs. Sydney. Pas un truc immense, juste de quoi mettre un lit et de quoi cuisiner, mais ça m’éviterait de toujours compter sur Qasim et Olivia pour m’héberger ou de me rabattre sur une chambre d’hôtel. » Il se disait qu’il pourrait toujours le sous-louer à des touristes lorsqu’il n’était pas sur place … Il y songeait depuis un moment, à vrai dire. Il n’avait simplement pas encore décidé si le jeu en valait vraiment la chandelle ou non.
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| | | | (#)Jeu 14 Nov 2019, 18:22 | |
| WAIT FOR SOMETHING BETTER you gotta be stronger than the story, don't let it blind you | |
Prendre des nouvelles de son ex-beau-frère était peut-être mal placé, voire inadapté. Malgré tout, elle espérait que Qasim et sa famille se portaient bien, qu'elles les apprécieraient toujours même si elle avait conscience qu'il avait beaucoup de rancoeur à son égard suite à la réaction qu'elle avait eu le jour où Hassan avait demandé le divorce. Il y avait plus d'une personne qui ne comprenait pas son attitude de ce jour-là, peut-être même Hassan. Mais il lui avait été reconnaissant de ne pas avoir forcé, de ne pas avoir rendu la tâche bien plus difficile qu'elle ne l'était déjà. La petite blonde avait ses arguments et pourtant bien peu y accordait de crédit, elle était lasse de les répéter et qu'on ne la croit pas, alors elle ne tenait plus à fournir d'efforts à ce sujet. Hassan ne fournissait pas plus de détails que ça, Joanne comprenant par là qu'il ne désirait pas s'épancher davantage sur cette discussion. Un pincement au coeur vint générer en elle un malaise bien désagréable, saisissant bien que l'amertume de leur divorce était toujours bien présent. Si ce n'était pas Hassan, c'était ses proches qui le rappelaient à Joanne, pour les quelques fois où elle croisait leur chemin. Qu'est-ce qu'elle ne donnerait pas pour que tout le monde passe le cap. Elle pensait que ça fonctionnait plutôt bien avec le brun, à moins que lui aussi, ne préférait plus faire remonter à la surface des rancoeurs datant désormais de plusieurs années. Joanne esquissait un sourire triste, combiné d'un regard assez bas. Oui, il valait peut-être mieux parler d'autre chose, et la reprise du travail de la conservatrice semblait être idéal pour cela. "J'avoue que je ne me ressentais pas en droit de refuser." admit-elle, l'air gêné. Elle s'était mise à jouer nerveusement avec ses doigts, comme durant toute situation qui était inconfortable pour elle. "Je ne m'estime pas vraiment en droit de refuser s'il me demande quelque chose, tu vois ? Un peu dans le même ordre idée que je ne me voyais pas refuser des services qu'on me demandait quand j'ai fait mes premiers jours au QAGOMA. C'est à peu de chose près la même sensation." tenta-t-elle d'expliquer. "Mais je retiens le conseil." Elle relevait enfin les yeux en sa direction et échangea un bref sourire avec lui. "Et promis, je ne le dirais à personne." Joanne était preneuse de tout conseil, surtout venant de son ex-mari, qui avait suffisamment d'expérience dans l'enseignement pour en connaître toutes les ficelles et tous les subterfuges. Elle se souvenait encore très bien de ces fois où elle se faufilait dans les amphithéâtres où il enseignait alors qu'elle n'était encore qu'une étudiante. Juste pour le voir et pour l'admirer (et pour le narguer s'il avait remarqué sa présence, aussi). "J'ai juste... envie de bien faire. D'arriver à être satisfaite de ce que je fais et qu'on soit un peu fier de moi." dit-elle dans un soupir, encore incertaine de comment se profilera sa reprise de l'enseignement à l'université. Elle était encore indécise pour la suite et l'avait confié à son ex-mari, qui ne préférait pas rebondir sur ce sujet. A la place, il acceptait très volontiers la tasse de thé qu'elle lui proposait et qui accompagnait toujours très bien des discussions plus ou moins sérieuses. Après avoir servi ce qu'il fallait et expliqué l'absence des chiens dans la maison, Joanne préférait centrer la conversation sur le brun et le grand projet qu'il avait du mal à amorcer. Adopter. D'abord décontenancé, Hassan restait muet pendant quelques secondes, la bouche entrouverte. Le regard bleu de Joanne s'illumina dès lors qu'il disait avoir enfin envoyé le dossier de la demande d'adoption. "C'est génial, Hassan." lui dit-elle avec un large sourire, véritablement ravi pour lui. "Je suis si heureuse que tu sois parvenu à l'envoyer." Il avait eu beaucoup d'appréhension et énormément de questionnements à ce sujet. Mais il l'avait fait et Joanne savait qu'il avait tout fait pour mettre toutes ses chances de son côté. Il préférait tout de même relativiser au possible, par crainte d'être déçu si la réponse venait à être négative. Pas de plan sur la comète, pas d'achats de matériel précoce pour avoir tout ce dont il aurait besoin pour éduquer un enfant. Il n'avait plus qu'à attendre, et cela pouvait prendre énormément de temps. "Je comprends." lui assura-t-elle. Hassan se protégeait avant tout, c'était évident. Elle avait peur pour lui. Qu'il finisse par être terriblement déçu s'il était mené à essuyer un refus et qu'il ne parvienne pas à s'en remettre. "Je sais que je ne peux pas faire grand chose à ce stade, mais je reste de tout coeur avec toi." Elle savait qu'elle n'était pas la première personne vers qui il se tournerait en cas de pépin, mais au moins, il pouvait compter sur elle. Joanne déposa un e main hésitante sur le bras de son ex-mari en guise de soutien. "Ca compte énormément pour toi." C'était évident et Joanne était plutôt bien placée pour le savoir. Ils avaient des rêves de famille ensemble, à l'époque. Hassan révélait ensuite avoir bien d'autres choses en tête qui semblaient beaucoup le préoccuper. Inquiète, la petite blonde fronçait légèrement les sourcils. "Qu'est-ce qui rend tout plus compliqué, en dehors de tout ce que tu dois faire pour le boulot ?" lui demanda-t-elle. "Tu t'en sors quand même, avec cet emploi du temps qui m'a l'air bien chargé ?" Hassan adorait son métier et la spécialité qu'il enseignait. Mais la charge de travail augmentait de plus en plus et les activités dans lesquelles il s'était engagé lui prenait aussi apparemment de plus en plus de temps. Amnesty prenait tellement de son temps qu'il envisageait même de prendre un appartement à Sydney pour avoir un petit pied-à-terre sans avoir à compter sur son frère et sa chambre d'amis. "Tu y seras beaucoup, à Sydney ?" On ne parlerait pas d'angoisse de séparation, mais Joanne serait assez triste de savoir qu'ils se verraient beaucoup (déjà qu'ils ne se voyaient pas beaucoup) alors que leur relation allait enfin sur une bonne pente. Peut-être aimait-elle baigner dans l'utopisme, mais elle avait espoir de pouvoir nouer avec lui une amitié solide, mais pas tout mettre à plat pour mieux s'éloigner l'un de l'autre avec des regrets. Elle ne voulait pas tout ramener à elle non plus, loin de là. Peut-être qu'il avait besoin de s'éloigner aussi plus régulièrement de Brisbane, bien qu'il avait toujours aimé y vivre. Joanne se faisait certainement des idées, peut-être qu'elle extrapoler les simples paroles du brun en des choses qu'elle ne voudrait pas entendre. La conversation fut interrompue par la petite Louise, qui avait apparemment décidé de déjà finir sa sieste. "La sieste n'aura pas duré bien longtemps." dit Joanne avec un sourire nerveux. Elle préférait néanmoins attendre quelques temps afin de voir si elle finissait par se rendormir, que ce n'était qu'un petit hoquètement au milieu de son sommeil. Mais que nenni, la petite en avait assez d'être au lit et le faisait bien comprendre. "Je vais aller vite la chercher avant qu'elle ne réveille Daniel. N'hésite pas à te servir en gâteau." dit-elle en filant rapidement vers la chambre pour aller récupérer Louise, toujours dans sa turbulette. Elle ne demandait pas plus qu'être portée pour arrêter de pleurer, l'effet était immédiat. Un dernier coup d'oeil sur un Daniel encore profondément endormi avant de sortir de la chambre et de fermer silencieusement la porte avant de rejoindre Hassan dans le séjour. Elle s'installait à ses côtés avec un sourire un tant soit peu timide. "Eh voilà, je te présente Louise." Joanne ressentait la même étrangeté que lorsqu'elle lui avait présenté Daniel. Elle en était extrêmement fière, de ses enfants, mais c'était toujours un peu particulier lorsqu'il s'agissait d'en parler à Hassan, leur passif laissant stagner un malaise encore palpable. "Ma mère trouve qu'elle me ressemble comme deux gouttes d'eau. Elle a même ressorti quelques albums photos qu'elle avait récupéré de chez ma grand-mère pour me le prouver." dit-elle avec un petit rire. Penser à sa grand-mère la chagrinait toujours un petit peu. Le deuil faisait son chemin, mais elle lui manquait encore. "J'aurais bien aimé que Nanny fasse aussi sa connaissance, elle aurait adoré son petit caractère." ajouta-t-elle avec un petit rire. Et quand elle regarde sa fille qui se plaisait à somnoler encore un peu dans les bras de sa mère, elle continuait d'espérer de tout coeur qu'Hassan connaisse également ce bonheur grâce à l'adoption.
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| | | | (#)Lun 18 Nov 2019, 01:03 | |
| Joanne ne savait pas dire non ; Ou très difficilement, et certainement pas du premier coup. C’était un trait de caractère qu’Hassan lui avait toujours connu mais qui n’avait pas véritablement évolué avec les années, un trait de caractère qui avait déjà pu la desservir à quelques occasions. Plutôt que d’essayer vainement de la pousser à agir contre sa nature le brun avait donc fini par la laisser faire, chose d’autant plus vraie maintenant qu’il n’avait plus vraiment son mot à dire sur les choix de vie de la jeune femme – il trouvait simplement cela dommage, de constater à nouveau que son incapacité à refuser un service, particulièrement quand il était un peu abusif, la mettait dans une position inconfortable et lui créait plus de souci qu’autre chose. « J'ai juste ... envie de bien faire. D'arriver à être satisfaite de ce que je fais et qu'on soit un peu fier de moi. » avait finalement conclu la blonde à ce sujet, songeuse, et se permettant un sourire teinté de bienveillance Hassan s’était contenté de faire remarquer avec douceur « Pense d’abord à faire ce qui toi te rendra fière. C’est le plus important. » Et le reste viendrait ensuite. Du moins c’était le point de vue du brun, qui estimait bien plus facile d’avoir de l’estime pour quelqu’un qui portait un projet avec fierté que pour quelqu’un qui ne croyait pas lui-même dur comme fer à ce qu’il présentait. Raison pour laquelle, sur un tout autre registre, il était partagé entre le fait d’écouter le conseil de son avocate et de ne pas fonder trop d’espoir sur les démarches d’adoption qu’il s’était enfin décidé à finaliser après une longue période d’errance, et la certitude que s’il ne commençait pas déjà par y croire lui-même il ne pouvait pas espérer de quiconque d’y croire à sa place. L’ironie – ou peut-être n’en était-ce pas vraiment une, en définitive – résidait d’ailleurs dans le fait que jusqu’à présent, son ex-épouse avait été la seule à réellement l’encourager dans cette voie, peut-être plus consciente que quiconque de l’importance qu’avait aux yeux d’Hassan la volonté de pouvoir un jour fonder sa propre famille, quoi qu’il lui en coûte. Il ne savait pas s’il en était triste, ou reconnaissant … Un peu des deux sans doute, mais passé maître dans l’art de ranger dans une petite boîte tout ce qui tendait à le tirer vers le bas, il avait ravalé ce qui le chagrinait et offert à Joanne un sourire reconnaissant lorsqu’elle lui avait assuré « C'est génial, Hassan. Je suis si heureuse que tu sois parvenu à l'envoyer. » quand bien même il n’avait accompli aucun exploit : tout n’était qu’une question de courage, et du temps qu’il avait mis à en réunir suffisamment pour sauter le pas malgré les doutes qui l’assaillaient. Peut-être par peur de se porter la poisse néanmoins, il avait préféré nuancer et faire part de la demi-mesure et de la prudence que lui avait conseillée son avocate, le bout des doigts allant discrètement glisser contre le bout de la table basse lorsqu’il y avait reposé sa tasse, comme dans une autre tentative un peu désespérée de conjurer le mauvais sort. « Je comprends. Je sais que je ne peux pas faire grand-chose à ce stade, mais je reste de tout cœur avec toi. Ça compte énormément pour toi. » Troublé par la main que Joanne était venue poser sur son avant-bras, il avait senti sa gorge se serrer un peu mais malgré tout offert à la blonde un sourire reconnaissant, bien que teinté d’une certaine tristesse. « T’as déjà fait beaucoup plus que tu ne le penses. » avait-il alors assuré avec douceur, posant quelques instants sa propre main par-dessus celle de la jeune femme. « Ça fait du bien d’avoir quelqu’un qui comprend. Qui sait que ce n’est pas un caprice, ou une lubie de quarantenaire en rémission. » Mais qui mieux que Joanne, au fond, pour savoir qu’aux yeux d’Hassan, être père était le projet d’une vie ? Réalisant pourtant qu’il s’épanchait peut-être un peu trop, Hassan s’était raclé la gorge et avait rompu le contact initié par Joanne avant de secouer la tête, absolument pas prêt à lui faire un topo de tout ce qui, à l’heure actuelle, donnait à son quotidien un goût amer et une odeur âcre. « Qu'est-ce qui rend tout plus compliqué, en dehors de tout ce que tu dois faire pour le boulot ? » Il y aurait eu tant à dire pourtant, de la façon dont Yasmine s’était éloignée, à cette impression désagréable qu’il était épié depuis qu’il avait découvert les pneus de sa voiture crevés et reçu quelques courriers d’insultes dont il se bornait pourtant toujours à assurer à Gwen qu’ils ne méritaient pas qu’il s’en inquiète, en passant par cette sensation parfois de s’être laissé engloutir par le travail au point d’en ressentir physiquement les conséquences. Il était épuisé, il en avait conscience, mais lorsque Joanne avant ajouté « Tu t'en sors quand même, avec cet emploi du temps qui m'a l'air bien chargé ? » il avait préféré secouer la tête et nier en bloc, assurant au contraire « C’est qu’une question d’organisation. Et puis tu me connais, j’ai besoin de me tenir occupé. » comme si cela suffisait à justifier toute la situation, et embrayant sans trop savoir pourquoi sur ce projet qu’il avant de façon de plus en plus sérieuse de se chercher un pied-à-terre en Nouvelle-Galles du Sud. « Tu y seras beaucoup, à Sydney ? » Il avait déjà l’impression d’y être beaucoup en réalité, ou tout du moins suffisamment pour que l’idée de chercher une alternative plus durable que la chambre d'amis de Qasim ou n’importe quelle chambre d’hôtel ait germé dans son esprit. « Pas beaucoup plus que maintenant. Cinq ou six jours par mois ... Ça serait juste plus simple que les confcall Skype ou les allers-retours marathon avec le premier avion du matin et le dernier du soir. » Et puis, bien qu’elle n’arrive pas à la cheville de Brisbane, Sydney lui permettait de changer d’air et de décor. Ce qui, à l’heure actuelle, ne pouvait pas lui faire de mal. Il n’avait cependant pas eu à se justifier plus longuement à ce sujet puisque le nourrisson de la maison avait subitement décidé de donner de la voix, Joanne commentant « La sieste n'aura pas duré bien longtemps. » dans un soupir avant de quitter le canapé « Je vais aller vite la chercher avant qu'elle ne réveille Daniel. N'hésite pas à te servir en gâteau. » Mais à cette idée, l’estomac déjà noué du brun avait catégoriquement refusé toute négociation, et se servir en gâteau était devenu le cadet de ses soucis à la seconde où son ex-femme était réapparue bébé dans les bras, reprenant sa place dans le canapé avec une infinie précaution avant d’enfin murmurer « Eh voilà, je te présente Louise. » Il se souvenait de son cœur se serrant la première fois qu’il avait posé les yeux sur le fils de Joanne, dans cette salle d’attente de cabinet vétérinaire et par le plus grand des hasard. Il se souvenait d’avoir eu mal, et vu véritablement se réduire en cendres tout ce qu’il avait imaginé de la vie qu’ils auraient pu avoir Joanne et lui – une autre vie. Mais ça n’avait rien de comparable avec la douleur qui venait de lui écraser la poitrine tandis que la blonde ajoutait « Ma mère trouve qu'elle me ressemble comme deux gouttes d'eau. Elle a même ressorti quelques albums photos qu'elle avait récupéré de chez ma grand-mère pour me le prouver. » rayonnante malgré la tristesse que semblait lui provoquer l’évocation de sa défunte grand-mère. « J'aurais bien aimé que Nanny fasse aussi sa connaissance, elle aurait adoré son petit caractère. » La gorge nouée, et le regard plus humide qu’il ne l’aurait voulu, Hassan était parvenu à articuler « Elle est magnifique. Et ta mère a raison, elle te ressemble. » Elle lui ressemblait et par conséquent, elle ressemblait à cet enfant qu’eux n’avait pas eu, celui auquel le brun pensait encore, parfois, et rarement les jours de gaîté. C’était trop pour lui, en fin de compte. Venir ici, contempler une version du bonheur auquel lui n’aurait pas droit, prendre le risque que le père de ce bébé ne débarque à l’improviste et ne lui colle son poing dans la figure pour avoir osé mettre les pieds sous son toit … C’était une erreur. « Excuse-moi. » Conscient du spectacle peu enjoué qu’il offrait, Hassan s’était levé et avait fait quelques pas pour traverser le salon, disparaissant quelques secondes dans l’entrée et profitant d’être hors de vue pour frotter ses deux yeux du bout de sa manche et prendre une grande inspiration. Récupérant ensuite son casque de moto posé près de la porte, il en avait sorti l’objet jusque-là resté caché dedans puis avait regagné le salon en tentant de faire meilleure figure. « Tiens. C’est pour elle … Désolé, j’ai pas vraiment eu le temps de l'emballer. » Reniflant puis se raclant la gorge pour tenter de retrouver une contenance, il avait tendu à la blonde un lapin vert d’eau en tissu éponge, dont seuls ressortaient les petits yeux gris et le museau rose en forme de cœur. Son regard ayant du mal à recroiser celui de Joanne, Hassan s’y était néanmoins résolu « Crois pas que je sois pas heureux pour toi ... Je le suis. Vraiment. » Pas pour eux, pas pour Jamie et elle, ça il n’y parvenait pas … Mais pour elle, il l’était réellement. « C’est juste que c’est difficile. » Plus que ça, c’était une torture de voir qu’autour de lui tout évoluait, tout passait à autre chose, quand lui restait désespérément coincé sur le quai d’un train qui ne venait jamais. « Mais ça me touche beaucoup que tu aies voulu me la présenter. » La minuscule concernée, quant à elle, semblait plutôt décidée à terminer sa sieste contre l’épaule de sa mère qu’à se laisser admirer.
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| | | | (#)Dim 24 Nov 2019, 17:31 | |
| WAIT FOR SOMETHING BETTER you gotta be stronger than the story, don't let it blind you | |
La crainte de contrarier ou de déccevoir les personnes qu'elle appréciait ou admirait était toujours bien présente dans l'esprit de la jeune femme. A force de vouloir bien faire à tout va, certaines notions se perdaient et la situation se tournait finalement contre elle. On en avait déjà abusé, c'est certain. Bien qu'elle travaillait sur sa longue liste de défauts et que certaines de ses tares tendaient à s'évanouir, elles pouvaient revenir au grand galop pour trois fois rien, surtout lorsqu'il s'agissait d'être fière d'elle, d'avoir un semblant d'estime qui lui permettait de croire aux projets dans lesquels elle s'investissait. La passion y était, la motivation aussi, mais la moindre remarque pouvait encore tout faire chavirer et la pousser à abandonner. Il y avait plus d'une personne dans son entourage qui avait conscience de l'influence qu'ils pouvaient avoir sur elle. Toujours avec un sourire bienveillant sur ses lèvres, Hassan restait de bon conseil. "Il y a deux-trois choses qui me rendraient fières. Côté boulot, je veux dire." Enseigner n'en faisait pas nécessairement partie, elle se découvrait encore dans cette discipline. Sa maternité ayant mis sa carrière en pause, Joanne avait laissé de côté ces quelques idées et celles-ci avaient pris poussière. Elle appréhendait déjà suffisamment la reprise pour se concentrer sur quelque chose d'autre. Elle désirait déjà reprendre ses activités habituelles avant de songer à de nouvelles ambitions. Parlant de projets, le brun s'était enfin décidé à lancer le dossier de la demande d'adoption. Joanne était sincèrement heureuse qu'il y soit parvenu, même si le plus difficile était encore à venir. L'attente allait lui sembler interminable, surtout que ce genre de demande pouvait prendre des mois, voire des années, avant d'avoir une réponse. Dans tous les cas, Joanne tenait à repréciser qu'elle pouvait compter sur lui s'il avait besoin d'aide pour quoi que ce soit. Hassan lui assurait que son soutien avait déjà été des plus précieux, ce qui la surprit plus que de raison. "Je t'ai juste soutenu dans ton projet et répondu aux questions d'une professionnelle pour appuyer ta demande. Ce n'était pas grand chose." dit-elle avec un sourire sincère, appréciant également le contact de la main qu'il avait posé sur la sienne. "Et ça m'a fait plaisir de le faire, vraiment." Suite à quoi Hassan se confiait un peu plus à elle, la laissant ainsi comprendre qu'il n'avait pas eu l'appui de certaines personnes comme il aurait bien voulu avoir. Joanne ignorait de qui il parlait précisément et n'aurait pas l'indiscrétion de le lui demander. Cela devait déjà bien trop lui peser pour qu'elle appuie encore plus là où ça faisait mal. Tourmenté, Hassan l'était déjà. Suffisamment pour qu'il évite la question qu'elle venait de lui poser, elle qui ne cherchait qu'à savoir et comprendre ce qui le préoccupait au quotidien. Elle esquissait un sourire désolé en le voyant éviter le sujet, se contenter de lui répondre qu'il avait toujours aimé avoir des journées bien remplies, avec de quoi s'occuper de l'aube au crépuscule. Il ne laissait de véritables temps de pause au cours duquel Joanne aurait bien aimé lui préciser que si un jour il ressentait le besoin de partager ses peines, il pourrait venir vers elle. "Si ça se trouve, tu prendras goût de Sydney et tu finiras pas y passer bien plus de temps que tu ne voudrais l'admettre." dit-elle sur le ton de la plaisanterie, avec un petit rire dissimulant une légère appréhension à ce sujet. "Tu me diras quand tu auras trouvé quelque chose." Elle espérait qu'il l'en tienne informé. Ce n'était pas rien non plus, de se prendre un autre bien immobilier dans une autre grande ville australienne. Leur conversation fut interrompue par Louise, qui ne voulait manifestement par rester dans sont berceau. Joanne n'avait pas attendu trop longtemps pour aller la chercher afin de ne pas réveiller son autre enfant. Hassan peinait à dissimuler toutes les émotions qui le submergeaient dès que ses yeux s'étaient posés sur le nourrisson. Malgré la tristesse qui humidifiait ses yeux, Hassan avait pris le temps de la regarder et de constater que Louise avait un air de ressemblance avec sa mère. Ce qui semblait le peiner encore plus, si bien qu'il quittait avec une certaine précipitation la maison. Joanne s'était levée, en gardant Louise collée contre elle, en le regardant s'éloigner sans pouvoir faire quoi que ce soit, si ce n'est de sentir son coeur se serrer dans sa poitrine. Avec un air soucieux, elle le voyait réapparaître dans le séjour avec une petite peluche en main pour Louise. "Merci beaucoup..." souffla-t-elle, l'air néanmoins perplexe en constatant qu'il tentait de faire comme si de rien n'était. "Tu n'aurais pas du. Mais c'est très gentil." La petite blonde devait avoir un regard tout aussi bas que celui de son ex-mari, un malaise surchargeant l'air rendant un échange de regard bien compliqué. Hassan s'était risqué à reprendre la parole, dans le but, sûrement, d'éviter que Joanne se fasse des idées en interprétant la raison de son absence éclaire. "J'avais déjà bien remarqué que... Ce n'était pas vraiment ce que tu préférais, de... de voir mes enfants." dit-elle tout bas. Et en dehors des rencontres inattendues, Hassan n'avait pas trop à les voir. Oui, c'était difficile pour lui. Et Joanne ne voudrait pas que ses propres enfants soient également récepteurs des remords et des rancunes qui restaient persistantes entre Hassan et leur mère, alors que les petits, eux, n'y pouvaient rien. "Je ne voudrais pas non plus que tu crois que je... que j'étale mon bonheur pour te faire de la peine." bégaya-t-elle, l'air néanmoins sincère. "Je suis désolée, je ne voulais pas te faire autant de mal." ajouta-t-elle après une courte pause. "Ce n'était peut-être pas la meilleure idée qui soit de t'inviter ici, mais je tenais à ce que tu la vois, et que je prenne aussi de tes nouvelles." C'était important pour elle, et Joanne n'était pas aussi flexible en journée, entre les jours d'école de Daniel, le respect des heures de sieste de chacun, s'occuper de l'ensemble de la maisonnée. Elle était loin de s'ennuyer. "Je ferai en sorte que tu n'aies plus à endurer ça les prochaines fois qu'on se verra, c'est promis." lui assura-t-elle en relevant enfin les yeux en sa direction. "Ca pourra être à l'université de nouveau, par exemple. C'est ton terrain de jeu à toi là-bas, tu t'y es toujours senti comme un poisson dans l'eau là-bas." Joanne tenait d'ajouter un peu de légéreté à leur conversation, à faire preuve d'optimisme et de positivité. C'était nécessaire, voire essentiel. "Je ne voudrais pas t'imposer de rester là si c'est trop compliqué pour toi." dit-elle en toute bienveillance. "Mais j'ai toujours du thé et du gâteau." ajoutait-elle d'un ton qui se voulait plus enthousiaste. Elle ne voulait pas le mettre à la porte, loin de là. Mais elle ne voulait pas le savoir mal à l'aise par la simple présence de Louise pour les prochaines minutes. Ca la mettait tout aussi mal et elle ne pouvait décemment pas mettre la petite dans un coin et l'oublier (l'idée ne lui serait même pas venue à la tête.). Louise pendant ce temps, s'était endormie sans oublier de laisser un peu de bave mouiller le haut de sa mère. Joanne s'était habituée à changer de vêtements aussi souvent que ses enfants depuis quelques mois. "Je voudrais juste que tu te sentes bien, Hassan. C'est tout ce que je te souhaite." conclut-elle d'un air sincère, se sentant incapable de faire quoi que ce soit de plus pour lui.
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| | | | (#)Sam 14 Déc 2019, 07:28 | |
| Le fait qu’il se permette d’évoquer avec quelqu’un d’autre que Qasim l’éventualité de prendre un petit appartement à Sydney témoignait en réalité du fait que sa décision était plus ou moins prise, et que seules sa raison et quelques hésitations qu’il n’avait pas encore totalement canalisées faisaient provisoirement barrage. L’idée lui trottait dans la tête depuis l’automne précédent, et le fait que les occasions de descendre en Nouvelle-Galles du Sud se soient multipliées au cours de l’année scolaire n’avait fait que le conforter là-dedans, rendant même tentant le fait de songer à toutes les opportunités professionnelles qui pourraient en découler. Comme si elle était parvenue à le deviner, Joanne avait plaisanté en commentant « Si ça se trouve, tu prendras goût de Sydney et tu finiras par y passer bien plus de temps que tu ne voudrais l'admettre. » et rejetant l’idée d’un geste de la main Hassan avait ironisé « Qu’ils commencent par avoir une équipe de rugby décente, on verra ensuite. » du même ton amusé, illustrant ainsi le peu de crédit qu’il accordait pour le moment à cette possibilité – tant celle que les Waratahs deviennent une équipe décente, que celle qu’il finisse par prendre goût à Sydney au point d’y passer plus de temps que nécessaire. « Tu me diras quand tu auras trouvé quelque chose. » Acquiesçant d’un signe de tête, il n’avait néanmoins pas épilogué plus longtemps à ce sujet, sa tendance à la superstition lui faisant craindre de se porter l’œil s’il continuait de trop en dire à ce sujet avant d’avoir réellement entamé des démarches dans ce sens. Accédant sans le savoir à sa requête, le nouveau-né de la maison avait donné de la voix pour mettre fin à sa sieste et quémander l’attention de sa mère, et avalant difficilement une ou deux gorgées de thé pendant que Joanne rejoignait la chambre d’enfant le brun s’était soudain senti submergé par une bouffée d’angoisse pour laquelle il ne pouvait s’en prendre qu’à lui-même : il avait accepté de venir ici, après tout – il avait accepté de se faire du mal. Et alors que la blonde revenait avec son bébé dans les bras il s’en était voulu de ne pas être capable de garder l’air impassible qu’il s’était promis de conserver coûte que coûte ; Joanne avait beau deviner mieux que quiconque la tragédie intérieure que cela représentait pour lui, elle ne méritait pas d’en avoir les retombées sous les yeux. Ce n’était pas juste, et profitant du prétexte que lui offrait l’oubli de la peluche destinée au bébé dans le vestibule Hassan s’était éclipsé un instant et avait fait au mieux pour ravaler ses larmes, apprivoiser la boule qui lui serrait douloureusement la gorge, et faire fonctionner ses zygomatiques dans le but de présenter un sourire qui, s’il ne serait pas entièrement sincère, donnerait au moins un peu le change. De retour au salon, il avait tendu la peluche à Joanne avec maladresse, malgré une sincère envie de faire plaisir lorsqu’il avait choisi le lapin et son nez en forme de cœur au milieu de la ménagerie du rayon jouets, et c’est tout aussi maladroitement que la blonde s’en était saisie en soufflant « Merci beaucoup ... Tu n'aurais pas dû. Mais c'est très gentil. » Ne jugeant pas nécessaire de faire remarquer qu’il n’aurait pas envisagé de venir les mains vides, il avait essayé de se justifier au mieux pour ne pas laisser à son ex-épouse le temps de croire à un désaveu de sa part. Il était heureux pour elle, là n’était pas le problème … Il aurait préféré qu’être heureux pour elle puisse se concilier à être heureux lui-même, mais ce n’était pas si simple. Cela viendrait sans doute avec le temps. « J'avais déjà bien remarqué que ... Ce n'était pas vraiment ce que tu préférais, de ... de voir mes enfants. Je ne voudrais pas non plus que tu crois que je ... que j'étale mon bonheur pour te faire de la peine. » avait de son côté repris la jeune femme en bafouillant, tombant précisément dans l’écueil qu’Hassan avait tenté d’éviter en temporisant sur sa propre réaction. « Je suis désolée, je ne voulais pas te faire autant de mal. Ce n'était peut-être pas la meilleure idée qui soit de t'inviter ici, mais je tenais à ce que tu la vois, et que je prenne aussi de tes nouvelles. » À la façon dont elle en parlait, il avait l’impression d’être un vieil oncle dont on se sentait obligé de prendre des nouvelles depuis qu’on l’avait collé en maison de retraite ; Il se sentait comme une œuvre de charité, et ce n’était pas plaisant. Mais sa tête lui jouait probablement encore des tours, et il apprenait à reconnaître les moments où ce n’était plus sa raison mais la paranoïa de ses épisodes dépressifs qui se manifestait, et chassant tout cela dans un coin de son esprit il avait secoué la tête « Non c’est pas … T’y es pour rien. C’est pas ta faute. » Elle n’avait rien fait de mal, rien qui ne mérite des excuses. Et bien que sa façon de faire soit souvent maladroite, à aucun moment n’avait-il pensé qu’elle puisse vouloir sciemment lui faire de la peine. « Et j’ai rien contre tes enfants, c’est pas ça … C’est juste que … » Marquant une pause durant laquelle il avait pincé ses lèvres l’une contre l’autre, il avait cherché une formulation qui ne sonnerait pas comme un reproche. « Je t’ai toujours sentie méfiante quand j’étais en présence de ton fils. Et j’ai toujours eu un bon feeling avec les enfants, du moins je pense, mais là du coup je … j’ai jamais trop su comment m’y prendre pour que tu ne me vois pas comme une … menace. » Fut un temps où elle avait agi comme s’il avait pu en être une pour elle aussi, et bien que le sentiment semblait avoir fini par s’estomper cela restait une blessure qu’il n’avait pas terminé de soigner. Alors s’étonner de le voir si distant avec ses enfants, c’était sans doute oublier un peu vite que cette distance elle avait elle-même tout fait pour l’instaurer en premier lieu, bien plus que celle que le brun aurait naturellement conservé en sachant quelle était sa place – et si Hassan avait choisi de le respecter, il ne savait pas comment s’en accommoder maintenant que Joanne s’en étonnait. « Je ferai en sorte que tu n'aies plus à endurer ça les prochaines fois qu'on se verra, c'est promis. » avait finalement repris cette dernière « Ça pourra être à l'université de nouveau, par exemple. C'est ton terrain de jeu à toi là-bas, tu t'y es toujours senti comme un poisson dans l'eau là-bas. » Le sourire un peu maladroit, depuis le départ bien moins à l’aise qu’elle à l’idée de la croiser sans crier gare dans un espace qu’il avait toujours considéré comme imperméable à ses drames personnels, il s’était retrouvé un peu pris au dépourvu lorsqu’elle avait ajouté « Je ne voudrais pas t'imposer de rester là si c'est trop compliqué pour toi. Mais j'ai toujours du thé et du gâteau. » ne sachant pas trop si elle tentait de rattraper la situation ou au contraire de le mettre à la porte en douceur. « Je voudrais juste que tu te sentes bien, Hassan. C'est tout ce que je te souhaite. » Le regard fuyant, s’interdisant clairement d’admettre qu’il manquait tout un tas de facteurs pour qu’il se sente bien et qu’elle n’en était même pas le principal, il avait pris une grande inspiration et fait au mieux pour offrir à la blonde un air plus résolu, et assurément bienveillant. « J’ai envie de rester, vraiment. Ça me fait plaisir de te voir et de pouvoir discuter un peu. » Machinalement, le volume de sa voix avait baissé d’un cran en remarquant la petite Louise, dont la joue était allée s’échouer contre l’épaule de sa mère pour un retour provisoire au pays des rêves. « Mais je veux pas que ce soit une source de stress pour toi, ou vis-à-vis des petits. » Marquant une hésitation, il avait fini par ajouter d’un ton plus incertain « En acceptant de venir j’avais surtout peur de t’attirer des ennuis, pour être honnête … » Des ennuis vis-à-vis de Jamie, il ne jugeait pas utile de le préciser. Elle aurait beau assurer que non, lui continuait de le croire capable d’une gifle ou d’un coup qui partait à nouveau trop vite si la contrariété était suffisante – et Hassan se savait être une contrariété plus que suffisante pour le britannique. « Disons que je reste le temps de prendre un deuxième thé … ? » avait-il alors suggéré, pour couper la poire en deux. « Et après ça je me mettrai doucement en route. Je peux pas rester trop tard de toute façon, j’ai promis d’être parti pour dix-sept heures. » Si tant est qu'il aurait songé à préciser à qui au juste il l'avait promis, l’apparition dans le salon d’un Daniel encore ensommeillé et agrippé à son doudou y aurait de toute façon coupé court. Les gratifiant d’un bâillement, le petit garçon s’était frotté les yeux, offrant tour à tour à sa mère un regard interrogateur et à Hassan un regard timide.
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| | | | (#)Dim 15 Déc 2019, 18:09 | |
| WAIT FOR SOMETHING BETTER you gotta be stronger than the story, don't let it blind you | |
Qu'il était plaisant d'entendre Hassan énoncer une plaisanterie. La petite blonde avait l'impression que ça faisait un éternité qu'ils n'avaient pas eu droit à un échange parsemé de légèreté et d'humour, leurs conversations ayant adopté un ton des plus sérieux et des plus poignants depuis qu'ils s'étaient retrouvés. Pas qu'elle ne l'en pensait pas capable, loin de là, mais les opportunités avaient été limitées jusqu'alors. Cela lui faisait tant plaisir qu'elle ne pouvait s'empêcher d'esquisser un large sourire, accompagné d'un rire ravi, lorsqu'elle l'écoutait. "C'est plutôt mal parti, alors." Bien qu'elle ne suivait plus aussi assidûment le rugby comme ça ne pouvait l'être quand elle était encore avec Hassan, Joanne s'était déjà surprise à plusieurs reprises de s'intéresser aux derniers résultats tombés lorsqu'il y avait des championnats. Joanne n'espérait que le bonheur de son ex-mari et si trouver un appartement à Sydney pour faciliter son quotidien, alors elle ne pouvait que l'y encourager malgré son appréhension à savoir qu'il serait quand même loin régulièrement. Hassan ne s'éternisait pas trop sur le sujet et comprenant qu'il préférait en rester là, la jeune femme n'insistait pas davantage. Mais laisser cette conversation s'étaient avait laissé place à un malaise plus que pesant. Difficile pour le brun de voir son ex-épouse porter dans ses bras un bonheur que le couple Jaaffari-Prescott n'était pas parvenu à atteindre malgré toute la volonté qu'ils avaient fourni. Hassan ne se doutait pas que ça affectait aussi Joanne. Bien sûr qu'elle ne l'oubliait pas, bien sûr que ça la pesait aussi. De constater que ça le touchait toujours autant lui faisait beaucoup de peine et elle se désolait de se rendre compte qu'il n'y avait rien qu'elle puisse véritablement faire pour l'aider. La solution la plus adaptée qui le venait en tête était de lui garantir qu'il n'aurait pas à être confronté à ses enfants lors de leurs prochaines rencontres. Ca lui crevait le coeur de penser qu'elle ne pouvait que tirer cette conclusion alors qu'elle aurait apprécié que ses bouts de choux fassent le connaissance d'Hassan. Jamie n'approuverait certainement pas. Le coeur pincé, Joanne avait senti sa gorge se serrer et les larmes monter aux yeux. Ce malaise persistera-t-il donc entre temps à longueur de temps ? "Apparemment, si." souffla-t-elle du bout de ses lèvres tremblantes, alors que le brun lui assurait qu'elle n'était en rien fautive de sa peine. Hassan pointait du doigt ce qui l'empêchait de s'approcher de ses enfants. "J'avais juste peur que..." Elle baissait les yeux. Joanne en avait beaucoup, des peurs inconsidérées et inexpliquées. Ca survenait subtilement dans son esprit et il lui était impossible de s'en débarrasser une fois que l'idée avait germé. "... Qu'être proche de Daniel te rappelle l'enfant que nous aurions pu avoir, que ça te fasse plus de peine qu'autre chose. Mais je ne t'ai jamais vu comme étant d'une menace quelconque pour lui." Joanne se sentait toujours aussi coupable de chacune de ses fausse-couches. La sensation s'estompait avec le temps mais restait tout de même bien présente. L'attitude qu'elle avait eu quand ils se voyaient avait profondément marqué le brun et il jugeait bon de le lui faire comprendre. Il ne faisait que partager son ressenti et même s'il avait sé de la plus grande délicatesse pour prononcer ces quelques mots, elle n'en était que plus peinée. Ses lèvres tremblantes se pinçaient à son tour afin de réprimer un sanglot. "Je ne voulais pas te faire de mal. Je suis désolée." souffla-t-elle, le regard bas. Comment se faire pardonner des mois, des années, où elle avait adopté une attitude qui le maintenait loin d'elle ? Il suffisait de l'entendre parler pour constater qu'il n'y parvenait pas vraiment. Mais le mal était fait. Joanne tentait de se racheter autant que possible depuis longtemps désormais, et elle faisait au mieux pour trouver autant de solutions que possible pour qu'Hassan ne se sente pas aussi mal qu'il n'avait déjà pu l'être. Si la solution était d'éviter qu'il ne voit ses enfants ou de le forcer à venir chez elle, alors soit. Le regard bleu de Joanne s'était illuminé lorsqu'Hassan lui disait qu'il était content d'être ici, de passer un peu de temps avec lui. Rassurée par ses paroles, elle lui esquissait un sourire qui se fanait lorsqu'il faisait part de ses inquiétudes. "Ca me fait très plaisir aussi de pouvoir passer du temps avec toi. Et je ne suis pas stressée." lui assura-t-elle avec un doux sourire. "Louise n'a pas l'air de l'être non plus." Elle rit bouche fermée tout en indiquant d'un signe de tête sa fille assoupie et blottit contre elle. Joanne avait beau ne pas être une championne pour saisir les messages subliminaux, mais il ne lui fallait pas bien longtemps pour comprendre qu'Hassan ait encore des craintes que Jamie s'en prenne à elle d'une façon ou d'une autre quand il saura que son ex-mari était venu passer un peu de temps ici. Il avait hésité avant de prononcer sa crainte à haute voix. "Ne t'en fais pour moi." dit-elle afin de le rassurer. "J'ai bien le droit de voir qui je veux." Et ce n'était pas comme si elle lui faisait des infidélités. Elle désirait passer du temps avec Hassan, c'était aussi simple que ça. Joanne retrouvait son sourire ravi lorsqu'il disait être partant pour une autre tasse de thé. "Je vais faire en sorte de trouver le plus grand mug possible et de chauffer l'eau autant que possible alors." dit-elle d'un ton amusé. Un maigre prétexte pour le faire rester aussi longtemps que possible malgré ses impératifs. Joanne n'oubliait pas que, contrairement à elle, son ex-mari était capable de boire une boisson bouillante sans se brûler. "Tu as quelque chose de particulier de prévu ce soir ?" lui demanda-t-elle, curieuse. Suite à quoi Daniel fit son apparition, encore un petit peu somnolent. Sans grande surprise, il venait se coller aux jambes de sa mère et ses grands yeux bleus restaient rivés sur Hassan. Elle libérait l'une de ses mains pour lui caresser les cheveux. "Tu te rappelles d'Hassan, trésor ?" demanda-t-elle à son garçon pendant qu'elle s'accroupissait afin d'être à sa hauteur. Il se collait contre elle afin de finir d'émerger un petit. "C'est un ami de Maman. Il reste pour le goûter, et je pense qu'il adorerait manger un bout du gateau qu'on a fait tous les deux, tout à l'heure." Difficile de trouver des tâches culinaires à faire faire à son petit bout de chou haut comme trois pommes pour faire de la pâtisserie, mais Joanne était parvenue à lui faire faire deux-trois choses qui avaient rendu le garçon fier comme tout. Il fallait quelques secondes avant les informations ne soient assimilés par le petit, qui finit par décoller sa tête du torse de sa mère afin de regarder Hassan. "Tu veux un bout du gâteau que j'ai fait ?" demanda-t-il au brun alors, le regard pétillant. Joanne laissait échapper un rire et finit par se redresser et de poser délicatement Louise dans le transat pour bébé qui se trouvait juste à côté du canapé. "Je reviens vite, je vais juste aller refaire chauffer de l'eau." Ca ne prenait qu'une minute le temps qu'elle ne fasse l'aller-retour en cuisine, mais c'était apparemment largement suffisant pour que Daniel n'ait déjà commencé à faire l'inventaire de ses jouets avec Hassan. Le petit avait beau avoir ses instants de timidité, il y avait on ne sait quel déclencheur qui le rendait tout d'un coup très sociable. Elle retournait en cuisine une fois que l'eau était chaude pour ramener deux mugs bien remplis et s'installa sur le canapé. "Ils ont déjà commencé à lui apprendre à écrire son prénom à l'école." racontait-elle lorsqu'elle voyait l'un des (très) nombreux dessins posés sur la table basse. "Je ne vais pas te le cacher, mais j'ai eu la larme à l'oeil quand il est revenu pour la première fois avec son dessin et son écriture. Le N était à l'envers et le point du i au moins tout aussi gros que la barre du i, mais qu'est-ce que j'étais fière." Joanne s'émerveillait toujours d'un rien, c'était bien quelque chose qui n'avait pas changé chez elle. Et de voir ses enfants évoluer et s'épanouir autant la fascinait au quotidien.
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| | | | (#)Lun 13 Jan 2020, 21:52 | |
| Avec le recul, Hassan réalisait que le comportement de Joanne vis-à-vis de lui lorsqu’il était question de son fils à l’époque aurait dû lui mettre la puce à l’oreille, et suffire à lui faire entendre raison sur le fait que les choses ne fonctionneraient plus jamais de la même manière entre eux. Mais il était toujours plus simple de réaliser ses erreurs une fois que les plaies qu’elles avaient causées avaient terminé de cicatriser, et si ces cicatrices-là continuaient de le piquer un peu parfois, elles avaient terminé de saigner. Pour autant, le brun possédait encore un souvenir vivace du mal que lui avait fait cette impression que Joanne protégeait son rejeton de lui comme on le protégerait d’un animal aux canines acérées – comme si quelque part entre le divorce et la maladie il était devenu quelqu’un qu’elle croyait capable de pouvoir faire du mal à un enfant. À son enfant qui plus est. « J'avais juste peur que ... » Il aurait voulu la dissuader de continuer, lui dire qu’elle n’avait pas besoin de se justifier quand en réalité c’était lui qui ne voulait pas en savoir plus, mais les mots étaient restés coincés dans sa gorge et faute d’être interrompue la blonde avait continué « ... Qu'être proche de Daniel te rappelle l'enfant que nous aurions pu avoir, que ça te fasse plus de peine qu'autre chose. Mais je ne t'ai jamais vu comme étant d'une menace quelconque pour lui. » Il se souvenait pourtant les mouvements de recul, et le regard méfiant qu’elle avait parfois eu, et la gorge serrée Hassan avait admis en baissant les yeux « J’ai beaucoup douté, après ça … Même vis-à-vis des petits de Qasim. » Et même demandé si sans qu’il le sache, les enfants qu’ils n’avait pas eu ensemble et ceux qu’il n’aurait jamais tout seul n’étaient pas le signe qu’il n’était tout simplement pas fait pour ça, en dépit de ses désirs personnels. « Je ne voulais pas te faire de mal. Je suis désolée. » Sans doute. Au fond il n’avait jamais pensé qu’elle ait agi sciemment – plutôt par réflexe, par instinct, et pour qu’elle ne se méprenne pas il avait répondu « Je sais. » Et si elle lui avait effectivement fait du mal, il avait su laisser passer du temps et prendre un recul suffisant pour réaliser par lui-même que les angoisses injustifiées de Joanne à son égard ne faisaient pas pour autant de lui quelqu’un de mauvais, ou de dangereux. Elle était aussi là, l’ampleur de ce qu’il avait dû surmonter avant de se décider à entamer des démarches d'adoption. Mais le temps passant Hassan avait cessé d’en vouloir au monde entier pour les embuches et les déconvenues qui s’étaient mises en travers de sa route, et bien que l’image de Joanne avec son nouveau-né dans les bras lui pince douloureusement le cœur, il avait envie d’essayer de passer outre et de s’en accommoder. Il avait envie de se prouver qu’il en était capable, comme d’être capable de poser l’une après l’autre les pierres de l’amitié qu’ils essayaient non sans mal de construire. « Ça me fait très plaisir aussi de pouvoir passer du temps avec toi. Et je ne suis pas stressée. » lui avait en retour assuré la blonde, retrouvant un brin de sourire. « Louise n'a pas l'air de l'être non plus. » Attendri, Hassan avait souri à son tour mais eu l’air pensif, hésitant avant d’admettre que sa seule hésitation à rester était encore la même que celle qu’il avait eu avant d’accepter de venir. Pour lui ce n’était que difficile, mais pour elle il craignait que cela soit une source d’ennui, un danger. « Ne t'en fais pour moi. J'ai bien le droit de voir qui je veux. » Partagé entre l’envie de la croire et la crainte qu’elle ne minimise une fois encore les colères de son époux, il n’avait pas voulu enfoncer le clou et s’était contenté de hocher la tête. « Je vais faire en sorte de trouver le plus grand mug possible et de chauffer l'eau autant que possible alors. » Croisant les bras pour se donner une contenance, il avait proposé « Tu veux que je m’en occupe ? T’as les mains un peu prises. » avec bienveillance, ayant suffisamment observé où étaient rangés bouilloire et thé dans la cuisine lorsqu’elle avait préparé leurs premières tasses. « Tu as quelque chose de particulier de prévu ce soir ? » Pris d’une soudaine hésitation et trahissant alors malgré lui le caractère feint de son indifférence, il avait tenté de noyer le poisson en haussant vaguement les épaules. « J’ai laissé ma moto chez Gwen, elle devrait pas tarder à rentrer … Elle habite pas très loin. » La tête dodelinant légèrement, il avait ajouté « C’est ma, hm … c’est la brune avec qui je déjeunais quand on s’est croisés à la cafèt’ un peu avant que tu partes en congé maternité. Je sais pas si tu te souviens. » non sans se dire que cela ne l’avait probablement pas marquée. Après tout il n’avait rien fait pour empêcher la discussion de ne pas s’éterniser ce jour-là, un peu mal à l’aise de devoir présenter à Gwen celle qui avait partagé sa vie pendant toute une décennie quand la base de leur relation consistait à ne pas s’immiscer dans le passé et les affaires de l’autre. Il était divorcé, elle aussi, il n’avait jamais rencontré sa fille, elle n’avait jamais rencontré les Khadji, et les choses étaient bien ainsi. Plus que de la gêne ou une certaine forme de malaise, c’était plutôt une certaine forme d’intimidation qui s’était emparée d’Hassan lorsque Daniel était apparu sur le pas de la porte, le fixant silencieusement de son air ensommeillé avant de rejoindre sa mère. « Tu te rappelles d'Hassan, trésor ? » Posant un genou à terre pour se mettre à sa hauteur, la blonde avait passé une main affectueuse dans sa tignasse ébouriffée « C'est un ami de Maman. Il reste pour le goûter, et je pense qu'il adorerait manger un bout du gâteau qu'on a fait tous les deux, tout à l'heure. » Timidement, le petit garçon avait tourné la tête et relevé les yeux vers Hassan, ce dernier finissant par se mettre à son tour à sa hauteur et tendre vers lui une main prudente pour le saluer. « Tu es un peu plus grand à chaque fois que je te vois. » Comme la plupart des enfants, enorgueilli par la perspective d’être considéré comme « un grand », Daniel avait pincé ses lèvres avec une brève hésitation, puis finalement demandé d’une petite voix « Tu veux un bout du gâteau que j'ai fait ? » néanmoins emplie de fierté, arrachant à Hassan un sourire amusé avant qu’il ne réponde d’un ton volontairement résolu « Si c’est toi qui l’a fait, j’ai encore plus envie d’y goûter. » et ne ponctue sa phrase d’un clin d’œil. Déposant le bébé dans son transat, Joanne avait finalement pris la direction de la cuisine elle-même en signalant « Je reviens vite, je vais juste aller refaire chauffer de l'eau. » et laissant momentanément Daniel sous la bonne garde du brun. Un peu hésitant sur la conduite à adopter, l’enseignant avait suivi le petit garçon des yeux et l’avait observé fouiller dans la caisse de jouets rangée dans un coin du salon pour en ressortir une collection de figurines d’animaux qu’il avait entrepris de présenter un par un à Hassan, hochant la tête et s’enthousiasmant à chaque nouvelle bête que lui présentait le bambin jusqu’à ce que Joanne ne revienne s’installer sur le canapé avec deux tasses à nouveau fumantes. « Merci. » Par habitude, il avait refermé ses doigts autour de la tasse avant de souffler dessus, tandis que sur la table basse Daniel faisait se rencontrer la girafe et le pingouin, association que seule l’imagination fertile d’un enfant pouvait trouver parfaitement normale. « Ils ont déjà commencé à lui apprendre à écrire son prénom à l'école. » avait de son côté commenté Joanne avec un sourire. « Je ne vais pas te le cacher, mais j'ai eu la larme à l'œil quand il est revenu pour la première fois avec son dessin et son écriture. Le N était à l'envers et le point du i au moins tout aussi gros que la barre du i, mais qu'est-ce que j'étais fière. » L’évocation de l’école avait laissé Hassan songeur un bref instant, Daniel tenant à peine sur ses jambes la dernière fois qu’il l’avait vu – brève rencontre avec Jamie l’année précédente mise à part, et durant laquelle le petit homme somnolait dans sa poussette. « Bizarrement je n’ai aucun mal à t’imaginer la larme à l’œil en accrochant le dit dessin au frigo. » S’en était-il alors amusé, avant que ne lui échappe un bref soupir l’ayant poussé a ajouter d’un ton pensif « Ça grandit tellement vite … La grande de Leilani aura dix ans l’an prochain, tu imagines ? » Tellement vite, et en même temps l’époque où la jeune femme avait donné naissance à son aînée semblait remonter à une autre vie, une éternité durant laquelle Joanne et lui étaient encore un couple sans nuages. « Elle nous a proposé d’aller passer quelques jours de vacances chez elle à Rhett et à moi à l’automne prochain. Maintenant qu’ils ont l’air d’être rentrés à Singapour pour un moment. » Ayant suivie la voix professionnelle qui aurait pu être celle d'Hassan s’il ne s’était pas découvert une véritable vocation pour l’enseignement, la jeune femme avait épousé un singapourien quelques années après la fin de leurs études, et après quelques années de vadrouille à travers l'Asie au gré de leurs opportunités professionnelles respectives et durant lesquelles étaient nées leurs deux filles, ils avaient posé leurs valises dans le pays natal de Monsieur voilà plus d’un an maintenant. « Bon alors, voyons voir ce gâteau … » Troquant sa tasse de thé contre l’assiette à dessert posée devant lui sur la table basse, il avait volontairement attendu que l’attention de Daniel soit titillée pour goûter et s’était fendu d’un « C’est l’un des meilleurs gâteaux que j’ai jamais mangé. » en partageant un regard complice avec Joanne. « Maman t’a aidé pour le faire ? » Diablement sérieux, le bambin avait posé sa girafe et dodeliné vaguement sa tête « Un peu. » provoquant au passage l’amusement des deux adultes, Hassan tournant à nouveau la tête vers la blonde pour commenter « Un peu, c’est dit. » d’un air entendu.
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| | | | (#)Dim 19 Jan 2020, 16:00 | |
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Le nombre de fois où Joanne avait présenté ses excuses avec son ex-mari pour toutes les fois où elle avait pu le blesser, d'une façon ou d'une autre. Elle se demandait parfois s'il la croyait encore ou si, à la longue, il était las de la voir se répéter continuellement dès qu'ils approchaient d'un peu trop près des sujets qui leur étaient encore difficiles. Le chemin suivait son cours, les plaies prenaient du temps à se soigner, mais il y avait toujours cette douleur sourde qui leur rappelait que c'était toujours là. Les sourcils de la jeune femme se courbèrent pas le poids de la peine quand elle entendait de sa bouche que son comportement avait affecté sa relation avec ses neveux et nièces. Il disait savoir qu'elle était navrée et elle ne savait pas vraiment comment interpréter cette phrase. Si c'était pour qu'elle cesse de s'embourber dans cette quête interminable de son pardon ou pour mettre fin à ce sujet encore un peu épineux. Malgré cela, elle voyait bien que la simple présence de Louise le blessait. Dieu sait ce qui pouvait se passer dans la tête du brun en la voyant ainsi. Joanne n'osait pas le lui demander. Leur rencontre avait déjà failli s'écourter et elle faisait tout son possible pour la prolonger autant que possible. Il craignait que Jamie le reproche à son épouse d'une façon ou d'une autre. "Non merci, ne t'en fais pas. Je m'en occupe de suite." lui répondit-elle d'un air reconnaissant après qu'il se soit proposé de s'occuper du thé. Il avait également précisé qu'il ne pourrait pas non plus s'éterniser trop longtemps, laissant deviner qu'il avait des impératifs pour la soirée. Joanne, sans vouloir se montrer indiscrète, lui demandait ce qu'il avait de prévu. "J'avoue ne pas m'en souvenir." avoua-t-elle d'un rire nerveux. Ils s'étaient effectivement croisés, et il n'y avait qu'un bref échange avant que chacun ne doive repartir à ses occupations. On sentait qu'Hassan pesait ses mots, il était plutôt hésitant sur la façon dont la présenter à son ex-femme. Celle-ci avait beau avoir toujours du mal à comprendre le second degré et les sous-entendus, elle n'avait étonnement pas trop de mal à faire les liens. "Vous... Vous vous fréquentez ?" hésita-t-elle à dire, après avoir longuement réfléchi sur la façon dont elle allait poser la question sans paraître trop envahissante et curieuse. C'était étrange pour elle de se dire qu'il voyait quelqu'un mais cela ne l'empêchait pas d'être heureuse pour lui, qu'importe le type de relations qu'il y avait entre eux. Après tout, Hassan avait eu l'occasion auparavant de voir son ex-femme se mettre avec quelqu'un d'autre. La situation s'inversait désormais et c'était comme s'ils avaient franchi chacun cette étape là de leur vie. Elle esquissait un fin sourire sans trop savoir si elle pouvait en savoir plus ce sujet ou non. Elle ne désirait pas se montrer insistante. La discussion fut interrompue par la venue d'un Daniel à peine réveillé de sa sieste, ses petites mains se frottant encore les yeux qu'il avait hérité de sa mère. Hassan s'était également accroupi afin d'être au hauteur du bambin, observant d'abord la main tendue avant de tendre la sienne à son tour. Il se sentait fier, de serrer la main comme les grands et ça se voyait amplement sur le sourire qui illuminait son visage. Sa mère l'observait, attendrie, avant de se relever pour aller chercher le nécessaire pour le goûter après avoir installé Louise. La blonde revenait une poignée de minutes plus tard, ayant remarqué que Daniel avait déballé tous ses animaux en plastique pour les montrer à Hassan et jouer avec ensuite. Son amour des animaux lui avait clairement été transmis avec son père et c'était sans grande surprise qu'elle voyait son fils avec le pingouin en main, l'animal préféré de Jamie. Daniel avait semé ses figurines un petit peu partout et Joanne savait qu'elle allait devoir faire un rappel à l'ordre en matière de rangement avant que son esprit vif n'aille se concentrer sur ses autres jouets. "Le dessin y est toujours, d'ailleurs." reconnut-elle tout en riant, encore un peu émue de voir son enfant évoluer si vite. "Je garde une bonne partie de ses dessins encore, je l'avoue." Il n'y avait parfois qu'un coup de crayon dessus et il adorait offrir des dessins à sa mère et son père. Jamie y voyait là un futur artiste, Joanne plutôt quelqu'un qui adorait offrir, de toute évidence. Ses yeux s'arrondirent lorsqu'Hassan donnait des nouvelles de Leilani et de son enfant. "Déjà ?! Que le temps passe vite. Et tout va bien, de son côté ?" lui demanda-t-ell. Elle n'avait plus eu de nouvelles de la brune depuis des années et elles ne s'étaient pas vus depuis bien plus longtemps. "Ca sera vraiment un chouette voyage." s'enthousiasma-t-elle. Elle était heureuse de constater que Rhett et Hassan pouvaient toujours autant compter sur l'un l'autre et qu'ils s'organisent des vacances comme celles-ci, à aller voir une amie de longue date. "Si le voyage se concrétise, tu voudras bien lui passer le bonjour de ma part ?" Elle pourrait très bien le faire elle-même, à essayer de retrouver ses coordonnées et prendre de ses nouvelles. Mais Joanne la percevait comme une amie d'Hassan avant tout avant d'avoir été la sienne et elle ne se sentait pas tout à fait légitime de revenir vers elle. Suite à quoi Hassan s'assurait d'avoir toute la l'attention du petit pour savourer avec exagération le fameux gâteau. La petite blonde ne put se retenir de lâcher un rire devant son garçon, fier comme un coq avec un large sourire satisfait sur son visage. Elle manquait même d'avaler de travers sa gorgée de thé. A son tour, il goûtait à la pâtisserie et il finit par le dévorer à tout allure. Une gorgée de sirop à l'eau pour passer le thé. "T'as vu Maman, je cuisine bien comme toi et Papas !" dit-il en gonflant le torse. Haut du corps qu'elle n'hésita pas à lui chatouiller. Il laissait échapper quelques éclats de rire qui agitait un peu le sommeil de sa petite soeur. Joanne en profitait pour couper quelques parts supplémentaires si jamais quelqu'un voulait se reservir (et elle savait qu'il y allait au moins avoir son garçon qui allait tomber dessus).Certes, sa sieste avait été tronquée, mais elle avait dormi un petit peu plus qu'elle ne pouvait le faire d'habitude. En soi, c'était un miracle. "Est-ce que tu veux la prendre un petit peu ?" proposa-t-elle à Hassan, avec un fin sourire. Louise adorait être portée tout court. Un point bonus si c'était Jamie mais ce dernier était encore au travail. "Tu sais, je suis contente que Rhett et toi soyez toujours amis. Enfin, je veux dire, même s'il était parti pendant un certain temps, vous envisagiez toujours de faire un voyage pour revoir Leilani, par exemple." Son sourire était sincère. "J'ai fait l'erreur de couper les ponts avec lui, mais je suis contente que nous ayons pu en discuter et renouer. Il m'avait beaucoup manqué." admit-elle sans hésiter. Pendant toutes ces années avant le divorce, elle avait toujours chéri son amitié avec le blond. C'était un allié sur qui elle pouvait toujours compter et il avait toujours su qu'il pouvait compter sur elle également. "Vous arrivez à vous voir assez souvent, non ? Entre deux cours ou deux entraînements." dit-elle avec un sourire amusé. C'était comme un retour aux sources. Sur les quatre, trois enseignaient désormais à l'université.
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| | | | (#)Mar 25 Fév 2020, 17:12 | |
| Sans doute qu’inconsciemment Hassan s’était créé un rempart en s’arrangeant pour que son passage chez Joanne ne le mène ensuite directement chez Gwen. Un rempart dans le cas où l’amertume lui aurait grignoté le cœur un peu trop fort, et où sa raison n’aurait pas su l’empêcher de laisser la tristesse le submerger. Gwen n’aurait pas posé de questions, ils ne s’en posaient jamais, et il aurait eu tout le loisir de refouler au fin fond de son crâne les sentiments douloureux dans l’espoir qu’à les ignorer ils disparaissent d’eux-mêmes … De toute les mauvaises habitudes qu’il avait acquis au fil de ces dernières années, celle de mettre les problèmes sous le tapis faute d’oser les affronter était de loin la plus mauvaise. « J'avoue ne pas m'en souvenir. » lui avait en tout cas avoué Joanne lorsqu’il avait maladroitement tenté de poser des mots sur l’identité de Gwen. « Vous ... Vous vous fréquentez ? » Elle pesait ses mots, il pouvait le sentir, et bien qu’il lui en soit reconnaissant Hassan ne savait pas vraiment comment répondre à cette question. L’ironie de sa relation avec l’entraîneuse reposait aussi sur le fait que sa simplicité tranchait avec la complexité qu’il avait à mettre des mots dessus – elle ne rentrait simplement dans aucune case, et surtout pas celle des relations telles que Joanne les avait toujours imaginées. « Si on veut, oui. » avait-il alors simplement répondu sur le ton de la concession, un « oui » franc n’étant pas plus une vérité que le « non » n’en aurait été une. L’irruption du fils de la jeune femme avait de toute façon coupé court à l’échange, et passé un bref moment de timidité le fait que sa mère le présente comme un ami semblait avoir suffi au bambin pour accepter Hassan et lui présenter ses jouets avec enthousiasme. De retour avec le goûter, Joanne avait repris sa place dans le canapé et observé Daniel d’un air songeur, divagant sur ses premiers exploits et admettant « Le dessin y est toujours, d'ailleurs. Je garde une bonne partie de ses dessins encore, je l'avoue. » comme tout bon parent l’aurait également fait à sa place. Le temps passait, et sans le savoir le petit garçon était un autre des témoins d’à quel point il filait, pas encore né à l’époque où Hassan et sa mère s’étaient revus la première fois et désormais en âge de donner vie à ses animaux de plastique sous le regard attendri de Joanne. La plus âgée des filles de Leilani allait avoir dix ans. « Déjà ?! Que le temps passe vite. » s’en était aussitôt étonnée la blonde, comme un énième rappel d’une époque qui semblait à la fois lointaine, et pas tant que cela. « Et tout va bien, de son côté ? » Acquiesçant, sans pour autant rentrer dans des détails dont elle n’aurait peut-être que faire, Hassan avait mentionné la proposition qui leur avait été faite à Rhett et à lui d’aller passer quelques jours de vacances auprès de leur amie et de sa famille. « Ça sera vraiment un chouette voyage. Si le voyage se concrétise, tu voudras bien lui passer le bonjour de ma part ? » Il espérait réellement qu’il se concrétiserait, tant parce qu’ils n’avaient pas vu Leilani depuis une éternité que parce que changer un peu de décor ne le ferait sans doute pas de mal à Rhett et à lui. « Oui, bien sûr. Je suis sûr que ça lui fera plaisir. » avait-il en tout cas assuré à Joanne, plus par optimisme que par totale certitude mais malgré tout sûr qu’au bout du compte, Leilani ne souhaiterait jamais rien de mauvais à la blonde peu importe ma manière dont les choses avaient évolué. Donnant enfin sa chance au gâteau préparé par Joanne d’être mangé, il avait néanmoins fallu compter avec la frimousse espiègle de Daniel et sa certitude d’avoir accompli lui-même le gros du travail, arrachant à sa mère un rire léger tandis qu’il se fendait encore d’un « T'as vu Maman, je cuisine bien comme toi et Papa ! » Tiré du sommeil par le brin de chahut que provoquaient les trois autres occupants de la pièce, le bébé avait réclamé l’attention de sa mère alors que cette dernière coupait de nouvelles parts de dessert, et la récupérant dans son transat la blonde avait pris Hassan au dépourvu en proposant « Est-ce que tu veux la prendre un petit peu ? » Bafouillant avec incertitude, peu convaincu que l’idée soit judicieuse mais n’osant pas prendre le risque de vexer Joanne, il avait fini par accepter « Oh, heu, oui, je … oui, pourquoi pas. » et s’était retrouvé la seconde suivante avec la petite dans les bras et l’impression de ne pas avoir fait cela depuis une éternité. Reda n’était pourtant pas bien vieux, et la période où le plus jeune des neveux d’Hassan était encore un nouveau-né n’était pas si lointaine. « Tu sais, je suis contente que Rhett et toi soyez toujours amis. » avait finalement confié Joanne, revenant au sujet précédent alors qu’Hassan adressait un sourire prudent au regard ensommeillé du bébé. « Enfin, je veux dire, même s'il était parti pendant un certain temps, vous envisagiez toujours de faire un voyage pour revoir Leilani, par exemple. » Relevant les yeux vers la blonde, il l’avait laissée terminer « J'ai fait l'erreur de couper les ponts avec lui, mais je suis contente que nous ayons pu en discuter et renouer. Il m'avait beaucoup manqué. » et lui avait automatiquement rendu le sourire qu’elle lui avait offert avec bienveillance. « Je suis content pour vous aussi. » Marquant une pause, comme s’il cherchait ses mots, il avait repris « Ça n’a pas été facile pour lui non plus … Quand il est rentré d’Europe. » La période avait été trouble pour tous les trois en fin de compte, chacun pour ses propres raisons. « C’est bien qu’il sache qu’il n’est pas seul maintenant qu’il est ici. Qu’il peut encore compter sur nous. » Rhett en parlait peu, mais Hassan savait qu’une partie des relations acquises du temps de sa carrière sportive s’étaient envolées à l’instant où la dite carrière avait brutalement pris fin. La rançon de la gloire dans ce qu’elle avait de plus cruel, sans doute. « Vous arrivez à vous voir assez souvent, non ? Entre deux cours ou deux entraînements. » Chacun avait bien sûr ses obligations personnelles, mais le fait de travailler au même endroit et de fréquenter le même cercle permettait en effet aux deux hommes de se voir régulièrement, aussi l’enseignant avait-il acquiescé à la question de Joanne. « On essaye, oui … C’est presque comme au bon vieux temps. » Mais il manquait une pièce du puzzle, et au regard que les deux anciens époux avaient échangé tous les deux avaient pensé à la même chose et vu le visage de la grande absente s’afficher dans leur esprit. Avec d’autant plus de clarté qu’au jeu de la réapparition surprise dont Sophia l’avait gratifié voilà quelques temps, le brun savait que Joanne avait reçu sa visite elle aussi. Que ni l’un ni l’autre n’avaient évoqué le sujet jusqu’à présent témoignait de l’incertitude que leur inspirait ce retour, conjugué à la naissance de Louise et au fait que Joanne avait eu d’autres choses à penser, depuis. Les deux jeunes femmes s’étaient-elles revues depuis que la rousse était venue tisser sa toile jusqu’à son bureau ? Hassan se l’était déjà demandé, et peut-être parce que l’occasion ne se représenterait pas aussi simplement il avait osé reprendre la parole. « Elle est passée à mon bureau. Sophia. » Ne sachant pas comment interpréter le regard que lui avait lancé Joanne, il avait repris « Y’a quelques semaines. Elle m’a dit qu’elle était venue te voir aussi, avant … Enfin, elle me l’a sous-entendu plutôt que réellement dit. » En réalité toute sa conversation avec Sophia lui avait semblé être un immense sous-entendu, avec le recul. Un amas de politesses et de maladresses dans lequel ni l’un ni l’autre n’avait véritablement eu l’occasion de dire le fond de sa pensée, de peur d’écorner une relation qui appartenait pourtant sans doute au passé désormais. La rousse n’avait pas gardé son numéro, et Hassan savait que s’il souhaitait la revoir la balle serait forcément dans son camp, mais jusqu’à présent il n’avait pas osé … À quoi bon, après tout ? Qu’avaient-ils encore à se dire, désormais ? Sophia était pleine d’une rancœur qu’il n’avait pas eu le cran de tenter de désamorcer, certain de se dresser face à une situation probablement désespérée – la vérité c’est qu’il avait préféré se préserver d’une déception supplémentaire. « Je ne sais pas trop ce qu’elle attendait de ma part. » Il y avait vu une occasion de s’excuser enfin des mots violents qu’il avait eus à son égard la dernière fois qu’ils s’étaient vus ; Et il avait eu l’occasion de se rendre compte depuis que contrairement à ce qu’il s’était longtemps imaginé, cela ne l’avait pas fait se sentir mieux. Quant à Sophia elle prétendait ne pas être venue là pour ça, mais n’avait pas pour autant donné de véritable motif à sa visite.
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| | | | (#)Ven 28 Fév 2020, 13:31 | |
| WAIT FOR SOMETHING BETTER you gotta be stronger than the story, don't let it blind you | |
Joanne avait toujours su qu'Hassan avait un certain succès auprès de la gente féminine depuis qu'ils se connaissaient. Et surtout, qu'ils n'avaient pas la même vision des rapports intimes. Trop ancrée dans le traditionalisme largement instauré par son père, il y avait certains concepts qui la dépassaient totalement. La gêne d'Hassan quand elle lui demanda s'il était le compagnon de Gwen lui laissait comprendre que ce n'était pas une relation amoureuse comme elle l'entendait elle. Et, ignorant pourquoi, cela lui provoquait un petit pincement au coeur. Néanmoins, elle était heureuse qu'il s'y soit retrouvé de ce côté-là. Elle l'avait suffisamment blessé pour qu'il soit totalement vacciné des relations de couple et qu'il ne cherchait même plus quoi que ce soit dans cet aspect là de sa vie. Curieuse, elle aurait peut-être tenté d'en savoir plus si Daniel n'était pas venu interrompre leur conversation. S'en suivit une discussion centré sur le petit et sa croissance dont Joanne s'émerveillait au quotidien. Des petits exploits qu'elle trouvait immenses, ces petites choses qui le faisaient grandir si vite tout d'un coup qu'elle ne voyait même plus le temps défiler. Cela était d'autant plus flagrant lorsqu'Hassan lui rappelait qu'une amie commune avait déjà une fille aînée d'une dizaine d'années et qu'il aurait peut-être l'occasion de la voir avec Rhett d'ici peu. Projet de voyage que Joanne ne pouvait qu'encourager, en souvenir du bon vieux temps et surtout qu'elle avait toujours adoré et admiré l'amitié solide qu'il y avait entre Rhett et Hassan. Joanne proposait à son ex-mari de porter sa fille, mais après avoir bafouillé avant d'accepter de la prendre, il fut d'abord un tout petit peu nerveux. Elle avait l'impression que cette gêne s'envola très rapidement et qu'il gardait précieusement Louise dans ses bras comme s'il avait toujours su le faire. Il devait avoir l'habitude, avec ses neveux et nièces, et peut-être d'autres proches qu'il avait et qui avaient des enfants. En tout cas, Joanne fut attendrie par cette vision. Elle se confiait ensuite sur le soulagement ressenti depuis qu'elle avait renoué avec son meilleur ami. Comme s'ils ne s'étaient que quittés la veille, préférant tous les deux occulter les raisons et la période durant laquelle ils ne s'étaient plus parlés. "Je pense que ce n'est toujours pas facile pour lui." Elle ignorait dans quel état il était exactement depuis son retour, il avait beau continuer à jouer les charmeurs et à minimiser les faits en espérant berner la petite blonde, mais elle-ci le connaissait bien trop pour savoir qu'il cachait quelque chose. "Je vois bien qu'il y a des moments où il souffre vraiment." Et il devait en avoir d'autres où il devait songer à Sophia, à leur relation. "Mais tu as raison, je pense que ça doit lui faire du bien." approuva-t-elle avec un signe de tête. "Ca fait trop protecteur si je dis que ça me rassure de l'avoir près de moi ? Je veux dire... Que s'il y a quoi que ce soit, je sais que je pourrais faire quelque chose pour l'aider. Bien plus que s'il était resté en Europe." dit-elle, se sentant maladroite dans ses paroles et espérant qu'Hassan comprenne tout de même ce qu'elle voulait dire. Ni Hassan, ni Rhett ne méritaient ce qu'ils leur étaient arrivés. Une pensée dont Joanne n'arrivait pas à se débarrasser et qui la rongeait quand elle y songeait. "Presque." répéta-t-elle avec un sourire triste, sachant très bien à qui il faisait référence par ce simple mot. Encore une fois, elle sentait son coeur se serrer. La dernière discussion avec Sophia était loin d'être présente. Du moins, elle ne pensait pas que ça pouvait être encore plus pire que ça ne l'était déjà. Pensive, elle baissa les yeux quelques secondes. Elle les relevait dès lors qu'Hassan lui racontait brièvement que Sophia était venue à sa rencontre. Il semblait être plus confus par autre chose par cette discussion. "Je ne sais pas trop ce qu'elle attendait de son retour à Brisbane tout court." résuma-t-elle en jouant nerveusement des doigts. "Qu'est-ce que vous vous êtes dits ?" lui demanda-t-elle, afin de savoir si sa rencontre s'était tout aussi mal passée que la sienne. Joanne s'éclaircit la gorge avant de raconter sa propre expérience. "Nous avons pris le temps de parler... Deux fois. Avant l'accouchement et... Après que Louise soit née, je l'avais invité à venir à la maison." commença-t-elle. "J'avais... vraiment l'espoir qu'après des explications, nous puissions mettre notre passif de côté et reprendre là où ça en était. Il n'y a eu aucun problème avec Rhett, toi et moi, nous y sommes parvenus aussi. Mais avec Sophia, tout a tourné au vinaigre et je ne pouvais plus rien faire. C'est arrivé si vite." De toutes ses amitiés, jamais n'aurait-elle songé un seul jour que la plus difficile à retrouver serait celle de la belle rousse. Joanne passait en revue toute le défilé de la conversation. "Je crois que j'ai fait une bêtise." lui dit-elle d'un air sincèrement navré. Nerveuse, elle marquait une pause avant de reprendre la parole. "J'ignorais qu'elle ne savait pas po ur ton cancer." Elle pinçait ses lèvres. Elle avait peur qu'Hassan ne lui en veuille. "Je lui expliquais que les choses n'avaient pas été faciles pour toi depuis que tu t'en es remis et que c'est en partie ma faute. Mais que je voulais vraiment être là pour toi, pour Rhett. Et c'est là qu'elle m'a questionnée, dès que j'a dit que tu avais été malade, elle voulait en savoir plus." La blonde sentait son coeur s'accélérer, craignant tellement qu'il ne lui en veuille. "Je lui ai raconté ce que je savais." Parce qu'elle se doutait bien qu'Hassan avait du lui épargner de très nombreux détails pour des raisons qui lui étaient propres. "Je suis désolée d'avoir vendu la mèche, Hassan." dit-elle d'un air paniqué. "Et... J'ai pris ta défense, du mieux que j'ai pu. Mais à ses yeux, ça n'était tout de même pas une raison valable pour divorcer. Elle a utilisé les pires mots pour décrire ta démarche et j'ai été vraiment attristée de voir qu'elle ne l'approuvait vraiment pas et que... Pour elle, je me suis juste faite facilement berner par tes paroles. Et de la manière dont elle disait les choses, elle trouvait même stupide d'à quel point je me sentais coupable de ne rien avoir vu, quand tu es tombé malade." Les lèvres pincées, les yeux soudainement bien humides, Joanne baissa à nouveau la tête. "Notre discussion s'est assez mal terminée et... Nous ne nous sommes plus revues depuis." Et Joanne en était peinée, vraiment. "Ca sera vraiment de ma faute cette fois-ci si elle est encore plus en colère contre toi. Je suis désolée..." répéta-t-elle la gorge serrée. Elle était extrêmement reconnaissante de pouvoir dire qu'elle avait à nouveau Hassan et Rhett dans sa vie, elle les aimait tellement. Mais avoir l'impression d'avoir perdu celle qui fut l'une de ses meilleurs amis était un coup dur dont elle peinait à se remettre.
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| | | | (#)Dim 29 Mar 2020, 22:56 | |
| Le premier bébé auquel Hassan avait été confronté, il s’en souvenait à la fois de façon incertaine et avec pourtant quelques flashs d’une infinie précision. Il ne se souvenait pas vraiment de ce jour-là mais il se rappelait de la manière dont son père l’avait attrapé sous les bras pour le hisser plus haut que les barreaux du berceau, et lui permettre d’y déposer la souris en peluche choisie quelques jours plus tôt avec l’aide de sa mère, tandis que Yasmine dormait à poings fermés en digérant son biberon de onze heures. Il se souvenait de l’avoir trouvée minuscule, d’avoir pensé que les bébés avaient une drôle d’odeur, et d’avoir boudé – un peu – lorsque sa mère avait reposé la peluche initialement choisie, un dragon vert et mauve, pour lui suggérer quelque chose de plus inoffensif. Une souris, donc. Il se souvenait d’avoir été un peu jaloux lorsqu’au réveil du nouveau-né Qasim avait obtenu le droit de la porter un peu, quand lui avait été jugé trop petit pour une telle responsabilité, mais il se souvenait aussi d’avoir été fier comme un coq lorsqu’il avait déposé un baiser sur le crâne chevelu de la petite fille au moment de quitter les Khadji, et qu’il avait reçu en réponse un bref gazouillis. Un gazouillis dans le genre de celui qui venait d’échapper à Louise lorsqu’il avait caressé la pointe de son nez du bout du doigt et qu’elle avait tenté d’attraper les bracelets brésiliens qu’il commençait à avoir en collection autour du poignet. Des cadeaux de petites mains du service pédiatrique, qu’il conservait jusqu’à ce que l’usure ne les fasse tomber d’eux-mêmes. « Je pense que ce n'est toujours pas facile pour lui. Je vois bien qu'il y a des moments où il souffre vraiment. » avait de son côté renchéri Joanne, lorsqu’il avait mentionné la période sombre ayant suivi le retour de Rhett au pays. « Mais tu as raison, je pense que ça doit lui faire du bien. » Cela ne les rendait pas moins impuissants face à certaines choses, et Hassan s’en frustrait assurément autant qu’elle, mais ils faisaient de leur mieux. « Ça fait trop protecteur si je dis que ça me rassure de l'avoir près de moi ? Je veux dire ... Que s'il y a quoi que ce soit, je sais que je pourrais faire quelque chose pour l'aider. Bien plus que s'il était resté en Europe. » Offrant un sourire bienveillant à la blonde, il avait secoué la tête pour l’assurer du contraire. « Non, je comprends ce que tu veux dire. Moi aussi j’aurais préféré que tout roule pour lui et qu’il puisse continuer sa vie en Europe, mais … Quitte à ce que ça ne soit pas le cas, je préfère le savoir ici. » Il préférait le savoir à proximité de gens qui seraient là en cas de coup dur, des gens comme son frère, comme Joanne, comme lui … Des gens qui n’avaient pas attendu sa célébrité pour voir la personne qu’il était. Des gens dont Sophia aurait pu faire partie si les choses s’étaient passées autrement, si la fatalité et les mauvais choix ne les avaient pas frappés eux aussi, et si en de rares instants la situation donnait l’impression faussée d’être revenue à son point de départ, le « Presque. » pointé par Hassan et répété par Joanne était un grain de sable supplémentaire empêchant la machine de tourner comme elle l’avait fait durant des années, quand ils allaient aussi bien par deux que par quatre. L’hésitation durant juste le temps d’un nouveau regard accordé au bébé, qui s’étant lassé de ses bracelets retombait dans un demi-sommeil, le brun avait fini par pousser pour de bon la porte entrouverte par ce sous-entendu sur l’absence de Sophia. Elle était venue le voir, il n’avait aucun intérêt à le cacher, d’autant plus qu’il savait n’avoir été que son second arrêt après un premier consacré sans surprise à celle qui avait été son amie et sa confidente durant plus d’une décennie. « Je ne sais pas trop ce qu'elle attendait de son retour à Brisbane tout court. » avait à ce sujet admis Joanne en baissant les yeux, l’air un peu las. « Qu'est-ce que vous vous êtes dits ? » Haussant les épaules, il avait pris conscience de la vacuité de la conversation qu’il avait partagée avec la rousse en réalisant qu’il ne savait même pas quoi en dire. « Des banalités. Comme si … Je sais pas. Comme si elle était venue pour me dire quelque chose de précis, et qu’elle avait changé d’avis au dernier moment, tu vois ? » Pas même le témoin d’une obligation qu’aurait ressentie la jeune femme à lui rendre visite pour s’assurer le bon œil de Joanne, puisqu’il avait rapidement compris lors de leur échange que la blonde n’avait pas mentionné les chemins sinueux qu’avaient empruntés leur relation après l’éternité de leur divorce. « Nous avons pris le temps de parler ... Deux fois. Avant l'accouchement et ... Après que Louise soit née, je l'avais invité à venir à la maison. » lui avait alors expliqué la blonde, Hassan comprenant alors du même coup que Sophia avait revu Joanne une seconde fois après leur entrevue, et qu’elle n’avait pas jugé utile de se vanter d’être allée voir du côté du reste de ses anciens amis. « J'avais ... vraiment l'espoir qu'après des explications, nous puissions mettre notre passif de côté et reprendre là où ça en était. Il n'y a eu aucun problème avec Rhett, toi et moi, nous y sommes parvenus aussi. Mais avec Sophia, tout a tourné au vinaigre et je ne pouvais plus rien faire. C'est arrivé si vite. » Fronçant les sourcils, il l’avait interrompue pour questionner « Tourné au vinaigre, comment ça ? » car si Sophia ne lui avait pas semblée empreinte d’une quelconque volonté de raccommoder quoi que ce soit avec lui, Hassan avait pourtant cru déceler une volonté timide de faire amende honorable auprès de Joanne … À moins qu’il ne se soit trompé ? Nerveuse, Joanne avait repris « Je crois que j'ai fait une bêtise. » Pour seule réponse, il l’avait interrogée du regard et laissée continuer. « J'ignorais qu'elle ne savait pas pour ton cancer. Je lui expliquais que les choses n'avaient pas été faciles pour toi depuis que tu t'en es remis et que c'est en partie ma faute. Mais que je voulais vraiment être là pour toi, pour Rhett. Et c'est là qu'elle m'a questionnée, dès que j'ai dit que tu avais été malade, elle voulait en savoir plus. » Son débit de parole augmentant à mesure que les mots lui échappaient, la blonde se laissait gagner par un brin de panique, reprenant « Je lui ai raconté ce que je savais. Je suis désolée d'avoir vendu la mèche, Hassan. Et ... J'ai pris ta défense, du mieux que j'ai pu. Mais à ses yeux, ça n'était tout de même pas une raison valable pour divorcer. Elle a utilisé les pires mots pour décrire ta démarche et j'ai été vraiment attristée de voir qu'elle ne l'approuvait vraiment pas et que ... Pour elle, je me suis juste fait facilement berner par tes paroles. Et de la manière dont elle disait les choses, elle trouvait même stupide d'à quel point je me sentais coupable de ne rien avoir vu, quand tu es tombé malade. » d’une voix tremblante et ses yeux s’embuant sans qu’elle ne semble pouvoir s’en empêcher. « Notre discussion s'est assez mal terminée et ... Nous ne nous sommes plus revues depuis. Ça sera vraiment de ma faute cette fois-ci si elle est encore plus en colère contre toi. Je suis désolée ... » S’il se sentait blessé par les propos qu’auraient tenu Sophia et que Joanne venait de lui rapporter, le brun avait tâché de ne rien en laisser paraître. Et plus que la peine c’était la colère de savoir que Sophia s’était servie de la blonde pour passer ses nerfs plutôt que de venir régler ses comptes avec lui, qui avait pris le pas sur le reste. « T’as pas à être désolée. » avait-il en tout cas assuré, attendant qu’elle relève les yeux vers lui pour continuer. « Ça a cessé d’être un secret pour qui que ce soit à la seconde où ça n’en a plus été un pour toi … Et très sincèrement, ce que Sophia en pense, je m’en fiche. À elle ne j’ai pas de comptes à rendre, encore moins maintenant. » Comment pouvait-elle seulement avoir l’audace de juger, de remettre en question le bien fondé de ses choix quand elle-même avait disparu du jour au lendemain de la vie de Joanne sans la moindre explication ? « Je suis désolé que les choses ne se soient pas passées comme tu l’espérais entre elle et toi. » avait-il néanmoins admis avec un fond de vérité. Lui avait fait le deuil de son amitié avec Sophia voilà longtemps, mais sans doute n’en était-il pas de même pour la blonde. « Et ça me touche, que tu aies pris ma défense … T’étais pas obligée. » Parce que le point de vue de la rousse se défendait, sans doute. Rhett était du même avis, il avait simplement mieux su choisir ses mots pour le faire savoir, et pour un tas de raisons Hassan n’avait jamais cherché à lui faire changer de point de vue. Lui savait, il connaissait ses propres raisons, et en dépit de tout ce qui en avait découlé s’il fallait refaire les choses il les referait à l’identique, au moins concernant cette période de sa vie. « Tu penses que vous allez vous revoir ? » Était-ce prévu ? En avait-elle seulement envie ? Le bras sur lequel reposait Louise commençant à s'engourdir, il avait accueilli avec un brin de soulagement ce nouveau réveil express, et profité de l’occasion pour faire signe à sa mère de la récupérer – non sans avoir pris quelques instants, d’abord, pour lui faire risette d’un air attendri. « Tiens, je pense qu’il est temps qu’elle retrouve les bras de Maman. » Profitant d’avoir de nouveau ses deux mains libres pour récupérer sa tasse de thé sur le bord de la table, il en avait pris quelques gorgées lorsque son téléphone avait vibré dans la poche de son jean pour l’avertir d’un SMS. Gwen quittait le stade d’athlétisme et prévoyait d’être chez elle d’ici une petite demi-heure, de quoi laisser à Hassan le temps de prendre gentiment congé puis de regagner à pieds la maison de sa belle. « Je ne vais pas tarder à y aller. » avait-il alors annoncé d’un ton léger, adressant à Joanne un sourire en relevant les yeux vers elle après avoir pianoté une réponse à Gwen. « Ça m’a fait plaisir de te voir. Et de rencontrer cette demoiselle. » Terminant ce qu’il restait de sa tasse de thé, il avait intercepté le regard que Daniel avait relevé vers lui et ajouté « Et de revoir ce jeune homme, évidemment. » avec bienveillance. L’attention retournant néanmoins à la mère de famille, il avait repris « Je ne sais pas si on aura le temps ou l’occasion de se revoir avant que tu reprennes le boulot, mais on s’appelle, de toute façon ? » Il se promettait de le faire au moins une fois ou deux pour prendre de ses nouvelles, en tout cas, plus à l’aise avec cette idée qu’avec celle de repasser ici et de risquer croiser l’homme qui partageait sa vie. « Et promets-moi que tu ne te rendras pas malade pour Sophia, d’accord … ? » C’était sans doute peine perdue, Hassan la connaissait suffisamment pour savoir qu’elle ne serait pas capable de passer outre, car Joanne était comme ça : elle ressassait, plus qu’elle ne devrait, plus que Sophia ne le méritait. Elle ne l’écouterait pas et malgré tout il se sentait obligé d’essayer, au cas où, par excès d’optimisme peut-être.
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| | | | (#)Mer 08 Avr 2020, 14:51 | |
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Veiller sur ses proches était un devoir que Joanne s'attribuer d'office. Ils savaient qu'elle avait la fâcheuse tendance à ce qu'elle les fasse passer bien avant sa propre santé tant elle leur était dévouée. Et malgré la distance qu'elle avait établie entre Rhett et elle suite au divorce, le jour où elle avait appris pour son accident et la fin de sa carrière prometteuse, elle en était profondément attristée et s'en était voulue de ne rien avoir pu faire pour lui. Elle était heureuse de savoir que leur amitié n'avait finalement été que mise en suspend et qu'ils la reprenaient comme si de rien n'était. Ses yeux bleus restaient plongés dans ceux de son ex-mari, lorsque celui-ci comprenait tout à fait ce qu'elle voulait dire. A le regarder lui et songer à Rhett lui faisait ressentir un profond sentiment d'injustice dont elle ne parvenait définitivement pas à se défaire. Si on lui avait laissé le choix, elle aurait préféré encaisser à elle seule le cancer d'Hassan et l'accident de Rhett si cela permettait de les épargner. Elle n'avait pas vraiment leur même santé de fer, mais elle aurait fait avec. Elle gardait cette pensée pour elle, même si Hassan devait se douter qu'elle puisse se faire ce genre de réflexions et qu'elle le pensait vraiment. Alors qu'ils discutaient de leurs amis communs, le sujet glissa doucement vers celui de Sophia. Rien que de songer à elle, Joanne en avait le coeur pincé, ayant toujours bien du mal à digérer sa dernière conversation avec elle. Hassan ne semblait pas avoir été épargné non plus, mais il s'avérait que leur échange fut malgré tout plus doux que celui entre les deux jeunes femmes. "Elle qui a pourtant l'habitude de dire ce qu'elle pense, c'est étrange si elle a fini par garder quelque chose pour elle." nota-t-elle, l'air perplexe. Etrange qu'elle se soit rabattue sur des banalités, surtout avec Hassan. Celui-ci se montrait à son tour curieux des échanges entre la rousse et son ex-femme. Joanne en était encore chamboulée. Jamais ne se serait-elle attendue à ce qu'elles tombent aussi bas dans leur relation. Leur vision des choses avait toujours été différente, et elles étaient complémentaires. Cette belle dynamique semblait s'être évaporer face à la vivacité et l'amertume de leurs échanges. Hassan n'allait pas tarder à en apprendre bien plus, voyant devant lui Joanne se décomposer à l'idée d'avoir révélé son cancer sans son approbation. La réaction de Sophia n'en était que plus difficile à supporter. La rousse avait été bien incapable de se mettre à la place de son ancienne amie et elle semblait être totalement exaspérée par le romantisme dont elle s'était toujours bercée. Sophia avait refusé d'entendre raison aux arguments de Joanne, et à ceux d'Hassan, trouvant le tout au contraire d'une profonde stupidité. La jeune femme se fondait en excuses auprès de son ex-mari, légèrement essoufflée par la tirade d'explications qu'elle venait de lui donner. Hassan cherchait à la rassurer comme il le pouvait, attendant qu'il puisse à nouveau voir ses iris bleus pour poursuivre son discours. En prenant une profonde inspiration, une larme s'échapper et fut essuyée par un geste vif de la main. Depuis que Joanne était informée des raisons de leur divorce, Hassan estimait qu'il n'avait plus à le cacher à qui que ce soit. Elle peinait à se l'expliquer, mais elle était touchée par ses paroles. Elle devinait cependant qu'il n'était pas prêt à se réconcilier avec la rousse de si tôt, certainement bien plus contrarié après avoir entendu ce qu'il s'était passé entre Sophia et Joanne. "Je ne sais plus vraiment quoi espérer, entre elle et moi." dit-elle d'un air profondément triste. "Je pensais vraiment que nous étions capables de passer au-dessus de tout ça." Elle avait pu le faire avec Hassan, elle avait pu le faire avec Rhett. "J'avais tort." Et il était difficile pour elle de s'y résoudre. "Je ne me voyais la laisser parler sans rien dire. C'était injuste, qu'elle se montre aussi virulente à ton égard." répondit-elle lorsqu'il la remerciait d'avoir pris sa défense. "Je l'ignore." Joanne ne se voyait pas écrire à Sophia comme si de rien n'était, ni de venir vers elle après un tel échange. Il lui était difficile d'envisager quoi que ce soit de ce côté-là. "Si c'est pour que ce soit comme ça à chaque fois..." Joanne vivait avec suffisamment de culpabilité et de remords pour alourdir le tour avec une amitié qui semblait ne plus tenir qu'à un fil.
Après un dernier regard affectueux envers Louise, Hassan finit par la rendre à sa mère alors que la petite se réveiller en étirant ses petits doigts habituellement fermés en poings. Le nourrisson se blottit tout contre elle, lâchant un soupir d'aise. Elle prenait le temps d'émerger en bonne et due forme. Les mains à nouveau libres, Hassan en profitait pour pour répondre à un message, tout en précisant qu'il n'allait pas tarder à partir. "Je suis contente que tu aies pu venir." lui répondit-elle avec un sourire sincère. Elle acquiesça d'un signe de tête lorsqu'il lui proposait de s'appeler d'ici à ce que leur chemin se recroise à l'université. Elle se doutait qu'il préfère éviter de tomber sur Jamie lors de l'un de ses passages. En revanche, elle ne se sentait pas capable de tenir la promesse que son ex-mari lui demandait de faire. "Je ne peux rien te garantir, mais je peux au moins essayer." dit-elle avec un sourire triste. Joanne finit par se lever afin d'accompagner Hassan jusqu'à la porte d'entrée. Elle déposait d'abord Louise dans son transat tout en l'embrassant sur le front avant de rejoindre le brun d'un pas hâtif. "Merci d'être venu." lui souffla-t-elle, le regard reconnaissant. A dire vrai, cela lui avait fait un bien fou de pouvoir se confier sur son altercation avec Sophia, savoir qu'ils étaient sur la même longueur d'ondes concernant Rhett. Il avait pu voir Louise pour la première fois et voir combien Daniel grandissait et évoluait. Une rencontre des plus fructueuses et agréables à ses yeux. "Prends soin de toi." souffla-t-elle avant de déposer un baiser timide sur sa joue. En le voyant s'éloigner, la dernière impression qui lui traversait l'esprit était l'étrangeté que de savoir qu'il fréquentait quelqu'un. Bien sûr qu'elle était heureuse pour lui qu'il soit parvenu à évoluer de ce côté-là. Mais ça restait étrange, et elle ne saurait expliquer pourquoi.
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| | | | | | | | joassan + wait for something better |
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